Rodolphe Darzens La Muse noire, recueil comprenant des poèmes d’un rythme sur qui révèlent déjà, à travers l’admiration de l’auteur pour Baudelaire, une originalité curieuse, dont le caractère fut bientôt affirmé dans un livre ayant pour titre : Rosa mystica, où des pensées d’un ordre élevé sont exprimées en fort beaux vers.
Je monte au fort en terre, que l’on construit à Montretout. […] Le fort, il est encore dans la tête de l’officier du génie chargé de le construire. On entend des manœuvriers gouailleurs dire : « Le fort, il sera fini dans trois mois ! […] Un jour il y eut un fort dîner. […] La remarque est faite que le bruit des canons des forts ne s’entend plus, que c’est bon signe, que l’armée avance !
À plus forte raison rentraient-ils facilement dans ce joyeux oubli de tout grand débat où Élisabeth aimait à les entretenir. […] Doit-on s’étonner que cette imagination jeune et brillante se soit empressée d’errer à son plaisir dans de tels sujets, libre du joug des vraisemblances, dispensée de chercher des combinaisons sérieuses et fortes ? […] Pour expliquer l’humiliation du poëte, il faut supposer ou quelque scandale fort au-delà de l’usage, ou simplement un déshonneur particulier attaché aux désordres et à l’état de comédien. […] Rien n’indique qu’il eût été fort tourmenté de cette séparation. […] S’il faut en général que le fond de la tragédie soit pris dans l’histoire des grands et des puissants, c’est que les impressions fortes dont elle veut nous saisir ne peuvent guère nous être communiquées que par des caractères forts, incapables de succomber sous les coups d’une destinée ordinaire.
Michel, pourquoi pleures-tu, — pleures-tu si fort ? — Parce que je suis chargé de mille liens — et partagé entre trente-six États. — C’est pour cela que je pleure, — que je pleure si fort. […] On les mettait en prison, on les exilait : loin de se taire, ils reprenaient leur chant, plus âpre et plus fort. […] … Est-ce à cette intensité, trop forte pour un cœur humain, que de tels poètes durent d’échapper si tôt à la vie ? […] Les Allemands sont avides d’émotions fortes ; chez eux règne un sentimentalisme qui n’est le fait ni des Français, ni des Italiens.
Nulle image plus forte n’a peint l’excès des tourments qui déchirent l’orgueil écrasé. […] ne retrace-t-elle pas généralement la différence qui existe toujours entre le fort et le faible, entre l’heureux et le malheureux ? […] Le concurrent trace avec mollesse toutes ces fortes images ; sa touche n’appuie pas si bien sur elles. […] À plus forte raison, dans les arts et la poésie, les exemples n’accroissent pas le pouvoir de l’invention au-delà du vrai beau qu’accomplit un génie suprême. […] Il n’inventa ni les uns ni les autres, il les peignit tels qu’on les croyait ; seulement, sa forte imagination les réalisa mieux, et les agrandit encore.
C’est, en ce genre, ce qu’on a fait de plus fort depuis la Justice de Sully Prudhomme.
Charles Fuster C’est le livre d’un poète breton, qui aime son pays et qui en a gardé toutes les fortes et naïves croyances, la simplicité et la grandeur.
Si Racine, dans les vingt-six années environ qui forment sa pleine carrière depuis les Frères ennemis jusqu’à Athalie, avait eu le temps de voir une couple de révolutions politiques et littéraires, s’il avait été traversé deux fois par un soudain changement dans les mœurs publiques et dans le goût, il aurait eu fort à faire assurément, tout Racine qu’il était, pour soutenir cette harmonie d’ensemble qui nous paraît sa principale beauté : il n’aurait pas évité çà et là dans la pureté de sa ligne quelque brisure. […] A défaut d’un grand siècle qui demande avant tout l’établissement, la gradation et l’harmonie dans l’ensemble, on est une fort belle chose secondaire, une spirituelle et chaude entreprise très-variée, très-mêlée, très-infatigable, un coup de main, au moins amusant, dans tous les sens.
Ces races héroïques et musicales qui faisaient de si grandes choses, restaient sensibles jusqu’au plus fort de leurs passions publiques à la moindre note du poëte ou de l’orateur, et l’applaudissement soudain n’éclatait que là où la pensée tombait d’accord avec le nombre, là où l’oreille était satisfaite comme le cœur. […] Ceux qui seraient tentés d’accueillir avec sourire ce genre de recherches intimes, poursuivies par un homme de goût, peuvent être de bons et d’excellents esprits, mais ils ne sont pas entrés fort avant dans le secret du langage antique, et nous les renverrions pour se convaincre, s’ils en avaient le temps, à Denys d’Halicarnasse et aux traités de rhétorique de Cicéron.
Une certaine fraction du public paraissait s’attendre à un genre d’extraordinaire qui n’est pas venu ; cette sorte d’attention, nécessairement fort défavorable, lorsqu’elle a cherché à se porter et à se faire jour sur certains mots du dialogue, a été bientôt déjouée, car la suite ne répondait en rien à l’intention qu’on supposait voir percer et qu’on introduisait plus sottement encore que malignement. […] Quand le succès d’une pièce est contesté, c’est d’ordinaire au moment où l’acteur parvient à nommer l’auteur, que l’explosion du conflit est la plus forte.
Quand Goethe déclare que « Klopstock n’avait aucun goût, aucune disposition pour voir, saisir le monde sensible, et dessiner les caractères », quand il trouve ridicule cette ode où le poète suppose une course entre la Muse allemande et la Muse britannique, quand il ne peut supporter « l’image qu’offrent ces deux jeunes filles courant à l’envie à toutes jambes et les pieds dans la poussière » : à ce moment-là Goethe est moins content, moins heureux, il jouit moins du plaisir de vivre, du bonheur de sentir que madame de Staël, qui traduit avec enthousiasme cette même ode, et déclare fort heureux tout ce que Goethe trouve ridicule. […] On disputera fort et ferme de part et d’autre, sans que personne se rende… La comédie ne peut pas mieux finir, et nous ferons bien d’en demeurer là.
Et pour Pascal, comme pour Voltaire, acteurs et caractères ne sont que des cadres : ce n’est pas l’intérêt dramatique qu’ils cherchent, c’est la démonstration forte d’une vérité théologique ou philosophique. […] Dès qu’elle a eu fait sa petite fortune royale, elle a vu que cela même n’en valait pas la peine ; et elle est entrée fort sincèrement dans la voie du détachement.
L’invention chez lui n’était pas des plus fortes ; vous retrouvez dans toutes ses œuvres les traces de bien des auteurs, Shakespeare, Byron, Calderon, Schiller, puis Boccace, La Fontaine, Régnier, Ronsard, Marivaux, Béranger et tous nos vieux conteurs ; ce qui faisait dire à une femme d’esprit : Quand je lis M. de Musset , je crois toujours avoir lu cela quelque part. […] Lucrèce, et aussi dans l’éternel inassouvissement du désir, l’éternelle illusion renaissante ; ou encore que la mélancolie de l’amour lui a été parfois un acheminement aux mélancolies intellectuelles de son siècle, on sera fort près d’avoir tout dit.
Je vois à l’énormité de son succès deux causes, dont l’une (la plus forte) est son excellence, et dont l’autre est, sans doute, une lassitude du public et comme un rassasiement, après tant d’études psychologiques, tant d’historiettes d’adultères parisiens, tant de pièces féministes, socialistes, scandinaves ; toutes œuvres dont je ne pense, à priori, aucun mal, et parmi lesquelles il y en a peut-être qui contiennent autant de substance morale que ce radieux Cyrano, mais moins délectables à coup sûr, et dont on nous avait accablés ces derniers temps. […] Et très longuement j’envisage, Pour savoir si j’ai le cœur fort, Pour m’assurer de mon courage, La tristesse de votre sort.
Ils ont si fort senti combien il étoit difficile d’égaler cette touche mâle & vigoureuse ; cette versification aussi nombreuse que correcte ; cette tournure de pensées tantôt lumineuse & piquante, tantôt forte, pittoresque & majestueuse, qui caractérise ce Poëte, que leur amour-propre a pris le parti le plus facile, celui de le décrier.
L’abbé de Clairvaux y dénonça l’ouvrage qui l’avoit si fort révolté. […] Dans les processions, comme il marchoit devant moi, selon la coutume, j’admirois qu’un homme d’une aussi grande réputation s’abbaissât de la forte.