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17. (1767) Salon de 1767 « Peintures — La Grenée » pp. 90-121

Il avoit placé les deux vieillards à droite, sur le fond. […] Ce rideau du fond, si je m’en souviens bien, fait assez mal, et n’imite pas trop l’étoffe de soye. […] Tout à fait à gauche et sur le fond, la scène se termine par des arbres. […] Sur le fond Télémaque à deux genoux devant sa mère. […] Plus sur le fond, du même côté, une piramide.

18. (1885) Préfaces tirées des Œuvres complètes de Victor Hugo « Préfaces des recueils poétiques — Dédicace, préface et poème liminaire de « La Légende des siècles » (1859) — La vision d’où est sorti ce livre (1857) »

* Il n’est pas de brouillards, comme il n’est point d’algèbres, Qui résistent, au fond des nombres ou des cieux, À la fixité calme et profonde des yeux ; Je regardais ce mur d’abord confus et vague, Où la forme semblait flotter comme une vague, Où tout semblait vapeur, vertige, illusion ; Et, sous mon œil pensif, l’étrange vision Devenait moins brumeuse et plus claire, à mesure Que ma prunelle était moins troublée et plus sûre. […] La muraille semblait par le vent remuée ; C’étaient des croisements de flamme et de nuée, Des jeux mystérieux de clartés, des renvois D’ombre d’un siècle à l’autre et du sceptre aux pavois, Où l’Inde finissait par être l’Allemagne, Où Salomon avait pour reflet Charlemagne ; Tout le prodige humain, noir, vague, illimité ; La liberté brisant l’immuabilité ; L’Horeb aux flancs brûlés, le Pinde aux pentes vertes ; Hicétas précédant Newton, les découvertes Secouant leurs flambeaux jusqu’au fond de la mer, Jason sur le dromon, Fulton sur le steamer ; La Marseillaise, Eschyle, et l’ange après le spectre ; Capanée est debout sur la porte d’Électre, Bonaparte est debout sur le pont de Lodi ; Christ expire non loin de Néron applaudi. […] Et sur la vision lugubre, et sur moi-même Que j’y voyais ainsi qu’au fond d’un miroir blême, La vie immense ouvrait ses difformes rameaux ; Je contemplais les fers, les voluptés, les maux, La mort, les avatars et les métempsycoses, Et dans l’obscur taillis des êtres et des choses Je regardais rôder, noir, riant, l’œil en feu, Satan, ce braconnier de la forêt de Dieu. […] Sur la paroi sans fond de l’ombre épanouie Qui donc avait sculpté ce rêve où j’étouffais ? […] * Tandis que je songeais, l’œil fixé sur ce mur Semé d’âmes, couvert d’un mouvement obscur Et des gestes hagards d’un peuple de fantômes, Une rumeur se fit sous les ténébreux dômes, J’entendis deux fracas profonds, venant du ciel En sens contraire au fond du silence éternel ; Le firmament que nul ne peut ouvrir ni clore Eut l’air de s’écarter.

19. (1767) Salon de 1767 « Peintures — Beaufort » pp. 308-316

Un autre flagelle sur le fond. […] Entre Apollon et ces deux muses, sur le fond, assez proche d’Apollon, et vu de face, un petit faune en admiration. Voilà la scène, voyons le fond. […] Du même côté, plus encore sur le fond, un petit groupe de figures sur un bout de roche, assises et attentives. […] Au loin, à gauche sur le fond, par derrière le faune qui écoute Apollon, un voyageur qui passe et qui se soucie apparemment peu de musique.

20. (1889) L’art au point de vue sociologique « Chapitre septième. L’introduction des idées philosophiques et sociales dans la poésie. »

La poésie, c’est le regard jeté sur le fond, brumeux, mouvant et infini des choses. […] Mais, si le mystère ne peut être complètement éclaira, il nous est pourtant impossible de ne pas nous faire une représentation du fond des choses, de ne pas nous répondre à nous-mêmes dans le silence morne de la nature. […] L’extrême mal ne fait pas de bien. » De là à croire que c’est le mal qui fait le fond de l’existence, le bien qui en est l’accident, il n’y a pas loin. […] De Vigny y met sa dignité et y voit le fond de l’honneur même. […] Et de toutes les croyances naïves, de tous les beaux rêves puérils de l’humanité, nul ne redescendra du fond de l’infini bleu, grand ouvert sur nos têtes, et dont la profondeur est faite de solitude.

21. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XI. Gorini »

L’auteur de ce travail, M. l’abbé Sauveur Gorini, ne peut pas passer pour un écrivain dans le sens littéraire du mot, quoiqu’il ait souvent ce qui fait le fond de l’écrivain, — une manière de dire personnelle, — mais c’est un érudit, et un érudit d’une nouvelle espèce, venu en pleine terre, à la campagne, comme une fleur sauvage ou comme un poëte… Jusqu’ici vous aviez cru, n’est-ce pas ? […] de vocation, cette reine des miracles, un érudit sans bibliothèques, sans livres, ou avec peu de livres, au fond du plus modeste presbytère, dans une campagne perdue, et tout en remplissant les devoirs du pasteur qui a charge d’âmes, et qui sait porter son fardeau. […] un phénomène bon enfant, sans charlatanisme, sans tromperie, sans trompe et sans trompette, qui, malgré la réputation qui lui vient de Paris, tout doucement, goutte par goutte, flot par flot, comme l’eau vient à l’écoute-s’il-pleut de sa paroisse, n’a pas cessé de vivre à l’écart, au fond de sa province, y continuant son petit train (un train silencieux) de savant, d’annotateur et de critique. […] Ce dut être quelque publication d’alors qui lui montra, comme un éclair, latente au fond de son esprit, sa vocation de critique historique, car il le devint, malgré sa position isolée, éloignée des villes, de toute source intellectuelle, de tout renseignement ; impuissant en tout ! […] Pour cette raison, apparemment, l’auteur de la Défense de l’Église, livre déshonorant au fond, — car l’honneur des historiens, c’est l’exactitude ! 

22. (1767) Salon de 1767 « Peintures — Doyen » pp. 178-191

Elle a trois de ses femmes autour d’elle ; l’une vue par le dos la soutient sous les bras et joint en même temps ses regards et sa prière aux cris douloureux de sa maîtresse ; la seconde, plus sur le fond et vue de face, a la même action. […] Derrière ce groupe, un peu plus vers la gauche, sur le fond au pied du massif, à l’endroit où l’escalier descend et perd de sa hauteur, les têtes suppliantes d’une foule d’habitans. […] On voit de profil, plus sur le fond, son enfant penché et les regards attachés sur le visage de sa mère, il est frappé d’horreur, ses cheveux se sont dressés sur son front, il cherche si sa mère vit encore, ou s’il n’a plus de mère. […] Ajoutez que tandis que le défaut d’air et de perspective porte les figures du devant vers le fond et du fond vers le devant, par une seconde malédiction elles sembleront encore chassées de la gauche vers la droite et de la droite vers la gauche, ou retenues comme par force dans l’enceinte de la toile ; en sorte que cet obstacle levé, on craindrait que tout n’échappât, et n’allât se disperser dans l’espace environnant. […] J’abandonne une thèse, faute de mots qui rendent bien mes raisons ; j’ai au fond de mon cœur une chose, et j’en dis une autre.

23. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome premier — Livre troisième. Le souvenir. Son rapport à l’appétit et au mouvement. — Chapitre troisième. La reconnaissance des souvenirs. Son rapport à l’appétit et au mouvement. »

Est-il nécessaire ici, avec les spiritualistes, de faire intervenir le « pur esprit » comparant, du fond de son unité, les divers termes que le temps apporte et remporte ? […] C’est l’habitude, tantôt à l’état naissant, tantôt plus ou moins complète, qui se révèle à elle-même dans la conscience par un sentiment spécial, et ce sentiment spécial fait le fond de la reconnaissance. […] En tout cas, si la mémoire a une véritable certitude quand elle est « fraîche », elle se perd parfois dans le lointain du temps et vient se fondre avec le rêve comme la mer à l’horizon se fond avec le ciel. […] Puis, quand la voie est ouverte, la conscience ne sent presque plus que les bords du lit où coule le courant nerveux : la forme intellectuelle tend à remplacer le fond sensible ; c’est le second moment de l’évolution. […] La mémoire intellectuelle est un ensemble de signes au moyen desquels la conscience arrive à renouveler les idées par leurs contours sans renouveler les émotions et efforts qui en occupaient primitivement le fond.

24. (1890) L’avenir de la science « XV » pp. 296-320

Or cette intuition vraie de l’humanité, qui n’est au fond que la critique, la science historique et philologique peut seule la donner. […] Dans l’intérieur de chaque famille, les réformes successives n’ont été que les développements d’un fond identique 140. […] Bouddha ne fut qu’un philosophe ; le brahmanisme n’a guère des religions organisées que le livre sacré et n’est au fond que l’expression la plus simple du naturalisme. […] C’est la pure fantaisie, c’est l’imagination humaine brodant sur un fond toujours identique, qui est la religion naturelle. […] Il n’y a pas de difficulté dont on ne puisse sortir par une subtilité, et au fond une subtilité peut quelquefois être vraie.

25. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre IV. La fin de l’âge classique — Chapitre II. La Bruyère et Fénelon »

Si l’on descend au fond de son âme, la raison de ce besoin de plaire est un amour infini de soi-même. « Je ne puis expliquer mon fond, écrivait-il un jour. […] Le troisième trait qui enveloppe et fond les deux autres, c’est l’amour. […] Le moi est au fond de toutes ses chimères, comme il inspire ses plus exquises conceptions. […] Il indique cette thèse du retour à la nature que prêchera Jean-Jacques, avec qui, au fond, il a tant d’affinités.

26. (1842) Discours sur l’esprit positif

Toutefois, c’est surtout par les doctrines que l’incompatibilité des deux philosophies doit éclater chez la plupart des intelligences, trop peu touchées d’ordinaire des simples dissidences de méthode, quoique celles-ci soient au fond les plus graves, comme étant la source nécessaire de toutes les autres. […] C’est ici le lieu de compléter, à ce sujet, l’indispensable explication indiquée au début de ce Discours, où cette dissolution graduelle a été spécialement attribuée à l’état métaphysique proprement dit, qui, au fond, n’en pouvait être que le simple organe, et jamais le véritable agent. […] Ce progrès continu, qui même avait d’abord déterminé, au fond, la transformation du fétichisme en polythéisme, a surtout constitué ensuite la source essentielle de la réduction du polythéisme au monothéisme. […] On conçoit pareillement, en sens inverse, que la règle du classement suppose celle de l’évolution, puisque tous les motifs essentiels de l’ordre ainsi établi résultent, au fond, de l’inégale rapidité d’un tel développement chez les différentes sciences fondamentales. […] Dès lors, on reconnaît aisément qu’un tel mouvement doit surtout dépendre des études astronomiques, qui, par leur nature, offrent nécessairement la pleine manifestation du véritable esprit mathématique, dont elles constituent, au fond, la principale destination.

27. (1889) L’art au point de vue sociologique « Chapitre huitième. L’introduction des idées philosophiques et sociales dans la poésie (suite). Victor Hugo »

Nous sommes deux au fond de mon esprit, lui, moi. […] Cette bienveillance finale est le fond de sa morale même, de sa morale sociale, qui pourrait se résumer en cette formule : identité de la fraternité et de la justice. […] » bons et méchants ; Et rien ne reste là qu’un Christ pensif et pâle, Levant les bras au ciel dans le fond de la salle. […] Toits, murs, seuils des maisons, pierres des catacombes, Feuilles au fond des bois, plumes au fond des nids, Donnez ! […] Sans chercher un but extérieur à elle, sans prétendre à l’utilité proprement dite, la grande poésie ne saurait pourtant être indifférente au fond des idées et des sentiments, elle ne saurait être une forme pure : elle doit être l’indivisible union du fond et de la forme dans une beauté qui est en même temps vérité.

28. (1888) Journal des Goncourt. Tome III (1866-1870) « Année 1866 » pp. 3-95

Au fond un public naïf sur lequel la pièce historique exerce une fascination. […] La femme a comme une pudeur de se voir toute et de regarder au fond d’elle. […] Elle m’amusait les yeux, m’occupait comme une souriante toile de fond… la nouvelle voisine ! […] Au fond, ce qui fait l’appassionnement : c’est le faisandage des êtres et des choses. […] Au fond Bouilhet est un élève de Casimir Delavigne, Victor Séjour et Hugo.

29. (1866) Cours familier de littérature. XXII « CXXVIIIe entretien. Fior d’Aliza (suite) » pp. 65-128

Ici le bargello se pencha vers moi, baissa la voix, et me dit en me montrant la dernière loge grillée, sous le cloître, au fond de la cour : — Il n’y a qu’un grand criminel ici, qui n’inspire ni pitié ni intérêt à personne, c’est celui-là, ajouta-t-il en me montrant du doigt et de loin la loge de Hyeronimo. […] Un pilier du cloître cachait la lucarne de cette dernière loge du fond de la cour aux autres prisonniers, en sorte qu’il y faisait sombre comme dans une caverne. […] Je m’approchai donc avec plus de confiance de la sombre lucarne, assombrie encore par le noir pilier, et je jetai un regard furtif à travers les barreaux de fer du premier grillage ; je ne vis que deux yeux fixes qui me regardaient du fond du cachot, tout au fond de la nuit régnant derrière la seconde grille. […] qui ne savait encore que penser et qui me regardait du fond de l’ombre. […] Tu pourras alors laisser le meurtrier, ses membres libres, aller et venir de sa loge dans la chapelle de la prison, au fond de la cour, sous le cloître, entendre les offices des morts qu’on lui récitera tous les jours, et jouir enfin de toutes les douceurs compatibles avec sa réclusion.

30. (1895) Les œuvres et les hommes. Journalistes et polémistes, chroniqueurs et pamphlétaires. XV « Xavier Aubryet » pp. 117-145

Derrière tous enfin, quels qu’ils soient, l’idée générale qu’ils expriment fleurit comme une rosace embrasée sur le fond d’or, de vermillon et d’outre-mer, de laquelle les individualités ressortent mieux, magnifique repoussoir ! […] III Mais cette réserve faite sur le fond des choses, mais ce desideratum, posé, ce desideratum dont Aubryet, avec la libéralité de son esprit, ne méconnaîtra pas l’exigence, je n’ai plus qu’à louer, même sur le fond des choses, l’écrivain qui vient de montrer en critique tant d’aperçu et de fécondité. […] Ainsi, en restant sur le fond des choses et dans les généralités d’opinion, la critique de Xavier Aubryet a, dès son premier pas, pris une forte avance sur les autres critiques contemporaines, mais en continuant dans le sens de son premier mouvement, elle les distancerait tout à fait. […] L’ardente recherche de la distinction en toutes choses, qui est le fond de sa nature, fut la cause de quelques défauts, qu’il n’a plus, quand il débuta dans les lettres. […] C’est Henri de Latouche, l’auteur de Fragoletta, qui nous a raconté dans ses œuvres l’histoire de ces yeux étonnants, et cette histoire est belle comme un poème, — un poème au fond duquel il y a des larmes… Latouche dit qu’elle était très triste, cette jeune fille qui répondait : Napoléon Empereur à tous les sentiments de la vie !

31. (1767) Salon de 1767 « Peintures — Baudouin » pp. 198-202

Cette couche à moitié ouverte, occupe le fond. […] Quel est celui qui ne prononce au fond de son cœur que le talent pouvait être mieux employé, un pareil ouvrage n’être pas fait, et qu’il y aurait qeulque mérite à le supprimer ? […] Plus sur le fond, un quidam, le nez envelopé dans un manteau et recevant un nouveau-né emmaillotté, un peu plus sur le fond et vers la gauche, en coëffure noire, en mantelet, en mitaines, une sage-femme qui présente l’enfant au quidam et prête à sortir. […] Les bottes de paille, ce rustique théâtre du plaisir, est au pied des murs de quelques étables dont la couverture descend en pente du fond vers le devant.

32. (1904) Les œuvres et les hommes. Romanciers d’hier et d’avant-hier. XIX « ??? » pp. 175-182

Si son livre ne révèle aucune de ces manières éclatantes et familières au public qui disent, dès les premiers mots, les plumes dont elles sont sorties, il n’accuse pas non plus quelque grande manière nouvelle, — une initiative dans le fond ou la forme des choses ; il confirme assez modestement les bruits qui ont couru. […] Le Blessé de Novare est un roman d’invention sur un fond historique ; mais ce fond d’histoire n’a pas deux pouces de profondeur. […] À cela on aurait gagné, non seulement le fond de son livre, mais la forme, — la forme, qui devient chaque jour dans le roman plus difficile, la forme, plus rare que ce qui est déjà si rare : les idées et les observations !

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