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1073. (1899) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Septième série « Discours prononcé à la distribution des prix du lycée d’orléans. » pp. 223-229

Chers élèves, L’éloquent et généreux discours que vous venez d’entendre me facilite le commencement du mien. […] On sait partout ce qu’il faut entendre par l’esprit des guêpins.

1074. (1899) Esthétique de la langue française « Esthétique de la langue française — Chapitre IX »

J’entendais donc, à la campagne, appeler des pommes de terre roses hâtives, des lirlies roses ; on ne put me donner aucune autre explication, et, le mot m’étant inutile, je l’oubliai. […] J’ai fait prononcer à diverses personnes le mot plum-pudding ; voici les sons entendus : Plum, pleum, plome, ploume ; poudigne, poudinegue, poudine, poudingue.

1075. (1761) Salon de 1761 « Peinture — M. Pierre » pp. 122-126

Mais je l’entends qui me répond, et qui est-ce qui eût osé regarder cela ? […] Si le roi de Prusse s’entend un peu en peinture, que fera-t-il de ce mauvais Jugement de Paris [?]

1076. (1767) Salon de 1767 « Peintures — [autres peintres] » pp. 317-320

Sans contredit le premier peintre de l’école pour le technique, s’entend ; pour l’idéal et la poésie, c’est autre chose. […] Ce Parocel que j’ai tant maltraité, ce Brenet sur lequel j’ai un peu exercé ma gaieté, obtiendraient peut-être de vous et de moi quelque éloge, si l’un né chaud, bouillant, se chargeait d’une décoration ou de quelques-uns de ces ouvrages éphémères qui demandent beaucoup d’imagination et de faire ; et l’autre, d’un sujet historique, si les besoins domestiques ne le pressaient point, et s’il n’entendait pas sans cesse à ses oreilles le cri de la misère, qui lui demande du pain, des jupons, des souliers, un bonnet.

1077. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Seconde partie — Section 4, objection contre la proposition précedente, et réponse à l’objection » pp. 35-43

Son instinct, et le peu qu’il entend dire du monde, lui donnent des lumieres confuses de sa vocation. […] Telle fut la destinée du Correge, qui se trouva être un grand peintre avant que le monde eut entendu dire qu’il y avoit dans le bourg de Corregio un jeune homme d’une grande esperance, et qui montroit un talent nouveau dans son art.

1078. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Seconde partie — Section 39, qu’il est des professions où le succès dépend plus du génie que du secours que l’art peut donner, et d’autres où le succès dépend plus du secours qu’on tire de l’art que du génie. On ne doit pas inferer qu’un siecle surpasse un autre siecle dans les professions du premier genre, parce qu’il le surpasse dans les professions du second genre » pp. 558-567

On ne doit pas inferer qu’un siecle surpasse un autre siecle dans les professions du premier genre, parce qu’il le surpasse dans les professions du second genre Il ne faut pas entendre de tous les écrivains de l’antiquité ce que je dis ici des poetes, des historiens et des orateurs excellens. […] On connoît encore aujourd’hui une infinité de remedes dont Hippocrate n’entendit jamais parler, et dont le nombre surpasse de beaucoup celui des remedes qu’il connoissoit et que nous avons perdus.

1079. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Roederer. — II. (Suite.) » pp. 346-370

Roederer n’eut pas seulement à donner son avis dans le Journal de Paris et dans un petit écrit de celle date intitulé Du gouvernement, il fut appelé sur sa réputation de constituant devant la commission des Onze et fut entendu. […] Qu’entend-on par style ? […] Pendant les jours suivants, Roederer continua d’être un intermédiaire entre Bonaparte et Sieyès, un interprète habile et entendu de ce fameux plan de Constitution que ce dernier avait en portefeuille, et qui ne put être appliqué qu’avec des modifications qui le transformèrent profondément. […] Vous entendez les affaires publiques ; vous parlez bien ; vous êtes capable de faire face au Tribunat. » — « Général, je ferai ce que je pourrai pour le succès de la chose. » (Extrait d’une conversation de décembre 1799.) […] Examinant chaque question en elle-même sous ces deux rapports, après l’avoir divisée par la plus exacte analyse et la plus déliée ; Interrogeant ensuite les grandes autorités, les temps, l’expérience ; se faisant rendre compte de la jurisprudence ancienne, des lois de Louis XIV, du grand Frédéric… Ce ne sont pas proprement des pages suivies que j’extrais, mais de simples notes que je rejoins, et que j’assemble ; il suffit, toutefois, de les rapprocher, tant elles concordent, pour voir se dessiner cette beauté consulaire dans toute sa vigueur et sa simplicité : Le premier consul n’a eu besoin que de ministres qui l’entendissent, jamais de ministres qui le suppléassent. 

1080. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Nouvelle correspondance inédite de M. de Tocqueville »

Les premières descriptions ou les premiers aperçus que M. de Tocqueville donne à ses parents et amis n’ont rien de sensiblement pittoresque : c’est judicieux, graduel, avec une part de réflexion toujours et des commencements de considérations ; même quand il nous décrit le pays neuf, les luttes de l’homme avec les forêts, les grands lacs, il n’a pas de bien vives couleurs ; la palette proprement dite, et comme nous l’entendons aujourd’hui, est absente. […] Conséquemment, lorsque les Indiens commencent à se trouver un peu trop près de leurs frères les blancs, le président des États-Unis leur envoie un messager, lequel leur représente que, dans leur intérêt bien entendu, il serait bon de reculer un tant soit peu vers l’Ouest. […] Dans mon avant-dernière lettre, je m’adressais à lui comme s’il avait encore pu m’entendre ; je lui peignais ma joie au retour. […] Hier au soir, je l’ai prié comme un saint ; j’espère qu’il a entendu ma voix et qu’il a vu que ses bienfaits n’avaient point été tout à fait perdus… » Cette mort d’un vieillard, à laquelle il semble qu’il pouvait s’attendre, assombrit pour le jeune voyageur les spectacles auxquels il va désormais assister ; il le dit et le redit à toutes les personnes de sa famille avec des accents d’une sincérité profonde, et qui mettent à nu, à n’en pas douter, l’état contristé de son âme : « (A Mme de Grancev, 10 octobre 1831)… Bien des gens croient que nous n’avons fait qu’une perte ordinaire ; mais vous savez que c’est presque un père que nous pleurons. […] Et d’ailleurs, je vous l’ai entendu dire à vous-même, depuis longtemps vous viviez déjà à part, vous étiez plus spectateur qu’acteur.

1081. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Œuvres mêlées de Saint-Évremond »

Délicatesse, fierté ou indifférence, il entendait bien se dérober au pardon de Louis XIV. […] Ceux qui l’appellent un précieux n’y entendent rien ; ils s’en tiennent à l’écorce. […] Saint-Évremond, qui vécut près de quarante ans en Angleterre, n’entendait point l’anglais ; c’étaient ses amis, le duc de Buckingham et M. d’Aubigny, qui lui expliquaient les meilleures pièces anglaises, et naturellement ils ne lui parlaient que du théâtre du jour. […] Sur le choix des livres, il est excellent à entendre : il ne lit plus, il relit. […] Saint-Évremord, qui est meilleur à entendre, remplissait auprès d’elle le rôle assez compliqué d’un vieil ami, empressé, amoureux, non jaloux, confident et conseiller assez écouté, mais non obéi.

1082. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Mémoires sur la mort de Louis XV »

Quand je dis que Mme Dubarry voulait, j’entends que M. d’Aiguillon voulait ; car cette femme, comme les trois quarts de celles de son espèce, n’avait jamais eu de volonté. […] Il avait entendu dire que, pendant la maladie du roi à Metz, M. de Richelieu s’était enfermé seul avec lui et avait interdit la porte à M. de Bouillon et à mon grand-père, qui avaient eu l’un et l’autre la faiblesse de souscrire à cette volonté ridicule de M. le maréchal. […] Ici on avait toujours entendu dire qu’une troisième saignée devait faire recevoir les sacrements ; et, suivant la disposition favorable ou contraire à la maîtresse, chacun craignait ou espérait de la voir ordonner. […] Il avait, vers les cinq heures, envoyé chercher ses enfants, qui étaient venus passer auprès de son lit une demi-heure, sans en entendre et sans lui dire une parole. […] J’entendais cette scène dans un coin, près de ces messieurs, et, trouvant ma sensibilité bien au-dessous de la leur, je me taisais, et me contentais de ne pas rire.

1083. (1858) Cours familier de littérature. V « XXVIIIe entretien. Poésie sacrée. David, berger et roi » pp. 225-279

L’âme, ainsi entendue, est la partie la plus divine, la plus complète, la plus sentante, et par là même la plus émue et la plus expressive de nos facultés pensantes. […] Quelqu’un dit : « J’ai entendu un petit berger des montagnes de Bethléem, fils d’Isaï, qui joue merveilleusement de la harpe en gardant ses brebis. » On fait venir le jeune musicien. […] L’Écriture, en effet, nous parle d’abord d’un petit berger, fils d’un nommé Isaï, de Bethléem, que les officiers de la tente de Saül ont entendu jouer délicieusement de la flûte sur la colline en gardant les brebis de son père. […] En les lisant, on entend d’ici le chœur ou le peuple, auquel on jette le refrain, qui le reçoit sur les lèvres et qui le faire retentir en le prolongeant jusqu’au ciel. […] Quant à l’âme, on n’en voit pas la trace, on n’en entend pas le cri, on n’en recueille pas les larmes douces ou amères dans le vase du cœur versé devant Dieu.

1084. (1895) Histoire de la littérature française « Première partie. Le Moyen âge — Livre II. Littérature bourgeoise — Chapitre III. Littérature didactique et morale »

Ne prenons pas le change sur le cadre ou sur le ton : tant d’énumérations moralisées ou satiriques que nous rencontrons, ne sont qu’une forme originale de littérature réaliste, dont le caractère essentiel est de réveiller chez l’auditeur la sensation des réalités qui lui sont prochaines : et comme cette littérature s’adresse à des imaginations vierges, non blasées encore, ni réfractaires par un trop long usage à l’action suggestive des mots, les noms soûls des choses, sans descriptions, sans épithètes, sans tout le mécanisme compliqué du style intense, les noms tout secs sont puissants : le poète se contente d’appeler, pour ainsi dire, chaque objet, aussi le voilà présent, en sa concrète et naturelle image, aux esprits de ceux qui l’entendent. […] C’étaient des enfants, et qui n’aimaient qu’à entendre des histoires. […] Dans la langue vulgaire, comme dans la langue latine, le xiiie  siècle est le siècle des Sommes et des Encyclopédies : les unes plus scientifiques (entendez le mot des sujets, non de la méthode), comme l’Image du monde de Gautier de Metz, ou le fameux Trésor de Brunetto Latino (1205), d’autres purement morales et religieuses, connue la Somme des vertus et des vices, dédiée à Philippe le Hardi en 1279 par le frère Lorens, d’autres où la description satirique de la vie se mêle à la morale, et prend même le dessus sur elle, comme la Bible, peu religieuse, et parfois impudente, de Guyot de Provins. […] Jean Clopinel est un vrai bourgeois, qui n’entend rien aux raffinements de l’amour courtois, ou qui n’y voit que ridicule fadaise : aussi, dès les premiers vers qu’il écrit, imprime-t-il à sa matière un tout autre caractère, un caractère tout pratique et positif. […] Enfin, de tout temps, le bourgeois a détesté l’hypocrisie et médit des « capots » : et il définit hypocrisie ou cagotisme tout ce qui n’est pas la religion telle qu’il l’entend et la pratique, accommodée à son usage, intérêts et préjugés.

1085. (1911) La valeur de la science « Première partie : Les sciences mathématiques — Chapitre IV. L’espace et ses trois dimensions. »

(Il faut bien entendu pour cela que S ait été convenablement choisie.) […] Ainsi la question posée ne peut s’entendre que d’une manière ; est-il possible d’imaginer que, les résultats des expériences relatées plus haut ayant été différents, nous ayons été conduits à attribuer à l’espace plus de trois dimensions ; d’imaginer, par exemple, que la sensation d’accommodation ne soit pas constamment d’accord avec la sensation de convergence des yeux ; ou bien que les expériences dont nous avons parlé au paragraphe 2 et dont nous exprimons le résultat en disant « que le toucher ne s’exerce pas à distance », nous aient conduits à une conclusion inverse. […] Bien entendu, cette classification est beaucoup plus compliquée que cela, mais cela suffira pour faire comprendre mon raisonnement. […] — Mais bien entendu, répondra-t-on, il faut qu’on suppose que ces parois restent immobiles. — Oui, mais il est évident que moi, j’ai le droit de bouger ; et alors les parois que nous supposons en repos absolu seront en mouvement relatif par rapport à moi. — Oui, mais un pareil mouvement relatif ne peut pas être quelconque, quand des objets sont en repos, leur mouvement relatif par rapport à des axes quelconques est celui d’un corps solide invariable ; or, les mouvements apparents que vous imaginez ne sont pas conformes aux lois du mouvement d’un solide invariable. — Oui, mais c’est l’expérience qui nous a appris les lois du mouvement d’un solide invariable ; rien n’empêcherait d’imaginer qu’elles fussent différentes. […] Je crois donc que si par espace on entend un continu mathématique à trois dimensions, fût-il d’ailleurs amorphe, c’est l’esprit qui le construit, mais il ne le construit pas avec rien, il lui faut des matériaux et des modèles.

1086. (1889) Le théâtre contemporain. Émile Augier, Alexandre Dumas fils « Alexandre Dumas fils — Chapitre XV »

Vous entendez d’ici sonner les sacs du mariage d’argent : Catherine Mauriceau est, en effet, une de ses victimes. […] On croit entendre l’orchestre du bal accompagner, en mode mineur, ces commérages légendaires. […] Le petit duc n’aime pas sa femme et vit en complet divorce avec elle, mais il n’entend pas être remplacé. […] Il n’entend point, d’ailleurs, que M. de Septmonts lui tue un garçon dont il a besoin, et qui vient de lui fournir un procédé pour le lavage de l’or, à l’aide duquel il économisera vingt-cinq pour cent sur ses frais d’extraction minière. […] Ce malheureux duc a une cousine, la marquise de Rumières, à laquelle il n’a fait ni bien ni mal, et qui devrait, au moins, rester indifférente à son sort ; il faut entendre comme elle marivaude sur sa fin probable, et l’oraison funèbre qu’elle vocalise d’avance, en ironie suraiguë, sur son beau cousin.

1087. (1887) Journal des Goncourt. Tome I (1851-1861) « Année 1859 » pp. 265-300

Il y a eu des jours dans sa vie, où il est resté couché, trompant la faim avec des cigarettes, et il raconte pour se consoler qu’il a un camarade de chambre encore plus rafalé que lui, demeuré deux jours au lit sans manger, — et l’affreux, dit-il, c’est qu’il l’entendait rêver qu’il faisait des repas à trois services. […] — Je n’y entends rien, mais du tout… Il m’ira, vous croyez ? […] Je n’entendais rien, mais quand il souriait, je souriais involontairement et dans la même pose de tête… Jamais âme pareille n’a été mise en deux corps. […] 15 novembre Comme mon dentiste me nettoyait les dents, penché sur moi, il me dit tout à coup : « Est-ce que vous allez quelquefois entendre les prêtres ? […] Et dans la salle on entend les femmes murmurer dans des sortes de pâmoisons ; « Oh !

1088. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Livre I : La politique — Chapitre III : Examen de la doctrine de Tocqueville »

La souveraineté populaire et l’égalité des conditions sont des principes dont on peut abuser, que l’on peut corrompre, mal entendre, mal appliquer, mais enfin des principes légitimes, bons par eux-mêmes, et une société qui repose sur ces principes est supérieure, toutes choses égales d’ailleurs, à celles qui s’appuient sur des principes opposés. […] Il montre comment la doctrine de l’intérêt bien entendu est conforme à l’esprit démocratique. « Il n’y a pas de pouvoir sur la terre, dit-il, qui puisse empêcher que l’égalité croissante des conditions ne porte l’esprit humain vers la recherche de l’utile, et ne dispose chaque citoyen à se resserrer en lui-même. » Il y a en effet bien des raisons, et trop longues à énumérer, pour qu’il en soit ainsi ; je ne sais cependant s’il faut dire : « La doctrine de l’intérêt bien entendu me semble la mieux appropriée aux besoins des hommes de notre temps. […] Cette manière d’entendre la politique pourrait avoir des inconvénients entre les mains d’un esprit corrompu, comme Machiavel, ou un peu trop indifférent, comme Aristote et quelquefois Montesquieu ; car, en se contentant d’observer comment les hommes agissent, on peut oublier comment ils devraient agir, et prendre leur conduite habituelle pour règle et pour mesure du juste et du droit. […] Sans doute il est cruel à une cause qui s’est toujours donnée pour la cause de la liberté de s’entendre dire, et cela sans passion, et même avec bienveillance, qu’elle porte la servitude dans son sein, et qu’il lui faudra lutter contre ses plus violents instincts pour rester libre.

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