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1001. (1855) Louis David, son école et son temps. Souvenirs pp. -447

Un an après qu’elle fut entreprise, Moreau, dont le talent en architecture était tout à fait recommandable, saisit fort raisonnablement l’occasion qui lui fut offerte de reconstruire l’intérieur de la salle du Théâtre-Français (de la République alors) rue Richelieu. […] Mais quelles pouvaient être la figure et les allures d’une dame de la haute société, qui prenait le parti d’étudier sérieusement la peinture dans un atelier situé dans le Louvre, dont on a eu l’occasion de faire connaître les dispositions intérieures ? […] Ce ne fut même qu’en faisant un grand effort sur lui qu’il parvint à se rendre maître de l’agitation intérieure qu’il éprouva en ce moment. […] Non content de ce genre d’exactitude, David poussa la recherche jusqu’à présenter exactement le costume romain dans les vêtements, dans la décoration intérieure de l’appartement, et jusque dans les meubles, dont il fit faire des modèles, qui déjà ont été signalés en donnant la description de l’atelier des Horaces. […] Prodigue ou économe jusqu’à l’excès, il avait fait bâtir une fort grande maison dont l’intérieur n’a jamais été décoré ni même meublé.

1002. (1896) Journal des Goncourt. Tome IX (1892-1895 et index général) « Année 1894 » pp. 185-293

Lundi 26 février À l’anarchique heure présente, dans les maisons où les magistrats ont un appartement, il y a une porte intérieure en glace fermée, qu’ouvre seule la portière. […] Dimanche 29 avril Cette noire envie produite par la détention de l’argent, chez quelques-uns, nous faisait rabâcher, Daudet et moi, que ce n’était pas l’argent, qui apportait à la vie les jouissances intérieures intraduisibles, que ces jouissances étaient produites par une bouteille de vin médiocre, le jour où on avait soif, par l’abandon entre vos bras d’une femme, qu’on n’achetait pas, et, mon Dieu, quelquefois simplement par une matinée de beau temps dans la campagne, par du soleil, par de l’air grisant, dans l’alacrité du physique et du moral, en bonne santé et en joie. […] Il nous peignait aujourd’hui Fénéon, cet original né en Italie, et ayant l’aspect d’un Américain, un être intelligent, travaillant à se faire une tête, cherchant l’étonnement des gens par une parole axiomatique, une comédie de concentration intérieure, une série de petites actions et manifestations mystificatrices, — mais un homme de cœur, bon, sensible, appartenant tout entier aux excentriques, aux disgraciés, aux miséreux. […] L’autre, non signé, un dessin influencé par l’art chinois, une étude d’une princesse dans son intérieur, et que Hayashi attribue à Yukinobou.

1003. (1898) La cité antique

Cette divinité intérieure, ou, ce qui revient au même, la croyance qui est dans l’âme humaine, voilà l’autorité la moins discutable. […] Il était dans l’intérieur de sa famille l’unique magistrat. […] Ces dieux vivaient dans l’intérieur de chaque maison : l’homme a donc aimé sa maison, sa demeure fixe et durable, qu’il tenait de ses aïeux et qu’il léguait à ses enfants comme un sanctuaire. […] Elle a sa justice intérieure au-dessus de laquelle il n’en est aucune autre à laquelle on puisse appeler. […] Elle n’avait rien à voir dans l’intérieur d’une famille ; elle n’était pas juge de ce qui s’y passait ; elle laissait au père le droit et le devoir de juger sa femme, son fils, son client.

1004. (1864) Études sur Shakespeare

Les démêlés de l’Angleterre avec les cours de Rome et de Madrid, quelques conspirations intérieures et les sévérités qu’elles entraînèrent, élevaient successivement, entre les deux partis, de nouveaux motifs d’animosité ; cependant l’intérêt religieux dominait si peu tous les sentiments qu’en 1569 Élisabeth, l’enfant de la réforme, mais précieuse à ses peuples comme le gage du repos et du bonheur public, trouva la plupart de ses sujets catholiques pleins d’ardeur pour l’aider à réprimer la révolte catholique d’une portion du nord de l’Angleterre. […] Qui ne voudrait remonter à la source des premières inspirations d’un génie original, pénétrer dans le secret des causes qui ont dirigé ses forces naissantes, le suivre pas à pas dans ses progrès, assister enfin à toute la vie intérieure d’un homme qui, après avoir, dans son pays, ouvert à la poésie dramatique la route qu’elle n’a point quittée, y marche encore le premier et presque le seul ? […] Qu’Aristophane attaque, avec la plus fantastique liberté d’imagination, les vices ou les folies des Athéniens ; que Molière retrace les travers de la crédulité, de l’avarice, de la jalousie, de la pédanterie, de la frivolité des cours, de la vanité des bourgeois, et même ceux de la vertu ; peu importe la diversité des sujets sur lesquels se sont exercés les deux poëtes ; peu importe que l’un ait livré au théâtre la vie publique et le peuple entier, tandis que l’autre y a porté les incidents de la vie privée, l’intérieur des familles et les ridicules des caractères individuels : cette différence de la matière comique provient de la différence des siècles, des lieux, des civilisations, mais pour Aristophane comme pour Molière, les réalités sont toujours le fond du tableau ; les mœurs et les idées de leur temps, les vices et les travers de leurs concitoyens, la nature et la vie de l’homme enfin, c’est toujours là ce qui provoque et alimente leur verve poétique. […] Si ce ne sont pas là de pures formes de langage employées peut-être dans des occasions bien différentes de celles qu’elles paraissent indiquer, le sentiment qui occupait ainsi la vie intérieure du poëte était aussi orageux que passionné. […] Au lieu de ces cerveaux électriques, prompts à communiquer l’étincelle qu’ils ont reçue, au lieu de ces hommes ardents et simples dont les projets, comme ceux de Macbeth, « passent aussitôt dans leurs mains », le monde offre maintenant au poëte des esprits pareils à celui de Hamlet, profonds dans l’observation de ces combats intérieurs que notre système classique a puisés dans un état social déjà plus avancé que celui du temps où vécut Shakespeare.

1005. (1913) Poètes et critiques

Il continua par d’éclatantes peintures de paysages ou d’intérieurs dans l’Extrême-Orient et il les rassembla, comme des pages d’album pleines d’inattendu ou même d’inédit, dans trois volumes que le public accueillit aussitôt avec une faveur marquée : a Société Japonaise ; — Les Journées et les Nuits Japonaises ; — En Escale ; De Ceylan aux Philippines. […] Maintenant supposez l’équilibre rompu entre ces deux pouvoirs mystérieux, qui sont comme le flux et le reflux de la vie intérieure chez les Suédois ; donnez la prédominance à « ce désir qui nous porte à sortir de nous », et vous aurez des révoltés contre les conventions sociales, à la façon du romantique Almqvist. […] Giraud nous découvre le fond de cette nature morale, par l’interprétation de l’attitude « intérieure » de Taine à l’égard de la religion. […] Très ordonné presque sans intention, et d’une composition rendue dramatique avec un minimum d’arrangement par la seule suite des événements de la vie intérieure, ce recueil de poèmes, pour la plupart excellents, aurait dû susciter le zèle d’un éditeur intelligent ou animé de quelque bon vouloir. […] Loin de lui, près de lui, tout vit d’une vie intérieure et dont il a, pour la première fois, surpris le secret : Le piano que baise une main frêle Luit dans le soir rose et gris vaguement ; Tandis qu’avec un très léger bruit d’aile Un air bien vieux, bien faible et bien charmant, Rôde discret, épeuré quasiment, Par le boudoir longtemps parfumé d’Elle.

1006. (1911) Nos directions

L’acte du poète est intérieur à son chant ; le but de son chant n’est pas l’acte, mais son chant même. […] Paul Claudel prête son langage à des êtres, et ils existent davantage à mesure qu’ils s’expriment mieux ; leur drame intérieur porte la beauté de la phrase ; jamais la phrase ne les détourne du conflit. […] Je ne parle pas d’Iphigénie, œuvre neutre, glacée, sans vie intérieure, sans nécessité. […] Rien que l’octosyllabe et privé de la rime — nouvel indice de macération — : le mètre le plus mécanique qui soit, et le moins susceptible de modulations intérieures. […] Sous le pittoresque, sous l’accessoire, va périr étouffé le drame intérieur !

1007. (1875) Premiers lundis. Tome III « De la liberté de l’enseignement »

Ce n’est pourtant que depuis 89, depuis cette ère historique, où tout s’est retrempé et d’où nous datons, que le libre examen, l’exercice de la pensée, cet exercice non pas simplement intérieur, mais se produisant au dehors en des termes de discussion convenable et sérieuse, est devenu de droit commun ; il l’est devenu surtout pour les régimes qui se font honneur d’inscrire 89 dans leur acte de naissance et dans leur titre de légitimité. […] Et en le nommant ainsi je voudrais éviter, quoique cela soit bien difficile, de nommer et d’indiquer l’Église spirituelle ; je voudrais séparer tous ces esprits, toutes ces âmes respectables et intérieures, tous ces croyants qui ne vivent que du suc intime du christianisme et dont la vie est soumise à des préceptes de douceur et de charité ; — et ce n’est pas ici un hommage d’apparat que je leur rends : j’ai le bonheur d’en compter plusieurs pour amis, et à travers les dissidences de la pensée, je n’ai jamais cessé de sympathiser avec eux par le cœur ; — mais il faut bien le dire, des circonstances récentes, des déterminations politiques qui étaient peut-être nécessaires, ont donné aux hommes actifs et d’humeur ingérante, aux meneurs politiques qui dirigent le parti, des encouragements et des espérances qui, dans leur exaltation bruyante et leur redoublement fiévreux, sont faits pour inspirer des craintes, — non pas de l’effroi, — et pour inquiéter du moins ceux de mon âge, qui, se souvenant des misérables luttes du passé, voudraient en prévenir le retour.

1008. (1861) Cours familier de littérature. XI « LXIe entretien. Suite de la littérature diplomatique » pp. 5-79

Comment se fait-il que, dans l’intérieur même de l’Asie Mineure, jusqu’aux pieds du Taurus, les villages chrétiens soient mêlés aux villages turcs, de telle sorte que le voyageur a peine à savoir laquelle des deux populations domine l’autre en nombre, en autorité, en richesse, dans toutes ces parties de l’empire ? […] L’inviolabilité des régimes intérieurs des peuples chez eux est le droit commun : le droit des peuples, le droit des républiques, le droit des théocraties, je dirai plus, le droit du destin.

1009. (1867) Cours familier de littérature. XXIII « cxxxviie entretien. Un intérieur ou les pèlerines de Renève »

Un intérieur ou les pèlerines de Renève Monceaux, 19 septembre 1865 I Tous mes biens sont vendus ou engagés jusqu’au dernier centime de leur valeur pour payer mes dettes. […] Elle suivit la petite vallée de prairies domestiques où paissaient les vaches des bonnes demoiselles Bruys, jadis les protectrices aimées du village, puis, tournant à droite, sans hésitation, à l’angle d’un mur en ruines, elle tira un morceau de fil de fer caché dans une fente de la muraille intérieure, la porte s’ouvrit et nous nous trouvâmes dans le jardin de l’abbé Dumont, à côté de l’allée des tulipes.

1010. (1868) Cours familier de littérature. XXVI « CLVIe Entretien. Marie Stuart (reine d’Écosse) »

Le jeune Darnley, fils du comte Lenox, exclurait les princes étrangers dont la domination menacerait l’indépendance de l’Écosse et plus tard peut-être de l’Angleterre ; il donnerait à la reine un gage de bonne harmonie intérieure et de foi commune au catholicisme ; il plairait aux Anglais, car sa maison avait des biens immenses en Angleterre et habitait Londres ; enfin, il conviendrait aux Écossais, car il était Écossais de sang et de race, et les nobles d’Écosse se surbordonneraient plus volontiers à un de leurs plus grands compatriotes qu’à un Anglais ou à un étranger. […] Elle viola les convenances de l’étiquette presque sacrée du temps jusqu’à l’admettre seul à sa table, dans ses appartements intérieurs ; elle supprima le nom du roi des actes publics, pour y faire apposer le nom de Rizzio.

1011. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre II. La première génération des grands classiques — Chapitre III. Pascal »

Il fallut des freins intérieurs pour retenir l’âme avec son propre consentement et l’empêcher de glisser dans l’impiété scandaleuse. […] Par l’une, il soumettait à Dieu la vie intérieure de l’individu, par l’autre, la conduite universelle du monde ; par l’une et l’autre, il faisait échec à la raison et la courbait sous une force divine, impénétrable et irrésistible.

1012. (1883) Souvenirs d’enfance et de jeunesse « Chapitre III. Le Petit Séminaire Saint-Nicolas du Chardonnet (1880) »

Toute circonstance de la vie intérieure de la maison, tout événement personnel au supérieur ou à l’un des élèves, était l’occasion d’un entretien rapide, animé. […] » retentît à mon oreille intérieure avec une persistance invincible.

1013. (1887) Revue wagnérienne. Tome II « Paris, le 8 mai 1886. »

A l’origine, notre âme éprouve des sensations, phénomènes de plaisir ou de peine : et c’est les diverses couleurs, résistances, odeurs, ou sonorités, toutes choses que nous croyons des qualités externes, et qui sont, uniquement, des états intérieurs de l’esprit. […] La scène a été vue par un artiste qui l’a voulu recréer franchement : elle nous console des nombreuses illustrations techniques : intérieurs d’usines, équipes d’ouvriers, etc., que nous étalent là, sous le prétexte de naturalisme, MM. 

1014. (1908) Dix années de roman français. Revue des deux mondes pp. 159-190

Tandis qu’ils se livrent au démon intérieur qui fixe à leur activité un but, une pensée d’apostolat, de solidarité ou d’enseignement, d’autres, très nombreux, continuent à n’écrire que pour faire œuvre d’art, à ne conter que pour le plaisir de conter. […] Qui pourrait ne pas trouver qu’il est beau d’étudier une intelligence aux prises avec les problèmes les plus vivants qui soient : la dépense prodigieuse d’énergie que suppose une affaire prospère ; la lutte contre la concurrence, et les angoisses, et l’orgueil des triomphes rapides ; l’obéissance d’un personnel nombreux aux ordres d’un seul homme : ces milliers d’industries qui sont autant de petits États dans l’État, ayant chacun sa politique extérieure et intérieure, sa dynastie, ses drames ?

1015. (1906) La nouvelle littérature, 1895-1905 « Deuxième partie. L’évolution des genres — Chapitre II. La poésie lyrique » pp. 81-134

Charles Guérin, avec le Cœur solitaire, le Semeur de Cendres et l’Homme intérieur a écrit la plus parfaite des œuvres de sensibilité qui, depuis Samain, Verlaine et Musset, ait gémi, près de nos cœurs. […] Hélène, le Jasmin se ressentent plus des lakistes et de Shelley que d’un mouvement intérieur spontané.

1016. (1888) Petit glossaire pour servir à l’intelligence des auteurs décadents et symbolistes « Petit glossaire »

Le Colisée… l’intérieur circuitant s’évase de gradins en gradins, bâille comme une gueule. […] Tracer à l’intérieur d’une figure, une autre figure telle que le sommet de tous les angles de celle-ci touche le périmètre de celle-là.

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