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1628. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « M. DE LA ROCHEFOUCAULD » pp. 288-321

Le petit avis au lecteur y répond bien mieux d’un seul mot : « Il faut prendre garde…, il n’y a rien de plus propre à établir la vérité de ces Réflexions que la chaleur et la subtilité que l’on témoignera pour les combattre141. » Voltaire, qui a jugé les Maximes en quelques lignes légères et charmantes, y dit qu’aucun livre ne contribua davantage à former le goût de la nation : « On lut rapidement ce petit recueil ; il accoutuma à penser et à renfermer ses pensées dans un tour vif, précis et délicat. […] Vauvenargues, qui commença l’un des premiers la réhabilitation, le remarque très-bien : « L’homme, dit-il, est maintenant en disgrâce chez tous ceux qui pensent, et c’est à qui le chargera de plus de vices ; mais peut-être est-il sur le point de se relever et de se faire restituer toutes ses vertus… et bien au delà144. » Jean-Jacques s’est chargé de cet au delà ; il l’a poussé si loin, qu’on le pourrait croire épuisé. […] Le malheur de La Rochefoucauld est de croire que les hommes ne se corrigent pas : « On donne des conseils, pense-t-il, mais on n’inspire pas de conduite. » Lorsqu’il fut question d’un gouverneur pour M. le Dauphin, on songea un moment à lui : j’ai peine à croire que M. de Montausier, moins aimable et plus doctoral, ne convenait pas mieux. […] mais pensez comme Platon, du poëte.

1629. (1865) Cours familier de littérature. XIX « CXIIe entretien. La Science ou Le Cosmos, par M. de Humboldt (1re partie). Littérature scientifique » pp. 221-288

Jadis, lorsque j’étudiais les étoiles, je fus saisi d’un mouvement de crainte, inconnu de ceux qui mènent une vie sédentaire ; il m’était douloureux de penser qu’il faudrait renoncer à l’espoir de contempler les belles constellations qui se trouvent au voisinage du pôle sud. Impatient de parcourir les régions de l’équateur, je ne pouvais porter mes yeux vers la voûte étoilée du ciel, sans penser à la Croix du sud, et sans me rappeler en mémoire le sublime passage du Dante1. » — Tous les passagers, notamment ceux qui avaient déjà habité les colonies d’Amérique, partagèrent la joie que Humboldt ressentit à la vue de cette constellation. […] La voix était très faible, rauque et délicate comme celle d’un enfant, c’est pourquoi on lui a encore posé des sangsues au larynx. — Il a sa parfaite connaissance. — “Pensez souvent à moi, disait-il avant-hier, avec beaucoup de lucidité. — J’étais très heureux, ce jour a été bien beau pour moi, car rien n’est plus sublime que l’amitié. […] Mais il pensa enfin, en 1844 et 1845, à rédiger pour le monde le Cosmos, ce testament de sa science universelle, où il espérait immortaliser son nom.

1630. (1869) Cours familier de littérature. XXVII « CLXIIe entretien. Chateaubriand, (suite.) »

« Je pense que tout homme qui peut espérer quelques lecteurs rend un service à la société en tâchant de rallier les esprits à la cause religieuse ; et dût-il perdre sa réputation comme écrivain, il est obligé en conscience de joindre sa force, toute petite qu’elle est, à celle de cet homme puissant qui nous a retirés de l’abîme. […] Vous qui avez épuisé tous les chagrins de la vie, que penserez-vous d’un jeune homme sans force et sans vertu, qui trouve en lui-même son tourment, et ne peut guère se plaindre que des maux qu’il se fait à lui-même ? […] « Je vois encore le mélange majestueux des eaux et des bois de cette antique abbaye où je pensai dérober ma vie aux caprices du sort ; j’erre encore au déclin du jour dans ces cloîtres retentissants et solitaires. […] Mais l’homme sait-il bien toujours ce qu’il veut, est-il toujours sûr de ce qu’il pense ?

1631. (1895) Histoire de la littérature française « Première partie. Le Moyen âge — Livre I. Littérature héroïque et chevaleresque — Chapitre I. Les chansons de geste »

Car cette « triomphante défaite », c’est bien tout le poème, et je ne puis que me ranger à l’avis de ceux qui pensent que la revanche de Charlemagne sur l’émir Baligant et son Marsile est une mesquine addition destinée à satisfaire la vanité nationale aux dépens de la poésie. […] Pour le retenir et l’assouvir, stimulés par la concurrence, les trouvères, ayant épuisé la matière épique, se jettent dans la fantaisie : ils fabriquent de l’épopée, gauches contrefaçons qui insensiblement, sans que personne y pense, deviendront de ridicules parodies : et de jour en jour la poésie traditionnelle et populaire s’altère, se dissout et se noie davantage dans l’immense fatras de l’invention littéraire. […] Nous tendons à lier nos perceptions, nos idées : nous ne pensons connaître et nous ne croyons réel ou vrai que ce dont nous apercevons les relations. […] Ce qui en fait la vérité, c’est l’absolue égalité, l’identité plutôt de l’auteur et du public, l’impossibilité où est celui-là de penser hors et au-dessus de la sphère où celui-ci enferme ses pensées.

1632. (1886) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Deuxième série « M. Deschanel et le romantisme de Racine »

Je ne pense donc pas qu’il soit besoin de demander la permission d’admirer les tragédies de Racine. […] Et qui dira s’il n’en a pas senti et pensé plus long qu’il n’en a écrit ? […] Je ne suis pas loin de penser qu’il n’y a que la foule qui ait besoin, au théâtre, de s’intéresser, comme elle le ferait dans la réalité, aux entreprises d’un personnage ou d’un groupe, de prendre parti pour l’un ou l’autre camp. […] Je ne pense pas qu’on ait exagéré la tendresse de Racine. « Mon père était tout cœur71. » « Racine qui aime pleurer…72. » Il faut répéter ici ce qui a été dit mille fois : Racine est bien le poète de l’amour.

1633. (1894) Propos de littérature « Chapitre IV » pp. 69-110

Mais la rigide mesure forçait à ne penser que par six syllabes à la fois, — uniformément, — et, l’on s’en souvient, la monotonie de ces jeux produisit par réaction les coupes hardies des Romantiques. […] Mais l’homme, jusqu’ici, pense à soi plus qu’aux autres hommes ; la Société est une collection d’égoïsmes, et la lutte pour l’existence s’y dénonce à première vue comme le seul principe un peu apparent : le socialisme, venu de l’autre pôle, doit donc précéder l’anarchie, — de quelques centaines, peut-être de quelques milliers d’années, — car il importe avant tout de protéger les faibles ; il faut d’abord paralyser les forces de l’égoïsme et le faire peu à peu céder au sentiment contraire, pour qu’enfin puisse grandir l’universel Amour. […] Griffin, luttent contre les autoritaires du Parnasse ; mais l’équilibre du moment se trouve encore entre eux, et un peu en avant de M. de Régnier, je pense. […] L’Harmonie, plus lente en ses variations, se modèle aux formes des objets pensés, s’amoncelle en masse vigoureuse, ou s’atténue comme un lointain, dispose les plans, consolide les proportions, recueille la clarté monitoire des choses, et conduite par le Rythme qui se meut en son sein, passant avec lui de son en son et d’objet en objet, elle le suscite à lui-même par l’empreinte qu’il y marque, grande toujours et féconde, opulente et passive comme la Nature-Mère.

1634. (1913) La Fontaine « VIII. Ses fables — conclusions. »

Dans l’Horoscope La Fontaine met en lumière par deux exemples combien sont trompeuses les prédications ou les prévisions que certains pensent tirer de la conjonction des astres ; puis il se met à raisonner : De ces exemples il résulte Que cet art, s’il est vrai, fait tomber dans les maux Que craint celui qui le consulte ; Mais je l’en justifie et maintiens qu’il est faux. […] Troisième ou quatrième saison, la fin de l’automne, alors que les paysans ou les petits paysans, les fils de villageois ne sont plus occupés à la terre et pensent à attraper les oiseaux à la pipée ou autrement. […] Il a dit ailleurs  et j’aurais pu vous apporter les sept ou huit volumes où l’on trouve ici et là Voltaire parlant de La Fontaine, j’y ai pensé, mais j’ai supposé que l’heure me presserait  il a dit ailleurs que La Fontaine est à peu près au niveau de l’Arioste. […] Vous pensiez voir arriver le mot de raison parce qu’on a toujours dit : le classicisme c’est la raison !

1635. (1902) Les œuvres et les hommes. Le roman contemporain. XVIII « Alphonse Daudet »

Je pense qu’il s’abuse un peu sur ce point. […] Il y a beaucoup de passages de ce détail poétique et de cette exquisité dans ce roman, qu’un autre eût pu penser peut-être, mais n’eût pas écrit de cette plume-là ! […] Balzac, qui a pris toute la société de son temps dans sa ceinture et l’a jetée et enlevée sur son épaule, avec la force d’un Hercule, sans en laisser rien à personne, n’a pas pensé à y mettre ce qui devait y peser le plus. […] Tout serait donc consommé pour ceux qui pensent à la Royauté ?

1636. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Étude sur la vie et les écrits de l’abbé de Saint-Pierre, par M. Édouard Goumy. L’abbé de Saint-Pierre, sa vie et ses œuvres, par M. de Molinari. — II » pp. 261-274

Un jour qu’il venait d’entendre Mme de Talmont une femme du monde qui parlait bien et pensait peu : « Mon Dieu ! remarqua-t-il par un retour sur lui-même, que cette dame ne dit-elle ce que je pense ! 

1637. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre XIII. Des tragédies de Shakespeare » pp. 276-294

La découverte de l’imprimerie a nécessairement diminué la condescendance des auteurs pour le goût national : ils pensent davantage à l’opinion de l’Europe ; et quoiqu’il importe que les pièces qui doivent être jouées aient avant tout du succès à la représentation, depuis que leur gloire peut s’étendre aux autres nations, les écrivains évitent davantage les allusions, les plaisanteries, les personnages qui ne peuvent plaire qu’au peuple de leur pays. […] Il ne dit pas un mot qui n’atteste son mépris pour l’espèce humaine, et pense plus souvent encore à se tuer qu’à punir ; noble idée du poète d’avoir représenté l’homme vertueux ne pouvant supporter la vie, quand la scélératesse l’environne, et portant dans son sein le trouble d’un criminel, alors que la douleur lui commande une juste vengeance.

1638. (1858) Cours familier de littérature. V « Préambule de l’année 1858. À mes lecteurs » pp. 5-29

Que pensez-vous de cet homme ? […] que pensez-vous alors de vos insultes, vous qui me reprochez de travailler, c’est-à-dire vous qui m’outragez parce que je fais… quoi ?

1639. (1861) Cours familier de littérature. XI « Atlas Dufour, publié par Armand Le Chevalier. » pp. 489-512

Que penseriez-vous d’un peuple civilisé qui jetterait ses manuscrits aux flammes, et ses médailles à la fournaise, pour prouver sa civilisation ? […] L’homme est petit par ce qu’il fait, il n’est grand que par ce qu’il pense ; ne mesurez pas le globe par son diamètre, mesurez-le par la masse de pensées qui en est sortie.

1640. (1895) Histoire de la littérature française « Troisième partie. Le seizième siècle — Livre IV. Guerres civiles conflits d’idées et de passions (1562-1594) — Chapitre I. Les mémoires »

Enfin, sans y penser, sans y prétendre, Palissy est un écrivain : il y a dans son style si net et si spontané, une force d’imagination qui fait jaillir l’expression non seulement adéquate à l’idée, mais représentative de la vie. […] Sur la fin de son commandement, toutefois, après la Saint-Barthélemy, il se décida à révéler au roi Charles IX les conclusions de son expérience : à force de pendre et de tuer, il en était venu à penser que le roi, pour rétablir son autorité et la paix, devait accorder la liberté de leur culte aux protestants, en détacher peu à peu la noblesse ambitieuse en réservant la faveur et les emplois aux catholiques, enfin user la turbulence de ses sujets dans la guerre étrangère : ce n’est pas là le discours d’un fanatique.

1641. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre III. Le naturalisme, 1850-1890 — Chapitre I. Publicistes et orateurs »

Par sa politique et par sa chute, l’empire fournit à Thiers la plus belle situation que jamais homme d’Etat puisse rêver : celle où tous les intérêts personnels coïncident avec le bien public et le devoir patriotique, celle où il suffit de s’oublier pour s’élever, de penser à soi pour bien mériter de tous. […] Ses dons d’orateur lui firent la réputation de ne point penser.

1642. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — L — Leconte de Lisle, Charles-Marie (1818-1894) »

Cela suffit à expliquer pourquoi les Poèmes antiques et les Poèmes barbares n’ont jamais obtenu de vogue parmi les lecteurs qui sont emprisonnés dans le domaine de la sensation, et pourquoi leur place est plus haute parmi ceux qui pensent ; si haute, que la poésie contemporaine en est dominée tout entière. […] Quand il pense, il doute.

1643. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre XIII. Premières tentatives sur Jérusalem. »

Ce furent les ennemis du christianisme, comme Julien, qui pensèrent à cet endroit 612. […] Je pense que les « Hérodiens » de l’Évangile sont les Boëthusim.

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