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325. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Santeul ou de la poésie latine sous Louis XIV, par M. Montalant-Bougleux, 1 vol. in-12. Paris, 1855. — I » pp. 20-38

Mais il faut raconter tout cela par ordre et avec méthode, et mettre chacun à même de bien juger de l’état au moins de la question. […] Tu m’as donné des chants pour te célébrere ; donne-moi les prières, donne-moi les larmes par où je puisse laver les taches de ma vie antérieure, poète trop peu chrétien ; et que tu n’aies point à me percer un jour de cette parole de David, qui est comme un javelot : « Pourquoi racontes-tu mes justices et prends-tu mon testament à travers tes lèvres ?  […] On raconte que, lorsque ses hymnes eurent été adoptées dans les bréviaires et qu’elles se chantèrent dans les offices, il ne se tint pas de joie ; il courait les églises où on les chantait ; il grondait ceux près de qui il était placé lorsque leur ton n’était pas à son gré, et quand le chant lui paraissait convenir à la beauté des paroles, il sautait et grimaçait tellement qu’il lui fallait sortir, de peur d’esclandre.

326. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Mémoires de Mme Elliot sur la Révolution française, traduits de l’anglais par M. le comte de Baillon » pp. 190-206

On n’a pas à craindre cet inconvénient avec Mme Elliott ; M. de Bâillon s’est borné à la traduire, et il l’a fait en homme d’esprit sans doute et en homme de goût, mais en la laissant d’autant plus elle-même, d’autant plus naturelle, tellement que ce livre a l’air d’avoir été écrit et raconté sous sa forme originale en français. […] Mme Elliott, malade des émotions de ces journées, ne put retourner savoir le résultat de la démarche ; mais le duc vint lui-même chez elle le lui apprendre, et lui raconta de quelle manière il avait été reçu ; comment, arrivé à temps pour le lever du roi et s’y étant rendu, ayant même présenté au roi la chemise selon son privilège de premier prince du sang, et ayant profité de ce moment pour dire qu’il venait prendre les ordres de Sa Majesté, Louis XVI lui avait répondu rudement : « Je n’ai rien à vous dire, retournez d’où vous êtes venu. » Le duc paraissait ulcéré ; cette dernière injure, venant après tant d’autres affronts, avait achevé de l’aliéner. […] Le trône écroulé, le roi arrêté et mis en jugement, lui, prince du sang, il se figurait qu’il allait continuer de vivre à Paris à son aise, dans les plaisirs et en riche citoyen ; et son amie Mme de Buffon, femme gracieuse, qui montra plus tard bien du dévouement, écrivait au duc de Biron (un autre intime), alors à la tête de l’armée du Rhin, une lettre curieuse, incroyable34, où elle lui racontait à sa manière et sur un ton badin, les événements du 10 août, les arrestations qui en étaient la suite, les exécutions qui devaient commencer le lendemain au Carrousel : Au milieu de ces arrestations, disait-elle, Paris est calme pour ceux qui ne tripotent point. — J’oubliais de vous dire que Mme d’Ossun est à l’Abbaye.

327. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « Térence. Son théâtre complet traduit par M. le marquis du Belloy (suite et fin.) »

La scène touchante de l’Andrienne, qui est en récit dans l’exposition, cette espèce de déclaration publique involontaire de l’amour de la jeune fille éplorée, de Glycère pour Pamphile, aux funérailles de Chrysis, ne saurait se séparer de cette autre scène racontée par Pamphile lui-même à la fin du premier acte. […] Et voilà trois mois de cette fuite. — Chrémès, après avoir tout entendu : « Il y a de votre faute à tous deux, dit-il, bien que ce coup de tête annonce pourtant une nature sensible à l’honneur, et à qui certes le cœur ne manque pas. » — Ménédème a raconté ce qui lui était le plus pénible ; c’est alors que le malheureux père, en apprenant le départ de son fils et se voyant seul, a tout quitté et vendu de désespoir ; il a fait maison nette et s’en est venu se confiner dans ce champ pour s’y mortifier et s’y punir. […] comme il se jette sur le premier ami qu’il rencontre pour lui tout raconter !

328. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Mémoires de Malouet »

Une anecdote, racontée dans le Voyage à la Guyane, soulève une petite question littéraire. […] Les voyages de Malouet, même avant d’être publiés, étaient connus ; il les racontait volontiers. […] Cette histoire de Malouet, racontée par lui-même à M. 

329. (1895) Histoire de la littérature française « Cinquième partie. Le dix-huitième siècle — Livre II. Les formes d’art — Chapitre IV. Le roman »

Le goût des— lecteurs y poussait : les médiocres romans historiques que donnent les imitatrices de Mme de la Fayette497, les méchants mémoires apocryphes que fabrique Sandras de Courtilz498, plaisent par l’apparence vraie, par la prétention d’être vrais, par la conformité des faits qu’ils racontent avec les faits communs de la vie réelle, et même avec les faits particuliers de l’histoire. […] Chaque personnage raconte son histoire à un moment ou à l’autre ; et il y a bien des aventures où Gil Blas n’est jeté que pour donner occasion à quelqu’un de paraître et de narrer sa vie. […] Inutile de raconter la vie décousue, inquiète, désordonnée de l’écrivain.

330. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Histoire de la Restauration, par M. de Lamartine. (Les deux premiers volumes. — Pagnerre.) » pp. 389-408

Lubis dans le sens royaliste, ont raconté avant M. de Lamartine ces grands événements ; et il est curieux de voir comme celui-ci, qui le reconnaît du reste hautement, profite de tous deux, les unit, les entrelace, les combine en les traduisant dans sa langue et en les recouvrant de sa couleur. […] Sainte-Beuve sur son Histoire de la Restauration, M. de Lamartine raconte, dit-on, dans sa réponse, que, le 16 avril, « sa journée et non celle du général Changarnier », il fut rencontré par M.  […]  » Si M. de Lamartine raconte cela, il a une de ces illusions et de ces exagérations de souvenir qui lui sont familières : car il est impossible que je lui aie dit une telle chose, n’ayant jamais l’habitude de mêler ainsi le nom de Napoléon à tout et de le prendre pour mesure de mon admiration : ce serait la première fois que j’aurais usé de ce langage.

331. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Le surintendant Fouquet. (Article Fouquet, dans l’Histoire de Colbert, par M. P. Clément.) 1846. » pp. 294-312

Un des hommes les moins scrupuleux et les plus entendus de ce temps-là, Gourville, raconte dans ses Mémoires très sincères comment il fit la connaissance de Fouquet, qui le goûta et l’employa à plus d’une sorte de négociations. […] Gourville raconte l’état de désordre où était dans ce temps (1657) l’administration des finances ; la place était remplie de billets décriés qui provenaient de la banqueroute qu’avait faite quelques armées auparavant le maréchal de La Meilleraye (alors surintendant) ; on achetait ces anciens billets pour rien, et, en faisant des affaires avec le roi, on obtenait de Fouquet, comme condition, qu’il réassignât ces billets pour les sommes entières : « Cela fit beaucoup de personnes extrêmement riches, dit Gourville ; cependant, parmi ce grand désordre, le roi ne manquait point d’argent, et, ayant tous ces exemples devant moi, j’en profitai beaucoup. » Le roi ne manquait point d’argent, là est un point essentiel dont Pellisson s’est ensuite servi très habilement dans les Défenses qu’il a données de Fouquet. […] On a mainte fois raconté cette fameuse fête donnée à Vaux par Fouquet à Louis XIV le 17 août 1661, et durant laquelle le roi avait résolu d’abord de le faire arrêter, comme si le scandale d’une telle opulence devait étouffer tout respect de l’hospitalité.

332. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « La reine Marguerite. Ses mémoires et ses lettres. » pp. 182-200

Elle nous raconte quelques traits d’elle et de ses reparties d’enfant, qui annoncent un esprit précoce. […] Elle a raconté avec beaucoup de naïveté, et d’un ton simple, les scènes de cette nuit d’horreur, qu’elle ignora jusqu’au dernier instant. […] Sa vie bien déduite et bien racontée ferait la matière d’un plein et intéressant volume.

333. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Les Faux Démétrius. Épisode de l’histoire de Russie, par M. Mérimée » pp. 371-388

Tacite nous a raconté l’histoire des faux Agrippa, des faux Drusus, des faux Néron ; il y eut de ceux-ci en quantité surtout. […] Mérimée dans l’étude si creusée de son brigand et de sa bohémienne, c’est que l’auteur, en homme d’esprit qui sait son monde, a jugé convenable d’encadrer son roman dans une sorte de plaisanterie et d’ironie : il voyageait comme antiquaire, il ne voulait que résoudre un problème d’archéologie et de géographie sur la bataille de Munda livrée par César aux fils de Pompée, lorsqu’il fait la connaissance du bandit qui lui racontera ensuite son histoire : et le roman finit par un petit chapitre où l’antiquaire reparaît encore et où le philologue se joue au sujet de la langue des bohémiens. […] Lui, il ne procède point de la sorte ; il s’interdit ces analyses de cœur faites au nom de celui qui raconte ; il n’a jamais de ces petits couplets rêveurs ou mélancoliques.

334. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « La Fontaine. » pp. 518-536

Toutes les fois qu’il a eu à parler des maîtres de la terre et du Lion qui les représente en ses Fables, La Fontaine a marqué qu’il n’était point séduit ni ébloui, et l’on a raconté à ce sujet une anecdote que je veux mettre ici parce qu’elle est moins connue que d’autres ; elle est, d’ailleurs, très authentique et vient de Brossette, qui la tenait de la bouche de Boileau : M. Racine, racontait celui-ci, s’entretenait un jour avec La Fontaine sur la puissance absolue des rois. […] Car la vie de La Fontaine est devenue comme une légende, et il suffit de commencer à raconter de lui une anecdote pour que tout lecteur l’achève aussitôt.

335. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « Philarète Chasles » pp. 111-136

car le tous-les-jours de la vie des peuples est aussi bête que le tous-les-jours de la vie des hommes, et le Génie lui-même se morfondrait à la raconter. […] Bacon y est raconté à la manière de Chasles quand il est en verve, et jugé presque sans faiblesse. Ce qui est plus étonnant que de raconter l’infamie de l’homme, qui dans Bacon fut infâme, c’est d’avoir diminué le philosophe, et il l’a diminué en ne le faisant que le vulgarisateur des idées de l’autre Bacon (le moine Roger), dont la Gloire infanticide a étouffé le nom dans le nom du second.

336. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « Michelet »

Nous avons celle où de telles choses sont gravement et imperturbablement racontées, et cela paie de tout, même d’avoir lu le livre, cette préface-là ! […] Il racontait les animaux se faisant, et il devait les raconter sans forcer le trait, panthéiste, naturaliste, matérialiste, je ne sais quoi de confus mais d’adouci, de peu ambitieux, d’homme à son affaire, qui était de décrire, et d’amuser les petites filles sans qu’elles vissent un Dieu dans tout cela.

337. (1894) La vie et les livres. Première série pp. -348

Gabriel Charmes a raconté avec beaucoup d’esprit ce premier voyage, qui aboutit à une déconvenue. […] Elles racontaient leur vie ; car, toutes, elles avaient eu leur roman, gracieux ou terrible. […] La mémoire des Bretons foisonne de légendes où sont racontés les mystères du monde invisible. […] Il sortait des Italiens et rencontra, dans les galeries du Palais-Royal (c’est lui-même qui le raconte), une « personne du sexe ». […] Elle lui raconta son histoire.

338. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — A — article » p. 154

d’Argonne peut être regardé comme un Littérateur, dans qui la solitude n’avoit affoibli ni l’amour des Lettres, ni celui des Anecdotes, ni l’art de les raconter avec agrément.

339. (1761) Salon de 1761 « Peinture —  Boizot  »

Boizot Telemaque qui raconte ses aventures à Calipso.

340. (1867) Cours familier de littérature. XXIII « cxxxviie entretien. Un intérieur ou les pèlerines de Renève »

Nous lui promîmes de lui raconter, au retour, toutes les circonstances du voyage et toute la physionomie du pays. […] X Nous nous avançâmes d’un pas discret d’allée en allée dans le castel du curé comme on l’appelle encore, jusqu’à une galerie bâtie à neuf, car la maison avait changé plusieurs fois de maître, et un vieux serviteur qui fendait du bois au pied de la galerie, dans l’écurie, nous raconta toutes ces métamorphoses. […] Pendant cette longue station que nous fîmes dans votre chambre de jeune homme, occupées à déchiffrer et à copier des lambeaux de notes au crayon noir à moitié effacées sur le plâtre blanc des murailles, Besson qui buvait un coup à la cuisine racontait à cette aimable dame et aux femmes du village ensuite ce qu’il savait de nous, et qui nous étions. […] Cela dit, elles coururent raconter leurs résolutions à leurs voisines et à leurs maris, et elles chargèrent Besson d’en avertir tout bas madame D***. […] Ma mère avait le plus beau chez la veuve de l’ancien maire ; le lit, gonflé de feuilles de blé de maïs, était haut comme un monticule ; des buis bénits étaient suspendus à la muraille, un bénitier en argent doré contenait de l’eau bénite ; une image coloriée du Juif-Errant donnant cinq sous au bourgeois de Bruxelles, et une gravure représentant Bonaparte faisant grâce de la vie à une dame de Berlin, dont le mari avait raconté dans une lettre à son roi l’entrée triomphale de l’Empereur des Français dans sa capitale, avec des expressions de respect pour le souverain de la Prusse, décoraient les murs.

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