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1462. (1913) Les antinomies entre l’individu et la société « Chapitre XIII. Conclusions » pp. 271-291

Nous sentons très bien ces deux âmes opposées vivre côte à côte en nous, se mêler, se pénétrer, ruser l’une avec l’autre, se tendre des pièges, se jouer de mauvais tours. […] L’individualiste, par exemple, reste individualiste, quelle que soit son expérience des inconvénients pratiques de cette attitude morale quand on est forcé de vivre en l’état de société.

1463. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre VIII. Jésus à Capharnahum. »

Obsédé d’une idée de plus en plus impérieuse et exclusive, Jésus marchera désormais avec une sorte d’impassibilité fatale dans la voie que lui avaient tracée son étonnant génie et les circonstances extraordinaires où il vivait. […] Mais qui voudrait dire que Jésus eût été plus heureux, s’il eût vécu un plein âge d’homme, obscur en son village ?

1464. (1880) Les deux masques. Première série. I, Les antiques. Eschyle : tragédie-comédie. « Chapitre XV, l’Orestie. — les Choéphores. »

L’ancêtre ou le père continuait à vivre sous la terre, d’une existence affaiblie sans doute, mais aussi réelle et aussi distincte que celle que le soleil avait éclairée. […] » — « Ne laisse point périr en nous la race de PéIops : ainsi tu vivras, bien que tu sois mort. » — « Les enfants sauvent la renommée du père qui n’est plus, pareils au liège qui porte le rets et l’empêche de s’enfoncer dans l’abîme. » Cette fois l’Ombre est assurément réveillée ; sortie du sépulcre, elle enveloppe son vengeur ; le spectre ne fait plus qu’un avec le vivant. — Avant d’agir, Oreste veut savoir pourquoi ces libations envoyées au mort, « don misérable si fort au-dessous du crime ».

1465. (1889) Le théâtre contemporain. Émile Augier, Alexandre Dumas fils « Alexandre Dumas fils — Chapitre XI »

Généreux comme un prince, courtois comme un gentilhomme de l’ancien régime, il a vécu et il mourra dans l’impénitence finale de l’amour des femmes. […] Qui ne partagerait pourtant l’indignation de ce gentilhomme, traité par son fils en enfant mutin à qui on coupe les vivres pour le rendre sage ?

1466. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Mémoires touchant la vie et les écrits de Mme de Sévigné, par M. le baron Walckenaer. (4 vol.) » pp. 49-62

Voilà le mérite principal, l’art de vivre et de régner qui a immortalisé Hortense et sauvé son renom. Elle eut, après tout, de la justesse et de l’économie jusque dans la prodigalité de ses qualités et de ses dons ; elle ne se contenta pas d’avoir de l’esprit, elle l’aima chez les autres ; elle rechercha les lumières, chose alors nouvelle, et sut partout s’entourer d’un cercle d’hommes distingués ; elle vécut enfin et mourut comme une grande dame, tandis que la pauvre Sidonia, avec tout son esprit et ses grâces, a fini comme une aventurière.

1467. (1885) Préfaces tirées des Œuvres complètes de Victor Hugo « Préfaces des pièces de théâtre — Préface du « Roi s’amuse » (1832) »

Nous le répétons, dans le temps où nous vivons, lorsqu’un pareil acte vient vous barrer le passage et vous prendre brusquement au collet, la première impression est un profond étonnement. […] Dans quel pachalik vivons — nous ?

1468. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome I « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Bossuet, et Fénélon. » pp. 265-289

Devenue veuve à l’âge de vingt-cinq ans, ayant de la beauté, du bien, une naissance honnête, un esprit fait pour le monde, elle voulut y vivre comme dans un cloître, & s’entêta de ce qu’on appelle spiritualité. […] On peut assurer uniquement que mademoiselle Desvieux vécut toujours l’amie de l’évêque de Meaux, & qu’on respecta leur union sévère.

1469. (1912) L’art de lire « Chapitre IX. La lecture des critiques »

S’il est historien littéraire, il vous donnera tous les renseignements qui vous sont utiles, et dont quelques-uns vous sont indispensables sur le monde où vivait l’auteur, sur les hommes pour qui il a parlé, sur tout ce qui (son génie mis à part) l’a fait ce qu’il a été ; il vous introduira ainsi chez lui ; il vous fournira toutes les informations sans lesquelles vous ne comprendriez de lui à très peu près rien. […] J’ai vécu pendant quelques années dans une société d’hommes très intelligents, très lettrés, de beaucoup de goût, très décisionnaires aussi, qui parlaient sans cesse des ouvrages nouveaux.

1470. (1761) Apologie de l’étude

En effet, s’ils trouvaient aujourd’hui dans un livre, sans nom d’auteur, que les lettres ne guérissent de rien, qu’elles ne nous apprennent point à vivre, mais à disputer ; que la raison est un mauvais présent fait à l’homme ; que depuis que les savants ont paru, on ne voit plus de gens de bien ; ils ne manqueraient pas d’attribuer cette satire de l’esprit et des talents à quelque déclamateur moderne, ami des paradoxes et des sophismes ; l’antiquité, diront-ils, était trop sage pour penser de la sorte, et encore moins pour l’écrire. […] C’est elle qui nourrit et fait vivre toutes les autres parties de la littérature, depuis le bel esprit jusqu’au philosophe ; il faut l’encourager par les mêmes principes qui dans un État bien policé font encourager les cultivateurs.

1471. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre XXVI. La sœur Emmerich »

Quand on lit ces détails impossibles à inventer, tant ils, sont précis dans leur nouveauté, on ne s’imagine pas qu’on a vécu du temps de Jésus ; mais on croit qu’on y vit encore et que ce n’est pas là de l’histoire, mais de la vie revécue, comme diraient les Hégéliens. […] III En effet, quoi de plus vague et de plus incertain que le terrain sur lequel elle nous bâtit, avec cette puissance de poëte que lui envieraient les plus grands, le monde au sein duquel elle nous fait vivre, puisque je l’ai dit, ce terrain, c’est le blanc laissé par les historiens entre les lignes de l’histoire… ?

1472. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « Jules Janin » pp. 137-154

Ainsi, positivement, en maladie comme en santé, il ne vivait que par le style ou pour le style. […] Janin, l’homme de lettres qui n’avait vécu que par et pour les lettres, devait avoir l’ambition littéraire d’être de l’Académie.

1473. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « Les Nièces de Mazarin » pp. 137-156

Quand un grand homme a cessé de vivre, quand il est sorti de la phase historique qu’il a marquée de la double empreinte de son esprit et de son caractère, il laisse souvent après lui, et dans l’histoire même, quelques gouttes de son sang : — une famille, que la curiosité aime à étudier pour y retrouver les influences de sa gloire et de son génie ; car ceux qui croient le plus à la personnalité du mérite posent, malgré eux, la question de race à propos de tout, comme si c’était une fatalité ! […] Elle ressemblait un peu à cette reine Christine, avec qui elle vivait intimement à Rome : elle aussi subordonna tout à ses désirs et à ses passions ; elle franchit hardiment la dernière barrière qu’une société facile lui opposait encore.

1474. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « XV. M. Dargaud » pp. 323-339

mais nous dîmes que le livre vivait avec tous ses défauts, ses erreurs, ses troubles, ses défaillances, et que Marie Stuart était là, — et pour la première fois — ressuscitée ! […] Au xvie  siècle, si nous avions vécu, nous aurions certainement porté l’écharpe rouge des catholiques, et lui, la casaque blanche des protestants, s’il l’avait portée, s’il n’avait pas imité plutôt l’homme qu’il vénère le plus dans son histoire, ce Michel de l’Hôpital, qu’il met au-dessus de Coligny lui-même, le plus grand pourtant des protestants !

1475. (1908) Les œuvres et les hommes XXIV. Voyageurs et romanciers « Eugène Fromentin ; Maxime du Camp »

Or, c’est ce tableau, ou plutôt ce livre, que nous demanderons aujourd’hui à deux voyageurs contemporains qui viennent chacun de publier son voyage, tous deux appartenant à cette race d’écrivains préoccupés du pittoresque, qui ne vivent que pour le pittoresque, et qui vont l’un et l’autre justifier, l’un malgré des qualités souvent charmantes, et l’autre par ses défauts très réels et très persistants, ce que nous venons de dire des livres de voyages. […] Facile à vivre.

1476. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Première partie. — Chapitre VI. »

On envie Horace d’avoir pu dire : « Ils vivent encore les feux confiés à la lyre de la jeune Éolienne : … Spirat adhuc amor, Vivuntque commissi calores Æoliæ fidibus puellæ70, et de ces feux on retrouve encore quelques rayons épars dans les décombres des scoliastes. […] Son nom vivra, comme l’amour.

1477. (1874) Premiers lundis. Tome I « Mémoires de mademoiselle Bertin sur la reine Marie-Antoinette »

Que les hommes qui vivent dans une révolution, et qui en sont ou spectateurs éclairés ou acteurs principaux, lèguent à la postérité le dépôt fidèle de leurs souvenirs, c’est un devoir que nous réclamons d’eux ; que ceux mêmes qui, dans une situation secondaire, n’ont vu qu’un coin du vaste tableau et n’en ont observé que quelques scènes, nous apportent leur petit tribut de révélations, il sera encore reçu avec bienveillance ; et si surtout l’auteur nous peint l’intérieur d’une cour dans un temps où les affaires publiques n’étaient guère que des affaires privées, s’il nous montre au naturel d’augustes personnages dans cette transition cruelle de l’extrême fortune à l’extrême misère, notre curiosité avide pardonnera, agrandira les moindres détails ; impunément l’auteur nous entretiendra de lui, pourvu qu’il nous parle des autres ; à la faveur d’un mot heureux, on passera à madame Campan tous les riens de l’antichambre et du boudoir : mais que s’en vienne à nous d’un pas délibéré, force rubans et papiers à la main, mademoiselle Rose Bertin, modiste de la reine, enseigne du Trait galant, adressant ses Mémoires aux siècles à venir, la gravité du lecteur n’y tiendra pas ; et, pour mon compte, je suis tenté d’abord de demander le montant du mémoire.

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