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33. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre second. De la sagesse poétique — Chapitre IX. De l’astronomie poétique » pp. 233-234

Les Phéniciens, instruits par les mêmes Chaldéens, portèrent aux Grecs la connaissance des divinités qu’ils plaçaient dans les étoiles. — Avec ces trois vérités philologiques s’accordent deux principes philosophiques : le premier est tiré de la nature sociale des peuples ; ils admettent difficilement les dieux étrangers, à moins qu’ils ne soient parvenus au dernier degré de liberté religieuse, ce qui n’arrive que dans une extrême décadence. […] Les héros, et les hiéroglyphes qui signifiaient leurs caractères ou leurs entreprises, furent donc placés dans le ciel, ainsi qu’un grand nombre des dieux principaux, et servirent l’astronomie des savants, en donnant des noms aux étoiles.

34. (1874) Premiers lundis. Tome II « X. Marmier. Esquisses poétiques »

Comme tous les élégiaques du temps, il est placé au point de vue purement individuel : ce sont des souvenirs d’enfance, des regrets du premier amour, des plaintes sans amertume sur une condition obscure et gênée, des vers harmonieux aux châteaux, aux bois, aux amis qu’il aime ; des vœux de loisir et de rêverie, des confidences de ses goûts qui révèlent une nature aimante et mélancolique. Ceci est bien : les jeunes cœurs tendres et ouverts aux sympathies ont dû passer par cette phase mélancolique à leur entrée dans un monde égoïste et oisif ; livrés à des occupations sans rapport avec leur vocation secrète, ils ont dû placer leur idéal dans cette vie opulente et facile dont ils sont les témoins un peu jaloux : ils rêvent un véritable paradis à deux, dans le parc de quelque vieux château, à l’ombre des hautes futaies ou des charmilles.

35. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Œuvres de Barnave, publiées par M. Bérenger (de la Drôme). (4 volumes.) » pp. 22-43

Il le pleure, il exhale ses regrets dans quelques pages senties et touchées tout à fait à l’antique : Tu étais, s’écrie-t-il, un de ceux que je séparais parmi le monde, et je t’avais placé bien près de mon cœur. […] Une telle déclaration, placée en regard du récit de Mme Campan, ne laisse pas d’embarrasser, je le répète, et de jeter dans une vraie perplexité ; car on se refuse à admettre que Barnave ait parlé simplement ici comme un avocat qui se croit en droit de nier tout ce qui n’est pas prouvé. […] Bérenger, dans l’estimable et intéressante Notice qu’il a placée en tête des présents volumes, n’ait point abordé et discuté ce point délicat pour le fixer avec précision ; c’est là une lacune fâcheuse dans un travail qui pourrait autrement passer pour définitif. […] Arrivé sur mes foyers, je me demande s’il n’eût pas autant valu ne jamais les quitter ; et j’ai besoin d’un peu de réflexion pour répondre, tant la situation où nous a placés cette nouvelle Assemblée abat le courage et l’énergie. […] Le consul, qui fit placer la statue de Barnave à côté de celle de Vergniaud dans le grand escalier du palais du Sénat, lui en aurait fait monter, vivant, les degrés.

36. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome second — Livre septième. Les altérations et transformations de la conscience et de la volonté — Chapitre premier. L’ubiquité de la conscience et l’apparente inconscience »

Une grenouille saine, emprisonnée dans l’eau par une glace placée au-dessus de sa tête, saura fort bien découvrir une sortie par les coins pour aller respirer l’air. Enlevez à la grenouille ses hémisphères cérébraux et placez-la sous la même vitre ; si vraiment il ne subsiste plus ni sensation ni appétition, s’il ne reste plus aucune trace d’intelligence, la machine vivante pourra bien encore frapper son nez contre la vitre et demeurer là jusqu’à ce qu’elle soit suffoquée ; mais ce n’est point ce qui se passe. […] Placez sur le dos une grenouille sans cerveau, après lui avoir attaché une de ses pattes, vous poserez à la machine vivante un petit problème de mécanique, car les mouvements nécessaires alors pour se remettre sur le ventre ne sont pas les mêmes que dans les circonstances ordinaires ; or, cette prétendue machine, dont vous croyez que toute idée et toute sensation est désormais absente, résoudra fort bien le problème et se remettra sur le ventre. […] Dans la main insensible d’une hystérique, placez une paire de ciseaux : sans rien sentir en apparence, elle n’en fera pas moins les mouvements nécessaires pour couper.

37. (1818) Essai sur les institutions sociales « Addition au chapitre X de l’Essai sur les Institutions sociales » pp. 364-381

La préface de cette édition provisoire était terminée par un post-scriptum, que je crois devoir en détacher, pour le placer ici, avec quelques changements, comme addition au chapitre X. […] Damiron, placée par lui dans son ouvrage sur la philosophie du dix-neuvième siècle, et un article inséré dans le Globe m’obligent à ajouter ici quelques mots. […] Quoi qu’il en soit, celui qui, au sujet de l’institution du langage, m’accusait de m’être placé en dehors de la sphère de l’infini, en était bien plus éloigné qu’il ne le croyait. […] Celui qui se croyait l’antagoniste du fini plaçait l’infini dans l’homme même.

38. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre XXIV. Mme Claire de Chandeneux »

Placée par son mariage pour bien observer, elle n’a rien observé du tout… Dans ses Ménages militaires, on cherche la vie militaire, les choses militaires, les mœurs militaires. […] » Tout ce militarisme, à trop bon marché, rappelle cette antique petite pièce du Gymnase, qui est, je crois, intitulée : les Mémoires du colonel, et où il n’y a du colonel, que le colback, placé dans un coin sur un meuble, et dont les amoureux de la pièce font la boîte aux lettres de leurs billets doux ! […] Cette femme absolument sans esprit, malgré son espèce de talent, et dont on a osé placer la statue là où Voltaire seul, ce Dominateur par l’esprit, a la sienne, n’a jamais, au fond, inspiré, comme Voltaire, d’enthousiasme à personne, malgré ses succès. […] Sa gloire, de suffrage universel (une hontepour la gloire), s’est faite du plus mou consentement de tous, — comme sa statue a été placée au Théâtre-Français sansdiscussions préalables, sans élan, sans passion électrique ou embrasée.

39. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — G — article » pp. 377-379

Il faut choisir, sur vingt endroits, celui où un fait sera le mieux placé, pour répandre la lumiere sur tous les autres. Souvent un fait montré par avance & de loin, débrouille ce qui le prépare ; souvent un autre fait sera mieux dans son jour, étant placé en arriere ».

40. (1864) Cours familier de littérature. XVIII « CVIIe entretien. Balzac et ses œuvres (2e partie) » pp. 353-431

Cette pitié, placée au cœur de Grandet et prise tout en gré pour la vieille fille, avait je ne sais quoi d’horrible. […] Je te rendrai six mille francs en livres, et tu vas les placer comme je vais te le dire. […] J’ai fait de mon argent ce qu’il m’a plu d’en faire, et soyez sûr qu’il est bien placé…. […] Si vous l’avez placé, vous en avez un reçu…. […] dit-il en emportant le trésor et allant se placer à la fenêtre.

41. (1782) Plan d’une université pour le gouvernement de Russie ou d’une éducation publique dans toutes les sciences « Plan d’une université, pour, le gouvernement de Russie, ou, d’une éducation publique dans toutes les sciences — I. Faculté des arts. Premier cours d’études. » pp. 453-488

Cependant j’incline à les laisser où je les ai placées. […] Adulateurs des grands, ils altéreront, par leurs éloges mal placés, toute idée de vertu : plus ils seront séduisants, plus on les lira, plus ils feront de mal. […] Entre les connaissances, est-ce dans le rang des essentielles ou des surérogatoires qu’il faut les placer ? […] Entre les arbres à placer dans l’avenue du château et à la porte de la chaumière, il y a encore du choix. […] Nous transcrirons seulement les réflexions placées à la fin de l’examen des auteurs latins. » (Note de M. 

42. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Journal du marquis de Dangeau — I » pp. 1-17

Sur ce fond tout uni et qui s’est dessiné en nous sans qu’on y pense, se viendront ensuite placer les scènes piquantes des divers témoins, les anecdotes et les aventures ; mais le tous-les-jours, ce qui fait qu’on se souvient d’une époque non par saillie et fantaisie, mais par cette imagination positive qu’on appelle la mémoire, c’est à lui plus qu’à tout autre qu’on l’aura dû. […] Dangeau avait de la littérature ; il rimait en homme du monde, faisait des impromptus au moment où on le croyait tout occupé ailleurs, et gagnait des gageures par des tours de force d’esprit : ce sont là des mérites bien minces de loin, mais qui sont comptés de près ; et lorsque l’on voit dans la notice des éditeurs tous ses talents divers, un peu à la guerre, un peu dans la diplomatie, sa manière de s’acquitter de bien des emplois avec convenance, ses assiduités surtout, ses complaisances bien placées, sa sûreté de commerce et son secret, on n’est pas étonné de sa longue faveur, et on est obligé de convenir qu’il la méritait ou la justifiait. […] Les enfants qu’il y plaçait étant trop jeunes pour les armes et l’équitation, la base des exercices était la lecture, l’écriture, le latin, l’histoire, la géographie et la danse. […] Et dans ces voyages de Chambord il n’oubliera pas de dire combien il y avait de carrosses, et comment on était placé dans celui du roi et dans les suivants : Voici comme on était placé dans le carrosse du roi en venant : le roi et Mme la Dauphine au derrière, Monseigneur à une portière, Mme de Maintenon à l’autre et dans le devant Mme la princesse de Conti, Mademoiselle, et Mme d’Arpajon. — Dans le second carrosse, etc.

43. (1856) Leçons de physiologie expérimentale appliquée à la médecine. Tome I

Les fibres musculaires sont surtout longitudinales, et elles forment des faisceaux rougeâtres, placés parallèlement les uns aux autres. […] Si l’on vient alors à retirer du bain le cœur muni de ses deux thermomètres, et qu’on le laisse se refroidir à l’air, on s’aperçoit que le thermomètre placé dans le ventricule droit s’abaisse plus rapidement que celui qui est placé dans le ventricule gauche. […] On a placé l’appareil ainsi disposé dans un bain à une température de 40 degrés environ. Au bout d’un quart d’heure, les deux thermomètres placés dans le cœur ont marqué sensiblement la même température qu’un autre thermomètre placé dans le bain. […] L’extrémité de la canule est acérée en forme de trocart, et l’ouverture S placée latéralement.

44. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Le général Jomini. [V] »

On était très bien placé en 1820, quand on avait un bon esprit, et libre de passions, pour juger des hommes et des choses de notre grande Révolution, dont tant de témoins et d’acteurs principaux étaient encore vivants. […] Je n’en veux pour preuve que ce portrait de l’empereur Alexandre placé dans la bouche de Napoléon. […] Il n’a cessé, en la retraçant, et pour ses divers points de vue, de se placer au quartier général de celui qu’il suivait neuf ans auparavant à Eylau ; c’est là qu’il se suppose en idée, et non dans le camp de ses adversaires. […] L’Académie a placé le portrait du général Jomini dans une des salles de l’établissement, comme l’un de ses fondateurs. […] C’est ainsi que dans son pays natal, où Jomini était loin d’avoir toujours été prophète, le conseil d’État du canton de Vaud décida à son tour que le portrait de son illustre concitoyen serait placé au musée de Lausanne ; et ce portrait s’y voit aujourd’hui, de la main de l’excellent et généreux peintre Gleyre.

45. (1885) Préfaces tirées des Œuvres complètes de Victor Hugo « Préfaces des romans — Préfaces de « Han d’Islande » (1823-1833) — Préface d’avril 1823 »

Au moment d’exécuter cette détermination hardie, il conçut d’abord la pensée de placer en tête de cette seconde édition ce dont il n’avait pas osé charger la première, savoir quelques vues générales et particulières sur le roman. […] Quelqu’un l’exhortait encore — car il doit tout dire ingénument à ses lecteurs — à placer son nom sur le titre de ce roman, jusqu’ici enfant abandonné d’un père inconnu. […] Il lui reste à remercier les huit où dix personnes qui ont eu la bonté de lire son ouvrage en entier, comme le constate le succès vraiment prodigieux qu’il a obtenu ; il témoigne également toute sa gratitude à celles de ses jolies lectrices qui, lui assure-t-on, ont bien voulu se faire d’après son livre un certain idéal de l’auteur de Han d’Islande ; il est infiniment flatté qu’elles veuillent bien lui accorder des cheveux rouges, une barbe crépue et des yeux hagards ; il est confus qu’elles daignent lui faire l’honneur de croire qu’il ne coupe jamais ses ongles ; mais il les supplie à genoux d’être bien convaincues qu’il ne pousse pas encore la férocité jusqu’à dévorer les petits enfants vivants ; du reste, tous ces faits seront fixés lorsque sa renommée sera montée jusqu’au niveau de celles des auteurs de Lolotte et Fanfan ou de Monsieur Botte, hommes transcendants, jumeaux de génie et de goût, Arcades ambo ; et qu’on placera en tête de ses œuvres son portrait, terribiles visu formæ , et sa biographie, domestica facta .

46. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « Belmontet »

Belmontet55 Un livre de poésies, annoncé seul dans un bulletin bibliographique exclusivement consacré aux ouvrages en prose, doit produire un effet inattendu et un contraste, comme si l’on plaçait une pierre d’une autre espèce dans une mosaïque dont les marbres ne différeraient, jusque-là, que par les couleurs. […] Aujourd’hui, Belmontet vient à son tour se placer parmi tous ces poètes que la grandeur des gloires ou des mélancolies de l’Empire a fait chanter comme malgré eux. […] la Critique, qui reconnaît en lui de pareils dons et qui voudrait que l’homme qui les a en tirât parti davantage, comme une femme tire parti de sa beauté quand elle en a l’intelligence, la Critique, sympathique et pourtant sincère, n’a-t-elle pas le droit de regretter que l’incohérence des images, trop habituelle, vienne si souvent jeter son ombre heurtée sur des qualités faites pour être vues dans la lumière, et qui produiraient certainement l’effet imposant qu’on devrait en attendre si le poète savait les y placer et les y retenir ?

47. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Troisième partie. Beaux-arts et littérature. — Livre premier. Beaux-arts. — Chapitre VI. Architecture. — Hôtel des Invalides. »

Un paysage paraît-il nu, triste, désert, placez-y un clocher champêtre : à l’instant tout va s’animer : les douces idées de pasteur et de troupeau, d’asile pour le voyageur, d’aumône pour le pèlerin, d’hospitalité et de fraternité chrétienne, vont naître de toutes parts. […] Ce bâtiment religieux est placé derrière les bâtiments militaires, comme l’image du repos et de l’espérance, au fond d’une vie pleine de troubles et de périls.

48. (1874) Premiers lundis. Tome II « Hippolyte Fortoul. Grandeur de la vie privée. »

Tandis que son regard nageait dans l’espace, il sentit une ombre se placer devant son soleil ; aussitôt, sautant sur ses pieds, il s’écria : « — C’est lui !  […] Simiane va porter son écrit à Montesquieu, que les Lettres persanes ont placé à la tête de la réaction qui s’est prononcée contre la grandeur et le despotisme de Louis XIV. […] Steven, Suédois de naissance et de cœur, fils d’un des braves de Pultawa, se trouve placé entre toutes ses affections et tous ses devoirs. […] Mais ici, quand le roi, en hâte de partir, et dont le danger redouble à chaque minute, demande et commande à Steven des chevaux, et de lui rendre son compagnon de voyage, qu’on lui retient parce que c’est le fiancé de Mina ; quand Steven, non content de résister par piété domestique, étale cette piété, la discute, l’oppose avec faste au rôle du conquérant, quand il s’écrie : « L’homme que vous venez d’appeler un enfant se lève du sein de son obscurité pour se placer devant vous, et pour se mesurer à vous, sans orgueil comme sans crainte… Ce n’est pas parce que je commande que j’ose me comparer à vous, mais parce que j’obéis… J’ai vaincu un ennemi plus redoutable que vous…, je me suis vaincu moi-même » alors le drame cesse en ce qu’il avait de naturel et d’entraînant ; le système reparaît, se traduit de nouveau à la barre sous forme de plaidoyer.

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