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313. (1913) Les idées et les hommes. Première série pp. -368

Quel combat, où alternent la victoire des doctrines et la victoire du mâle instinct ! […] En définitive, depuis que le monde est monde, quelle doctrine fut assez prudente pour ne se compromettre jamais ? […] Et Léopold Baillard, en Lorraine, promulguera passionnément la doctrine de Vintras. […] Et ce n’est pas l’occasion d’épiloguer sur les doctrines. […] Il écrit : « La croyance au progrès est une doctrine de paresseux » ; il ajoute : « une doctrine de Belges ».

314. (1911) Études pp. 9-261

Aussi la doctrine de Claudel est-elle indécomposable, inexplicable. […] Abrégé de toute la doctrine chrétienne, § 2. […] Abrégé de toute la doctrine chrétienne, § 5. […] Abrégé de toute la doctrine chrétienne, § 6. […] Abrégé de toute la doctrine chrétienne, §13.

315. (1825) Racine et Shaskpeare, n° II pp. -103

Je me figure quelque chose de semblable au grand inquisiteur Torquemada, environné des juges et des familiers de l’Inquisition, devant lesquels un hasard favorable au maintien des bonnes doctrines aurait fait amener tout à coup Luther ou Calvin. […] Tous les partisans des saines doctrines applaudiront à tant d’érudition. […] Voilà, monsieur, le fond de ma doctrine ou de mes préjugés. […] Ce sont des hommes qui depuis 1789 n’ont pas admis une idée nouvelle ; et ce qui achève de déconsidérer leurs doctrines littéraires, c’est qu’ils sont enchaînés par le caissier du journal. […] Mais, me dites-vous, prêchez une doctrine saine, lumineuse, philosophique, et vous ferez oublier les phrases de La Harpe. — Pas du tout.

316. (1862) Portraits littéraires. Tome II (nouv. éd.) « Gabriel Naudé »

Le Postel fut présent de bonne heure à Naudé pour lui prouver que tout se peut dire et croire, pour lui apprendre à se méfier de la sottise humaine, jusqu’en de grands esprits et au sein de la plus haute doctrine. […] En 1624, le Père Garassus avait publié le livre de la Doctrine curieuse des Beaux-Esprits modernes, dans lequel il cherchait partout des libertins et des athées ; Naudé put en prendre l’idée de venger, par contre-partie, les grands esprits de l’antiquité qui avaient, d’ailleurs été compromis, il nous l’apprend positivement, dans les suites de cette querelle. […] A propos des trains et des vogues d’idées qui se succèdent depuis deux mille ans, vogue platonicienne, aristotélique, scholastique, hérétique et de Renaissance, Naudé se borne à remarquer que le même train de doctrine dure jusqu’à ce que vienne un individu qui lui donne puissamment du coude et en installe un autre à la place. […] Ainsi, à propos de l’Alcoran, dont les paroles, dit Mascurat (page 345), sont très-belles et bonnes, quoique la doctrine en soit fort mauvaise, Saint-Ange se récrie, et Mascurat répond entre autres choses : « … Joint aussi qu’il est hors le pouvoir d’un homme, tant habile qu’il soit, de connoître quelle est la religion des Turcs, soit pour la foi ou les cérémonies, par la seule lecture de l’Alcoran  ; tout de même, sans comparaison toutefois, qu’un homme qui n’auroit lu que le Nouveau Testament, ne pourroit jamais connoître le détail de la religion catholique, vu qu’elle consiste en diverses règles, cérémonies, établissements, institutions, traditions et autres choses semblables que les papes et les conciles ont établies de temps en temps, et pièces après autres, conformément à la doctrine contenue implicité ou explicité dans ledit livre. » On a le venin. […] Mascurat répond à Saint-Ange, qui vient d’exprimer la conviction naïve qu’aucune doctrine pernicieuse ne saurait se fonder sur la Sainte-Écriture : « Si tu ajoutes bien entendue, dit Mascurat, je suis de ton côté ; mais, à faute de suivre l’interprétation que la seule Église catholique donne à ces Livres sacrés, ils sont bien souvent causés de beaucoup de désordres, tant es mœurs à cause du livre des Rois et autres pièces du Vieil Testament, qu’en la doctrine, laquelle est bien embrouillée dans le Nouveau et par les Épîtres de saint Paul principalement : Mare enim est Scriptura divina, habens in se sensus profundos et altitudinem tudinem propheticorum enigmatum, comme disoit saint Ambroise… » Quand j’entends un sceptique, citer si respectueusement un grand saint, je me dis qu’il y a anguille sous roche.

317. (1898) L’esprit nouveau dans la vie artistique, sociale et religieuse « III — Bossuet et la France moderne »

Dans ses prêches comme dans ses livres, durant toute sa vie, il les poursuivit, dans leur personne et dans leur doctrine, de son mépris et de sa haine. […] « Deux chefs de famille de la ville de Meaux, de condition fort médiocre, ont écrit à leur évesque depuis quelques jours qu’il leur restoit beaucoup de scrupule sur quelques points de doctrine, et principalement sur celuy du Purgatoire. […] Le philosophe… J’emprunte à un auteur déjà cité80, un excellent résumé de sa doctrine : « On voit bien qu’il s’est nourri du terrorisme biblique bien plus que des tendresses de l’Évangile. […] L’esprit obstinément fermé à toutes les voix humaines, il ne connaît que la « parole divine », orgueilleusement campé sur le Dogme, dont il claironne la doctrine à tous les échos. […] Mais les princes ont reçu de Dieu l’épée pour seconder l’Église et lui soumettre les rebelles. »… C’est sur ce droit de forcer la conscience que s’engage la querelle… Bossuet n’échappe aux prises de Jurieu qu’en s’enfonçant dans sa barbare doctrine, en soutenant, contre la nature, la pitié, la justice, — le faux droit de la tyrannie.

318. (1862) Cours familier de littérature. XIV « LXXXIe entretien. Socrate et Platon. Philosophie grecque (1re partie) » pp. 145-224

Un jeune homme d’Athènes, plus politique que religieux, nommé Mélitus, qui voulait se faire un nom populaire en se posant en vengeur des dieux chers à l’ignorance et au fanatisme du bas peuple, porte l’accusation contre Socrate ; il l’accuse de corrompre la jeunesse par des doctrines qui sapent le ciel. […] On peut remarquer, dans ce procès, que le peuple est en général plus implacable envers les doctrines nouvelles que les grands ; moins il a d’idées, plus il s’irrite contre ceux qui les lui arrachent. […] Nous avons vu l’homme, nous allons voir la doctrine ; puis nous assisterons à la mort, et nous verrons comment elle est le sceau de cette admirable vie de philosophe. […] Les deux philosophes grecs, Timée et Pythagore, qui avaient voyagé aussi en Égypte, ont dans leurs doctrines les mêmes analogies avec les dogmes de ce livre. […] » Peut-on méconnaître les analogies frappantes entre ces doctrines engendrées les unes des autres jusqu’à l’explosion philosophique du dogme chrétien ?

319. (1917) Les diverses familles spirituelles de la France « Chapitre vi »

Les socialistes allemands disent que nous manquons à la doctrine, mais lui, il savait encore mieux qu’eux ce que c’est que le socialisme. […] Mais j’ai hâte d’aller au cœur du parti dont il fallait pourtant que je fisse comprendre les raisons, les conciles, le clergé ; mon objet propre est de chercher comment les doctrines de l’internationalisme et du pacifisme furent elles-mêmes, pour certains combattants, un ressort de guerre, un ravitaillement moral. […] Et, comme lui, beaucoup de ses coreligionnaires pacifistes trouvent dans leurs doctrines et passions de la veille le foyer où ils vont réchauffer leurs pieds demi-gelés, leurs mains gourdes, leurs âmes.‌ […] » Les syndicalistes de l’École, acquis à tout ce que renferme de large humanité le socialisme français, fraternisaient avec les plus fougueux d’entre les socialistes, les moins disciplinés, mais ceux dont le parti dirigeant se méfiait le plus parce que la logique de leurs doctrines les entraînait à vouloir étendre aux partis de droite les libertés qu’ils réclamaient pour eux.

320. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « M. de Pontmartin. Les Jeudis de Madame Charbonneau » pp. 35-55

M. de Pontmartin vient de même d’introduire toute une révolution dans sa manière : de critique aristocratique, de défenseur des hautes doctrines de la société, de chevalier avoué du trône et de l’autel, il s’est fait pamphlétaire satirique, auteur de Guêpes, diseur de vérités et de malices à tout prix ; les lauriers d’Alphonse Karr l’ont empêché de dormir. […] Il a une singulière doctrine en matière de satire. […] Et nous qu’il a tant de fois chapitré au nom de ses doctrines de convention, nous avons droit de dire en montrant le présent livre : Lisez et vous y sentirez pour toute inspiration, aux meilleurs endroits, une personnalité très-vive, très-fine, très-excitée et surexcitée, une vanité blessée et se vengeant.

321. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre I. La littérature pendant la Révolution et l’Empire — Chapitre III. Madame de Staël »

Nous verrons l’importance de cette aptitude dans l’évolution des doctrines littéraires. […] Elle n’a institué qu’une doctrine étroite, égoïste. […] Nous voici conduits au principe nouveau, large, fécond, dont Mme de Staël a voulu donner la démonstration par son livre, et qui contient tout le développement postérieur de la critique : « Je me suis proposé, dit-elle, d’examiner quelle est l’influence de la religion, des mœurs, des lois sur la littérature, et quelle est l’influence de la littérature sur la religion, les mœurs et les lois… Il me semble que l’on n’a pas suffisamment analysé les causes morales et politiques qui modifient l’esprit de la littérature… En observant les différences caractéristiques qui se trouvent entre les écrits des Italiens, des Anglais, des Allemands et des Français, j’ai cru pouvoir démontrer que les institutions politiques et religieuses avaient la plus grande part à ces diversités constantes. » Il semble qu’elle ne tienne pas trop, pour la poésie, à sa doctrine du progrès, et qu’elle se contente de constater des différences : si c’est sa pensée, la correction est heureuse.

322. (1897) Le monde où l’on imprime « Chapitre IX. Inquiets et mystiques » pp. 111-135

Ces jeunes gens, une fois en possession d’un corps de doctrine présentable, avec la sérénité de mathématiciens, le mettent dûment en pratique. […] Pour n’être pas le livre d’un littérateur, ce n’est pas un livre de forme banale ; quant au fond de la doctrine qu’il inclut, c’est la codification logique des principes féodaux ; mais d’une féodalité moderne, rationnelle, paradoxale et amusante. […] Vingt « meneurs », dont la puissance est énorme, et dont ce livre nous dit le caractère, la valeur, la doctrine et l’influence.

323. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre V. Premiers aphorismes de Jésus. — Ses idées d’un Dieu Père et d’une religion pure  Premiers disciples. »

Et cela n’était pas chez lui un principe théorique, une doctrine plus ou moins prouvée et qu’il cherchait à inculquer aux autres. […] Comme tous les rabbis du temps, Jésus, peu porté vers les raisonnements suivis, renfermait sa doctrine dans des aphorismes concis et d’une forme expressive, parfois énigmatique et bizarre 227. […] Donner vaut mieux que recevoir 237. » « Celui qui s’humilie sera élevé ; celui qui s’élève sera humilié 238. » Sur l’aumône, la pitié, les bonnes œuvres, la douceur, le goût de la paix, le complet désintéressement du cœur, il avait peu de chose à ajouter à la doctrine de la synagogue 239.

324. (1881) La psychologie anglaise contemporaine « M. James Mill — Chapitre I : Sensations et idées. »

Cette doctrine qui porte, en Angleterre, le nom générique de « Psychologie de l’Association » (Association-Psychology), dans James Mill n’en est encore qu’à son début ; mais appuyée sur les travaux antérieurs de Hume et de Hartley, elle se présente déjà chez lui sous une forme nette et arrêtée, comme on en va juger. […] Une longue exposition de doctrines bien dépassées depuis l’époque où écrivit l’auteur, serait inutile ici. […] C’est maintenant une doctrine acceptée en philologie, que la racine d’un verbe est de la nature d’un nom abstrait, et que ce nom devient un verbe simplement par l’addition d’un affixe pronominal30.

325. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Les Gaietés champêtres, par M. Jules Janin. » pp. 23-39

Peut-il exister en dehors des divers systèmes politiques, aux confins des doctrines qui se combattent et se font la guerre, un terrain plus ou moins neutre, une sorte de lisière, où l’on est bien venu à errer un moment, à rêver, à se souvenir de ces choses vieilles comme le monde et éternellement jeunes comme lui, du printemps, du soleil, de l’amour, de la jeunesse ; à se promener même (si la jeunesse est passée) un livre à la main, et à vivre avec un auteur d’un autre âge, sauf à en raffoler tout un jour et à demander ensuite, en rentrant dans la ville, à chaque passant qu’on rencontre : L’avez-vous lu ? […] Mais l’essentiel est que ce droit un peu vague, bien que si réel, ne soit jamais supprimé, et que jamais les doctrines régnantes, au nom même du salut commun, ne puissent dire au poète, au littérateur, à l’érudit curieux, comme dans la banlieue d’une place de guerre le génie militaire dit à l’honnête homme, qui a sa métairie avec son petit bois et sa source d’eau vive : « Monsieur, nous avons besoin de ce petit coin qui vous sourit : il entre dans nos lignes, il nous le faut ; voilà le prix, soyez content, mais vous n’y rentrerez pas. » Ceux qui vivent des lettres, de l’amour des livres et des études, de ces passions après tout innocentes et désintéressées, peuvent céder un moment ce coin de leur être et le prêter à la chose et à la pensée publique, ils le doivent dans les cas urgents ; mais, ce cas cessant, ils rentrent de plein droit dans leur domaine. […] Mais non ; ici je l’arrête et je lui dis : Ami, prends garde, tu dogmatises ; tu fais précisément ce que les gens à doctrines et les philosophes des diverses écoles veulent nous obliger de faire.

326. (1889) Écrivains francisés. Dickens, Heine, Tourguénef, Poe, Dostoïewski, Tolstoï « Th. Dostoïewski »

Effrayé de la peur de la vie et souffrant misérablement de son horreur, pénétrant l’homme dans ses dessous farouches et douloureux, pris du triste amour de sa chair souffreteuse, ne voyant en toute transgression que le commencement du châtiment, inquiet, éperdu et aimant, obstinément attaché à débattre et à retourner le problème du mal, du péché et de la peine, interrogeant la science et violenté, dans son âme obscure et slave, par la hautaine impiété de la philosophie évolutionniste, par ces doctrines qui, extraites et résumées du cours des astres, du choc des atomes, du sourd essor de la substance organique, puisent dans leur origine matérielle une inhumaine dureté et font au ciel qu’elles mesurent et dans l’âme qu’elles analysent un épouvantable et clair vide, frémissant du tranquille déni qu’elles opposent au problème final de toute méditation irréaliste — le but et le sens de la vie, — et finalement repoussé par les sèches raisons dont elles interdisent la pitié, l’aide aux faibles, aux malades, aux méchants, par la nécessité de ne point intervenir dans la lutte de tous contre fous, qui est à la fois la loi du monde vivant et la source même de ce qui nous pousse à la violer, — Dostoïewski s’est violemment rejeté en arrière ; sortant de toute église comme de tout enseignement, maudissant toute intelligence, se contraignant à croire ce qui console non sans trembler de la peur tacite d’être déçu, il a rivé ses yeux sur l’Évangile, il s’est prosterné pleurant sur la face pleurante d’un Christ populaire, en une agonie de pitié, de douleur, d’angoisse, d’effroi, de fou désespoir et de tremblante supplication aussi tragique en sa clameur que les affres contenues de Pascal. […] Quoi qu’il en eût, Dosloïewski était de ce siècle et en connaissait les doctrines qui sont exclusivement scientifiques, c’est-à-dire de raisonnement, et, en particulier, de raisonnement sur les origines. Ces doctrines ont pour trait général de vouloir expliquer, légitimer tout l’existant, et de conclure ainsi à une sorte d’optimisme résigné.

327. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Livre III : La science — Chapitre I : De la méthode en général »

Il se séparait entièrement en cette doctrine de son maître Reid, aussi opposé à la méthode hypothétique que qui que ce soit au xviiie  siècle. […] Enfin, pour ne négliger aucun des anneaux de cette chaîne d’idées, disons que cette doctrine de l’utilité de l’hypothèse dans les sciences expérimentales est passée de l’école saint-simonienne dans l’école de M.  […] Exposition de la doctrine saint-simonienne, xve séance.

328. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Appendice. [Rapport sur les primes à donner aux ouvrages dramatiques.] » pp. 497-502

En médecine, il est une doctrine qui prétend guérir les semblables par les semblables ; en morale, surtout au théâtre, pareille doctrine est des plus périlleuses ; chercher le retour au bien par les images prolongées et souvent attrayantes du mal, c’est aimer à rester en chemin.

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