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528. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « Charles Baudelaire  »

La littérature satanique, qui date d’assez loin déjà, mais qui avait un côté romanesque et faux, n’a produit que des contes pour faire frémir ou des bégaiements d’enfançon, en comparaison de ces réalités effrayantes et de ces poésies nettement articulées où l’érudition du mal en toute chose se mêle à la science du mot et du rhythme. […] Esprit d’une laborieuse recherche, l’auteur des Fleurs du mal est un retors en littérature, et son talent, qui est incontestable, travaillé, ouvragé, compliqué avec une patience de Chinois, est lui-même une fleur du mal venue dans les serres chaudes d’une Décadence. […] Cela est, dans sa férocité intime, d’un ton inconnu en littérature. […] Quoiqu’il soit sérieux d’apparence, à travers ses notions nombreuses, scientifiquement très affermies, — une littérature sui generis sur les deux substances dont il s’occupe, — à travers enfin les descriptions de l’ivresse, cet abîme qu’il descend marche par marche, s’arrêtant à chaque marche pour la décrire, sous tous ses côtés, le comique sort (est-ce malgré lui ?) […] Charles Baudelaire, qui nous a introduit Edgar Poe dans la littérature française (et c’est une bonne introduction), paraît vouloir y introduire cet autre esprit malade de son vice, qu’il nous donne pour plus qu’il ne vaut.

529. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — S. — article » pp. 248-249

Dès qu'on n'étoit pas de son avis sur quelque point de Littérature ou de Religion, aussi-tôt on étoit sûr d'être traité d'ignorant, de bête, de fripon. […] Cette maniere de disputer pouvoit être excusable dans un temps où l'on n'avoit pas encore dit : « Il est bien cruel, bien honteux pour l'Esprit humain, que la Littérature soit infectée de ces haines personnelles, de ces cabales, de ces intrigues, qui devroient être le partage des esclaves de la fortune.

530. (1896) Le IIe livre des masques. Portraits symbolistes, gloses et documents sur les écrivains d’hier et d’aujourd’hui, les masques…

En littérature, comme en tout, il faut que cesse le règne des mots abstraits. […] Mallarmé expliquait l’inutilité de compliquer les spectacles par la récitation de littératures généralement déplorables. […] Ayant pris charge de la littérature vers le déclin du naturalisme, M.  […] Sa littérature, quoique très volontaire, demeure toujours très personnelle ; et c’est un mérite, sans lequel tous les autres sont nuls. […] Le mysticisme qui chanta récemment dans la littérature et dans l’art était le concert de tous ces oiseaux.

531. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « SUR ANDRÉ CHÉNIER. » pp. 497-504

André Chénier, publié en 1819 par les soins de M. de Latouche, a exercé, sur la littérature et la poésie du xixe  siècle, une influence qu’il n’aurait jamais eue sur celle de la fin du xviiie , lors même qu’il eût été connu à cette dernière époque. […] En un mot, si André Chénier eût vécu, je me figure qu’il aurait pu être le grand poëte régnant depuis 95 jusqu’en 1803 ; réaliser admirablement ce que son frère, et Le Brun, et David dans son genre, tentèrent avec des natures d’artiste moins complètes et avec une sorte de sécheresse et de roideur ; exprimer poétiquement, et sous des formes vives de beauté, ce sentiment républicain à la fois antique et jeune, qui respire dans quelques écrits de Mme de Staël à cette époque, et surtout dans sa Littérature considérée par rapport à la Société. […] Voir l’article Littérature de M.

532. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — H — Heredia, José Maria de (1842-1905) »

[La Littérature de tout à l’heure (1889).] […] [Précis historique et critique de la littérature française (1895).] […] Il a compris que l’office et le bienfait de la littérature consistent surtout à ouvrir au public des trésors cachés et à faire entrer dans le domaine de tous ce qui était auparavant l’exclusive propriété de quelques spécialistes volontiers jaloux.

533. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — R — Retté, Adolphe (1863-1930) »

Mais toujours — tant la philosophie sociale et la littérature se confondent en ce beau livre — nous demeurons gêné pour louer, à l’exclusion des généreuses déclamations du Héros, telles strophes descriptives, tels paysages, tels rythmes, et la difficulté se fait insurmontable. […] Remy de Gourmont C’est de la littérature anarchiste qui serait en même temps de la littérature, tout court ; un poème et un exposé de doctrine ; un rêve et un manuel ; mais le poème et le rêve sont dominants.

534. (1912) L’art de lire « Chapitre VII. Les mauvais auteurs »

Les études scolaires donnent le goût du beau, ou l’horreur du beau, ou l’indifférence à l’égard de la littérature. […] Seulement, ceux que les études scolaires ont ennuyés se subdivisent en deux classes : ceux qui n’ont horreur que de la belle littérature et ceux qui ont horreur de toute littérature.

535. (1818) Essai sur les institutions sociales « Préface » pp. 5-12

Notre littérature doit subir le même sort que nos institutions. […] Lémontey était effarouché de l’expression archéologie, appliquée (page 100) à notre littérature du siècle de Louis XIV. […] Enfin il s’associait à toutes mes prévisions sur la poésie et sur la littérature : le mouvement actuel les confirme encore mieux que son suffrage, si important d’ailleurs.

536. (1864) Le roman contemporain

J’ajouterai que la littérature est un effet avant d’être une cause. […] C’est là un fait grave dans la littérature. […] Alexandre Dumas fils est entré dans la littérature. […] C’est à ses yeux la jeune littérature. […] » Touchant accord de l’art réaliste avec la littérature réaliste !

537. (1912) Pages de critique et de doctrine. Vol I, « I. Notes de rhétorique contemporaine », « II. Notes de critique psychologique »

L’autre était une vue de la littérature, considérée comme une psychologie vivante. […] Il n’est pas vrai que la littérature ait été jamais un jeu pour vous. […] Techniquement, il est le représentant le plus haut chez nous de la littérature à idées, confondue trop souvent avec la littérature à thèses. […] Et tous recommençaient la littérature. […] Condamnons la littérature à thèse, genre essentiellement faux ; distinguons-en la littérature à idées, genre légitime, genre nécessaire.

538. (1890) L’avenir de la science « VI »

La littérature, en effet, est bien mieux comprise. […] Bien peu de personnes, il est vrai, conçoivent le côté sérieux de la littérature et de la poésie ; le littérateur n’est, aux yeux de la plupart, qu’un homme chargé de les amuser, et le savant, n’ayant pas ce privilège, est par là même déclaré inutile et ennuyeux. […] Il y a pour la science, comme pour la littérature, un bon goût que nos compatriotes ont su parfois saisir avec une délicatesse supérieure. […] Tout cela prouve aussi une chose assez triste, c’est que l’art, la science et la littérature ne fleurissent pas chez nous par suite d’un besoin intime et spontané, comme dans l’ancienne Grèce, comme dans l’Italie du XVe siècle ; puisque, là où il n’y a pas d’excitation extérieure, rien ne se produit.

539. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « Ch.-L. Livet »

Niaiseries d’oisifs, détails inouïs de platitude recueillis avec un respect si comique, on se demande vraiment si c’est là de la littérature ou si c’est de l’esprit de société ? […] Je défie bien de lire de suite sans être écœuré cette Guirlande de Julie que Livet a transcrite à la fin de son ouvrage, pour nous démontrer, sans nul doute, l’influence heureuse de ces affreuses fadeurs sur la langue et la littérature. […] Il s’est laissé couler là-dedans… L’erreur du moment, c’est que la langue du xviie  siècle doit quelque chose à cette poignée de femmelettes affectées qui faisaient les hommes et la littérature à leur image. […] Cette littérature n’est pas plus lisible que ne sont portables les jupons de peau d’Espagne dans lesquels elles entortillaient leurs affectations.

540. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « Ernest Hello »

Mais en ce beau pays de France, qui est très lâche en littérature, on prit peur de ce mot « d’arabesques » qui pouvait déconcerter les petites têtes françaises et tromper leur besoin de petite clarté… et on le ratura pour le remplacer par le mot « d’extraordinaires », bête comme une affiche de théâtre, un jour de solennelle représentation ! […] Nous avons rendu compte, lorsqu’il les publia, de ces deux livres, d’une beauté rare et profonde, intitulés : l’Homme et Physionomies de saints 15, restés obscurs tous deux, malgré leur beauté et notre effort, et qui devaient naturellement et fatalement le rester dans un temps comme le nôtre, où l’on n’a plus souci que des choses matérielles et basses, et même des plus basses, en littérature… Quand M.  […] Tour de souplesse dans le talent dont la Force n’est pas toujours capable, et qu’on pouvait très bien ne pas attendre d’un homme absorbé dans l’unité de ce mysticisme qui le fait ce qu’il est de si particulier dans la littérature contemporaine ; car je n’y connais pas de talent qu’on puisse, d’accent, comparer au sien. […] Cette forme du conte, plus dure à manier dans sa brièveté que celle du roman dans sa longueur, cette forme concentrée, dans laquelle il faut se ramasser sans rien perdre de sa sveltesse, pouvait, par le seul fait de sa concentration, éclater sous sa main et le frapper dans sa prétention de conteur, qu’il n’en serait pas moins pour cela resté lui-même, avec sa valeur d’idées prouvée par les livres que j’ai énumérés : l’Homme, — Physionomies de saints, — la Parole de Dieu, ce dernier livre de Hello, qui échappe à la compétence de la critique profane, mais que des prêtres n’ont pas craint de lire dans leurs chaires, comme si c’était là de la littérature sacrée !

541. (1904) Les œuvres et les hommes. Romanciers d’hier et d’avant-hier. XIX « Madame Sand et Paul de Musset » pp. 63-77

une question bien plus grosse qu’une question de littérature. […] ; quelle que soit l’intention qui anime en secret Elle et Lui, c’est un scandale sans doute que ce livre, un misérable scandale, qui n’est pas fait pour agiter deux jours une saine et honnête littérature ; mais, hors cela, c’est un coup manqué ! […] Littérairement (s’il est permis de finir par un mot de littérature en présence de livres pareils), le roman de Paul de Musset est écrit avec le goût un peu sec, mais ferme, d’un homme qui a beaucoup lu les romans du xviie  siècle et qui s’est tapissé l’esprit de leurs formes. […] Que va devenir la littérature ?

542. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « Deux romans scandaleux » pp. 239-251

une question bien plus grosse qu’une question de littérature. […] Quelle que soit l’intention, que Dieu seul peut juger (et qu’il jugera, madame), quelle que soit l’intention qui anime en secret Lui et Elle, c’est un scandale sans doute, que ce livre, un misérable scandale, qui n’est pas fait pour agiter deux jours une saine et honnête littérature ; mais, hors cela, c’est un coup manqué ! […] Littérairement (s’il est permis de finir par un mot de littérature en présence de livres pareils), le roman de M. de Musset est écrit avec le goût un peu sec, mais ferme, d’un homme qui a beaucoup lu les romans du dix-septième siècle et qui s’est tapissé l’esprit de leurs formes. […] Que va devenir la littérature ?

543. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre II. L’époque romantique — Chapitre III. La poésie romantique »

Il y a quelque chose de singulier dans son cas : il compte comme un génie lyrique, et il a toujours employé les formes impersonnelles de la littérature. […] Il multipliait sa pensée par une invention verbale à l’aide de laquelle son immense personnalité occupait toutes les avenues de la littérature. […] Il était venu à la poésie par un atelier de peintre : et il ne fut jamais qu’un peintre fourvoyé — par bonheur — dans la littérature. […] C’est le commencement de la littérature impersonnelle. […] Et ainsi c’est sur Gautier en quelque sorte que pivote notre littérature pour se retourner du romantisme vers le naturalisme.

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