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2527. (1888) Revue wagnérienne. Tome III « VII »

Mais cette inspiration musicale elle-même était née d’une inspiration poétique ; elle ne se « condensait », elle ne devenait saisissable, qu’à mesure que le drame prenait forme, que ses acteurs se détachaient clairement, se mouvaient, parlaient dans l’imagination de l’auteur.

2528. (1888) Revue wagnérienne. Tome III « VIII »

Et en prenant pour exemple la symphonie du Dante de Liszt, il démontre comment un auditoire qui n’existe que dans l’imagination de l’artiste peut l’influencer pour créer une œuvre qu’il lui aurait été impossible de faire, si jamais l’idée d’un public réel avait traversé son esprit.

2529. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome premier — Livre deuxième. L’émotion, dans son rapport à l’appétit et au mouvement — Chapitre premier. Causes physiologiques et psychologiques du plaisir et de la douleur »

C’est que, devant l’immensité du ciel, de la mer ou de la montagne, la possibilité d’apercevoir l’ensemble, d’embrasser tout du regard ou même de l’imagination nous est enlevée ; mais, par un effort supérieur de la pensée, nous concevons l’infini et anéantissons l’obstacle matériel devant l’idée intellectuelle.

2530. (1856) Cours familier de littérature. II « XIIe entretien » pp. 429-507

Mais nos conjectures personnelles sur l’œuvre de Job ne sont pas, comme on pourrait le croire, de fantastiques excursions de l’imagination ; elles sont motivées et autorisées pour nous par une étude de trente ans des traditions, des histoires des monuments, des philosophies et des poésies de l’Orient primitif.

2531. (1870) De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés « De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés — Chapitre IX : Insuffisance des documents géologiques »

De sorte qu’à moins de supposer que des naturalistes aussi éminents ont été égarés par leur imagination, et que ces espèces tertiaires récentes ne présentent réellement aucune différence avec leurs représentants vivants, ou à moins d’admettre que la grande majorité des naturalistes ont tort, et que les espèces tertiaires sont toutes très distinctes des espèces vivantes, nous avons la preuve que de légères modifications de formes, telles que la théorie les requiert, se sont effectuées.

2532. (1896) Matière et mémoire. Essai sur la relation du corps à l’esprit « Chapitre III. De la survivance des images. La mémoire et l’esprit »

La doctrine qui fait de la mémoire une fonction immédiate du cerveau, doctrine qui soulève des difficultés théoriques insolubles, doctrine dont la complication défie toute imagination et dont les résultats sont incompatibles avec les données de l’observation intérieure, ne peut donc même pas compter sur l’appui de la pathologie cérébrale.

2533. (1863) Histoire de la vie et des ouvrages de Molière pp. -252

L’auteur de La Jeunesse de Molière reprendra quelque jour son bien, espérons-le, et nous donnera une Histoire sans imaginations, une Histoire véridique et définitive. […] Taschereau. » Nous n’avions jamais songé à coup sûr à adresser à son imagination un pareil reproche. […] Il ne fallait, pour servir à ces entretiens, ni bon sens, ni mémoire, ni la moindre capacité ; il fallait de l’esprit, non pas du meilleur, mais de celui qui est faux et où l’imagination a le plus de part. » Les usages de ces coteries n’étaient pas moins bizarres que les discours qui s’y tenaient. […] Plus tard Molière, justement effrayé du nombre de ses ennemis, voulant en éclaircir les rangs et lever les derniers obstacles qu’on opposait encore au Tartuffe, sembla proposer la paix aux médecins : « La médecine, dit-il en 1669, dans la Préface de ce dernier chef-d’œuvre, est un art profitable, et chacun la révère comme une des plus excellentes choses que nous ayons ; et cependant, il y a eu des temps où elle s’est rendue odieuse, et souvent on en a fait un art d’empoisonner les hommes. » Mais, soit que le souvenir de ses précédentes attaques eût porté la Faculté à demeurer sourde à ces paroles de paix, soit qu’il se fût ensuite effrayé de nouveau du dangereux empire des médecins et de leur ignorance, il attaqua dans une autre de ses comédies, Le Malade imaginaire, et cette confiance aveugle qui a sa source dans notre frayeur de la mort, et cet amour démesuré de la vie qui fait découvrir aux gens les mieux portants mille maladies mortelles, enfants de leur imagination. […] Voltaire la cite comme un modèle de grâce ; Bret y voit le type de toutes les pièces de Saint-Foix ; mais on a fait observer avec raison que Le Sicilien a sur les ouvrages de ce dernier auteur le mérite de la vraisemblance et du naturel, ce qui est bien quelque chose aux yeux des gens dont l’imagination n’est pas assez facile aux illusions pour les transporter dans la grotte d’une fée ou dans le séjour enchanté d’une divinité.

2534. (1898) La cité antique

Le contemporain de Cicéron (je parle surtout de l’homme du peuple) a l’imagination pleine de légendes ; ces légendes lui viennent d’un temps très antique et elles portent témoignage de la manière de penser de ce temps-là. […] On ne peut pas raisonnablement supposer qu’une religion de ce caractère ait été révélée aux hommes par l’imagination puissante de l’un d’entre eux ou qu’elle leur ait été enseignée par une caste de prêtres. […] Il arriva à la longue que, la divinité d’une famille ayant acquis un grand prestige sur l’imagination des hommes et paraissant puissante en proportion de la prospérité de cette famille, toute une cité voulut l’adopter et lui rendre un culte public pour obtenir ses faveurs. […] Il est vrai que cette grande vénération s’affaiblit de bonne heure en Grèce, parce que l’imagination grecque se laissa entraîner du côté des plus beaux temples, des plus riches légendes et des plus belles statues. […] Il importait assez peu que la croyance changeât : elle pouvait se modifier librement à travers les âges et prendre mille formes diverses, au gré de la réflexion des sages ou de l’imagination populaire.

2535. (1884) La légende du Parnasse contemporain

Et sa gloire ne sera pas bornée par les ans, parce que la merveilleuse exubérance de son imagination accepte les justes règles qui sont une gêne pour les faibles, une aide pour les forts. […] Misérable confusion entre les choses du cœur qui appartiennent à tous, et la rare faculté de les exprimer idéalisées par l’imagination ! […] À quoi bon, en effet, ces voûtes azurées qui ne servent à rien, qu’à défrayer les imaginations maladives des derniers songe-creux ?

2536. (1853) Propos de ville et propos de théâtre

L’imagination qu’on avait employée dans cette circonstance devenait alors une sorte de garantie qui le faisait bien augurer de la pièce qu’on venait lui présenter. […] Virmaître, obligé de convenir que les petits crétins du père Saint-Aime avaient un peu plus d’imagination que les autres, se montra disposé à leur faire quelques concessions. […] « J’ai reçu le coup de poing », me disait un jour en se frappant la poitrine un ouvrier dont l’imagination venait d’être vivement frappée par un grand spectacle. — Cette figure brutale rend parfaitement la nature de l’étonnement que m’a causé la vue de cette ville, où le gigantesque paraît se multiplier lui-même.

2537. (1894) La bataille littéraire. Cinquième série (1889-1890) pp. 1-349

Les pères qui tuent leurs filles, les femmes qui égorgent leurs maris, les frères, les fils incestueux et assassins, les mères féroces remplissent le théâtre antique, et nos imaginations n’iront jamais plus loin que ce que disent les seuls noms des Atrides, d’Agamemnon, de Clytemnestre, d’Oreste, d’Égisthe, d’Atrée et Thyeste et de tant d’autres. […] « Laisse-moi cependant te dire encore que, là aussi, avec ton imagination passionnée, tu dois aller au-delà de ce qui est. […] Flammarion n’emploie ni les grandes phrases, ni les grands mots ; il met sa haute science au service de tous les âges de l’intelligence, et en même temps qu’il parle à ceux pour qui sont venues les années, il se fait comprendre des jeunes gens et des femmes ; il a su rendre attrayant l’au-delà si inquiétant de la vie, et cela rien qu’en ouvrant une porte sur cette féerie qui s’appelle la nature qui défie toutes les imaginations humaines. […] Cela contente en général l’écrivain du registre, il saisit la syllabe que je lui livre, et il brode ce simple thème avec plus ou moins d’imagination, selon qu’il est ou n’est pas homme de goût.

2538. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Le Chevalier de Méré ou De l’honnête homme au dix-septième siècle. »

Si l’on cherche maintenant ce que Pascal a pu penser de ce chevalier qui le régentait si rudement, il est difficile de ne pas croire qu’il a eu en vue M. de Méré dans la définition qu’il donne des esprits fins par opposition aux esprits géométriques , de ces « esprits fins qui ne sont que fins, qui, étant accoutumés à juger les choses d’une seule et prompte vue, se rebutent vite d’un détail de définition en apparence stérile et ne peuvent avoir la patience de descendre jusqu’aux premiers principes des choses spéculatives et d’imagination, qu’ils n’ont jamais vues dans le monde et dans l’usage. » On retrouve presque en cet endroit de Pascal les termes mêmes du chevalier et sa prétention perpétuelle à dénigrer la géométrie, sous prétexte qu’un coup d’œil habile suffît à tout36.

2539. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre deuxième. Les mœurs et les caractères. — Chapitre I. Principe des mœurs sous l’Ancien Régime. »

Voilà le spectacle qu’il faudrait voir, non par l’imagination et d’après des textes incomplets, mais avec les yeux et sur place, pour comprendre l’esprit, l’effet, le triomphe de la culture monarchique ; dans une maison montée, le salon est la pièce principale ; et il n’y en eut jamais de plus éblouissant que celui-ci.

2540. (1860) Cours familier de littérature. X « LIXe entretien. La littérature diplomatique. Le prince de Talleyrand. — État actuel de l’Europe » pp. 289-399

C’était, en effet, l’oracle de la destinée pour la dynastie de Napoléon et pour celle de la France, si Napoléon n’eût pas rêvé au lieu de réfléchir, et si l’expédition d’Alexandre le Grand chez les Scythes ne l’eût pas emporté à une campagne d’imagination à Moscou qui déconcertait jusqu’à son étoile.

2541. (1864) Cours familier de littérature. XVII « CIIe entretien. Lettre à M. Sainte-Beuve (2e partie) » pp. 409-488

Un poète véritable est trop vaste d’imagination pour se défaire de ses images, de son harmonie, et se résumer dans la prose.

2542. (1865) Cours familier de littérature. XX « CXXe entretien. Conversations de Goethe, par Eckermann (2e partie) » pp. 315-400

» La nature bien observée avait été le missionnaire de l’existence et de la bonté du Créateur suprême ; il ne doutait plus de rien, et sa piété, illuminée par sa puissante imagination, lui paraphrasait partout les phénomènes dans le catéchisme de la création.

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