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264. (1862) Les œuvres et les hommes. Les poètes (première série). III « M. de Gères. Le Roitelet, verselets. »

De secrets avertissements, L’intérieure inquiétude, Quelques symptômes alarmants, Changent bientôt en certitude Les sinistres pressentiments. […] Son secret mourait à sa bouche… Avant d’à jamais t’assoupir, Douleur déjà vieille et finie, Que de maux il fallut subir !

265. (1888) Portraits de maîtres

De même ici plus encore que dans les Méditations la nature a révélé son secret au poète des Harmonies. […] Le déluge, Éloa, Moïse encore, venaient enseigner le secret des narrations parfaites dans le genre héroïque, secret qui réside en grande partie dans la science de la composition et que de notre temps ont si bien retrouvé dans un autre ordre de sujets des poètes habiles autant que sympathiques, François Coppée, Armand Renaud, Eugène Manuel. […] L’âme des choses y vit sereine ou frémissante ; le secret des bois dont parle Tacite et le mystère des cimes y passent tout entiers. […] À l’âge où l’on est encore un enfant, la mythologie, l’histoire des anciens n’avaient plus de secrets pour lui. […] Ce livre contient le secret de l’éducation salubre et vivifiante.

266. (1914) Une année de critique

Pour que ce secret ne fût pas plus longtemps révélé, ils l’ont écrasé sous la pierre d’un tombeau. […] Mais voilà justement l’un des moyens les plus familiers à Jules Renard et l’un des secrets de son ironie. […] Nous voici bien près de saisir le secret de M.  […] Au contraire, — et voici ton secret, prestigieux compagnon — c’est que tous les gestes te laissent indifférent. […] Ce met seul nous livre le secret des antinomies de sa pensée.

267. (1887) George Sand

Ce ne fut que par accident que revinrent plus tard des accès de cette exaltation douloureuse qui avait fait jusque-là son secret supplice et, ce qui est plus dangereux, sa secrète et chère volupté. […] Certes il y a de nobles passions qui grandissent l’âme, et, comme la raison humaine cherche l’idéal divin dans tout ce qui est grand et beau, on peut croire parfois, en sentant l’homme meilleur, à une secrète intervention de Dieu dans ces sentiments privilégiés. […] L’idéalité sensuelle, voilà le vice secret de presque tous les amours dans Mme Sand. […] Personne surtout n’a su comme elle saisir, exprimer cette âme intérieure, cette âme secrète des choses qui répand sur la face mystérieuse de la nature le charme de la vie. […] Et tout cela elle l’a livré au public, comme attirée par un charme secret et le répandant à son tour.

268. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Les poëtes français. Recueil des chefs-d’œuvre de la poésie française »

Vous toutes qui savez tout ce dont se composent les mille et un secret d’une toilette éblouissante et réparatrice, écoutez : Art sublime d’un nœud, d’une tresse ou d’un pli, Corsages à la fois voluptueux et chastes, Toilettes d’un matin à défier l’oubli, Étoffes dont le goût assortit les contrastes Où tempère l’éclat, à dessein affaibli ; Adorables chiffons, terribles bagatelles, D’inévitables traits arsenal chatoyant, Gazes, crêpe, rubans, guipures et dentelles. […] Si Arvers a beaucoup péché, il lui sera beaucoup pardonné pour ce sonnet-là : Mon âme a son secret, ma vie a son mystère, Un amour éternel en un moment conçu : Le mal est sans espoir, aussi j’ai dû le taire, Et celle qui l’a fait n’en a jamais rien su Hélas !

269. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « George Sand — George Sand, Lélia (1833) »

Aujourd’hui donc, de toutes parts, les femmes écrivent ; chacune a son secret, son roman douloureux à l’appui du plaidoyer d’émancipation, et chacune le livre. […] Les jours où je me sentais agitée au point de ne pouvoir plus reconnaître la ligne de démarcation imaginaire tracée autour de ma prison, je l’établissais par des signes visibles ; j’arrachais aux murailles décrépites les longs rameaux de lierre et de clématite dont elles étaient rongées, et je les couchais sur le sol aux endroits que je m’étais interdit de franchir : alors, rassurée sur la crainte de manquer à mon serment, je me sentais enfermée dans mon enceinte avec autant de rigueur que je l’aurais été dans une bastille. » J’indiquerai encore dans le début toute cette promenade poétique du jeune Sténio sur la montagne, la description si animée de l’eau et de ses aspects changeants, et, au sein de la nature vivement peinte, les secrets surpris au cœur : « Couché sur l’herbe fraîche et luisante qui croît aux marges des courants, le poëte oubliait, à contempler la lune et à écouter l’eau, les heures qu’il aurait pu passer avec Lélia : car à cet âge tout est bonheur dans l’amour, même l’absence. » On pourrait, chemin faisant, noter dans Léliaune foule de ces douces et fines révélations, dont l’effet disparaît trop dans l’orage de l’ensemble. 

270. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « en tête de quelque bulletin littéraire .  » pp. 525-535

Le critique a besoin de n’être pas isolé, de n’être pas seul à sa table, plume en main, au premier carrefour venu ; il a besoin d’être dans un ordre de doctrines, au sein d’un groupe uni et sympathique qui le couvre, dans lequel il puise à tout instant la confirmation ou la rectification de ses jugements ; car souvent il ne fait autre chose pour les sentences qu’il rend qu’aller autour de lui au scrutin secret, en dépouillant toutefois les votes avec épuration et intelligence. […] Les poésies, les romans sont arrivés à un tel degré d’individualité, comme on dit, à un tel déshabillé de soi-même et des autres ; — le style, à force d’être tout l’homme, est tellement devenu non plus l’âme, mais le tempérament même, — qu’il est à peu près impossible de faire de la critique vive et vraie sans faire une opération inévitablement personnelle, sans faire presque de la physiologie à nu sur l’auteur et parfois de la chirurgie secrète ; ce qui frise à tout moment l’offensant.

271. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Virgile et Constantin le Grand par M. J.-P. Rossignol. »

Rossignol, les caractères généraux de la poésie pastorale ; on a déterminé avec assez de précision quels devaient être le lieu de la scène, le rôle des acteurs, le ton du discours, les qualités du style ; mais l’organisation intérieure, le mécanisme secret, la structure savante et ingénieuse de cette poésie, ont été jusqu’ici peu étudiés. […] Ceux qui seraient tentés d’accueillir avec sourire ce genre de recherches intimes, poursuivies par un homme de goût, peuvent être de bons et d’excellents esprits, mais ils ne sont pas entrés fort avant dans le secret du langage antique, et nous les renverrions pour se convaincre, s’ils en avaient le temps, à Denys d’Halicarnasse et aux traités de rhétorique de Cicéron.

272. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Pensées »

Le vrai, c’est le secret de quelques-uns. […] XXV De même qu’un arbre pousse inévitablement du côté d’où lui vient la lumière et développe ses branches dans ce sens, de même l’homme, qui a l’illusion de se croire libre, pousse et se porte du côté où il sent que sa faculté secrète peut trouver jour à se développer.

273. (1875) Premiers lundis. Tome III « L’Ouvrier littéraire : Extrait des Papiers et Correspondance de la famille impériale »

Le gouvernement de l’empereur10 n’est pas de ceux qui craignent d’avoir affaire à la démocratie, sous quelque forme qu’elle se présente, parce que ce gouvernement a la puissance et le secret de l’élever et de l’organiser. […] Ce qu’il a dû éprouver (et je n’en excepte aucun) de rebuts, d’ennuis, de mortifications d’amour-propre, de piqûres à découvert ou d’affronts secrets, il le sait plus qu’il ne le dit, car c’est un gueux fier.

274. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome I « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Abailard, et saint Bernard. » pp. 79-94

Nous déclarons aussi tous les sectateurs & défenseurs de ses opinions, excommuniés. » La lettre du pape étoit accompagnée d’un ordre secret, aux mêmes archevêques, de faire enfermer Abailard. […] A peine eut-il fermé les yeux à la lumière, que le premier soin du zélé confident de tous ses secrets fut de ménager à la tendre Héloïse le coup qu’elle alloit ressentir.

275. (1905) Les œuvres et les hommes. De l’histoire. XX. « La Révolution d’Angleterre »

Car il se fait aussi de l’Histoire dans le secret de notre cœur, et nous avons toute une société de sentiments, rude à gouverner, dans nos poitrines ! […] Nous devons donc le croire, l’illustre historien s’est dit que des biographies n’étaient, en somme, ni moins importantes, ni moins nécessaires, que le récit des événements avec leur développement grandiose, et que là surtout, au contraire, était l’interprétation la plus intime de ces événements, le secret de l’humaine et divine comédie.

276. (1888) Les œuvres et les hommes. Les Historiens. X. « Le docteur Revelière » pp. 381-394

En Europe, les Royautés sont ajustées par tous les revolvers des sociétés secrètes. […] … Les badauds de philosophie et de civilisation, qui expliquent tout avec le mouvement général de la pensée et les évolutions progressives de l’esprit humain, affectaient de ne pas croire à l’importance des sociétés secrètes.

277. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « Silvio Pellico »

Au lieu de cette conduite sage et chrétienne, je croyais que l’on pouvait professer ouvertement l’opposition, et j’avais la folie de voir sous un aspect avantageux les sociétés secrètes qui pullulaient en Italie. » Voilà, à toute page de la Correspondance, le langage de Silvio Pellico. […] Nous avons voulu dire d’un homme dont toute la supériorité est dans l’âme, et pour lequel nous avons une affection qu’il nous fallait cacher à cause de ceux qui étalaient la leur pour lui avec un intérêt perfide : maintenant que Silvio Pellico n’est plus qu’un chrétien qui baise sa croix et que renient les sociétés secrètes, nous pouvons tout haut l’admirer !

278. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « VI. Jules Simon »

Taine est le cornac sonore, appliqué au Panthéisme ce dernier coup de pied qui fait mourir deux fois les lions mourants… Quelle raison secrète a donc dicté la réclame de M.  […] Jules Simon n’est pas, comme on pourrait le croire, un ignorant en christianisme ; et malgré la simplicité, chère aux esprits vulgaires, de sa religion naturelle dont il nous donne les preuves humaines, psychologiques, individuelles et par conséquent peu obligatoires, ce qu’il y a d’illusionnant et de dangereux dans cette religion, à portée de toutes les faiblesses, c’est encore ce que le christianisme, dont l’action nous pénètre comme la lumière, y a versé d’influence secrète et démentie !

279. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XXVII. Silvio Pellico »

Au lieu de cette conduite sage et chrétienne, je croyais que l’on pouvait professer ouvertement l’opposition, et j’avais la folie de voir sous un aspect avantageux les sociétés secrètes qui pullulaient en Italie. » Voilà à toute page de la correspondance le langage de Silvio Pellico. […] Nous avons voulu dire d’un homme dont toute la supériorité est dans l’âme, et pour lequel nous avons une affection qu’il nous fallait cacher à cause de ceux qui étalaient la leur pour lui, avec un intérêt perfide : Maintenant que Silvio Pellico n’est plus qu’un chrétien qui baise sa croix et que renient les sociétés secrètes, nous pouvons tout haut l’admirer !

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