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323. (1896) Matière et mémoire. Essai sur la relation du corps à l’esprit « Résumé et conclusion »

De toutes les associations qu’on pourrait imaginer, les associations par ressemblance et par contiguïté sont donc d’abord les seules qui aient une utilité vitale. […] 1º Si l’on imagine d’un côté une étendue réellement divisée en corpuscules, par exemple, de l’autre une conscience avec des sensations par elles-mêmes inextensives qui viendraient se projeter dans l’espace, on ne trouvera évidemment rien de commun entre cette matière et cette conscience, entre le corps et l’esprit. […] Supposez en effet que les qualités des choses se réduisent à des sensations inextensives affectant une conscience, en sorte que ces qualités représentent seulement, comme autant de symboles, des changements homogènes et calculables s’accomplissant dans l’espace, vous devrez imaginer entre ces sensations et ces changements une incompréhensible correspondance.

324. (1925) Méthodes de l’histoire littéraire « III. Quelques mots sur l’explication de textes »

D’autres appellent « lecture » leur habitude de rêver sur les pages d’un livre, où ils s’imaginent parfois avoir trouvé, comme Diderot, ce qui n’a jamais été que le jeu de leur fantaisie ou l’émotion de leur cœur. […] Parfois on s’imagine qu’il s’agit de dire n’importe quoi, pourvu qu’on dise quelque chose.

325. (1899) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Septième série « « L’amour » selon Michelet » pp. 47-66

Dans le chapitre : La Mouche et l’Araignée, cherchant comment elle peut être amenée à la faute, il n’ose imaginer que deux cas : si elle tombe, — c’est qu’une perfide amie avait résolu de la faire tomber, la pauvre petite ; — ou c’est que, de très bonne foi, elle voulait, la chère enfant, servir les intérêts de son mari… Et pour elle Michelet imagine des fractions de responsabilité morale.

326. (1911) La valeur de la science « Première partie : Les sciences mathématiques — Chapitre I. L’intuition et la logique en Mathématiques. »

C’est que quand nous cherchons à imaginer une courbe, nous ne pouvons pas nous la représenter sans épaisseur ; de même, quand nous nous représentons une droite, nous la voyons sous la forme d’une bande rectiligne d’une certaine largeur. Nous savons bien que ces lignes n’ont pas d’épaisseur ; nous nous efforçons de les imaginer de plus en plus minces et de nous rapprocher ainsi de la limite ; nous y parvenons dans une certaine mesure, mais nous n’atteindrons jamais cette limite.

327. (1890) L’avenir de la science « XXI »

Au premier moment, elle est en apparence imparfaite, et on s’imagine trop facilement que, quand viendra la période de calme et d’organisation paisible, elle produira des merveilles. […] Une des plus nobles morts qui se puissent imaginer est celle du curieux, indifférent à sa fin pour n’être attentif qu’à la levée de rideau qui va se faire et aux grands problèmes qui vont se dénouer pour lui.

328. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre XVII. Forme définitive des idées de Jésus sur le Royaume de Dieu. »

» Par une illusion commune à tous les grands réformateurs, Jésus se figurait le but beaucoup plus proche qu’il n’était ; il ne tenait pas compte de la lenteur des mouvements de l’humanité ; il s’imaginait réaliser en un jour ce qui, dix-huit cents ans plus tard, ne devait pas encore être achevé. […] Et ne dites pas que c’est là une interprétation bienveillante, imaginée pour laver l’honneur de notre grand maître du cruel démenti infligé à ses rêves par la réalité.

329. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Mémoires touchant la vie et les écrits de Mme de Sévigné, par M. le baron Walckenaer. (4 vol.) » pp. 49-62

supposez un moment qu’après tout à l’heure deux siècles, d’Hacqueville soit revenu au monde, qu’il se mette à se ressouvenir de ce temps-là, à nous entretenir de Mme de Sévigné et de ses amis, à vouloir tout nous dire et ne rien oublier ; imaginez le récit intime, abondant, interminable, que cela ferait, un récit doublé et redoublé de circuits sans nombre et de toutes sortes de parenthèses ; ou, mieux encore, imaginez une promenade que nous ferions à Saint-Germain ou à Versailles en pleine cour de Louis XIV, avec d’Hacqueville pour maître des cérémonies et pour guide : il donne le bras à Mme de Sévigné, mais il s’arrête à chaque pas, avec chaque personne qu’il rencontre, car il connaît tous les masques, il les accoste un à un, il les questionne pour mieux nous informer ; il revient à Mme de Sévigné toujours, et elle lui dirait : « Mais, les d’Hacqueville, à ce train-là, nous n’en sortirons jamais. » C’est tout à fait l’idée qu’on peut prendre du livre de M. 

330. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Journal de la campagne de Russie en 1812, par M. de Fezensac, lieutenant général. (1849.) » pp. 260-274

Personne, en les voyant, n’aurait pu s’imaginer combien les soldats avaient souffert et combien ils souffraient encore. […] Xavier de Maistre, j’imagine, en présence de semblables scènes, ne les aurait pas senties autrement.

331. (1761) Apologie de l’étude

N’imaginons pourtant pas, car il ne faut point s’exagérer ses propres maux, que le bonheur soit incompatible avec la culture des lettres. […] Pourquoi, par exemple, avez-vous imaginé qu’en feuilletant, étudiant, compilant des livres de métaphysique, vous y trouveriez des lumières sur tant de questions, moitié creuses, moitié sublimes, l’écueil éternel de tous les philosophes passés, présents et futurs ?

332. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « De Stendhal »

La fortune de la Correspondance, c’est qu’on s’imagine voir son visage. On s’imagine que dans cette vie journalière, facile, dénouée, dont cette correspondance est l’histoire, il avait mis son masque sur la table et dit bravement à ses amis, pendant que le monde avait le dos tourné : « Tenez !

333. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « Stendhal » pp. 43-59

La fortune de la Correspondance, c’est qu’on s’imagina voir son visage. On s’imagina que, dans cette vie journalière, facile, dénouée, dont cette Correspondance est l’histoire, il avait mis son masque sur la table et dit bravement à ses amis, pendant que le monde avait le dos tourné : « Tenez, Maintenant, regardez-moi ! 

334. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « APPENDICE. — M. SCRIBE, page 118. » pp. 494-496

Je m’imagine que M.

335. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — B — Bouilhet, Louis (1821-1869) »

On imaginera volontiers que c’était lui le mandarin.

336. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Deuxième partie. Ce qui peut être objet d’étude scientifique dans une œuvre littéraire — Chapitre VII. Objections à l’étude scientifique d’une œuvre littéraire » pp. 81-83

Descartes a imaginé sa théorie des tourbillons qui a fait loi pendant près de cent ans, qui a perdu ensuite toute l’autorité pour retrouver aujourd’hui, dit-on, quelque créance : personne songera-t-il pour cela à rayer l’astronomie du nombre des sciences ?

337. (1913) Le bovarysme « Première partie : Pathologie du bovarysme — Chapitre VII. Le Bovarysme essentiel de l’existence phénoménale »

C’est avec ses sensations qu’il construit ses perceptions, c’est-à-dire qu’il situe dans l’espace et hors de lui, à l’occasion de ses propres modifications, des causes imaginées, matérielles et sensibles, de ces changements où il se possède.

338. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome I « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Horace, et les mauvais écrivains du siècle d’Auguste. » pp. 63-68

On ne peut rien imaginer de plus parfait qu’Horace, dans les genres qu’il a choisis.

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