Schiller, homme de bonne foi plus que d’orgueil, reconnut bientôt son erreur. […] La froide raison a éteint cet enthousiasme ; il n’y a rien de véritablement sacré que la vérité et ce que la raison reconnaît comme vérité. […] En vérité, il n’y a pas de marché si populeux et si animé ; tout le monde semblait fort bien s’y reconnaître ; chacun allait chercher sous les fleurs une petite auberge où se retirer, puis on en ressortait ; on rencontrait le voisin ; on passait les uns à côté des autres en bourdonnant, comme si on eût voulu se dire où se trouve la bonne bière. […] Je ne veux pas les nommer, leurs œuvres les nomment ; ils s’annonçaient, avec la jactance de l’orgueil, comme les régénérateurs de la littérature française ; le monde intellectuel semblait n’avoir pas existé avant eux ; ils ne se reconnaissaient ni antécédents, ni modèles, ni ancêtres, ni égaux dans le monde de l’esprit. […] Les fils dépaysés reconnaîtront leurs ancêtres ; les philosophies, dépouillées des vêtements divers qui les déguisent, s’embrasseront au grand jour de la science dans l’unité des langues, témoignage de l’unité des idées.
Elle est facile à reconnaître, un enfant en bas âge y conduirait, car les maisons des Phéaciens ne ressemblent nullement à l’habitation d’Alcinoüs le héros. […] comment je reconnais les traces de la main puissante du Dieu fort. […] J’ai toujours aimé ceux qui aiment, ceux qui souffrent, ceux qui gémissent et qui s’indignent en silence, ceux qui se sauvent d’un monde moqueur ; ceux qui s’enveloppent, quand ils sortent, de leur manteau troué par la misère, de peur d’être reconnus dans la rue par ces persifleurs spirituels ou bêtes qui vendent des ricanements aux passants pour insulter toute grandeur : ces pauvres honteux de la gloire, qui sentent en eux leur noblesse innée, qui se cachent de peur qu’on ne se moque, non d’eux-mêmes, mais du don divin qu’ils portent en eux. […] Il me reconnut, et joignant ses deux fortes mains maigres, mais aux longs doigts et aux nœuds de chêne, sur son front : — Ah ! […] Elle suivait son maître, et jamais que son maître ; Nous avions une voix pour mieux nous reconnaître, Et quand l’appelait cette voix, Elle aurait tout quitté, ma blanche tourterelle, Et les amours d’avril, et le nid fait pour elle, Et sa couvée au fond des bois.
Il décide d’abord, sauf à reconnaître plus tard qu’il s’est trompé ; mais alors même, il se corrige sans se condamner. […] Elles ramènent à la surface des débris organiques où le microscope reconnaît ces sédiments formés de coquilles dont Buffon composait les couches végétales de ces terres à naître. […] J’y veux bien reconnaître aussi, avec Marmontel, l’élégance, pourvu que ce ne soit pas celle que Marmontel refuse à Boileau, et qu’il admire au même degré dans Quinault et dans Racine ; et le coloris, pourvu qu’il s’agisse de l’art de mettre les objets dans le meilleur jour. […] On a voulu aussi reconnaître Voltaire dans Gabriel Triaquero. […] Dans ces peintures si simples et si souriantes des mœurs des écoliers, je reconnais, pour avoir passé par là, leur tendresse à la louange et à la réprimande.
» J’ai reconnu le Dieu de Bossuet dans le Dieu de Michel-Ange, son Christ dans le Christ de Léonard de Vinci : je reconnais dans sa Marie les vierges de Raphaël. […] Il semble qu’on reconnaisse un frère, un ouvrier de la même vigne dans les portraits qu’il a tracés des Pères, ses prédécesseurs dans l’interprétation du dogme et dans la prédication. […] Je reconnais là les traditions d’un grand art. […] Ils seraient bien aises d’arracher de nos mains le flambeau que La Rochefoucauld y a mis pour nous les faire reconnaître.
Mais il reconnut bientôt que la même chose lui était arrivée pour son Jeune Siegfried que pour la Mort de Siegfried. […] Mais, je ne peux considérer comme tels, ceux qui prétendent m’aimer comme artiste, et croient devoir me refuser leur sympathie comme homme (IV, 288). » Et, autre part : « Je demande à ceux qui doivent me comprendre, seulement de me voir tel que je suis en réalité et non autrement, et de ne reconnaître dans mes communications artistiques comme essentiel que ce qui leur est révélé de moi suivant ma volonté et mon moyen de m’exprimer. » En prenant l’expression « ennemis de Wagner au sens wagnérien du mot, c’est-à-dire en l’appliquant à ceux qui ne le comprennent ni ne l’aiment comme il voulait l’être, on peut dire que la majorité du parti wagnérien français est ennemie de Wagner. […] Certes il faut reconnaître que les drames du maître sont aussi une manifestation de sa conception de l’art ; et je dirais même que ses œuvres artistiques sont plus éloquentes, plus convaincantes, plus pleines de haute vérité que tous les écrits théoriques. […] En attendant il faut reconnaître que leurs études sur la trame musicale des Maîtres Chanteurs et de Parsifal, et surtout leur examen des conditions optiques et acoustiques du théâtre de Bayreuth sont pleins d’intérêt et de remarques originales. […] Quoi que l’on pense de cette Revue Wagnérienne, de son évolution et de son influence spéciale, très limitée mais très réelle, on doit reconnaître qu’elle forme un précieux recueil de documents et de faits wagnériens.
» La souffrance vraiment philosophique impliquerait en effet une volonté stoïque, maîtresse de soi, saine, prête à aller jusqu’au fond du mal subi pour en sentir la réalité triste et pour en reconnaître aussi la nécessité, c’est-à-dire les liens qui rattachent cet accident au tout, les points par lesquels cette laideur vient se suspendre à toutes les beautés de l’univers. […] Le déterminisme que professent les partisans de l’évolution ne les empêche nullement de reconnaître que tel individu, telle espèce, telle société est en progrès ou en décadence sous le de la rapport vitalité, par conséquent de la force de résistance dans la lutte pour la vie, de l’unité et de la complexité internes, qui permettent aux êtres supérieurs de s’adapter à leur milieu et de le dominer, au lieu d’en être dominés. Dire que la maladie, comme la monstruosité, est normale est parce qu’elle fatale, qu’elle vaut la santé parce qu’elle est tout aussi naturelle, c’est ne pas reconnaître un critérium de valeur naturelle dans l’intensité même et dans l’extension de la vie, ainsi que dans la conscience et la jouissance qui en sont la révélation intime. « Un préjugé seul, où réapparaissent la doctrine antique des causes finales et la croyance à un but défini de l’univers, peut, dit Paul Bourget, nous faire considérer comme naturels et sains les amours de Daphnis et de Chloé dans le vallon, comme artificiels et malsains les amours d’un Baudelaire dans le boudoir qu’il décrit, meublé avec un souci de mélancolie sensuelle : Les riches plafonds, Les miroirs profonds, La splendeur orientale, Tout y parlerait A l’âme en secret Sa douce langue natale. […] On peut reconnaître en moyenne la santé intellectuelle et morale de celui qui a écrit une œuvre à l’esprit de sociabilité vraie dont cette œuvre est empreinte ; et, si l’art est autre chose que la morale, c’est cependant un excellent témoignage pour une œuvre d’art lorsque, après l’avoir lue, on se sent non pas plus souffrant ou plus avili, mais meilleur et relevé au-dessus de soi ; plus disposé non à se ramasser sur ses propres douleurs, mais à en sentir la vanité pour soi-même. […] Mais cette qualités qui seront sa signature, sa griffe sur tous les individus en fait prédominance des qualités bonnes ou mauvaises dans les naissent à précisément des détraqués, puisque les sains d’esprit se reconnaissent à l’équilibre de toutes leurs facultés.
Quant à nous, nous n’hésitons pas à reconnaître dans ce précurseur des philosophes et des politiques modernes un esprit digne de converser d’avance et de loin avec Machiavel, avec Bacon, avec Montesquieu, avec Jean-Jacques Rousseau, esprit assez fécond et assez vaste pour porter de la même gestation un monde divin et un monde humain dans ses flancs, comme deux jumeaux de sa pensée. […] Je les suivis d’un regard surnaturel et éternel dans les principales transfigurations angéliques ou humaines qu’elles avaient à subir dans les mondes supérieurs et inférieurs, se rencontrant quelquefois, sans se reconnaître jamais complétement, de sphère en sphère, d’âge en âge, d’existence en existence, de vie en mort et de mort en renaissance, dans le ciel et sur la terre. […] C’est ce sens mystique et symbolique des amours et de la poésie de Dante qu’Ozanam s’efforce de découvrir, et c’est dans ce sens mystique et symbolique du poème qu’il s’efforce aussi de faire reconnaître et admirer la philosophie religieuse du moyen âge chrétien. […] La troisième et dernière partie est celle où il envisage les hommes parfaits ; et il l’appelle Paradis, pour exprimer la hauteur de leurs vertus et la grandeur de leur félicité, deux conditions hors desquelles on ne saurait reconnaître le souverain bien. […] Lorsque Dante parcourt les cercles du paradis, écoutant le bruit harmonieux des astres et cherchant des yeux au fond de l’espace la terre imperceptible ; lorsqu’il apprend de son bisaïeul, Caccia-Guida, sa mission périlleuse et son exil, on reconnaît le récit du Songe de Scipion.
La fin de la science, comme le commencement de la sagesse, consiste à reconnaître l’incomparable immensité de l’inconnu et de l’inconnaissable. […] Il faut bien reconnaître, d’une manière générale, que cela est dans l’ordre, et que la spécialisation est destinée à devenir de plus en plus la condition nécessaire de la distinction. […] Ce sont les trois ou quatre grands types où l’on peut reconnaître un abrégé de l’humanité : Faust, Hamlet, don Juan, Alceste. […] Il est vrai que l’objection n’en serait pas une pour Carlyle, qui sans doute ne reconnaissait chez les deux pauvres sires aucun des caractères du héros. […] Veut-on voir un modèle de ces commentaires pleins de sagesse qui, dans chaque grand fait de l’histoire littéraire, reconnaissent et admirent un ordre rationnel ?
Je le reconnais à présent. […] C’est l’alouette qui chante ; je reconnais sa voix aiguë. […] Il reconnaît trois sortes de paroles, le geste, la parole et l’écriture. […] Nous reconnaissons, comme lui, le principe de la transmission ou de l’enseignement de la parole. […] On y reconnaîtra, j’espère, un amour pur du vrai.
Ghil a de tout temps reconnues entre lui et Guillaume-Salluste Du Bartas. […] En outre, sur les littérateurs plus jeunes, il faut reconnaître que M. […] Qui peut rien connaître sinon ce qu’il reconnaît. […] Gabriel Vicaire débute dans les lettres au moment où le Parnasse, après une longue lutte, commence à être reconnu par le public. […] Mais il entrait dans la vie, il reconnaissait au loin, dans la distance et le passé, des esprits avec lesquels il avait des points de contact.
Il ne tiendrait qu’à nous de l’y reconnaître. […] Je reconnais qu’il y a là quelque difficulté. […] Notre poëte y est reconnu par un Florentin que ses compatriotes avaient surnommé Ciacco, pourceau, à cause de sa gloutonnerie. […] Je ne viens pas ici de moi-même, lui répond l’Allighieri, qui le reconnaît aussitôt à son langage et à la nature de son supplice. […] J’y reconnais le même élément, apaisé ou soulevé, le même génie.
Sur quelques-unes, il passe avec un bruit strident comme un éclat de rire ; sur d’autres, il crie et gémit comme s’il pleurait1335. » — Jusqu’ici vous ne reconnaissiez que l’imagination sombre d’un homme du nord. […] Il y aboutit, il le brise, il se passe de lui, selon les circonstances ; mais, quoi qu’il fasse, il le traite en inférieur ; il ne lui reconnaît de sainteté que celle qu’il lui donne, et le juge impie s’il s’en trouve exclu. […] Quelques-uns prétendront qu’il n’est pas immoral ; mais tout le monde reconnaîtra qu’il fait toujours et partout abstraction de la morale. […] Nous ne consentirons jamais à voir que tel est le trait dominant de notre Shakspeare : nous ne reconnaîtrons pas que, comme Balzac, il mène ses héros au crime et à la monomanie, et que, comme lui, il habite le pays de la pure logique et de la pure imagination. […] Pecksniff avec une sensibilité exquise, et quand je sais qu’elle va, je sens que la leçon offerte par elle aux hommes fait de moi un des bienfaiteurs de mon espèce. » Vous reconnaissez un nouveau genre d’hypocrisie.
Je reconnus bientôt que cela n’était pas à proprement parler un barbarisme, mais seulement une forme, particulièrement inusitée dans ce sens-là, du verbe poindre. […] Il y a deux langues dans la langue française, avec des nuances, où tout le monde ne se reconnaît pas. […] Oui et non : mais jamais il n’a reconnu qu’on pouvait être à la fois un penseur et un libre-penseur, un sceptique et un sage. […] Je pense que l’on a reconnu dans ce petit traité une satire de l’ingéniosité industrielle ou commerciale qui commençait à prendre son essor vers le milieu du règne de Louis-Philippe. […] Encore qu’à ses jardins trop bien dessinés je préfère un bois embroussaillé, je reconnais volontiers que les géométriques conceptions de Le Nôtre se marient admirablement avec les majestueuses architectures.
Étant déterministe, il n’hésitait pas à reporter à la divinité, d’une façon plus ou moins formelle, l’honneur de ses pensées les plus heureuses, soit en matière de spéculation, soit en matière pratique ; toute spontanéité était à ses yeux une inspiration quand elle donnait naissance à quelque chose de beau et de bien ; comment surtout n’aurait-il pas reconnu à ses idées une origine divine, quand elles étaient relatives à l’avenir, chose cachée aux mortels, et que l’événement les confirmait ? […] Mais parfois il se sentait forcé de nier sa personnalité ; quelque chose de subit et d’imprévu se produisait en lui, qu’il ne reconnaissait pas comme sien : c’était là le signal divin dont il parlait fréquemment, son oracle personnel, la voix d’un dieu sans nom. […] On peut donc reconnaître dans le phénomène démonique une manifestation anormale, mais fidèle, de cette incomparable intelligence dont nous admirons, dans les dialogues socratiques, la finesse et la pénétration. […] Mais, si cette transition d’un sens à un autre a été possible, c’est grâce à l’apparition intermittente dans la succession psychique de paroles intérieures particulièrement vives ; ce fait, vaguement aperçu par certains hommes, et désigné plus ou moins nettement dans leur langage, ne parut point étrange à leurs interlocuteurs ; ils reconnurent un phénomène qui leur était familier ; l’allusion étant comprise, elle s’acclimata dans la langue commune jusqu’à devenir une métaphore presque banale. […] Dans le passage précité du Phèdre, on lit ces mots : « Il y a longtemps qu’en te parlant je me sentais agité d’un certain trouble ; … à présent, je reconnais ma faute. » Mais l’ironie est évidente.
Comme ces pièces premières de Lamartine n’ont aucun dessin, aucune composition dramatique, comme le style n’en est pas frappé et gravé selon le mode qu’on aime aujourd’hui, elles ont pu perdre de leur effet à une première vue ; mais il faut bien peu d’effort, surtout si l’on se reporte un moment aux poésies d’alentour, pour sentir ce que ces élégies et ces plaintes de l’âme avaient de puissance voilée sous leur harmonie éolienne et pour reconnaître qu’elles apportaient avec elles le souffle nouveau.
Il y a bien longtemps que Fénelon, dans sa Lettre à l’Académie française, semble avoir reconnu cette infériorité de la poésie française, en comparaison de la poésie des Anciens.
Le talent, si élevé qu’il soit, n’a point le don de remuer ainsi toute une grande capitale ; et dans tous les signes d’intérêt et d’approbation qui se manifestent, il faut reconnaître un devoir public courageusement rempli.
Dans ses Mémoires contre les prétentions du Parlement de Metz, il a défendu avec tant d’énergie & de solidité les droits & les priviléges de son pays, qu’il a porté le Gouvernement à les reconnoître & à les lui conserver.
Nous l’avertirons que ce n’est pas assez de savoir coudre les lambeaux étrangers à son Ouvrage, & dont on reconnoît d’abord la friperie ; de pousser de grandes exclamations sur le mérite de Voltaire ; d’avoir été admis à compulser les Archives du Mercure ; de nous reprocher habilement d’avoir omis quantité d’Ouvrages qui étoient sous presse, & qu’il ne nous étoit pas possible de connoître.
Ceux qui aiment l’esprit, les graces la finesse & la gaieté, trouveront ces heureuses qualités éminemment reconnues dans presque toutes les Productions de cet Académicien.
Petit perfide, je te reconnais ; puissé-je pour mon bonheur, ne te plus rencontrer.
Vintras ne reconnaissait pas la hiérarchie ecclésiastique et n’admettait que l’inspiration directe. […] Mais ce mode purement badin avait, il faut le reconnaître, de quoi choquer Renan et son entourage. […] Si l’on songe que ces notices sont assez anciennes, on reconnaîtra dans M. […] Ils lui reconnaîtront le mérite d’être instructif. […] Vous reconnaissez la thèse favorite de M.
Elle écrivit à quinze ans des extraits de l’Esprit des Lois, avec des réflexions ; à cet âge, en 1781, lors de l’apparition du Compte-rendu, elle adressa à son père une lettre anonyme où son style la fit reconnaître. […] Les Lettres sur Jean-Jacques sont un hymne, mais un hymne nourri de pensées graves, en même temps que varié d’observations fines, un hymne au ton déjà mâle et soutenu, où Corinne se pourra reconnaître encore après être redescendue du Capitole. […] Il vaut mieux reconnaître qu’indépendamment des habitudes et des tours acquis, le talent de poésie est en nous un don comme le chant. […] Marigniez, médecin de Montpellier et littérateur à Paris, auteur d’une tragédie de Zoraï dont il est question dans Grimm, homme qui avait plus de mérite réel qu’il n’a laissé de réputation. — J’ai depuis reconnu que ces articles étaient de M. […] En tête d’une réimpression de Corinne en 1839, nous ajoutions : « A mesure que le temps marche, l’intérêt qui s’attache à ces œuvres une fois reconnues comme subsistantes et durables peut varier, mais n’est pas moins grand.
Ici les quakers, les indépendants, les baptistes, subsistent, sérieux, honorés, reconnus par l’État, illustrés par des écrivains habiles, par des savants profonds, par des hommes vertueux, par des fondateurs de nations819. […] Le public les reconnaîtra dans la rue ; il n’y a plus qu’à écrire des noms sous ses portraits. […] Elle semble un amas de priviléges, c’est-à-dire d’injustices consacrées ; la vérité est qu’elle est un corps de contrats, c’est-à-dire de droits reconnus. […] Il en appelait aux Anglais contre eux-mêmes ; et, en dépit d’eux-mêmes, ils reconnaissaient leur plus cher instinct dans cette maxime, que chaque volonté humaine est inviolable dans sa province limitée et légale, et qu’elle doit se dresser tout entière contre la plus petite usurpation. […] À la place du droit et de Dieu, qui reconnaissez-vous pour maître ?
On citait de lui des fables, à la manière de Phèdre, où il eût été difficile de reconnaître une main moderne119. […] Plus modeste que Pascal, qui prouve son dédain par ses railleries, Bossuet semble ne pas se croire trop grand pour Jurieu et ne se reconnaître sur le ministre protestant que l’avantage d’avoir la vérité de son côté. […] Je reconnais là celui que Louis XIV appelait « le plus chimérique des beaux esprits de son royaume. » Le chimérique dominait dans cet esprit, d’ailleurs si lumineux et si net. […] Lui-même reconnaissait dans sa doctrine certains caractères qui auraient dû l’en garantir, si la bonne foi et l’opiniâtreté ne l’eussent aveuglé. […] Je reconnais là les formes qu’affecte le sens propre, et je les note dans Fénelon, parce qu’elles sont communes à toutes les opinions particulières.
L’esprit si net qui, pour les mettre à sa portée, leur a ôté l’infinité et le mystère, reconnaît en eux ses créatures et s’amuse des mythes qu’il a faits. […] Dans ces différents traits vous avez reconnu le besoin fondamental des formes délimitées et claires. […] Désormais il n’y a plus de cité sans gymnase ; c’est un des signes auxquels on reconnaît une ville grecque53. […] En effet, le corps gardait jusqu’au bout les traces de l’éducation gymnastique ou servile ; on le reconnaissait du premier coup à sa prestance, à sa démarche, à ses gestes, à sa façon de se draper, comme jadis on distinguait le gentilhomme dégourdi et anobli par les académies, du rustre balourd et de l’ouvrier rabougri. […] Diopithès, dit Plutarque, « fit un décret qui ordonnait de dénoncer ceux qui ne reconnaissaient pas l’existence des dieux ou qui enseignaient des doctrines nouvelles sur les phénomènes célestes ».
Hérold viendront-ils à reconnaître que les procédés rossiniens rappellent nécessairement aux oreilles qui les entendent des mélodies déjà toutes faites depuis longtemps ? […] L’impartialité m’oblige à reconnaître que M. […] Janin veut à toute force se reconnaître dans le portrait de l’Arétin, pour lequel il n’a pas posé. […] , il faut reconnaître que c’est une de ses meilleures pages. […] * * * Remarque et anecdote, tout cela ne m’empêche pas de reconnaître que si M.
Quelques moindres choses encore ont retenu mon attention et m’ont surpris, qu’à la réflexion, j’ai bien dû reconnaître conformes aux intentions évidentes du jeune romancier. […] Avant 1911, n’employait-il pas le terme de surnaturalisme qu’il reconnut ensuite moins bon que surréalisme ? […] J’ai été jusqu’à y reconnaître M. […] C’est trop durement qu’il nous impose de reconnaître nos erreurs. […] C’était être un peu égoïste, se regarder avec amitié dans sa glace, feindre de ne pas s’y reconnaître, embrasser cet inconnu.
Vraiment je ne te reconnais plus. […] Oui, je te reconnais maintenant. […] Si fait, je te reconnais maintenant. […] Je te répète qu’il est des nôtres : tu le reconnaîtras toi-même tout à l’heure. […] À coup sûr, je ne te reconnais qu’à la voix.
Dans les vivats de la foule, j’y vois entrer un vieux curé, gaillardement en selle sur un cheval, qu’on reconnaît pour un cheval prussien. […] Je suis curieux de reconnaître les endroits de nos tristes promenades de tout le printemps dernier. […] On vague à travers des pierres obscures, sans les reconnaître, étonné, même un peu inquiet de sa direction. […] Autour du poète, à demi couchés sur un divan, des amis, parmi lesquels je reconnais Vacquerie. […] Je suis arrivé à reconnaître avec certitude le canon du Mont-Valérien, d’Issy, de la canonnière du Point-du-Jour, de la batterie Mortemart.
Elle monte les Champs-Élysées dans son coupé, à l’heure du lac : sait-elle que le poète l’a reconnue et, à cette minute, dans la lumière d’or du jour qui meurt, sincèrement et mélancoliquement aimée ?
Quand la première saison est passée, quand le front se penche, quand on sent le besoin de faire autre chose que des histoires curieuses pour effrayer les vieilles femmes et les petits enfants, quand on a usé au frottement de la vie les aspérités de sa jeunesse, on reconnaît que toute invention, toute création, toute divination de l’art doit avoir pour base l’étude, l’observation, le recueillement, la science, la mesure, la comparaison, la méditation sérieuse, le dessin attentif et continuel de chaque chose d’après nature, la critique consciencieuse de soi-même ; et l’inspiration qui se dégage selon ces nouvelles conditions, loin d’y rien perdre, y gagne un plus large souffle et de plus fortes ailes.
En les comparant au plain-chant, on y reconnaît le même système.
Il reconnut du premier coup d’œil à qui il avait affaire mais il dissimula : « Cela va bien, répondit-il, et je vais te prendre pour femme ».
Il n’en est pas de même pour la comédie : les caractères de la nouvelle comédie à Athènes furent tous imaginés par les poètes du temps, auxquels une loi défendait de jouer des personnages réels, et ils le furent avec tant de bonheur, que les Latins, avec tout leur orgueil, reconnaissent la supériorité des Grecs dans la comédie.
Il vaut mieux reconnaître que nous ne savons pas, et que c’est là que se place la limite de notre connaissance. […] Il faut reconnaître en un mot que le déterminisme dans les phénomènes de la vie est non seulement un déterminisme très complexe, mais que c’est en même temps un déterminisme harmoniquement subordonné. […] Néanmoins elles ont pour nous une valeur historique, elles nous montrent que ce grand philosophe reconnaissait dans le cerveau deux choses : d’abord un mécanisme physiologique, puis, au-dessus et en dehors de lui, la faculté pensante de l’âme. […] Les atomistes ne reconnaissent pas d’intelligence motrice, le monde se meut par lui-même éternellement. […] D’un autre côté, les astronomes, avant de connaître les lois des mouvements des corps célestes, avaient imaginé des puissances, des forces sidérales, comme les physiologistes reconnaissaient des forces et des puissances vitales.
Mais l’impartialité nous oblige cependant à reconnaître que le barreau comporte, de par ses règlements, une dignité mieux assise que la critique. […] Il est rare que l’une des trois reconnaisse le droit des deux autres à une existence indépendante. […] Reconnaissons bien sa supériorité dans son domaine propre. […] Nous l’avons reconnu dans l’Évolution de la Critique de Brunetière. […] Il s’en servait, mais sa lucidité le conduisait à reconnaître en elle une faculté inférieure à celle de création artistique, qui lui manquait.
Il reconnaît, il honore en Elmire l’honnête courage avec lequel, épouse de second lit seulement, et belle-mère de grands enfants, elle vient au secours du foyer domestique envahi par un odieux parasite et combat pour la famille en péril. […] DOM JUAN Voilà qui est étrange, et tu es bien mal reconnu de tes soins. […] Il s’est accompli parmi nous depuis deux siècles, non seulement dans la vie publique, mais encore dans la vie privée, une suite de révolutions insensibles et cependant si profondes, que nous refusons parfois de nous reconnaître dans nos aïeux. […] Disons-le à l’honneur des grands seigneurs d’autrefois ; nous n’aurions eu sans doute à leur place ni autant de patience à supporter les censures, ni autant de facilité à en reconnaître la justesse. […] ——— À Saint-Flour, au cœur de l’Auvergne, on ne reconnaît point de gentilshommes.
Il a eu simplement la sincérité de reconnaître que, dans des œuvres de synthèse, on ne peut appliquer partout la même méthode. […] On reconnaîtra toujours en lui l’homme qui avait éprouvé ses premières sensations littéraires en lisant Guizot et Jouffroy, et qui eut un culte pour Macaulay. […] C’était un premier signe où l’on reconnaissait que son talent se ressentait des atteintes de l’âge. […] Nous reconnaissons partout l’éducateur qui a écrit de l’instruction, dans les conseils qu’il donne à Lefèvre, à Bodin, à lui-même. […] J’ai cru y reconnaître un désir sincère et un effort énergique pour se corriger de son défaut principal, qui est un goût excessif pour l’abstraction.
Les deux femmes se reconnaissent et s’embrassent. […] Il se reconnaît tous les droits dans l’instant où il a besoin de les exercer. […] Et, si d’aventure on dit que c’est le roi, et si le roi lui-même se reconnaît en lui, quel mal à cela encore ? […] Je reconnais de bonne foi que les plaidoyers de ce dernier sont, sans comparaison, plus dévots que les romans du premier. […] Ma colère revient, et je me reconnais.
Constatation décourageante, je le reconnais, mais pour les médiocres seulement. […] L’homme répond, et tout le monde reconnaît en lui le petit marin dont la croix blanchit au cimetière depuis dix-neuf ans. […] En entrant dans la cuisine, il reconnut avec stupeur que le fourneau était allumé. […] Malgré ses étrangetés, ses âpretés surtout, il faut reconnaître une puissance d’impressions transmises dans l’Honneur. […] » Qui ne reconnaîtrait là de l’Alphonse Karr, et du meilleur ?
Quel que soit le gouvernement, la Constitution doit donc reconnaître il l’homme des droits que la Loi doit respecter. […] On reconnaîtra qu’il est difficile de tirer une doctrine précise de ces affirmations, d’une part toujours retirées à demi et d’autre part contradictoires. […] La Bulle, bien entendu, qui n’était guère comprise de personne, n’était que le signe où l’on se reconnaissait pour être d’un camp ou de l’autre. […] Il était détestable de reconnaître une religion comme religion d’Etat. […] Ils reconnaissent encore les deux puissances ou du moins ils feignent de les reconnaître.
On reconnaît son parti-pris d’harmonie ; on se rend compte des effets, on remarque les répétitions évitées. […] Les plus délicats reconnurent sa perfection artiste et son réalisme exquis. […] Dix lignes suffisent à le reconnaître, surtout dans ses derniers volumes14. […] Plus l’on aura de talent, plus l’on reconnaîtra, une fois ce deuxième jet fini et recopié, la nécessité d’un troisième effort. […] Nous devrons nous borner aux chefs reconnus et incontestés qui, eux-mêmes, idéalistes ou réalistes, se rattachent au courant classique français.
Alors enfin il comprend les raisons du cauchemar : il regarde en soi-même, se reconnaît la seule Cause. […] Il reconnaît dans sa doctrine la synthèse finale des philosophies : ouvertement il se déclare hégélien. […] Reconnais-toi ! […] Berthelot, l’a sagement reconnu. […] Et, quand elle eut reconnu la voix de Pierre, elle courut dire que Pierre était devant la porte.
Viennet n’en reconnaît guère que huit avant ce temps-ci, avant l’invasion des novateurs.
Au milieu de distinctions fines et de bien nobles sentiments de spiritualisme que nous y reconnaissons, il nous est impossible, pour notre compte, d’en admettre le procédé, ni beaucoup des résultats.
Dans le premier, il examine le cercle des sciences, classant chaque objet sous sa faculté ; facultés dont il reconnaît quatre : l’âme ou la sensation, la mémoire, l’imagination, l’entendement.
La France s’oppose, par amitié pour l’Espagne, au déchirement des colonies espagnoles de l’Amérique du Sud : l’Angleterre, quoique précédemment soutien de l’Espagne, reconnaît l’insurrection de l’Amérique du Sud, par la seule raison que cette insurrection répugne à la France. […] C’est d’abord parce que ces publicistes sont jeunes, et qu’ils n’ont pas encore réfléchi à ce qu’ils proclament ; c’est ensuite parce que le vieil écho des casernes impériales du premier empire n’a pas eu le temps d’apprendre un autre mot que celui de guerre à l’Autriche depuis Leipzig jusqu’à Fontainebleau ; c’est enfin parce que deux grandes questions diplomatiques, l’Orient et l’Italie, se sont malheureusement interposées entre la France et l’Autriche depuis les traités de Vienne, et que ces deux questions, l’Italie surtout, devaient, tant qu’elles n’étaient pas tranchées, empêcher la France et l’Autriche de se reconnaître et de s’allier. […] La France a donc parfaitement le droit et, je dis plus, le devoir de ne pas avouer l’ambition d’un roi qui est roi par la grâce du sang français versé pour lui dans la Lombardie, et de ne pas reconnaître une unité monarchique piémontaise de toute l’Italie, qui serait un péril national créé contre la sécurité de la nation française. […] La France et l’Autriche elle-même sont intéressées à reconnaître cette fédération pacificatrice, qui garantit l’inviolabilité de l’Italie contre tout le monde, et qui leur défend à elles-mêmes d’attenter à l’Italie libre, mais qui ne leur défend plus de former l’alliance de l’équilibre et de la paix.
On peut aussi, si l’on veut, reconnaître Henri IV dans Euric, et dans Alcidon on dans Daphnide, le duc de Bellegarde ou la duchesse de Beaufort : à coup sûr, le ton n’y est pas ; et même l’inconstant Hylas, même le féroce Polémas n’ont pas les manières ni le reste qui décidaient la marquise de Rambouillet à se retirer chez elle. […] On reconnaît là les thèmes de la pastorale italienne : l’Arcadie de Sannazar, l’Aminte du Tasse, le Pastor Fido de Guarini, voilà les sources de D’Urfé. […] C’est un premier pas vers le roman vrai, quoique l’Astrée elle-même soit plus fausse par l’incohérence de l’élément pastoral et de l’élément historique : mais dans ce mélange je reconnais l’effet du même instinct qui va soumettre toute la littérature au vraisemblable et créer le réalisme classique. […] Le Tasse, Montemayor sont en leurs pays de grands poètes : D’Urfé ne vaut que par sa prose, fluide, diffuse, aimable, où se reconnaît le contemporain littéraire de François de Sales et de Montchrétien.
C’est à l’intérieur des différents ordres, des différents royaumes qu’il faut chercher, qu’il faut poursuivre, qu’il faut reconnaître des hiérarchies, des subordinations, des coordinations parallèles. […] Mais poursuivons parallèlement à l’intérieur des différents ordres et sachons reconnaître les qualités parallèles. […] Quand Bergson oppose le tout fait au se faisant, (et je voudrais bien savoir comment il pourrait dire en d’autres termes), et il faut tout de même bien de la mauvaise volonté pour ne pas reconnaître dans ce participe passé et dans ce participe présent les héritiers de deux beaux participes grecs moyens-passifs), il fait une opposition, il reconnaît une contrariété métaphysique de l’ordre de l’ordre même de la durée et portant sur l’opposition, sur la contrariété profonde, essentielle, métaphysique, du présent au futur et du présent au passé.
L’érudition a cru, par instants, reconnaître, entre Bacchus et Rama, une parenté mystérieuse : mêmes victoires bienfaitrices, mêmes largesses faites aux hommes. […] Derrière celui-là, il y en avait d’autres plus ou moins reconnus ou légitimés. […] Il n’était pas jusqu’au Jéhovah d’Israël, en qui on ne reconnût Dionysos, trônant sous la vigne d’or du temple de Jérusalem. […] Tous les démonographes du seizième siècle, Sprenger, Del Rio, de Lancre, Boquel, Le Loyer, Hédelin, s’accordent à reconnaître en lui le « Prince des Sorciers », « le Chef des bouquins », le grand maître des cérémonies de l’Enfer.
Il s’accomplit tout seul, artiste, œuvre et modèle ; Ni petit, ni mauvais, il n’est ni grand ni bon ; Car sa taille n’a pas de mesure hors d’elle, Et sa nécessité ne comporte aucun don. » Zénon, Spinosa, Hegel, reconnaîtraient dans ces vers la fière et triste image de leur pensée. […] La foi étant un compromis entre l’intelligence et la sensibilité, l’une des deux parties s’y est reconnue lésée, et aujourd’hui toutes les deux se défient excessivement l’une de l’autre. […] Mais le Chercheur ne veut pourtant pas reconnaître qu’il s’est entièrement trompé dans son enquête à travers le monde. […] Mais enfin, il s’agit d’un poème d’idée, non de sentiment pur ou de fantaisie ; encore faut-il se reconnaître dans la logique secrète de l’auteur, et j’avoue que cette logique est un labyrinthe où ma pensée se perd.
Les savants de Hollande, ces savants en us qu’il exalte tant, ne le reconnaissaient pas du tout comme un des leurs. […] Un jour, en décembre 1652, il est appelé auprès de M. l’avocat général Talon, qu’il trouve en hydropisie et très malade : Ayant reconnu son mauvais état, je vous avoue que les larmes m’en sont venues aux yeux, ce que je ne pus si bien cacher qu’il ne le reconnût lui-même et ne m’en fît compliment.
., plus incontestablement accepté, reconnu plus convenable et plus utile que le récit que fait annuellement l’Académie des actes de vertu, et les récompenses, si modérées d’ailleurs, qu’elle y attache. […] Il y a, Messieurs, reconnaissons-le, une grande bonne volonté de nos jours : chacun s’entend, se rapproche, se cotise pour faire le bien, pour soulager les maux et en diminuer la somme. […] Elle réunit, cette même loi, les hommes moins enthousiastes, qui, accoutumés à la discussion des intérêts divers et si compliqués que la société met sans cesse aux prises, savent les difficultés de la pratique, aiment à voir agir en tout l’expérience, ne recourent que dans les cas extrêmes aux principes de métaphysique, toujours contestables, et qui ont reconnu bien souvent que la réalité des choses, en se développant, déjoue la plupart des espérances ou des craintes que l’imagination s’était faites à l’avance.
Qu’ils sont rares ceux qui, dans l’ordre de la pensée, se fixent à temps et adhèrent sans réserve à la vérité reconnue par eux perpétuelle, universelle et sainte ; qui, non contents de la reconnaître, s’y emploient tout entiers, y versent leurs facultés, leurs dons naturels : riches leur or, pauvres leur denier, passionnés leurs passions ; orgueilleux s’y prosternent, voluptueux s’y sèvrent, nonchalants s’y aiguillonnent, artistes s’y disciplinent et s’y oublient ; qui deviennent ici-bas une volonté humble et forte, croyante et active, aussi libre qu’il est possible dans nos entraves, une volonté animant de son unité souveraine la doctrine, les affections et les mœurs ; véritables hommes selon l’esprit ; sublimes et encourageants modèles ! […] Mais l’action lui parut un devoir, il se l’imposa, et il attribue à l’effort violent qu’elle exige de lui l’espèce d’irritation, d’emportement involontaire, qu’on a remarqué en plusieurs endroits de ses ouvrages, et qu’il est le premier à reconnaître avec candeur.
Aujourd’hui, quand on veut reconnaître cette rade immense (si rade il y a), l’aspect a tout à fait changé. […] Le genre qu’il importait chez nous fut à l’instant suivi et pratiqué avec succès par plusieurs ; les juges compétents paraissent reconnaître que, de nos romanciers de mer, le plus exact à la manœuvre est M. […] Avait-il bien dessein en cela, comme il le déclare dans la préface de la Vigie, d’amener, d’induire, par les critiques mêmes qu’on lui ferait, le parti libéral et philosophique à reconnaître qu’il n’est pas de bonheur pour l’homme sur la terre si on lui arrache toute illusion ?
Daunou, qui en rendit compte dans le Journal des Savants (mai 1822), reconnaissait que les vues par lesquelles l’auteur avait étendu son sujet et en avait éclairci les préliminaires « supposaient une étude profonde de l’histoire de France ; » il trouvait que l’ouvrage « se recommandait moins par l’exactitude rigoureuse des détails que par l’importance et la justesse des considérations générales ; » mais il insistait sur cette importance des résultats généraux, et notait « la profondeur et quelquefois la hardiesse des pensées, la précision et souvent l’énergie du style. » Nous aimons à reproduire les propres paroles du plus scrupuleux des critiques, de celui qui, en rédigeant ses jugements, en pesait le plus chaque mot. […] Il est juste et doux de reconnaître que, depuis ce moment-là, il n’a fait autre chose que marcher en avant, poursuivre, étendre les mêmes études en les approfondissant, se perfectionner sans jamais dévier, cueillir le fruit (même amer) des années, sans laisser altérer en rien la pureté de ses sentiments ni sa sincérité première. […] Tant de hautes qualités, que nous avons eu à reconnaître dans la manière de l’historien et de l’écrivain, sont achetées au prix de quelques défauts, et notre profonde estime même nous autorisera à les indiquer.
Je vais examiner d’abord la littérature d’une manière générale dans ses rapports avec la vertu, la gloire, la liberté et le bonheur ; et s’il est impossible de ne pas reconnaître quel pouvoir elle exerce sur ces grands sentiments, premiers mobiles de l’homme, c’est avec un intérêt plus vif qu’on s’unira peut-être à moi pour suivre les progrès, et pour observer le caractère dominant des écrivains de chaque pays et de chaque siècle. […] C’est dans ce genre seul que la gloire littéraire a été acquise, et qu’on peut reconnaître sa véritable influence. […] L’infortuné qui, par le concours de quelques calomnies propagées, est tout à coup généralement accusé, serait presque aussi lui-même dans la situation d’un vrai coupable, s’il ne trouvait quelques secours dans ces écrits qui l’aident à se reconnaître, qui lui font croire à ses pareils, et lui donnent l’assurance que, dans quelques lieux de la terre, il a existé des êtres qui s’attendriraient sur lui, et le plaindraient avec affection, s’il pouvait s’adresser à eux.
Quand il mourut, Florence était libre, la Toscane prospère, l’Italie pacifique, l’Europe édifiée de ses vertus ; il fallait ou reconnaître son ascendant ou se déclarer le peuple le plus ingrat de la terre. […] Je vous en écris une qu’il m’a été permis de savoir : « Les citoyens te reconnaîtront pour mon successeur, je n’en doute pas. […] Il reconnut à l’instant ma voix, et me regardant avec complaisance, selon son habitude : « Eh !
J’ai fait ce que j’ai voulu : tout le monde me reconnaîtra en mon livre, et mon livre en moi235. » Il se confesse au même lieu d’avoir « une condition singeresse et imitative », et de recevoir l’empreinte de tout ce qu’il regarde avec attention. […] En philosophie, en littérature, partout, il pose la souveraineté de la raison, égale en tous les hommes, et qui a charge et pouvoir de reconnaître la vérité. […] L’humanité a reconnu en lui un exemplaire de sa commune nature ; et pour l’attester il suffira de nommer Bacon qui fait ses Essais à l’imitation de notre gentilhomme périgourdin, Shakespeare, à qui Montaigne peut-être a révélé la richesse psychologique et dramatique de Plutarque, qui à coup sur lisait, annotait, transcrivait parfois Montaigne ; le vieux Ben Johnson même l’avait entre les mains.
Les plus spirituelles reconnurent pourtant que l’observation était exacte. […] On l’a fait d’Église malgré lui, pour conserver dans la famille l’archevêché de Paris : dès qu’il a reconnu la nécessité d’être prêtre sans vocation, peut-être sans foi, il cesse de regimber ; sa volonté se fixe un but, le ministère ; pour y atteindre, il prêche le bon peuple de Paris, il répand les aumônes ; il est populaire. […] Il a une propriété, une vivacité singulières d’expression : plus de corps et de couleur que de délicate élégance, de la vigueur même dans la finesse ; de longues périodes chargées d’incidentes et de participes, un large emploi des pronoms, souvent bien éloignés du nom qu’ils ont charge de suggérer, des archaïsmes, de libres tournures : à ces dernières marques surtout, on reconnaît un style formé avant les Provinciales.
En six ans (1718-1724), il va se faire reconnaître comme le plus grand poète tragique du temps, comme le seul poète épique de la France. […] Les sciences ne l’avaient guère préoccupé jusqu’ici : il y reconnut l’œuvre essentielle de la raison et son arme efficace. […] Voltaire pousse des pointes en tout sens, reconnaît des régions inexplorées : sur l’Arabie, sur l’Inde, sur la Chine, il apporte des études bien incomplètes encore, mais singulièrement neuves pour le temps.
Il faut pourtant reconnaître que dans deux pièces au moins V. […] Fournisseur ordinaire du Gymnase depuis sa fondation (1820), applaudi souvent à la Comédie-Française, il offre à la bourgeoisie exactement le plaisir et l’idéal qu’elle réclame : elle se reconnaît dans ses pièces, où rien ne déroute son intelligence. […] Le Colonel : une jeune fille déguisée en colonel du 12e hussards est acceptée pour telle par les officiers du régiment ; la vue d’un pistolet la fait évanouir et reconnaître.
Et maintenant, Comme l’eau qu’il secoue aveuglé un chien mouillé, ou, si vous voulez, pareil au barbet du vieux conte, qui « secouait des pierreries », je me débats sur la rive, tout ruisselant et aveuglé de métaphores, le bruit des rythmes bourdonnant dans mes oreilles comme celui des grandes eaux ; et, dompté par un dieu, je reconnais et j’adore la toute-puissance de son verbe. […] Et voici les pensées qu’on y trouve : — Les poètes primitifs aimaient la nature, et elle leur parlait J’ai fait de la critique quand j’étais enfant, mais j’ai reconnu l’absurdité de cette occupation La tragédie classique sent le renfermé. […] Tous ces vers inconnus, je les reconnaissais à mesure.
On se prépare à la courte traite du lendemain, les femmes chantent, les enfants crient, l’enclume de campagne résonne sous le marteau. » Quiconque a vu un camp de bohémiens reconnaîtra sans doute la vérité de cette description, où tout est pris sur nature, sauf l’ours peut-être, qui, chez nous, est remplacé par un singe ou un âne savant. […] L’imposteur, déjà reconnu en Pologne et traité en prince dans le château du palatin Mniszek, est amoureux de sa fille, la belle Marina. […] Ne les reconnais-tu pas à présent ?
Mais ce premier principe demeure comme le fond de la réforme religieuse ; et quand on y regarde de près, on reconnaît dans toutes les institutions de détail du protestantisme cette mise en suspicion des œuvres. […] C’est aux endroits où ils sont modérés, où leur humeur n’est pas plus forte que leur raison, qu’on reconnaît une première image complète de cet esprit français, le plus libre et le plus discipliné qui soit au monde. […] Je reconnais là le logicien de la prédestination, le Caïn du parti de la vieille Genève, lequel, en se qualifiant de chiens de Calvin, témoignait par là une haine si forte, qu’elle ne prenait aucun souci de s’ennoblir.
D’abord, ils s’ennuieront de la scolastique ; la scolastique jetée de côté, on changera la forme des idées, et puis on reconnaîtra l’impossibilité de l’explication orthodoxe de la Bible, etc. […] Vous ne me reconnaîtriez plus alors, je n’étudierais plus, et ne penserais plus critiquement, je serais un mystique déterminé. […] J’imagine que vous avez dû éprouver ceci : il se passe en nous, relativement au bonheur, une espèce de délibération, où du reste nous sommes fatalement déterminés, par laquelle nous décidons sur quel tour nous prendrons telle ou telle chose ; car il n’est personne qui ne doive reconnaître qu’il porte en lui mille causes actuelles qui pourraient le rendre le plus malheureux des hommes.
D’après leurs prédications, l’Univers reconnoît un seul Maître : le monde n’est plus qu’une figure qui passe, ses biens qu’une vapeur qui se dissipe ; la vie qu’un passage à un autre plus durable, & dont l’usage de la premiere fixera le sort : l’Homme, cet être auparavant si foible, triomphe de ce que le monde a de plus flatteur & de plus redoutable : les combats qu’il est contraint de livrer à ses passions, sont la source de son repos & de celui de ses semblables ; le mariage est rappelé à son institution primitive : les Loix qui n’arrêtoient que la main, agissent sur le cœur : la bienséance devient un devoir général, même à l’égard des ennemis : le disciple d’Epicure embrasse cette morale mortifiante & austere : on ne reconnoît plus l’Homme dans l’Homme, comme l’a dit Bossuet ; mais dans cette étonnante révolution, on reconnoît le doigt de Dieu.
Tous reconnaissent sa suprématie, il les domine par l’autorité et par la puissance. […] Dans celle même querelle, le vieux Nestor, avec son impartialité vénérable, reconnaît l’offense qu’Agamemnon a faite à Achille, mais il le rappelle en même temps au respect que tous les alliés doivent au chef suprême : Il n’est point permis à Agamemnon, bien que le plus puissant, d’enlever à Achille la vierge que les Achéens lui ont donnée ; tu ne dois point non plus, fils de Pelée, résister au Roi, car tu n’es point l’égal de ce porte-sceptre glorifié par Zeus. […] Chalcas, le devin de l’expédition, reconnut les Atrides dans ces oiseaux dévorants ; il prédit la conquête tardive d’Ilion, mais il prévit aussi la colère d’Artémis qui « a horreur des festins d’aigles ».
De Pienne reconnaît qu’il doit la vie à la généreuse inspiration de Diane ; il s’engage à la lui rendre au premier appel, puis il emmène ses compagnons tout éblouis de cette vision royale de bonne grâce et de dignité. […] Ainsi voilà réunis tous les acteurs de l’imbroglio nocturne de la veille, jusqu’à M. de Cruas, qui survient, tout exprès, pour reconnaître sa fiancée dans la jeune fille qu’il pourchassait, la veille, d’une jambe avinée. […] Le cardinal, qui a reconnu en elle la sœur du jeune homme qui doit mourir le jour même, tente un dernier effort.
Un travailleur, quelque opinion qu’il professe, reconnaît dans son métier l’homme de valeur. […] On se reconnaît, on se juge, on peut s’estimer, on désire faire ensemble de la « bonne ouvrage ». […] Mais c’est vrai que le travail et le labeur normal font les mœurs et les courages, sans lesquels rien n’est possible et d’où naissent les supériorités, et je reconnais, je salue tout ce qu’il y a de réel et de bienfaisant dans cet orgueil de classe, dans cette piété du travail manuel qui rattachent l’enfant à la stabilité et l’empêchent de se jeter aux courants rapides.
. — À quel signe on reconnaîtra qu’un Temps est réel. […] Mais par là elle reconnaît qu’un événement E, s’accomplissant à côté de l’horloge H, est donné en simultanéité avec une indication de l’horloge H dans un sens tout autre que celui-là, — dans le sens que le psychologue attribue au mot simultanéité. […] S’il fallait définir la réalité en général, dire à quelle marque on la reconnaît, nous ne pourrions le faire sans nous classer dans une école : les philosophes ne sont pas d’accord, et le problème a reçu autant de solutions que le réalisme et l’idéalisme comportent de nuances.
Ce jour-là je ne la reconnaissais pas ; elle a eu peur, quoiqu’il n’y ait guère eu que deux ou trois cents hommes de tués. […] » Le moment d’après, son mari est venu, m’a regardé de tous les côtés, et m’a reconnu.
J’ai dit qu’envoyé en Espagne par le duc de Mayenne pour sonder les véritables intentions de Philippe II et faisant ce voyage dans une médiocre espérance, il arriva à reconnaître dès les premières audiences que Philippe II, en s’intéressant aux affaires de la Ligue, ne voulait autre chose que la part du lion, la couronne de France pour l’infante sa fille. […] L’auteur reconnu de ce conseil, qui causa grand déplaisir à la faction espagnole, fut le président Jeannin : « Et vous assure, nous dit Villeroi, que ce coup fut donné très à propos pour le salut du royaume. » Villeroi, qui était sobre de paroles, même au Conseil et autour d’un tapis vert, dédaigna de parler et d’assister à ces États généraux.
Scherer, de dire tout ce qu’il y a d’agitation dans notre cœur lorsque nous commençons à reconnaître que notre Église et notre système n’ont pas le monopole du bien et du vrai, lorsque nous rencontrons des hommes également éminents et sincères qui professent les opinions les plus opposées…, lorsque nous découvrons qu’il n’y a point d’erreur qui n’ait un mélange de vérité, point de vérité qui ne soit partielle, étroite, incomplète, entachée d’erreur, lorsque ainsi le relatif nous apparaît comme la forme de l’absolu sur la terre, l’absolu comme un but éternellement poursuivi mais éternellement inaccessible, et la vérité comme un miroir brisé en mille fragments qui tous réfléchissent le ciel et dont aucun ne le réfléchit tout entier. […] Le talent de de Maistre y est reconnu, mais strictement caractérisé et réduit à ses seuls éléments originaux.
M. le rapporteur lui-même l’a reconnu. […] Ce n’est pas une raison pour moins reconnaître la sagesse de l’empereur.
Il faut reconnaître qu’il avait trouvé autour de lui des exemples, et que ces exemples n’étaient pas trop édifiants. […] Un jour même, il salua son fils sans le reconnaître ; quelqu’un s’en étonna ; il répondit « qu’il croyait en effet avoir vu ce jeune homme quelque part ».
Tous les hommes meurent, donc je mourrai : voilà la déduction, qui tire la conséquence d’un principe incontestable et reconnu pour vrai. […] Elle est toute de convention, et elle n’a assurément pas plus de vérité que celle de l’Allemand naïf, à la tête carrée, aux grands pieds et à la longue pipe, buvant des chopes et dissertant sur l’idéal et l’infini, se gavant de choucroute et volant des pendules, pour être, en fin de compte, roué de coups par un sous-officier imberbe4. » On se tiendra donc en garde contre de pareilles tentations, et avant de faire aucune induction, avant de poser une loi ou une règle, avant de rien généraliser, on s’assurera qu’on travaille bien sur une réalité, et non sur un fantôme, que les faits d’abord existent ; on aura soin ensuite de ne rien négliger dans les faits qu’on aura reconnus, de tenir compte de tous les éléments qui les composent, de n’y rien ajouter ni retrancher arbitrairement.
Du Bellay, comme lui, reconnut la rime comme un élément essentiel de la versification française : « fâcheux et rude geôlier, et inconnu des autres vulgaires ». […] Ronsard a très bien reconnu deux choses : 1° qu’il fallait innover avec prudence et choix ; 2° qu’à l’usage seul appartiendrait d’autoriser les innovations, et d’en faire des acquisitions définitives de la langue.
Il ne s’agit pas seulement de reconnaître ce qui a été vraiment pensé, senti, exprimé par Montaigne et Pascal, par Racine et Victor Hugo ; mais dans ce qui va au-delà de ce qu’on peut raisonnablement appeler leur sens, au-delà des plus fines suggestions qu’on a droit de rapporter encore à leur volonté plus ou moins consciente, dans ce qui n’est plus vraiment que moi, lecteur, réagissant à une lecture comme je réagis à la vie, il ne faut tout de même pas confondre ce qui est le prolongement, l’effet direct, normal, et comme attendu de la vertu du livre, avec ce qui ne saurait s’y rattacher par aucun rapport et ne sert à en comprendre, à en éclairer aucun caractère. […] Je puis ajouter que la valeur de cet exercice a été depuis une vingtaine d’années de plus en plus reconnue dans les pays étrangers, en Europe et en Amérique, à mesure que nos professeurs l’ont démontré par leur pratique et en font comprendre la méthode et le but.
Sa santé d’esprit se reconnaît encore dans tout ce qu’il a écrit sur l’éducation et le rôle des femmes et les questions qui s’y rattachent. […] Si ce néo-Grec, que son culte de la nature n’empêche point de montrer dans les choses religieuses les tolérances tendres et amusées d’un Renan, nous parle d’aventure de l’Assomption ou de la Semaine sainte, il y reconnaîtra les fêtes symboliques de l’éternel amour ; il célébrera l’assomption de la femme, Eve ou Vénus anadyomène, et pleurera avec les belles Syriennes sur le cadavre d’Adonis.
Il se fait, avec rien, une supériorité mystérieuse que nul ne saurait définir, mais dont les effets sont aussi réels et aussi grands que ceux des supériorités classées et reconnues par les hommes : Le dandy est un révolutionnaire et un illusionniste. […] Et comme, ayant pris la mieux reconnue des vanités, il a su l’égaler aux occupations qui passent pour les plus nobles, il nous fait aussi entendre par là que tout est vain.
en général, compromis et comme enveloppés dans le reflet, une fois reconnu, de l’ensemble… On aurait à louer chez M. […] Je voudrais qu’ils reconnussent en lui au moins des dons peu communs de peintre à la plume, que tout au moins ils avouassent être en présence d’une merveilleuse vocation manquée.
Électre aperçoit d’abord la tresse de cheveux qu’Oreste a déposée sur la tombe, elle reconnaît l’empreinte de ses pas. Il apparaît enfin, image vivante de son père, et des signes certains le font reconnaître : — « Rapproche cette boucle de l’endroit où je l’ai coupée.
Voyons si lui-même, dans son ingénuité d’aveux, il ne nous mettra pas sur la voie pour la reconnaître. […] L’épisode de Graziella a des parties supérieurement traitées et dans lesquelles on reconnaît un pittoresque vrai, sans trop de mélange du faux descriptif, un sentiment vif de la nature et de la condition humaine.
Il était venu un matin à l’Arsenal pour voir des canons ; elle sortait pour aller à la messe aux Célestins : Il me reconnut, dit-elle, à ma livrée, mit pied à terre et me mena à la messe, et l’entendit avec moi. […] C’est Du Boulay qui eut l’idée de réunir, pour les faire lire en confidence à ses amis, les lettres et les papiers de Mme de Courcelles : J’avais à me justifier, dit ce galant homme, d’avoir aimé trop fidèlement et trop fortement la plus charmante créature de l’univers, à la vérité, mais la plus perfide et la plus légère, et que je reconnaissais pour telle.
Mais Bossuet reconnut mal cette marque d’estime. […] Il reconnut, sur la fin de sa vie, la vanité des sciences, & fit quelques vers galans* dans le goût de ceux de Quinault.
Un d’eux le reconnut, & avertit le chef que c’étoit le signor Ariosto. […] On a bien de la peine à les reconnoître aux différentes attitudes du corps.
Il faut bien reconnaître que les Hébreux ont été le premier peuple, et qu’ils ont conservé sans altération les monuments de leur histoire depuis le commencement du monde. […] D’après la division des trois âges que reconnaissaient les Égyptiens, Hermès devait être un dieu, puisque sa vie embrassait tout ce qu’on appelait l’âge des dieux dans cette nomenclature19.
Non ; il faut, en admirant le génie du poëte, reconnaître ses égarements et les imputer à ce culte matériel et corrupteur, à cette ivresse des sens où l’âme était plongée sous le beau ciel des Cyclades, entre les charmes de la nature et de l’art, devant les théories gracieuses qui déployaient leurs voiles blanches sur cette mer d’azur, et les processions de jeunes filles qui s’avançaient, en chantant, du rivage au temple de la belle déesse.. […] Le monde a vu cette révolution morale, cette dignité croissante de l’être humain ; et il hésite encore à la reconnaître et à la protéger !
C’est alors qu’on sent le prix d’une existence simple et dégagée de sensualités ; c’est alors qu’on trouve, dans le calme d’un cœur pur et dans l’énergie d’un corps sain, la récompense de la modération et des sacrifices de la jeunesse ; c’est alors enfin qu’on reconnaît combien la morale serait bonne encore quand même elle n’aurait pas de sanction dans une autre vie. » — « Jeunesse sensuelle, dit-il aussi, vieillesse douloureuse. » — « Un vieillard sans dignité est comme une femme sans pudeur. » Lorsqu’il en est particulièrement aux qualités et aux passions sociales, M. de Latena a de bonnes analyses et des définitions judicieuses.
Et vous reconnaîtrez tout de suite, dans celui qui parle, celui que vous aurez lu.
Dès la dédicace : Tous les baisers, etc…, j’ai vu ce qu’était votre livre et mon cœur a reconnu la poésie et, tendrement, à vous lire, il fleurissait.
Et si ces choses sont bâties de chic, comment les reconnaître, et donc, etc.]
Une connoissance profonde des hommes, des pensées neuves, des caracteres bien saisis, des peintures vraies, des réflexions justes, en font aimer la lecture à ceux qui ne sont pas révoltés par un certain pédantisme qui ne devroit pas se trouver au milieu des belles qualités que nous venons d’y reconnoître.
Tout reconnut ses loix, & ce guide fidele Aux Auteurs de ce temps sert encore de modele.
Il reste à montrer que cette conception chimérique de soi-même et des choses ne peut être évitée, qu’elle reconnaît à son principe une nécessité absolue et qu’il existe un antagonisme irréductible entre ces deux faits : existence et connaissance.
Il faut croire qu’à diverses périodes, ces œuvres, et celles qui en ont été inspirées, ont mieux satisfait les penchants d’un nombre notable de lecteurs français que les œuvres véritablement du terroir ; qu’en d’autres termes la littérature nationale n’a jamais suffi, et aujourd’hui moins que jamais, à exprimer les sentiments dominants de notre société, que celle-ci s’est mieux reconnue et complue dans les productions de certains génies étrangers que dans celles des poètes et des conteurs qu’elle a fait naître.
On reconnut Homère à son talent de rendre la nature avec une noble simplicité ; à sa poësie vive, pleine de force, d’harmonie & d’images ; à son érudition agréable, lorsqu’il décrit l’art de la guerre, les mœurs & les coutumes des peuples différens, les loix & la religion des Grecs, le caractère & le génie de leurs chefs, la situation des villes & des pays.
Guidé par ces mobiles blancheurs, Satan, comme un vaisseau longtemps battu de la tempête, reconnaît le port avec joie, et glisse plus doucement sur les vagues calmées.
On reconnaît ceux du bel âge de la France à la fermeté de leur style, au peu de recherche de leurs expressions, à la simplicité de leurs tours, et pourtant à une certaine construction de phrase grecque et latine qui, sans nuire au génie de la langue française, annonce les modèles dont ces hommes s’étaient nourris.
Telle est la réalité qu’il oppose aux divers systèmes des pouvoirs délégués ou consentis, et le fait fondamental, et divin puisqu’il est nécessaire, de l’existence du pouvoir bien avant qu’il ait été reconnu et consacré par nos faillibles et tardives légalités.
Ils reconnaissent que la justice est dans le camp des Alliés et décident unanimement de servir la France au nom de la République sociale.
Cela peut se reconnaître dans le dialecte parisien et normand du douzième siècle. […] Vous allez reconnaître distinctement votre langue. […] On y reconnaît l’empreinte du conquérant, et comme le coup de son gantelet de fer sur la nation vaincue. […] La langue s’y reconnaît mieux que dans les rimes alignées des trouvères. […] Thibaut, comte de Champagne, dans ses chants ingénieux, nous fera reconnaître l’idiome français.
Reconnaissons qu’il voulut savoir — et qu’il comprit tout en niant en même temps. […] L’on sent que tous se sont maintenant reconnus, et que l’on a pris position des deux côtés. […] Race silencieuse, tenace et patiente, d’âme primitive sous certains aspects, antireligieuse mais encore très attachée à des superstitions, à des coutumes, où l’on reconnaît la même source « Toi, tu es de chez nous ! […] Il parle d’attaques de la « Plume » : « Je tiens à ce propos, à vous adresser l’expression de mon dévouement, à reconnaître qu’en aucun temps vous n’exigeâtes de nous la moindre formule d’inféodation laissant au contraire à chacun sa pleine indépendance. […] Paul Verlaine, Baudelairien aussi à l’époque des Poèmes saturniens avait d’un Article enthousiaste salué au nom de la pléiade nouvelle le poète en qui ils reconnaissaient leur Maître.
On n’a pas le temps de s’arrêter, mais on a tout de même le temps de s’y reconnaître. […] Je suis forcé de reconnaître que M. […] Mais il faut reconnaître que le premier est plaisant, et d’un bon comique de farce. […] Nous reconnaissons immédiatement l’ombre de l’Homme à l’oreille cassée. […] Coquelin que je reconnus combien cette exhibition de nos gloires était incomplète.
On n’est guère disposé en France, ni élevé à reconnaître entre deux vers une autre différence que celle qui ressort de la nature même de la pensée ou du sentiment qu’ils expriment. […] Cependant il n’est question que de reconnaître et de préciser les caractères des genres, qui, s’ils en marquent les limites, c’est parce qu’ils en forment, à vrai dire, la définition. […] Ceux qui ne reconnaissent pas, qui ne retrouvent pas leur humanité dans le Néron de Racine, comment la retrouveraient-ils dans le Caligula de Dumas ? […] Si nous l’y reconnaissons aujourd’hui, c’est que nous le connaissons par ailleurs. […] Renan dont il semble que l’ancienneté nous permette aujourd’hui de reconnaître le sens et de mesurer l’action.
« 3º La poésie des cochons consiste à reconnaître universellement l’excellence des relavures et de l’orge moulue, ainsi que la félicité des cochons dont l’auge est en bon ordre, et qui ont le ventre plein. […] » Le langage, la poésie, les arts, l’Église, l’État ne sont que des symboles. « Ainsi, c’est par des symboles1428 que l’homme est guidé et commandé, heureux ou misérable ; il se trouve de toutes parts enveloppé des symboles reconnus comme tels ou non reconnus. […] Elles sont une vie plus ou moins trouble du mystère auguste et infini qui est au fond de l’univers. « Le plus grossier païen qui adora l’étoile Canope ou la pierre noire de la Caaba y reconnaissait une beauté, un sens divin… Canope luisant sur le désert, avec son éclat de diamant bleuâtre (cet étrange éclat bleuâtre qui semble celui d’un esprit), perçait jusqu’au cœur du sauvage Ismaélite qu’elle guidait à travers le désert vide. […] Il considère le poète, l’écrivain, l’artiste « comme un interprète de l’idée divine qui est au fond de toute apparence, comme un révélateur de l’infini », comme un représentant de son siècle, de sa nation, de son âge ; vous reconnaissez ici toutes les formules germaniques. […] La générosité et l’enthousiasme ont abondé ici comme chez vous ; reconnaissez-les sous une forme qui n’est point la vôtre.
Je connais la vie, mais je suis bonne et c’est ce qui m’a perdue. » C’est la règle, ils ne veulent pas se reconnaître. […] L’orgueil humain, même si c’était hors de toute contestation, serait très longtemps à le reconnaître. […] Je n’ai nulle sympathie pour aucun des individus de la « bande tragique », et je crois bien que Dieudonné a d’autres méfaits sur la conscience que l’attentat de la rue Ordener, mais c’est pour celui-là qu’on l’a condamné, et une seule personne l’a bien reconnu, reconnu avec véhémence, c’est la victime même, c’est-à-dire le seul être à qui il était bien permis d’avoir perdu, en un tel moment, tout son sang-froid. […] Mais le désordre, je le reconnais, est aussi un miracle. […] Pourtant il faut bien reconnaître qu’elles ont plus de vanité encore que de fierté et que leur force est en partie faite de feintise.
Il faut qu’une œuvre d’art soit nouvelle, et on la reconnaît nouvelle tout simplement à ceci qu’elle vous donne une sensation non encore éprouvée. […] Il faut reconnaître que M. […] On le reconnaît entre tous à son allure dévergondée et presque sauvage ; il brise les fleurs, s’il ne les cueille, et avec les roseaux il fait des radeaux qu’il jette au courant, vers le hasard, vers demain ; mais quand passent les jeunes femmes, il sourit et il s’alanguit. […] Ceux-là qui ne portent pas en eux l’âme de tout ce que le monde peut leur montrer, auront beau le regarder : ils ne le reconnaîtront pas, toute chose n’étant belle que selon la pensée de celui qui la regarde et la réfléchit en lui-même. […] Moréas a beau, comme sa Phébé, prendre des visages divers et même couvrir sa face de masques, on le reconnaît toujours entre ses frères : c’est un poète.
Il faut même reconnaître que l’intérêt romanesque se soutient assez bien ; mais les caractères manquent de réalité. […] je reconnais sans colère que mon esprit demande une autre nourriture, et je la lui donne. […] Il reconnaît à chaque pas les lieux qu’il a visités dans les rêves de son enfance. […] Mais, nous le reconnaissons volontiers, cette prudence n’était pas un calcul du poète impuissant. […] On croit les reconnaître et s’en souvenir, comme si on avait vécu avec eux plusieurs années.
Marie-Joseph, dont le cœur valait mieux que les passions, et qui avait des retours généreux après ses colères, reconnut-il jamais son tort envers celui avec qui il se rencontra plus tard dans la résistance à l’Empire ? […] Nous voici délivrés à la fois des habitudes serviles de l’ancien ordre et des exagérations passionnées du nouveau, appelés par notre gouvernement à délibérer sur de grands intérêts, reconnus par lui-même assez sages pour les bien déterminer ; eh ! […] Louis XVIII une fois reconnu roi de France, il fut membre d’une autre députation solennelle chargée de présenter au lieutenant général du royaume les hommages et les vœux de la cité antirévolutionnaire. […] Lainé) pour cette résolution qu’il avait prise de loin sans les consulter, il se laissa vaincre ; mais en le revoyant ils purent trop bien reconnaître que leur ami faisait un sacrifice au devoir. […] Après tout, quand on le considère de près et qu’on l’étudie, on reconnaît qu’il suivit toujours la même ligne de principes, le même ordre d’inspirations, puisées aux mêmes sources morales ; mais il était en progrès.
Cela pourtant va un peu loin ; Washington le sent, et, à propos de ses louables efforts pour la réhabilitation civile des Protestants, il lui écrit, dès 1785, ces paroles d’une intention plus générale : « Mes vœux les plus ardents accompagneront toujours vos entreprises ; mais souvenez-vous, mon cher ami, que c’est une partie de l’art militaire que de reconnaître le terrain avant de s’y engager trop avant. […] Un des tristes résultats de tant de violences précédentes avait été la nécessité généralement reconnue d’un coup d’État de plus pour sauver la liberté et l’ordre social. […] Après avoir partagé, au 18 brumaire, ma joie et mon espoir, vous ne tardâtes pas à reconnaître la funeste direction du nouveau gouvernement, et le droit que j’avais de ne pas m’y associer ; Bonaparte perdit par degrés l’estime et la bienveillance d’un des plus dignes appréciateurs du patriotisme et de la vraie gloire ; et cependant, avant d’ôter à la Hollande jusqu’au nom de république, la fortune semble avoir attendu, par respect, qu’elle eût perdu le plus grand et le meilleur de ses citoyens. […] Je puis dire que, pendant trente-quatre ans, je n’en ai pas éprouvé un instant l’ombre de gêne ; que toutes ses pratiques étaient sans affectation subordonnées à mes convenances ; que j’ai eu la satisfaction de voir mes amis les plus incrédules aussi constamment accueillis, aussi aimés, aussi estimés, et leur vertu aussi complètement reconnue que s’il n’y avait pas eu de différence d’opinions religieuses ; que jamais elle ne m’a exprimé autre chose que l’espoir qu’en y réfléchissant encore, avec la droiture de cœur qu’elle me connaissait, je finirais par être convaincu. […] J’ai reconnu moi-même ce lieu lorsque George m’y a conduit jeudi dernier, et que nous avons pu nous agenouiller et pleurer ensemble.
Addison, en amateur délicat des curiosités morales, suit complaisamment les bizarreries aimables de son cher sir Roger de Coverley, sourit, et d’une main discrète conduit l’excellent chevalier dans tous les faux pas qui peuvent mettre en lumière ses préjugés campagnards et sa générosité native, pendant qu’à côté de lui le malheureux Swift, dégradant l’homme jusqu’aux instincts de la bête de proie et de la bête de somme, supplicie la nature humaine en la forçant à se reconnaître dans l’exécrable portrait du Yahou. […] Leurs successeurs font de même, et toutes les diversités des tempéraments et des talents n’empêchent pas leurs œuvres de reconnaître une source unique et de concourir à un seul effet. […] Bien loin de les esquisser en passant, comme Gil-Blas, il appuie le trait désagréablement avec insistance, et le surcharge de tous les détails, sans considérer s’ils sont trop nombreux, sans reconnaître qu’ils sont excessifs, sans sentir qu’ils sont odieux, sans éprouver qu’ils sont dégoûtants. […] Nous comprenons maintenant qu’un âge oratoire le reconnaisse pour maître, et qu’on lui attribue dans l’éloquence la primauté qu’on reconnaît à Pope dans les vers. […] Au bas de chaque cage où il enferme un vice, il en inscrit le nom, il y ajoute la condamnation prononcée par l’Écriture ; il l’étale dans sa laideur, il l’enfonce dans son ordure, il le traîne à son supplice, en sorte qu’il n’y a pas de conscience si faussée qui ne le reconnaisse, ni de conscience si endurcie qui ne le prenne en horreur.
Qu’on la flagelle ou qu’on l’encense, ce qu’elle veut, c’est qu’on s’occupe d’elle et qu’on reconnaisse son pouvoir. […] On lui impose tous les devoirs des autres enfants ; On ne lui reconnaît aucun de leurs droits. […] On le reconnaissait tout de même à son effervescence, à l’intempérance de sa parole, à sa manie prometteuse. […] Et il est juste de reconnaître que, dans ces romans, M. […] On reconnaît et on salue au passage l’ode antique, l’épithalame, l’héroïde.
Il n’est que juste de reconnaître que M. […] Nous sommes à peine engagés sur une piste, nous reconnaissons que c’est une fausse piste. […] Cela se reconnaît au caractère des personnages et à l’espèce des sentiments qu’il met à la scène. […] Ne convient-il pas plutôt de reconnaître ce qu’il y a de généreux, — et surtout de désintéressé, — dans l’attitude de ces écrivains ? […] L’absence de travail est encore un des traits où se reconnaîtront les écrivains du prochain siècle.
César et Strabon nous font un portrait des Gaulois de leur temps, où certains traits nous permettent de nous reconnaître : le courage bouillant et inconsidéré, le manque de patience et de ténacité, la soudaineté et la mobilité des résolutions, l’amour de la nouveauté, un certain sens pratique, et la pente à se mêler des affaires d’autrui pour la justice, le goût de la parure et de l’ostentation, celui de la parole et de l’éloquence, tout cela est français, si l’on veut, autant que gaulois.
Nul n’a besoin de commentateurs pour reconnaître que ces trois faces d’un même talent sont des transformations successives, que ces trois fruits d’un même rameau sont d’une saveur et d’une valeur différentes.
L’imputation fut reconnue fausse par la suite ; mais personne à la cour n’était juge des preuves sur lesquelles le roi se décida au renvoi de madame de Navailles ; bien d’autres y auraient été trompés, et, certes, le fait était grave.
Dans tous, on reconnoît une adresse singuliere à profiter de certains traits de l’Histoire, pour parvenir au but qu’elle s’étoit proposé ; & ce but est toujours une morale agréablement embellie, seul mérite qui puisse faire valoir un Roman.
Les Poésies sacrées de M. de Pompignan seront vengées du froid ridicule d’un bon mot, par quiconque est capable de reconnoître les vraies beautés par-tout où elles se trouvent ; ou, pour mieux dire, elles le sont déjà par l’empressement qu’on met à les rechercher.
On reconnoît, dans la premiere, un Ecrivain, qui, comme dit M.
Pareils au peuple qui demeure pour nous, à jamais, l’initiateur de la beauté classique, nous n’hésiterons pas à dresser des autels à un dieu inconnu, à reconnaître des beautés en dehors de celles qui s’élevèrent, selon nos particulières théories d’art.
Les ouvrages des anciens se font reconnaître, nous dirions presque à leur sang.
Lorsque la veuve d’Hector dit à Céphise, dans Racine : Qu’il ait de ses aïeux un souvenir modeste : Il est du sang d’Hector, mais il en est le reste, qui ne reconnaît la chrétienne ?
Faites l’application de ce principe, vous en reconnaîtrez la justesse.
Voilà deux avantages que nous reconnaissons, et qui peuvent, à quelques égards, justifier vos principes, et balancer les beautés de la fable.
Quiconque a quelque critique et un bon sens pour l’histoire, pourra reconnaître que Milton a fait entrer dans le caractère de son Satan les perversités de ces hommes qui, vers le commencement du dix-septième siècle, couvrirent l’Angleterre de deuil : on y sent la même obstination, le même enthousiasme, le même orgueil, le même esprit de rébellion et d’indépendance ; on retrouve dans le monarque infernal ces fameux niveleurs qui, se séparant de la religion de leur pays, avaient secoué le joug de tout gouvernement légitime, et s’étaient révoltés à la fois contre Dieu et contre les hommes.
Il est certain que l’Abbé du Bos est trop diffus ; mais ce défaut ne doit pas empêcher de reconnoître qu’il a eu des vues nouvelles sur bien des objets, & ses réfléxions sont encore très-utiles.
Pour résoudre ces difficultés, il faut reconnaître qu’il y eut deux sortes de poètes tragiques, et autant de lyriques.
Le troisième âge fut celui de la nature humaine intelligente, et par cela même modérée, bienveillante et raisonnable ; elle reconnaît pour lois la conscience, la raison, le devoir.
Il reconnaît son pouvoir dans la cabane du pauvre comme dans l’ensemble du globe. […] Ainsi, les tableaux de Bernardin de Saint-Pierre ont toujours quelque chose d’idéal, sans cependant jamais sortir de la nature ; il est comme ces statuaires des temps antiques, qui reproduisaient la figure humaine avec des proportions si parfaites, que sous une forme mortelle on reconnaissait une divinité. […] et comment se refuserait-on à reconnaître l’influence de Fénelon dans un livre qui renferme une multitude de morceaux semblables ? […] Caton, le plus sage des hommes, fut accusé quarante-quatre fois ; et ces accusations n’eurent d’autre résultat que de forcer ses ennemis à reconnaître quarante-quatre fois sa vertu. […] Dans nos souhaits innocents, nous désirions être tout vue, pour jouir des riches couleurs de l’aurore ; tout odorat, pour sentir les parfums de nos plantes ; tout ouïe, pour entendre les concerts de nos oiseaux ; tout cœur, pour reconnaître ces bienfaits.
Le bon, l’indulgent Jupiter fit essayer à sa fille ces différens vêtements, et les hommes reconnurent qu’aucun ne lui allait aussi bien que celui sous lequel elle se montra au sortir de la tête de son père. […] -est-ce que vous ne reconnaissez pas ces lieux ? […] L’émotion vive de l’âme laisse, même après qu’elle est passée, des traces sur le visage qu’il n’est pas difficile de reconnaître. […] … cette analogie se reconnaîtrait-elle par l’expérience ? […] J’ai ouï dire à des personnes qui avaient fréquenté longtemps les bords de la mer, qu’elles reconnaissaient sur cette toile ce ciel, ces nuées, ce temps, toute cette composition.
Au contact des poètes d’outre-Manche il prit conscience de lui-même, et reconnut où se trouvait sa vraie famille intellectuelle. […] Sarrazin en a eu pleinement conscience lorsqu’il a dédié son dernier livre à la jeunesse idéaliste qui l’a reconnu comme un frère aîné, « à celle d’aujourd’hui, dit-il, mais aussi à celle de demain ». […] Rien qu’à cette façon de poser le problème, conformément, je le reconnais volontiers, aux idées de l’immense majorité des esprits à l’heure présente, je vois apparaître l’opposition fondamentale qu’il y a entre sa conception et la mienne. […] Un seul critérium, d’ailleurs, je le reconnais, pourra prouver que nous avons raison : la création d’œuvres nouvelles, conformes à notre conception de l’Univers. […] Les vers libres, qu’une critique superficielle prétendrait reconnaître simplement à ce qu’ils sont inégaux sur le papier, peuvent traduire des harmonies complexes et profondes, et ils ont cet avantage de ne pas supporter la médiocrité.
D’ailleurs on avoit à se plaindre de ce pape : il reconnut l’archiduc Charles pour roi d’Espagne, après avoir reconnu Philippe V. […] Reconnoît-on ses pères & le philosophe de la nation pour des dieux ? […] On y reconnut la main tremblante d’un vieillard moribond, mais dont l’ame étoit celle d’un philosophe. […] Ainsi l’université de Paris ne reconnoît que les sujets qu’elle a formés ou aggrégés. […] A quels autres signes croiroit on qu’on reconnut les chrétiens des jésuites ?
Ce passé une fois ressaisi, ces hôtes invisibles et silencieux une fois reconnus, on jouit mieux, ce semble, du séjour, on le possède alors véritablement, et le Genius loci, que notre hommage a rendu propice, anime doucement chaque objet, y met l’âme secrète, et accompagne désormais tous nos pas. […] Parmi nos illustres ancêtres les bibliothécaires (car je n’y veux reconnaître ni compter les esclaves et les affranchis), il cite donc en première ligne Démétrius de Phalere, Callimaque, Ératosthène, Apollonius, Zénodote, chez les Ptolémées, pour la bibliothèque d’Alexandrie ; Vairon et Hygin à Rome, pour la Palatine. […] S’il y avait erreur de sa part à cela, comme il est bienséant aujourd’hui de le reconnaître, ce n’était pas à la cour romaine qu’il pouvait s’en guérir ; ce n’était point en quittant la France sous Richelieu pour la retrouver bientôt sous Mazarin. […] Moreau et à moi, nous dit Guy Patin ; et quand il avoit reconnu la moindre chose dans quelqu’un, il n’en revenoit jamais : sentiment qu’il avoit pris des Italiens. » La mort trop prompte du cardinal de Bagni, en juillet 1641, laissa Naudé au dépourvu et comme naufragé sur le rivage. […] Il considéra dès lors sa fortune comme un peu manquée ; il reconnut qu’après avoir tant usé de lui, de sa science et de ses services, on ne lui avait ménagé aucun sort pour l’avenir ; il en devint disposé à se plaindre quelquefois de la destinée plus qu’il n’avait coutume de faire auparavant243.
Qui n’a rencontré dans le monde, depuis qu’on n’a plus le loisir d’y être parfaitement honnête homme , de ces gens qui sont charmants avec vous le soir, à condition d’être brusques s’ils vous rencontrent le matin, et de s’arranger, du plus loin qu’ils vous avisent, pour ne vous point reconnaître ? […] Aussi la vraie honnêteté est indépendante de la fortune ; comme elle s’en passe au besoin, elle ne s’y arrête pas chez les autres ; elle n’est dépaysée nulle part : « Un honnête homme de grande vue est si peu sujet aux préventions que, si un Indien d’un rare mérite venoit à la cour de France et qu’il se pût expliquer, il ne perdroit pas auprès de lui le moindre de ses avantages ; car, sitôt que la vérité se montre, un esprit raisonnable se plaît à la reconnoître, et sans balancer. » Mais ici il devient évident que la vue du chevalier s’agrandit, qu’il est sorti de l’empire de la mode ; son savoir-vivre s’élève jusqu’à n’être qu’une forme du bene beateque vivere des sages ; son honnêteté n’est plus que la philosophie même, revêtue de tous ses charmes, et il a le droit de s’écrier : « Je ne comprends rien sous le ciel au-dessus de l’honnêteté : c’est la quintessence de toutes les vertus. » Vous êtes-vous jamais demandé quelle nuance précise il y a entre l’honnête homme et le galant homme ? […] Il faut longtemps jouir de ce plaisir-là pour aimer toujours, car on ne se plaît guère à recevoir ce qu’on n’a pas beaucoup désiré, et quand on l’a de la sorte, on s’accoutume à le négliger, et d’ordinaire on n’en revient plus. » Pour le coup, on reconnaît, tissez bien, ce me semble, le maître de Mme de Maintenon ; et qui donc sut mettre en pratique, comme elle, cet art de douce et puissante lenteur ? […] En même temps il reconnaissait son charme, qui faisait qu’on lui restait attaché malgré tout : « Si cela vous paroît peu vraisemblable à cause que vous m’avez extrêmement négligé, lui disait-il, je vous apprends qu’entre vos merveilleuses qualités qui font tant de bruit, vous en avez une que je regarde comme un enchantement : c’est que les gens de bon goût qui vous ont bien connue ne vous sauroient quitter, de quelque adresse que vous usiez pour vous en défaire, et j’en suis un fidèle témoin. » Tout cela est finement observé et n’est pas du tout ridicule. […] On reconnaît encore le joueur d’alors et le contemporain du chevalier de Grammont à de certaines anecdotes ; en voici une qu’il entame en ces termes : « Il y avoit à la suite de Monsieur un fort galant homme qui ne laissoit pourtant pas d’user de quelque industrie en jouant… » (Œuv.
C’est cet esprit, qui, commun à ce moment à l’Angleterre et à la France, imprime son image dans la diversité infinie des œuvres littéraires, en sorte que dans son ascendant partout visible on ne peut s’empêcher de reconnaître la présence d’une de ces forces intérieures qui ploient et règlent le cours du génie humain. […] Son premier jet est si bien refondu et transformé, qu’on ne le reconnaît plus dans la copie définitive. […] et pourtant, par gageure sans doute, il a raconté dans la Boucle de cheveux une partie d’hombre ; on la suit, on l’entend, on reconnaît les costumes, « les quatre rois, majestés révérées, avec leurs favoris blancs et leurs barbes fourchues, les quatre belles dames dont les mains portent une fleur, emblème expressif de leur aimable puissance, les quatre valets en robes retroussées, troupe fidèle, une toque sur la tête, une hallebarde à la main, puis les quatre armées bigarrées, brillant cortége, rangées en bataille sur la plaine de velours vert1123. » On voit les atouts, les coupes, les levées, puis un instant après le café, la porcelaine, les cuillers, l’esprit de feu (entendez l’alcool) ; ce sont déjà les procédés et les périphrases de Delille. […] Vous reconnaissez là une espèce de déisme et d’optimisme, comme il y en avait beaucoup alors, empruntés, comme ceux de Rousseau, à la théodicée de Leibnitz, mais tempérés, effacés et arrangés à l’usage des honnêtes gens. […] Il peint toutes les petites choses, il n’en a pas honte, elles l’intéressent ; il prend plaisir à « l’odeur de la laiterie » ; vous l’entendez parler des chenilles, et « de la feuille qui se recroqueville empoisonnée par leur morsure », des oiseaux qui, sentant venir la pluie, « lissent d’huile leur plumage pour que l’eau luisante puisse glisser sur leur corps. » Il sent si bien les objets qu’il les fait voir : on reconnaît le paysage anglais, vert et humide, à demi noyé de vapeurs mouvantes, taché çà et là de nuages violacés qui fondent en ondées sur l’horizon qu’ils ternissent, mais où la lumière se distille finement tamisée dans la brume, et dont le ciel lavé reluit par instants avec une incomparable pureté.
Aristote, semblable au mathématicien dont il parle, ne reconnaît d’autre agrément que la vérité. […] « Reconnaissons donc que tous les individus dont nous venons de parler ont leur part de vertu morale, mais que la sagesse de l’homme n’est pas celle de la femme, que son courage, son équité, ne sont pas les mêmes, comme le pensait Socrate, et que la force de l’un est toute de commandement, celle de l’autre, toute de soumission. […] « Ainsi les principes de l’ostracisme appliqué aux supériorités bien reconnues ne sont pas dénués de toute équité politique. […] Le seul parti que naturellement tous les citoyens semblent devoir adopter, est de se soumettre de leur plein gré à ce grand homme, et de le prendre pour roi durant sa vie entière. » XXIV Il conclut ici que la royauté ne peut être reconnue à moins que l’individu couronné ne soit évidemment supérieur en talent et en vertu à tous les autres. […] « Nous avons indiqué déjà la cause première à laquelle il faut rapporter la diversité de toutes les constitutions, la voici : tous les systèmes politiques, quelque divers qu’ils soient, reconnaissent des droits et une égalité proportionnelle entre les citoyens, mais tous s’en écartent dans l’application.
Fait d’une importance capitale pour moi, je crus ne pouvoir m’empêcher de reconnaître que les divers arts isolés, séparés, cultivés à part, ne pouvaient, à quelque hauteur que de grands génies eussent porté en définitive leur puissance d’expression, essayer pourtant, sans retomber dans leur rudesse native et se corrompre fatalement, de remplacer d’une façon quelconque cet art d’une portée sans limite qui résultait précisément de leur réunion. […] La situation subordonnée du théâtre dans notre vie publique, situation dont j’avais si bien reconnu le vice, ne me permettait pas de croire que cet idéal pût arriver de nos jours à une réalisation complète, je le désignai donc sous le nom d’Œuvre d’art de l’avenir. » (Lettre sur la musique Toutes les idées formulées isolément dans les premiers écrits se trouvent réunies logiquement dans le grand traité : Opéra et Drame (Leipzig, 1856). […] On reconnaît là tout ensemble le zèle, le talent et l’autorité du chef d’orchestre, qui a présidé aux répétitions de l’œuvre : j’ai nommé M. […] Et je reconnais aussi qu’une œuvre d’art aussi complètement originale et basée sur un travail musical on ne peut plus complexe, exige une initiation comme toute création de génie, et que cette initiation demande encore un effort qui disparaîtra graduellement à mesure que l’esprit s’habituera à cette nouvelle forme d’art, comme il s’est habitué à l’ancien opéra.. […] Voici la conclusion de l’étude : Désormais la démonstration est faite, nous n’avons plus qu’à marcher dans la voie progressive ; Bruxelles a reconnu la signature de Richard Wagner ; ses œuvres entrent dans notre répertoire ; elles marchent invinciblement à cette popularité que bien d’anciens opéras détenaient injustement.
L’homme commence par reconnaître les séquences de jour et de nuit ; puis les séquences mensuelles produites par la lune ; puis le cycle annuel du soleil ; puis le cycle des éclipses de lune ; puis les périodes des planètes supérieures ; tandis que l’astronomie moderne détermine le long intervalle, après lequel l’axe de la terre reviendra occuper le même point dans le ciel ; et l’époque à peine concevable dans laquelle se reproduiront les perturbations planétaires142. » Un nouveau progrès consiste en ce que la correspondance croît en spécialité. […] « Tel est le cas du minéralogiste qui, pour reconnaître si une masse de matière peut être appropriée à un certain usage, en examine le mode de cristallisation, la couleur, la texture, la dureté, le clivage, la fracture, le degré de transparence, l’éclat, le poids spécifique, le goût, l’odeur, la fusibilité, les propriétés électriques et magnétiques, et dirige sa conduite d’après toutes ces choses prises ensemble. » La correspondance entre l’être et son milieu s’est donc constituée pleinement par des conquêtes successives ; il ne reste plus qu’à coordonner ces divers éléments. […] Et chaque fois aussi qu’une intelligence développée reconnaît comme étant essentiellement de la même nature des objets, phénomènes, ou lois qui étaient précédemment considérés comme distincts, cela implique une intégration d’états de conscience. […] Cela a produit naturellement un culte de la raison qui conduit quelques gens à supposer faussement que sa portée est sans bornes, et d’autres, qui reconnaissent des bornes à cette portée, à supposer faussement que, dans ses bornes, ses données sont indubitables. […] « Je reconnais, dit-il, avec Aug.
On croit le reconnaître dans une statue fluviale du Capitole ; une autre sculpture du Vatican le montre sous la forme d’un grand vieillard, au torse écaillé, dont la barbe houleuse roule des dauphins dans ses boucles. […] Tu vois où conduit une langue effrénée. » Le bonhomme de dieu seul bien au fond qu’il rabâche un peu, et il l’avoue avec une naïveté débonnaire : — « Peut-être te semblé-je dire des vieilleries », — λέγειν τάδε άρχαια. — Serviable d’ailleurs, dévoué à sa manière, il se croit bien en cour, et offre à Prométhée d’arranger l’affaire avec Zeus, s’il consent à reconnaître le droit du plus fort. […] » Prométhée reconnaît la fille d’Inachos et les Océanides lui demandent curieusement son histoire. […] Le Christianisme ne s’y trompa pas ; dès son avènement, il le reconnut comme un précurseur. […] Mais Eschyle reconnaîtrait encore son Titan dans ce Prométhée transformé qui n’est autre que l’Homme éternel.
Mesurez-les, tant que vous voudrez, de la coiffure à la chaussure, et vous verrez combien de différences : c’est bien le même amour du luxe, de la toilette et de l’ornement ; c’est bien la même mignardise et la même affectation, et le même caprice, tout proche de la beauté dont il est la juste contrefaçon ; oui, c’est bien, au premier abord, la même coquette, et perfide et galante, le même piège et ses dangers, — et pourtant d’un siècle à l’autre. il nous est impossible de reconnaître et de retrouver les modèles de ces portraits. […] Comme aussi je reconnais à certains signes ineffaçables, l’antiquaire acharné dont les filles à peine vêtues se refusent un tour de lit et du linge blanc. — Celui-ci est toujours le premier homme du monde pour les papillons ; celui-là rêve, la veille, par où et comment il pourra se faire remarquer le jour suivant. […] Nous ne saurions reconnaître cette série de bienfaits qu’en traitant de même leurs descendants ! […] Où sont-elles, où les avez-vous rencontrées, à quels signes les avez-vous reconnues ? […] Peut-être on devrait reconnaître au fond de cette obstination à toucher cette faible somme, qu’elle devait trouver si chèrement payée, maintenant qu’elle était riche et âgée, une certaine reconnaissance envers ce roi et cette reine, si misérablement traînés à l’échafaud !
D’abord, on fit tête à l’orage, et bien vite il fallut reconnaître que l’orage était le plus fort. […] » Certes, il faut reconnaître au fond de cette plaisanterie une certaine ambition honorable pour tout le monde ; la droiture et le bon sens de M. […] Elle parle, — vous la reconnaissez à sa voix. […] Elle reconnaissait les esprits forts à leur assurance, à leur air protecteur, et, pour ceux-là, elle était impitoyable. […] Michaud a-t-il relevé quelques erreurs de détail de l’Histoire des Croisades, des erreurs que, lui seul, il pouvait reconnaître.
La grande affaire est de le démêler, d’avoir le meilleur, de ne pas suivre un autre à sa place ; c’est un grand bonheur qu’il y en ait un, et qu’on le reconnaisse. Ceux-ci, sans élection populaire ni désignation d’en haut, le trouvent tout fait et tout reconnu dans le propriétaire important, ancien habitant du pays, puissant par ses amis, ses protégés, ses fermiers, intéressé plus que personne par ses grands biens aux affaires de la commune, expert en des intérêts que sa famille manie depuis trois générations, plus capable par son éducation de donner le bon conseil, et par ses influences de mener à bien l’entreprise commune. […] Partout il y a des chefs reconnus, respectés, qu’on suit avec confiance et déférence, qui se sentent responsables et portent le poids en même temps que les avantages de leur dignité. […] — Ils se piquent de peinture, du moins ils l’étudient avec une minutie étonnante, à la chinoise ; ils sont capables de peindre une botte de foin si exactement, qu’un botaniste reconnaîtra l’espèce de chaque tige ; celui-ci s’est installé sous une tente pendant trois mois dans une bruyère afin de connaître à fond la bruyère ; beaucoup sont des observateurs excellents, surtout de l’expression morale, et réussiront très-bien à vous montrer l’âme par le visage ; on s’instruit à les regarder, on fait avec eux un cours de psychologie ; ils peuvent illustrer un roman ; on sera touché par l’intention poétique et rêveuse de plusieurs de leurs paysages.
Nous disons neutralité apparente à l’extérieur, parce qu’en le lisant dans ses douze volumes et en l’étudiant impartialement dans sa vie, on reconnaît avec bonheur qu’il n’était nullement neutre, encore moins pervers ; qu’il aimait l’honnête, qu’il le pratiquait pour lui-même, et que son tort est d’avoir eu l’intelligence du mal, mais non le goût. […] Dans cette mêlée de races barbares greffées sur l’antique sol italien, dans cet amalgame de Grecs, Byzantins ou Campaniens, de Sicules, de Lombards, d’Étrusques, de Liguriens, de Vénètes, d’Allobroges, de Germains, de vieux Romains ayant oublié jusqu’aux noms de leurs ancêtres, gouvernés par un pontife dont la capitale est une Église sur le tombeau du pêcheur de Galilée ; dans cette confusion de la théocratie donnant des lois au temps au nom de l’éternité, d’aristocraties féodales comme Venise, de comptoirs souverains comme Gênes, d’ateliers républicains comme Florence, de monarchies aventurées et nomades comme le royaume de Naples, de tyrannies fortifiées dans des repaires de brigands plus ou moins policés et gouvernés par l’assassinat : Lucques, Pise, Bologne, Parme, Modène, Reggio, Ferrare, Ravenne, Milan, Padoue ; de cités municipales régies par des citoyens et envahies par des incursions de barbares des Alpes, telles que Turin et toutes les provinces cisalpines, sous les serres des comtes de Savoie, des marquis de Montferrat ou des châtelains du Tyrol, qui peut reconnaître l’Italie des Romains, celle des Scipions, l’Italie des Césars ? […] Telle était la reine Caroline quand la révolution française éclata ; elle y reconnut ses propres principes, mais elle y reconnut bientôt aussi l’ennemie des trônes et le levier des peuples ; le détrônement, les infortunes, le meurtre inexcusable de Louis XVI, de sa sœur Marie-Antoinette, la jetèrent dans une terreur qui se convertit en haine dans les âmes fortes.
Valjean le reconnaît et le fait disparaître, par un trou dans le pavé, sous les solitudes des égouts de Paris. […] Niez cette puissance, c’est la folie ; reconnaissez-la en l’adorant, c’est la sagesse. […] De là des troubles ; mais, après ces troubles, on reconnaît qu’il y a du chemin de fait. […] Il faut le reconnaître ou s’appeler Titan ; tout remettre en question, comme les utopistes ; se constituer en état de révolte radicale contre la forme de l’humanité tout entière, c’est-à-dire en état de démence et de frénésie contre la force des choses, cette souveraineté absolue de Dieu.
Lorsque Romaine, amenée à l’hôpital, reconnaît dans Barnier son ancien amant, est opérée par lui d’un cancer au sein et meurt désespérée et blasphémante, ce qui se passe chez la sœur Philomène, ce qui s’éveille et se glisse d’inconsciente jalousie de femme sous ses scrupules et ses effrois de sainte, tout cela est profondément observé et nuancé à ravir Anatole (dans Manette Salomon) n’est pas seulement supérieur aux bohèmes de Mürger par la variété et la vérité souvent douloureuse de ses aventures : la nature complexe de cet étourdissant et très sympathique raté est merveilleusement démêlée. […] On semblait vouloir reconnaître dans sa façon de peindre la beauté de son âme. […] Mais, cet heureux mensonge signalé, il faut reconnaître que les conversations qui abondent dans ces romans ont au plus haut point l’allure et le ton de la conversation contemporaine, parisienne, boulevardière, de la conversation de café ou d’atelier, avec son laisser-aller, son débraillé, ses façons sans-gêne et touche-à-tout, ses hardiesses, son hyperbolisme, son tour sceptique et paradoxal, avec ses prétentions aussi et ses affectations, son ironie tournée au tic, sa manie de feux d’artifice. […] Allons plus loin : dans presque tous les cas, si l’on essaye de substituer à la locution extraordinaire inventée par MM. de Goncourt une locution conforme aux habitudes de la langue, on reconnaîtra que celle qu’ils ont préférée est réellement plus expressive, contient quelque chose de plus.
Je reconnais que le sens moral ou ses équivalents sont de l’essence de l’humanité ; mais je maintiens que c’est parler inexactement que d’appliquer la même dénomination à des faits si divers. […] Ils donnent un langage et une voix à ces instincts muets qui, comprimés dans la foule, être essentiellement bègue, aspirent à s’exprimer, et qui se reconnaissent dans leurs accents : « Ô poète sublime, lui disent-ils, nous étions muets, et tu nous as donné une voix. […] La foule lui prête la grande matière ; l’homme de génie l’exprime, et en lui donnant la forme la fait être : alors la foule, qui sent, mais ne sait point parler, se reconnaît et s’exclame. […] Les grands hommes peuvent deviner par avance ce que tous verront bientôt ; ce sont les éclaireurs de la grande armée ; ils peuvent, dans leur marche leste et aventureuse, reconnaître avant elle les plaines riantes et les pics élevés.
. — Gurnémanz a reconnu Parsifal ; il comprend que cette lance est la lance merveilleuse enfin reconquise, que le simple d’autrefois est devenu par de longues épreuves l’élu d’aujourd’hui et s’abandonne à un transport d’admiration. […] « Nous, dit Schopenhauer, qui, philosophes, cherchons à scruter la valeur éthique des actions, et pour qui celle-ci seule importe, nous reconnaîtrons hautement, — sans craindre l’éternelle majorité de la vulgarité et de la platitude, — que le plus grand, le plus important et le plus significatif phénomène n’est pas l’homme qui conquiert le monde, mais l’homme qui le dompte. » — Dans l’ordre intellectuel, tout est aspiration, progression, désir sans fin ; c’est-à-dire éternelle Négation de ce qui est atteint : l’Ironie, cette formule des poètes contemporains de Schopenhauer, n’était autre chose que la destruction par la pensée de nos adorations. […] Parce que chaque action, vue, pour ainsi dire, de dedans, est Volonté ; et qu’étendant cette observation de nous-mêmes à ce qui nous entoure, nous arrivons nécessairement à reconnaître en toute chose, en les montagnes, les fleuves et les forêts, l’expression d’une Volonté. […] Mais les clairvoyants, qui savent lire plus avant dans l’âme contemporaine n’hésiteront pas à y reconnaître de nombreux et forts sous-courants spiritualistes et régénérateurs, qui trahissent sa douloureuse et profonde aspiration vers l’idéal.
Plus tard, quand l’Opéra avait donné le Tannhaeuser, nous devons reconnaître qu’au lieu d’écouter impartialement son œuvre, comme on l’aurait dû, avec ce sentiment de curiosité déférente qui est de simple bienséance envers les artistes célèbres, on l’avait brutalement égorgée sans miséricorde. […] Boulanger sera peut-être parmi les siffleurs, mais qu’il ne se reconnaît pas en état d’envahir l’Opéra-Comique à la tête d’une cohue de « protestataires ». […] Si on joue Lohengrin et si des scènes scandaleuses s’ensuivent, je ne veux pas qu’on puisse m’accuser de les avoir provoquées. » Ainsi, personne ne reconnaît avoir voulu organiser la résistance à Lohengrin ; tout le monde avoue que Lohengrin est un chef-d’œuvre et chacun rejette sur la foule — la mystérieuse foule — la responsabilité des désordres prévus. […] On reconnaît bien ici le style empreint de bonhomie de celui qu’on surnommait « l’oncle ».
Wundt, lui, reconnaît mieux la force de la volonté sous celle des idées, mais, nous l’avons vu, il place cette force uniquement dans l’attention, dans ce qu’il appelle l’aperception, c’est-à-dire la saisie des objets par l’intelligence. […] Les photographies du docteur Duchenne montrent un vieillard dont les muscles galvanisés donnent au visage l’expression de la terreur et de l’horreur extrême, accompagnée de grande souffrance ; Darwin ayant montré cette photographie à vingt-trois personnes, presque toutes reconnurent immédiatement l’expression d’horreur ; quelques-unes y crurent voir une fureur extrême, à cause de l’expression d’effort et de lutte violente qui est commune aux deux sentiments. […] Le marin, le cavalier, le danseur, se laissent facilement reconnaître ; les banquiers, les notaires, les avocats ont aussi des gestes qui leur sont propres ; mais ici le diagnostic devient incertain. » On sait que Lavater, quand on lui envoya le masque de Mirabeau, devina « un homme d’une énergie terrible, indomptable dans son audace, inépuisable en ressources, résolu, hautain. » On sait encore qu’un jour un inconnu se présenta à Lavater : « Regardez-moi bien et devinez qui je suis. » Lavater devina d’abord un homme de lettres, puis un homme habitué à saisir le côté ridicule des choses, ayant de l’originalité, de l’esprit. […] Le Français exprime tout ce qu’il sent par sa physionomie et ses gestes ; aussi se reconnaît-il au premier coup d’œil et ne peut-il rien cacher. » — « La mimique de l’Anglais, selon Mantegazza, est fière et dure, celle de l’Allemand lourde, bienveillante et toujours disgracieuse.
X Quoi qu’il en soit, cette première composition littéraire, échappée à une imagination de douze ans, parut aux maîtres et aux élèves supérieure au moins, par sa naïveté, aux redites classiques de mes condisciples ; on y reconnaissait l’accent, on y entendait le cri du coteau natal sous le soleil aimé du pauvre villageois à Midi. […] Ils me rappelèrent bien plus vivement cette scène, longtemps après, quand, visitant moi-même Athènes, la colline de l’Acropole, la roche taillée du Pnyx et les pentes dénudées du Pentélique, je reconnus une ressemblance parfaite entre ces collines rocailleuses de l’Attique et les collines ruisselantes de pierres de mon pays. […] J’entrai pour rappeler mon chien, cause de ce désordre ; M. de Valmont, assis sous un noisetier contre le mur, se trouva en face de moi ; il me reconnut, me sourit, me salua, et m’invita à entrer, avec une confiance très-étrangère à son caractère, mais inspirée sans doute par la candeur de ma figure et de mon âge. […] Ai-je goût pour rentrer dans ces lices politiques qui, fussent-elles rouvertes, ne reconnaîtraient plus nos accents posthumes ?
On lit même dans l’historien littéraire de la Bourgogne, Papillon, une anecdote presque gaillarde que je donne pour ce qu’elle vaut, mais qui concorde pour le fond avec le témoignage de Saumaise : Jeannin (selon un recueil manuscrit cité par Papillon) étant revenu à Bourges pour la seconde fois et étant allé avec ses anciens camarades voir le sieur Cujas incognito, Cujas ne laissa pas de le reconnaître, quelque soin qu’il prît de se déguiser, et, s’étant jeté à son cou, il commença à lui dire : « Est-ce toi, Romorantin ? […] Dès son entrée au barreau, il fut reconnu de tous, dit Saumaise, « facile aux affaires, subtil aux conseils, fertile aux raisons, haut à parler et profond à écrire ».
Après être allé quelques semaines voir sa maison et sa famille en Gascogne, avant la fin de l’année, Montluc retourne en Italie chercher de nouveaux hasards : dès les premiers moments, il s’y expose en soldat ; il va à cheval reconnaître une ville qu’on doit assiéger, à moins de cinquante pas et en plein jour. […] Quand on a lu cette partie des mémoires de Montluc et qu’on a surmonté l’impression d’horreur que causent et ses propres cruautés et celles qu’il prétend punir, on reconnaît mieux comment, en de pareils temps, les édits de L’Hôpital durent manquer leur effet ou en produire un qui, bientôt traduit et dénaturé au gré des passions, ne serait pas resté profitable et conforme à la pure idée de tolérancee.
C’est pendant sa maladie et sa convalescence en 1686, que le roi entre de plus en plus dans l’idée de Saint-Cyr, qu’il la prend à cœur, l’adopte tout entière et se l’approprie magnifiquement : Dieu sait, écrivait Mme de Maintenon en octobre 1686 à l’une des dames de Saint-Louis, Dieu sait que je n’ai jamais pensé à faire un aussi grand établissement que le vôtre, et que je n’avais point d’autres vues que de m’occuper de quelques bonnes œuvres pendant ma vie, ne me croyant point obligée à rien de plus, et ne trouvant que trop de maisons religieuses ; moins j’ai eu de part à ce dessein et plus j’y reconnais la volonté de Dieu, ce qui me le fait beaucoup plus aimer que si c’était mon ouvrage : il a conduit le roi à cette fondation, comme vous l’avez su, lui qui, de son côté, ne veut plus souffrir de nouveaux, établissements. […] Je prends au hasard deux pièces qui nous feront tout aussitôt pénétrer dans ce monde moral plus ému qui existe, il faut bien le reconnaître, et dont il ne servirait à rien de s’interdire et de se fermer rigoureusement l’aspect, depuis que Rousseau, Goethe, Chateaubriand, Byron et Lamartine sont venus.
Seulement reconnaissons les différences du procédé et des habitudes de vie. […] Mais après avoir encore une fois savouré ces tristes délices de la lecture d’Adolphe, avoir goûté cette finesse consommée d’expérience sociale, cette vérité aride et terne, si bien dissoute et démêlée, et avoir reconnu, par-dessus tout, le cachet d’élégance et de distinction achevée empreint dans l’ensemble, je n’ai pu m’empêcher d’admirer la différence des temps, des sociétés, des écoles diverses.
On dit et l’on croit reconnaître que l’introduction est de M. […] La plupart de ces anecdotes que nous lui avons entendu raconter ont trouvé place dans les présents volumes ; je les y reconnais, et je crois l’entendre.
Je les ai reconnus qui se tenaient à vingt pas de moi, détournant la tête quand je les regardais, en s’extasiant sûrement de voir des pays si loin. […] Mais ici, et dans ce mot échappé du cœur, on reconnaît plutôt encore la religion de l’amitié.
Boileau n’aimait et n’estimait guère rien en dehors des livres ; il n’avait nul goût pour les sciences, pas même la curiosité de se tenir au courant de leurs résultats généraux ; le tour précieux et maniéré, que Fontenelle donna à son livre de la Pluralité des Mondes, l’empêcha toujours d’en reconnaître la vérité et la supériorité philosophique. […] Ses Contes (on le reconnaît tout d’abord) ne sont pas de ceux qui sentent en rien l’œuvre individuelle.
Le petit nombre de juges compétents en pareille matière reconnaissent que, dans cette voie des investigations analytiques comparées M. […] On reconnaît les bons et excellents esprits à cette marque, qu’ils sentent le Besoin de faire parfaitement tout ce qu’ils font.