Ensuite, c’est que même sa métaphysique sort à brûle-pourpoint d’une théodicée, et qu’elle n’est, en dernière analyse, qu’une théologie, dans une époque qui n’admet plus Dieu et où le naturalisme le plus grossier est toute la réalité, en philosophie, et tout l’idéal, en littérature ! […] Avec tout son génie, indiscutable pour ceux qui l’ont lu et médité, que serait Saint-Bonnet, réduit à sa seule aptitude métaphysique, sans la réalité de la Révélation et de l’Histoire !
la réalité du miracle ! […] Évidemment c’était là un fait hors de toute proportion avec la réalité, que de traiter ce petit taquin hypocrite qui tracassait dans les Évangiles comme ces grands ennemis de l’Église, les forts hérétiques de tous les temps, qui n’avaient pas emporté, ainsi que Samson, les portes de Gaza sur leurs épaules, mais qui, du moins, les avaient secouées… La goutte d’encre jetée à la face rayonnante du Christ par un gamin d’Académie ne méritait pas de si saintes colères.
C’est elle, la réalité vivante, qu’il s’agit de toucher et de fortifier. […] Pour mes paysans vendéens, Dieu, Jésus-Christ, l’Église, l’âme immortelle sont des réalités sensibles.
— Cette cause, c’est le moi et ses facultés. « Il y a dans le monde interne, il y a dans l’objet complexe saisi à chaque instant par la conscience, deux éléments distincts : l’un qui est nous, l’autre qui n’est pas nous ; l’élément qui est nous est simple dans chaque moment, identique à lui-même dans tous les moments, tandis que l’élément qui n’est pas nous est multiple dans chaque cas et variable d’un moment à l’autre. » Ce second élément se compose de nos actions et de nos opérations. « Le moi ne se reconnaît pas dans les modifications inétendues et sans forme qu’il éprouve. » — « Le monde interne renferme donc une réalité simple et identique à elle-même, qui est nous, et qui subsiste et persiste par elle-même ; et, de plus, une phénoménalité multiple et changeante, qui dépend de la réalité d’où elle émane et qu’elle modifie77. » — J’entends : vous croyez au bâton d’ambre de M. de Biran78.
.), on a vu la vérité sur Werther, la part de réalité qui s’y trouve combinée à des éléments poétiques et transformée par l’art.
Quelque opinion qu’on garde après la lecture du livre sur la réalité de ces divisions qu’une philosophie plus forte trouverait sans doute moyen de simplifier et de réduire, ce qu’il faut reconnaître, c’est l’agréable et instructif chemin par lequel le philosophe nous a menés ; c’est cette multitude de remarques fines, judicieuses et ingénieuses, tempérées, qu’il a semées sous nos pas ; c’est ce jour si indulgent et si doux qu’il sait jeter sur la nature humaine en y pénétrant ; c’est l’émotion honnête qu’il excite en nous, tout en nous apprenant à décomposer et à observer ; ce sont les heureuses applications morales et pratiques, le choix et l’atticisme des exemples, et les fleurs d’une littérature si délicatement cultivée à travers les recherches de la philosophie.
Le jour où, acculé contre une petite porte de l’Hôtel-de-Ville, monté sur une chaise de paille, visé par des canons de fusils, la pointe des sabres lui piquant les mains et le forçant à relever le menton, gesticulant d’un bras tandis que de l’autre il serrait sur sa poitrine un homme du peuple, un loqueteux qui fondait en larmes le jour où, tenant seul tête à la populace aveugle et irrésistible comme un élément, il l’arrêta — avec des mots — et fit tomber le drapeau rouge des mains de l’émeute la fable d’Orphée devint une réalité, et Lamartine fut aussi grand qu’il ait jamais été donné à un homme de l’être en ses jours périssables.
Il en va peut-être autrement dans la réalité.
Cela nous rappelle que la matière première des plus beaux livres n’est, fort souvent, qu’une réalité souillée et médiocre.
Ne profanez jamais l’amour ; c’est la chose la plus sacrée du monde ; la vie de l’humanité, c’est-à-dire de la plus haute réalité qu’il y ait, en dépend.
John Stuart Mill (note 3), n’est pas l’existence entre deux choses d’un lien mystique qu’on appelle Relation, auquel on suppose une réalité vague et abstraite ; mais une particularité très simple dans le fait concret que les deux noms expriment.
À vrai dire, les Époques littéraires ne doivent être datées que de ce que l’on appelle des événements littéraires1 : — l’apparition des Lettres provinciales, ou la publication du Génie du christianisme ; — et non seulement cela est conforme à la réalité, mais c’est encore le seul moyen qu’il y ait d’imprimer à l’histoire d’une littérature cette continuité de mouvement et de vie, sans laquelle, à mon sens, il n’y a pas d’histoire.
À côté et en comparaison, Gargantua est sage, don Quichotte raisonnable, le Roi de Bohème et ses sept châteaux, de la lumière, et surtout de la réalité !
II Figurez-vous donc qu’au lieu du précieux, compendieux et sérieux Armand Baschet, qui ne rirait pas pour un empire, nous eussions ici affaire à quelque génie plein d’abandon et de sincérité, à quelque grand caricaturiste historique, — car un caricaturiste peut être un historien, puisque la caricature n’est qu’une certaine manière de regarder la vérité, — figurez-vous donc, par exemple, un esprit comme Thomas Carlyle, que je regarde comme l’Hogarth de l’Histoire, tombant sur l’histoire de Baschet, le Dangeau posthume de Louis XIII, et demandez-vous quels effets grotesques et charmants et quelle conclusion de savoureuse moralité humaine il aurait tirés de ce conte de La Fontaine historique, qui fut une réalité, et, pour les gens intéressés à l’achèvement de ce mariage resté en l’air, la plus plaisante des mélancolies !
Sa fantaisie peut être charmante ou puissante, mais le roman dans lequel il peut très-bien entrer de la fantaisie (voir le Tristram Shandy de Sterne), doit toujours prendre sa base dans la réalité, qu’il idéalise ou qu’il n’idéalise pas, mais qu’il ne peut jamais fausser.
Cladel, qui n’invente point, aime la réalité de ses paysans, dont il garde le souvenir et le regret dans l’exil des villes et qui sont peut-être toute sa poésie ; car notre idéal est toujours manqué, et c’est ce qui le fait notre idéal !