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522. (1868) Cours familier de littérature. XXVI « CLVIe Entretien. Marie Stuart (reine d’Écosse) »

Car jamais ne vit-on si douce et accomplie princesse, et vous voyez qu’est à elles de périr sous les coups des méchants. […] Douglas s’empara de la dague même de Darnley, frappa le favori, et dit, en lui laissant la dague dans le dos : « Voilà le coup du roi !  […] L’ayant enfin entraîné de la chambre à coucher dans la chambre de parade, ils le percèrent de cinquante-cinq coups de poignard. […] Tremblant pour son trône, pour sa liberté, pour sa vie et pour celle de l’enfant qu’elle portait dans son sein, elle entreprit de séduire à son tour l’époux outragé dont la colère semblait s’être tout à coup éteinte dans le sang de son rival. L’imagination seule peut mesurer la profondeur de cette dissimulation vengeresse de la reine envers celui qui avait donné le dernier coup de dague au cadavre de son favori !

523. (1914) Note sur M. Bergson et la philosophie bergsonienne pp. 13-101

Et je vois aujourd’hui que dans l’astronomie et la mécanique et la physique célestes on revient à l’hypothèse des tourbillons cartésiens, et j’en suis fort heureux, car ç’aura été un beau coup de génie, (mais de la divination du génie), et je serai plus heureux encore quand on y sera revenu pour la physique générale. […] Et peut-être sa plus grande invention et sa nouveauté et son plus grand coup de génie et de force est-il d’avoir conduit sa pensée délibérément comme une action. […] Dans le désordre même il peut y avoir des coups de fortune et même des coups d’ordre. […] Qu’un seul tout à coup, soudainement éclairé, les prenne au sérieux, ces paroles, les laisse comme lui entrer dedans, c’est instantanément la plus grande révolution qu’il puisse actuellement y avoir, car c’est une révolution dans le règne de l’argent, c’est une subversion du règne de l’argent. […] Quand au lieu de regarder une idée en l’air, tout à coup elle est prise au sérieux, c’est cela qui est, et qui fait, une révolution.

524. (1890) Dramaturges et romanciers

Non, il distribue à droite et à gauche de vigoureux coups de poing démocratiques et de sonores soufflets populaires. […] Tout est blessure grave, coup décisif, lésion mortelle dans une pareille passion, un mot ironique, une méprise de l’esprit, une honnête réserve. […] On passe souvent des années avant que la pioche ait remué autre chose qu’une argile sans valeur ; puis tout à coup la pierre précieuse se découvre. […] Elle a parlé, et tout à coup nous avons senti un froid brouillard tomber sur notre âme et notre cœur s’est refermé. […] À partir de cette scène, Louis de Camors est sous le coup de sortilèges bien puissants, et cependant il dépend de lui de succomber ou de triompher.

525. (1890) Impressions de théâtre. Quatrième série

Coup de théâtre. […] Suprême coup de théâtre. […] fit tout à coup mon ami, je viens de me déshonorer. […] Mais, trois ans après, tout à coup, Boussauel reparaît. […] Et elle le poursuit à coups de sabots, comme Didon poursuivait Enée à coups d’hexamètres.

526. (1892) Un Hollandais à Paris en 1891 pp. -305

Et c’est comme l’illusion d’une vie grandiose à distance, qui tout d’un coup se rapproche de notre œil. […] On me l’exposait ainsi tout récemment : « D’ordinaire, les étrangers quittent Paris sous le coup d’une fausse impression. […] Or je reconnais à coup sur cette sincérité dans la manière dont Moréas traite ses sujets. […] Ainsi ces deux existences de honte qui se rejoignent portent coup double à notre sentiment d’horreur. […] La foudre éclate tout près de vous ; vous n’osez pas regarder, vous êtes sûr qu’elle va tomber ; le bruit augmente, le malheur s’approche, vos nerfs deviennent de plus en plus sensibles au coup qui va fondre sur vous, — puis tout à coup un silence profond.

527. (1894) Critique de combat

Il voudrait surtout résoudre la question sociale à coups de décrets. […] La jeune fille, qui lui a insufflé ses aspirations réformatrices, est convertie du même coup. […] Il combat à coups de diamants, de promesses, de menaces. […] Ce fut, après le coup d’Etat de 1851, la propriété. […] Le docteur Pioger se rencontre tout à coup avec Guillaume de Greef.

528. (1890) Causeries littéraires (1872-1888)

Par exemple : les coups de coude de l’éclair ; se colleter avec la foudre. […] Finies, les belles inventions ; finis, les beaux coups d’audace. […] Tout à coup un coup de tonnerre sous ce ciel longtemps radieux. […] Lemaître n’ait senti ce jour-là comme un coup douloureux. […] C’est le dernier coup, n’est-ce pas, porté à ce triste personnage ?

529. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Appendice aux articles sur Roederer. (Voir page 393.) » pp. 533-543

Et quelle scène historique, refaite après coup, vaudrait le récit suivant que nous donnons dans toute sa simplicité et dans son premier jet sincère ? […] Tout à coup il prend un air grave et regarde son camarade ; il lui dit : « Monsieur, vous venez de passer une nuit dans la débauche ; cela est affreux ! […] Il va se frapper là de grands coups.

530. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Mélanges de critique religieuse, par M. Edmond Scherer » pp. 53-66

L’autorité et l’absolu ont disparu du même coup, et puisque la vérité n’est nulle part concentrée entre les mains d’un seul dépositaire, il s’agit désormais de chercher, d’éprouver, de choisir. […] Au lieu de cela, placez-vous à la frontière, dans un pays encore français, n’ayez nulle chance de rencontrer dans un salon le soir l’écrivain que vous avez jugé le matind, de le rencontrer, lui ou l’un de ses amis intimes, de ses proches par le sang ou par le cœur, et vous pouvez avec convenance en parler comme d’un ancien, comme d’un mort, sans embarrasser votre pensée dans toutes sortes de circonlocutions, en appelant faux ce qui est faux, puéril ce qui est puéril, en entrant dans le vif de la pensée à tout coup. […] Scherer lui-même avait peut-être besoin d’être signalé à la classe plus nombreuse de lecteurs auxquels je désire qu’il s’adresse dorénavant, et j’ai tenu à le faire sans retard ; c’était justice à la fois et plaisir ; j’aime assez à sonner le premier coup de cloche, comme on sait.

531. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « De la poésie en 1865. (suite.) »

Ma mère sous leurs coups est morte de douleur, Son martyre a duré trente ans ! […] Le vase où meurt cette verveine D’un coup d’éventail fut fêlé ; Le coup dut effleurer à peine, Aucun bruit ne l’a révélé.

532. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « HOMÈRE. (L’Iliade, traduite par M. Eugène Bareste, et illustrée par M.e Lemud.) —  second article  » pp. 342-358

Il est piquant d’en découvrir après coup quelque trace ; mais l’œuvre, telle que nous l’avons, a gagné sans doute en somme à ces soins vigilants et presque maternels. […] Ceux qui ont pris à tâche de décomposer l’œuvre reconstruite se sont fait trop beau jeu vraiment en combattant l’admiration un peu superstitieuse de madame Dacier ou du Père Le Bossu sur le plan exact et le but de l’Iliade, sur la perfection rigoureuse de la marche et sur l’observation inviolable des prétendues règles épiques qu’on en avait déduites après coup : Chaque vers, chaque mot court à l’événement, avait dit Boileau. […] ugène Bareste, en entrant dans cette voie séduisante, mais où l’on trouve, si l’on y prend garde, un repli et une ciselure à chaque pas, n’a pu espérer atteindre le but du premier coup.

533. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Troisième partie. Disposition — Chapitre V. Subordination et proportion des parties. — Choix et succession des idées »

Donc la querelle, qui venait ensuite, si elle n’était plus une vive entrée en matière, devenait un coup de théâtre émouvant : intéressés à la passion des jeunes gens, nous sommes plus touchés de la dispute des pères ; mais voir entrer deux hommes, qu’on ne connaît pas, dont on ne sait rien, qui ne nous sont rien, et les entendre échanger des insolences et des injures, c’est vif, si l’on veut : mais d’effet dramatique, je n’en vois pas. Cela intéressera tout juste comme deux inconnus qu’on voit se colleter dans la rue ; les coups peuvent intéresser, les hommes, non. […] N’ayez jamais recours à ces avertissements, qui sont comme les béquilles d’une composition boiteuse : « On verra plus tard pourquoi. — J’en donnerai la preuve tout à l’heure. » Ne cherchez pas à piquer la curiosité aux dépens de la clarté, à faire du mystère pour frapper un coup plus grand.

534. (1895) Histoire de la littérature française « Troisième partie. Le seizième siècle — Livre III. Poésie érudite et artistique (depuis 1550) — Chapitre I. Les théories de la Pléiade »

Voilà comment, dans quel esprit, sur les traces des anciens et des Italiens, la Pléiade a jeté brusquement la poésie hors des voies anciennes et populaires ; avec un mélange unique de noblesse aristocratique et de superbe érudition, elle a tenté de prodigieuses nouveautés : elle a voulu tout d’un coup renouveler les thèmes poétiques, changer les genres, refaire la langue. […] Contre ceux-ci, ils soutiennent qu’on ne peut égaler les anciens en leurs langues : il faut voir de quelle verve ils invectivent ces « reblanchisseurs de murailles », ces « latineurs » et « grécaniseurs » qui ont appris « en l’école à coups de verges » les langues anciennes, et croient avoir fait merveille d’« avoir recousu et rabobiné je ne sais quelles vieilles rapetasseries de Virgile et de Cicéron » : comme s’ils pouvaient faire autre chose que des « bouquets fanés ». […] Et du coup la sincérité de la poésie reçoit une grave atteinte.

535. (1842) Essai sur Adolphe

Elle avait joué hardiment sa vie entière sur un coup de dé ; elle avait gagné. […] Elle était forte, et défiait le danger ; elle était confiante et résignée, et ne demandait au ciel que des jours pareils aux jours évanouis ; et voici que tout à coup la vaillance de cette femme s’est affaissée ; voici que son espérance a fléchi comme le peuplier sous le vent qui passe. […] Il se remettait en marche, et commençait un nouveau pèlerinage ; il sent tout à coup se poser sur son épaule une main autrefois amie, qu’à peine il eût sentie, tant elle était légère, et qui aujourd’hui lui pèse et l’accable.

536. (1911) La valeur de la science « Première partie : Les sciences mathématiques — Chapitre I. L’intuition et la logique en Mathématiques. »

Les autres se laissent guider par l’intuition et font du premier coup des conquêtes rapides, mais quelquefois précaires, ainsi que de hardis cavaliers d’avant-garde. […] Cela vous permettrait seulement de reconnaître que chaque coup a été joué conformément à ces règles et cet avantage aurait vraiment bien peu de prix. […] C’est apercevoir la raison intime qui fait de cette série de coups successifs une sorte de tout organisé.

537. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre XXVI. La sœur Emmerich »

cette petite va-nu-pieds, ce brin de genêt à mettre au pied d’un bénitier tout au plus, était, même dès lors, destinée à devenir une Sainte et un poëte du même coup, — du même coup de la grâce de Dieu sur son berceau ! […] Ils sont là tous, plus humainement particularisés avec le détail, les mille petits ou profonds coups de poinçon, qui les gravent dans l’esprit au fond duquel ils étaient déjà (mais moins avant), dans la beauté pure de leurs grandes lignes lumineuses !

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