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965. (1889) Écrivains francisés. Dickens, Heine, Tourguénef, Poe, Dostoïewski, Tolstoï « Le Comte Léon Tolstoï »

D’autres avant lui ont tracé, d’un coup, des profils et des tableaux également saisissants ; il n’est unique qu’en sa manière de montrer des vies entières, de décrire peu à peu par une lente accumulation de scènes, de récits et d’indications, toute l’évolution vitale, en ses variations, ses écarts et sa particularité permanente d’un être conduit d’un bout à un autre d’une partie ou du tout de sa carrière. […] La démonstration par situations, actes et paroles des dramaturges, les monologues à la Stendhal, l’intervention personnelle et discursive à la façon des romanciers idéalistes, tout lui est bon pour vivifier entières les créatures ainsi déduites. […] Les œuvres de Tolstoï tendent à représenter une société entière ; ils en embrassent et le contenu moyen et les extrêmes de conditions, d’événements, de caractères, de scènes, d’âge ; ils la reproduisent non de haut, de loin, vaguement, par synthèses et abstractions, mais de près, par des descriptions où le lecteur se sent comme mis face à face avec la réalité, par des personnages étrangement vivants et individuels. […] La joie, l’ambition, le ressaisissement ; il se mêle aux affaires publiques, s’éprend, est trahi, retourne à la guerre et, mortellement atteint sur un champ de bataille, s’abandonne tout entier, au seuil de l’ombre, à cette méditation muette de la mort, cette contemplation ravie de l’inconnaissable où ne le touchent plus les caresses de son fils et de son amante. […] Il fut à l’origine celui qui, doué d’une merveilleuse faculté de percevoir et de se rappeler, connut les mille aspects de la nature, les innombrables et particulières manifestations humaines ; qui sut deviner, par on ne sait quelle intuition de soi-même et des autres, les âmes et les agitations d’âmes doutées dehors sont les signes ; embrassant dans son large esprit tout l’individuel des personnes, et ce qu’elles ont d’universel, les lois déliées, les indices délicats de leur permanence, de leur variabilité, de leur mobilité ; il conçut encore, le premier à ce degré, toute retendue presque du monde et de notre espèce, contempla cet immense spectacle de ses yeux novateurs et, le reproduisant entier, sut tacitement s’y enclore avec tous en des livres auxquels personne ne peut se prétendre étranger ; et comme l’essentiel de l’artiste est de connaître les choses et les gens, non pas objectivement et intellectuellement, mais sous leur aspect sensible, en la boulé de ses personnages, en leur âme aimante, en leur noblesse morale, en leur méditation douloureuse de la mort, et leur résignation à d’humbles solutions, ce sont ses vertus, ses angoisses et sa simplicité d’esprit qui transparaissent, comme s’accuse en leur impuissance spéculative la sienne propre, comme se marque sa répulsion pour le mal dans le rôle effacé qu’il lui assigne, et son détachement final de tout l’ensemble de la vie et du monde, dans le ton lointain et las dont il en parle.

966. (1767) Salon de 1767 « Peintures — La Grenée » pp. 90-121

Oh toujours très beau : les étoffes ici sont même plus rompues, moins entières que dans ses autres compositions. […] Fais cependant, ô Vénus, que les fureurs de la guerre cessent sur les terres, sur les mers, sur l’univers entier ; car c’est toi seule qui peux donner la paix aux mortels ; car c’est sur ton sein que le terrible dieu des batailles vient respirer de ses travaux ; c’est dans tes bras qu’il se rejette et qu’il est retenu par la blessure d’un trait éternel. […] Comptez bien, mon ami ; le Dauphin mourant ; Jupiter et Junon sur l’Ida ; la tête de Pompée présentée à Caesar ; les quatre états ; Mercure et Hersé ; Renaud et Armide ; Persée et Andromède ; le retour d’Ulysse et de Télémaque ; la baigneuse ; l’amour rémouleur ; la Suzanne ; le Joseph ; la poésie et la philosophie ; dix-sept tableaux ; en deux ans, sans compter ceux qui n’ont pas été exposés ; tandis que Greuze couve pendant des mois entiers la composition d’un seul, et met quelquefois un an à l’exécuter. […] Harmonie perdue, pour harmonie perdue, j’aimerois mieux que l’effet le plus violent du tems tombât sur les étoffes, et que leur entière destruction fît valoir les chairs et les autres parties essentielles, qui en reprendroient par comparaison une sorte de vie. […] L’appellerons-nous la routine de bien faire des piés et des mains, une bouche, un nez, un visage, une figure entière, même de faire sortir cette figure de la toile ?

967. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « XVIII. J.-M. Audin. Œuvres complètes : Vies de Luther, de Calvin, de Léon X, d’Henri VIII, etc. » pp. 369-425

Mais l’ouvrage capital de cette période fut un livre d’histoire et sur le sujet le plus magnifique qui pût s’offrir à l’intelligence et au génie historique d’un moderne, puisque le monde moderne tout entier est contenu, comme le sens de l’énigme sous sa lettre, dans ce redoutable sujet. […] Ils se soulevèrent, et ce ne fut pas seulement un peuple, mais ce fut la Tradition même du pays, ce fut l’histoire de France tout entière qui se souleva avec eux. […] On sent là-dedans, il est vrai, un tempérament littéraire ; mais, encore une fois, s’il a vie, il n’est pas en possession de son organisation tout entière. […] Mais Audin, lui, a voulu peindre Luther en entier. […] Ce grand travailleur creusait sous lui assez profondément le sol pour que le tour d’un siècle suffît au labeur entier de sa vie, quand même cette vie n’eût pas été si promptement interrompue par la mort.

968. (1889) Essai sur les données immédiates de la conscience « Chapitre II. De la multiplicité des états de conscience. L’idée de durée »

. — Pourtant on compte des sentiments, des sensations, des idées, toutes choses qui se pénètrent les unes les autres et qui, chacune de son côté, occupent l’âme tout entière ? […] D’autre part, on conçoit que les choses matérielles, extérieures les unes aux autres et extérieures à nous, empruntent ce double caractère à l’homogénéité d’un milieu qui établisse des intervalles entre elles et en fixe les contours : mais les faits de conscience, même successifs, se pénètrent, et dans le plus simple d’entre eux peut se réfléchir l’âme entière. […] Il n’a pas besoin, pour cela, de s’absorber tout entier dans la sensation ou l’idée qui passe, car alors, au contraire, il cesserait de durer. […] Nous voici donc en présence de l’ombre de nous-mêmes : nous croyons avoir analysé notre sentiment, nous lui avons substitué en réalité une juxtaposition d’états inertes, traduisibles en mots, et qui constituent chacun l’élément commun, le résidu par conséquent impersonnel, des impressions ressenties dans un cas donné par la société entière. […] Mais tandis que la cellule occupe un point déterminé de l’organisme, une idée vraiment nôtre remplit notre moi tout entier.

969. (1896) Matière et mémoire. Essai sur la relation du corps à l’esprit « Chapitre IV. De la délimitation, et de la fixation des images. Perception et matière. Âme et corps. »

Il y a des intervalles de silence entre les sons, car l’ouïe n’est pas toujours occupée ; entre les odeurs, entre les saveurs on trouve des vides, comme si l’odorat et le goût ne fonctionnaient qu’accidentellement : au contraire, dès que nous ouvrons les yeux, notre champ visuel tout entier se colore, et puisque les solides sont nécessairement contigus les uns aux autres, notre toucher doit suivre la superficie ou les arêtes des objets sans jamais rencontrer d’interruption véritable. […] Il entend par là que l’individualité de l’atome consiste dans le point mathématique où se croisent les lignes de force, indéfinies, rayonnant à travers l’espace, qui le constituent réellement : chaque atome occupe ainsi, pour employer ses expressions, « l’espace tout entier auquel la gravitation s’étend », et « tous les atomes se pénètrent les uns les autres 103 ». […] Et l’histoire tout entière ne tiendrait-elle pas en un temps très court pour une conscience plus tendue que la nôtre, qui assisterait au développement de l’humanité en le contractant, pour ainsi dire, dans les grandes phases de son évolution ? […] Nous l’avons déjà dit, mais nous ne saurions trop le répéter : nos théories de la perception sont tout entières viciées par cette idée que si un certain dispositif produit, à un moment donné, l’illusion d’une certaine perception, il a toujours pu suffire à produire cette perception même ; — comme Si le rôle de la mémoire n’était pas justement de faire survivre la complexité de l’effet à la simplification de la cause ! […] Mais si la divisibilité de la matière est tout entière relative à notre action sur elle, c’est-à-dire à notre faculté d’en modifier l’aspect, Si elle appartient, non à la matière même, mais à l’espace que nous tendons au-dessous de cette matière pour la faire tomber sous nos prises, alors la difficulté s’évanouit.

970. (1888) La vie littéraire. Première série pp. 1-363

Ce n’est pas seulement le Danemark, c’est le monde entier qui vous paraissait sombre. […] Elle le dévore tout entier. […] Mais son livre est jeté tout entier dans le moule du roman nouveau. […] Mais la source de son inspiration n’était pas tout entière dans l’étude du passé. […] Mais elle n’était pas de nature à se laisser ravir tout entière par l’illusion des arts.

971. (1892) La vie littéraire. Quatrième série pp. -362

Avec une entière bonhomie il saisissait les nuances les plus fines. […] Cette femme exprima dans sa solitude, avec une sincérité entière, son idée du monde et de la vie. […] Il ne voulait pas savoir le nom que Rome entière prononçait tout bas. […] Gaston Boissier des réflexions excellentes qu’il faut citer tout entières. […] Il lui fait trop d’honneur pour que je ne le cite pas tout entier.

972. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Eugène Gandar »

En admirant Virgile, il sait combien celui-ci, pour être tout entier lui-même, a dû se rapprocher de la Grèce, y vivre d’aussi près que possible, se tenir constamment en présence d’Homère. […] Ce sont des adieux que je vais faire au ciel d’Orient, et j’aspire à me renfermer comme vous dans l’horizon du ciel natal, dans le cercle étroit des affections domestiques et des petits devoirs de la vie de chaque jour. » J’ai dit qu’il préparait ses thèses : il avait choisi pour sujet de sa thèse française Ronsard d’abord ; mais bientôt le Ronsard tout entier l’avait effrayé ou rebuté, et il s’était restreint à suivre de près « l’imitation d’Homère et de Pindare » dans le vieux poète. […] Le plan de mes leçons est plus simple, mes analyses sont plus rapides et plus vivantes, j’ai eu le courage de jeter toutes mes notes, afin de monter en chaire avec une entière liberté d’esprit et de regarder les gens en face, et il se trouve naturellement que je dis mieux ce que je veux dire et suis mieux compris. […] Jugez quelles difficultés on rencontre en un tel sujet lorsqu’on ne peut le traiter ni du point de vue très précis de la tradition, ni avec un entier dégagement, et qu’on éprouve sur tant de questions délicates où la conscience est engagée, une égale horreur pour l’hypocrisie et pour la légèreté. […] … » Je ne crains point, par toutes ces citations, d’appuyer sur ce cachet de patience, sur cette peine et ce labeur que cet estimable esprit s’imposait en toute chose : ç’a été son honneur, son originalité. — Il atteignait enfin au but de sa vie entière : unanimement désigné par la Faculté pour le titre de la chaire qu’il remplissait si bien depuis six ans, il allait être présenté, à l’unanimité aussi, par le Conseil académique.

973. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Malherbe »

Ronsard et son école paraissent : Renaissance ou réaction, c’est tout un ; nouveau recommencement à de nouveaux frais, entière rupture ; mépris absolu de l’école et de toutes les écoles qui ont précédé. […] Il ne put faire réussir son arbre tout entier, cet arbre qu’il plantait trop grand et trop tard, trop artificiel et trop factice. […] , et le poète nous apparaît enfin mûr, formé tout entier : il avait quarante-quatre ans. […] Et à travers une fidélité de sujet si absolue, si entière, son esprit gardait sa liberté et sa franchise. […] Roux-Alpheran, a été donnée en entier par M. de Chennevières (Caen, 1846).

974. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Mademoiselle Aïssé »

Nous donnerons donc ici la lettre entière, qui n’a été publiée qu’assez récemment ; elle ne porte avec elle aucune indication de date ni d’endroit. […] » — Sans donc nous étendre davantage ni anticiper sur les années moins brillantes, on saisit bien, ce me semble, la physionomie du chevalier à cet âge où il est donné de plaire : brave, loyal, plein d’honneur, homme d’épée sans se faire de la gloire une idole, homme de goût sans viser à l’esprit, cœur naturel, il était de ceux qui ne sont tout entiers eux-mêmes et qui ne trouvent toute leur ambition et tout leur prix que dans l’amour. […] sa douleur fut ce qu’on peut imaginer ; il se consacra tout entier à cette tendre mémoire et à la jeune enfant qui désormais la faisait revivre à ses yeux. […] Voici la lettre tout entière, et vraiment maternelle, du chevalier à Mme de Nanthia ; elle est inédite et nous a été communiquée par la famille de Bonneval : « Je souhaite, mon enfant, que vous soyez heureusement arrivée chez vous ; je crois que vous ferez prudemment de n’en plus bouger jusqu’à vos couches, et quoique le terme qu’il faudra prendre après pour vous bien rétablir doive vous paraître long, je vous conseille et vous prie, ma petite, de ne pas l’abréger. […] Faites-la-moi voir d’ici tout entière, s’il est possible : je ne veux point d’échantillon.

975. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre V. Les contemporains. — Chapitre I. Le Roman. Dickens. »

Dorénavant toutes ses pensées, tous ses dangers, le monde entier disparaît pour lui dans une seule question : quand trouveront-ils le cadavre dans le bois ? […] C’est bien pis lorsqu’elle fabrique le pudding ; il y a là une scène entière, dramatique et lyrique, avec exclamations, protase, péripéties, aussi complète qu’une tragédie grecque. […] Quand l’esprit, avec une attention profonde, pénètre les détails minutieux d’une image précise, la joie et la douleur le secouent tout entier. […] Pecksniff ne lâche pas comme Tartufe des phrases de théologie ; il s’épanche tout entier en tirades de philanthropie. […] Jusqu’ici tout était bien : la colonne de bronze était restée entière et invaincue ; mais les exigences de la morale publique pervertissent l’idée du livre.

976. (1889) L’art au point de vue sociologique « Chapitre sixième. Le roman psychologique et sociologique. »

Le roman embrasse la vie en son entier, la vie psychologique s’entend, laquelle se déroule avec plus ou moins de rapidité ; — il suit le développement d’un caractère, l’analyse, systématise les faits pour les ramener toujours à un fait central ; il représente la vie comme une gravitation autour d’actes et de sentiments essentiels, comme un système plus ou moins semblable aux systèmes astronomiques. […] De même que chaque fragment d’un miroir brisé peut encore réfléchir un visage, de même dans chaque action, fragment détaché d’une vie humaine, doit se peindre en raccourci un caractère tout entier. […] Désormais, par la force du sentiment qui l’anime, Werther ne peut plus rester dans l’inaction ; il lui faut agir, il ira à Charlotte et, repoussé, il accomplira enfin la grande action née de toute sa vie contemplative, et l’on peut dire que le roman dans son entier n’est que la préparation du coup de pistolet final55. […] Ce dernier est, comme on l’a mainte fois remarqué, merveilleux dans l’analyse psychologique ; mais sa psychologie porte tout entière sur les idées parfaitement conscientes de ses personnages, non sur les mobiles obscurs du sentiment. […] La science n’a d’autre but qu’elle-même ; rien n’existe pour elle en dehors du résultat obtenu, l’homme ne compte qu’entant que moyen, mis de côté dès qu’il cesse d’être utile : il ne ferait que retarder, embarrasser sa marche ; le roman au contraire, tout entier tourné vers l’homme, ne verra l’œuvre de l’homme qu’à travers ses efforts.

977. (1880) Goethe et Diderot « Gœthe »

Pour de la difficulté, si Gœthe, qui ne descend pas les montagnes russes, mais qui les grimpe, en éprouva, il la diminua aisément, ce monsieur Sans-Gêne littéraire, en copiant tout au long des pages entières de Beaumarchais et en les plaquant dans sa pièce, où elles détonnèrent cruellement sur le style déclamatoire et glacé du reste de l’ouvrage. […] il est tellement Indou, ce grand national de Germain, qu’à la page 335 de ses Mémoires il professe les belles choses que voici : « L’humanité tout entière est l’homme véritable, et pour être heureux et content l’homme n’a besoin que de se sentir dans l’ensemble… » Hé ! […] Tel qu’il est, pourtant, ce petit roman, qui, quand on le lit maintenant après des romans comme ceux de Balzac qui sont des mondes et des sociétés tout entières, paraît aussi fané, aussi pâli, aussi démodé que les rubans roses du corsage de Charlotte et que les culottes jaune serin de Werther, tel qu’il est, pourtant, c’est encore le meilleur des trois romans de Gœthe. […] Et revoilà Gœthe tout entier revenu, le vrai Gœthe, l’habile homme, le metteur éternel en œuvre et en scène, pour qui la vie a toujours été de se tirer d’affaire, et qui, parbleu ! […] Mais ce qui a fait encore plus de tort à la moralité qu’il avait peu qu’au génie qu’il n’avait pas, c’est le sérieux avec lequel le monde tout entier a toujours accueilli le Gœthe intégral, avec toutes les sottises de son esprit, toutes les prétentions de sa vanité, toutes les extravagances de sa fantaisie.

978. (1904) Essai sur le symbolisme pp. -

Disons mieux : celle-ci accuse une telle richesse, une telle fécondité, un tel devenir, que si notre être la contient tout entière en ses virtualités, notre conscience réfléchie n’en goûte jamais qu’une tranche, celle-là seule qui dans l’instant est assimilable. […] L’éternelle poursuite de la formule magique, de cette unité fondamentale, promesse d’explication universelle ; la fureur belle de substituer aux systèmes le Système, celui qui absorbera la nature entière, — affolent le cerveau des hommes en mal d’absolu et l’obligent à rajeunir sans fin ses méthodes d’investigation, à se tailler de nouveaux sentiers parmi la brousse des faits, à pousser avec délices des reconnaissances dans l’inconnu. […] Mon transport, je ne l’ai pas résumé en une formule, je n’ai pu faire bref, ni me crier tout entier en une définition, car toute définition se présente abstraite et incomplète ; alors vous m’auriez entendu, mais non senti. […] Le mode expressif du poète symboliste, dont la correspondance est entière, selon l’expression de M.  […] Le second principe de notre école tient tout entier dans la solution de cet énoncé : trouver un rythme adéquat à l’expression des processus psychiques de l’âme humaine.

979. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Appendice. — [Lamartine.] » pp. 534-535

Hugo, ne l’oublions pas, à cette date où déjà il se distinguait par ses merveilles juvéniles, n’avait pas cette entière originalité qu’il n’a déployée que depuis, et je ne crois pas que lui-même, dans sa générosité fraternelle, démentît cet avantage accordé à son aîné, le poète des Méditations.

980. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Troisième partie. Beaux-arts et littérature. — Livre premier. Beaux-arts. — Chapitre IV. Des Sujets de Tableaux. »

Tertullien a écrit un livre entier (de Pallio) sur ce sujet.

981. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Troisième partie. Beaux-arts et littérature. — Livre V. Harmonies de la religion chrétienne avec les scènes de la nature et les passions du cœur humain. — Chapitre III. Des Ruines en général. — Qu’il y en a de deux espèces. »

Il s’y joint, en outre, une idée qui console notre petitesse, en voyant que des peuples entiers, des hommes quelquefois si fameux, n’ont pu vivre cependant au-delà du peu de jours assignés à notre obscurité.

982. (1763) Salon de 1763 « Sculptures et gravures — Falconet » pp. 250-251

Le faire du groupe entier est admirable.

983. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Première partie — Section 19, de la galanterie qui est dans nos poëmes » pp. 143-146

Renaud amoureux malgré lui, et parce qu’il est subjugué par les enchantemens d’Armide, m’interesse vivement à sa situation : je suis même touché de sa passion quand il ouvre la scene en disant à sa maîtresse qui le quitte pour un moment : Armide vous m’allez quitter, et lorsqu’il ne lui replique, après qu’elle lui a dit le motif important qui l’oblige à s’éloigner de lui, que les mêmes paroles qu’il lui avoit déja dites : Armide vous m’allez quitter, Renaud me paroît alors un homme livré tout entier à l’amour.

984. (1870) De l’intelligence. Première partie : Les éléments de la connaissance « Livre quatrième. Les conditions physiques des événements moraux — Chapitre premier. Les fonctions des centres nerveux » pp. 239-315

« Je l’ai laissée jeûner à plusieurs reprises jusqu’à trois jours entiers, puis j’ai porté de la nourriture sous ses narines, j’ai enfoui son bec dans le grain, j’ai mis du grain dans le bout de son bec, j’ai plongé son bec dans l’eau, je l’ai placée sur un tas de blé. […] Enfin, dès qu’une perception revient, toutes reviennent, et, dès qu’une faculté reparaît, toutes reparaissent. » Une grenouille à qui l’on n’avait laissé qu’un fragment de ses lobes postérieurs, environ un huitième du cerveau tout entier, avait gardé l’attitude d’une grenouille saine. […] Cas analogue d’un enfant de quatre ans et demi dont une balle avait traversé les deux tempes, et qui vécut encore vingt-six jours, jouissant de tout l’ensemble de ses facultés intellectuelles, mémoire entière, jugement sain, caractère semblable à celui qu’il avait avant l’accident. […] On remarque cependant que la fonction s’épuise plus promptement que lorsque le cerveau est entier, ce qui montre que l’opération influe sur la quantité et non sur la qualité des manifestations de l’organe. […] Landry, Paralysies, 47. « On peut diviser la moelle perpendiculairement à son axe en deux, trois, quatre, ou en un plus grand nombre de segments, sans apporter de modification dans les phénomènes auxquels elle participe. — Chacune de ces parties, anatomiquement constituée comme l’organe entier, possède isolément les mêmes facultés.

985. (1889) L’art au point de vue sociologique « Chapitre huitième. L’introduction des idées philosophiques et sociales dans la poésie (suite). Victor Hugo »

Avec Hugo, la poésie devient vraiment sociale en ce qu’elle résume et reflète les pensées et sentiments d’une société tout entière, et sur toutes choses. […] La puissance même de son imagination le projette toujours hors de lui, dans le monde entier, et il en résulte une conséquence qu’on n’a pas assez remarquée : c’est que, par cela même qu’il est plus imaginatif, plus objectif, il est aussi au fond plus métaphysicien. […] Ce rayonnement éclaire à son tour la nature entière, lui donne un sens, un but, la rend belle et bonne, à la fois intelligible et aimable :                 … Comprendre, c’est aimer. […] Le monde entier est le lieu de la sanction, le monde-châtiment, domaine de la chute des âmes, où chaque être occupe la place que lui assigne son propre poids, plus haut ou plus bas, comme un corps plongé dans un fluide monte ou descend selon qu’il renferme plus de matière. […] Lisez la pièce des Contemplations qui a pour titre un simple point d’interrogation, et qui n’est tout entière qu’une grande antithèse :   ?

986. (1920) Action, n° 2, mars 1920

Du Monde Entier — Blaise Cendrars (Nouvelle Revue Française). — Blaise Cendrars est vraisemblablement un des « avenirs » de notre littérature. […] Qu’apporta leur mort, sinon la certitude de son entière inutilité ? […] Son geste typique, c’est de serrer sur son cœur l’humanité entière et les choses, c’est de consoler les déshérités de la vie et de leur montrer ce qu’il y a encore de beau malgré tout. […] Le mercredi 4 février, « Criton » (Maurras), dans sa « Revue de la presse » écrit, en réponse à l’article d’Albalat : « Il était donc permis de vivre trente années entières dans le voisinage de Moréas et de commettre des erreurs, involontaires du reste, mais de ce calibre ! […] En 1913, un numéro entier de Der Sturm lui est consacré.

987. (1911) Lyrisme, épopée, drame. Une loi de l’histoire littéraire expliquée par l’évolution générale « Chapitre II. Vérification de la loi par l’examen de la littérature française » pp. 34-154

Psychologie morbide qui fait rire telle honnête femme à certaines gravelures, et qui répand sur une salle entière une odeur de luxure ; psychologie puissante qui réveille les consciences et fait passer dans les âmes bourgeoises au souffle d’héroïsme. […] Qui lit Montaigne par fragments, de ci, de là, ne voit en lui que le xvie  siècle ; qui le lit en entier y découvre en germe tout le classicisme. […] Ces énergies d’un peuple entier tendues vers le même but, dans un même esprit, sont l’affirmation solennelle du génie français ; cet effort assure à la France une suprématie intellectuelle séculaire qui est aujourd’hui encore une avance ; il donne sa direction durable et logique à l’action française dans l’œuvre humaine. […] Chez Rousseau tout se tient dès le premier Discours ; l’œuvre entière est animée d’un souffle qui va renouveler la littérature. […] Cette France, qu’on dit inconstante, obéit héroïquement à la logique des idées ; quand elle souffre, c’est pour l’humanité entière qu’elle souffre ; et si elle devait mourir, elle mourrait d’un idéal surhumain.

988. (1894) Études littéraires : seizième siècle

Elle est tout entière un petit chef-d’œuvre de bonne humeur, de gaîté fine et d’esprit. […] D’abord son livre tout entier est une parodie. […] Cette parodie robuste et qui appuie circule dans le livre tout entier et se marque davantage à mesure qu’on avance. […] Il a accepté avec bonheur l’Antiquité tout entière et en a fait la nourriture de son esprit. […] Il était tout entier à ses professeurs et à ses livres, écoutant, compulsant, rédigeant, exposant et argumentant.

989. (1923) Paul Valéry

D’une part un artiste travaille généralement dans une joie qui l’applique tout entier à son œuvre et qui ressemble à l’inspiration. […] Dans un milieu et dans un temps où régnaient le vers libre, Valéry, comme Mallarmé, a voulu un vers discipliné, une rime aussi entière et aussi probe que celle de Hugo et des Parnassiens. […] L’Album pourrait porter entier ce titre d’une de ses pièces : Narcisse parle. […] Valéry, dans le dialogue sur la danse, parle du corps de la danseuse, qui devient tout entier une main, parce que la danse est le type du mouvement centrifuge qui répand l’âme vers l’extérieur. […] L’ancienne Parque n’avait pas d’yeux pour le soleil et ne le « soutenait » que de son être entier.

990. (1909) Nos femmes de lettres pp. -238

Goûtons les heures tout entières, Dans le recueillement des pesantes paupières. […] Il faudrait ne rien concéder aux merveilleuses puissances de l’intuition, pour refuser à la femme, si peu douée fût-elle d’expression verbale, ce droit d’aveu, de confession, par où elle saura se révéler tout entière, à nous que d’irréductibles divergences de physiologie empêchent de sentir comme elles. […] le Théâtre… qui est de tous les temps, et le Roman presque entier. […] vains et artificiels témoignages, auprès du désir qui se représente la vie entière comme une harmonie, où chaque geste est expressif et contribue à la perfection du tout ! […] Comme un précieux flacon qui longtemps enferma dans son cristal ciselé le plus capiteux des aromes, ses vers dégagent la senteur de l’Idéal qui tout entier s’exprime par eux : « Les Lesbiens avaient l’attrait bizarre et un peu pervers des races mêlées.

991. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Appendice. — [Véron.] » pp. 530-531

La vérité tout entière à ce sujet est dans la note suivante que je retrouve et qui a été écrite de son vivant.

992. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Riposte à Taxile Delord » pp. 401-403

Jeune homme, qui vous destinez aux lettres et qui en attendez douceur et honneur, écoutez de la bouche de quelqu’un qui les connaît bien et qui les a pratiquées et aimées depuis près de cinquante ans, — écoutez et retenez en votre cœur ces conseils et cette moralité : Soyez appliqué dès votre tendre enfance aux livres et aux études ; passez votre tendre jeunesse dans l’etude encore et dans la mélancolie de rêves à demi-étouffés ; adonnez-vous dans la solitude à exprimer naïvement et hardiment ce que vous ressentez, et ambitionnez, au prix de votre douleur, de doter, s’il se peut, la poésie de votre pays de quelque veine intime, encore inexplorée ; — recherchez les plus nobles amitiés, et portez-y la bienveillance et la sincérité d’une âme ouverte et désireuse avant tout d’admirer ; versez dans la critique, émule et sœur de votre poésie, vos effusions, votre sympathie et le plus pur de votre substance ; louez, servez de votre parole, déjà écoutée, les talents nouveaux, d’abord si combattus, et ne commencez à vous retirer d’eux que du jour où eux-mêmes se retirent de la droite voie et manquent à leurs promesses ; restez alors modéré et réservé envers eux ; mettez une distance convenable, respectueuse, des années entières de réflexion et d’intervalle entre vos jeunes espérances et vos derniers regrets ; — variez sans cesse vos études, cultivez en tous sens votre intelligence, ne la cantonnez ni dans un parti, ni dans une école, ni dans une seule idée ; ouvrez-lui des jours sur tous les horizons ; portez-vous avec une sorte d’inquiétude amicale et généreuse vers tout ce qui est moins connu, vers tout ce qui mérite de l’être, et consacrez-y une curiosité exacte et en même temps émue ; — ayez de la conscience et du sérieux en tout ; évitez la vanterie et jusqu’à l’ombre du charlatanisme ; — devant les grands amours-propres tyranniques et dévorants qui croient que tout leur est dû, gardez constamment la seconde ligne : maintenez votre indépendance et votre humble dignité ; prêtez-vous pour un temps, s’il le faut, mais ne vous aliénez pas ; — n’approchez des personnages le plus en renom et le plus en crédit de votre temps, de ceux qui ont en main le pouvoir, qu’avec une modestie décente et digne ; acceptez peu, ne demandez rien ; tenez-vous à votre place, content d’observer ; mais payez quelquefois par les bonnes grâces de l’esprit ce que la fortune injuste vous a refusé de rendre sous une autre forme plus commode et moins délicate ; — voyez la société et ce qu’on appelle le monde pour en faire profiter les lettres ; cultivez les lettres en vue du monde, et en tâchant de leur donner le tour et l’agrément sans lequel elles ne vivent pas ; cédez parfois, si le cœur vous en dit, si une douce violence vous y oblige, à une complaisance aimable et de bon goût, jamais à l’intérêt ni au grossier trafic des amours-propres ; restez judicieux et clairvoyant jusque dans vos faiblesses, et si vous ne dites pas tout le vrai, n’écrivez jamais le faux ; — que la fatigue n’aille à aucun moment vous saisir ; ne vous croyez jamais arrivé ; à l’âge où d’autres se reposent, redoublez de courage et d’ardeur ; recommencez comme un débutant, courez une seconde et une troisième carrière, renouvelez-vous ; donnez au public, jour par jour, le résultat clair et manifeste de vos lectures, de vos comparaisons amassées, de vos jugements plus mûris et plus vrais ; faites que la vérité elle-même profite de la perte de vos illusions ; ne craignez pas de vous prodiguer ainsi et de livrer la mesure de votre force aux confrères du même métier qui savent le poids continu d’une œuvre fréquente, en apparence si légère… Et tout cela pour qu’approchant du terme, du but final où l’estime publique est la seule couronne, les jours où l’on parlera de vous avec le moins de passion et de haine, et où l’on se croira très clément et indulgent, dans une feuille tirée à des milliers d’exemplaires et qui s’adresse à tout un peuple de lecteurs qui ne vous ont pas lu, qui ne vous liront jamais, qui ne vous connaissent que de nom, vous serviez à défrayer les gaietés et, pour dire le mot, les gamineries d’un loustic libéral appelé Taxile Delord.

993. (1887) Journal des Goncourt. Tome I (1851-1861) « Préface » pp. -

Le manuscrit tout entier, pour ainsi dire, est écrit par mon frère, sous une dictée à deux : notre mode de travail pour ces Mémoires.

994. (1888) Préfaces et manifestes littéraires « Autobiographie » pp. 169-176

Le manuscrit tout entier, pour ainsi dire, est écrit par mon frère, sous une dictée à deux : notre mode de travail pour ces Mémoires.

995. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre quatrième. Du Merveilleux, ou de la Poésie dans ses rapports avec les êtres surnaturels. — Chapitre X. Machines poétiques. — Vénus dans les bois de Carthage, Raphaël au berceau d’Éden. »

Une de ses pensées est belle comme l’âme entière de l’homme, lorsque, digne de son immortalité, elle médite profondément.

996. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Troisième partie. Beaux-arts et littérature. — Livre troisième. Histoire. — Chapitre II. Causes générales qui ont empêché les écrivains modernes de réussir dans l’histoire. — Première cause : beautés des sujets antiques. »

Rome et Athènes, parties de l’état de nature pour arriver au dernier degré de civilisation, parcourent l’échelle entière des vertus et des vices, de l’ignorance et des arts.

997. (1913) Essai sur la littérature merveilleuse des noirs ; suivi de Contes indigènes de l’Ouest-Africain français « Contes — XVII. La flûte d’ybilis »

Vingt années entières, il la chercha partout sans succès.

998. (1910) Variations sur la vie et les livres pp. 5-314

Le marquis de Montausier n’obtint sa main qu’après une cour assidue de quatorze ans, et la soumission la plus entière. […] Il se tournait tout entier pour la regarder. […] C’était une amitié entière et parfaite, fort rare dans les affaires de ce monde. […] Puis il reprenait : — Certes, une loi qui impose les changements, traverse la nature entière. […] Ses amis l’engageaient à traduire en entier le Jules César de Shakespeare.

999. (1899) Musiciens et philosophes pp. 3-371

Le tragique, en tant qu’il trouve son expression dans la légende, dans le mythe, a donc besoin de la Musique pour se révéler à nous dans son entière vérité. […] En d’autres •termes, Wagner se livre tout entier à notre contemplation, mais il ne s’analyse pas. […] Il est tout entier dans la musique, et dans la musique seule. […] Wagner au moins était entier ; Wagner était la corruption complète ; Wagner était le courage, la volonté, la conviction dans la corruption. […] Il savait bien qu’il y avait mis autre chose que de la musique, qu’il y exprimait des idées et des sentiments, que ces œuvres étaient de véritables poèmes où il se donnait tout entier.

1000. (1922) Nouvelles pages de critique et de doctrine. Tome II

Haeckel absorbe le physico-chimique dans le mécanique, et il conclut que la Science explique l’univers entier par le mouvement. […] La ruche agressive se mobilise tout entière. […] Ils ont montré ainsi l’étendue entière du péril allemand et sa profondeur. […] Ce travail, lui aussi, comme celui de l’artiste ou du littérateur, intéresse l’homme tout entier. […] Parfois, des vacances sont de rigueur, l’entier mois d’août, par exemple, chez les tréfiliers d’archal.

1001. (1857) Réalisme, numéros 3-6 pp. 33-88

Godeau en plongeant ses dents solides dans une poire qui disparut presque en entier dans sa large mâchoire. […] Vous avez insulté à l’œuvre entière de Victor Hugo. […] Gozlan surtout a ignoré le Balzac fils, frère ; il a connu l’ami, mais on ne se montre jamais tout entier à l’ami, même le plus intime, et, dois-je le dire ? […] Pourtant chacun de ces analogistes a eu pour collaborateur la nature entière. […] À l’Opéra-Comique, les chœurs ont l’habitude de chanter pendant des heures entières le mot : En avant !

1002. (1890) Causeries littéraires (1872-1888)

Ce qu’il a amassé de documents doit passer en entier ; il ne fait grâce de rien. […] Halévy, nous avons le récit d’une existence entière ou peu s’en faut. […] Et tant pis pour les convives qui désireraient qu’on leur servît un cantalou dans son entier ! […] Ils sont venus en Suisse, et là, s’isolant du monde entier, ils ont vécu la vie des patriarches. […] Au lieu de ce long et triste combat dont souffrirait l’existence entière, que nous montre-t-on ?

1003. (1908) Jean Racine pp. 1-325

Mais on l’ouvrit tout entière, et jamais fille ne fut plus fille. […] Mais Dieu merci, je suis libre encore, et si je quittais ce pays, je rapporterais un cœur aussi sain et aussi entier que je l’ai apporté. […] En attendant, Jean Racine se donne tout entier à sa vocation profane. […] Vraiment, elle introduisit l’amour — l’amour tout entier — non seulement sur notre scène, mais dans notre littérature. […] Racine les a exprimés tout entiers dans le moment où il les a saisis.

1004. (1903) Propos de théâtre. Première série

— L’armée tout entière et moi. […] Clitandre se déclare tout entier et sans esprit de retour attaché à Henriette. […] D’abord, pourquoi ne pas donner le texte entier ? […] Si je restais, je serais tout entier avec la peine de Bérénice. […] Les Précieuses ridicules sont en entier une comédie bouffe.

1005. (1859) Critique. Portraits et caractères contemporains

Le Génie du Christianisme n’appartient ni au roi, ni au pape, ni à l’empereur : il appartient à la France, à l’Europe, au monde entier. […] Non, non, il n’est pas mort, le grand poète ; il y en a même qui prétendent que sa croissance n’est pas entière encore. […] mort cet illustre génie dont le nom seul faisait bondir la ville entière ! […] La ville entière poussa un cri de douleur quand elle apprit l’escapade et l’engagement de son jeune bachelier. […] Adieu à cette grande métairie où la famille entière devait se cacher quand l’Histoire des Français serait complète… Il faut à cette heure acheter, non pas une métairie, mais un tombeau !

1006. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Appendice — I. Sur M. Viennet »

Sainte-Beuve (cela se sent bien) l’avait dicté tout entier à son secrétaire, Si l’on y remarque un peu de complaisance, c’est que M. 

1007. (1870) Portraits contemporains. Tome IV (4e éd.) « M. FAURIEL. — POST-SCRIPTUM. » pp. 269-272

la critique elle même tout entière peut-être, pour savoir rouvrir la source de quelques élégies adorées.

1008. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — P — Parodi, D.-Alexandre (1842-1902) »

Non, le terme est trop noble pour cette nature farouche, entière, emportée par l’instinct sauvage de la brute.

1009. (1909) Les œuvres et les hommes. Philosophes et écrivains religieux et politiques. XXV « César Cantu »

Nous aurons bientôt le quatrième volume, mais il ne s’agit point ici de l’ouvrage entier.

1010. (1862) Les œuvres et les hommes. Les poètes (première série). III « Préface »

Elle n’avait pas lu la préface générale, placée à la tête du premier volume des Œuvres et des Hommes (le volume des Philosophes et des Écrivains religieux), ou si elle l’avait lue, elle ne s’en souvenait plus, car il est dit positivement dans cette préface, que pour être plus dans le mouvement de son temps, l’auteur laisserait là toute exposition artificielle ou chronologique, et ne partirait jamais, tout en embrassant le siècle tout entier, dans un nombre indéterminé de volumes, que des publications contemporaines ou des réimpressions par lesquelles on atteint à tous les moments du passé et à tous les hommes qui y ont laissé une place durable ou éphémère… Avec ce système, il y a des attentes, il n’y a pas d’oublis !

1011. (1862) Portraits littéraires. Tome II (nouv. éd.) « Bernardin de Saint-Pierre »

se révéler pour la première fois tout entier, dans le mystère ! […] Le point de vue des causes finales n’est jamais fécond pour la science, et rentre tout entier dans la poésie, dans la morale, dans la religion ; ce ne peut être au plus que le moment de prière du savant, après quoi il faut qu’il se remette à l’examen, à l’analyse. […] Les Études donc, en y comprenant Paul et Virginie et la Chaumière, nous le présentent tout entier. […] Mais, à part ce portrait un peu complaisant de lui-même, je ne crois pas qu’il y en ait d’autre dans Paul et Virginie  ; ces êtres si vivants sont sortis tout entiers de la création du peintre.

1012. (1859) Cours familier de littérature. VII « XXXIXe entretien. Littérature dramatique de l’Allemagne. Le drame de Faust par Goethe (2e partie) » pp. 161-232

Je suis maintenant tout entière en ta puissance. […] La rue est déserte ; la ville entière s’est portée en masse hors des murs, au-devant d’une colonne fugitive d’émigrés des bords du Rhin, qui se sauvent avec leurs femmes, leurs enfants, leurs vieillards, leurs malades, leurs troupeaux, leurs meubles, devant l’armée envahissante des Français. […] Ce coup d’œil décida de la vie entière de Goethe. […] Quant à lui, il était ce qu’on est convenu d’appeler très improprement panthéiste, c’est-à-dire ne séparant pas en deux la création et la créature, et adorant la nature entière comme la divinité des choses sans s’élever à la divinité de l’esprit ; philosophes pour ainsi dire brutaux et fatalistes dans leur croyance, qui reconnaissent bien en Dieu la force latente de tous les phénomènes visibles ou invisibles, mais qui n’y reconnaissent pas l’individualité et la suprême intelligence, c’est-à-dire ce qui constitue l’être, refusant ainsi à l’Être des êtres ce qu’ils sont forcés d’accorder au dernier insecte de la nature.

1013. (1862) Cours familier de littérature. XIII « LXXVIIIe entretien. Revue littéraire de l’année 1861 en France. M. de Marcellus (1re partie) » pp. 333-411

C’était le moment où l’intérêt diplomatique du monde était reporté tout entier en Espagne, à Naples, à Turin, et où le congrès de Vérone devait bientôt appeler sur la scène des négociations toutes les cours de la Sainte-Alliance. […] Et cependant ce n’était que la moitié de la France, car la France n’est jamais tout entière que dans la guerre ; dans sa diplomatie et dans ses parlements, elle ne montre jamais que la moitié de ses capacités, tant elle est divisée en deux fractions par les partis qui la déchirent. […] Il se dévoua tout entier à l’étude, région sereine, d’où l’on voit tout sans s’étonner de rien. […] Au milieu de toutes ces idolâtries, je n’osais me créer une divinité ; mais aujourd’hui ma croyance est fixée, et, à force de bienfaits versés sur mes semblables, je veux mériter les bienfaits de ce Dieu, seul et tout-puissant, dont mon âme tout entière reconnaît l’existence.

1014. (1867) Cours familier de littérature. XXIII « cxxxviie entretien. Un intérieur ou les pèlerines de Renève »

Le paysage magique du soir semblait entrer tout entier par la fenêtre, dans la chambre, avec les derniers rayons du soleil couchant. […] On croit contempler une belle vallée de la Lombardie italienne ; au pied de la fenêtre de la chambre, le pays que l’on voit tout entier, se creuse en larges vallons pleins de hameaux et de fumées de cheminées de paysans, qui traînent sur les prés et sur les vignes, on voit que les paysannes préparent à leur famille le souper du soir. […] Mais, le château et le tombeau ne nous suffisaient pas, le pays tout entier était pour ainsi dire partie de la maison ; nous voulûmes le visiter. […] Nous passâmes toute la journée entière à marcher et à parler et à rêver, et à prier sur vos traces.

1015. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — H — Hugo, Victor (1802-1885) »

Armand Fallières « … Il faut que la France entière présente un vaste ensemble, ou, pour mieux dire, un vaste réseau d’ateliers intellectuels, gymnases, lycées, collèges, chaires, bibliothèques, échauffant partout les vocations, éveillant partout les aptitudes… » Tel est le programme que traçait Victor Hugo à la tribune de l’Assemblée législative (1850). […] Edmond Picard La vie humaine entière se reflète en voire œuvre. […] Adolphe Thalasso Hugo n’appartient pas à la France seulement ; comme Shakespeare et Molière, il appartient, par son génie, au monde entier. […] Il a su transmuter la substance de tout en substance poétique, ce qui est la condition expresse et première de l’art, l’unique moyen d’échapper au didactisme rimé, cette négation absolue de toute poésie ; il a forgé, soixante années durant, des vers d’or sur une enclume d’airain ; sa vie entière a été un chant multiple et sonore où toutes les passions, toutes les tendresses, toutes les sensations, toutes les colères généreuses qui ont agité, ému, traversé l’âme humaine dans le cours de ce siècle, ont trouvé une expression souveraine.

1016. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre VII. La littérature et les conditions économiques » pp. 157-190

Mêlez à tout cela des satyres qui représentent la brutalité, un peu de magie, des danses champêtres, des travestissements, des vers coulants, faciles, des apostrophes aux oiseaux, aux forêts, à la nature entière, ajoutez-y comme dénouement des mariages où l’on voit des rois épouser des bergères ; vous aurez une idée de la façon dont une société mondaine transpose à son usage les mœurs villageoises, et du même coup vous aurez la preuve qu’à l’agriculture aimée et florissante correspond l’idylle dans le livre et sur le théâtre. […] La découverte de l’imprimerie qui va faire de la lecture un pain quotidien, la résurrection des œuvres grecques et latines qui fait bouillonner dans les cerveaux une sorte d’ivresse, ce grand réveil de la pensée qui s’appelle la Renaissance, cette ardeur de connaître qui, venue d’Italie, se propage dans l’Europe entière, le brusque agrandissement du monde en même temps que du passé, toutes ces secousses profondes et répétées éprouvées par les intelligences ont une répercussion presque immédiate sur le sort de ceux qui cultivent les lettres. […] Il aboutit à remplacer l’aristocratie fausse, factice, convenue, celle qui se fonde sur des parchemins ou des sacs d’écus, par l’aristocratie vraie, naturelle, qui repose tout entière sur le mérite personnel. […] Les gens ne sachant pas lire commençant à devenir une rareté, le public qui contribue à la rémunération de ceux qui écrivent est devenu le peuple presque tout entier, et mieux vaut dépendre de cent mille maîtres que d’un seul ou de deux ou trois tyran neaux.

1017. (1888) Revue wagnérienne. Tome III « III »

Certes, nous ne sommes pas de ceux pour qui l’art est tout entier sur les planches, et la valeur d’une partition nous séduit en-dehors des mérites de Mademoiselle Malten ou de M.  […] Lors du grand essor du moyen âge, et de l’institution de la chevalerie, elle se répandit par la France entière, rayonna jusqu’en Allemagne, et se trouva concorder, si je puis dire, avec divers événements historiques, les croisades, la création des templiers. […] Il représente l’homme vivant (animé), non seulement dans une de ses parties, mais dans son être entier de la plante des pieds jusqu’à la tête. […] La face était tout entière occupée à proférer.

1018. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Le marquis de Lassay, ou Un figurant du Grand Siècle. — II. (Fin.) » pp. 180-203

Ce que Bernis écrivait de Venise à Pâris-Duverney, Lassay l’écrira presque dans les mêmes termes à Bolingbroke : « J’ai toujours pensé qu’une extrême ambition ou une entière liberté peuvent seules remplir le cœur d’un honnête homme : l’état qui est entre deux n’est fait que pour les gens médiocres. » En attendant, la guerre ayant recommencé en 1688, Lassay fit comme les gentilshommes de cœur, et alla servir en Allemagne et en Flandre sur le pied de volontaire. […] À peine marié (1696), Lassay dut rompre toute intimité avec elle et lui rendre une entière liberté, comme on le voit par une lettre sévère et fort digne qu’il lui adresse. C’est cette même marquise de Lassay pour laquelle Chaulieu, qui en était épris, et qui la rencontrait sans cesse dans la petite cour de Mme la Duchesse à Saint-Maur, a fait une foule de jolis vers, et ceux-ci entre autres où il parle de son cœur d’un ton presque aussi ému que l’eût pu faire La Fontaine : Il brûle d’une ardeur désormais éternelle ; Et, livré tout entier à qui l’a su charmer, Il sert encore un Dieu qu’il n’ose plus nommer51.

1019. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Le maréchal de Villars — II » pp. 57-80

Une lettre de Louis XIV, du 5 octobre, ne contribua pas peu à l’y exciter : Monsieur le marquis de Villars, je suis si content de ce que vous venez de faire, et j’ai une confiance si entière en votre expérience et votre bonne conduite, que j’ordonne au maréchal de Catinat de vous envoyer le plus diligemment qu’il pourra une augmentation de dix bataillons avec vingt escadrons. […] On saisit bien la nuance et le degré du tort où Villars put être à l’égard de M. de Magnac ; il le nomme, il lui rend aussi, justice : mais il ne va pas sur son compte au-devant de l’entière et éclatante vérité : seulement, si on la lui demande, il la dira. […] Et il lui réitère les ordres les plus précis de rentrer immédiatement en campagne. — Villars est touché et piqué du reproche : J’ose supplier Votre Majesté d’être bien persuadée que je tâcherai de mériter l’honneur de sa confiance par une très grande exactitude à ne rien prendre sur moi ; il est vrai que, depuis que sa bonté a daigné me confier ses armées, elle m’avait laissé une liberté entière, dont, grâce à Dieu, je n’ai pas abusé au détriment de ses affaires.

1020. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Œuvres de Virgile »

Sans parler de Hofman Peerlkamp, l’ingénieux, l’osé, le téméraire en conjectures, celui qui enlève à Virgile non seulement des vers çà et là, mais des épisodes tout entiers, il y a tout un bataillon régulier, Forbiger, Paldam, Haupt, Ladewig, … Dübner (chez nous, petite édition Didot), Ribbeck, et enfin M.  […] Avec les légers défauts qu’une critique minutieuse y peut relever, les Épilogues de Virgile restent charmantes ; il ne faut point leur demander sans doute l’entière et expressive rusticité des Idylles de Théocrite, ni la réalité du cadre et de la composition ; mais ce serait une autre erreur que de les considérer comme un genre factice, allégorique, parce qu’il s’y mêle de l’allégorie et de l’allusion. […] Tout cela est vrai, mais il n’est pas moins vrai que la beauté du vers célébré chez Virgile est empruntée d’Homère, qu’elle est empruntée et pour la pensée et pour la forme, mais empruntée d’une certaine manière qui n’est pas directe, qui n’est pas vulgaire, que Virgile seul a su introduire, et dont il vaut la peine de remettre ici sous les yeux une entière explication.

1021. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Le général Jomini. [IV] »

Si le mouvement de Ney s’était opéré tout entier dans le premier sens et avec la vigueur que l’illustre maréchal avait déployée en tant d’autres rencontres, le résultat de la victoire de Bautzen eût été bien différent : « c’eût été, ni plus ni moins, un mouvement entièrement semblable à celui que Blucher exécuta plus tard contre nous à Waterloo. » La paix, du coup, eût pu être conquise. […] Ce fut vers ce temps, et d’après l’expérience qu’il acquit à cette nouvelle école, que quelques-unes de ses opinions antérieures en vinrent à se modifier : il avait cru jusque-là avec le monde entier que Napoléon était le seul obstacle à la paix, il commença à entrevoir que cette paix, eût-elle été sincèrement voulue par lui, n’aurait pas été si facile à obtenir en présence d’une telle coalition de haines. […] Dans le temps, l’honneur de ce qu’il fit alors alla presque tout entier à M. de La Harpe ; mais M. de La Harpe, l’ancien gouverneur d’Alexandre et dont l’influence était en effet prépondérante auprès de son ancien élève, M. de La Harpe, qui mena à bonne fin et qui consomma si honorablement en 1815 l’œuvre de la Suisse reconstituée, était absent dans ces premiers mois, et il n’arriva qu’un peu après au quartier général.

1022. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « M. DE BALZAC (La Recherche de l’Absolu.) » pp. 327-357

Son Dernier Chouan, en 1829, l’avait fait remarquer pour la première fois, mais sans le tirer encore de la foule ; sa Physiologie du Mariage lui avait acquis la réputation d’un homme d’esprit, observateur sans scrupules, un peu graveleusement expert sur une matière plus scabreuse que celle dont avait traité Brillat-Savarin ; mais c’est à partir de la Peau de Chagrin seulement que M. de Balzac est entré à pleine verve dans le public, et qu’il l’a, sinon conquis tout entier, du moins remué, sillonné en tout sens, étonné, émerveillé, choqué ou chatouillé en mille manières. […] Comme les alchimistes, il a passé des années entières en tâtonnements, à travers la fumée et la cendre, les sédiments et les scories, avant d’arriver à la transmutation tant désirée : aussi, quelle joie bien légitime et quelle ivresse étourdissante le jour où il vit dans le creuset son mercure se fixer en or ! […] C’est dans ses Contes de la Vie privée qu’il devait tout entier se produire.

1023. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « M. VINET. » pp. 1-32

La plante est là, entière, authentique et reconnaissable à un certain point ; mais où est sa couleur, son port, sa grâce, le souffle qui la balançait, le parfum qu’elle abandonnait au vent, l’eau qui répétait sa beauté, tout cet ensemble d’objets pour qui la nature la faisait vivre, et qui vivaient pour elle ? […] Mais c’est à produire, à solliciter une impression entière et efficace qu’ils sont destinés ; et aussi n’en parlons-nous qu’avec rapidité et une sorte de crainte sous un point de vue autre. […] Vinet (2e édition), une charmante lettre écrite de Bruxelles par Benjamin Constant, âgé de douze ans, à sa grand’mère : l’homme y perce déjà tout entier.

1024. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « L’abbé Prévost »

On commence à croire que, sans cette tour solitaire de René, qui s’en détache et monte dans la nue, l’édifice entier de Chateaubriand se discernerait confusément à distance94. […] On l’occupa successivement dans les diverses maisons de l’Ordre à Saint-Ouen de Rouen, où il eut une polémique à son avantage avec un jésuite appelé Le Brun ; à l’abbaye du Bec, où, tout en approfondissant la théologie, il fit connaissance d’un grand seigneur retiré de la cour qui lui donna peut-être la pensée de son premier roman ; à Saint-Germer, où il professa les humanités ; à Évreux et aux Blancs-Manteaux de Paris, où il prêcha avec une vogue merveilleuse ; enfin à Saint-Germain-des-Prés, espèce de capitale de l’Ordre, où on l’appliqua en dernier lieu au Gallia Christiana, dont un volume presque entier, dit-on, est de lui. […] Lenglet l’avait brutalement accusé de s’être laissé enlever par une belle : Prévost répondit que de tels enlèvements n’allaient qu’aux Médor et aux Renaud, et il exposa en manière de réfutation le portrait suivant, tracé de lui par lui-même : « Ce Médor, si chéri des belles, est un homme de trente-sept à trente-huit ans, qui porte sur son visage et dans son humeur les traces de ses anciens chagrins ; qui passe quelquefois des semaines entières dans son cabinet, et qui emploie tous les jours sept ou huit heures à l’étude ; qui cherche rarement les occasions de se réjouir ; qui résiste même à celles qui lui sont offertes, et qui préfère une heure d’entretien avec un ami de bon sens à tout ce qu’on appelle plaisirs du monde et passe-temps agréables : civil d’ailleurs, par l’effet d’une excellente éducation, mais peu galant ; d’une humeur douce, mais mélancolique ; sobre enfin et réglé dans sa conduite.

1025. (1875) Premiers lundis. Tome III «  À propos, des. Bibliothèques populaires  »

Il a aggravé la dénonciation des pétitionnaires par son commentaire propre : des noms honorables ou glorieux, confondus avec d’autres, y encourent une réprobation entière et sommaire, une véritable flétrissure publique, sans discussion. […] Balzac aussi figure sur la liste maudite : il y passe tout entier avec toute son œuvre. […] « Votre dévoué collègue, « Lacaze. » On met cette lettre en entier telle que M. 

1026. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre troisième. L’esprit et la doctrine. — Chapitre IV. Construction de la société future »

Chacun se donne tout entier, « tel qu’il se trouve actuellement, lui et toutes ses forces, dont les biens qu’il possède font partie ». […] Il faudrait pouvoir la citer tout entière. […] Tocqueville, l’Ancien régime , livre II tout entier ; et livre III, ch. 3.

1027. (1868) Cours familier de littérature. XXV « CXLIXe entretien. De la monarchie littéraire & artistique ou les Médicis (suite) »

Je ne crains pas non plus que ton autorité soit inférieure à celle que j’ai eue jusqu’à ce jour : mais parce qu’une cité entière est un corps à plusieurs têtes, comme l’on dit, et qu’on ne peut pas être au gré d’un chacun, souviens-toi, au milieu de cette diversité, de suivre toujours le dessein que tu jugeras le plus honnête, et d’avoir égard à l’intérêt de tous plutôt qu’à l’intérêt d’un seul. » Il donna ensuite des ordres pour ses funérailles, pour qu’elles se fissent à l’instar de celles de son aïeul Côme, dans la mesure enfin qui convient à un simple particulier. […] Ensuite, après nous avoir caressés et embrassés tous, et demandé pardon pour les choses fâcheuses dont sa maladie avait pu être cause à l’égard de quelqu’un d’entre nous, il fut tout entier à l’extrême-onction et aux dernières paroles qu’on adresse à l’âme qui part. […] » Ajouterai-je qu’à la première veille, des nuages ayant tout à coup assombri le ciel, le dôme de cette magnifique basilique, dont la coupole, par son admirable travail, surpasse la plus belle du monde entier, fut frappé d’un tel coup de foudre, que de grandes portions s’en détachèrent, et que des marbres énormes furent ébranlés par une force et un choc horribles, et principalement dans cette partie qui est en vue du palais des Médicis !

1028. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre III. Les grands artistes classiques — Chapitre I. Les mondains : La Rochefoucauld, Retz, Madame de Sévigné »

On peut partager le siècle en quatre ou cinq générations : la première, de Richelieu (1583) à Corneille (1606), a disparu, ou vieilli en 1660 ; la suivante, de La Rochefoucauld (1613) à Bossuet (1627), a sa pleine vigueur, alors que la troisième, celle de Boileau, de Louis XIV et de Racine (1636-1639), entre seulement dans la vie, dans l’activité indépendante et consciente ; la quatrième, de La Bruyère (1643) à Regnard (1633), ne s’avancera au premier plan que dans les dernières années du siècle, tandis que la suivante, avec La Motte (1672), formée avant 1713, inaugurera en sa maturité le xviiie  siècle intellectuel auquel les Montesquieu (1689) et les Voltaire ( 169 î) appartiendront tout entiers, gardant seulement en leurs esprits quelques reflets de ce xviie siècle, dont les dernières lueurs auront éclairé leur enfance. […] Il n’y a dans le monde qu’égoïsme, c’est-à-dire intérêt : ni vertu, ni dévouement, peu même de ces passions, qui, égoïstes en leur principe, s’absorbent dans leur objet jusqu’à l’entier désintéressement. […] Le remède à la naïveté, mais le remède aussi à la vanité, est là, dans ce petit volume presque tout entier excellent et substantiel, dont ceux-là seuls médiront, qui n’auront pas su s’y connaître.

1029. (1886) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Deuxième série « Francisque Sarcey »

On admire comme il sait s’intéresser à des histoires minuscules, à des draines qui évoluent tout entiers dans les bornes d’un rond de cuir, à des Lutrin et à des Seaux enlevés, à des épopées héroï-comiques qu’il aura oubliées dans cinq minutes. […] Sarcey ressemble peu à un héros romantique ; qu’il n’a de René ou d’Obermann ni la sveltesse pliante ni la pâleur nacrée, et qu’une myopie célèbre dans le monde entier aggrave encore le poids de sa démarche. […] Au premier coup d’archet qui sur la scène mettait en branle les dieux de l’Olympe et des Enfers, il semblait que la foule fût secouée d’un grand choc et que le siècle tout entier, gouvernements, institutions, mœurs et lois, tournât dans une prodigieuse et universelle sarabande.

1030. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre XIII. La littérature et la morale » pp. 314-335

Il semble, de la sorte, que la vertu tout entière réside dans la chasteté. […] Louis XV s’abandonne à ses passions avec une désinvolture parfaite et une entière sécurité de conscience. […] Il serait à souhaiter qu’à toute époque un représentant de tous les groupes intellectuels existant alors eût pris la peine de faire un travail analogue pour lui et les siens ; on aurait de la sorte une série de témoignages qui donneraient le droit d’embrasser une époque entière dans les conclusions qu’on tirerait sur l’origine de ses principales tendances.

1031. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — Y. — article » pp. 529-575

« On prétend, dit-il*, que les Articles Ame & Dieu sont des Traités de Matérialisme & d'Athéisme, quoique ces Articles soient tirés en entier des Ouvrages de MM. […] Quand il seroit vrai que les Articles qu'il défend auroient été tirés en entier de Clarke & Jacquelot, s'ensuivroit-il qu'ils ne favorisent pas le Matérialisme, qui y est si positivement énoncé ? […] Il est faux, en second lieu, que ces Articles soient extraits en entier des Ouvrages du Docteur Anglois & du Ministre Protestant.

1032. (1913) La Fontaine « III. Éducation de son esprit. Sa philosophie  Sa morale. »

Le passage vaut que je vous le lise tout entier, et du reste il n’est pas long, et il a son importance. […] Je remarque ceci ; quand il nous fait son discours — le Discours à Mme de La Sablière — sur l’âme des bêtes, avez-vous remarqué qu’il donne une certaine âme  mais non pas l’âme tout entière, mais non pas l’âme humaine  qu’il donne une certaine âme aux animaux, une âme imparfaite et grossière, inférieure à la nôtre, mais qui est une âme, c’est-à-dire une sensibilité, une intelligence, et même peut-être une imagination ou une intuition. […] Et non seulement les jugements de cour, mais les jugements du monde entier, de tous les hommes.

1033. (1913) La Fontaine « IV. Les contes »

Ils sont contraints de se faire, de temps en temps, des sujets de désir et d’inquiétude : tant il est vrai que l’entière satisfaction et le dégoût se tiennent la main ! […] Voici le passage, le voici tout entier : Psyché, à travers les épreuves dont je vous ai parlé, traversant les déserts, traversant les contrées sauvages, finit, ce qui est tout à fait naturel, par rencontrer un ermite  pas tout à fait, puisque c’est un bon vieillard qui vit dans une sorte de cottage avec sa fille  qui lui raconte son histoire. […] Il écrit à sa marraine, c’est-à-dire celle qu’il appelait ainsi parce qu’elle lui avait donné un sobriquet, à Mme Jaubert : Il est donc vrai, vous vous plaignez aussi, Vous dont l’œil noir, gai comme un jour de fête, Du monde entier pourrait chasser l’ennui !

1034. (1899) Le roman populaire pp. 77-112

Une foule d’écrivains s’y essayent ; plusieurs y gagnent une fortune, une réputation, on pourrait dire une gloire d’une espèce particulière ; ils voient leur nom et leurs œuvres pénétrer dans des milieux où n’ont jamais pénétré ceux des maîtres de la littérature française ; ils intéressent, ils font pleurer, ils égayent, ils ennuient un peuple entier ; ils sont les vrais créateurs et les vrais soutiens d’une certaine presse, investis d’une puissance plus immédiate sur ses destinées que tous les écrivains politiques, les économistes, les critiques, les reporters et les correspondants de la rédaction, et je me rappelle que l’administrateur général d’un des plus importants petits journaux de Paris me disait que, dans la première semaine après le commencement d’un feuilleton, le tirage du journal montait ou s’abaissait de cinquante mille, de quatre-vingt mille exemplaires par jour, selon que le feuilleton plaisait ou ne plaisait pas. […] Je le dis avec une entière conviction : il faudrait avoir du peuple une insultante idée pour se résigner à le laisser indéfiniment victime des lectures qu’on lui sert. […] C’est l’enfance, l’âge mûr, parfois l’existence entière du héros qui passe sous nos yeux, longues périodes où il y a des chances pour que chaque lecteur reconnaisse quelque trait de sa propre histoire.

1035. (1906) Les idées égalitaires. Étude sociologique « Deuxième partie — Chapitre III. La complication des sociétés »

Notre organisation économique force les individus à se spécialiser tout entiers s’ils veulent subsister ? […] C’est dire que l’homme tout entier lui appartient : le métier détermine les droits et les devoirs, les croyances et les habitudes ; c’est avec les mêmes compagnons qu’on travaille et qu’on mange, qu’on prie et qu’on s’amuse. […] Lorsqu’un individu n’appartient qu’à une société, c’est alors qu’il lui appartient tout entier.

1036. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Mélanges de critique religieuse, par M. Edmond Scherer » pp. 53-66

Scherer, de dire tout ce qu’il y a d’agitation dans notre cœur lorsque nous commençons à reconnaître que notre Église et notre système n’ont pas le monopole du bien et du vrai, lorsque nous rencontrons des hommes également éminents et sincères qui professent les opinions les plus opposées…, lorsque nous découvrons qu’il n’y a point d’erreur qui n’ait un mélange de vérité, point de vérité qui ne soit partielle, étroite, incomplète, entachée d’erreur, lorsque ainsi le relatif nous apparaît comme la forme de l’absolu sur la terre, l’absolu comme un but éternellement poursuivi mais éternellement inaccessible, et la vérité comme un miroir brisé en mille fragments qui tous réfléchissent le ciel et dont aucun ne le réfléchit tout entier. […] Si l’on y gagne de connaître un peu mieux le personnage par des détails particuliers, on y perd en ne pouvant le plus souvent exprimer ce qu’on sent avec une entière netteté et franchise.

1037. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Mémoires de l’impératrice Catherine II. Écrits par elle-même, (suite.) »

Je résolus donc, autant que je pourrais, de continuer à lui donner tous les conseils dont je pourrais m’aviser pour son bien, mais de ne jamais m’opiniâtrer jusqu’à le fâcher comme ci-devant, quand il ne les suivrait pas ; de lui ouvrir les yeux sur ses vrais intérêts, chaque fois que l’occasion s’en présenterait, et le reste du temps de me renfermer dans un très-morne silence ; de ménager, d’un autre côté, dans le public, mes intérêts, de telle façon que celui-ci vît en moi le sauveur de la chose publique dans l’occasion. » Le grand chancelier Bestoucheff, à la veille d’une chute et d’une entière disgrâce, s’inquiétait également de l’avenir, comme si de rien n’était, et il avait préparé un plan en prévision du décès de l’Impératrice : d’après ce projet, le grand-duc eut été proclamé comme de droit empereur ; mais en même temps, la grande-duchesse eût été déclarée avec lui « participante à l’administration. […] C’est là-dessus (avril 1759) que nous en restons avec les Mémoires inachevés ; et les trois années qui précèdent l’avénement à l’Empire et la grande usurpation de Catherine continuent de se dérober à nous dans leur entière obscurité et leur mystère.

1038. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Bossuet. Œuvres complètes publiées d’après les imprimés et les manuscrits originaux, par M. Lachat »

— Enfin on a publié depuis lors (1856) les Mémoires mêmes, si souvent cités et invoqués, et le Journal tout entier de l’abbé Ledieu, ce secrétaire de Bossuet, dont le nom et le renom valent mieux que la personne, qui n’est pas l’exactitude ni la délicatesse même, mais qui aimait, somme toute, son évêque, qui l’admirait, et qui, ayant songé de bonne heure à tirer parti de son intimité pour écrire ce qu’il voyait et ce qu’il entendait, nous a rapporté bien des choses qui se ressentent du voisinage de la source, et que rien ne saurait suppléer. […] Vie chaste, vie sobre, vie tour à tour de mouvement et d’un certain éclat à Paris, et de retraite à Metz ; — c’est à ce régime qu’il dut le perfectionnement, la forte et entière nourriture de son génie.

1039. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Frochot, Préfet de la Seine, histoire administrative, par M. Louis Passy. »

Frochot est zélé, dévoué, tout entier à son œuvre d’exécution et d’obéissance intelligente, animé d’un sentiment personnel d’humanité dans les réformes qui tiennent à l’assistance publique, au régime des prisons, paternel et plein de sollicitude pour les établissements d’instruction publique avant la création de l’Université, bienveillant pour les personnes, attentif aux talents naissants ; en un mot, doué de vertus, mais, on l’entrevoit, un peu faible : le nerf, on le pressent, le jour où il en aura besoin, est ce qui lui manquera. […] C’était d’une crédulité et d’une facilité qui trahissait et dénonçait aux yeux de tous le fonctionnaire, entier peut-être encore par les talents et l’aptitude, mais usé par le caractère et qui avait fait son temps.

1040. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « MADAME TASTU (Poésies nouvelles.) » pp. 158-176

Mme Tastu, dans une belle pièce de son dernier recueil (le Temps), montre les mortels partagés en trois classes : les uns, ne vivant qu’au jour le jour, dans le présent ; les autres tout entiers à l’avenir et dans l’ambition des espérances ; les autres, enfin, tout à l’amour du passé et à la mélancolie du souvenir. […] Cette muse, autrefois sortie du même camp libéral que Béranger, n’est pourtant pas tout entière aujourd’hui aux craintifs présages.

1041. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Le Brun »

On devine pourtant et l’on rêve à plaisir ce petit monde heureux, d’après quelques épîtres réciproques et quelques vers épars : Abel, mon jeune Abel, et Trudaine et son frère, Ces vieilles amitiés de l’enfance première, Quand tous quatre muets, sous un maître inhumain, Jadis au châtiment nous présentions la main ; Et mon frère, et Le Brun, les Muses elles-mêmes ; De Pange fugitif de ces neuf Sœurs qu’il aime : Voilà le cercle entier qui, le soir quelquefois, A des vers, non sans peine obtenus de ma voix, Prête une oreille amie et cependant sévère. […] Mais la victoire reste tout entière du côté d’André Chénier.

1042. (1875) Premiers lundis. Tome III « Sur le sénatus-consulte »

l’Institut presque tout entier tourne et s’aigrit à votre sujet. […] si vous tenez tant à mettre des contradictions en présence, je suis homme à vous proposer, moi aussi, mon amendement, et cet amendement, je le formule en ces termes : « Les ministres ne dépendent que de l’empereur, mais ils gardent en présence de l’empereur leur entière indépendance de jugement, de caractère et de langage. » Que si, encore une fois, on tient tant à faire antithèse et à mettre des contradictions aux prises, je propose celle-là.

1043. (1796) De l’influence des passions sur le bonheur des individus et des nations « Section première. Des passions. — Chapitre II. De l’ambition. »

Les événements sont l’extérieur de la vie ; sa véritable source est tout entière dans nos sentiments. […] La passion de la gloire ne peut être trompée sur son objet ; elle veut, ou le posséder en entier, ou rejeter tout ce qui serait un diminutif de lui-même ; mais l’ambition a besoin de la première, de la seconde, de la dernière place dans l’ordre du crédit et du pouvoir, et se rattache à chaque degré, cédant à l’horreur que lui inspire la privation absolue de tout ce qui peut combler ou satisfaire, ou même faire illusion à ses désirs.

1044. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre premier. La structure de la société. — Chapitre I. Origine des privilèges. »

Il va au-devant des barbares, ou les gagne aussitôt après leur entrée ; service énorme ; jugeons-en par un seul fait : dans la Grande-Bretagne, devenue latine comme la Gaule, mais dont les conquérants demeurèrent païens pendant un siècle et demi, arts, industries, société, langue, tout fut détruit ; d’un peuple entier massacré ou fugitif, il ne resta que des esclaves ; encore faut-il deviner leurs traces ; réduits à l’état de bêtes de somme, ils disparaissent de l’histoire. […] L’ordre public tout entier émane de moi ; j’en suis le gardien suprême.

1045. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Troisième partie. Disposition — Chapitre V. Subordination et proportion des parties. — Choix et succession des idées »

Il faut saisir le point d’où l’idée rayonnera en quelque sorte sur l’œuvre entière, et sera présente, toutes les fois qu’il faudra, sans qu’on la répète. […] Un raisonnement reposera tout entier sur un fait reconnu ou sur une proposition admise, qu’il ne faut jamais laisser perdre de vue : là encore on ne craindra pas de se répéter.

1046. (1887) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Troisième série « Joséphin Soulary »

Au bras qui le défend Un nourrisson gazouille une note indécise ; Sa mère, lui tendant le doux sein qu’il épuise, L’embrasse tout entier d’un regard triomphant. […] Et notez aussi qu’on ne donne pas « l’absoute » aux enterrements des petits enfants  La mère embrasse du regard son enfant tout entier : il est donc bien grand, ce petit ?

1047. (1887) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Troisième série «  Les femmes de France : poètes et prosateurs  »

Dès que l’Ève éternelle ou l’éternelle Phryné est citée devant nous, nous sommes en cause, sciemment ou non ; et qui répondra de notre entière liberté de jugement ? […] Si je ne me trompe, nous retrouverons quelque chose de cette honnête candeur chez Madeleine de Scudéry, la vierge sage, d’âme héroïque et d’esprit prolixe  Voici Marguerite d’Angoulême, très savante, très entortillée, toute fumeuse de la Renaissance, souriante, gaie et bonne à travers tout cela, avec son grand nez sympathique, le nez de son frère François Ier  Puis, c’est l’autre Marguerite, Marguerite de Valois, point pédante celle-là, dégagée, galante avec une entière sécurité morale, que rien n’étonne, qui raconte si tranquillement la Saint-Barthélémy ; la première femme de son siècle qui écrive avec simplicité ; une inconsciente, un aimable monstre, comme nous dirions, aujourd’hui que nous aimons les mots plus gros que les choses  Je mets ensemble les enamourées, les femmes brûlantes, les Saphos, chacune exhalant sa peine dans la langue de son temps : Louise Labé mettant de l’érudition dans ses sanglots ; Mlle de Lespinasse mêlant aux siens de la sensibilité et de la vertu, Desbordes-Valmore des clairs de lune et des saules-pleureurs… Mlle de Gournay est une antique demoiselle pleine de science, de verdeur et de virilité, une vieille amazone impétueuse que Montaigne, son père adoptif, dut aimer pour sa candeur, une respectable fille qui a l’air d’un bon gendarme quand, dans son style suranné, elle défend contre Malherbe ses « illustres vieux ».

1048. (1889) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Quatrième série « Barbey d’Aurevilly. »

Son œuvre entière respire les sentiments les plus opposés à ceux que doit avoir un enfant de Dieu : elle implique le culte et la superstition de toutes les vanités mondaines, l’orgueil, et la délectation dans l’orgueil, la complaisance la plus décidée et même l’admiration la plus éperdue pour les forts et les superbes, fussent-ils ennemis de Dieu. […] C’est un sentiment qui tient tout entier dans le mot de cette Napolitaine qui disait que son sorbet était bon, mais qu’elle l’aurait trouvé meilleur s’il avait été un péché.

1049. (1899) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Septième série « « L’amour » selon Michelet » pp. 47-66

— Car il la faut ainsi, molle et incertaine, pas encore formée de corps ni d’esprit, pour que l’homme la puisse pétrir et créer entière et que, la créant, il soit à son tour renouvelé et achevé par elle. […] Il montre bien que la femme est d’autant plus notre égale qu’elle est moins notre pareille et que son sexe s’étend à son âme, à son esprit, à elle tout entière.

1050. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — L — Lamartine, Alphonse de (1790-1869) »

Je lus en entier ce livre singulier ; je le relus encore, et, malgré les négligences, les néologismes, les répétitions et l’obscurité que je pus quelquefois y remarquer, je fus tenté de dire à l’auteur : « Courage, jeune homme ! […] Mais, si le temps a déjà emporté bien des pages d’une œuvre trop inégale, si d’autres inspirent d’insurmontables défiances et même des colères et des rancunes, il y en a pourtant, et beaucoup, qui ont conservé leur fraîcheur, leur éclat presque entiers.

1051. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — V — Verlaine, Paul (1844-1896) »

Il nous a paru intéressant de le reproduire en entier pour marquer la place qu’on accorde en Allemagne à notre plus grand poète lyrique.] […] Quelle messe vaudra celle de ce cœur qui s’offre tout entier, brûlant, extasié, sur l’autel de son repentir ?

1052. (1913) Les antinomies entre l’individu et la société « Chapitre XIII. Conclusions » pp. 271-291

Durkheim nous paraît différer de Spencer en ce qu’il n’admet pas, comme ce philosophe, une solution globale, unique et universelle du problème des antinomies, solution obtenue par le jeu mécanique de la loi d’évolution et valant pour l’humanité entière devenue finalement altruiste. […] Il représente une pure attitude d’abstention sociale ou de révolte antisociale, une mise en théorie de la désobéissance et de l’insoumission, un mépris philosophique des conventions sociales, de la morale, du droit, du pacte social tout entier.

1053. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre XIII. Dernière semaine de Jésus. »

Désormais, en effet, Jésus se retrouve tout entier et sans nuage. […] Chaque minute, à ce moment, devient solennelle et a compté plus que des siècles entiers dans l’histoire de l’humanité.

1054. (1854) Préface à Antoine Furetière, Le Roman bourgeois pp. 5-22

J’aurai soin de m’éclaircir de la chose, et je vous en manderai le détail7. » Ménage, dont les lumières eussent été si utiles à l’Académie, et à qui elle préféra Bergeret, écrivit dans ses Anas (tome 1er, p. 97) : « L’Académie tout entière a été sacrifiée à la passion de quelques uns de son corps. […] Le Carpenteriana corrobore sur ce point le témoignage de Ménage : « Je ne crois pas faire grand tort au corps entier de l’Académie en m’attribuant l’épître et la préface de son Dictionnaire, puisque j’en suis l’auteur.

1055. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « De Stendhal »

Stendhal, un jour, aux environs de la Bérésina, se présenta devant son chef, Daru, l’intendant général, rasé et habillé avec la recherche qu’il aurait eue à Paris : « Vous êtes un homme de cœur », lui dit Daru, frappé d’un détail qui aurait frappé aussi Napoléon, car il révélait l’homme tout entier qu’était Stendhal, et, en effet, à part la petite terreur d’être dupe, rapportée des salons et que lui a reprochée si spirituellement Sainte-Beuve, il garda toujours inaltérables, dans toutes les positions et dans tous les dangers, sa bonne humeur et son sang-froid. […] Mérimée, — ne craignait pas la mort, mais il n’aimait pas à en parler, la tenant pour une chose sale et vilaine plutôt que triste. » En se laissant saisir par la glace du matérialisme, un homme comme Diderot pouvait donc ne pas s’éteindre tout entier, tant il était bouillonnant !

1056. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « Stendhal » pp. 43-59

Daru, frappé d’un détail qui aurait frappé aussi Napoléon, car il révélait l’homme tout entier qu’était Stendhal ; et, en effet, à part la petite terreur d’être dupe, rapportée des salons, et que lui a reprochée si spirituellement M.  […] Mérimée, ne craignait pas la mort, mais il n’aimait pas à en parler, la tenant pour une chose sale et vilaine plutôt que triste. » En se laissant saisir par la glace du matérialisme, un homme comme Diderot pouvait donc ne pas s’éteindre tout entier, tant il était bouillonnant !

1057. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XXXVII. Des éloges en Italie, en Espagne, en Angleterre, en Allemagne, en Russie. »

Ils ont négligé la tragédie, destinée à peindre les passions et les hommes, et se sont livrés tout entiers à l’opéra, qui d’un bout à l’autre est le spectacle des sens. […] L’église entière et huit chapelles étaient décorées avec la même magnificence.

1058. (1874) Premiers lundis. Tome I « Mémoires de mademoiselle Bertin sur la reine Marie-Antoinette »

Quoi qu’il en soit de tant d’opinions diverses, et sur cette affaire en particulier, et sur la vie entière de Marie-Antoinette, on ne pourra du moins refuser des vertus à cette princesse qui montra tant d’affabilité sur le trône et de dignité dans le malheur.

1059. (1902) L’observation médicale chez les écrivains naturalistes « Introduction »

⁂ Notre étude pivotera tout entière autour du document humain (pathologique) et comprendra l’analyse : 1° Des qualités nécessaires à la recherche de ce document humain.

1060. (1866) Petite comédie de la critique littéraire, ou Molière selon trois écoles philosophiques « Première partie. — L’école dogmatique — Chapitre IV. — Molière. Chœur des Français » pp. 178-183

Ses personnages, élevés du particulier au général, résument en eux des catégories entières ; ils participent de la nature immuable et essentielle de l’homme, un hypocrite a quelque chose de l’hypocrisie absolue, un jaloux, quelque chose de la jalousie absolue ; leur nom propre devient un substantif commun ; ils sont de tous les pays, et demeurent à jamais contemporains des générations qui se succèdent246.

1061. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — B — Barbey d’Aurevilly, Jules (1808-1889) »

Mais c’est que toutes les facultés de ce rare talent se font équilibre et se tiennent d’une étroite manière ; et, même à l’occasion de ces feuilles légères des Memoranda, c’est ce talent tout entier qu’il convient d’évoquer… Quoi qu’il en soit des causes dont ces habitudes ont été l’effet visible, il est certain que, pareil à ce lord Byron qu’il aime tant, M. d’Aurevilly aura vécu dans notre dix-neuvième siècle à l’état de révolte permanente et de protestation continue… M. d’Aurevilly est, au plus beau et au plus exact sens de ce mot, un poète, — un créateur ; même sa poésie est aussi voisine de celle des Anglais que sa Normandie est voisine de l’Angleterre.

1062. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — M — Montesquiou, Robert de (1855-1921) »

Remy de Gourmont Avec la moitié des Hortensias bleus, on ferait un tome, encore très dense, qui serait presque tout entier de fine ou de fière ou de douce poésie.

1063. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — T — Tailhède (Raymond de la) = La Tailhède, Raymond de (1867-1938) »

Le livre ouvert par le principal poème qui a donné son titre au volume entier, contient, en outre, quatre odes, quatre sonnets et trois hymnes.

1064. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Deuxième partie. Ce qui peut être objet d’étude scientifique dans une œuvre littéraire — Chapitre VII. Objections à l’étude scientifique d’une œuvre littéraire » pp. 81-83

Mais que de choses nous manquent encore pour avoir une connaissance pleine et entière d’un individu !

1065. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — C — article » pp. 521-526

Il est aisé de présumer que ceux mêmes à qui elles ont été adressées, n’ont pas eu le courage de les lire en entier.

1066. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Troisième partie. Beaux-arts et littérature. — Livre second. Philosophie. — Chapitre V. Moralistes. — La Bruyère. »

quelle force invincible et accablante de témoignages rendus successivement et pendant trois siècles entiers par des millions de personnes les plus sages, les plus modérées qui fussent alors sur la terre, et que le sentiment d’une même vérité soutient dans l’exil, dans les fers, contre la vue de la mort et du dernier supplice ! 

1067. (1909) Les œuvres et les hommes. Philosophes et écrivains religieux et politiques. XXV « Pierre Mancel de Bacilly »

Mais, pour nous qui venons de le lire avec attention tout entier, nous dirons encore davantage.

1068. (1922) Gustave Flaubert

Le seul de ses amours qui ait pu passer entier dans sa littérature est son amour de Trouville. […] Pour le moment, il s’est voué tout entier à une œuvre, à sa Bovary. […] Mais quand Flaubert a-t-il vraiment composé dans une joie entière ? […] Et cette existence nue devient pour elle l’existence tout entière en tant que fardeau. […] Il est tout entier dans l’exposition du roman, dans la montée passive sur la Seine.

1069. (1882) Autour de la table (nouv. éd.) pp. 1-376

Pour vous faire agréer mes réflexions, il faut que je vous dise et que je vous fasse agréer aussi l’entière liberté de choix, le manque absolu de méthode avec lesquels on procède ici. […] Il me tardait, ce soir-là, d’être seul et de lire l’ouvrage en entier. […] Quand la sienne est foncièrement belle et magnanime, ses amertumes passent, Dieu les dissipe, et l’humanité toute entière reçoit le bienfait de son inspiration. […] » Cette objection si simple vous est apparue d’avance au spectacle du grand combat auquel la création terrestre tout entière sert d’arène. […] Qu’est la série entière des siècles, que l’histoire nous révèle ?

1070. (1885) Le romantisme des classiques (4e éd.)

Ainsi je serais tenté de dire que l’humanité tout entière travaille aux chefs-d’œuvre, longtemps avant et longtemps après l’artiste qui les produit. […] Cinq cents gentilshommes font plus qu’une brigade ; il y a des régiments entiers qui n’en ont pas davantage ; etc. […] Tàlbot Si tu vis, ton père ne meurt pas tout entier. […] Les destinées de notre théâtre, de notre poésie tout entière, du génie français lui-même, eussent été changées. […] Toujours est-il que Rotrou, dans plusieurs passages de Saint Genest, comme dans Venceslas presque tout entier, se montre le digne émule de son ami.

1071. (1826) Mélanges littéraires pp. 1-457

Quoiqu’il fût peu riche, il avait fondé une école pour les petits Français expatriés, et il y passait des journées entières à admirer l’esprit et la vivacité de ces enfants. […] « Le monde entier s’ouvrait devant eux. […] Sa vie entière se présente comme une de ces années orageuses et frappées de stérilité, où l’on dirait que le cours des saisons et l’ordre de la nature sont intervertis. […] Mais si vous ne pouvez trouver cet ordre de citoyens généreux, n’accusez plus en particulier les favoris des muses : gémissez sur l’humanité toute entière. […] Sur cent cinquante villages que l’on comptait au bord du Nil, en remontant de Rosette au Caire, il n’y en a pas un seul qui soit entier.

1072. (1905) Propos de théâtre. Deuxième série

Quelquefois même, la pièce tout entière, sans qu’on sache pourquoi, est condamnée à la répétition générale et est un triomphe à la première. […] L’habitude vient de suivre toute la nature, de dire d’elle tout entière : « Qu’elle nous soit chère !  […] Il est tout entier, — tenez ! […] Est commerçant qui veut : la loi laisse tout faire ; Sous ce rapport au moins entière liberté. […] Il était littéralement le théâtre tout entier de son temps.

1073. (1906) Propos de théâtre. Troisième série

Ils nous la présentent tout entière. […] Et quelle apparence de leur donner d’autres intérêts que cette fameuse haine qui les occupait tout entiers ? […] Elle remplit l’acte tout entier, à bien peu près. […] Il aime ses amis et même l’humanité entière. […] — Le vieillard est entier. — Le jeune homme encore plus !

1074. (1835) Critique littéraire pp. 3-118

Amaury se jette dans cette fange, sans regarder la place où il tombe ; il s’y plonge tout entier, sans ivresse, sans remords, poussé par un instinct aveugle et brutal. […] Périclès, Auguste, Luther, Louis XIV, Voltaire, voilà des noms d’un sens immense ; chacun d’eux réfléchit l’éclat, la grandeur, la puissance, l’esprit tout entier du siècle qu’il représente. […] Les sens n’ont plus de rôle à jouer dans ce drame qui a les deux plus grands royaumes de la terre pour théâtre, et pour spectateurs le monde entier. […] Leur puissance n’est pas là ; elle est presque tout entière dans l’esprit civilisateur et dans l’habileté administrative qui caractérisent cette nation. […] Il parcourut, sous le feu des tropiques ou sous l’ombrage pestilentiel des bois, toute la longueur de cette île meurtrière, à la recherche de quelques lambeaux de ces terrains, dont l’étude et l’analyse le courbaient douloureusement pendant des jours entiers.

1075. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Jean-Jacques Ampère »

Il lui fut donné pendant des années, et sauf quelques intervalles de congé et d’école buissonnière qu’il avait besoin de s’accorder de temps en temps88, de parcourir en entier plusieurs fois toutes les périodes, tous les stades de notre histoire littéraire depuis les origines latines et romanes jusqu’au xviiie  siècle. […] Il ne sut pas se dire que ce peu de débit était inévitable, que l’œuvre ne pouvait prendre sur le public et commander l’attention que quand elle serait à son milieu, en pleine période française, et qu’alors, seulement alors, mais certainement aussi, elle se classerait en entier d’un même cran et d’un même niveau. […] Depuis, Tocqueville m’avait écrit, comme à l’ordinaire, les lettres les plus rassurées, toujours d’une grâce d’amitié charmante, et témoignant d’une entière liberté d’esprit. […] J’éprouve aujourd’hui presque des remords de n’avoir pas insisté davantage, en 1822, quand je possédais pleinement le cœur de Fauriel, pour qu’il abandonnât cet ouvrage historique (l’Histoire de la Gaule méridionale) auquel il convenait imparfaitement, et se consacrât tout entier à la poésie primitive, spontanée, populaire, de tous les temps et de tous les pays. […] Ces dix années, de 45 à 55, ont été fort mêlées et entrecoupées ; mais les précédentes, de 33 à 45, avaient été entières.

1076. (1867) Cours familier de littérature. XXIV « CXLe entretien. L’homme de lettres »

Obligé de vivre de peu, il passait les jours entiers dans sa chambre, cherchant à s’absorber par l’étude des mathématiques. […] On l’en dépossède au moment où il allait la récolter ; il parcourt l’île entière pour en faire une géographie exacte. […] Dans les villes d’Europe, une rue, un simple mur, empêchent les membres d’une même famille de se réunir pendant des années entières ; mais dans les colonies nouvelles, on considère comme ses voisins ceux dont on n’est séparé que par des bois et des montagnes. […] De loin, je la crus seule ; et m’étant avancé vers elle pour l’aider à marcher, je vis qu’elle tenait Paul par le bras, enveloppé presque en entier de la même couverture, riant l’un et l’autre d’être ensemble à l’abri sous un parapluie de leur invention. […] L’esclave, en peu de moments, le dévora tout entier.

1077. (1898) Manuel de l’histoire de la littérature française « Livre II. L’Âge classique (1498-1801) — Chapitre premier. La Formation de l’Idéal classique (1498-1610) » pp. 40-106

Il y fallait cette conséquence de la prise de Constantinople par le Turc : la dispersion de l’élément grec à travers l’Europe entière du quinzième siècle. […] Ils veulent dire tous les deux que, dans la nature, notre imagination ne trouve jamais de satisfaction entière ; que rien de naturel, en aucun genre, n’épuise l’idée que nous nous formons de sa perfection ; et qu’ainsi nous y pouvons toujours ajouter quelque chose de notre fonds. […] Ce grand liseur est un grand pillard, et il n’a pas toujours indiqué tous ses larcins, en vérité comme s’il eut craint que son livre n’y fondit tout entier. […] Elles sont deux : l’italienne d’abord, qui, sous le long règne de la mère de trois rois, s’est étendue de la littérature à la langue, et de la langue aux mœurs ; et en second lieu l’espagnole, dont le progrès dans l’Europe entière a suivi les progrès de la politique ou des armes de Charles-Quint et de Philippe II. […] Nous n’avons pu réussir à retrouver les dates précises de la première publication des Œuvres séparées de Du Vair ; et nous devons faire observer que, par exemple, on assigne à ses Traités philosophiques la date de 1606, qui est certainement erronée, puisqu’on en trouve des passages entiers dans La Sagesse de Charron, qui est mort en 1603.

1078. (1902) La formation du style par l’assimilation des auteurs

La nef pirouetta tout entière, frappée du tonnerre de Jupiter, et elle se remplit de soufre : mes compagnons tombèrent du vaisseau. […] Rousseau avait transmis ce sens déjà coloré de la nature, le procédé descriptif de Chateaubriand et son vocabulaire d’écrivain tout entier. […] Quelquefois son disque tout entier paraissait à l’extrémité d’une avenue, et la Tendait toute étincelante de lumière. […] Lisez ceci : Paris entier était allumé. […] Étudions un dernier exemple : Un peuple entier se soumet à la tyrannie.

1079. (1901) Figures et caractères

Il a un haut sens des intérêts communs à l’humanité tout entière. […] Le style classique tout entier repose sur cette donnée. […] Le poème tout entier l’exalte. […] La nature entière lui est soumise. […] Se dire tout entier.

1080. (1896) Les Jeunes, études et portraits

C’est le cas pour les préraphaélites anglais ; aussi en a-t-il parlé avec une entière sympathie et en toute chaleur de cœur. […] Trop généreux pour se réserver ils s’engagent tout entiers et n’exigent pas moins qu’ils ne donnent. […] Et il semble d’abord qu’ils soient récompensés de leur bonne volonté et que l’entier pardon leur ait rendu le bonheur. […] Car il y a une solidarité entre les hommes et chacun porte en soi le dépôt de l’humanité tout entière. […] Si petite que soit cette blessure, elle est assez grande pour que son âme y passe tout entière.

1081. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Académie française — Réception de M. Ponsard » pp. 301-305

Ponsard, le directeur a très finement indiqué ce qu’elles laissent à désirer quelquefois pour l’entière vérité des personnages.

1082. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « LXXII » pp. 286-290

Je n’ai jamais eu qu’une idée, c’est que tous mes ouvrages posthumes parussent en entier, et non par livraisons détachées, soit dans un journal, soit ailleurs.

1083. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — A — Aubanel, Théodore (1829-1886) »

Elle s’écoula presque tout entière en Avignon, comme on dit là-bas, où il était né et où il mourut, après y avoir vécu cinquante-sept ans (1829-1886)… Son œuvre offre partout la clarté native du génie latin.

1084. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — S. — article » pp. 240-246

On est fâché que cette Histoire ne soit qu'un Fragment, & que la paresse de l'Auteur ne lui ait pas permis de la finir en entier.

1085. (1885) Préfaces tirées des Œuvres complètes de Victor Hugo « Préfaces des pièces de théâtre — Préface d’« Angelo, tyran de Padoue » (1835) »

Aujourd’hui, en présence d’un succès dû évidement à cette pensée et qui a dépassé toutes ses espérances, il sent le besoin d’expliquer son idée entière à cette foule sympathique et éclairée qui s’amoncelle chaque soir devant son ivre avec une curiosité pleine de responsabilité pour lui.

1086. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre premier. Vue générale des épopées chrétiennes. — Chapitre II. Vue générale des Poèmes où le merveilleux du Christianisme remplace la Mythologie. L’Enfer du Dante, la Jérusalem délivrée. »

Le Tasse eût parcouru le cercle entier des caractères de femmes, s’il eût représenté la mère.

1087. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Première partie — Section 43, que le plaisir que nous avons au théatre n’est point produit par l’illusion » pp. 429-434

Ainsi quand nous voïons une belle tragédie, ou bien un beau tableau pour la seconde fois, notre esprit est plus capable de s’arrêter sur les parties d’un objet qu’il a découvert et parcouru en entier.

1088. (1900) Taine et Renan. Pages perdues recueillies et commentées par Victor Giraud « Taine — I »

Taine tout entier comme étant l’homme de la méthode dite l’analyse.

1089. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre cinquième. Retour des mêmes révolutions lorsque les sociétés détruites se relèvent de leurs ruines — Chapitre III. Coup d’œil sur le monde politique, ancien et moderne, considéré relativement au but de la science nouvelle » pp. 371-375

L’Europe entière est soumise à la religion chrétienne, qui nous donne l’idée la plus pure et la plus parfaite de la divinité, et qui nous fait un devoir de la charité envers tout le genre humain.

1090. (1885) Préfaces tirées des Œuvres complètes de Victor Hugo « Préfaces des pièces de théâtre — Préface de « Cromwell » (1827) »

Ainsi voilà un principe étranger à l’antiquité, un type nouveau introduit dans la poésie ; et, comme une condition de plus dans l’être modifie l’être tout entier, voilà une forme nouvelle qui se développe dans l’art. […] Ce que nous appelons le laid, au contraire, est un détail d’un grand ensemble qui nous échappe, et qui s’harmonise, non pas avec l’homme, mais avec la création tout entière. […] D’ailleurs nous avons déjà fait voir que la prodigieuse étendue de la scène antique lui permettait d’embrasser une localité tout entière, de sorte que le poëte pouvait, selon les besoins de l’action, la transporter à son gré d’un point du théâtre à un autre, ce qui équivaut bien à peu près aux changements de décorations. […] Il n’y a ni règles, ni modèles ; ou plutôt il n’y a d’autres règles que les lois générales de la nature qui planent sur l’art tout entier, et les lois spéciales qui, pour chaque composition, résultent des conditions d’existence propres à chaque sujet. […] Tant mieux ; la liberté du poëte en est plus entière, et le drame gagne à ces latitudes que lui laisse l’histoire.

1091. (1870) De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés « De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés — Chapitre VI : Difficultés de la théorie »

De plus, chaque espèce sur les confins de son habitat, où elle existe en moindre nombre, doit, en vertu des fluctuations du nombre de ses ennemis, de la quantité de ses moyens de subsistance ou des saisons plus ou moins extrêmes, être fréquemment exposée à une entière extinction ; de sorte que les limites de son extension géographique en deviennent encore plus rigoureusement définies. […] Si l’on pouvait démontrer qu’il existe un seul organe si compliqué qu’il ne puisse avoir été formé par une série de modifications légères, nombreuses et successives, ma théorie s’écroulerait tout entière. […] Les effets d’une diminution d’exercice avec un accroissement de nourriture doivent être plus importants encore sur l’organisation tout entière ; et, selon que l’a démontré dernièrement H. […] Nous ne pouvons douter, en voyant la chasse incessante de l’oiseau à la surface des mers, que l’accroissement de cet ordre et son adaptation de plus en plus parfaite à une vie à la fois aérienne et nautique, analogue à celle de la Frégate, n’ait contribué pour beaucoup à la disparition d’ordres entiers de mollusques ou de crustacés nageurs. […] Robin, le savant professeur d’histologie à la Faculté de médecine de Paris, ont établi récemment que l’appareil observé chez les Raies est également producteur d’électricité, et que désormais ce genre entier doit être compris dans le nombre des poissons électriques.

1092. (1845) Simples lettres sur l’art dramatique pp. 3-132

Apportant son pinceau d’artiste en aide à la plume du poète, il dessinait, avec un égal amour, la chlamyde de Léonidas, la cuirasse du duc de Guise, ou le pourpoint d’Hernani ; contemporain de tous les âges qu’il avait étudiés, citoyen du monde entier qu’il avait parcouru, pas un détail de mœurs, de costume, d’armure ne lui était inconnu ; pas un site historique ou pittoresque ne lui était étranger. […] « Si cette comédie n’a pas eu le sort que lui promettaient les prédictions unanimes de la répétition, je ne puis accuser les acteurs, dont le talent et le zèle m’ont au contraire prêté un appui dont je suis vivement reconnaissant, et qui m’a aidé dans la lutte de tous les jours que j’ai eu à soutenir contre la malveillance préméditée de l’administration du théâtre, concentrée aujourd’hui tout entière dans la personne de M.  […] Isabeau de Bavière tout entière y passa. […] Buloz, qui en avait acheté à l’auteur la propriété tout entière. […] Buloz, l’auteur de Saül, de Clytemnestre, de Jeanne d’Arc, de Norma, de la Fête de Néron, du Gladiateur, de la Divine Épopée, le poète qui partage le trône de la poésie avec Hugo et Lamartine ; l’homme dont la vie entière a été un dévouement à l’art dramatique, a été chassé par vous, c’est le terme dont Soumet s’est servi ce matin même, a été chassé par vous du Théâtre-Français.

1093. (1888) Études sur le XIXe siècle

Je ne sais, mais il est très réel, et le public anglais presque tout entier l’a éprouvé : ce n’est pas pour rien que Holman Hunt est, plus peut-être qu’aucun autre, un peintre national. […] Enfin, le dernier grand mouvement artistique de l’Allemagne, dont Wagner est jusqu’à présent la seule incarnation, repose tout entier sur des théories depuis longtemps esquissées. […] C’est donc à un simple poète qu’un peuple entier, unanime et recueilli, a rendu un hommage jusqu’à présent réservé aux seuls souverains, et il faut saluer ce fait comme un glorieux triomphe pour les lettres. […] Ce germe brûlant n’aurait-il pas son entier développement ? […] « L’art n’est pas destiné à un petit nombre de savants et d’érudits ; il s’adresse à la nation tout entière.

1094. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome III pp. -

L’Europe entière s’entretint longtemps de ces sçavans débats. […] L’Italie entière s’occupa de ce démêlé. […] Jusques à quand, ô capucins, en imposerez-vous au monde entier ? […] L’Europe entière retentit de leurs plaintes, sur la fausseté de la date. […] Ce sanctuaire du jansénisme réduit, le jansénisme entier tomboit naturellement.

1095. (1870) Portraits contemporains. Tome IV (4e éd.) « M. THIERS. » pp. 62-124

Le passage est un peu long, mais il ne semblera point tel, nous l’espérons, à qui l’aura lu en entier. […] On ne nous saura pas mauvais gré de représenter ici la noble page tout entière : « Jours à jamais célèbres et à jamais regrettables pour nous ! […] Le commerce et les finances sortaient d’une crise épouvantable ; le sol entier, restitué à des mains industrieuses, allait être fécondé. […] Or, dans cette révolution anglaise, que nous connaissons tout entière, y eut-il deux soulèvements populaires ? […] Le livre second tout entier est consacré au mécanisme nouveau de la réorganisation départementale, judiciaire, financière, « à cette œuvre de réorganisation, est-il dit, dont le jeune général faisait son occupation constante, dont il voulait faire sa gloire, et qui, même après ses prodigieuses victoires, est restée, en effet, sa gloire la plus solide. » Dans cet exposé multiple, l’historien a fait usage, comme on pense bien, de toutes les ressources lumineuses qu’on lui connaît, mais il les a poussées à leur dernier terme.

1096. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MADAME DE CHARRIÈRE » pp. 411-457

Il me semble qu’un volume entier de titres ne me ferait pas envier ce jour-ci : il faut bien autre chose pour compenser ce qu’un engagement éternel a d’effrayant. […] Meyer sera l’âme de la vie entière de ton amie, ou si je n’aurai fait qu’un petit rêve agréable, qui m’aura amusé pendant un mois ; ce sera l’un ou l’autre, et quelques moments décideront lequel des deux. […] De l’esprit, des talents, des lumières, rien ne vous réconcilierait avec un homme de cette trempe ; il faut voir en un homme, pour le pouvoir estimer, que quelque chose lui paraît être bien, quelque chose être mal ; il faut voir en lui une moralité quelconque. » Ainsi parle à la jeune baronne de Berghen cet aimable et sceptique abbé de La Tour, qui trouve peu sur pour son repos de passer un hiver entier à Altendorf, près de Constance. […] Pour l’entière exactitude bibliographique, je dois dire que le titre de Caliste ou Lettres écrites de Lausanne n’appartient qu’aux éditions postérieures à la première : celle-ci s’intitulait simplement au premier volume Lettres écrites de Lausanne, et au second Caliste ou Suite des Lettres, etc. ; les deux titres se sont bientôt confondus. […] On la peut lire tout entière dans la Chrestomathie de M.

1097. (1868) Cours familier de littérature. XXV « CXLVe entretien. Ossian fils de Fingal »

Campbell, auteur d’un ouvrage savant et classique, regarde comme hors de doute que les poëmes attribués à Ossian existaient, et étaient généralement connus dans la haute Écosse avant que Macpherson essayât pour la première fois de les traduire ; qu’ils n’étaient de son invention ni dans leur entier ni dans leurs parties principales ; qu’ils n’étaient nullement le produit d’une fraude littéraire, mais que le traducteur, aidé de quelques coopérateurs, les avait recueillis et arrangés dans une forme systématique, et les avait ainsi traduits et offerts au public. […] Mais, pour exprimer la nature entière, l’un n’est pas moins nécessaire que l’autre ; la pleine lumière est le jour d’Homère, l’ombre et les nuages sont le crépuscule d’Ossian. […] Trois jours entiers nous renouvelâmes le combat ; nos guerriers restaient à l’écart, immobiles et tremblants. […] » « Trois jours entiers, elle le fatigua de ses larmes ; le quatrième, il consentit à combattre. […] Enfants de l’île Solitaire, trois jours entiers vous célébrerez la fête dans mon palais ; vous poursuivrez trois jours les sangliers de mes bois, afin que votre renommée puisse pénétrer jusqu’aux demeures secrètes où habite la jeune Agandecca. » « Le roi des Neiges méditait leur mort en leur donnant la fête de l’amitié.

1098. (1856) Jonathan Swift, sa vie et ses œuvres pp. 5-62

Mais déjà, j’ose le dire, l’objet de Swift était rempli ; il avait exercé sur mon imagination enfantine l’influence qu’il voulait produire sur celle des hommes ; le miel dont il avait entouré sa coupe me l’avait fait vider tout entière. […] Les ministres whigs, Halifax, Orford, Somers, et l’ami de Guillaume, Bentinck, comte de Portland, venaient d’être mis en accusation par la Chambre des Communes, pour avoir signé le traité de partage de la monarchie Espagnole, que le testament de Charles II venait de donner tout entière à la France. […] Swift racontait l’histoire d’un duc qui, jouant à un jeu de hasard, entassait devant lui des monceaux d’or, et tout entier au jeu, n’apercevait pas derrière lui un voleur qui, passant la main sous son bras, faisait tomber l’or dans son chapeau. […] Quatre ans après cette tentative, il saisissait avec une audace inouïe et un art admirable l’occasion de la soulever tout entière. […] Mais l’île des Houyhnhnms est l’abîme où l’humanité s’engloutit tout entière ; les arts, les lois, les mœurs, la religion, la raison même, tout succombe ; la beauté s’avilit, l’amour fait horreur, et après cette universelle dégradation de tout ce qui peut occuper, charmer, élever l’homme sur la terre, on n’est plus surpris de voir le voyageur qui est rejeté parmi le genre humain, au sortir d’une telle épreuve, se voiler la face et refuser de voir des hommes.

1099. (1853) Histoire de la littérature dramatique. Tome II « Chapitre VI » pp. 394-434

À Dieu ne plaise que nous tentions d’écrire ici la vie entière de mademoiselle Mars ; un chapitre complet dans ce livre… et notre livre serait perdu, tant ce chapitre au grand complet, serait la satire de tous les autres. Notre lecteur se contentera de beaucoup moins, je l’espère, et s’il veut mademoiselle Mars tout entière, eh bien, qu’il la cherche çà et là, répandue à chacune de ces pages, et des pages qui viendront, plus tard, comme on ramasse, dans un jardin cultivé sans ordre, les diverses fleurs dont se compose un bouquet ! […] Elle était comme cet empereur romain qui voulait mourir debout, et dans l’exercice entier de sa majesté. […] Or, de tous les artistes de ce temps-ci, l’artiste qui a duré le plus longtemps, qui a vécu d’une vie à la fois plus entière et plus hautaine, à coup sûr, c’est mademoiselle Mars. […] Quand tout a été dit, la salle entière a voulu revoir mademoiselle Mars.

1100. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Seconde partie — Section 13, qu’il est probable que les causes physiques ont aussi leur part aux progrès surprenans des arts et des lettres » pp. 145-236

Nous avons encore un volume entier de ses poësies sous le nom de Marguerites françoises. […] On suppose donc que les inondations des barbares, suivies du bouleversement entier de la societé par tout où ils s’établirent, ôterent aux peuples conquis les commoditez necessaires pour cultiver les lettres et les arts, et même l’envie de le faire. […] Telles sont les guerres des turcs et des chrétiens où le peuple entier court encore de plus grands dangers que ceux où les soldats sont exposez dans les guerres ordinaires. […] Les tumultes des cohortes prétoriennes n’ont pas empêché qu’il n’y eut de grands peintres, de grands sculpteurs, de grands orateurs et de grands poëtes, puisqu’ils n’empêchoient pas qu’il ne s’y trouvât un peuple entier d’artisans médiocres. […] La Grece depuis la mort d’Alexandre jusqu’à son assujetissement aux romains, n’essuïa point cependant de ces guerres qui sont capables de faire oublier durant des siecles entiers les lettres et les arts.

1101. (1911) Lyrisme, épopée, drame. Une loi de l’histoire littéraire expliquée par l’évolution générale « Appendices » pp. 235-309

Abstraction faite des cas individuels et des réminiscences inconscientes, il y a aussi des façons d’emprunter qui sont communes à une génération entière. […] Dès lors son œuvre littéraire s’explique tout entière, et ses « plagiats » apparaissent sous un jour particulier. […] Car D’Annunzio n’a aucun besoin de concentration ; non content de mener de front un hymne à la terre, un roman et une tragédie, il conçoit ses œuvres par séries entières. […] La volupté féroce, sanguinaire, avec arrière-goût d’inceste et de sadisme pénètre de plus en plus l’œuvre de D’Annunzio ; elle s’étale dans La Nave tout entière, jusque dans les indications scéniques ! […] L’histoire, dit-il, donnait la vraisemblance aux aventures extraordinaires du théâtre cornélien ; en outre, « si l’histoire n’est que le spectacle du conflit des volontés entre elles, ou du combat de la volonté contre la force des choses, voilà pourquoi l’histoire est devenue naturellement l’inspiratrice d’un théâtre fondé tout entier, comme celui de Corneille, sur la croyance au pouvoir de la volonté55 ».

1102. (1928) Quelques témoignages : hommes et idées. Tome II

La page vaut d’être citée tout entière. […] Cette science épouse-t-elle tout entière la réalité ? […] Mais observer avec une entière soumission à l’objet, qu’est-ce autre chose qu’une application du grand principe scientifique ? […] Une seconde catégorie de mémoires, ceux des témoins qui n’ont pas été acteurs, méritera-t-elle confiance plus entière ? […] La tentation de la guerre préventive travaille déjà le peuple tout entier et son chef qui ne fait qu’un avec lui.

1103. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « M. RODOLPHE TÖPFFER » pp. 211-255

Celui-ci se sentait peintre en effet, et aurait voulu en commencer l’apprentissage incontinent : le père tint bon et exigea qu’avant de s’y livrer, son fils eût achevé le cours entier de ses études. […] Les chapitres sur la flânerie qui ouvrent la Bibliothèque de mon Oncle sont, comme il le dit agréablement, l’histoire fidèle des plus grands travaux de son adolescence : « Oui, la flânerie est chose nécessaire au moins une fois dans la vie, mais surtout à dix-huit ans au sortir des écoles… Aussi, un été entier passé dans cet état ne me paraît pas trop dans une éducation soignée. […] Il oublie l’heure ; les portes de la ville se ferment, et il est obligé de passer la nuit entière en proie aux terreurs. […] En achevant cette lecture d’un auteur chez qui la littérature est née tout entière des habitudes morales et du foyer de la vie, est-ce une conclusion purement critique que je suis tenté d’y rattacher ?

1104. (1860) Cours familier de littérature. IX « LIIe entretien. Littérature politique. Machiavel » pp. 241-320

Voici une des dernières lettres confidentielles d’un homme d’État qui a été le plus grand écrivain politique de l’Italie moderne tout entière. […] « Pendant quatre heures de temps que dure cet entretien avec les morts, je ne sens plus aucun de mes soucis, j’oublie toutes mes angoisses, je ne crains plus ma pauvreté, je ne m’épouvante plus de la mort ; je me transfigure en eux tout entier, et, comme dit Dante, “qu’aucune science ne mérite ce nom si on ne retient pas ce qu’on a appris”, j’ai noté de ces entretiens avec ces hommes antiques tout ce que j’ai recueilli de capital et de caractéristique dans leur vie et dans leurs pensées, et j’en ai composé un opuscule intitulé des Gouvernements, ouvrage dans lequel je pénètre aussi profondément que je le peux dans les pensées qu’un tel sujet comporte, agitant en moi-même ce que c’est que la souveraineté, de combien d’espèces de souverainetés le monde se compose, comment elles s’acquièrent, comment elles se conservent, pourquoi elles se perdent ; et si jamais quelques-unes de mes rêveries vous ont plu, celle-ci, je le crois, ne devra pas vous déplaire ; et elle pourrait être acceptable surtout à un prince nouveau (allusion aux Médicis, rentrés maîtres de Florence, à qui il espérait plaire par cette haute leçon de gouvernement) : c’est pour cela que l’ai dédiée à la magnificence (majesté) de Julien. […] Il explique avec une sagacité véritablement divine la pensée ou la passion des personnages, rois, consuls, magistrats ou peuple, qui amenèrent, dans tel ou tel but, telles ou telles vicissitudes dans les destinées du peuple romain ; il montre comment de l’événement accompli devait nécessairement découler tel autre événement par la seule fatalité des grands esprits, la fatalité des conséquences ; il refait l’histoire romaine tout entière avec une lucidité rétrospective qui éclaire mille fois mieux les faits que l’historien romain lui-même. […] Sans nous étendre sur les événements trop souvent microscopiques qui composent l’histoire de la Toscane, cette Athènes de l’Arno, aussi illustre et aussi dramatique que l’Athènes du Céphise, jetons un regard seulement sur les fondements de cette histoire où Machiavel décompose et recompose en quelques pages l’Italie tout entière ; cette anatomie, aussi savante que lucide, rappelle tout à fait, par sa structure fruste mais indestructible, ces monuments cyclopéens qui portaient des temples ou des villes, et qu’on rencontre encore çà et là sur les collines de l’antique Étrurie.

1105. (1831) Discours aux artistes. De la poésie de notre époque pp. 60-88

C’est ainsi que le monde tout entier, en y comprenant l’art, qui en fait partie au même titre que les monuments naturels auxquels il s’ajoute, devient symbolique. […] C’est dire qu’entre l’industrie et l’art il y a l’homme tout entier. […] La poésie est cette aile mystérieuse qui plane à volonté dans le monde entier de l’âme, dans cette sphère infinie dont une partie est couleurs, une autre sons, une autre mouvements, une autre jugements, etc., mais qui toutes vibrent en même temps suivant certaines lois, en sorte qu’une vibration dans une région se communique à une autre région, et que le privilège de l’art est de sentir et d’exprimer ces rapports, profondément cachés dans l’unité même de la vie. […] D’ailleurs les grandes métamorphoses de l’Humanité ne se font pas si vite qu’il ne reste longtemps des masses d’hommes et des peuples entiers aux défenseurs des religions déchues : si la France leur échappe, il leur reste l’Espagne, la Belgique, l’Irlande : ainsi, quand les villes échappaient aux dieux du Paganisme, les habitants des bourgs devinrent les païens.

1106. (1887) Revue wagnérienne. Tome II « Paris, le 8 mars 1886. »

Ainsi considérée, on peut voir dans chacune de ses notes le monde entier que les fakirs trouvent toujours dans la contemplation de leur nombril ; l’admiration qu’on a pour Wagner, et qu’on lui doit, ne peut pas être le monopole de quelques vieilles dames empaillées et de quelques jeunes gens aux sens déviés, minés par la névrose ; Wagner nous appartient à tous et sa gloire est indépendante des nôtres ; l’Art français doit bénéficier de ses progrès en les appropriant à son génie national, sans emprunt, sans imitations. […] Dans les stalles le public sera debout, tout entier aux clameurs de la rue. […] Mais moi, bonhomme, qui vais au théâtre pour mon plaisir et qui le prends où je le trouve, je suis la nation tout entière. […] Le Tannhaeuser déplut parce qu’on l’imposa tout entier aux oreilles françaises.

1107. (1856) Cours familier de littérature. I « Ier entretien » pp. 5-78

Je pourrais la copier ici tout entière ; je me contente de l’abréger sans y rien changer. […] Et je n’ouvris jamais dans un autre âge le tiroir du secrétaire de ma mère sans la relire tout entière avec une certaine satisfaction de ma précocité. […] venait à arrêter un moment ma plume, l’outil assidu que j’use pour eux, ces braves amis péricliteraient avec moi ; ils seraient obligés de chercher dans mes cendres leur fortune ; ils la retrouveraient tout entière, sans doute, mais ils ne la retrouveraient que sous mes démolitions. […] je sais aussi bien que vous ce qu’il vaut et ce qui l’attend ; je voudrais de tout mon cœur (le Ciel m’en est témoin) qu’il n’eût jamais été prononcé ; je donnerais ce qui me reste de jours pour qu’il fût déjà enseveli tout entier, avec celui qui l’a porté, dans le silence de la terre, sans bruit là-bas, sans mémoire ici !

1108. (1856) Cours familier de littérature. I « VIe entretien. Suite du poème et du drame de Sacountala » pp. 401-474

C’est en vain qu’il cherche le repos sur sa couche tourmentée, où, durant la nuit entière, il ne peut goûter un seul instant les douceurs du sommeil. […] Instruite actuellement de la vérité tout entière, tu ne dois plus conserver le moindre ressentiment pour un époux qui, de sa pleine volonté, n’eût jamais cessé de te chérir. […] Sache que cet enfant est destiné à se rendre un jour, par sa valeur, maître du monde entier. […] Le nombre immense des spectateurs comprenant, comme à Athènes ou à Rome, le peuple entier d’une ville, excluait les théâtres murés pour ces représentations.

1109. (1919) L’énergie spirituelle. Essais et conférences « Chapitre V. Le souvenir du présent et la fausse reconnaissance »

Au contraire, la fausse reconnaissance peut ébranler la personnalité entière. […] Si l’on nous donne l’image rejetée dans le passé pour antérieure à l’image localisée dans le présent, si l’on y voit une première perception moins intense, ou moins attentive, ou moins consciente, on essaie tout au moins de nous faire comprendre pourquoi elle prend la forme d’un souvenir ; mais il ne s’agira alors que du souvenir d’un certain moment de la perception ; l’illusion ne se prolongera pas, ne se renouvellera pas, à travers la perception entière. […] Le premier, fonctionnant sans l’aide du second, percevrait automatiquement l’objet présent, et le second s’emploierait alors tout entier à considérer l’image recueillie par le premier, au lieu de regarder l’objet lui-même.  […] Il ne nous est pas aussi facile de comprimer l’élan de notre vie psychologique tout entière que celui de notre parole ; mais, là où l’élan général faiblit, la situation traversée doit paraître aussi bizarre que le son d’un mot qui s’immobilise au cours du mouvement de la phrase.

1110. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) «  Œuvres et correspondance inédites de M. de Tocqueville — II » pp. 107-121

Ceux qui se croient le plus affranchis des préjugés de naissance (et M. de Tocqueville était de ce nombre) ont à se garder d’un autre préjugé indirect bien tentant pour une âme généreuse ; c’est d’aller transporter à l’humanité tout entière les idées nobiliaires trop avantageuses qu’ils n’ont plus pour eux-mêmes. […] Molé provoqua une fort belle réponse de cet homme d’État ; je la citerai ici tout entière, parce qu’en y faisant la part d’une certaine vivacité qui tenait aux circonstances et aussi à la délicatesse chatouilleuse des deux personnes, on y trouve une leçon gravement donnée, et d’un ton fort digne ; il y respire un sentiment fort élevé de la puissance publique que M. 

1111. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Le général Joubert. Extraits de sa correspondance inédite. — Étude sur sa vie, par M. Edmond Chevrier. — I » pp. 146-160

Il a eu ce beau cadre pour carrière ; il s’y forma tout entier. […] J’attends, moi, la paix pour résultat de notre campagne d’hiver, et, dans cet espoir, je m’y livre tout entier.

1112. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Le général Joubert. Extraits de sa correspondance inédite. — Étude sur sa vie, par M. Edmond Chevrier. — III » pp. 174-189

Songez que vous êtes l’espoir de la France entière. […] Ce qu’il y eut de brave, d’intrépide, d’honnête, d’individuel en lui, a dès longtemps pâli dans l’éloignement et serait déjà effacé par la distance : son caractère plus distinct, sa marque fatale et comme sacrée est dans ce qui le rattache au grand mouvement irrésistible qui se préparait, à l’ère de rénovation vers laquelle aspirait la société tout entière.

1113. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Mélanges religieux, historiques, politiques et littéraires. par M. Louis Veuillot. » pp. 44-63

Âme robuste, entière, non usée de père en fils par l’élégance et la politesse des salons, intelligence brusque et absolue, non assouplie par la critique, non rompue aux systèmes, d’une sensibilité profonde et d’un grand besoin de tendresse au milieu de certaines grossièretés de nature, il fut atteint et renversé en même temps, retourné tout d’une pièce ; le fier Sicambre s’agenouilla : il se fit du même coup chrétien, catholique, ultramontain. […] Ces moqueries lui sortent d’abondance de cœur et se versent sur des classes entières, qui ont leurs infirmités sans doute et leurs ridicules, mais qui pourraient le rendre à la communion adverse.

1114. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Lettres de Madame de Sévigné »

Il m’a paru quelquefois à regretter que le livre destiné à devenir classique, une fois mis en lumière, une fois livré au public et imprimé, on ne détruisît pas tous les manuscrits, tous les moyens d’un contrôle éternel et toujours renaissant ; qu’il n’y eût pas un règlement définitif et un arrêté de compte qui permît ensuite à l’admiration toute sa sécurité et son entière plénitude. […] C’est tout un duel, qu’elle mène bel et bien, et de point en point, jusqu’à satisfaction entière.

1115. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Entretiens de Gœthe et d’Eckermann (suite et fin.) »

L’entretien s’animant à ce sujet, et continuant de parler de cette sorte de chanson et de son influence électrique sur les nations à certaines heures, Gœthe disait qu’il fallait pour cela qu’une nation n’eût qu’une tête et qu’un cœur et, à un moment donné, qu’une seule voix : « Mais, ajoutait-il, une poésie politique n’est aussi que l’œuvre d’une certaine situation momentanée qui passe et qui ôte à la poésie la valeur même qu’elle lui a donnée. » Il reconnaissait qu’il y avait seize ans, même dans cette Allemagne si divisée, mais unie alors dans un sentiment commun contre l’étranger, un poëte politique aurait pu exercer aussi son influence sur le pays tout entier, et il ajoutait : « Mais ce poëte était inutile : le mal universel et le sentiment général de honte avaient, comme un démon, saisi la nation ; le feu de l’inspiration qui aurait pu enflammer le poëte brûlait déjà partout de lui-même. […] Sa vie était tout entière dans la passion de chaque jour, et il ne savait pas ce qu’il faisait.

1116. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Le Mystère du Siège d’Orléans ou Jeanne d’Arc, et à ce propos de l’ancien théâtre français (suite et fin.) »

La Madeleine du Mystère ne recherche l’entière perdition que dans l’ordre de l’esprit ou des sens délicats. […] Parmi les sept démons dont on dit qu’elle fut possédée et que Jésus eut à faire sortir d’elle, il en est un, du moins, auquel elle ne s’est pas livrée tout entière, corps et âme.

1117. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Don Quichotte. »

Don Quichotte n’est déchu que par la raison ; il est entier par le cœur, par la hauteur des visées et des sentiments. […] Cromwell, qui voulut, également y aller un jour, ne partit point pour l’Amérique ; Cervantes non plus : l’Angleterre aurait perdu à l’un, — le monde entier à l’autre.

1118. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Lettres d’Eugénie de Guérin, publiées par M. Trébutien. »

Ne faisons pas comme d’autres, n’allons pas oublier, dans cette gloire posthume des deux noms, celui de l’humble éditeur à qui nous devons de les connaître en entier et de les posséder dans leur pleine auréole. […] On dirait que l’univers entier sombre dans l’abîme.

1119. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre XVII. De la littérature allemande » pp. 339-365

Tous les hommes sensibles et généreux se sont sentis quelquefois prêts d’en être atteints ; et souvent peut-être des créatures excellentes que poursuivaient l’ingratitude et la calomnie, ont dû se demander si la vie, telle qu’elle est, pouvait être supportée par l’homme vertueux, si l’organisation entière de la société ne pesait pas sur les âmes vraies et tendres, et ne leur rendait pas l’existence impossible. […] La liberté donne des forces pour sa défense, le concours des intérêts fait découvrir toutes les ressources nécessaires, l’impulsion des siècles renverse tout ce qui veut lutter pour le passé contre l’avenir : mais l’action inhumaine sème la discorde, perpétue les combats, sépare en bandes ennemies la nation entière ; et ces fils du serpent de Cadmus, auxquels un dieu vengeur n’avait donné la vie qu’en les condamnant à se combattre jusqu’à la mort, ces fils du serpent, c’est le peuple, au milieu duquel l’injustice a longtemps régné.

1120. (1796) De l’influence des passions sur le bonheur des individus et des nations « Section première. Des passions. — Chapitre VII. De l’esprit de parti. »

Des querelles frivoles, telles que des disputes sur la musique, sur la littérature, peuvent donner quelques idées légères de la nature de l’esprit de parti ; mais il n’existe tout entier, mais il n’est l’action dévorante qui consume les générations et les empires, que dans ces grands débats où l’imagination peut puiser sans mesure tous les motifs d’enthousiasme ou de haine. […] L’esprit de parti est la seule passion qui se fasse une vertu de la destruction de toutes les vertus, une gloire de toutes les actions qu’on chercherait à cacher, si l’intérêt personnel les faisait commettre ; et jamais l’homme n’a pu être jeté dans un état aussi redoutable, que lorsqu’un sentiment qu’il croit honnête, lui commande des crimes ; s’il est capable d’amitié, il est plus fier de la sacrifier ; s’il est sensible, il s’enorgueillit de dompter sa peine : enfin, la pitié, ce sentiment céleste, qui fait de la douleur un lien entre les hommes ; la pitié, cette vertu d’instinct, qui conserve l’espèce humaine, en préservant les individus de leurs propres fureurs, l’esprit de parti a trouvé le seul moyen de l’anéantir dans l’âme, en portant l’intérêt sur les nations entières, sur les races futures, pour le détacher des individus ; l’esprit de parti efface les traits de sympathie pour y substituer des rapports d’opinion, et présente enfin les malheurs actuels comme le moyen, comme la garantie d’un avenir immortel, d’un bonheur politique au-dessus de tous les sacrifices qu’on peut exiger pour l’obtenir.

1121. (1895) Histoire de la littérature française « Première partie. Le Moyen âge — Livre I. Littérature héroïque et chevaleresque — Chapitre IV. Poésie lyrique »

Tandis que la poésie antique ne connaissait que la passion physique, et, pour rendre raison de la force de l’amour, regardait le désir allumé par Vénus dans la nature entière à la saison nouvelle, la poésie moderne, par une orientation toute contraire, assimilera l’amour humain à l’amour divin et en fondera la puissance sur l’infinie disproportion du mérite au désir Même quand le terme réel de l’amour appartiendra à l’ordre le plus matériel et terrestre, la pensée et la parole s’en détourneront, et c’est à peine si, comme indice de ses antiques et traditionnelles attaches au monde de la sensation physique, il gardera ces descriptions du printemps, saison du réveil de la vie universelle ; encore ces descriptions seront-elles de moins en moins sincères et vivantes, et ne subsisteront-elles chez la plupart des poètes que comme une forme vide de sens, un organe inutile et atrophié. […] Il semble reposer tout entier sur cette gageure, de ne donner à la poésie aucun point d’appui ni dans la réalité extérieure ni dans la conscience intime.

1122. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre III. Les grands artistes classiques — Chapitre V. La Fontaine »

Par là il manifeste son entière communion de goût avec les grands artistes classiques, chez qui nous avons trouvé la même conception originale de la véritable invention. […] En son léger et clair langage d’homme du monde, il a laissé couler dans quelques pièces et dans quelques lettres une fine tristesse, sans éclat et sans espoir, dont l’emplissaient la vue de la vanité des choses, le sentiment de l’irrévocable passé, de son être, tout entier ; pour jamais écoulé, et par ces douces sensations même où il aspirait.

1123. (1894) Propos de littérature « Chapitre III » pp. 50-68

Dans les œuvres qui vinrent ensuite, ces gammes et ces oppositions de teintes ont une tendance à disparaître de tel passage isolé et à se fondre en la strophe et le poème entiers, comme pour ne point gêner l’allure des mille rythmes qui s’y meuvent et bondissent. Mais elles reparaissent avec un accent plus personnel en des vers comme ceux-ci : Ils sont passés en riant près de moi, Au chemin creux du val, Des rubans flottants jaunes et roses Et deux sur chaque cheval… ou bien c’est une page tout entière d’un coloris vénitien très particulier ; bien différente des œuvres de MM. 

1124. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre XXIV. Arrestation et procès de Jésus. »

L’autorité sacerdotale, comme nous l’avons déjà vu, résidait tout entière de fait entre les mains de Hanan. […] S’il faut en croire Jean, il aurait avoué sa royauté, mais prononcé en même temps cette profonde parole : « Mon royaume n’est pas de ce monde. » Puis il aurait expliqué la nature de sa royauté, se résumant tout entière dans la possession et la proclamation de la vérité.

1125. (1887) Revue wagnérienne. Tome II « Paris, le 15 janvier 1887. »

…   Avoir le ciel entier pour soi ; n’être plus qu’un Et deux pourtant ; fondre mon être dans ton être ; Devenir azur, nuage, étoile, parfum, Loin des hommes, loin des demain, loin des peut-être ! […] La Revue Wagnérienne, partant des principes que nous estimons ceux du véritable wagnérisme, jugera, avec l’entière, l’absolue indépendance qu’exige sa situation spéciale et qui est incompatible avec les conditions d’existence de la plupart des autres publications, les faits wagnériens qui s’annoncent pour Issy.

1126. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Raphaël, pages de la vingtième année, par M. de Lamartine. » pp. 63-78

. — Je reviens au Raphaël d’aujourd’hui, à celui de M. de Lamartine : S’il eût tenu un pinceau, dit notre auteur, il aurait peint la Vierge de Foligno ; s’il eût manié le ciseau, il aurait sculpté la Psyché de Canova ; s’il eût connu la langue dans laquelle on écrit les sons, il aurait noté les plaintes aériennes du vent de mer dans les fibres des pins d’Italie… S’il eût été poète, il aurait écrit les apostrophes de Job à Jéhovah, les stances d’Herminie du Tasse, la conversation de Roméo et Juliette au clair de lune, de Shakespeare, le portrait d’Haydé de lord Byron… S’il eût vécu dans ces républiques antiques où l’homme se développait tout entier dans la liberté, comme le corps se développe sans ligature dans l’air libre et en plein soleil, il aurait aspiré à tous les sommets comme César, il aurait parlé comme Démosthène, il serait mort comme Caton. […] Il a essayé de faire une confession entière, et il s’est arrêté à mi-chemin, en songeant que c’était aussi la confession d’une autre.

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