Quand les mœurs se polissent, le langage aussi s’épure, et, n’était la crainte de paraître jouer sur les mots, je dirais volontiers que « politesse » et « polissure » sont choses qui vont naturellement ensemble. […] — Le prétendu roman de Pascal. — Si Pascal a été « joueur », comme le veut Sainte-Beuve ; — « beau, souffrant, plein de langueur et d’ardeur, impétueux et réfléchi, superbe et mélancolique », comme le peint Cousin ; — ou, comme le croit un autre encore, s’il a rêvé de jouer un personnage politique [Cf. […] [On remarquera que Limoges est la seule ville de France dont un nom de rue soit spécifié dans le théâtre de Molière] ; — 1649, Toulouse, Narbonne ; — 1650, Agen ; — et comment ce séjour d’Agen permet de croire que Molière a joué deux ou trois fois auparavant à Bordeaux [Cf. […] Soulié, Recherches] des pièces qu’il eût imitées dans les siennes, et qu’il n’aurait jamais jouées à Paris [Cf. […] 5º Les Œuvres. — De toutes les pièces qu’on vient d’énumérer, il n’y en a pas six dont on ait gardé la mémoire ; — ni seulement une que l’on osât encore jouer ; — et il n’y a pas un auteur à qui l’histoire de la littérature doive plus qu’une mention.
Hantée du désir de jouer un grand rôle, elle avait fait choix de Bonaparte pour qu’il gouvernât d’après ses inspirations : elle aurait été la tête, il aurait été le bras. […] Napoléon est continûment dans la situation du joueur qui engage la partie décisive et qui joue le tout pour le tout. […] Il va sans dire que le mari y jouera un sot personnage et ne cessera d’être ridicule que pour devenir odieux. […] Le rôle qu’on s’est imposé et qu’on finit par jouer au naturel, ne le sent-on pas à de certaines heures peser lourdement sur ses épaules ? […] Les romantiques qui sont des bourgeois, quand bien même ils jouent au gentilhomme, affichent l’horreur du bourgeois, déclarent la guerre à la société bourgeoise et à sa morale.
On en jugera par l’ancienne Piece de l’Avocat Patelin jouée sur le théatre de la Basoche sous le regne de Charles VII. […] Le rolle qu’elle joue dans ce Poëme est bien inférieur & bien opposé à la maniere dont elle figure dans l’histoire. […] On voit dans ce dernier ouvrage l’homme de génie qui se joue de sa matiere, & dans l’autre un faible rimeur accablé sous le poids de la sienne. […] Plusieurs de ses Pieces n’ont pas réussi : d’autres n’ont pu être jouées : d’autres même n’eussent jamais dû voir le jour. […] C’est l’illustre Berger d’Admette qui joue avec les Bergers d’Arcadie les airs qu’ils savent, & qui leur en apprend de nouveaux.
Ce qu’il y a de plus étonnant dans cette comédie, c’est qu’elle ait été jouée. […] Le Tsar lut le manuscrit, porté au palais par une amie ; il éclata de rire, il ordonna à ses comédiens de jouer la parodie de ses fonctionnaires. […] Ils jouèrent au conspirateur en enfants ; le jeu finit tragiquement ; les conjurés allèrent expier leur espoir chimérique en Sibérie ou en exil. […] Quelques-unes de ces pièces furent jouées dans le temps, aucune n’est restée au répertoire. […] Je prierai mon frère de nous jouer une valse.
C’est, pour jouer sur votre mot, de la poudre qui ne monte au cerveau de personne. […] Pour écrire une étude de quelque étendue sur un homme qui a joué un tel rôle, il faudrait faire l’histoire d’au moins la moitié d’un règne. […] Bu quelques coups de trop d’un certain vin d’Espagne, Qui fait fleurir la joue, et battre la campagne. […] Mais, trouvant assez ridicule le rôle de peureux qu’on voulait me faire jouer, je pressai M. […] Persuadé par tout ce que je savais que l’homme ne se jouait pas de moi, je me laissai faire.
Les Flaireurs écrits en 1888, parurent dans La Wallonie en 1889, furent joués à Paris une première fois le 5 février 1892 au Théâtre d’Art sous la direction de Paul Fort, puis le 12 janvier 1896, à l’Œuvre, par les soins de Lugné-Poe. […] Le destin se joue de nous non moins que de la Princesse Maleine ou de Pelléas ; malgré la rage avec laquelle nous nous cramponnons, il nous entraînera. […] Lugné-Poe joua dans toutes ces pièces. […] Jouée au Gymnase, le 20 mai 1903, avec Mme Georgette Leblanc dans le rôle de Joyzelle. […] Joué à Bruxelles au Théâtre du Parc, le 20 février 1900 ; à Paris, à l’Œuvre, le 8 mai 1900 ; à Villers (Belgique) dans les ruines d’un vieux cloître, au mois de juillet 1910, et plusieurs fois depuis, dans des décors analogues, en Belgique et en Angleterre.
» Et, prenant aux talons le cadavre du roi, Il marche à l’empereur qui chancelle d’effroi ; Il brandit le roi mort comme une arme, il en joue, Il tient dans ses deux poings les deux pieds, et secoue Au-dessus de sa tête en murmurant : « Tout beau ! […] Quand les acteurs anglais vinrent jouer Shakespeare à Paris, en 1828, ils avaient supprimé le personnage du fou. […] Et, en effet, si Beaunier joue avec ses souvenirs, s’il se raconte ici, comme partout ailleurs, à la façon renanienne, c’est-à-dire cum grano salis, il n’invente pas, assurément, cette sensation de crainte, ce mouvement de recul, à la seule pensée de s’engager dans la forêt obscure. […] Il s’assied au piano ; il joue du Schumann et conclut : « Voilà de la musique : cela vaut mieux que vos Wagner ! […] Les tricoteuses et les filandières de plein air, les belles filles qui tissent leurs brins de fil avec des fuseaux d’os ont coutume de la chanter : elle est innocemment douce, elle se joue avec la candeur de l’amour, comme au bon vieux temps ».
Ce profiteur adroit joue devant le peuple un rôle généreux de défenseur des déshérités, pour désarmer leur révolte agissante et réellement maintenir l’ordre capitaliste, dont il est le bénéficiaire. […] Il est frappé du teint d’un consommateur qui jouait aux cartes tranquillement. […] On dirait qu’il joue à l’empereur, et il est réellement l’empereur. Il joue au « seigneur de la guerre », et il est réellement le chef de l’armée. […] Le voilà rétabli et qui joue gaiement avec ses bassets.
Mais c’est affaire à l’auteur de se jouer avec les difficultés. […] Mais du stuc qui joue le marbre, du carton-pâte qui joue la sculpture, du poirier qui joue l’ébène. […] Zola joue ici un rôle non de témoin, mais simplement de metteur en scène et d’arrangeur ? […] Et moi aussi, je joue du bistouri ! […] Au surplus, ces moralistes jouent de malheur.
Lavedan fit jouer Catherine : la jolie pièce ! […] C’est que l’abbé Jules, tel que le voilà, nie Dieu et le diable, se moque de l’évêque, se rit de la morale, se joue de l’opinion publique et mène, en ce monde, grand train de révolté. […] Si les animaux jouent, ce qui s’appelle jouer, pour le plaisir ? […] Non loin de ce réduit, le paysage est le plus beau du monde, la Corne d’Or et les collines de Scutari, les merveilles de la lumière qui joue avec l’air et l’eau. […] Il a écrit, dans le Monarque, où Ion voit d’aimables méridionaux jouer gentiment avec le mensonge : « L’amour de ce qui n’est pas, seule joie de ce misérable univers !
Souveraine, elle se joue à des combinaisons infinies ; elle afflue par des canaux sans nombre. […] qu’il méprise ces exercices de patience, ces façons de « jouer aux petites difficultés vaincues » ! […] C’est lui qui est le timide ; il détourne les yeux quand elle le regarde, il voudrait fuir, un afflux de sang teinte sa joue sous le hâle. […] L’être bon, que la vie récompense, est celui qui, au lieu de se jouer aux élégances futiles, se conforme à sa fin. […] Nullement épris des idées, il les touche, semble-t-il, en délicat sceptique, les assemble, les pousse, se joue à leurs combinaisons comme à un jeu de précision supérieure.
Une frise d’enfants, qui jouent avec l’armure du Dieu Mars, mérite aussi d’être mentionnée. […] Et c’était à l’Euchre que jouaient ces deux gentlemen, à bord d’un bateau sur le Mississipi, quand un spectateur, scandalisé de la fréquence avec laquelle un des joueurs tournait le valet, prit la liberté d’avertir l’autre joueur que le gagnant prenait les cartes de dessous. […] Il personnifie ses abstractions et leur fait jouer des pièces devant vous. […] Stephen Phillips, qui a récemment joué le rôle du Fantôme dans Hamlet au Théâtre du Globe, avec une dignité et un talent de diction si admirables ; et M. […] Ô chevelure avec laquelle j’ai joué dans cette demeure !
Mlle Necker lisait donc des livres au-dessus de son âge, allait à la comédie, en faisait des extraits au retour ; plus enfant, son principal jeu avait été de tailler en papier des figures de rois et de reines, et de leur faire jouer la tragédie : ce furent là ses marionnettes comme Goëthe eut les siennes. […] Les défenseurs d’un goût exclusif et d’une langue fixe jouent exactement en littérature un rôle de tories ; ils sont pour une cause qui se perd journellement. […] Sur cette circonférence qu’elle décrit et qu’elle essaye d’entamer, sa marche inégale avec ses amis devient une stratégie savante ; c’est comme une partie d’échecs qu’elle joue contre Bonaparte et Fouché représentés par quelque préfet plus ou moins rigoriste. […] On jouait souvent à Coppet des tragédies, des drames, ou les pièces chevaleresques de Voltaire, Zaïre, Tancrède si préféré de Mme de Staël, ou des pièces composées exprès par elle ou par ses amis. […] Zacharias Werner, l’un des originaux de cette cour, et dont on jouait l’Attila et les autres drames avec grand renfort de dames allemandes, Werner écrivait vers ce temps (1809) au conseiller Schneffer (nous atténuons pourtant deux ou trois traits, auxquels l’imagination, malgré lui sensuelle et voluptueuse, du mystique poëte, s’est trop complu) : « Mme de Staël est une reine, et tous les hommes d’intelligence qui vivent dans son cercle ne peuvent en sortir, car elle les y retient par une sorte de magie.
On comprend dès lors la pensée dont Valéry a animé ce lui-même hyperbolique que, sous le nom de Léonard ou de Teste, il a transporté sur les confins où se joue l’expérience suprême la plus analogue peut-être à celle de l’élan créateur originel. « Je n’apprécie en toutes choses, dit Teste, que la facilité ou la difficulté de les connaître, de les accomplir. […] Valéry appelle ici moments suprêmes de la vie « ceux où la pensée se joue seulement à exister », et il dit en avoir connu en octobre 1893. […] Le poète joue en interprète d’un public, et il trouve un public, un public organique qu’il pénètre en bloc, qu’il anime et enthousiasme en masse. […] Où Kant, assez naïvement, peut-être, avait cru voir la Loi Morale, Mallarmé percevait sans doute l’impératif d’une poésie : une Poétique. » L’intuition n’a pas pris ici de forme poétique, mais nous voyons déjà sur quels tableaux elle joue : deux tableaux contraires, être et non-être, et le ciel d’étoiles porté indifféremment au compte de l’un ou au compte de l’autre, chacun de ces tableaux logiques détruit logiquement par l’autre, et leur réalité pour le poète comme leur réalité pour le physicien consistant dans un ordre ou une nature de relations. […] La Jeune Parque ne comportait qu’un être, en lequel tout le drame du monde se jouait.
Une Europe qui ne reconnaîtrait pas de droit public, ou qui ne le ferait pas respecter, serait une barbarie universelle ; le monde y serait joué aux dés tous les jours. […] Quelque chose de sardonique dans son sourire se mêlait, sur ses lèvres, à un désir visible de séduction ; ce sourire semblait indiquer en lui l’arrière-pensée de se jouer des hommes en les charmant ou en les gouvernant. […] Son hôtel, ou plutôt son palais, était plein, depuis l’atrium jusqu’au salon, d’une foule immense et somptueuse, dans tous les costumes, sous toutes les décorations de toutes les époques où il avait joué les grands rôles de la vie sociale, et rendu des services publics ou des services personnels à cette multitude de clients.
C’est une simple lettre en vers qu’il écrit à des amis ; et ce cadre, où il peut se jouer à son gré, lui convient à merveille. […] « Quand on suppose que les gens ne vous comprendront pas, si l’on ne prend la peine de leur tout expliquer, on se donne beaucoup de mouvement, comme ces mauvais mimes qui pirouettent sur eux-mêmes pour imiter un disque qui tourne, ou qui tirent à eux le Coryphée quand ils jouent, aux sons de la flûte, la Scylla attirant les navires sur l’écueil. […] Telle est la portée véritable de la dialectique platonicienne ; c’est là ce qui lui assigne le grand rôle qu’elle joue dans l’histoire de la philosophie.