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24. (1772) Bibliothèque d’un homme de goût, ou Avis sur le choix des meilleurs livres écrits en notre langue sur tous les genres de sciences et de littérature. Tome II « Bibliotheque d’un homme de goût — Chapitre III. Des Livres nécessaires pour l’étude de l’Histoire sacrée & ecclésiastique. » pp. 32-86

Fleuri, Godeau, Evêque de Vence, avoit écrit l’Histoire de l’Eglise depuis le commencement du monde jusqu’à la fin du neuviéme siècle, in-fol. […] Il faut puiser la connoissance de la doctrine de la morale de l’Eglise dans les Peres qui l’ont illustrée. […] Le Pere Général l’obligea de rentrer dans le monde à cause de son traité de l’Eglise de Rome. […] Pourrions-nous oublier dans cette liste l’histoire des variations des Eglises Protestantes, par Bossuet ? […] Il prouve qu’ils avoient des Prêtres parmi eux & des Eglises où ils s’assembloient.

25. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Le Mystère du Siège d’Orléans ou Jeanne d’Arc, et à ce propos de l’ancien théâtre français »

Le drame recommença au sein de l’Église sans que celle-ci, pour ainsi dire, s’en aperçût, et sans qu’elle s’avisât que c’était le drame qui renaissait. […] Dans l’Église chrétienne, au moyen âge, les choses se passèrent d’une façon analogue. […] C’était un premier degré de sécularisation, un premier pas vers le profane ; mais ce pas ne se fait pas encore hors de l’Église ; si l’on sort du sanctuaire, on ne sort pas de la nef. […] L’acteur qui fait Dieu le Père sort de l’église et y rentre alternativement ; les ornements sacerdotaux sont employés dans la représentation ; l’église est à la fois coulisse, vestiaire. […] Félix Clément (1 vol. in-8°, librairie Le Clore, 1860), le chapitre deuxième de la première partie, qui traite des drames liturgiques dans les églises.

26. (1895) Histoire de la littérature française « Seconde partie. Du moyen âge à la Renaissance — Livre I. Décomposition du Moyen âge — Chapitre I. Le quatorzième siècle (1328-1420) »

Décadence de la féodalité et de l’Église : dessèchement des formes poétiques du moyen âge. […] L’Église de France est son Église, qui ne devra obéir au chef spirituel de Rome qu’autorisée et contrôlée par le chef temporel de Paris. […] L’Église ne peut consommer, placer, régir tout ce qu’elle a formé. […] Il entre dans l’Église, et s’attache à la reine Philippe de Hainaut, femme d’Edouard III. […] En 1386, on le voit à l’Église en Flandre, puis à Riom, en Auvergne.

27. (1920) La mêlée symboliste. II. 1890-1900 « Le symbolisme ésotérique » pp. 91-110

D’ailleurs, l’Église les a désavoués. […] Il a pris sa doctrine à l’Église, mais non sa révérence, ni les fleurs du beau langage. […] L’Église se méfie des poètes, qu’elle considère comme des insurgés. […] Édouard Schuré, un autre philosophe poète idéaliste, nous explique pourquoi il s’est détaché de l’Église. […] Depuis qu’elle est devenue romaine, l’Église s’est employée à immobiliser les esprits au lieu de les conduire à la découverte.

28. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Troisième partie — Section 17, quand ont fini les représentations somptueuses des anciens. De l’excellence de leurs chants » pp. 296-308

Nous retrouvons les regles de la musique poëtique dans les vers des anciens, et je crois que l’église peut bien nous avoir conservé quelqu’unes de leurs mélopées dans le chant de son office. […] Ainsi ce que Justin ne veut pas, c’est qu’en chantant dans les églises les airs composez par les payens, on les y déclame, il veut qu’on les chante sans faire aucun geste. Quoi qu’il en soit, l’office de l’église contient plusieurs hymnes composées avant le sac de Rome par Totila. […] Lorsque cet évenement arriva, saint Gregoire Le Grand, le même qui a composé ou reglé l’office et le chant gregorien qui sont encore en usage dans un très-grand nombre d’églises catholiques, étoit déja né. […] Si dans mille ans d’icy les chants prophanes qui sont composez depuis quatre-vingt ans étoient perdus, et si les chants d’église qui se sont faits depuis le même temps s’étoient conservez, ne pourroit-on pas alors se faire une idée de la beauté de nos chants prophanes sur celle de nos chants d’église.

29. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « VIII. M. de Chalambert. Histoire de la Ligue sous le règne de Henri III et de Henri IV, ou Quinze ans de l’histoire de France » pp. 195-211

Fait par l’Église, le peuple fait la Ligue à son tour. Mais la Ligue, c’est l’Église encore, c’est l’Église à l’état de résistance ouverte, officielle, déclarée. Qu’on étudie l’Église elle-même, l’Église calme n’est-elle pas, pour qui jette sur elle un regard profond, une ligue à l’état latent ? L’Église n’est point un tas de pierres, c’est l’union des âmes dans le bon vouloir. Au point de vue de la politique, l’Église et le peuple sont identiques, car, en dehors de l’Église, il n’y a pour les multitudes que l’esclavage antique et ses hontes ou le morcellement moderne et ses fanges.

30. (1902) Les œuvres et les hommes. Le roman contemporain. XVIII « Ferdinand Fabre »

Rien, au contraire, ne montre mieux que le livre de Fabre la largeur d’idées de cette Église qu’ils font étroite comme leurs pauvres têtes, et qui est vaste comme la coupole sous laquelle doivent s’abriter les nations ! […] Mais il a certainement le sentiment très respectueux de la force et de la grandeur de l’Église, quoique son regard d’observateur ait parfois beaucoup de hardiesse. […] Edgar Poe a écrit des Contes fantastiques avec le sentiment frissonnant de leur réalité, et un artiste qui comprend l’Église et le prêtre, et qui aurait dû aller jusqu’au bout et tout comprendre, n’ose pas faire parler franchement et distinctement un crucifix ! […] L’Église, l’esprit de l’Église, la sagesse romaine qui juge à travers le péché, qui peut pardonner tout à ses serviteurs quand ils ont cette chose rare maintenant et qu’on appelle « le caractère », ont inspiré heureusement Fabre. […] Il a gardé l’Église et ses portes comme l’autre les portes du Paradis.

31. (1886) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Deuxième série « Ferdinand Fabre  »

Il serait excellent d’avoir été élevé par un curé, d’avoir été enfant de chœur, familier avec les choses d’église et de sacristie. […] Ainsi pas une phrase qui ne sente en plein l’église ; pas une qui ne porte la soutane. […] Puis il n’y a pas seulement, dans l’Église, des doux et des patients ; Grégoire VII ni Jules II n’ont laissé une réputation de mansuétude, et, de nos jours encore, on a vu des hommes d’Église au nom desquels on avait pris l’habitude d’accoler le mot « fougueux » comme une épithète homérique. […] Il se convainc qu’un prêtre ne fait pas à l’Église sa part ; et dès lors il faut ou qu’il se révolte ou qu’il s’immole. […] C’est qu’il a eu deux nourrices : la montagne et l’Église.

32. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XXIII. P. Enfantin »

Il prouve, ce manifeste ironique ou patelin (et peut-être tous les deux), que le saint-simonisme a gardé la prétention d’être une Église, une Église cachée et qui se croit persécutée sans doute, car le mépris d’un temps, qui a encore à sa disposition les lucidités du ridicule et l’éclat de rire, peut paraître, à certaines gens sensibles, une persécution. […] Puisqu’il apporte ici une parole dont il ne se servait plus depuis longtemps, nous lui demanderons où se tient cette Église dont il parle comme d’une force organisée et agissante ? […] Saint Paul savait le nombre des chrétiens d’Éphèse, de Corinthe, de chez les Galates… Si vraiment l’Église saint-simonienne est une réalité, si effectivement M.  […] Il voit le capucin de l’Église romaine avec un dégoût, plein d’entrailles, il est vrai, car M.  […] Sans donner à ce bruit plus de consistance qu’il n’en a, toujours est-il qu’il est inconcevable qu’à propos d’une des mille prédications de l’Église catholique, M. 

33. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Troisième partie. Beaux-arts et littérature. — Livre premier. Beaux-arts. — Chapitre III. Partie historique de la Peinture chez les Modernes. »

On livra aux flammes les tableaux des églises. De stupides et furieux hérésiarques, assez semblables aux puritains de Cromwel, hachèrent à coups de sabre les mosaïques de l’église de Notre-Dame de Constantinople et du palais des Blaquernes. […] Ces efforts se remarquent surtout dans les églises bâties par Théodoric, Luitprand et Didier. Le même esprit de religion inspira Charlemagne ; et l’église des Apôtres, élevée par ce grand prince à Florence, passe encore, même aujourd’hui, pour un assez beau monument129. […] Tout se fit pour les églises, et par la protection des pontifes et des princes religieux.

34. (1883) Souvenirs d’enfance et de jeunesse « Chapitre V. Le Séminaire Saint-Sulpice (1882) »

Tout reposant pour lui sur l’autorité infaillible de l’Écriture et de l’Église, il n’y a pas à choisir. Un seul dogme abandonné, un seul enseignement de l’Église repoussé, c’est la négation de l’Église et de la révélation. Dans une Église fondée sur l’autorité divine, on est aussi hérétique pour nier un seul point que pour nier le tout. […] Je sais bien la mesure des concessions que l’Église peut faire et de celles qu’il ne faut pas lui demander. […] Je cessai de prendre part aux sacrements de l’Église, tout en ayant le même goût que par le passé pour ses prières.

35. (1856) Jonathan Swift, sa vie et ses œuvres pp. 5-62

Son grand-père, vicaire de l’Église anglicane, dans le comté d’Hereford et tout dévoué à la cause royale pendant les guerres civiles, avait eu quatorze enfants. […] Il attaque les adversaires de son église par des armes, qui ne laissent subsister aucune église ; il porte aux adversaires de son parti des atteintes qui intéressent le genre humain. […] On se plaint de l’observation du dimanche, mais on oublie l’utilité des églises pour les marchés, les rendez-vous d’affaires et d’amour, et surtout le sommeil. […] Les mêmes déceptions l’attendaient dans ce nouveau camp, moins libre encore que le premier dans son action sur l’Église. […] Jusqu’au bout, enfin, il s’indigna des atteintes portées par le Parlement d’Irlande aux intérêts de l’Église, et une série de pièces satiriques atteste son inutile ressentiment.

36. (1904) Les œuvres et les hommes. Romanciers d’hier et d’avant-hier. XIX « Paul Meurice » pp. 231-241

Mais il est très compté comme auteur dramatique, — un auteur dramatique de seconde ou de troisième catégorie, — et surtout comme un des prêtres de l’Église Hugo, de cette Église où Victor Hugo, l’archevêque, selon l’expression si comique et si vivante de Cousin, pontifie depuis plus de trente ans, sous son fameux dais historique. […] L’auteur de Césara 25, le prêtre de l’Église Hugo, est aussi, par la même occurrence, l’apôtre de cette autre Église humanitaire qui flambe neuf et va remplacer incessamment la vieille religion divine qui avait suffi jusque-là aux plus forts et aux plus nobles esprits, mais qui ne suffit plus maintenant, même aux plus imbéciles… Or, c’est dans les intérêts de cette religion humanitaire que l’auteur de Fanfan la Tulipe, laissant là les amusettes du théâtre où il s’est oublié si longtemps, s’est mis à écrire cette grande pancarte, qui aura plusieurs cartons, et qu’il appelle Les Chevaliers de l’Esprit, titre un peu vague. […] Césara, l’ennemi de l’Église romaine, meurt révolté, mais béni par l’Église romaine, plus forte que lui. […] Meurice, le révolutionnaire, comme Césara, l’homme d’Hegel et d’Hugo, est aussi, malgré lui, béni par l’Église, dans ce livre, levé, comme une arme, contre elle ! […] Mais que peut cette poussière de diamant brisé contre le diamant de l’Église ?

37. (1895) Histoire de la littérature française « Cinquième partie. Le dix-huitième siècle — Livre I. Les origines du dix-huitième siècle — Chapitre I. Vue générale »

Mais nulle voix ne met directement en question les principes de la foi : nulle voix surtout n’attaque la puissance de l’Eglise dans l’ordre temporel. La dispute est entre les églises, entre les sectes ; il ne s’agit que d’orthodoxie et d’hérésie. […] L’Église pâtit du petit esprit des sectes, de leur fanatisme injurieux. […] Ces prélats font sentir à la nation la disproportion des richesses et des services de l’Église. […] L’Église ne comptera pas parmi les forces intellectuelles du siècle.

38. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « Ch. de Rémusat. Abélard, drame philosophique » pp. 237-250

Ces gens-là ne sont pas sots comme nous… Jetez une robe de moine, pour les élargir, sur les étroites et grêles épaules de Charles de Rémusat, et dressez devant lui l’Église dans la majesté d’un Concile, et vous n’aurez plus le petit philosophe moderne qui n’a plus d’hérésie à oser, dans ce xixe  siècle incrédule et tolérant comme la prostitution ! Vous n’aurez plus l’aimable éclectique, le sceptique large et indulgent, le respectueux devant les faits accomplis, le doux qui hait toujours l’Église, en dessous, mais qui, en la haïssant, ne craint plus pour sa peau. […] Regardez comme il y a diminué et calomnié l’homme de l’Église, le grand saint Bernard ! Partout, vous sentez, dans le drame que voici, le trait de Nestor, tombant affaibli aux pieds de l’Église, mais dirigé contre sa poitrine. Heureusement que l’ange de l’Église n’a pas eu besoin de dessécher le nerf de la cuisse d’un Jacob qui n’était plus jeune quand il voulait lutter encore, et qui ne fut jamais musculeux… L’Église, qui a condamné, en concile, Abélard, n’assemblera pas de concile pour juger les Abélards modernes.

39. (1896) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Sixième série « Louis Veuillot »

Triomphante, souffrante, militante, l’Église est une en ces trois états. […] On parle des droits de l’État, et de les défendre contre l’Église, comme si l’Église n’était pas seule compétente pour définir et fixer tous les droits, y compris ceux de l’État. […] Mais il a été contre le régime de Juillet, et contre l’Empire, du jour où l’Empire a trahi l’Église. […] Il admet, il désire la séparation de l’Église et de l’État. « Les propriétés de l’Église sont soumises aux charges communes, et elle devra, dans un temps et moyennant les dispositions transitoires nécessaires, subvenir aux dépenses du culte. » En somme, il réclame pour l’Église « toute la liberté ». […] Reste donc l’Église.

40. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre II. L’époque romantique — Chapitre I. Polémistes et orateurs, 1815-1851 »

Pareillement dans la religion, un seul pouvoir, le pape : plus d’Église gallicane, plus de libertés gallicanes ; le pape souverain et infaillible. […] L’Église ne le comprit pas. […] Il estimait la religion nécessaire à l’ordre et à la conservation de la société ; elle était partie intégrante de sa raison : il voulait des Églises fortement organisées, Église catholique, Église calviniste, Église spiritualiste, excluant ou matant les têtes ardentes ou indisciplinées, les ultras de toute couleur, unies entre elles par une bonne confraternité administrative et par une coopération journalière. […] Mais il ne renonça point à ses tendances, à son désir de réconcilier l’Église et le monde moderne, le dogme et la liberté. […] Des maux de l’Église, Épilogue (XII, 269).

41. (1883) Souvenirs d’enfance et de jeunesse « Chapitre I. Le broyeur de lin  (1876) »

Le presbytère touchait à l’église. […] Le sacristain avait été vu dans l’église tout le temps de l’office. […] Elle avait un sentiment exquis de l’église. On ne comprendrait plus cela maintenant à Paris, où l’église signifie peu de chose. […] Il allait à l’église, mais il ne se mettait pas à son banc.

42. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « Chastel, Doisy, Mézières »

Chastel, car il a beaucoup de talent, et il a pris dans la lecture des Pères des empreintes si chrétiennes, qu’on oublie parfois qu’il est un révolté contre l’Église dont il écrit l’histoire. […] Après avoir tracé, d’une plume simple et qui touche, l’histoire des premiers siècles de l’Église, que le protestantisme appelle son origine comme nous, sans songer à sa grande rupture, E.  […] C’est ainsi que partout, dans le livre des Études sur la Chanté chrétienne, Notre-Seigneur Jésus-Christ n’est jamais appelé que « le plus grand des révélateurs », et que les miracles enseignés par l’Église sont regardés de cet œil tout ensemble défiant et superficiel que nous connaissons. […] Martin Doisy catholique, aussi à l’aise dans son sujet que les protestants le sont peu, par la raison naturelle que pour juger l’Église qui n’a jamais varié, il ne faut pas être devenu — si tard que cela ait été — l’ennemi de cette Église, Martin Doisy a montré par tous les développements de son ouvrage que la charité, qui a sauvé et nourri le monde, n’a pas concentré son action dans les premiers temps du christianisme. […] Menteur comme le serait un bâtard qui voudrait cacher sa naissance, ce Communisme, on ne l’ignore pas, se vante d’une origine chrétienne, tandis qu’il est païen de naissance et d’instinct, et pour justifier ses théories il a coutume de s’appuyer sur l’exemple de la primitive Église, dans laquelle la communauté des biens existait.

43. (1898) L’esprit nouveau dans la vie artistique, sociale et religieuse « III — La rentrée dans l’ordre »

Sa conscience s’éclaire : « La simple honnêteté ne lui commandait-elle pas de sortir d’une Église, où il niait que Dieu pût se trouver ?  […] Contre ces deux forces dangereuses l’Église a des armes. […] L’Église ne se contente pas du séminaire et du vœu de virginité pour imprimer sa volonté despotique dans l’être de ses ministres. […] individualité suppose volonté et le prêtre ne peut avoir une volonté personnelle, celle de l’Église en tenant lieu. La volonté de l’Église est le principe moteur de l’existence du prêtre ; lui-même n’est rien par définition.

44. (1854) Histoire de la littérature française. Tome I « Livre II — Chapitre troisième »

Calvin fonde l’Église et le gouvernement de Genève. — § III. […] Calvin fonde l’église et le gouvernement de Genève. […] Il en voulut depuis à l’Église romaine d’un abus dont il avait profité ; et quand il revint à Noyon pour prêcher, il avait déjà le doute dans le cœur. […] La confession qu’il dressa pour l’église de Genève, et la violence de ses attaques contre les mœurs de cette ville, si longtemps ville d’Église, la divisèrent en deux partis. […] Un décurion assisté d’un ministre, allait de maison en maison demander à chacun l’état de sa conscience par rapport à la religion, Calvin avait subordonné l’État à l’Église de telle sorte que l’Église fut la loi, et l’État la puissance matérielle chargée de la faire exécuter.

45. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre III. Les grands artistes classiques — Chapitre VI. Bossuet et Bourdaloue »

Il écrit sa Réfutation du Catéchisme de Paul Ferry, ministre de l’Église réformée. […] Il n’en a publié qu’un seul, sur l’Unité de l’Église, qui était comme le manifeste du gallicanisme. […] En somme, Saurin fait honneur à l’Eglise française de Hollande. […] Molinos, prêtre de l’église de Saragosse, fut emprisonné en 1685, et condamné en août 1687. […] Voyez le sermon sur l’Eminente dignité des pauvres dans l’Eglise.

46. (1908) Les œuvres et les hommes XXIV. Voyageurs et romanciers « L’Abbé *** »

Publié en Belgique, chez les éditeurs Lacroix et Verboeckhoven, les fonctionnaires publics du gouvernement Victor Hugo, descendu de la même planche qui, sans se rompre, a porté les Misérables, et bien autrement fort de café, disait-on, contre le sacerdoce et l’Église, que tout ce qu’on nous avait servi jusque-là, ce livre, intitulé sinistrement : le Maudit, était l’œuvre d’un prêtre, non d’un prêtre ébauché et d’un fuyard de séminaire comme Ernest Renan, mais d’un vrai prêtre, complet et héroïque, qui n’avait pas mis son nom à son ouvrage, parbleu ! […] L’abbé Julio de la Clavière est ce prêtre que l’Église, toujours au Moyen Age, persécute, traque et maudit, parce qu’il a dans la tète et dans la poitrine l’idée et le sentiment de l’Église transformée. […] C’est alors que les jésuites, qui gouvernent l’Église, comme on sait, et font du pape leur polichinelle, lèvent sur Julio, pour ne plus le baisser jamais, le terrible glaive dont, suivant un cliché célèbre, la poignée est à Rome et la pointe partout, et, cette pointe de l’épée aux reins, ils le chassent de Toulouse et l’envoient dans la petite cure de Saint-Aventin, sise aux montagnes des Pyrénées, où ce curé amateur va faire désormais de la botanique et de la géologie, entre ses messes. […] Que peut donc un pareil bonhomme contre l’Église catholique, apostolique et romaine ? […] Il ne m’est guères permis, à moi, d’écrire le mot d’idiot45, mais je crois bien que c’est ce mot-là qu’il faudrait ici, en parlant de ces trois énormes volumes sans couleur, sans passion, sans esprit, sans gaîté, et que les éditeurs belges ont pu seuls nous donner comme un grand coup porté à l’Église dans le pays de Voltaire, où il faut de la verve et de la gaîté même aux camouflets du voyou.

47. (1885) Préfaces tirées des Œuvres complètes de Victor Hugo « Préfaces des romans — Préface et note de « Notre-Dame de Paris » (1831-1832) — Préface (1831) »

Il se demanda, il chercha à deviner quelle pouvait être l’âme en peine qui n’avait pas voulu quitter ce monde sans laisser ce stigmate de crime ou de malheur au front de la vieille église. […] Car c’est ainsi qu’on agit depuis tantôt deux cents ans avec les merveilleuses églises du moyen-âge. […] L’homme qui a écrit ce mot sur ce mur s’est effacé, il y a plusieurs siècles, du milieu des générations, le mot s’est à son tour effacé du mur de l’église, l’église elle-même s’effacera bientôt peut-être de la terre.

48. (1895) Histoire de la littérature française « Première partie. Le Moyen âge — Livre II. Littérature bourgeoise — Chapitre III. Littérature didactique et morale »

Leur religion les faisait jeûner et ouvrir leur bourse à l’Église ou aux pauvres, elle ne leur inspirait pas de réfléchir sur la Trinité ou sur le mode d’union de l’âme au corps. […] Mais l’institution monastique est l’âme de l’Église : l’idéal chrétien ne se réalise à peu près que par l’ascétisme des couvents, où s’épanouissent les saintes fleurs de pauvreté et de pureté. L’Église (et non pas seulement les moines) est ennemie de la Nature : et Jean de Meung, qui ne s’attaque qu’aux moines, le voit bien obscurément. […] Cependant Jean de Meung se contente de consacrer la Nature au nom de Dieu : il laisse à un autre, qui viendra à son heure, à Rabelais, la charge d’excommunier l’Église, Antiphysie, au nom de la Nature. […] Jean de Meung n’aperçoit pas que sa pensée le met hors de l’Église, et en ruine les fondements.

49. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Procès de Jeanne d’arc, publiés pour la première fois par M. J. Quicherat. (6 vol. in-8º.) » pp. 399-420

Ces conseils, c’était de se bien conduire, de fréquenter l’église, et aussi d’aller en France. […] La chaumière de son père touchait de près à l’église. […] Une fois montée sur son coursier, la Pucelle, continue Gui de Laval, « se tourna vers l’huis de l’église qui était bien prochain, et dit en assez claire voix de femme : “Vous les prêtres et gens d’Église, faites procession et prières à Dieu.” » Puis elle reprit son chemin, en disant : « Tirez avant, tirez avant !  […] L’Église hiérarchique et officielle, l’Église, telle qu’elle était organisée alors, lui semblait respectable sans doute, mais ne lui semblait venir qu’après ses voix. Elle se fût sentie de force à commander aux gens d’Église et aux prêtres, à les redresser et à les remettre dans leur chemin, tout comme elle y remettait les princes, chevaliers et capitaines.

50. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Jasmin. (Troisième volume de ses Poésies.) (1851.) » pp. 309-329

Pourtant elle dépérit, une fièvre lente la dévore ; elle est mourante, et bientôt le prêtre la recommande à l’église aux prières de tous. […] Un des épisodes les plus touchants, les plus honorables et les plus caractéristiques de son existence de poète-troubadour, est son pèlerinage pour l’église de Vergt. […] Je me dirai : J’étais nu ; l’Église, je m’en souviens, m’a vêtu bien souvent pendant que j’étais petit. […] Il avait composé pour cette solennité une pièce nouvelle, intitulée Le Prêtre sans église, et inspirée des mêmes sentiments élevés et droits. […] Jasmin commence et récite la pièce qu’on peut lire dans son troisième volume : Le Prêtre sans église.

51. (1869) Cours familier de littérature. XXVIII « CLXVIIIe entretien. Fénelon, (suite) »

L’Église s’émut de ces doctrines. […] Madame Guyon, enfermée de son côté dans un monastère de la rue Saint-Antoine, subit les interrogatoires sévères de l’Église, et se lava victorieusement de toutes les accusations de scandale et d’impiété. […] C’était la justification, par les textes tirés des livres et des opinions même des oracles de l’Église, de l’amour désintéressé de Dieu. […] La justification de Fénelon parut un crime contre l’autorité de l’oracle de l’Église de France. […] Évêque et théologien, il compose plusieurs ouvrages, instructions et mémoires sur les sujets difficiles qui, en ce moment même, occupent l’Église de France.

52. (1895) Les œuvres et les hommes. Journalistes et polémistes, chroniqueurs et pamphlétaires. XV « Philarète Chasles » pp. 147-177

qu’il faut savoir quand on est professeur, en présence de ces faits très peu dramatiques, et qui ne prêtent guères aux déclamations et aux effets de plume, je conçois qu’un ennemi de l’Église fût légèrement contrarié. […] Et voici comment Cydalise s’y est prise pour tout gâter : Elle savait trop qu’il était impossible d’accuser directement l’Église, en une circonstance où l’Église avait été si admirablement maternelle. L’Église avait multiplié les avertissements à Galilée. […] » Mais cette simplicité forte, cette vérité de bon sens, Galilée voulut l’embrouiller, et l’Église ne le voulut point. […] L’Église est donc inattaquable.

53. (1895) Histoire de la littérature française « Première partie. Le Moyen âge — Introduction. Origines de la littérature française — 4. Physionomie générale du moyen âge. »

Sans l’Église, la seule mesure du droit risquait d’être la force. […] Même tout l’art dont est capable ce moyen âge qui lut les chefs-d’œuvre de la poésie antique sans y remarquer la fine splendeur des formes, cet art sortira de là : il manifestera l’énergie de son individualisme par ses châteaux, et la vivacité de sa foi par ses églises. […] Plus pur est le sentiment qui dresse les églises, et plus belle la forme par où il se réalise en elles. Selon le mot tant de fois cité d’un des plus ignorants moines qui aient fait le métier de chroniqueur, « le monde se pare d’une blanche robe d’églises neuves ». Saint-Front de Périgueux, l’abbaye du Mont-Saint-Michel, les églises d’Auvergne, tout cet art roman qui s’épanouit au xie  siècle, l’art gothique qui le continue, voilà par où le moyen âge participa au désir de créer, à la faculté de sentir le beau.

54. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Troisième partie. Beaux-arts et littérature. — Livre V. Harmonies de la religion chrétienne avec les scènes de la nature et les passions du cœur humain. — Chapitre III. Des Ruines en général. — Qu’il y en a de deux espèces. »

Nous vîmes une église dont les toits étaient enfoncés, les plombs des fenêtres arrachés, et les portes fermées avec des planches mises debout. […] Sur les murailles on voyait des peintures, à demi effacées, représentant la vie de saint Bruno ; un cadran était resté sur un des pignons de l’église ; et dans le sanctuaire, au lieu de cette hymne de paix qui s’élevait jadis en l’honneur des morts, on entendait crier l’instrument du manœuvre qui sciait des tombeaux. […] La nuit approchait : comme nous passions entre deux murs, dans une rue déserte, tout à coup le son d’un orgue vint frapper notre oreille, et les paroles du cantique Laudate Dominum, omnes gentes, sortirent du fond d’une église voisine ; c’était alors l’octave du Saint-Sacrement. […] Loin d’accuser mes décrets, imite ces serviteurs fidèles qui bénissent les coups de ma main, jusque sous les débris où je les écrase. » Nous entrâmes dans l’église, au moment où le prêtre donnait la bénédiction.

55. (1917) Les diverses familles spirituelles de la France « Chapitre viii »

Nos soldats se disent qu’en se dévouant à la France ils sauvent, celui-ci l’Église catholique, celui-là les Églises protestantes, cet autre la République sociale, cet autre enfin la libre pensée. […] Jamais en France, à aucune époque de notre histoire, ni l’Église, ni surtout les ordres monastiques n’ont eu cette dévotion irraisonnée à la force que l’on voit aux prêtres et aux moines allemands.‌ […] La France a toujours occupé dans l’Église une place privilégiée et les papes ont souvent proclamé à quel rang notre patrie a droit. […] Maintes fois les catholiques ont pu penser qu’en défendant la France, ils défendaient l’Église ; jamais autant que dans cette guerre ils n’ont rempli ce rôle.

56. (1889) Histoire de la littérature française. Tome III (16e éd.) «  Chapitre treizième.  »

. — Constitution de l’Église gallicane. — Sermon sur l’unité de l’Église. — Histoire des Variations. — § XI. […] Il fait partie de ces traditions de l’Eglise, dont le corps entier était accepté et défendu par Bossuet. […] Constitution de l’Église gallicane. — Sermon sur l’unité de l’Église. […] Voilà cet idéal de la tradition, de la suite de l’Eglise, dans le gouvernement comme dans la doctrine, personnifié et contemplé sous la figure de l’Église, épouse fidèle et jalouse, qui n’admet pas de partage dans l’affection de l’époux. […] L’Eglise y avait même pris quelques-uns de ses saints.

57. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Deuxième partie. — Chapitre XVIII. »

La trace de ces influences se retrouve dans quelques débris des anciens offices de l’Église grecque. […] Ce fut un des caractères de l’Église grecque. […] Mais un autre hymne au même Dieu a dû, par la rapidité du mètre et la simplicité des images, se mêler dans le culte public aux chants populaires de l’Église. […] Né vingt ans après et arrivé tard dans l’Église, l’évêque de Ptolémaïs, le disciple et le fidèle ami de la savante Hypatie, le seul grand lettré de l’Église, depuis Origène, qui, dans ces temps de fondation fervente, n’ait pas reçu le nom de saint, le platonicien Synésius mérite aussi d’être étudié comme poëte philosophe et religieux. […] Cette confiance de l’Église ne sera pas trompée par Synésius.

58. (1888) Les œuvres et les hommes. Les Historiens. X. « H. Forneron » pp. 149-199

Il paraît qu’on aime avec cela… Et c’est avec cela que Philippe II a aimé Dieu et son Église. […] Il tendit toute sa vie, par amour de l’Église, à se faire l’Église, à absorber, à usurper la Papauté. Par amour de l’Église, il aurait violé l’unité de l’Église, troublé la hiérarchie chrétienne, et compromis, lui si croyant, jusqu’à la pureté de sa foi ! […] Il a aimé Dieu et l’Église du premier amour de sa vie et à travers tous les sentiments de sa vie, s’il en eut d’autres, ce qui est douteux. En dehors de Dieu et de l’Église, il n’eut peut-être que des sensations.

59. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Le journal de Casaubon » pp. 385-404

Ajoutez que l’Église de Paris m’a envoyé tout exprès Dumoulin pour s’opposer à ce que je vinsse ici (à Fontainebleau), dussé-je souffrir tous les supplices ! […] Il nous paraît dur de condamner ton ancienne Église comme coupable d’une telle ignorance, qu’il nous faille aujourd’hui croire le contraire de sa foi pour entrer dans le chemin de la vie. Or, sur un si grand mystère et sur quelques autres articles de grande importance, je suis certain, ou du moins je crois l’être, que l’ancienne Église a pensé tout autrement que ceux de doctrine toute récente. […] (Il en dit ici plus long encore pour et contre l’antique Église et l’Église romaine, et il ajoute en gémissant 81  :) Ô Dieu qui lis dans les cœurs, tu vois les plaies de mon âme, sois mon médecin ! […] La vue de cette Église bien ordonnée rendit un peu de repos à son esprit inquiet : surtout personne ne le tourmentait plus sur sa foi : il cessa d’être, comme il disait, sur le tranchant du rasoir.

60. (1895) Histoire de la littérature française « Seconde partie. Du moyen âge à la Renaissance — Livre II. Littérature dramatique — Chapitre I. Le théâtre avant le quinzième siècle »

Les pompes, les cérémonies de l’Église étaient sa joie. […] D’autres enfants, aux voûtes de l’église, figurant des anges, entamaient le Gloria. […] On ne se contente plus des chants de l’Église ni du texte des livres saints. […] Elles sortent de l’Église, où de toute façon elles ne sont plus à leur place : elles s’étalent sur le parvis, devant la foule assemblée. […] Dans le drame d’Adam, l’église sert de coulisse, au moins à Dieu, qui y rentre quand il a parlé.

61. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome I « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Bossuet, et Fénélon. » pp. 265-289

Personne alors, dans l’église Gallicane, n’avoit plus de réputation. […] Il fait autorité dans l’église. […] Les femmes dévorèrent le livre : elles l’appelloient un livre d’or, ou la bible de la petite église. […] Louis s’impatiente : il écrit lui-même à sa sainteté, pour qu’elle donne la paix à l’église de France. […] Mademoiselle Desvieux lui fit le sacrifice de sa passion & de son état, pour ne pas mettre obstacle à la fortune que l’éloquence de son amant lui procureroit dans l’église.

62. (1895) Les œuvres et les hommes. Journalistes et polémistes, chroniqueurs et pamphlétaires. XV « Crétineau-Joly » pp. 247-262

Ce fut un ardent et brave serviteur de l’Église et des monarchies ; il eut un talent que je vais tout à l’heure caractériser. […] On ne s’imaginait guères alors que ce petit tonsuré deviendrait un jour le mousquetaire de l’Église contre la Révolution, comme le petit tonsuré de Savoie était devenu le mousquetaire de l’Empereur contre Louis XIV. […] Il chouanna pour l’Église (dans son Histoire de l’Église) contre la Révolution, toujours présente et jamais désarmée. […] Crétineau-Joly, qu’on a dit vendu et qui n’a pas même été récompensé au prorata de ses services, ne s’est jamais soucié que d’une seule chose : la mort de la Révolution, et quand il la rencontra un pied dans l’Église, car elle l’y a mis un jour, il le dit, voilà tout ! par pur dévouement à l’Église.

63. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome II « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Fontenelle, et le père Baltus. » pp. 2-16

Il rappelle quantité de contes puériles, de livres apocryphes, de subterfuges qu’on imaginoit dans les premiers siècles de l’église pour l’accréditer, & dont elle n’avoit pas besoin. […] La première est pour venger les pères de l’église & les anciens chrétiens des raisonnemens qu’on leur fait tenir, & pour exposer les motifs qu’ils ont eu de croire que les oracles des payens étoient rendus par les démons ; la seconde, pour détruire les preuves directes par lesquelles on établissoit que les oracles étoient l’unique ouvrage de quelques prêtres imposteurs ou dupes ; la troisième, pour faire voir que la naissance de Jésus-Christ est l’époque de la cessation des oracles, & qu’ils n’ont cessé que par le pouvoir de la croix & par l’invocation de son nom. […] Le sentiment contraire est celui de bien des payens, de plusieurs sectes de philosophes, des pères qui font le plus autorité dans l’église, de l’écriture elle-même : il est conforme aux intérêts de la religion. […] Le détail de ces troubles imaginaires n’est qu’une allégorie des maux réels produits par les divisions arrivées dans l’église, figurée par la reine Mliséo. Ses deux filles, Mréo, Eénegu, sont, l’une, l’église Romaine, & l’autre, l’église de Genève.

64. (1909) Les œuvres et les hommes. Philosophes et écrivains religieux et politiques. XXV « Vte Maurice De Bonald »

Elle était la fille légitime de l’Église, qui, pour le chrétien, est Dieu sur la terre, et elle fut la plus grande et la plus puissante de toutes les monarchies du monde tout le temps qu’elle eut le profond respect de sa mère… Pour Maurice de Bonald, le mal qui prit la monarchie et dont elle est absolument morte, si Dieu ne la ressuscite pas par des moyens présentement inconnus à toute prévoyance humaine, n’est pas d’hier. […] La monarchie y a péri cependant, la monarchie, fille aînée de l’Église, et on se demande ce que deviendront les autres monarchies, qui ne sont pas chrétiennes ou qui ne le sont pas comme l’était la monarchie française. […] Il se plaignait alors du mal fait à l’Église par le dernier des Napoléon : « Et ils sont tous comme cela, — ajoutait-il. — Je me souviens du pauvre Maximilien. […] Seulement il en ressort, avec une netteté qui effraye, que s’il y a jamais une monarchie dans l’avenir ce ne pourra être que la monarchie fille aînée de l’Église, redevenue soumise et obéissante à sa mère, sous peine de n’être qu’une face retournée de la Révolution qui n’a pas fini de bouleverser le monde, et elle ne sera rien de plus qu’une monarchie de passage, qui s’en ira et disparaîtra avec les autres au premier souffle de cette révolution qui est le génie infatigable des tempêtes ! […] … Après tout, l’Église de Dieu est plus haute que toutes les monarchies, qui ne se soutenaient que par elle et contre laquelle elles se sont révoltées avec une si effroyable ingratitude.

65. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « Mémoires de l’abbé Legendre, chanoine de Notre-Dame secrétaire de M. de Harlay, archevêque de Paris. (suite et fin). »

Le Jansénisme, apaisé en apparence depuis la Paix de l’Église (1669), s’aigrissait sous cette surface dormante et restait une des graves difficultés intérieures du règne. […] Lorsque l’abbé Legendre fit la connaissance de l’archevêque, le prélat était au plus fort de l’engagement dans la lutte soutenue par Louis XIV pour les droits de sa couronne et les libertés de l’Église gallicane contre la Cour de Rome ; on était au lendemain de l’Assemblée de 1682. […] Le Noir, auteur des principaux libelles, fut condamné à faire amende honorable devant l’église de Paris, nu, en chemise, la corde au cou, la torche au poing. […] Vingt-quatre ans de domination sont un long règne, et il y avait ce temps que l’archevêque conduisait l’Église de France en véritable primat. […] Il nous apprend que la duchesse de Retz, pour plus de sûreté, avait fondé à ses frais, dans l’église de Paris, un service complet et perpétuel pour y faire recommander par les prières de M.M. du Chapitre le repos de l’âme du prélat à Dieu.

66. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre III. Le naturalisme, 1850-1890 — Chapitre I. Publicistes et orateurs »

L’Église, par une fausse manœuvre qui lui a coûté cher, s’était laissé lier aux partis politiques : elle apparaissait comme la grande ennemie de la liberté et de l’égalité. L’hostilité à l’Église était le premier principe, la première nécessité de tout libéralisme. […] Puis l’écrasement des partis monarchiques, la retraite de l’Eglise hors du champ de bataille politique, donnèrent au régime républicain une assiette solide : mais au lendemain de la victoire s’est produit, comme on pouvait s’y attendre, la dislocation de la majorité. […] Rédacteur (1843), puis directeur (1848) de l’Univers, il se fit le serviteur de l’Église catholique, serviteur sans défaillance et sans complaisance, impérieux aux amis, injurieux aux adversaires. […] J’ai parlé précédemment, pour n’y pas revenir, de l’éloquence religieuse : l’orientation nouvelle de l’Église, dans notre société, n’a pas encore eu le temps de donner des résultats littéraires, que peut-être elle donnera bientôt.

67. (1895) Histoire de la littérature française « Cinquième partie. Le dix-huitième siècle — Livre I. Les origines du dix-huitième siècle — Chapitre II. Précurseurs et initiateurs du xviiie  siècle »

On ne raisonnait pas, on ne disputait pas : on n’en voulait pas à l’Église, pourvu qu’on n’en sentît pas le joug ; et on lui permettait d’être maîtresse ailleurs. […] Ce procédé de critique fut peut-être le plus efficace et le plus fatal à l’Eglise : et ce furent les théologiens qui l’enseignèrent aux philosophes. Les protestants, qui prétendaient restaurer la primitive Église, avaient été amenés à faire la part du divin et de l’humain dans le corps des traditions chrétiennes, soit contre le catholicisme romain, soit contre les sectes rivales issues également de la Réforme. […] Ceux-ci ne touchaient plus seulement, comme les Bénédictins, aux ornements de la religion, mais à ses fondements, qu’ils ébranlaient par le seul emploi d’une méthode qui écartait la tradition de l’Église comme une idée préconçue. […] Le dictionnaire de Bayle fut un des livres essentiels du xviiie  siècle ; il fit les délices de Voltaire, de Frédéric II, de tous les incrédules ; c’est le magasin d’où sortit presque toute l’érudition philosophique, historique, philologique, théologique, dont les philosophes s’armèrent contre l’Église et la religion.

68. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « A. Dumas. La Question du Divorce » pp. 377-390

Il est condamné par mon Église, et cela me suffit. » Nous autres catholiques, nous ne discutaillons pas ; nous obéissons. […] Vidieu ou non, cette réponse est la nôtre ; et c’est mieux qu’une réponse : c’est la mise à l’écart d’une question impertinente posée contre l’Église, que tous ceux qui croient en elle n’ont pas le droit de discuter avec ceux-là qui n’y croient pas ! […] Nous sommes maintenant tellement sophistes, que même ceux qui croient à l’Église se sont amusés à byzantiner sur une question qui ne souffre pas de Byzance ! […] Seulement, nous lui faisions l’honneur de croire qu’en plein xixe  siècle il ne roulerait pas jusqu’aux plaisanteries de Voltaire contre la Bible, l’Église et nos dogmes, et il y a roulé ! […] Nous pouvons, nous qui croyons à l’immortalité de l’Église, supporter un ennemi de plus à cette Église contre laquelle les portes de l’enfer et les portiers de ce temps ne prévaudront pas.

69. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « LXI » pp. 237-241

Il y a quelques mois, une église manquait à Vergt en Dordogne, ou plutôt la cloche de cette église, car on avait pourvu au reste par souscription : il n’y avait plus que le clocher à bâtir. […] Il a débité, indépendamment de ses autres poëmes, une pièce de vers sur la circonstance : Un prêtre sans église, qui a électrisé l’auditoire. […] Berthaud, qui devait prêcher le jour même sur l’infinité de Dieu, a trouvé qu’il était mieux de prêcher sur le thème de Jasmin, et le sermon a également roulé sur le prêtre sans église.

70. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — L — article » p. 72

Ce Prélat est un des Ministres de l’Eglise, qui ont été le plus maltraités par l’Auteur du Dictionnaire critique. […] Languet ait figuré avec avantage dans un parti contraire au sien, si l’on doit appeler parti, celui de l’Eglise, auquel M. […] Nous ajouterons donc, par un principe d’équité, que ce Prélat doit être regardé, sinon comme un des premiers Ecrivains de l’Eglise, du moins comme un Ministre laborieux, dont les talens sont plus dignes d’éloge que de critique.

71. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Le père Lacordaire orateur. » pp. 221-240

L’Église, dit-il en parlant des temps de mélange et de confusion semblables aux nôtres, l’Église alors appelle à son secours une parole qu’il serait difficile de définir par des caractères constants, à cause de la variété des erreurs qu’elle doit combattre et des âmes qu’elle veut convaincre, mais qu’on peut appeler la prédication extérieure ou apostolique. […] Dieu, dit-il en un endroit, donna à son Église la charité. Par la charité, il n’y eut pas de cœur où l’Église ne pût pénétrer ; car le malheur est le roi d’ici-bas, et, tôt ou tard, tout cœur est atteint de son sceptre… Désormais l’Église pouvait aller avec confiance conquérir l’univers, car il y a des larmes dans tout l’univers, et elles nous sont si naturelles, qu’encore qu’elles n’eussent pas de cause, elles couleraient sans cause, par le seul charme de cette indéfinissable tristesse dont notre âme est le puits profond et mystérieux. […] Il a repris son rôle indépendant, élevé, ses conférences, et on l’a vu avec plaisir familiariser encore son éloquence dans l’homélie, dans le prône dont il s’est chargé à la petite église des Carmes. […] À la veille des tempêtes qui devaient ébranler l’Europe et l’Église, il faisait de la prose avec l’élasticité la plus consommée.

72. (1917) Les diverses familles spirituelles de la France « Chapitre iii »

Dans les minutes de silence, regardez-les : ils sont bien loin de cette église lorraine, champenoise ; ils sont dans l’église de chez eux. C’est dans l’église de leur village qu’en esprit ils assistent à la messe avec leur femme.‌ […] Pour mes paysans vendéens, Dieu, Jésus-Christ, l’Église, l’âme immortelle sont des réalités sensibles. […] Un matin, après avoir visité l’église blessée par un obus, j’étais allé au cimetière. […] Ce sont des acclamations que l’Église prononce auprès des mourants.

73. (1857) Cours familier de littérature. III « XIIIe entretien. Racine. — Athalie » pp. 5-80

Le roi n’était que la main du pontife, il vengeait l’Église, et l’Église, à son tour, vengeait le prince ; car ces deux autorités se confondaient en une. Ce qui échappait à l’Église tombait sous le glaive du roi, et ce qui s’insurgeait dans son cœur contre le roi tombait sous l’excommunication de l’Église. […] L’Église, qui maintenait l’usage du latin, l’avait remplie de latinité. […] Le jansénisme préoccupait gravement alors de la menace d’un schisme l’Église et le gouvernement de Louis XIV. […] Ils la maniaient à leur fantaisie dans leurs intérêts et dans les intérêts de l’Église.

74. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Livre V : La religion — Chapitre III : Le problème religieux »

Ce qu’il y a de fécond et de vivant dans le christianisme progressif de la nouvelle église, c’est précisément d’avoir résolu le problème religieux d’une manière toute différente de celle que l’on proposait il y a une trentaine d’années. Alors on proposait de créer un dogme, une église, des cérémonies, tout à nouveau. […] De même que Luther et Calvin se sont aujourd’hui réconciliés, au point qu’on voit journellement les pasteurs d’une Église passer dans l’autre et y exercer leur ministère, pourquoi, sans aucun sacrifice d’opinion propre, ne verrait-on pas une réconciliation s’opérer entre des opinions qui la plupart du temps ne se combattent que dans leurs excès ? […] Une fois cette grande Église philosophique constituée, qui l’empêcherait de prendre pour temple la vieille Église chrétienne, rajeunie, émancipée, animée du vrai souffle des temps modernes, entraînée par l’esprit nouveau, mais le purifiant, le pacifiant par cet esprit d’amour dont l’Évangile, plus qu’aucun livre religieux, a eu le secret ? Quel centre plus naturel d’union que cette antique Église dont nous sommes sortis, et qu’aiment toujours du fond du cœur ceux qui en sont le plus séparés ?

75. (1909) Les œuvres et les hommes. Philosophes et écrivains religieux et politiques. XXV « Le Marquis Eudes de M*** »

Nous la transcrivons tout entière : « Il peut y avoir vingt ans, — dit l’auteur, — dans l’église Saint-Étienne-du-Mont, un vieux prêtre faisait le prône à une grand’messe le dimanche ; l’auditoire était nombreux, attentif, ce qui n’empêchait pas tous les regards de se porter involontairement sur un grand jeune homme qui, debout en face de la chaire et les bras croisés, semblait suivre avec la plus grande attention tous les raisonnements du prédicateur. À l’excentricité de sa tenue, à l’étonnement de sa physionomie, il était facile de le juger : ce n’était pas un habitué de la paroisse, pas davantage un habitué d’autres églises, et certainement c’était le hasard seul qui l’avait fait entrer dans celle-ci. […] Puis, ayant remis son chapeau sur sa tête et s’étant frayé de vive force un passage, il s’élança hors de l’église et disparut. […] Des voyageurs instruits constataient par des monuments sa minutieuse exactitude… Les apologistes n’avaient plus qu’à justifier les dogmes et le passé de l’Église catholique. […] Depuis le sort des enfants morts sans le baptême, et le dogme : Hors de l’Église, pas de salut ! 

76. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « Proudhon » pp. 29-79

quand on pose de ces thèses contre cet enseignement séculaire qu’on appelle l’Église, et qu’on lui dit, avec le sans-façon d’un goujat, qu’elle, la sainte Église, ne fut jamais juste, on est tenu au moins de déterminer avec une clarté d’éclair fixé, avec une splendeur de soleil, ce qu’on entend par la Justice, Mais P. […] L’Antiquité avait fait l’homme fier ; l’Église, l’homme bon (qu’il appelle le bonhomme, par stupide moquerie) ; mais l’avenir produira l’homme juste. […] La Justice dans la Révolution et dans l’Église n’en sera jamais un qu’en librairie. […] de nature, cet irréligieux, cet athée, ce matérialiste ; ce haïsseur de l’Église, car il était encore plus haïsseur de l’Église que matérialiste et athée, était chrétien. […] Même plus tard, bien plus tard, Proudhon, à force de bon sens et d’impersonnalité, aurait été avec l’Église.

77. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome IV pp. -328

Il aimoit la paix qu’il eût desiré pouvoir procurer à l’église. […] Bientôt saint Médard ne fut plus rien dans son église. […] Peut-on, en conscience, dispenser les chrétiens des commandemens de l’église ? […] La police des églises & le droit des évêques ne le souffrent pas. […] Les plus grands troubles de l’église ont eu de plus foibles commencemens.

78. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Œuvres inédites de F. de La Mennais »

Il préparait lentement les matériaux de l’ouvrage qu’il faisait en commun avec son frère, la Tradition de l’Église sur l’institution des Évêques ; il en amassait les textes et les mettait en ordre ou les compilait. […] Les événements du premier Empire ne se réfléchissent guère dans cette Correspondance que par le côté ecclésiastique, par la lutte contre l’Université au sujet du petit séminaire de Saint-Malo, et par la participation morale que prend La Mennais aux affaires générales de l’Église. […] Qui est-ce qui, à ce spectacle, refuserait de croire à l’Église et à ses célestes promesses ? […] L’Église de France a une dure vieillesse. […] En cela, il était fort inférieur aux grands docteurs gallicans, les Arnauld, les Bossuet, les Fénelon. » — Gallicans, c’est-à-dire de l’Église de France ; autrement Fénelon n’est pas gallican.

79. (1895) Histoire de la littérature française « Troisième partie. Le seizième siècle — Livre V. Transition vers la littérature classique — Chapitre I. La littérature sous Henri IV »

Il avait, réfutant le traité de l’Église de Duplessis-Mornay, établi trois vérités : vérité de l’existence de Dieu, contre les athées ; vérité du christianisme, contre les infidèles ; vérité du catholicisme, contre les protestants. […] Du Perron, notamment, use de science et de logique ; avec lui l’Eglise romaine se décide à discuter, et à démontrer. […] L’Eglise catholique, avec Du Perron et François de Sales, achève sa réforme intellectuelle, elle retrouve la science et l’éloquence. […] Déjà Bèze, par son Histoire ecclésiastique des Eglises Réformées (1580), avait bien marqué le biais dont on la prendrait chez nous, quand on voudrait s’élever au-dessus des Mémoires personnels et des Dissertations érudites. […] Il prêcha avec succès, et fut prédicateur de la reine Marguerite de Navarre, théologal de l’église de Bazas, puis théologal et chantre en l’église de Condom.

80. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre XVIII. Institutions de Jésus. »

Mais il n’est pas douteux qu’elle ne fût de droit commun dans l’Église primitive, et qu’elle ne figurât en première ligne dans l’attention des contemporains 838. […] Un germe d’église commençait dès lors à paraître. […] Il confie à l’Église le droit de lier et délier (c’est-à-dire de rendre certaines choses licites ou illicites), de remettre les péchés, de réprimander, d’avertir avec autorité, de prier avec certitude d’être exaucé 843. […] En tout cas, ce ne fut qu’après sa mort que l’on vit se constituer des églises particulières, et encore cette première constitution se fit-elle purement et simplement sur le modèle des synagogues. Plusieurs personnages qui avaient beaucoup aimé Jésus et fondé sur lui de grandes espérances, comme Joseph d’Arimathie, Lazare, Marie de Magdala, Nicodème, n’entrèrent pas, ce semble, dans ces églises, et s’en tinrent au souvenir tendre ou respectueux qu’ils avaient gardé de lui.

81. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Livre IV : La philosophie — I. La métaphysique spiritualiste au xixe  siècle — Chapitre III : Le présent et l’avenir du spiritualisme »

Ils n’entendent, ne comprennent et ne veulent appliquer que la liberté du bien, c’est-à-dire leur propre domination et le gouvernement de la société tout entière par l’Église catholique. […] On pourrait nous dire que cette dissidence, en supposant qu’elle existât (et l’on cherche autant qu’il est possible à nous la dissimuler), ne porte après tout que sur des questions libres, des questions sociales et politiques, mais que l’Église catholique nous offre au moins un point fixe et un asile sûr dans un dogme incontesté, formulé par une autorité infaillible. […] Bien souvent, dans l’Église protestante, on a essayé de constituer une autorité ; les synodes ont voulu jouer le rôle des conciles ; les confessions de foi ont essayé de se donner pour des credo ; mais la radicale contradiction qui éclatait dans ces tentatives d’organisation doctrinale devait les faire échouer infailliblement ; et malgré les résistances des dogmatiques, malgré les anathèmes de Bossuet, le protestantisme continua de donner l’exemple, si nouveau en Europe, d’une religion mobile et incessamment transformée. Néanmoins, tant que ces variations et oppositions ne se manifestaient que dans les limites du dogme lui-même, c’est-à-dire sans mettre en question le fondement surnaturel du christianisme, il y avait dans l’Église protestante un fonds commun, une unité de foi, et en quelque sorte, un point fixe : la divinité du Christ, et la croyance à une révélation spéciale de Dieu ; mais le moment est arrivé où, la liberté d’examen venant à s’étendre jusqu’aux bases mêmes de la théologie dogmatique, s’est élevée la question de savoir si le christianisme est absolument lié à tel ou tel dogme, s’il lui est interdit de s’ouvrir aux lumières de la critique et de la philosophie moderne, et si rejeter le surnaturel, c’est abdiquer l’esprit chrétien. […] Le positivisme, le matérialisme, se forment en églises, et hors de ces églises il n’y a plus de salut.

82. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « La Papesse Jeanne » pp. 325-340

Il les a tirés contre l’Église, Rhoïdis, l’Église catholique, la grande cible dans laquelle ils tirent tous, les uns après les autres, leur coup inutile, comme s’ils tiraient contre le ciel ! […] Mais, fusillée ainsi depuis des siècles, et restée debout, martyre immortelle, l’Église catholique répond aux coups par les tranquilles rayons qu’elle envoie dans les yeux de ceux qui la frappent, et qui, pour les éviter, voudraient maintenant la retourner contre le mur et la fusiller par derrière comme un otage ! Emmanuel Rhoïdis est de l’armée de ces ennemis de l’Église qui sont partout, sous toutes les formes, et qui se transforment de tout, excepté de leur immuable haine… Il est vrai que, pour son compte, Rhoïdis s’est peu transformé. […] Mais la chose importante, qui va à fond, le trait à emporter, c’est la dissertation historique qui établit, ou qui tente d’établir, un point de fait qu’on croit déshonorant pour l’Église romaine, et avec lequel il s’agit de la déshonorer. […] Il n’y a là partout que la légende seule, la légende, absurde et abjecte, mise à confire, pour la servir aux friands, dans d’exquises malpropretés de détails, par ce pudibond et roséabond Rhoïdis, dont la vertu fait des gorges si chaudes des vices de l’Église romaine et nous en fait aussi de telles peintures… par pudeur !

83. (1898) Politiques et moralistes du dix-neuvième siècle. Deuxième série

Il y a une Église du roi de France. […] Il crut voir que décidément il fallait choisir entre la subordination de l’Église à l’État, et le divorce de l’Église avec l’État. […] Il accepte tout le libéralisme et le réclame pour lui, pour son Église, pour les ennemis de son Église, pour tous. […] Bien plus, comprenant, comme il l’a toujours dit, que l’Église et l’État unis, par quelque lien que ce soit, c’est l’Église assujettie ou l’État subordonné, il veut énergiquement la séparation de l’Église d’avec l’État. — Mais la subvention de l’État à l’Église ? […] De quoi s’occupe l’Église ?

84. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « XVIII. J.-M. Audin. Œuvres complètes : Vies de Luther, de Calvin, de Léon X, d’Henri VIII, etc. » pp. 369-425

De cela seul qu’un homme est un prêtre, le voilà suspect dans ce qu’il dit ou écrit pour la gloire ou le salut de l’Église. […] Audin, — lequel a servi l’Église sans appartenir à l’Église, — autrement que par le baptême et par la ferveur de la foi. […] Le caractère indélébile de l’Église romaine n’est pas que dans ses sacrements. […] Les moralistes n’ont pas assez remarqué l’action mystérieuse de l’Église sur les esprits qu’elle touche. […] Ici nous voudrions que l’on pesât bien nos paroles… Le catholicisme, — et non l’Église catholique, — a déterminé la Saint-Barthélemy.

85. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Charron — I » pp. 236-253

Il se fit recevoir avocat, et fréquenta quelque temps le Palais ; mais prévoyant trop d’obstacle et d’ennui dans la pratique, par la dépendance où se trouvaient les avocats vis-à-vis des procureurs, il se tourna du côté de l’Église, et muni comme il était de toute sorte de doctrine, doué d’une faconde naturelle, et d’une parole abondante et démonstrative, il devint prêtre et prédicateur. […] En attendant, Charron continuait son office de théologal et d’homme d’Église et combattait avec sincérité les protestants : il composait à Bordeaux, pendant ces années de troubles, et il publiait en 1595 son livre intitulé Les Trois Vérités. C’était une réponse un peu tardive à un livre (le Traité de l’Église) que Du Plessis-Mornay avait publié en 1578, et qu’il avait dédié à Henri IV, alors simple roi de Navarre et défenseur du parti calviniste. […] Il ne niait point qu’il n’y eût certaines réformes possibles à apporter dans l’Église, mais il demandait que ces réformes fussent faites par qui de droit, et il observait judicieusement que, pour y aider, la première condition était de demeurer dans le giron et de n’en point sortir. […] Charron était âgé de soixante ans et avait titre théologal et chantre dans l’église cathédrale de Condom, lorsqu’il publia à Bordeaux, en 1601, son célèbre ouvrage intitulé De la sagesse, qui n’est guère qu’une rédaction plus méthodique et une ordonnance régulière de tout ce qu’on trouve dans les Essais de Montaigne.

86. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre II. La première génération des grands classiques — Chapitre III. Pascal »

La pensée tend à s’affranchir de l’autorité de l’Église, elle s’éloigne de la tradition par diverses routes : aristotélisme alexandrin ou averroïste, panthéisme naturaliste, scepticisme et positivisme, philosophie scientifique. […] L’Église essaya d’arrêter par des rigueurs le progrès du mal. […] Il tire hors de l’École et de l’Église les matières théologiques ; il propose à la raison laïque de décider sur tel dogme, telle doctrine, entre tels et tels théologiens. […] Celles qui sont essentiellement chrétiennes, lui sont communes avec les grands docteurs de l’Église ; Bossuet les exprimera, sans avoir besoin de s’inspirer de Pascal. […] L’Église laissait à la liberté des fidèles l’option entre les systèmes qui concilient le libre arbitre et la grâce, celui de saint Thomas, où domine la grâce, et celui du jésuite Molina, où domine la liberté.

87. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Troisième partie. Beaux-arts et littérature. — Livre premier. Beaux-arts. — Chapitre VI. Architecture. — Hôtel des Invalides. »

Ce dôme, qui se change en clocher dans la plupart de nos églises, donne à nos hameaux et à nos villes un caractère moral, que ne pouvaient avoir les cités antiques. […] Trois corps de logis, formant avec l’église un carré long, composent l’édifice des Invalides. […] Pénétrez-vous plus avant, le bruit s’affaiblit par degrés, et va se perdre à l’église, où règne un profond silence.

88. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre premier. La structure de la société. — Chapitre II. Les privilèges. »

Cela fait de 25 000 à 30 000 familles nobles, 23 000 religieux en 2 500 monastères, 57 000 religieuses en 1 500 couvents, 60 000 curés et vicaires dans autant d’églises et chapelles. […] Ceux de Saint-Maur, au nombre de 1 672, estiment à 24 millions le mobilier de leurs églises et maisons, et à 8 millions leur revenu net, « sans compter ce qui retourne à MM. les abbés et prieurs commendataires », c’est-à-dire autant et peut-être davantage. […] Souvent, ayant fondé l’église, il en est le patron, choisit le curé, prétend le conduire ; dans les campagnes, on le voit avancer ou reculer à sa fantaisie l’heure des messes paroissiales. […] Il faut en outre compter dans le revenu avant 1789 les droits seigneuriaux dont jouissait l’Église. […] Delbos, l’Église de France, I, 399.

89. (1886) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Deuxième série « Le père Monsabré »

Le clergé même a presque abandonné la vieille église trop grande, où tiendraient trois ou quatre églises modernes. […] Des sectateurs intransigeants de l’Évangile, qui d’ailleurs ne l’ont jamais lu et qui ne hantent pas les églises, auraient une belle occasion de s’écrier ici : « Ô sainte égalité des hommes devant Dieu ! […] Ils n’y viennent pas, ou, s’ils y viennent d’aventure, comme ce sont évidemment des simples et des résignés, ils ne s’irritent point d’être exclus des chaises réservées ; ils acceptent avec la douceur de l’habitude les plus mauvaises places à l’église comme dans la vie : cela leur semble naturel. […] Elles ont des églises plus petites, chauffées, confortables, qui sont d’aujourd’hui et qui sont à elles : Notre-Dame est d’autrefois et est à tout le monde. […] La belle humeur des religieux et, en général, des hommes d’Église n’est point une invention des conteurs du moyen âge.

90. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « Saint-Bonnet » pp. 1-28

C’est, sous son nom abstrait, mis bravement à la tête du livre pour faire tête de Méduse aux sots et les empêcher d’y toucher, — car les sots de moins dans un débat en rendent facile la conclusion, — une thèse vieille comme l’Église elle-même. C’est la thèse qu’ont posée et soutenue partout les Pères, les théologiens et les écrivains catholiques qui ont eu à parler de l’Église depuis son établissement, — c’est la notion même de l’Église, se renversant, dans la tête humaine, si elle ne s’appuie à cette idée nécessaire d’infaillibilité. […] Pour ceux qui savent voir d’un coup d’œil tout ce que cette grande notion d’Infaillibilité étreint dans les six syllabes qui l’expriment, il y a là, Sous ce simple mot, toute la philosophie de l’Église et toute son histoire. En creusant cette notion si pleine et si profonde, impossible de ne pas toujours dégager l’une ou de raconter l’autre, quand on ne fait pas tous les deux ; car, de rigueur et en tout, l’invisible donnant le visible, je ne sache comment on pourrait toucher à l’histoire de l’Église sans toucher au principe par lequel elle est, par conséquent sans faire de la philosophie, — et comment toucher à son principe, qui est sa philosophie, sans faire de l’histoire, qui prouve les principes par les faits ! […] Dans l’impossibilité où je suis de citer tout ce qui me frappe au milieu de ce fouillis de richesses, j’indiquerai au moins le chapitre où l’auteur montre, avec une audacieuse justesse, que sans l’Église le Christianisme aurait fait le mal et l’erreur du monde et qu’il ne serait plus que l’épouvante de l’Histoire ; et celui-là encore qu’il intitule : « Coexistence des pouvoirs d’ordre, de juridiction et d’infaillibilité », dans lequel il prouve d’une manière si piquante que Jésus-Christ, étant et restant dans sa forme humaine sur la terre, n’en serait pas moins tenu d’instituer son Église telle qu’il l’a instituée et telle qu’elle est à cette heure.

91. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « VIII. Du mysticisme et de Saint-Martin »

Or, nous ne connaissons dans l’histoire du monde que le Catholicisme qui ait jamais pu régler et contenir cet extravasement de la faculté religieuse, parce que le Catholicisme, cette force organisée de la vérité, a, par son Église, l’autorité éternellement présente et vigilante, qui sauve l’homme de son propre excès et le ramène tout frémissant à l’Unité, quand le malheureux s’en écarte, fût-ce même par une tangente sublime ! Partout ailleurs que sous le gouvernement de l’Église et en dehors de son orthodoxie, le Mysticisme, — et il en faut bien prévenir des âmes ardentes et pures qu’une telle coupe à vider tenterait, — le Mysticisme n’a donc été et ne continuera d’être qu’une immense erreur et une éblouissante ivresse de cette faculté de l’infini, la gloire de l’homme et son danger, et qui fait de lui, — diraient les naturalistes, — un animal religieux. […] Lui, dont les yeux sont fins et sûrs, n’a-t-il pas senti que, s’il les avait fixés profondément sur ce qui n’est pas seulement une distinction nominale, faite par la haute sagesse gouvernementale de l’Église, il n’aurait pu s’empêcher de voir, se détachant du fond commun des idées et des phénomènes imputés au Mysticisme, pris dans son acception la plus générale et la plus confuse, un autre mysticisme, ayant ses caractères très déterminés ; l’éclatante réalité, enfin, qui contient la vérité intégrale que la Religion seule met sous les mains de nos esprits, mais dont la Philosophie les détourne ? […] Certes, si l’Église a des mélancolies comme celles des mères, ce doit être en voyant se détacher d’elle des âmes comme celle de Saint-Martin. […] Caro tourne contre Saint-Martin tous ces grands arguments de l’Église contre le protestantisme, qui, depuis Bossuet, sont notre musée d’artillerie.

92. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre premier. La structure de la société. — Chapitre IV. Services généraux que doivent les privilégiés. »

Pendant tout le dix-huitième siècle, l’Église veille à ce que l’opération continue104. […] On sait combien celui de l’Église est large ; j’estime qu’ils en prélèvent au moins la moitié. […] Dans l’Artois, où souvent la dîme prélève 7 1/2 et 8 pour 100 du produit de la terre, nombre de curés sont à la portion congrue et sans presbytère ; leur église tombe en ruines et le bénéficier ne donne rien aux pauvres […] Sauf trois ou quatre petits évêchés « de laquais », toutes les dignités de l’Église sont réservées à la noblesse ; « pour être évêque aujourd’hui, dit l’un d’entre eux, il faut être gentilhomme ». […] Lanfrey, l’Église et les philosophes , passim.

93. (1865) Cours familier de littérature. XIX « CIXe entretien. Mémoires du cardinal Consalvi, ministre du pape Pie VII, par M. Crétineau-Joly (1re partie) » pp. 5-79

Elles seraient plus convenablement nommées Mémoires de l’Église de Rome pendant la persécution de Pie VII, rédigées par son premier ministre et son ami. […] À la fin, et après trois mois d’inaction, le conclave sent qu’il perd l’Église. […] Il se transporta donc chez le cardinal Braschi, et, dans un discours étudié, il lui rappela d’abord l’excessive longueur du conclave, aussi scandaleuse pour les fidèles que pénible à l’Église ; les inutiles épreuves tentées pour l’élection des cardinaux des deux partis ; l’urgence de terminer enfin et d’accorder à l’Église un chef alors si nécessaire. […] C’était le jour destiné par la Providence pour faire cesser le veuvage de l’Église romaine, et pour donner un suprême pasteur aux fidèles, après une vacance du Saint-Siège de six mois et seize jours, et après trois mois et quatorze jours de conclave. […] Le pape sortit après dîner, et il alla processionnellement, avec le Sacré-Collège, à l’église, au milieu des plus vifs et des plus continuels applaudissements.

94. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « M. Léon Aubineau. La Vie du bienheureux mendiant et pèlerin Benoît-Joseph Labre » pp. 361-375

Et cet enfant était la perle qui devait rouler sur le fumier du siècle, sans que le fumier s’en aperçut ; et celui de ce temps-ci ne s’en apercevrait pas davantage, si l’Église, de sa main maternelle, ne l’eût pas ramassée, cette perle, et ne l’eût mise à sa couronne. […] Il était né, ce Benoît Labre, dans l’obscurité la plus profonde, et il allait y vivre jusqu’au jour où l’Église l’en tirerait. […] dont l’existence entière s’écoula dans des pèlerinages aux églises les plus lointaines, et qui alla je ne sais combien de fois, à pied, son bréviaire pendu au cou, la besace au dos, les jambes ouvertes par ses marches forcées et les pieds saignants, de Notre-Dame-de-Lorette à Rome, et de Rome à Notre-Dame-de-Lorette. […] il partit pour l’errance éternelle, — pour ne plus s’arrêter qu’en Paradis, dont le seuil pour lui était les Églises qu’il trouvait sur les routes et qu’il visitait. […] Quand il s’arrêtait aux Églises, il s’y reposait de ses longs chemins sur les genoux devant le sanctuaire, les bras en croix, insensible à tout, aux plus affreuses fatigues, à la douleur, à la faim, imperméable à la création tout entière, lui qui n’était plus qu’une âme et qu’on eût pu appeler, dans nos langages de la terre : le cataleptique de l’amour de Dieu !

95. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « Ernest Hello » pp. 207-235

Alors, il se passa dans l’ordre spirituel un fait analogue à celui qui se produisit dans nos églises. […] L’école protestante et rationaliste de Guizot nous donnait les Thierry, et, je viens de le dire, on sait ce que les Thierry nous ont donné ; on connaît leurs notions sur la grandeur de l’Église ! […] voilà qui est bien dit, et Hello a voulu partager avec l’Église un peu de son invincible mémoire, mais il est une raison plus pratique de nous occuper de la vie des Saints, que j’eusse souhaité lui voir nous donner. Sans doute, l’Église se souvient des Saints une fois qu’ils sont faits ! mais il faut en faire à l’Église, mais il faut qu’ils renaissent de l’admiration qu’ils inspirent, et c’est à ceux qui écrivent leur vie de l’inspirer !

96. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Appendice. Discours sur les prix de vertu »

Il a, nous écrit-on dans un premier résumé, il a reconstruit l’école des filles de Bournois, sa première paroisse ; construit, fondé et doté une école de filles à Villars-lez-Blamont, son pays natal ; créé à Blamont un pensionnat, un orphelinat et un ouvroir destinés aux filles du canton ; il a construit une église catholique à Villars-lez-Blamont où il n’y avait d’abord qu’un bâtiment commun pour les protestants et les catholiques ; il a reconstruit l’église de Laviron, sa propre paroisse ; il a fait élever et instruire à ses frais sept enfants orphelins appartenant à des familles pauvres, etc. […] L’église de Villars n’était pas terminée que déjà il fondait dans le même village, et de ses deniers encore, un établissement de deux sœurs de charité pour l’instruction des jeunes filles du lieu et pour soigner les malades (1850) : c’était décidément une vocation. Encouragé, enhardi par son premier succès, l’abbé Brandelet entreprit de bâtir une église dans sa paroisse même, à Laviron ; la vieille église, insuffisante pour contenir les fidèles, avait de plus l’inconvénient grave de menacer ruine. […] C’est ainsi que, pour bâtir son église de Laviron, il dut lui-même présider au transport des matériaux, à l’achat des bois de construction ; c’est à lui qu’on s’adressait pour solder les dépenses, payer les journées de travail : cela dura plus de deux ans (1859-1864). […] L’Académie demande à l’Église la permission d’aller choisir et distinguer jusque dans ses rangs l’un des plus méritants et des plus humbles, l’un de ceux dont on peut dire véritablement qu’ils sont dévorés du zèle de la maison du Seigneur : elle décerne une médaille de première classe à M. l’abbé Brandelet.

97. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre premier. La structure de la société. — Chapitre I. Origine des privilèges. »

Au commencement, pendant les quatre premiers siècles, il avait fait la religion et l’Église : pesons ces deux mots pour en sentir tout le poids. […] D’autre part, dans un État qui peu à peu se dépeuplait, se dissolvait et fatalement devenait une proie, il avait formé une société vivante ; guidée par une discipline et des lois, ralliée autour d’un but et d’une doctrine, soutenue par le dévouement des chefs et l’obéissance des fidèles, seule capable de subsister sous le flot de barbares que l’Empire en ruine laissait entrer par toutes ses brèches : voilà l’Église. — Sur ces deux premières fondations, il continue à bâtir, et, à partir de l’invasion, pendant plus de cinq cents ans, il sauve ce qu’on peut encore sauver de la culture humaine. […] L’Église la consacre à Reims par une sorte de huitième sacrement accompagné de légendes et de miracles ; il est l’oint de Dieu15. […] Depuis le concordat, il nomme les dignitaires de l’Église. […] Le même sentiment vif se prolonge jusqu’à la fin du quinzième siècle dans les peintures de Beato Angelico et de Hans Memling. — La Sainte Chapelle de Paris, l’église supérieure d’Assise, le paradis de Dante, les Fioretti peuvent donner une idée de ces visions.

98. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Livre V : La religion — Chapitre I : Philosophie religieuse de M. Guizot »

Que l’Église se mette en hostilité ouverte avec ses principes, c’est foi contre foi, et l’on sait ce qui résulte d’une guerre de croyances : le fanatisme s’y met de part et d’autre, et des maux incalculables peuvent être la conséquence d’une lutte si imprudemment engagée. […] Guizot, qui n’a pas craint de défendre en beaucoup de circonstances la cause de l’Église catholique, se croit aussi le droit de signaler dans la conduite de cette Église ce qu’il appelle « un certain manque de clairvoyance religieuse autant que de prudence politique », et il reconnaît que, « tant que le gouvernement de l’Église n’aura pas accepté et accompli cette œuvre de conciliation, les amis de la liberté auront sujet et raison de se tenir envers ce gouvernement dans une réserve vigilante, au nom des principes moraux et libéraux qu’il désavoue. » Cette défiance toutefois n’est autorisée qu’envers une seule Église. Depuis longtemps, le protestantisme s’est mis d’accord avec les principes de la société moderne, et d’ailleurs l’Église catholique elle-même, si elle est bien inspirée et si elle suit les conseils de ses vrais amis, de ses plus généreux adhérents, se hâtera de faire disparaître les causes de cette fâcheuse défiance en s’alliant hardiment et librement avec l’esprit nouveau.

99. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre XXVI. La sœur Emmerich »

Cazalès n’a songé qu’à glorifier, devant Dieu et devant ceux qui l’aiment, une de ces âmes, rares parmi les Saints eux-mêmes, et comme on en peut compter une cinquantaine au plus, parmi ces milliers de Saints, nés au giron fécond de l’Église catholique, depuis dix-huit cent soixante-dix-sept ans ! […] nous l’honorons spécialement dans la sœur Emmerich, qui est une sainte à grâces spéciales, dans la sainteté même, une sainte à visions…, et ce mot-là est pur d’ironie, puisque nous sommes chrétien et que sur cette question de visions comme sur celle de miracles, nous n’avons pas d’autres doctrines que celles de l’Église romaine. […] Nous savons bien, enfin, que cette terriblement privilégiée de Dieu, cette marquée par lui, cette grande stigmatisée, n’est explicable et intelligible que comme l’Église l’explique, à cette forte époque incrédule qui, hier encore, s’affolait de tables tournantes ; et, par parenthèse, on peut apprendre comment l’Église l’explique dans les introductions très bien faites que M. l’abbé Cazalès a placées à la tête des œuvres de la sœur Emmerich. […] … Cette Sœur Emmerich, que l’Église placera peut-être un jour entre les Brigitte et les Thérèse, aurait passé de l’extase au ciel, laissant dans les quelques yeux défiants, envieux, épouvantés, de ceux qui la virent, l’impression, ensevelie maintenant avec eux, d’un spectacle incompréhensible ! […] Son traducteur, qui a la haute prudence d’un prêtre, nous dit assez dans ses introductions que nulle obligation ne nous est faite, de par l’autorité de l’Église, d’admettre ou de rejeter la vérité objective des visions de la sœur Emmerich.

100. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre II. La Renaissance. — Chapitre V. La Renaissance chrétienne. » pp. 282-410

Le dimanche à l’église, quand on l’oblige à se signer, à s’agenouiller devant la croix, à recevoir l’hostie, il frémit, se croit en péché mortel. […] L’alliance est si forte que, sous Cromwell, les ecclésiastiques en masse se firent destituer pour le prince, et que les cavaliers par bandes se firent tuer pour l’Église. […] Les abus qui sont dans l’Église doivent être corrigés par le prince ; les ministres doivent prêcher contre les abus, et beaucoup de traditions humaines sont de purs abus. » Que fait donc le prince, et pourquoi laisse-t-il des abus dans l’Église ? […] « Comment sera gouvernée l’Église de Christ » : voilà la grande question qui s’agite entre les sectes. […] Voyez les Dialogues de Galilée ; c’est la même idée qui, en même temps, est poursuivie à Rome par l’Église et défendue en Angleterre par l’Église.

101. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Troisième partie. Beaux-arts et littérature. — Livre premier. Beaux-arts. — Chapitre VIII. Des Églises gothiques. »

Des Églises gothiques. […] On ne pouvait entrer dans une église gothique sans éprouver une sorte de frissonnement et un sentiment vague de la divinité. […] Ces voûtes ciselées en feuillages, ces jambages qui appuient les murs, et finissent brusquement comme des troncs brisés, la fraîcheur des voûtes, les ténèbres du sanctuaire, les ailes obscures, les passages secrets, les portes abaissées, tout retrace les labyrinthes des bois dans l’église gothique ; tout en fait sentir la religieuse horreur, les mystères et la Divinité.

102. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Troisième partie — Section 10, continuation des preuves qui montrent que les anciens écrivoient en notes la déclamation » pp. 154-173

On peut même observer aujourd’hui dans les lieux où les habitans sont de religions differentes qu’ils ne sortent pas de leurs églises après le service avec la même humeur. […] Qu’il me soit permis, pour éclaircir ce passage d’Horace, de me servir d’une comparaison tirée du chant de l’église. […] Quand saint Ambroise le composa, les théatres étoient encore ouverts, et l’on y récitoit dans la même langue en laquelle on chantoit à l’église. Ce saint ne voulut point, suivant l’apparence, qu’on entendît à l’église les tons propres et fréquens au théatre. […] Ainsi les quinze cordes de la musique ancienne entrerent dans le chant gregorien, et tout le monde a trouvé que le chant grégorien surpassoit tellement en beauté le chant ambroisien, que dès le temps de nos rois de la seconde race, les églises des Gaules quitterent l’usage du chant ambroisien pour y substituer le chant grégorien.

103. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Méditations sur l’essence de la religion chrétienne, par M. Guizot. »

Guizot, n’aurait qu’un pas de plus à faire, et il rejoindrait exactement un des plus respectables et des plus savants prélats de l’Église française, j’aurais dit autrefois de l’Église gallicane, M.  […] Guizot, et pour rester membre de son Église, il faut admettre et respecter un certain symbole dont les premiers articles sont révélation, miracles, divinité du Christ. Il n’est ni pour la grande Église catholique hiérarchique, ni pour l’émancipation absolue et l’Église libre universelle, de même qu’en politique il n’était ni pour la forme monarchique ou aristocratique pure, ni pour la liberté démocratique et le suffrage universel. […] L’Antichristianisme, discours prononcé dans l’église métropolitaine de Paris pendant l’octave de la dédicace de cette basilique le 4 juin 1864, par Mgr l’évêque de Sura, doyen de la faculté de théologie ; Paris, Douniol, rue de Tournon, 29. […] J’admets comme un droit naturel et universel la liberté de la pensée ; mais, parce qu’elle est essentiellement libre, elle n’est pas indifféremment vraie, et ceux-là seuls qui pensent comme moi sont, pour moi, dans la vérité et appartiennent à la même société intellectuelle, c’est-à-dire à la même Église que moi.

104. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Le cardinal de Bernis. (Fin.) » pp. 44-66

Voltaire, quand il vit Bernis devenu cardinal, archevêque, et engagé dans les hautes dignités de l’Église, était disposé à toutes les coquetteries et à toutes les louanges à son égard, à condition d’y mêler plus d’une malice, et, si on le laissait faire, plus d’une impertinence religieuse. […] C’est beaucoup, dit-il, pour un cadet de Gascogne, si c’est peu pour un cardinal : Les premiers diacres de l’Église romaine n’en avaient pas tant, et je ne suis pas fâché d’être le plus pauvre des cardinaux français, parce que personne n’ignore qu’il n’a tenu qu’à moi d’être le plus riche. […] Lui qui devait si bien s’acclimater à Rome, en épouser les habitudes, en ressentir et en rehausser encore la noble hospitalité, il fut sévère d’abord jusqu’à l’injustice pour ses collègues les princes de l’Église, et pour le peuple romain en général. […] Un jour le pape lui fit cadeau de toutes sortes de titres et de pièces originales concernant l’église d’Albi, en y joignant un bref où il le comblait de marques d’honneur et de témoignages de tendresse. […] Aussi, à la mort du pontife, comme les passions irritées cherchaient à se venger sur ses restes, et que le catafalque placé dans l’église de Saint-Pierre, pendant la neuvaine des obsèques, n’était point en sûreté, Bernis, fidèle à l’amitié et au respect envers l’illustre mort, entretint à ses propres frais une garde qui, jour et nuit, veilla autour de ce catafalque pour en préserver les inscriptions et empêcher tout scandale.

105. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Entretiens sur l’architecture par M. Viollet-Le-Duc (suite et fin.) »

La société, telle qu’elle se formait alors, toute féodale et religieuse, demandait aux constructeurs d’élever force monastères, force églises, des palais aussi, des châteaux surtout et des remparts. […] Ce grand Ordre eut ses architectes à lui, qui atteignirent assez tôt à la perfection de leur forme, à Cluny même, aujourd’hui détruit, à l’église de Vézelay, encore existante, et dont M.  […] Et certes une église gothique, — ce beau vaisseau, cette nef de haut bord avec toutes ses mâtures et armatures, se détachant sur un fond de ciel brumeux ou dans un couchant enflammé, — ne perd point à être vue du dehors : du plus loin, la flèche ; de près, la façade ; et, sur les flancs mêmes, des portails secondaires, merveilleux d’ornements, peuplés de saints et saintes dans leurs niches ! […] Une bourse, — une église, — un palais, — un ministère ? […] Je l’ai vu, grimpé sur une corniche à 60 pieds du pavé, dessiner debout aussi bien que s’il avait été dans son cabinet. » Le premier grand travail dont il ait été chargé a été la restauration de l’église de Vézelay ; cette grande et belle église, chef-d’œuvre des architectes clunisiens, était en si mauvais état, qu’il avait été plus d’une fois question de la démolir ; il était à craindre qu’au premier coup de marteau tout ne tombât.

106. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « La Femme et l’Enfant » pp. 11-26

il faut avouer que sur ce point, comme sur tant d’autres, l’Église avait vu plus juste et plus loin que les sciences écloses hors de son sein. […] Mère à qui la tendresse avait appris la vraie science, l’Église savait mieux que l’Économie politique de nos jours le mystère de la douleur humaine et ses profondes complexités. Elle ne s’arrêtait point à un des effets du mal quand il s’agissait de remonter à toutes les causes, et en inspirant la résignation aux classes dénuées et opprimées, en appuyant à de sublimes espérances la moralité défaillant sous toutes les croix de ses épreuves, elle avait plus fait pour diminuer l’oppression et la misère, et, disons davantage, doubler la richesse sociale, par la modération ou les renoncements de la vertu, que l’Économie politique qui reprend à son tour le problème résolu par l’Église depuis tant de siècles, et qui prétend le résoudre aujourd’hui, avec toutes les convoitises excitées de la nature humaine, aussi aisément et plus complètement que l’Église avec toutes ses abnégations. Voilà pourtant ce que l’auteur du livre de La Femme et l’Enfant n’a pas compris, ou ne s’est pas rappelé, quand il a pensé à alléger la masse de douleurs et de misères pour lesquelles l’Église catholique a plus fait que toutes les civilisations réunies.

107. (1888) Les œuvres et les hommes. Les Historiens. X. « Michelet » pp. 259-274

Mais s’il n’a pas été baptisé comme nous, s’il a combattu trente ans contre l’Église et la Monarchie, cette fille de l’Église, et s’il est mort comme il a vécu, il n’en était pas moins chrétien par bien des points de son âme, — un chrétien de nature, et de nature indestructible. […] Il savait trop l’Histoire pour l’écrire comme il l’a écrite s’il n’a pas menti aux autres et à lui-même ; si sa haine contre l’Église — une haine venue tard, dans son Histoire de France et dans sa vie, — ne l’avait pas égaré jusqu’à la honte du mensonge, d’autant plus grande qu’on tient la vérité, et Michelet la tenait ! […] La démocratie de Michelet et sa haine de l’Église sont à présent dépassées d’un fier bout. […] … La haine de Michelet contre l’Église est un sentiment couleur de rose, en comparaison de la haine atrocement noire des libres-penseurs de ce délicieux moment.

108. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « Lamennais »

Condamné à Rome alors, mais, comme tous les hérétiques qui commencent, faisant la distinction de l’Église et de la cour de Rome, il affirmait, à ce moment encore, son respect pour l’Église, se vouant seulement à un silence absolu, à un silence de trappiste sur les choses religieuses, comme il le dit dans deux ou trois lettres de la présente collection. […] Forgues, ont cité des passages de la plus merveilleuse éloquence, il est vrai, mais qui étaient dans la donnée du talent connu et presque public de l’homme qui a écrit l’Essai en matière d’indifférence, les Paroles d’un croyant, la Révolution et l’Église, etc. ; ces passages, magnifiques comme expression, n’apprenaient rien de nouveau, ne modifiaient rien de ce qu’on sait sur la manière de Lamennais, et n’avaient le droit d’étonner personne. Ce que nous avons voulu, nous, simplement indiquer, c’est qu’il y avait dans ce livre posthume des qualités et un accent qu’on ne connaissait pas à Lamennais, et qui le faisait différer de lui-même, tout en y ajoutant… La Correspondance de Lamennais répondra, pour les réfuter, à deux idées communes : la première, que cet ardent tribun de l’Église d’abord et ensuite de la démocratie, traité dernièrement encore de pessimiste, de malade et de furieux, par quelqu’un qui se porte très bien probablement, eut une âme ambitieuse et ulcérée ; et la seconde, que l’esprit, cette chose svelte, retroussée, légère, n’entrait pour rien dans la composition de son talent surchargé, grandiose et pompeux. […] Quel que soit le jugement qu’on doive prononcer sur la conduite de Lamennais dans sa rupture avec l’Église, et ce jugement, nous pensons que l’Histoire le fera sévère, la Correspondance n’en entraînera pas moins ces deux erreurs contemporaines sur sa personne.

109. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « Lacordaire. Conférences de Notre-Dame de Paris » pp. 313-328

Parti de la notion même de l’Église, de sa nécessité, de sa constitution, de son autorité, de rétablissement sur terre de son chef, de sa puissance coercitive, il a comparé la réalité à l’idéal ; et, devant le type décrit et complet d’une Église enseignante, il examine l’Église telle qu’elle est dans le monde, il en interroge la doctrine générale et ses sources. […] Je ne crois pas que pareil accent ait jamais ébranlé une voûte d’église. […] Ce dont je le féliciterai comme d’un succès utile à la cause de l’Église, c’est d’avoir élargi la chaire chrétienne de sorte que les accents qui en viennent porteront plus loin.

110. (1908) Les œuvres et les hommes XXIV. Voyageurs et romanciers « Arthur de Gravillon »

Ainsi, un La Bruyère jeune homme, un La Bruyère Damis, quand La Bruyère ne le fut jamais, quand La Bruyère est le plus beau talent d’automne qui ait jamais épandu sur les choses humaines des rayons désarmés, tout souriants de mélancolie ; ainsi, un La Bruyère en colère, — aussi en colère que lord Byron dans sa fameuse satire contre la fille de chambre qui l’avait brouillé avec sa femme, et qui était probablement une dévote de l’Église officielle d’Angleterre, — tel est l’auteur de ce petit livre des Dévotes, dont la seule sincérité est le ressentiment qui l’inspira. […] aux idées communes, et les plus communes, sur le Moyen Age et sur l’Église. […] Spiritualiste évaporé, il ose accuser l’Église d’un matérialisme plus grand que celui des religions païennes, parce qu’elle a permis à ses solitaires de presser la tête de mort, traditionnelle image du néant de la vie, de leurs lèvres mortifiées ou expirantes. […] L’Église seule sait la mesure de tout. […] L’Église seule sait juste ce qu’il faut donner d’amour et d’horreur à la mort.

111. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Mémoires et journal de l’abbé Le Dieu sur la vie et les ouvrages de Bossuet, publiés pour la première fois par M. l’abbé Guettée. — II » pp. 263-279

Bossuet eut pour ami particulier durant toute sa vie, pour auxiliaire affectionné et constant dans toutes les questions de doctrine, de foi, de morale et de discipline de l’Église, un homme bien digne en tout de cette relation étroite et de cette intimité : l’abbé Fleury fut ce premier lieutenant modeste, ce véritable second de Bossuet et comme son abbé de Langeron. […] Ainsi ayant affaire à la morgue des uns, à la mauvaise humeur et à la pétulance des autres, ayant à compter avec la politique des prélats, avec le formalisme des docteurs, Bossuet, sans amour-propre, sans impatience, poursuit son dessein, fait toutes les concessions nécessaires, écarte et tourne les obstacles, et n’a de cesse qu’il n’ait obtenu la condamnation des 127 propositions tant molinistes que jansénistes, maintenant par là l’Église de France dans la voie qui lui semble celle de la rectitude et du sage milieu. […] Nous assistons, grâce au journal de Le Dieu, aux derniers sermons de Bossuet, qu’il prêche à l’âge de soixante-quatorze et soixante-quinze ans : le 1er novembre 1701, jour de la Toussaint, « il recueille les restes de ses forces pour exciter les cœurs à l’amour de Dieu, dans un sermon de la béatitude éternelle. » Une autre fois, le 2 avril 1702, dimanche de la Passion, il fait un grand sermon dans sa cathédrale pour l’ouverture du jubilé : Il réduit tout à ce principe : Cui minus dimittitur, minus diligit, que plus l’Église était indulgente, plus on devait s’exciter à l’amour pour mériter ses grâces et parvenir à la vraie conversion. Ce discours était très tendre et très édifiant, nous dit Le Dieu, et M. de Meaux l’a prononcé avec toutes ses grâces, et aussi avec une voix nette, forte, sans tousser ni cracher d’un bout à l’autre du sermon : en sorte qu’on l’a très aisément entendu jusqu’aux portes de l’église, chacun se réjouissant de lui voir reprendre sa première vigueur. On aime à rejoindre ces détails sur le Bossuet de la fin et sur son bel organe, éclatant une dernière fois, avec ce que le même biographe nous a dit de lui dans sa jeunesse, quand il nous le montre affectionné à chanter l’office de l’Église et les psaumes : « Il avait la voix douce, sonore, flexible, mais aussi ferme et mâle.

112. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Lawrence Sterne »

— et qu’il fût d’Église, dans ce pays qui ne croit plus à l’Église, il fit longtemps partie d’une société peu ecclésiastique, qui s’intitulait la Société des Démoniaques à Crazy-Castle (en français : Château détraqué), la résidence de Hall Stevenson, un ami chez lequel on commençait déjà ces orgies dérisoires, — monacales et funèbres, — qui se sont plus tard continuées chez Lord Byron. […] On y pleurait et on y riait, et seule l’Église anglicane ne riait ni ne pleurait. […] cette sainte Église était impassible à tout cela. […] Malgré cet habit de ministre anglican que sa naissance lui jeta sur les épaules, c’était un chrétien de l’Évangile dans le pays de la Bible, un chrétien qui aurait dit si bien à l’Église : « Ma mère ! » et qui aurait si bien prié cette autre mère que l’Église nous fait adorer avec un enfant dans ses bras !

113. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome III pp. -

Pourquoi souffrir dans l’église ce qui va contre la police des états ? […] Ils se vantent d’avoir rendu à l’église de grands services. […] Il écrivit pour les libertés de l’église de France, & contre les prétentions des papes. […] Jansénius mourant le soumit au jugement de l’église. […] On le nomma la paix de Clément IX, ou la paix de l’église.

114. (1903) Le problème de l’avenir latin

L’Eglise chrétienne, tout d’abord humble et souterraine, avait grandi dans les persécutions. […] Elle n’a cessé d’appartenir à l’Empire que pour passer sous la domination de l’Eglise. […] Un retour aux traditions de la primitive Eglise, une rénovation de la pensée religieuse : cela sans doute. […] Survint ensuite l’Eglise pour aggraver et perpétuer le mal. […] Quelques-uns penseront qu’on pourrait adapter à cet effet l’église désaffectée.

115. (1906) Les idées égalitaires. Étude sociologique « Deuxième partie — Chapitre III. La complication des sociétés »

La famille antique idéale est à la fois État, Église, Armée, Atelier. […] Il est remarquable que, dans les pays absolutistes, les Églises sont le plus souvent autocéphales et font un avec l’État ; les individus y perdent du même coup cette faculté de recourir contre la puissance gouvernante, et de lui dérober une part de leur personnalité, que l’indépendance de l’Église vis-à-vis de l’État a plus d’une fois garantie174. L’Église catholique a pu, en fait, mettre souvent ses forces organisées au service de l’absolutisme, et lui offrir l’appui de ses dogmes. […] En installant à côté des groupements laïques un groupement nouveau, l’Église catholique instituait une forme sociale favorable au libéralisme. […] À la porte de l’Église tous les honneurs humains doivent être dépouillés : le Dieu unique est si grand qu’à ses yeux les plus grands de la terre ne dépassent pas les plus humbles.

116. (1869) Cours familier de littérature. XXVIII « CLXVIIe entretien. Sur la poésie »

On destinait l’enfant à l’Église. […] Le jeune homme ne tarda pas à devenir prêtre, resta à Paris, et fut employé, pendant trois ans, à expliquer les mystères aux enfants du peuple, les jours de fête et les dimanches, dans la sacristie de l’église Saint-Sulpice. […] La Grèce s’ouvre devant mes pas ; l’islamisme recule, le Péloponèse redevient libre, l’Église de Corinthe refleurit, la voix de l’apôtre s’y fait encore entendre. […] Il pouvait aspirer, sous les auspices de M. de Harlay, aux plus hautes et aux plus célèbres dignités de l’Église ; il leur préféra l’amitié stérile alors de Bossuet. […] L’évêque de Meaux s’imposait à Rome par ses services à l’Église, à laquelle il conquérait par la main du roi la France protestante au catholicisme ; il s’imposait à Versailles par son ascendant à Rome, au monde, par la sublimité de son génie.

117. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « I. Saint Thomas d’Aquin »

Il consiste à reprendre d’une main tout doucettement ce qu’il a donné de l’autre avec un grand geste, et ce qui suit va le faire comprendre : Agrégé à la Faculté des lettres, sorti de l’Université pour entrer à l’Académie dont il a voulu le prix qu’il n’a pas manqué, ayant par conséquent des terreurs respectueuses fort naturelles pour le progrès, et non moins naturellement des affections intellectuelles pour l’Église, M.  […] La gloire de celui qui fut appelé l’Ange de l’école, son influence inouïe sur un temps où la foi primait encore la raison, sa préoccupation perpétuelle et absorbante des intérêts de l’Église, et jusqu’à son genre de génie, qui ne fut vraiment original que par sa souveraine certitude et la toute-puissante clarté de son orthodoxie, furent une gloire, une influence, une préoccupation et un génie, essentiellement théologiques. […] Mais ce qu’il possède, c’est justement le bien des pauvres, c’est la tradition de l’Église, et, par l’étude théologique dont il a reporté les habitudes sur les choses de la philosophie, la précision et le génie de la formule, tellement claire, dit très heureusement M.  […] Pour être le docteur des docteurs, la lumière et la loi des esprits, l’autorité irréfragable, il faut à saint Thomas d’Aquin, le second Aristote, l’Église, la révélation et l’histoire, c’est-à-dire, tout ce que M. 

118. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Deuxième partie. — Chapitre XIX. »

Comme elle avait donné jadis Lucain et Martial à la monstrueuse grandeur et aux vices de Rome, elle offrait aux vertus de l’Église sortant des catacombes un chantre harmonieux et pur. Né dans la province de Tarragone vers l’an 348 de notre ère, tour-à-tour avocat, juge, préfet, puis appelé par ses talents à Rome et à la cour de Théodose, Prudence, dans sa vie toute laïque, ne pouvait atteindre à l’autorité et à la gloire des grands évêques dont s’honorait alors l’Église. […] Et quand il deviendra quelque jour évêque, il consacrera, dans son inépuisable charité, au rachat des captifs, et les vases de son église et sa propre liberté. […] Mais les flots de la barbarie, mal contenus par le despotisme usé du vieux monde, allaient pour un temps tout submerger et tout détruire, sauf les croix immortelles des églises, qui apparaîtraient encore çà et là sur l’abîme.

119. (1917) Les diverses familles spirituelles de la France « Chapitre ix »

Qui n’a pas, au lointain de son âme, un porche d’église illuminée au fond d’un village sur lequel tombe la neige ? […] L’église chrétienne ouverte à tous, chante et prie devant tous, pour tous, sans demander à personne ses raisons. […] Les protestants et les catholiques se croyaient revenus au temps de la primitive Église.

120. (1841) Discours aux philosophes. De la situation actuelle de l’esprit humain pp. 6-57

Mais tous croyaient fermement à cette égalité devant Dieu et dans l’Église. […] J’avais ma part dans cette Église, ma part égale, à titre d’enfant de Dieu et de cohéritier du Christ. Et cette Église encore n’était que le vestibule et l’image de la véritable Église, de l’Église céleste, vers laquelle se portaient mes regards et mes espérances. […] La milice de l’Église terrestre était à mon service, pour me diriger et m’aider à gagner l’Église céleste. […] Rendez-moi l’égalité dans l’Église, ou donnez-moi l’égalité dans la cité laïque.

121. (1866) Dante et Goethe. Dialogues

Les ordres mendiants qui démocratisaient l’Église, parlaient et écrivaient l’italien. […] Rappelez-vous ces églises, ces palais de Florence, que nous visitions ensemble l’an passé ! […] L’Église reste en cela invariable, Marcel. […] Un la chantait encore dans les églises, mais on ne la savait plus ni écrire ni parler. […] Il passe de longues heures méditatives dans les églises, dans les musées.

122. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Notes et éclaircissements. [Œuvres complètes, tome XIII] »

Le lendemain, jour destiné à la célébration des saints mystères, le peuple accourut en foule à l’église pour y voir dans Eutrope une image éclatante de la faiblesse des hommes, et du néant des grandeurs humaines. […] L’Église, à qui vous avez fait la guerre, ouvre son sein pour vous recevoir : et les théâtres, objet éternel de vos complaisances, qui nous ont si souvent attiré votre indignation, vous ont abandonné et trahi. […] » Mais, disent quelques personnes dures et impitoyables, qui même nous savent mauvais gré de lui avoir ouvert l’asile de l’Église, n’est-ce pas cet homme-là qui en a été le plus cruel ennemi, et qui a fermé cet asile sacré par diverses lois ? […] Il n’y a point de victoires, point de trophées, qui pussent faire tant d’honneur à l’Église. […] Mais quelques jours après, ayant eu l’imprudence de sortir de l’Église pour se sauver, il fut pris, et banni en Cypre, d’où on le tira dans la suite pour lui faire son procès à Chalcédoine, et il y fut décapité.

123. (1932) Le clavecin de Diderot

En récompense de cette déclaration, l’Église a béatifié le faiseur de calembredaines. […] L’Église, tous les chemins lui sont bons, et elle s’en vante : Tous les chemins mènent à Rome. […] Marché conclu, l’Église béatifie gangrènes et pouilleries, plaies et ulcères. […] Ainsi le veut la tradition de l’Église de toutes les Églises, pour qui l’esprit devient matière, le Verbe se fait chair. […] Homme d’Eglise, historien et critique littéraire français, membre de l’Académie française.

124. (1895) Histoire de la littérature française « Première partie. Le Moyen âge — Livre I. Littérature héroïque et chevaleresque — Chapitre III. L’Histoire »

Il honore l’Église, ses cardinaux, et le pape même, tant qu’ils ne traversent pas ses intérêts ; et, au prix de son respect, de ses dons, ce qu’il leur demande surtout, ce sont des pardons, des absolutions : de quoi se mettre la conscience en repos, avant de faire ou après avoir fait ses affaires. […] Il lui plaît qu’on prenne la conquête de l’empire grec pour un accident singulier amené par une suite de circonstances fortuites et fatales : il n’a garde de confesser que du jour où Boniface devint le chef de la croisade, c’était fait de la défense des lieux saints et du service de Dieu ; il n’a garde de laisser entendre que les Vénitiens ne sont pas des fils dévoués de l’Eglise, et peuvent entretenir des rapports quelconques avec Abd el-Melek, le sultan d’Egypte. […] Mais ce furent surtout les faits contemporains, les grandes crises ou les grands hommes de l’Église qui firent le passage de la légende poétique à la biographie historique. […] Très exactement informé, religieusement attaché à la vérité et aux documents qui la montrent, bon écrivain dont le style a de la solidité et du relief, ce clerc errant, de vie assez libre, est intraitable sur les privilèges et la mission du clergé ; c’est un de ces enfants perdus, de ces polémistes que rien n’effraie, qui, de leur autorité privée, se font défenseurs et régents de l’Église, aussi prompts à en invectiver la corruption qu’à réclamer pour elle toute la puissance : l’Eglise, de tout temps, a eu de ces serviteurs zélés, brutaux, indociles, qui la gênent, la compromettent autant qu’ils la servent, et, somme toute, lui font payer cher leurs services. […] Au reste, comme saint Louis même, il est assez sûr de sa foi pour ne pas être esclave de l’Eglise : le saint roi prenait un jour le parti des excommuniés, le sénéchal est une fois excommunié, et porte légèrement la chose, sans crainte et sans émotion.

125. (1895) Histoire de la littérature française « Cinquième partie. Le dix-huitième siècle — Livre IV. Les tempéraments et les idées (suite) — Chapitre IV. Le patriarche de Ferney »

Sauf la religion qu’il combat à outrance, parce qu’il ne voit pas de compromis possible entre l’Église et la raison, il ne prétend pas changer les bases actuelles de la société. […] Un autre jour, le philosophe se souvient qu’il est l’héritier de Racine : il dresse ses tréteaux, habille ses marionnettes, et lance des Grecs, des Guèbres, des Crétois à l’assaut de l’Église et des Parlements ; ou bien il arrange en farce indécente sa critique biblique : Saül et David détruisent l’idée d’une révélation. […] Des morts sortent du tombeau : le licencié Dominico Zapata, rôti à Valladodid l’an de grâce 1631, pose aux docteurs de l’Église soixante-sept questions subversives de la foi. […] Mais il faut dire deux choses à la décharge de Voltaire : d’abord qu’il attaquait, non pas la religion idéale, mais l’Église de son temps ; et il est excusable de n’avoir pas compris celle-là en regardant celle-ci. […] Il fallait que le pouvoir de l’Église fût détruit, pour qu’on pût rendre justice à la religion sans y croire.

126. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre XVIII. Formule générale et tableau d’une époque » pp. 463-482

L’église catholique, bien qu’elle soit universelle par définition et tienne par conséquent à honneur de s’élever au-dessus des différences de race et de climat, est en France, avec Bossuet, gallicane ; l’histoire l’est aussi, si je puis parler ainsi ; car, en dépit de toute vraisemblance, elle affirme que les Francs n’étaient pas des envahisseurs germains, mais qu’ils étaient nés sur le sol de la Gaule184. […] En matière religieuse, la littérature est soumise à l’Eglise catholique. […] Mais, ces réserves faites, tout s’incline devant l’Eglise. […] Le triomphe du catholicisme est pour Bossuet le couronnement de l’histoire universelle, et tous les événements depuis le commencement du monde n’ont eu d’autre raison d’être que de le préparer ; il admet implicitement que tout ce qui change est par là même inférieur, et de là son grand argument contre les Églises protestantes. […] Ainsi, dans l’époque que nous avons résumée plus haut, la poésie dramatique et la littérature religieuse me paraissent avoir droit aux deux premiers rangs, et ce rapprochement seul de deux genres qui se ressemblent si peu, qui sont même, à certains égards, en pleine opposition, fait comprendre à merveille cette société catholique et mondaine qui voltige avec aisance du théâtre au sermon et se partage entre l’Église et les plaisirs du siècle.

127. (1869) Cours familier de littérature. XXVII « CLVIIe Entretien. Marie Stuart, (Reine d’Écosse). (Suite et fin.) »

La reine peut sortir jusqu’à l’église de la ville, mais toujours accompagnée de cent arquebusiers. […] » On voit assez que ce dernier feuillet était relatif à Marie Stuart elle-même, et lui prédisait sans doute son avénement au trône d’Angleterre et la restauration de l’Église dans ce royaume ! […] Elle écrivit à tous ses parents et à tous ses amis de France et d’Écosse. — « Mon bon cousin, disait-elle au duc de Guise, celuy que j’ay le plus cher au monde, je vous dis adieu, estant preste par injuste jugement d’estre mise à mort, telle que personne de nostre race, grasces à Dieu, n’a jamays receue, et moins une de ma qualité ; mais mon bon cousin, louez-en Dieu, car j’estois inutile au monde en la cause de Dieu et de son Église, estant en l’estat où j’estois ; et j’espère que ma mort tesmoignera ma constance en la foy, et promptitude de mourir pour le maintien et restauration de l’Église catholique en ceste infortunée isle ; et, bien que jamais bourreau n’ait mis la main en nostre sang, n’en ayez honte, mon amy, car le jugement des hérétiques et ennemys de l’Église, et qui n’ont nulle jurisdiction sur moy, royne libre, est profitable devant Dieu aux enfants de son Église ; si je leur adhérois, je n’aurois ce coup. […] Dieu soit loué de tout cependant, puisqu’il me fait cet honneur de mourir pour lui et son Église !  […] Ils ne me tuent pas comme complice de cette conspiration, mais comme reine dévouée à l’Église.

128. (1883) Souvenirs d’enfance et de jeunesse « Chapitre III. Le Petit Séminaire Saint-Nicolas du Chardonnet (1880) »

Ma sœur eut ainsi pour première maîtresse une vieille ursuline qui l’aimait beaucoup et lui faisait apprendre par cœur les psaumes qu’on chante à l’église. […] À quoi bon si bien apprendre le latin, sinon pour l’Église ? […] Mes succès le désolaient, car il sentait bien que tout ce latin contreminait sourdement ses projets et allait faire de moi une colonne de l ‘Église qu’il n’aimait pas. […] Il prétend que mon âme habitera, après ma mort, sous la forme d’une mouette blanche, autour de l’église ruinée de Saint-Michel, vieille masure frappée par la foudre qui domine Tréguier. […] Quellien a très bien compris ce qui fera toujours défaut à mon église, c’est l’enfant de chœur.

129. (1854) Histoire de la littérature française. Tome I « Livre II — Chapitre deuxième »

Du reste, dans la fondation de son abbaye, Gargantua n’oublie qu’une chose : c’est l’église. Il n’y veut pas de cloches : c’est contre les catholiques ; il y oublie l’église : c’est à la fois contre les catholiques et les protestants49. […] Son ouvrage étant la critique de tout, il y avait compris l’Église, mais sans aller au-delà de ces traits que tous les hommes éclairés, même certains princes de l’Église, se permettaient contre l’ignorance et les mœurs des ordres ecclésiastiques ; c’était l’esprit et non la théologie de la Réforme. […] Le curé de Meudon tendait aussi la main, par-dessus quarante années de guerre civile, aux auteurs de la Ménippée, lesquels trouvaient, entre l’Église des papimanés et celle des papefigues, l’Église anglicane. […] Où connaît-on une image plus vigoureuse et plus expressive du moine du moyen âge, ignorant, grossier, livré, par l’excès de santé et d’oisiveté, à toute la violence de ses appétits, hardi sans vergogne, croyant tout au plus à l’Église qui le nourrit, et toutefois, sous cette ignorance, laissant percer un esprit avisé, de même que, jusque dans ses vices, il garde une certaine franchise d’humeur qui ôte toute envie de lui en vouloir ?

130. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « Abailard et Héloïse »

Cousin, le chef à présent déposé de la philosophie en France, et qui s’est lui-même tondu (mais non pour se faire moine) avec les ciseaux de Madame de Longueville, se fit, à grand bruit, l’éditeur et le vulgarisateur du philosophe du xiie  siècle condamné par l’Église. […] C’est que cette philosophie qui, au xixe  siècle, se réclame avec tant d’orgueil de Descartes et de son cogito, ergo sum, se sent des parentés certaines avec l’homme qui, clerc de l’Église de Dieu, introduisit le scepticisme là où l’Église avait mis ses sécurités sublimes, et déposé dans les esprits de son temps, comme dit Cousin : « le doute salutaire et provisoire qui préparait l’esprit à des solutions meilleures » que celles de la Foi. […] On n’y trouverait pas, par exemple, l’insolente apologétique de Béranger, l’écolâtre, contre saint Bernard, l’illustre défenseur de l’Église ; et si on l’y avait placée, on n’y aurait pas, du moins, soigneusement oublié, comme on l’a fait, les lettres de ce même saint Bernard, qui fut l’arbitre suprême et obéi dans une querelle dont on raconte l’histoire, en l’oubliant !

131. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XIX. Abailard »

Cousin se fit, à grand bruit, l’éditeur et le vulgarisateur du philosophe du douzième siècle, condamné par l’Église. […] C’est que cette philosophie qui, au dix-neuvième siècle, se réclame avec tant d’orgueil de Descartes et de son cogito, ergo sum, se sent des parentés certaines avec l’homme qui, clerc de l’Église de Dieu, introduisit le scepticisme là où l’Église avait mis ses sécurités sublimes, et déposé dans les esprits de son temps, comme dit M.  […] On n’y trouverait pas, par exemple, l’insolente apologétique de Béranger, l’écolâtre, contre saint Bernard, l’illustre défenseur de l’Église ; et si on l’y avait placée, on n’y aurait pas, du moins, soigneusement oublié, comme on l’a fait, les lettres de ce même saint Bernard, qui fut l’arbitre suprême et obéi dans une querelle dont on raconte l’histoire, en l’oubliant !

132. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « L’abbé Brispot »

Plus d’un courageux esprit a lutté avec elles ; car ce n’est pas une idée d’aujourd’hui ou d’hier, mais un besoin qui date de loin dans l’Église, qu’une concorde lumineuse des Évangiles devant laquelle la mauvaise foi et la mauvaise science fussent obligées de baisser le ton et les yeux. Dès les premiers temps de l’Église, en face des premières hérésies, saint Jérôme écrivait au pape saint Damase sur la nécessité vivement sentie par les fidèles de relier et de concentrer les quatre Évangiles en un seul. […] L’abbé Brispot accompagne le texte concordé des Évangiles de commentaires, explications et notes, tirés des écrivains les plus illustres de l’Église dans l’ordre de la sainteté ou de la science, et c’est dans le choix de ces annotations, qui viennent ajouter leur lumière à celle du texte souvent d’une trop divine pureté pour tomber dans des yeux charnels sans les offenser, que l’abbé Brispot a montré les richesses d’une forte érudition religieuse et le tact supérieur qui sait s’en servir. […] Si l’on nous demandait les noms de quelques-uns de ces grands hommes, nous répondrions avec saint Jean Chrysostôme parlant de ceux qui l’ont précédé, que c’est un Évode, la bonne odeur de l’Église, disciple et imitateur des Apôtres ; que c’est un saint Ignace, qui porte Dieu lui-même dans sa personne ; un saint Denis l’Aréopagite, qui poussait son essor jusque dans le ciel ; un saint Hippolyte-le-Grand, si plein de douceur et de bienveillance ; un saint Basile-le-Grand, presque égal aux apôtres ; un saint Athanase, si riche de vertus ; un saint Grégoire-le-Thaumaturge, soldat invincible de Jésus-Christ ; un autre du même nom et du même génie, un saint Éphrem, dont le cœur semblait être le temple particulier de l’Esprit-Saint ! 

133. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Troisième partie. Beaux-arts et littérature. — Livre V. Harmonies de la religion chrétienne avec les scènes de la nature et les passions du cœur humain. — Chapitre VI. Harmonies morales. — Dévotions populaires. »

Il faut placer au premier rang ces dévotions populaires qui consistent en de certaines croyances et de certains rites pratiqués par la foule, sans être ni avoués, ni absolument proscrits par l’Église. […] Nous ne dirons point non plus comment, dans les calamités publiques, les grands et les petits s’en allaient pieds nus d’église en église, pour tâcher de désarmer la colère de Dieu.

134. (1895) La science et la religion. Réponse à quelques objections

Qui se détacherait aujourd’hui de la communion de l’Église pour des « raisons philologiques » ? […] Placez John Wesley à Rome, il y sera certainement le premier général d’une société dévouée aux intérêts et à l’honneur de l’Église. […] J’entends maintenant ce qu’on voulait dire autrefois quand on réduisait toute la querelle entre protestants et catholiques à la « matière de l’Église ». […] C’est un premier point dont nous pouvons convenir avec l’enseignement de l’Église ; — et je n’ai pas besoin d’en montrer l’importance. […] Consentons que les Évangiles ne soient ni de leurs auteurs ni du temps que leur assigne la tradition de l’Église.

135. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « Mémoires de l’abbé Legendre, chanoine de Notre-Dame, secrétaire de M. de Harlay, archevêque de Paris. »

L’abbé Legendre était un homme de lettres et un homme d’esprit ; il fut sinon secrétaire à proprement parler, du moins de l’intimité et au service de l’archevêque de Paris, M. de Harlay de Champvallon, le beau, l’habile et l’éloquent prélat, qui administra et conduisit non seulement son diocèse, mais l’Église de France sous Louis XIV ; il nous aide à le mieux connaître. […] Il aurait voulu être avocat ou jésuite : contrarié sur ces deux points par sa famille, il entra simplement dans l’Église et prit cette carrière non par aucun mouvement de piété, mais uniquement comme une profession. […] Au sortir de là et sa démission obtenue, le roi avait nommé M. de Marca, un savant homme, un ancien magistrat devenu homme d’Église, et qui mourut brusquement dans le temps même où il recevait ses bulles : on se rabattit alors à messire Hardouin de Péréfixe, ancien précepteur du roi, écrivain assez agréable dans sa Vie de Henri le Grand, assez instruit, assez bonhomme, mais sans caractère, sans élévation d’âme ni aucune dignité extérieure : il ne fut jamais au niveau de sa haute position, et il encourut en plus d’un cas le ridicule. […] L’église restait ouverte nuit et jour, et les laquais, pour garder les meilleures places, étaient obligés d’y passer les nuits. Sur ce grand succès, les Augustins déchaux le supplièrent de venir prêcher dans leur église le samedi d’avant le dimanche des Rameaux.

136. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « A. P. Floquet »

Voilà ce qui sauva de l’oubli un homme pour qui l’Église romaine se montra plus que généreuse, mais pour qui la Fortune, à force de bontés, finissait par se retrouver cruelle. […] Nommé, dès treize ans, à un canonicat de l’Église de Metz, s’il ne grandit pas, comme Éliacin, dans le sanctuaire, il grandit du moins pour le sanctuaire, au sein duquel se trouvait la place qu’il devait occuper un jour. […] Le Bossuet de la stalle en chêne de l’antique église de Metz, digne d’inspirer un poète comme Byron quand Byron devenait catholique et pleurait en entendant l’orgue, ce Bossuet ponctuel comme le Devoir et comme l’Humilité, qui arrivait, quarantième manteau noir, pour l’office de nuit, pendant dix-sept ans, à sa place accoutumée dans le chœur de l’église assombrie, a beaucoup frappé Floquet, qui n’est pas un rêveur, mais un esprit solide.

137. (1917) Les diverses familles spirituelles de la France « Chapitre iv »

En même temps qu’il collabore au mouvement social, il est un de nos pasteurs les plus zélés, et il se relie en pensée à toutes les belles figures qui sont dans l’Église catholique. […] Elle contribuera à réveiller l’Église, à unir ses membres. » (Cité par M.  […] Ailleurs, dans la vie du jeune Escande, nous lisions que privé de voir l’aumônier protestant, il aimait à entrer dans la petite église catholique de Courtemont, où, caché derrière un pilier, il se tenait dans le silence et le recueillement. […] Ce sont des chrétiens qui chantent les psaumes en français et qui ont organisé leurs églises sur le modèle des sociétés modernes.

138. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Entretiens sur l’histoire, par M. J. Zeller. Et, à ce propos, du discours sur l’histoire universelle. (suite.) »

Jésus-Christ obtenu et parfaitement défini, au lieu de passer outre pour s’étendre, comme on s’y attend, sur les progrès de l’Église par saint Paul et après saint Paul, il va encore revenir et avec une sorte d’acharnement sur les châtiments des Juifs, sur l’accomplissement des prophéties par leur entière ruine au temps de Vespasien et de Titus. […] Une allocution à Monseigneur termine cette seconde partie, allocution essentiellement politique et qui s’adresse au futur souverain : Monseigneur, lui dit-il, tout ce qui rompt cette chaîne, tout ce qui sort de cette suite (la suite de l’Église), tout ce qui s’élève de soi-même et ne vient pas en vertu des promesses faites à l’Église dès l’origine du monde, vous doit faire horreur. […] Ses lois sont un des plus fermes remparts de l’Église. […] S’il attaque l’Hérésie par tant de moyens et plus encore que n’ont jamais fait ses prédécesseurs, ce n’est pas qu’il craigne pour son trône ; tout est tranquille à ses pieds, et ses armes sont redoutées par toute la terre : mais c’est qu’il aime ses peuples, et que, se voyant élevé par la main de Dieu à une puissance que rien ne peut égaler dans l’univers, il n’en connaît point de plus bel usage que de la faire servir à guérir les plaies de l’Église. » Erreur, abus de la parole et de l’éloquence !

139. (1898) L’esprit nouveau dans la vie artistique, sociale et religieuse « III — Les deux cathédrales »

Écoutez-le, ou plutôt écoutez son sosie, Durtal101, s’abîmer en extase devant le sanctuaire : « Elle est un résumé du ciel et de la terre ; du ciel dont elle nous montre la phalange serrée des habitants, Prophètes, Patriarches, Anges et Saints éclairant avec leurs corps diaphanes l’intérieur de l’Église, chantant la gloire de la Mère et du Fils ; de la terre, car elle prêche la montée de l’âme, l’ascension de l’homme ; elle indique nettement, en effet, aux chrétiens, l’itinéraire de la vie parfaite     Et cette allégorie de la vie mystique, décelée par l’intérieur de la Cathédrale, se complète au dehors par l’aspect suppliant de l’édifice. […] Pour l’un, il y a Dieu, la Vierge et les Saints, l’Église, gardienne de la Vérité, l’homme, créature pitoyable et pécheresse, sans espoir hors de l’obéissance à Dieu. […] L’homme qui vote au Parlement pour le maintien des « survivances du passé » est proche de l’homme qui consacre un roman à l’exaltation de l’Église. […] « M Huysmans fait avec l’Église un mariage de raison. […] Je le sais, vous n’êtes pas seul, puisque la Sainte Église vous couvre de sa protection, mais combien toutefois, vous paraissez faible à tous ceux que fut assez puissante pour entraîner, la nouvelle chanson, celle que vous n’entendez pas !‌

140. (1829) Tableau de la littérature du moyen âge pp. 1-332

Les prédications et les prières de l’Église en étendaient sans cesse l’usage. […] C’est surtout à l’empire de l’Église que la langue latine avait servi d’interprète. […] La comtesse le fit ensevelir dans l’église des Templiers, et prit bientôt après le voile de religieuse. […] Les chants d’église en langue latine en avaient, bien des siècles auparavant, consacré l’usage. […] Les veilles d’armes dans l’église duraient plusieurs nuits.

141. (1763) Salon de 1763 « Peintures — De Machy » pp. 242-243

De Machy Des cinq tableaux que cet artiste a exposés : l’Intérieur de l’église de la Magdeleine, le Péristyle du Louvre vu du côté de la rue Fromenteau et éclairé par une lampe ; les deux Ruines à gouache de la foire Saint-Germain incendiée, et l’Installation de la statue de Louis XV, les quatre premiers ne sont pas sans mérite. […] Ce que je priserais donc dans le morceau de l’Église de la Magdelaine, ce n’est pas l’architecture ; l’éloge si elle en mérite, en appartient à M. 

142. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Merlin de Thionville et la Chartreuse du Val-Saint-Pierre. »

Tel est le personnage original qui, dans sa jeunesse, eut la pensée de devenir homme d’Église, et qui plus est, la tentation de se faire chartreux. […] L’église, d’une architecture moderne, en occupait le fond, et deux ailes en formaient les côtés. […] Derrière l’église était le cloître, contenant quarante cellules, composées chacune de quatre belles pièces, et ouvrant d’une part sur un joli jardin, et de l’autre sur le cloître, en communication lui-même avec le grand jardin, orné d’ifs taillés en pyramide, de gazons et d’un bassin avec un superbe jet d’eau. L’église était resplendissante de dorures et divisée en quatre parties : le sanctuaire, surmonté d’une couronne soutenue par des colonnes de marbre de vingt-cinq à trente pieds de hauteur ; le chœur des chantres, garni de stalles en bois de chêne d’une rare beauté, avec des panneaux incrustés en bois de diverses couleurs, et des tableaux représentant la vie de saint Bruno ; le transept contenant d’un côté l’autel de la Vierge, de l’autre celui de saint Bruno, avec la statue en marbre blanc de ce bienheureux ; la nef, dans laquelle le public était admis une fois l’an, séparée du reste par une haute et magnifique grille, toute chargée de dorures. […] Une fois, sortant de l’église au petit jour, à la file des chartreux, avec dom Ignace qui reconduisait chez moi sans mot dire, je remarquai que le mur en pierre de taille sur lequel s’ouvraient les cellules était usé d’une manière sensible à la hauteur des bras, et que les dalles du pavé étaient creusées uniformément comme les chemins battus par les bœufs ; j’arrêtai dom Ignace et lui demandai si ces traces n’étaient pas l’effet du passage quotidien des religieux : par un simple mouvement de tête, il me répondit affirmativement.

143. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre VII. Mme de Gasparin »

Mme de Gasparin a marqué des signes d’un protestantisme trop ardent et trop déterminé les précédents écrits que nous avons d’elle pour qu’on ne suppose pas, dans une de ses publications, une intention de théologie au compte et au profit de son Église, et ici, qu’on le sache bien, cette intention n’existe pas. […] D’une simplicité toute féconde, cette conception a du moins pour elle l’innocence, si elle n’a pas le réel de la vérité, L’Église, en laquelle nous croyons, nous ; l’Église qui a tiré le voile du mystère sur le bonheur réservé à ses Justes, n’a pas défendu, que je sache, à l’imagination des hommes de se figurer cette félicité des élus, pourvu qu’on n’altérât jamais la pureté sans tache de cette félicité divine. L’Église a laissé faire au Dante son rêve immense et elle a souffert dans son sein ces autres poëtes, appelés mystiques, qui souvent ont été des Saints, et qui, eux aussi, ont cherché à percer le ciel de leur regard et à voir ce qu’il y avait derrière cette éternité éblouissante ! […] ce que l’Église nous permet à nous, une femme qui n’est pas de notre communion, — une glaneuse libre de vérités ; privée, hélas ! […] On n’est pas accoutumé à entendre de tels accents dans l’Église dont elle est la fille.

144. (1895) Histoire de la littérature française « Troisième partie. Le seizième siècle — Livre I. Renaissance et Réforme avant 1535 — Chapitre I. Vue générale du seizième siècle »

Les âmes au fond desquelles vivait encore une foi intense, avaient perdu l’enthousiasme : les nobles avaient ruiné la féodalité, les gens d’Église étaient en train de perdre l’Église et la religion : les grandes idées périssaient par les hommes qui les représentaient. L’esprit bourgeois triomphait partout, tout positif, fait de bon sens et de raison pratique, mais desséché, démoralisé par le spectacle de la forme qu’avaient donnée au monde ces grandes puissances de l’Église et de la noblesse, tourné vers la défiance railleuse, vers la négation hostile, tirant du train des choses une leçon de ruse et d’égoïsme, le culte du fait et du succès, voué enfin à la poursuite des jouissances matérielles. […] Deux choses couraient grand risque : le dogme avec l’Église qu’il soutient ; et la morale, la pratique aussi bien que la théorique.

145. (1888) Les œuvres et les hommes. Les Historiens. X. « M. H. Wallon » pp. 51-66

Wallon reste debout, et même assis, en peignant l’homme devant l’image duquel l’Église nous prescrit de nous agenouiller. […] Seulement, chose plus étrange encore, et qui n’étonne pas, du reste, quand on connaît la rouerie des ennemis de l’Église, c’est précisément cette Sainteté apparaissant à travers tous les faits d’un règne, que je n’ai pas, comme M. Wallon, le temps de brasser, qu’on a cherché à retourner contre l’Église. […] Ils sont même allés, pour prouver qu’en Saint Louis le Roi foulait aux pieds quelquefois le Saint, jusqu’à inventer cette fameuse Pragmatique si longtemps invoquée, qui fit, jusque de Bossuet, une dupe si coupable, et dont une Critique plus avisée et plus savante a démontré récemment la fausseté, comme si on avait eu besoin de cette démonstration, maintenant irréfragable, pour être sûr de la fausseté de cet acte, évidemment stupide avant d’être faux ; car je ne sache pas que l’Église, qui a canonisé Saint Louis, ait eu jamais l’habitude de canoniser ceux qui la canonnent — c’est-à-dire ses ennemis !

146. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « II. Jean Reynaud »

Rationalistes, panthéistes, éclectiques, voltairiens, toutes les variétés de philosophes qui se tiennent entre eux comme des crustacés, sont intéressés à vanter un livre, quel qu’il soit, dont les idées ne vont à rien moins qu’à la destruction intégrale de nos dogmes et à la ruine de l’Église romaine : aussi nul d’entre eux n’y a-t-il manqué. […] Mais à une époque où le Rationalisme souffre tant des blessures qu’il se fait à lui-même et où l’enseignement de l’Église commence de reprendre dans les esprits éminents l’empire qu’il avait perdu au dix-huitième siècle, ils se sont dit probablement qu’il ne fallait mépriser le secours de personne. […] Jean Reynaud est un coup porté, par une main philosophique de plus, au christianisme et à l’Église. Comment ceux qui haïssent l’Église et le christianisme n’en seraient-ils pas reconnaissants ?

147. (1894) Écrivains d’aujourd’hui

Il fait le tableau de la primitive Église et de ses vertus. […] J’ai donc cette semaine hanté beaucoup les églises. […] Elle a de l’influence dans les Conseils de l’Église et dans le monde. […] L’Église doit-elle s’ouvrir largement au mouvement moderne ? […] Jusqu’ici l’Église de France a hésité à entrer dans ce mouvement.

148. (1902) La politique comparée de Montesquieu, Rousseau et Voltaire

L’Église catholique en 1685 n’a pas défendu les protestants. […] Etat dans l’Etat, les Eglises. […] Etat dans l’Etat, un collège libre, car c’est une Eglise tout de même. […] C’était supprimer « l’appel comme d’abus », c’est-à-dire toutes les libertés de l’Église gallicane. […] Même vous avez, la nuit, souillé une église.

149. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — G — article » pp. 416-419

En suivant cette méthode, qui prouve beaucoup de sagacité, beaucoup de connoissances, il est parvenu à donner non seulement une Collection intéressante des actions principales des Saints que l’Eglise révere dans ses Fastes, mais encore de présenter dans l’ensemble de l’Ouvrage un tableau assez suivi de l’Histoire de l’Eglise.

150. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Entretiens sur l’architecture par M. Viollet-Le-Duc »

Les palais nous semblaient assez maussades, insignifiants ; les églises, ou de misérables baraques en brique et sapin mal bâties, ou des amas de formes d’architecture les plus monstrueuses ; les ruines antiques… la plupart d’une mauvaise époque, des édifices cent fois remaniés et ayant perdu leur caractère. […] On lui confia les restaurations les plus importantes, celle de l’église de Vézelay, entre autres, qui dura quinze ans à exécuter. […] Charles Nodier, Victor Hugo, avaient énergiquement tonné contre la bande noire ; des savants positifs, les antiquaires de Normandie, M. de Caumont, Auguste Le Prévost, un si bon et si aimable esprit, décrivaient et remettaient en honneur les monuments, églises, restes d’abbayes et de moutiers, de leur riche province ; pionniers utiles, ils amassaient des matériaux pour un futur classement complet qui se ferait d’après l’observation comparée des caractères. […] Que de courses archéologiques je me rappelle et à Paris et hors de Paris, à l’abbaye de Saint-Denis, à l’église de Sarcelles, à Écouen, ou tout simplement au réfectoire de Saint-Martin des Champs, en la compagnie de ces savants hommes ; que d’occasions de bien savoir et d’apprendre, dont j’ai trop peu profité ! […] Un jour il me fit entrer dans l’église de Notre-Dame, et me portait dans ses bras, car la foule était grande.

151. (1899) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Septième série « Les deux Tartuffe. » pp. 338-363

Plus rien du rat d’église. […] qu’à ce moment le premier Tartuffe, le bedeau, le truand d’église, est loin de nos yeux et de notre souvenir ! […] Parmi les voluptés sensuelles, les plaisirs de la table sont ceux que l’Église interdit avec le moins de rigueur. […] Pour nombre d’hommes d’Église et de dévots, même sincères, les jouissances de la gueule sont comme une revanche licite de ce qu’ils se retranchent sur le point que vous devinez. […] Orgon a, de lui-même, remarqué ce saint homme qui ne lui demandait rien et se contentait de lui offrir discrètement de l’eau bénite à la sortie de l’église : Instruit par son garçon, qui dans tout l’imitait, Et de son indigence, et de ce qu’il était, Je lui faisais des dons ; mais avec modestie Il me voulait toujours en rendre une partie.

152. (1949) La vie littéraire. Cinquième série

Son orgueil s’accommode des précautions que l’Église prend contre elle. […] Pourtant son action sur l’Église fut forte et durable. […] Sans pape, point d’Église ; sans Église, point de christianisme ; sans christianisme, point de société : donc le pape est au-dessus de tout. […] L’orientalisme acheva de perdre la peinture d’église. […] On a bien dit, l’autre jour, que j’inclinais vers la nouvelle Église.

153. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Introduction »

De l’Église ? mais quelle Église ? […] J’accorde donc que l’on peut être librement croyant, même dans une Église où il y a une autorité infaillible ; mais, s’il en est ainsi, j’avoue ne pas comprendre l’objection qu’élèvent les partisans de cette Église contre les confessions qui ne reconnaissent pas une pareille autorité. […] Ne voient-ils pas que jusqu’à ce qu’ils aient trouvé dans l’Écriture le texte qui fonde l’autorité de l’Église, ils usent eux-mêmes du libre examen ? […] Le jour où Luther a renversé l’autorité de l’Église, il a implicitement reconnu à tous les fidèles le droit de lire et d’interpréter la Bible à leurs risques et périls.

154. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « V. M. Amédée Thierry » pp. 111-139

Amédée Thierry ne manque pas à l’histoire de l’Église universelle, et l’historien aurait pu la trouver là, s’il ne la trouvait pas dans sa propre pensée. Sur la route qu’il parcourt aujourd’hui, en effet, dans cette phase que sa plume traverse, il y a l’Église chrétienne. […] Saint Léon, que l’Église romaine appelle le Grand et que l’Église grecque appelle le Sage, saint Léon, le pontife sauveur, au-dessus de la tête duquel Raphaël a mis des apôtres et des anges pour expliquer le cabrement du cheval d’Attila devant la majesté placide du vieillard, saint Léon n’est pour M.  […] Pour écrire dignement l’histoire de ces Barbares, nos ancêtres, que l’Église, la toute-puissante et irrésistible Église eut tant de peine à apprivoiser, il faudrait, dans l’ordre littéraire, quelque chose comme un Tintoret, doublé de quelque Delacroix !

155. (1868) Cours familier de littérature. XXV « CXLVIIIe entretien. De la monarchie littéraire & artistique ou les Médicis (suite) »

À ce moment, ils ouvrirent les fenêtres du palais sur la place et aperçurent Giacomo Pazzi qui appelait le peuple à l’insurrection et annonçait l’assassinat du tyran dans l’église. […] Cet enfant célèbre fut pape sous le nom de Clément VII, et contribua à sauver l’Église. […] « Vous êtes désormais consacré à Dieu et à l’Église, et pour cette raison vous devez constamment aspirer à être un bon ecclésiastique, et montrer que vous préférez l’honneur et l’état de l’Église et du saint-siége apostolique à toute autre considération. Et tant que vous serez pénétré de ces principes, il ne vous sera pas difficile de rendre à votre famille et à votre patrie des services importants ; au contraire, vous pouvez devenir le lien heureux qui attachera plus étroitement cette ville à l’Église et votre famille à cet État ; et, quoiqu’il soit impossible de prévoir quels événements peuvent arriver un jour, je ne doute point que cela ne se puisse faire avec un égal avantage pour tous, observant néanmoins que vous devez toujours préférer les intérêts de l’Église. […] Laurent n’osa pas se compromettre avec l’Église, alors toute-puissante, en le réprimant.

156. (1869) Cours familier de littérature. XXVII « CLXIIe entretien. Chateaubriand, (suite.) »

L’Église, dans sa longue carrière, a subi diverses sortes de persécutions et essuyé bien des guerres : dans les siècles de sa formation, sous Julien, « elle fut exposée à une persécution du caractère le plus dangereux. […] « Souvent assis dans une église peu fréquentée, je passais des heures entières en méditation. […] Au milieu de mes réflexions, l’heure venait frapper à coups mesurés dans la tour de la cathédrale gothique ; elle allait se répétant sur tous les tons et à toutes les distances d’église en église. […] L’enfer me suscitait jusqu’à la pensée de me poignarder dans l’église et de mêler mes derniers soupirs aux vœux qui m’arrachaient ma sœur. […] « Un peuple immense remplissait l’église.

157. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « IX. L’abbé Mitraud »

… Tous ces haïsseurs de la vieille Église romaine se sont pris de je ne sais quel goût, — ou plutôt d’un goût que je m’explique très bien, — pour un livre qui a la prétention d’être un livre de science sociale en restant du christianisme. […] C’est donc du haut de leurs idées et de leur orgueil que les ennemis de l’Église ont fait tomber l’éloge sur le front épanoui de M. l’abbé Mitraud et qu’ils ont tendu leur main de Grec ( Timeo Danaos et dona ferentes ! […] D’un autre côté, vainement l’Église lui a-t-elle appris cette charité chrétienne qui a suffi au monde depuis l’Évangile, il ne s’en est pas moins laissé mordre par la brebis enragée de la Philanthropie moderne, et comme l’école tout entière du dix-huitième siècle qu’il essaie de combattre, mais qui le tient sous elle comme un vaincu, il se préoccupe, à toute page de son livre philanthropique, du droit de chaque homme vis-à-vis de la société, et il va chercher ce droit individuel dans des notions incomplètes ou fausses, pour l’exprimer dans de nuageuses définitions que le dix-huitième siècle n’aurait certes pas repoussées ! […] Mitraud s’il y a et s’il peut y avoir des interprétations ou des développements ultérieurs à cette vérité sociale et au christianisme, tels que l’Église les enseigne et les a toujours enseignés.

158. (1858) Cours familier de littérature. VI « XXXIe entretien. Vie et œuvres de Pétrarque » pp. 2-79

Lisez ce second de ses sonnets, commémoration de la première rencontre de Laure dans l’église. […] On songeait à transporter la cour pontificale à Rome ; Pétrarque, Italien de cœur, adressa au pape une magnifique allocution de la ville de Rome au pape pour le conjurer de rapatrier l’Église à la ville éternelle. […] J’habite Parme, j’y passe ma vie dans l’église ou dans mon jardin. […] Clément VI caressait cependant encore le poète ; il s’entretenait amicalement avec Pétrarque, lui prodiguait les faveurs et les dons de l’Église, mais Pétrarque persistait à vouloir se rendre à Rome ; la dernière fois qu’il vit Laure avant ce départ fut pour lui comme un pressentiment d’éternelle séparation. […] Ce songe était prophétique, Laure était morte de la peste à Avignon, le 6 avril, anniversaire de sa première rencontre avec son poète dans l’église de Sainte-Claire.

159. (1890) L’avenir de la science « XVII » p. 357

On est parfois injuste pour les persécutions de l’Église au Moyen Âge. […] C’est pour cela qu’il faut juger tout autrement les persécutions de l’Église au Moyen Âge et dans les temps modernes. […] Quand l’Église était la domination légitime, elle avait beaucoup moins à persécuter que depuis qu’elle eut cessé de l’être. […] C’est donc que l’Église est plus faible. […] Le pouvoir a toujours été la mesure de la tolérance de l’Église.

160. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Santeul ou de la poésie latine sous Louis XIV, par M. Montalant-Bougleux, 1 vol. in-12. Paris, 1855. — I » pp. 20-38

La littérature latine moderne pâlissait nécessairement en présence des chefs-d’œuvre de poésie française qui venaient d’éclore et qui illustraient le règne ; cette littérature et cette poésie latine, déjà de toutes parts en retraite, trouva néanmoins son dernier refuge et son emploi dans les livres d’Église. […] C’est absolument comme en architecture, lorsqu’on trouve à redire à de prétendues réparations, et à des reconstructions en style romain appliquées à des églises gothiques. […] Le Tourneux, qui vise à réformer en lui le cœur, est attentif à poursuivre en lui ce déguisement nouveau de l’amour-propreb : « Considérez, lui écrit-il, mon cher frère, qu’on peut bien, dans l’Église visible et militante, chanter et composer les louanges de Dieu avec un cœur impur et des lèvres souillées, mais qu’on ne chantera pas les louanges de Dieu dans le ciel avec un cœur impur et des lèvres souillées… Vous avez donné de l’encens dans vos vers, mais c’était un feu étranger qui était dans l’encensoir. […] On raconte que, lorsque ses hymnes eurent été adoptées dans les bréviaires et qu’elles se chantèrent dans les offices, il ne se tint pas de joie ; il courait les églises où on les chantait ; il grondait ceux près de qui il était placé lorsque leur ton n’était pas à son gré, et quand le chant lui paraissait convenir à la beauté des paroles, il sautait et grimaçait tellement qu’il lui fallait sortir, de peur d’esclandre. Ce malheureux démon de gloire poétique, qu’on avait cru un moment exorcisé, le possédait et l’agitait de plus belle : « Les autres font leur salut dans l’église, disait-il ; mais moi c’est le contraire : pour faire le mien il faut que j’en sorte, de peur d’entendre mes hymnes avec trop d’orgueil. » Il les envoyait cependant à M. de Rancé et aurait voulu qu’on les chantât à la Trappe.

161. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Le Mystère du Siège d’Orléans ou Jeanne d’Arc, et à ce propos de l’ancien théâtre français (suite.) »

D’abord il se passe dans le sanctuaire et dans l’église, et est tout latin ; Puis, dans son premier mélange, à l’état de drame farci, c’est-à-dire dans son latin entrelardé de français, il se tient dans l’église encore ; Puis, tout en français, mais encore timide, s’écartant peu des textes, sacrés et, pour ainsi dire, attenant, à l’église, il se joue tout contre et devant. […] L’auteur, Arnoul Gresban, était un notable bachelier en théologie, chanoine de l’église du Mans, du temps de Louis XI. Il avait un frère également homme d’église, poëte et auteur dramatique. « Les deux Gresban au bien résonnant style », a dit Marot.

162. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Lamennais — Lamennais, Affaires de Rome »

Feutrier a fait contre les Jésuites les Ordonnances du 21 avril et du 16 juin ; c’est parce que M. de Vatimesnil poursuit ses persécutions contre l’Église. […] Les Paroles d’un Croyant, non plus que le chapitre des Maux de l’Église, inséré à la fin du présent volume et assez anciennement composé, ne me semblent point, dans leur violence, sortir de ce rôle de foi, de cette inspiration d’un prêtre, non pas absolument sage, mais généreux et presque héroïque, et toujours le crucifix en main. […] Dans les conclusions du présent livre sur le vrai christianisme qui doit désormais régir le monde, je remarque avec peine la même intrépidité de prédiction que quand l’auteur des Réflexions sur l’État de l’Église (1808) s’écriait en terminant : « Non, ce n’est pas à l’Église à craindre… Les siècles s’évanouiront, le temps lui-même passera, mais l’Église ne passera jamais. […] Si, au contraire, ceci est la fin, et que le monde soit condamné, au lieu de rassembler ces débris, ces ossements des peuples, et de les ranimer, l’Église passera dessus et s’élèvera au séjour qui lui est promis, en chantant l’hymne de l’Éternité ; » — ou bien quand, à la fin des Progrès de la Révolution, en 1829, il écrivait : « Vient le temps où il sera dit à ceux qui sont dans les ténèbres : Voyez la lumière ! 

163. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — S. — article » pp. 236-239

Ce Poëte s’est élevé à lui-même un trophée immortel, par les Hymnes composées à l’usage de l’Eglise, adoptées dans le plus grand nombre des Dioceses. […] On met tout cela sur le compte d’un Religieux dont les Poésies sont consacrées par l’usage que quelques Eglises en font dans les Prieres publiques, & dont la mémoire ne devoit pas être flétrie par un Libelle ».

164. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Troisième partie. Beaux-arts et littérature. — Livre premier. Beaux-arts. — Chapitre II. Du Chant grégorien. »

Pergolèze a déployé dans le Stabat Mater la richesse de son art ; mais a-t-il surpassé le simple chant de l’Église ? […] Au reste, en ne parlant que des chants grecs de l’Église, on sent que nous n’employons pas tous nos moyens, puisque nous pourrions montrer les Ambroise, les Damase, les Léon, les Grégoire, travaillant eux-mêmes au rétablissement de l’art musical ; nous pourrions citer ces chefs-d’œuvre de la musique moderne, composés pour les fêtes chrétiennes, et tous ces grands maîtres enfin, les Vinci, les Leo, les Hasse, les Galuppi, les Durante, élevés, formés, ou protégés dans les oratoires de Venise, de Naples, de Rome, et à la cour des souverains pontifes.

165. (1772) Bibliothèque d’un homme de goût, ou Avis sur le choix des meilleurs livres écrits en notre langue sur tous les genres de sciences et de littérature. Tome II « Bibliotheque d’un homme de goût — Chapitre XX. Des Livres de facéties, des recueils d’anecdotes & de bons mots. » pp. 381-385

On prétend que l’auteur avoit un but en composant ses extravagances, & qu’il avoit pris le masque de la folie pour cacher la satyre qu’il vouloit faire du Pape, des Cardinaux & de l’Eglise. […] Le comique tombe souvent sur des querelles entre l’Eglise anglicane & la presbytérienne, & sur des jeux de mots particuliers à la langue angloise.

166. (1867) Cours familier de littérature. XXIII « cxxxviie entretien. Un intérieur ou les pèlerines de Renève »

— Quel est, lui demandai-je avec curiosité, le nom de ce gros village à l’église neuve, qui s’étend là-bas, du côté du soleil couchant, dans la plaine, et qui semble regarder un beau château blanc avec une balustrade au-dessus ? […] Nous entrâmes ensuite dans l’église. […] Ces haltes toujours si fréquentes nous menèrent jusqu’au milieu de la soirée, et nous ne voyions toujours rien devant nous qu’une haute chaîne de montagnes, noire de forêts ; mais ni église, ni château, ni village ; cela nous trompa de route, monsieur. […] Leur moindre bruit, leur plus faible voix montait jusqu’à nous comme si nous eussions été dans une église, tant l’air était pur et l’atmosphère limpide. […] L’église, avec son clocher romain du treizième siècle, s’élevait seule au bout du jardin, et il y avait une chapelle donnant sur le jardin.

167. (1889) Les œuvres et les hommes. Les poètes (deuxième série). XI « Victor Hugo »

Quand il a repris, dans son poème, la vieille idée de tous les ennemis de l’Église, il l’a faite sentimentale pour la faire plus meurtrière, pour la faire d’un plus large et d’un plus sûr coup de poignard. […] Au fond, c’est la même haine contre l’Église, c’est le même désir scélérat de la voir détruite, et c’est surtout la même théologie. […] S’il y a, en effet, une idée qui chausse la médiocrité des bourgeois, c’est l’idée absurde que l’Église, établie de Dieu et constituée à grand renfort de Saints, de grands hommes et de siècles, doit, pour sa plus grande gloire, revenir à l’Église primitive, qui n’était pas constituée, et à la pauvreté des premiers temps. […] C’est cette idée-là que Hugo roule dans son poème, au milieu de beaucoup d’autres, aussi bourgeoises, sur les Papes, les Rois, les richesses de l’Église, l’Infaillibilité. […] S’il a été jamais un soleil, Hugo est dans ce livre un soleil qui se couche, et ses idées bourgeoises contre l’Église et la Papauté le coiffent du bonnet de coton de ceux qui se couchent et qui ne sont pas le soleil… Littérairement, et à ne voir son Pape que comme une œuvre de l’esprit pure du déshonneur du pamphlet, on se demande ce que c’est et comment on pourrait classer cette composition, qui n’est un poème que parce qu’elle est en vers, et qui est dialoguée comme un drame, sans être un drame.

168. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Lamennais — L'abbé de Lamennais en 1832 »

Mais lorsque, deux ans après, parut le tome second de l’Indifférence, et que l’auteur développa sa théorie de la certitude, puis les applications successives de cette théorie au paganisme, au mosaïsme et à l’Église, l’attention publique, détournée ailleurs, ne revint aucunement ; sur ce terrain il n’y eut plus guère que le clergé, les théologiens gallicans et les personnes faites aux controverses philosophiques, qui le suivirent. […] » La Tradition de l’Église sur l’Institution des Évêques, publiée en 1814, aux premiers jours de la Restauration, avait été commencée, dès 1809, au petit séminaire de Saint-Malo, où M. de La Mennais était entré en prenant la tonsure. […] Au milieu d’imperfections nombreuses, et dont M. de La Mennais est le premier à convenir aujourd’hui, telles que des jugements trop acerbes, d’impraticables conseils de subordination spirituelle de l’État à l’Église, et une érudition incomplète, quoique bien vaste, et arriérée ou sans critique en quelques parties, ce grand ouvrage constitue la base monumentale, le corps résistant d’où s’élèveront et s’élèvent déjà les travaux plus avancés de la science chrétienne. […] Les temps antérieurs à Moïse et les formes nombreuses de la gentilité, la révélation spéciale du législateur hébreu, la révélation sans limite de Jésus et l’Église romaine qui en est la permanente dépositaire, se déroulent tour à tour devant lui et composent les pièces principales de ce merveilleux enseignement : tout le programme de la future science catholique est là. […] Dans le moyen âge, il n’en allait pas ainsi : la puissance spirituelle régnait ; les princes, fils de l’Église, tuteurs au temporel, administraient les peuples robustes, encore en enfance ; s’ils faisaient sentir trop pesamment le sceptre, au cri que poussaient les peuples le Saint-Siège s’émouvait et portait sentence.

169. (1895) Histoire de la littérature française « Seconde partie. Du moyen âge à la Renaissance — Livre II. Littérature dramatique — Chapitre II. Le théâtre du quinzième siècle (1450-1550) »

Et pendant tout le temps des représentations, à la fin de chaque journée, ils se rendent à la même église pour chanter un Salve, Regina. […] Il se peut que, selon une hypothèse assez vraisemblable, ils représentent les célébrants de la fête des fous, quand cette joyeuse et insolente parodie des cérémonies religieuses fut bannie de l’Eglise. […] La sottie soulevait l’opinion publique contre la fureur et l’ambition de l’Église romaine, sous les habits de qui se découvrait à la fin Mère Sotte. […] La fameuse sottie, intitulée le Monde, Abus, les Sots, vaut surtout par sa liste de personnages : Sot Dissolu, habillé en homme d’Église, Sot Glorieux, habillé en gendarme, Sot Corrompu, habillé en marchand, Sot Ignorant, habillé en vilain, et Sotte Folle, en femme. […] Ce peut être à l’origine une farce de gens d’Église, comme un plaidoyer ridicule sera une farce de gens de Palais.

170. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Montaigne en voyage »

Il a le regret, dans cette ville d’Augsbourg, de se rendre remarquable par quelque façon opposée au goût du pays : c’était en passant par une église ; comme il faisait très froid et qu’il était indisposé, il garda son mouchoir sous son nez, ce qui parut étrange : il en fut mortifié, quand ensuite on le lui dit. […] A peu de distance de là, il admire fort le paysage : « Ce vallon semblait à M. de Montaigne représenter le plus agréable paysage qu’il eût jamais vu ; tantôt se resserrant, les montagnes venant à se presser, et puis s’élargissant à cette heure de notre côté, qui étions à main gauche de la rivière, et gagnant du pays à cultiver et à labourer dans la pente même des monts qui n’étaient pas Ri droits, tantôt de l’autre part ; et puis découvrant des plaines à deux ou trois étages l’une sur l’autre, et tout plein de belles maisons de gentilshommes et des églises. […] Nous y vîmes deux très belles églises, et fûmes logés à l’Aigle, beau logis. […] Mais était vraisemblable que ces membres dévisagés qui en restaient, c’étaient les moins dignes, et que la furie des ennemis de cette gloire immortelle les avait portés premièrement à ruiner ce qu’il y avait de plus beau et de plus digne ; que les bâtiments de cette Rome bâtarde qu’on allait à cette heure attachant a ces masures, quoiqu’ils eussent de quoi ravir en admiration nos siècles présents, lui taisaient ressouvenir proprement des nids que les moineaux et les corneilles vont suspendant en France aux voûtes et parois des églises que les Huguenots viennent d’y démolir… ». […] Ils l’engagèrent à aider à l’Église par son éloquence, et à demeurer paisible chez eux tant qu’il le voudrait.

171. (1889) Émile Augier (dossier nécrologique du Gaulois) pp. 1-2

» Et lorsque l’on construisit l’église de Croissy, qui coûta deux cent mille francs, Augier tint à apporter son obole et m’envoya cinq cents francs… Il n’allait pas à la messe, il est vrai ; mais que de fois, il a donné le pain bénit… Un jour même, je m’en souviens, il blâma Victor Hugo de n’avoir pas voulu recevoir de prêtre à son lit de mort… » Aussi je suis persuadé que, s’il eût gardé sa connaissance, il eût été heureux de recevoir mes encouragements et mes exhortations au moment où il était rappelé vers un monde meilleur… » Les funérailles aux frais de l’État Les paroles si conciliantes et si prudentes du vénérable curé de Croissy, le souci que montra naguère l’illustre mort de s’opposer à la reprise du Fils de Giboyer, pour ne pas paraître s’allier au gouvernement républicain dans sa lutte contre le sentiment chrétien, cette vie de travail, de gloire et de probité, doivent, dans un journal catholique, épargner un blâme, si discret soit-il, à l’homme de génie qui meurt sans que les siens lui aient permis, dans un but que nous n’avons pas à juger, de mettre son âme en règle vis-à-vis de Celui dont émane tout génie. […] Et c’est ainsi que j’ai monté, au Gymnase, Madame Caverlet et le Mariage d’Olympe, simplement parce qu’on en avait fait au maître la demande… Les obsèques Voici la décision prise par les parents au sujet des obsèques : Dimanche, à deux heures et demie, à l’église de Croissy, service fort simple et pour lequel il ne sera pas fait d’invitations. À l’issue de ce service, le corps sera transporté à Paris et déposé dans une chapelle à l’église de la Trinité. Dimanche, à dix heures et demie, service solennel à l’église de la Trinité, paroisse du défunt — qui habitait rue de Clichy. […] Augier et sa future femme recoururent à son ministère avec beaucoup de simplicité et de piété et, le jeudi saint, le prélat leur donna la bénédiction nuptiale dans l’église Sainte-Marie-du-Peuple, où Luther a dit sa dernière messe.

172. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Deuxième partie. — Chapitre XXIII. »

C’est à un autre nom cependant, à une âme plus chrétienne et plus inspirée, que nous demanderons, dans nos jours d’activité matérielle et technique, un reflet de l’Église primitive, un écho des chants lyriques de Grégoire de Nazianze ou de Synésius. […] Les poésies de sa jeunesse nous offrent en vers élégants quelques versions de Pindare, des bardes du Nord ou des poëtes d’Asie ; mais les grands souvenirs de la Bible et les fêtes de l’Église chrétienne sont sa plus touchante inspiration. […] Correct et gracieux génie, il a pour nous, dans une langue du Nord, tantôt l’élégante douceur de l’hellénisme, tantôt la simplicité naïve de quelques anciens chants de l’Église. […] Mais ce zèle même, si consumant pour la faiblesse du corps, cette ferveur ingénue qui semblait un don de l’Église primitive, s’alliaient en lui aux vues les plus hautes sur le mouvement de la race humaine ici-bas et le progrès nécessaire de l’Évangile. […] L’Amérique du Nord réimprime ses vers ; et dans un des États-Unis de formation récente, près des chutes du Niagara, deux églises ont été bâties, avec des inscriptions consacrées à sa mémoire.

173. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Mémoires et journal de l’abbé Le Dieu sur la vie et les ouvrages de Bossuet, publiés pour la première fois par M. l’abbé Guettée. — I » pp. 248-262

L’abbé Le Dieu était un ecclésiastique estimable, laborieux, auteur par lui-même de quelques ouvrages sur des matières théologiques ; il fut attaché à Bossuet à partir de l’année 1684, et resta auprès de lui près de vingt ans, les vingt dernières années de la vie du grand prélat, en qualité de secrétaire particulier et avec le titre de chanoine de son église cathédrale ; mais il ne faut point voir en lui auprès de Bossuet ce qu’était l’abbé de Langeron pour Fénelon : ce n’était point un ami, mais un domestique dévoué et fidèle. […] Mais Bossuet, qui n’était pas seulement le docteur, mais l’orateur, ne séparait pas de son Augustin son saint Chrysostome ; il y apprenait les interprétations de la sainte Écriture les plus propres à la chaire, et s’y familiarisait avec ces tours nobles et pleins, avec ces tons incomparables d’insinuation « qui lui faisaient dire que ce Père était le plus grand prédicateur de l’Église. » — Il louait aussi Origène, nous dit l’abbé Le Dieu, ses heureuses réflexions et sa tendresse dans l’expression, dont il rapportait souvent cet exemple : « Qu’heureuses furent les tourterelles, dit Origène, d’avoir été offertes (par la Vierge au jour de la purification) pour notre Seigneur et sauveur ! […] Un jour, dans le carême de 1687, à Meaux, prêt à aller à l’église de Saint-Saintin expliquer le Décalogue, je le, vis, dit Le Dieu, M. l’abbé Fleury présent, prendre sa Bible pour s’y préparer, et lire à genoux, tête nue, les chapitres xix et xx de l’Exode ; s’imprimer dans la mémoire les éclairs et les tonnerres, le son redoublé de la trompette, la montagne fumante et toute la terreur qui l’environnait, en présence de la majesté divine ; humilié profondément, commençant par trembler lui-même afin de mieux imprimer la terreur dans les cœurs et enfin y ouvrir les voies à l’amour. […] Il n’écrit pas pour écrire, il n’a nulle démangeaison d’être imprimé ; il n’écrit généralement que forcé par quelque motif d’utilité publique, pour instruire ou pour réfuter, et si le motif cesse, il supprime ou du moins il met dans le tiroir son écrit. « Il n’y avait de grand à ses yeux que la défense de l’Église et de la religion. » Tel il nous apparaît de plus en plus dans le tableau de l’abbé Le Dieu, et tel il sera jusqu’à sa mort.

174. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XXXVII. Des éloges en Italie, en Espagne, en Angleterre, en Allemagne, en Russie. »

Cet artiste fameux était mort à Rome, et le pape voulait le faire enterrer avec la plus grande pompe, dans l’église de Saint-Pierre, qu’il avait contribué à embellir par son génie82 ; mais Florence, sa patrie, ne put consentir à le céder. […] On le déposa dans la principale église jusqu’à ce qu’on eût ordonné sa pompe funèbre. […] L’église entière et huit chapelles étaient décorées avec la même magnificence. […] On aurait pu alors mettre sur son tombeau la même inscription qu’on a mise à Londres sur le tombeau de l’architecte (Wren) qui a bâti la célèbre église de Saint-Paul, et qui y est enterré.

175. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « V. Saint-René Taillandier »

« Ainsi, dit-il, l’Église de saint Louis n’était pas l’Église de Constantin », et on pourrait le mettre au défi de dire en quoi ces deux églises diffèrent !

176. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — F. — article » pp. 303-308

Une critique sage lui a fait négliger les petits faits, comme superflus ou comme étrangers au but de son Histoire, qui est de mettre au grand jour la doctrine de l’Eglise, sa discipline, ses mœurs. […] Si M. l’Abbé Ducreux, Auteur des Siecles Chrétiens, avoit un style moins inégal, ce seroit à lui qu’il appartiendroit de continuer cette Histoire, puisqu’au style près, ses Siecles Chrétiens annoncent toutes les qualités qu’on exige dans un Historien de l’Eglise.

177. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre cinquième. Retour des mêmes révolutions lorsque les sociétés détruites se relèvent de leurs ruines — Chapitre I. Objet de ce livre. — Retour de l’âge divin » pp. 357-361

Aussi les peuples mettaient-ils leurs soins à les cacher, à les enfouir sous terre ; on voit dans toutes les églises que le lieu où on les conserve est le plus reculé, le plus secret. […] Dans la Campanie, le Samnium, l’Apulie115 et dans l’ancienne Calabre, du Vulture au golfe de Tarente, elle gouverna cent dix églises, soit immédiatement, soit par des abbés ou moines qui en étaient dépendants, et dans presque tous ces lieux les abbés de Saint-Laurent étaient en même temps les barons.

178. (1884) Propos d’un entrepreneur de démolitions pp. -294

L’Église devait être saisie dans les sales mains d’un peuple désabusé. […] C’était un vrai dévot de cette Église moderne qui exproprie les bonnes gens pour trimballer les commis-voyageurs et pour fabriquer du dividende à air comprimé. […] L’Église est un pouvoir désarmé qui ne menace plus la peau de personne. […] Peut-être n’a-t-il reçu que le « baptême de la science académique », car le Père Didon compte beaucoup plus de baptêmes que l’Église qui n’en a jamais connu qu’un seul. […] En d’autres temps, l’Église étant toute vive et très forte, un assez grand nombre de coupe-jarrets lui faisaient la guerre.

179. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre I. Les origines. — Chapitre II. Les Normands. » pp. 72-164

Rien de plus opposé à leur génie que les vrais chants et les profondes hymnes, telles que les moines anglais en chantent encore sous les voûtes basses de leurs églises. […] Le petit vers de ses fabliaux gambade et sautille comme un écolier en liberté, à travers toutes les choses respectées ou respectables, daubant sur l’Église, les femmes, les grands, les moines. […] Le Normand, qui raille les rois saxons, qui déterre les saints saxons et les jette hors des portes de l’église, n’aime que les idées et les vers français. […] Le lendemain, allant à l’église, il trouva les portes closes et attendit plus d’une heure avant qu’on apportât la clef. […] Églises de Londres, de Sarum, de Norwich, Durham, Chichester, Peterborough, Rochester, Hereford, Glocester, Oxford, etc. —  Guillaume de Malmesbury.

180. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome I « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Abailard, et saint Bernard. » pp. 79-94

Peuples, rois & papes le consultoient avec vénération ; & quoique simple abbé de Clairvaux, il gouvernoit l’église & l’état. […] Ce père de l’église eut peut-être mieux fait, dit-il, de tourner son zèle contre l’instituteur de Fontevraud, Robert d’Arbrissel, qui couchoit avec ses pénitentes pour avoir le mérite de leur résister, & qui scandalisoit les personnes qui ne vouloient pas croire à des genres de mortification aussi extraordinaires & aussi recherchés. […] Il mourut réputé le Thaumaturge de l’Occident, pour le nombre & le caractère de ses miracles ; un père de l’église, pour l’excellence de ses écrits ; un chef zélé de moines, pour le nombre & la magnificence des établissemens qu’il leur procura.

181. (1905) Les œuvres et les hommes. De l’histoire. XX. « Le cardinal Ximénès »

Le Cardinal Ximénès ou l’Église d’Espagne. […] I Un historien très opposé à l’Église et au Sacerdoce a dit, dans un de ses ouvrages : « Quand on lit l’histoire de l’Europe, ce qu’on y rencontre le plus, ce sont des Cardinaux à la tête de presque tous les gouvernements des États. […] Nous ne parlerons pas de l’Innocent III de Hurter, car Hurter est devenu catholique par la vertu de l’histoire, mais, puisque le docteur Hefele, de l’université de Tubingue, a publié un livre sur Ximénès, — le bienheureux père Ximénès, comme l’appellent les églises d’Espagne, — il faut qu’à une certaine hauteur d’histoire tous les historiens soient catholiques, en plus ou en moins.

182. (1863) Cours familier de littérature. XV « LXXXVIIIe entretien. De la littérature de l’âme. Journal intime d’une jeune personne. Mlle de Guérin » pp. 225-319

On voyait qu’en rentrant de la petite église d’Andillac on l’avait déposé là le matin pour le reprendre le soir, à l’heure où le soleil baissant fait sentir le besoin de prier. […] « C’est un événement ici que ce foyer, comme à peu près un nouvel autel dans une église. […] « Nous sommes allés, lui, Mimi et moi, à l’église en nous levant, célébrer cet anniversaire et entendre la messe. […] Tous nos gens sont à l’église. […] C’est que j’en fais ce que je veux, un salon, une église, une académie.

183. (1865) Cours familier de littérature. XIX « CXe entretien. Mémoires du cardinal Consalvi, ministre du pape Pie VII, par M. Crétineau-Joly (2e partie) » pp. 81-159

D’un autre côté, un cardinal ne pouvait guère se montrer dans un pays où depuis tant d’années on n’avait pas vu même les insignes d’un simple homme d’Église. […] Ces princes de l’Église avaient en outre, l’un et l’autre, un nom plus illustre que le mien, et plus capable, évidemment, de flatter cet orgueil auquel on venait de faire allusion. […] Nul ne songea à lui contester le titre de ministre pacificateur de l’Église. […] Les vingt-cinq jours du voyage désespéré de Consalvi avaient reconquis l’Europe à l’Église. […] Il trouvait en moi, disait-il, des qualités appropriées à son service et à celui de l’Église attaquée ; mais c’était un pur effet de sa bonté, car ces qualités n’existaient pas.

184. (1895) Histoire de la littérature française « Cinquième partie. Le dix-huitième siècle — Livre IV. Les tempéraments et les idées (suite) — Chapitre V. Jean-Jacques Rousseau »

Si elle « sonne » si différente de celle de Voltaire ou de Diderot, c’est uniquement parce que Rousseau vient de l’Église Réformée. […] Le protestant ne saurait être anticlérical absolument, sans réserve, et contre sa propre Église. […] Le protestant qui cesse de croire peut se chamailler avec quelques ministres, il ne se heurte point au même dogme compact, à la même autorité intraitable : il n’est pas mis hors de son Église ; il fait un parti avancé, il peut faire une nouvelle Église, en restant membre de la grande et multiple Église chrétienne. […] Dans une crise douloureuse de sa conscience, Julie se relève de sa faute, purifie son âme, et la crée à nouveau : elle sort de l’église, où on la mène malgré elle, avec une volonté prête à l’effort moral. […] Sans doute, pour le croyant des anciennes églises, la question est inutile, ou dangereuse.

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