Qu’il ne vienne jamais le jour où des hordes cruelles traverseraient cette vallée, où le ciel, que colore la riante pourpre du soir, refléterait les lueurs terribles de l’incendie des villes et des villages ! […] Rousseau, le soleil du soir jouer comme un crépuscule du jour éternel sur les rideaux de son lit. […] La vie se retirait peu à peu de lui comme le rayon du soir, dans la galerie du Vatican, se retire d’abord des pieds, puis du buste, puis de la tête de l’Apollon de marbre, rougi par les roses des plus hautes clartés du soleil couchant.
XVIII Quelques jours après ce jour, le soir, à l’heure où quelques rares amis, que la mort décime d’année en année, viennent causer un moment de la journée, et savoir si la sentinelle oubliée n’a pas été relevée de son poste, on annonça Adolphe Dumas et son frère. […] Un bouquet dans un vase, ou sur la cheminée, Le matin elle y fait son lit de la journée, Et le soir, jusqu’au lendemain. […] Et je disais souvent, le soir dans la campagne : Dieu, qui me savait seul, m’a donné pour compagne L’image de son Esprit-Saint !
Il rentra avec un accès de fièvre qui dura quelques heures et baissa sur le soir. […] Le soir, selon sa coutume, il but son chocolat, et le trouva bon. […] Le soir, il paraissait mieux, et ne voulut pas se mettre au lit, ne croyant pas pouvoir le supporter.
Qu’on me permette un exemple : en passant le soir auprès d’un cimetière, j’ai été poursuivi par un feu follet ; en racontant mon aventure, je m’exprimerai de la sorte : « Le soir, en passant auprès du cimetière, j’ai été poursuivi par un feu follet. » Une paysanne, au contraire, qui a perdu son frère quelques jours auparavant, et à laquelle sera arrivée la même aventure, s’exprimera ainsi : « Le soir, en passant auprès du cimetière, j’ai été poursuivie par l’âme de mon frère. » Voilà deux narrations du même fait, parfaitement véraces.
Je serai ce soir ivre mort ; Alors, sans peur et sans remord, Je me coucherai sur la terre, Et je dormirai comme un chien ! […] En automne, le bruit des bûches qu’on vient de scier et tombant sur le pavé des cours lui fait dire : Il me semble, bercé par ce choc monotone, Qu’on cloue en grande hâte un cercueil quelque part… Ce n’est pas tant, à proprement parler, l’angoisse de la mort qu’on retrouve à chaque page que l’horreur toute physique du tombeau ; et lorsque nous le voyons se complaire aux idées de décomposition, évoquer les squelettes et rêver de cadavres, nous sommes tout simplement en présence de l’enfant qui, ayant peur de l’obscurité, ouvre la porte le soir et fait quelques pas au dehors pour ressentir le grand frisson de la nuit et, qui sait ? […] Pourtant, lorsqu’il le voulait, il savait rendre douce l’ironie et demander à la nuit des inspirations moins troublées que la plupart de celles qu’il lui doit : Sois sage, ô ma Douleur, et tiens-toi plus tranquille Tu réclamais le Soir ; il descend ; le voici.
Chaque matin le vent du nord se lève pour conduire les barques d’Athènes aux Cyclades ; chaque soir le vent contraire les ramène au port. […] À Hyères, en janvier, je voyais le soleil se lever derrière une île ; la lumière croissait, emplissait l’air ; tout d’un coup, au sommet d’un roc, une flamme jaillissait ; le grand ciel de cristal élargissait sa voûte sur la plaine immense de la mer, sur les innombrables petits flots, sur le bleu puissant de l’eau uniforme où s’allongeait un ruisseau d’or ; au soir, les montagnes lointaines prenaient des teintes de mauve, de lilas, de rose-thé. […] Le soir, après le repas, chacun à son tour se levait pour dire et mimer l’élégie, et le polémarque donnait à celui qui emportait le prix un plus grand morceau de viande. […] De loin en loin on les lâche en embuscade sur les chemins, et ils tuent le soir les Ilotes attardés ; il est utile d’avoir vu le sang et de s’être fait la main d’avance. […] Le goût de la parure qui distingue le palicare et qui se montre avec tant d’innocence dans la jeune Grecque, n’est pas la pompeuse vanité du barbare, la sotte prétention de la bourgeoise, bouffie de son ridicule orgueil de parvenue ; c’est le sentiment pur et fin de naïfs jouvenceaux, se sentant fils légitimes de vrais inventeurs de la beauté. » (Saint-Paul, par Ernest Renan, p. 202.) — Un de mes amis, qui a longtemps voyagé en Grèce, me raconte que souvent les conducteurs de chevaux et les guides cueillent une belle plante, la portent délicatement à la main toute la journée, la posent à l’abri le soir au moment de la couchée et la reprennent le lendemain pour s’en délecter encore.
… je t’enverrai prochainement un livre, appelle-le comme tu voudras, des prières ou un trésor, pour te rappeler matin et soir les bons souvenirs de l’amitié et de l’amour. » Que ce soit à Lotte qu’il parle ainsi et qu’il semble adresser particulièrement son livre, on le conçoit : il espère plus d’indulgence et de grâce auprès d’elle qu’auprès de Kestner. […] [NdA] On se rappelle le bel endroit de René : « Quand le soir était venu, reprenant le chemin de ma retraite, je m’arrêtais sur les ponts pour voir se coucher le soleil… » Dans le tableau naturel que nous trace Goethe, on remarquera, comme différence fondamentale avec Chateaubriand, le sentiment cordial et domestique, la joie d’enfants à cette veillée de Noël.
On les ramena le soir tous les deux à leur mère inquiète, qui ne savait ce qu’ils étaient devenus. […] mais non ; le silence, le retirement du cloître. — 30 au soir. » Ces jeunes âmes déjà mûres, aux heures où la vie leur échappe, ont souvent ainsi de ces révoltes concentrées et profondes, de ces rancunes dernières contre la destinée, de ces regrets ineffables de ce qu’on a connu trop peu et qu’on ne peut plus ressaisir.
On peut, quand on est de l’Académie, la contredire, la blâmer même au dehors, mais les conversations intérieures restent des conversations : on en parle le soir dans un salon, on les répète tout au plus entre amis ; mais l’écho n’en arrive jamais au public que très vague ou très altéré. […] Il fit plus, il arriva d’Orléans la veille au soir de l’élection, et, le matin même du jeudi, il rendit visite à quelques-uns des membres sur qui il a prise.
Ayant un soir, en effet, poussé Santeul de vin de Champagne, il trouva plaisant de verser sa tabatière de tabac d’Espagne dans un grand verre de vin et le lui offrit à boire ; le pauvre Théodas si naïf, si ingénu, si bon convive et plein de verve et de bons mots, mourut dans d’affreux vomissements140. […] Tienne qui voudra contre de si grandes extrémités, je me jette et me réfugie dans la médiocrité. » Les simples bourgeois viennent là bien à propos pour endosser le reproche, mais je ne répondrais pas que la pensée ne fût écrite un soir en rentrant d’un de ces soupers de demi-dieux, où M. le Duc poussait de Champagne Santeul142.
En effet, si maintenant je retourne en arrière jusqu’à mon arrivée à l’auberge, je revois le vieux chêne à vingt pas de la maison, deux ou trois troncs abattus et une douzaine de polissons qui vaguent ou dorment sous la tiédeur du soleil du soir ; ainsi, en évoquant le point de jonction, c’est-à-dire le commencement de l’image, j’ai fourni à l’image le moyen de renaître tout entière. — C’est qu’à vrai dire il n’y a pas de sensation isolée et séparée ; une sensation est un état qui commence en continuant les précédents et finit en se perdant dans les suivants ; c’est par une coupure arbitraire et pour la commodité du langage que nous la mettons ainsi à part ; son commencement est la terminaison d’une autre, et sa terminaison le commencement d’une autre. […] Il en est de même d’un monument, d’une rue, d’un paysage, aperçus plusieurs fois, à différentes heures de la journée, au soir, au matin, par un temps gris, par la pluie, sous un beau soleil, si on les compare au même monument, au même paysage, à la même rue regardés pendant trois minutes, puis remplacés aussitôt par des objets tout différents.
On sent que l’homme mûri et désenchanté se promène le soir pour se donner les consolations et les diversions de la vie active qui lui était refusée. […] « Je montais un soir la colline du couvent de Saint-Nicolas, dans l’île de Prinkico, lisant, apprenant ou commentant l’Odyssée, mon livre favori ; et, suivant une coutume de ma jeunesse qui m’est restée, m’arrêtant à chaque vers comme à chaque détour du sentier, pour cueillir les glaïeuls, les asphodèles et les premières églantines.
Nous faisons tous les soirs des courses dans le voisinage. […] Une autre pratique encore extrêmement nécessaire dans la situation où vous vous trouvez, c’est de penser chaque soir, surtout dans les premiers temps, à ce que vous aurez à faire le jour suivant, afin qu’il ne vous survienne aucune chose imprévue.
Cependant il passait ses vacances, et, lorsqu’il eût échappé aux collèges, il fit un long séjour au triste château de Combourg ; le paysage avec ses forêts, ses landes, ses marais, était âpre et désolé ; le château était une autre solitude, plus écrasante : le soir, après avoir couru dans la campagne sauvage, le chevalier écoutait passer les heures, dans la vaste salle à peine éclairée, que son père parcourait en silence d’un pas invariable : puis il allait coucher dans une tourelle isolée, tout seul, face à face avec les terreurs de la nuit. […] Je ne puis que rappeler ici les canards sauvages, le cou tendu et l’aile sifflante, s’abattant tout d’un coup sur quelque étang, lorsque la vapeur du soir enveloppe la vallée — le jour bleuâtre et velouté de la lune descendant dans les intervalles des arbres, et ce gémissement de la hulotte qui avec la chute de quelques feuilles ou le passage d’un veut subit remplit seul le silence nocturne— les premiers reflets du jour glaçant de rose les ailes noires et lustrées des corbeaux de l’Acropole — ces Arabes accroupis autour d’un l’eu dont les reflets colorent leurs visages, tandis que quelques têtes de chameaux s’avançaient au-dessus de la troupe et se dessinaient dans l’ombre 664.
C’est à l’imitation étrangère qu’appartiennent ces désespoirs, ces alternatives de feu et de glace, ces cœurs Meurdris, couverts de sang, percés de toutes parts, Au milieu d’un grand feu qu’allument des regards ; ces vies « ravies par des yeux foudroyants, ces yeux « où le beau soleil tous les soirs se retire » ; ces plaies incurables, et tout ce détail du martyre amoureux : … les angoisses mortelles, Les diverses fureurs, les peurs continuelles Les injustes rigueurs, les courroux véhéments, Les rapports envieux, les mécontentements etc. […] Les plans de campagne se faisaient dans cette petite chambre à six ou sept chaises dont parlent les biographes, où Malherbe s’entretenait tous les soirs avec ses jeunes amis, Maynard entre autres et Racan, qui devaient laisser quelques vers dignes du maître.
III HYMEN La Musique : « Tu parleras, mourant, quand mon soir nuptial T’étonnera de Toi, ne parle pas : mon geste N’est pas d’amour et, vois, ô Drame ! […] Ta virilité sûre un soir d’épithalame : Lui, c’est l’homme, sois tout le Combat !