Toutes les vérités que nous leur devons, les grandes vues fécondes et suggestives qu’il nous ont laissées, ne valent peut-être pas la leçon qu’ils nous ont donnée par l’erreur et par l’échec de leur prétention scientifique. […] Ce n’est que par cette distinction, mais en tirant toutes les conséquences qu’elle comporte (et elles vont loin), que nous pouvons donner à la vérité que nous élaborons, si relative et si provisoire, si imprécise et si incertaine, un peu de la solidité, de la loyauté au moins, du savoir scientifique. […] Nous nous sommes trop crus en droit de faire la vérité littéraire avec nos sympathies et nos antipathies, avec nos préférences et nos dogmes, avec nos désirs et nos rêves. […] L’acceptation des résultats où conduit la loyale obéissance à cette discipline forme un terrain solide de vérités acquises sur lequel ces hommes venus de tous les coins de l’horizon se rencontrent.
IV La science n’a d’ennemis que ceux qui jugent la vérité inutile et indifférente et ceux qui, tout en conservant à la vérité sa valeur transcendante, prétendent y arriver par d’autres voies que la critique et la recherche rationnelle. […] L’homme ne vivra jamais seulement de pain ; poursuivre d’une manière désintéressée la vérité, la beauté et le bien, réaliser la science, l’art et la morale, est pour lui un besoin aussi impérieux que de satisfaire sa faim et sa soif. […] Il y a une incontestable vérité dans quelques-uns des reproches que les ennemis de l’esprit moderne adressent à notre civilisation bourgeoise.
J’ai cru m’apercevoir que le phénomène de la pensée ne s’opérait pas de la même manière dans tous les hommes de cet âge, et cela me suffit, la supposition que je fais devant ensuite être remplacée par ce que je crois être la vérité, ou même par tout autre système que mes lecteurs voudraient lui substituer. […] Ceux qui, dans ce moment, professent, à cet égard, les doctrines anciennes, croient jeter dans la société une lumière nouvelle, en annonçant, comme une vérité qui va être admise, que l’homme n’a pas le pouvoir de créer sa langue. […] Ils n’ont pas fait attention qu’ils présentaient comme nouvelle une vérité très ancienne, une vérité vieillie, vieillie, qui se retirait de la société au lieu d’y entrer.
Et en vain nous répéterait-il (ce qu’il nous dit si haut dans son histoire) qu’il n’a eu en vue, quand il l’a entreprise, que la justice et la vérité. Est-ce que, pervers ou vertueux, tout ce qui a jamais écrit quatre lignes d’histoire ne s’est pas toujours réclamé de la vérité et de la justice, et la critique a-t-elle le temps ou la puissance d’écouter ces trop naïves ou trop rusées déclarations ? […] Calomnie ou vérité, est-ce que le fait éternel, implacable, ineffaçable, qui s’exprime avec un seul mot : « Clément XIV a aboli les jésuites » peut être changé ou diminué par personne ? […] L’empire de la vérité aussi.
Cette société ne manque pas de vérité, sans doute, mais c’est de petite vérité, de vérité raccourcie, et un observateur de l’acuité de M. […] Il a peut-être un superbe avenir9, mais son succès d’aujourd’hui force la Critique à plus de rigueur dans la vérité.
Tel enfin parut, dans Constantinople, un orateur, que six empereurs honorèrent successivement ; qui, panégyriste, ne parla jamais que pour dire aux princes les vérités les plus nobles ; à qui l’admiration éleva des statues, sans que l’envie même osât murmurer ; et qui, malgré ses imperfections et ses défauts, eut un caractère fort supérieur à l’esprit général de son temps ; c’est le philosophe Thémiste. […] si vous vous apercevez que je vous trompe, si le moindre mensonge se mêle à mes paroles, élevez tous votre voix contre un lâche orateur ; repoussez-moi du sanctuaire de la sagesse, et ne permettez plus à celui qui l’outrage, d’oser en donner des leçons ; mais si toutes les fois que je louerai, je dis la vérité, ne regardez pas comme une vile flatterie ce qui est un juste éloge. […] dit-il ailleurs, pardonnez-moi, si le désir que l’empereur témoigne de m’entendre, m’inspire peut-être un noble orgueil ; il se lasse d’entendre le langage de la vérité, et il permettra plutôt au guerrier de cesser de combattre, qu’au philosophe de se taire. » Dans un discours à Théodose, il rappelle le jour ou cet empereur, prêt à partir pour l’Occident, lui confia son fils en présence du sénat et du peuple. […] Toujours l’histoire jugera les peuples et les princes ; toujours la vérité éloquente et sage parlera aux hommes de leurs devoirs, et affermira les âmes nobles, en faisant rougir celles qui ne le sont pas.
Les vérités que nous venons d’établir renversent tout ce qui a été dit sur l’origine de la poésie, depuis Aristote et Platon jusqu’aux Scaliger et aux Castelvetro. […] Au milieu des nuées de ces premiers orages, à la lueur de ces éclairs, ils aperçurent cette grande vérité, que la Providence veille à la conservation du genre humain. Aussi, sous un de ses principaux aspects, la Science nouvelle est d’abord une théologie civile, une explication raisonnée de la marche suivie par la Providence ; et cette théologie commença par la sagesse vulgaire des législateurs qui fondèrent les sociétés, en prenant pour base la croyance d’un Dieu doué de providence ; elle s’acheva par la sagesse plus élevée (riposta) des philosophes qui démontrent la même vérité par des raisonnements, dans leur théologie naturelle. […] Pour l’intelligence, ce n’est qu’une puissance passive sujette à la vérité.
La vérité répugne à ces lâches pratiques. […] L’Alceste de Fabre d’Eglantine est d’une vérité frappante. […] Mais, naïf, ou emporté par la force de la vérité, Molière le dit lui-même ! […] Mais cette vérité sur le genre humain, est-il vraiment utile de la montrer et de l’étaler ? […] Je reconnais qu’il n’est pas d’une vérité moyenne et facilement vérifiable qu’un valet bâtonne son maître.
Il y a peu de ces traits qui peignent d’un mot, de ces expressions de génie qui présentent une vérité commune sous une face toute nouvelle. […] ne l’entendoit jamais sans être sensiblement frappé des vérités fortes & pathétiques qu’il lui annonçoit. […] La Religion y paroît avec ces charmes, que lui prête un cœur éloquent, pénétré de sa vérité & de sa grandeur. […] Les discours imprimés à Avignon sous le titre de Sermons nouveaux sur les vérités les plus intéressantes de la Religion, en 2. vol. […] Il faut cependant convenir que les premiers qu’il a composés, ne sont pas de la force des autres ; ils annoncent à la vérité un grand talent ; mais ils ne le montrent pas encore tel qu’il a été depuis.
Qui ne sentira la beauté de ce morceau, où le Poëte, d’après un des tableaux de l’antichambre du Cardinal de Richelieu, peint la Vérité que le Temps découvre ! D’un abîme sans fond & plein d’obscurité, Le Temps, pere des Dieux, tire la Vérité.
On y trouve l’Histoire des démêlés des Ecrivains les plus célebres, anciens & modernes ; il est assez bien écrit, & contient un grand nombre d’anecdotes singulieres, propres à le rendre amusant ; mais la vérité, la justice & le bon goût y sont presque toujours sacrifiés à M. de Voltaire, dont M. l’Abbé Iraïl a élevé un des petits neveux. […] Rousseau, l’Abbé Desfontaines, M. de Maupertuis, &c. que nous avons traités d’une maniere plus conforme à la vérité, dans le Tableau philosophique de l’Esprit de M. de Voltaire.
Tout y respire la saine critique, la fine plaisanterie ; on y admire sur-tout la justesse & la vérité des tableaux. […] Nous renvoyons les Lecteurs de bonne foi à l’Ouvrage même : ils verront combien l’Auteur est éloigné de favoriser l’autorité arbitraire & le gouvernement despotique ; ils verront avec quelle force il défend les droits des Sujets, avec quel noble courage il présente au Prince, non seulement le tableau des devoirs de la Royauté, mais une infinité de principes & de vérités propres à écarter du cœur des Souverains, l’orgueil qui cherche sans cesse à les séduire & à leur faire oublier qu’ils ne sont sur le Trône, que pour rendre leurs Peuples heureux.
Les Réflexions morales sur les Evangiles, l’Abrégé des obligations chrétiennes, ses Lettres spirituelles respirent une éloquence noble, vive & touchante, qui prend sa source dans un cœur fortement pénétré des vérités qu’il y expose. […] L’intérêt de la vérité exige que nous apprenions à ceux qui l’ignorent, que toute la part que l’Abbé de Rancé prit à ces démêlés, se réduit à deux Lettres très-courtes adressées à l’Evêque de Meaux, & publiées contre le gré de celui qui les avoit écrites.
La vérité c’est que nous sommes nécessairement injustes avec la plupart des œuvres que nous avons d’abord distinguées. […] Cela ressemble à une vérité de La Palisse. […] La vérité, c’est que pour courir les plus belles aventures, l’esprit a besoin d’un guide qui l’arrête au bord des précipices et l’empêche de s’égarer. […] Par une naturelle réaction, et devant les excès du romantisme même, il a ramené la pensée française au culte de la Vérité. […] La vérité, c’est que nous manquons encore du recul suffisant pour nous retrouver dans ce prétendu chaos.
Ainsi se marquent les grandes scènes guerrières des Souvenirs de Sébastopol et de la Guerre et la Paix, dont l’exactitude prodigieusement nouvelle, le singulier et menu relief prennent l’attention, sans que rien d’oratoire, de stylé, les recommande, sans qu’ils importent par autre chose qu’une observation, une imagination, une expression aussi proche de la vérité qu’on peut la concevoir. […] Cet ensemble de scènes, les plus importantes que nous avons citées, les moins notables qui forment la contexture même de l’œuvre, sont faites, non d’indications descriptives, de traits anecdotiques, de considérations exposées par l’auteur, en son nom personnel, mais des actes mêmes, des paroles et des manifestations de la foule des personnages dont on admire et la variété, et la vérité, et l’étonnante vie fictive. […] Que l’on écarte toute idée de mièvrerie, de sensiblerie vertueuse, d’embellissement factice de la vérité ; il n’y a là aucune de ces effusions doucereuses, de ces feints attendrissements qui rendent odieux dans la littérature française les tableaux de la vie en famille ; mais la simple vérité virile et saine, comprenant les froissements, les conflits, les ridicules, le prosaïque de l’existence à plusieurs ; mais donnant aussi sa sûreté, sa dignité, sa douceur, sa gaîté, son aspect archaïque et patriarcal. […] Cet écrivain, l’un des plus grands parmi les réalistes, perçoit et décrit le monde extérieur avec une vision originale immédiate, avec une pénétration dans ses détails et son intimité qui donnent la vérité même comme fraîchement découverte et saisie sur le fait. […] Ce problème est un objet de pensée que l’on ne tranche pas de quelques apostrophes : il appartient de le discuter à ceux qui sont fervents de vérité plus que de belles illusions, ne connaissent d’autre passion que celle d’égaler leur âme au système du monde.
Il en faut plus qu’on ne pense pour dire la vérité. […] Faut-il laisser entendre une vérité qu’on ne peut pas dire crûment ? […] Que devient entre les mains du critique cette vérité banale ? […] Ganderax n’est pas de ceux qui sacrifient la vérité à un bon mot. […] Or on peut répéter : Vérité en deçà, erreur au-delà !