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352. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre X. La commedia dell’arte en France pendant la jeunesse de Molière » pp. 160-190

Car, quoiqu’il semble que votre juridiction ne s’étende pas plus loin que la comédie et que les théâtres, je ne pense pas que les savants s’en puissent affranchir, puisque leur profession, aussi bien que toutes les autres que nous voyons, n’est qu’une comédie, et que toute retendue du monde n’est qu’un vaste théâtre où chacun joue son différent rôle. Regardez donc favorablement, ô très ridicule héros, ce combat scolastique, et, par vos effroyables grimaces, défendez-moi de celles de nos trop critiques savants. […] Aux plus savants docteurs je sais faire la loi, Ma grimace vaut mieux que tout leur préambule ; Scaramouche, en effet, n’est pas si ridicule Ni si Scaramouche que moi.

353. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Pensées de Pascal. Édition nouvelle avec notes et commentaires, par M. E. Havet. » pp. 523-539

Havet, vient de publier à son tour, en l’environnant de tous les secours nécessaires, explications, rapprochements, commentaires ; il a donné une édition savante, et vraiment classique dans le meilleur sens du mot. […] Le savant et modéré d’Aguesseau, dans un plan qu’il propose d’un ouvrage à faire d’après les Pensées, a pu dire : Si l’on entreprenait de mettre en œuvre les Pensées de M.  […] Havet, m’a traité avec tant d’indulgence en une page de son introduction, que j’ai quelque embarras, en finissant, à venir le louer à mon tour ; il me paraît, toutefois, s’être proposée et avoir atteint le but principal que j’indique, et son édition savante est un service rendu à tous.

354. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Saint Anselme, par M. de Rémusat. » pp. 362-377

Il était difficile de ne pas dire un mot tout d’abord de ce qu’on a sur le cœur : mais venons vite au savant et pacifique ouvrage auquel M. de Rémusat s’est consacré tout entier, sans sortir de son sujet un seul moment. […] Il portera au milieu du siècle quelque chose du savant et du solitaire. […] Il y a un beau mot de l’abbé Sieyès qui dit que « nos langues sont plus savantes que nos idées », c’est-à-dire qu’elles font croire par quantité d’expressions à des idées qu’on n’a pas, et sur lesquelles s’épuisent ensuite de grands et profonds raisonneurs.

355. (1782) Plan d’une université pour le gouvernement de Russie ou d’une éducation publique dans toutes les sciences « Plan d’une université, pour, le gouvernement de Russie, ou, d’une éducation publique dans toutes les sciences — Essai, sur, les études en Russie » pp. 419-428

Les lettrés disent que cela est cause que tout cultivateur un peu à son aise, au lieu de laisser à son fils sa charrue, veut en faire un savant, un théologien, ou tout au moins un maître d’école. […] On reste dans ces écoles illustres jusqu’à douze années en Allemagne, après quoi on va passer quatre années dans quelque université, et puis on est savant. […] C’est-à-dire que le grand nombre des nations savantes et policées obligea les hommes éclairés de chaque nation d’étudier une multitude si prodigieuse de langues nécessaires à la circulation des connaissances acquises, que leur tête en péta.

356. (1895) De l’idée de loi naturelle dans la science et la philosophie contemporaines pp. 5-143

Cette théorie très séduisante a été soutenue, on le voit, par des savants de premier ordre. […] On lui reproche de trop porter le savant à raisonner déductivement, et aussi d’être trop métaphysique. […] Comme le montre le savant et profond ouvrage de M.  […] Telle fut l’hypothèse de Boscovich, reprise par des savants comme Ampère, Cauchy, Carnot. […] Pourtant les savants s’y trouvent amenés comme les autres hommes.

357. (1866) Petite comédie de la critique littéraire, ou Molière selon trois écoles philosophiques « Première partie. — L’école dogmatique — Chapitre premier. — Une leçon sur la comédie. Essai d’un élève de William Schlegel » pp. 25-96

Une comédie d’Aristophane n’est pas une dissertation morale dialoguée, ni une étude de psychologie, ni le roman dramatique d’une intrigue nouée et dénouée avec un art savant. […] Tel est celui des Femmes savantes dans Molière. […] Parce que je cite Les Femmes savantes, à titre d’exemple, je ne voudrais pas que personne, parmi mes auditeurs, pût s’imaginer que j’approuve Molière en aucune façon d’avoir écrit cette comédie. […] » lorsqu’il propose comme « accommodement » à Henriette que son amoureux épouse Armande, afin qu’elle-même puisse épouser Trissotin83, il me console un peu des grossièretés de sa trop fameuse tirade contre la science et contre les savants. […] Les Femmes savantes, acte V, scène ii.

358. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre IV. La fin de l’âge classique — Chapitre I. Querelle des Anciens et des Modernes »

Un abbé, à qui Perrault attribue du génie, et qui le représente lui-même, défend les modernes contre un Président qu’il donne pour savant et idolâtre des anciens, et qu’il fait imbécile : l’abbé est soutenu d’un chevalier, sot à boutades, à qui l’auteur confie le soin de lancer les énormités paradoxales qu’il veut insinuer, et n’ose pourtant avancer sérieusement. […] Charles, premier commis de la surintendance des bâtiments du roi, de l’Académie française depuis 1670, de l’Académie des belles-lettres depuis la fondation, eut une grande part dans les mesures de protection et d’encouragement que prit Colbert en faveur des sciences et des savants.

359. (1895) Histoire de la littérature française « Cinquième partie. Le dix-huitième siècle — Livre V. Indices et germes d’un art nouveau — Chapitre I. Bernardin de Saint-Pierre »

Le malheur, c’est que le pauvre homme veut expliquer la nature sans être savant, et en se passant de la science. […] Pour lui, athées, riches, savants, ces trois termes se tiennent ; et c’est l’égoïsme des privilégiés qui a inventé les idées impies de force centripète on centrifuge.

360. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre XII. Lo Ipocrito et Le Tartuffe » pp. 209-224

Vous êtes savant, très savant.

361. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XI » pp. 89-99

Les savants y trouvaient ce goût exquis et délicat qui fait le prix de la science et sans lequel elle n’offre rien que de rebutant. […] « Souvenez-vous, dit-il, de ces cabinets qu’on regarde encore avec tant de vénération, où la vertu était révérée sous le nom de l’incomparable Arthénice, où se rendaient tant de personnes de qualité et de mérite, qui composaient une cour choisie, nombreuse, sans confusion, modeste sans contrainte, savante sans orgueil, polie sans affectation. » La causticité du duc de Saint-Simon ne l’a pas empêché de rendre justice à la maison de Rambouillet.

362. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « Taine »

Pour être savant, on n’en est pas moins amusant et intéressant quand on a de l’esprit, et voilà ce que Taine n’a plus. […] Il nie l’activité spirituelle ; il n’y a pas d’esprit dans ce livre, qui est d’un homme autrefois d’esprit, mais qui, en se faisant savant dans les sciences matérielles, a donné sa démission d’homme d’esprit.

363. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « Louis Wihl »

C’est un savant. Il a déjà publié quelque chose d’infiniment remarqué sur les Origines phéniciennes, et, pour achever ce travail d’une érudition transcendante, il faudrait qu’il fût mieux assis que sur l’escabeau que l’Université de France lui a aumôné, croyant n’avoir affaire ni à un fort savant ni à un grand poète.

364. (1866) Petite comédie de la critique littéraire, ou Molière selon trois écoles philosophiques « Troisième partie. — L’école historique » pp. 253-354

Il doit voyager et faire son tour du monde, non pas en rêve, comme un poète, ni même dans sa bibliothèque, comme un savant, mais en réalité, par le bateau à vapeur et par le chemin de fer. […] Aux yeux du savant véritable, tout est bien, parce que tout est naturel. […] Ce ton est sans proportion avec le petit travers des femmes savantes, si exceptionnel, si peu redoutable. […] Les Femmes savantes, III, ii. […] Les Femmes savantes, acte IV, scène ii.

365. (1888) Poètes et romanciers

Virgile et Horace ignorent ces savants artifices. […] C’est là sa doctrine ; elle n’est ni très compliquée ni très savante. […] Nul n’est digne du nom de savant s’il ne sent ce qu’il y a d’inachevé dans son œuvre. Et en cela le savant ressemble à l’artiste ; il n’y a de grand artiste que celui qui cherche toujours au-delà. […] Avec son imagination savante, quels riches tableaux il aurait pu tracer !

366. (1910) Études littéraires : dix-huitième siècle

Un savant même est bien forcé d’être à peu près à la mode. […] Pour ce qui est des savants, il me semble bien qu’il n’y est pas. […] C’est un délicieux causeur, savant, intelligent, spirituel, un peu cancanier et un peu bavard. […] Il n’était pas plus lettré, de vocation, que savant. […] Au xvie  siècle les savants voyageaient beaucoup, mais surtout pour courir à la recherche de manuscrits précieux et de savants.

367. (1895) Nos maîtres : études et portraits littéraires pp. -360

J’admire cette musique, — grandement savante déjà et combien superbe !  […] Mais les savants compositeurs scolastiques ne furent point, comme les Grecs, des esprits positifs et raisonnables. […] Tous les moyens de la plus savante musique employés à recréer, suivant leurs nuances profondes, ces cinq émotions. […] Il appelle la civilisation « une barbarie savante ». […] Pareillement, les savants d’Europe tiennent pour impossible à jamais l’élévation spontanée d’un corps, l’apparition d’un esprit ; et les savants de l’Inde, leurs confrères, tiennent pour éternellement possibles et naturelles, en certains cas, ces mêmes manières d’agir.

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