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1386. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — R. — article » pp. 140-155

S’il est faux que les Lettres, cultivées selon les regles & les précautions que le bien commun exige, soient capables de nuire à la Société, il est du moins très-certain qu’à en juger par les désordres qui regnent aujourd’hui parmi les Littérateurs, elles sont sujettes à de grands inconvéniens.

1387. (1824) Notes sur les fables de La Fontaine « Livre onzième. »

Il ne faut point juger des gens sur l’apparence.

1388. (1767) Salon de 1767 « Peintures — Madame Therbouche » pp. 250-254

Je le lui promis, et, en effet je vis Chardin, Cochin, Le Moyne, Vernet, Boucher, La Grenée, j’écrivis à d’autres, mais tous me répondirent que le tableau était déshonnête, et j’entendis qu’ils le jugeaient mauvais.

1389. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Troisième partie — Section 5, explication de plusieurs endroits du sixiéme chapitre de la poëtique d’Aristote. Du chant des vers latins ou du carmen » pp. 84-102

On ne sçauroit dire plus positivement que le dit Aristote dans le dernier passage : que tout ce qui se recitoit sur le theatre étoit assujeti à une mélodie composée, et qu’il n’étoit pas libre aux acteurs des anciens, comme aux nôtres, de débiter les vers de leurs rolles sur le ton ni avec les inflexions et les ports de voix qu’ils jugent à propos d’emploïer.

1390. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Troisième partie — Section 9, de la difference qui étoit entre la déclamation des tragedies et la déclamation des comedies. Des compositeurs de déclamation, reflexions concernant l’art de l’écrire en notes » pp. 136-153

Cet auteur a jugé à propos de faire dans son septiéme livre une courte dissertation sur l’origine et sur l’histoire des représentations théatrales à Rome.

1391. (1905) Les ennemis de l’art d’écrire. Réponse aux objections de MM. F. Brunetière, Emile Faguet, Adolphe Brisson, Rémy de Gourmont, Ernest Charles, G. Lanson, G. Pélissier, Octave Uzanne, Léon Blum, A. Mazel, C. Vergniol, etc… « XIV »

Nous avons malheureusement toujours jugé Saint-Simon, Sévigné ou Molière comme de très grands artistes.

1392. (1895) Les œuvres et les hommes. Journalistes et polémistes, chroniqueurs et pamphlétaires. XV « De Cormenin (Timon) » pp. 179-190

De cette masse de flèches qui ont si bien sifflé dans le temps, et percé, — semblait-il, — et fait tant pousser, aux uns des cris de joie, et aux autres des cris de douleur, on a choisi celles-ci et on en a composé comme un carquois en ces deux volumes ; et c’est ce carquois, jugé si formidable, que nous venons à l’instant de peser, et qui, le croira-t-on ?

1393. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « Madame Sand »

Pour des écrivains perspicaces qui n’ont jamais été éblouis par cette gloire sans proportion avec le talent qui ne l’a pas faite, mais bien le sexe de l’auteur, Madame Sand était jugée déjà un peu à l’envers de sa gloire, et à travers ses œuvres nombreuses on avait pénétré jusqu’à la nature de son esprit et jusqu’au mystère d’une inspiration qui n’a aucun des caractères de l’inspiration du génie.

1394. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Lessing »

Il y avait dans Diderot quelque chose de béat, de pédant, de mystique, d’yeux fermés (on dit qu’il parlait les yeux fermés et je le crois), qui ne pouvait jamais être dans Lessing, cet homme qui n’est jamais dupe de rien, pas même de lui, et dont l’œil attentif est ouvert comme celui d’un archer qui vise… Avec Henri Heine, qui l’a jugé, Lessing est peut-être le seul allemand d’esprit comme nous entendons l’esprit en France, où on ne l’entend que là… Il était le seul qui pût se mesurer avec Voltaire et que Voltaire ne faisait pas trembler.

1395. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « I. Saint Thomas d’Aquin »

Avec son style naturellement sans couleur, ce style blanc et doux que l’abstraction a blanchi encore, il n’a fait aucun mal aux yeux des hommes à conserves qui avaient à le juger, et ils ont tous apprécié infiniment cette flanelle… Certainement, pour manquer le prix, il fallait s’y prendre de toute autre manière.

1396. (1889) Les œuvres et les hommes. Les poètes (deuxième série). XI « M. Paul Bourget »

IV Je n’ai pas cité tout ce que j’aurais voulu mais tout ce que j’ai pu de La Vie inquiète, mais j’en ai cité assez pour juger le livre et la tendance du poète Les poètes, quoi qu’en disent les jeunes gens, qui ne se contentent pas des seuls profits de la jeunesse mais qui veulent jusqu’aux profits de ceux qui ne sont plus jeunes, les gloutons !

1397. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre VIII. De Platon considéré comme panégyriste de Socrate. »

On ne pourra pas juger dans un extrait, du style et l’éloquence de Platon ; mais on connaîtra du moins le caractère moral de Socrate, un des plus beaux qu’il y ait jamais eu, depuis que chez les plus civilisés on parle de vertu en commettant des crimes.

1398. (1891) La bataille littéraire. Quatrième série (1887-1888) pp. 1-398

Ce n’est pas, je crois, le chiffre des années qui les distingue toujours, et j’avoue qu’avant de juger un homme, non pas sur ce qu’il doit faire, mais sur ce qu’il a fait, je ne songerai jamais à commencer par lui demander son acte de naissance. […] Le lecteur, le bourgeois, comme les auteurs, nous appellent dédaigneusement quand nous ne sommes pas de leur avis, jugent qu’il est certains tableaux qui doivent ou ne pas être faits, ou rester retournés contre la muraille. […] Reproche étrange dans le pays où est né Montaigne qui, fort justement, trouvait qu’étudier un homme c’est les étudier tous et que l’on ne peut juger ses actes qu’en sachant exactement ce qui se passe dans sa conscience : « Ce n’est pas marquer d’entendement rassis, dit-il, de nous juger simplement par nos actions du dehors ; il faut sonder jusqu’au dedans et voir par quels ressorts se donne le branle. » Ainsi parle le maître des observateurs et des psychologues ; et ce n’est pas le moindre mérite de M.  […] Le lecteur pourra mieux juger des tendances de M.  […] Cette jeune fille devait se complaire dans la continuité monotone des heures semblables à tant d’autres heures ; elle ne gardait pas rancune au destin de l’avoir mise où elle était, de l’y laisser ; elle se jugeait heureuse de ne pas l’être.

1399. (1864) Histoire anecdotique de l’ancien théâtre en France. Tome I pp. 3-343

Il déclara qu’il voulait juger du différend en connaissance de cause, et fit venir les trois amis au Palais-Royal, alors Palais-Cardinal. […] Il applaudissait lui-même, trépignait des pieds et des mains, se levait dans sa loge, mettait la moitié du corps en dehors, imposait silence pour faire mieux goûter les endroits qu’il jugeait sublimes, enfin il témoignait la joie d’un enfant ! […] Il veut juger de tout et ne juge pas bien. […] C’est le duc d’Orléans, régent de France, qui, sur le compte que lui en firent des hommes d’esprit, voulut juger par lui-même de l’effet produit à la scène par Athalie. […] L’histoire et la postérité finissent tôt ou tard par juger en dernier ressort, et leur jugement est sans appel.

1400. (1895) Nos maîtres : études et portraits littéraires pp. -360

Ne voyaient-elles point tous les jours autour d’elles mille choses qu’elles devaient juger des miracles ? […] J’ai eu l’honneur d’être parmi les plus ardents à les admirer, jadis, en un temps où l’on était encore à peu près unanime à les juger ridicules. […] Renan ne jugerait point condamnables. […] Et mes pressentiments ne m’avaient pas trompé, à en juger par le second ouvrage que vient de nous offrir M.  […] Ils ne jugent plus les œuvres dont ils parlent, ou du moins s’ils les jugent ce n’est plus que par occasion, et sans prétendre à nous imposer les opinions qui leur plaisent.

1401. (1868) Rapport sur le progrès des lettres pp. 1-184

À une époque où les gens de lettres forment une vaste société liée par les plus étroits rapports, juger ses amis, ses confrères, ses égaux ! […] Il se plaignait de la diversité des opinions et des goûts et de la difficulté de juger quand on n’a pour asseoir ses jugements que quelque chose d’aussi arbitraire que les règles de l’art d’écrire et l’impression produite par le talent. […] Juger ! […] À force de peindre on finirait par perdre l’habitude de juger, et qu’est-ce que la critique sans jugement ? […] On ne le jugeait plus, on l’admirait.

1402. (1900) La culture des idées

Delille s’est rendu célèbre par son goût pour la périphrase didactique ; mais je crois qu’il a été mal jugé. […] Trop souvent le démon du Mieux a tourmenté des intelligences et les a stérilisées ; il est vrai que c’est aussi un grand malheur que de ne pas pouvoir se juger. […] On peut du moins juger du présent et aussi accorder quelque créance aux observations contemporaines d’une œuvre. […] C’est au dieu de juger si le marché lui convient. […] Les parents jugent la connaissance de l’anglais et de l’allemand plus utile à leurs enfants au point de vue commercial.

1403. (1890) La vie littéraire. Deuxième série pp. -366

Et quelle tâche que de juger par la raison pure des ouvrages qui ne relèvent que du sentiment ? […] J’ai entendu dire « Puisqu’il a le tort impardonnable de juger sa mère, il devrait au moins l’excuser. […] Eh bien, puisqu’il me faut juger M.  […] Je ne me crois pas permis de juger cet ouvrage à la place même où il a paru. […] C’est assez déjà pour qu’on puisse juger du mérite de l’œuvre.

1404. (1876) Romanciers contemporains

Nous avons à juger seulement les ouvrages dans lesquels est poursuivi le beau, est recherché le vrai. […] Dumas a jugé plus commode de faire tenir l’histoire dans le cadre de ses romans. […] À en juger par la préférence que depuis longtemps il donne à la science pure sur les œuvres d’observation et d’imagination, on peut croire qu’il réputera ce choix comme indigne de ses productions sérieuses, et qu’il jugera cette compagnie comme étant un peu compromettante au moins aux yeux de certains savants, ses collègues. […] Bien que la plupart de nos devanciers aient considéré ce livre comme immoral, nous le jugeons au contraire une des œuvres les plus morales qui existent. […] Oui, pauvre Gaboriau, pour avoir été jugé si à la légère !

1405. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre I. Les origines. — Chapitre II. Les Normands. » pp. 72-164

À côté de leurs chroniqueurs latins, Henri de Huntington, Guillaume de Malmesbury, hommes réfléchis déjà, et qui savent non-seulement conter, mais juger parfois, ils ont des chroniques rimées, en langue vulgaire, celle de Geoffroy Gaimar, de Benoît de Sainte-Maure, de Robert Wace. […] Ils n’appellent pas les choses par leur nom, surtout en matière d’amour ; ils vous les laissent deviner : ils vous jugent aussi éveillé et avisé qu’eux-mêmes94. […] Après tout, la seule garantie permanente et invincible, en tout pays et sous toute constitution, c’est ce discours intérieur que beaucoup d’hommes se font, et qu’on sait qu’ils se font : « Si quelqu’un touche mon bien, entre dans ma maison, se met sur mon chemin et me moleste, qu’il prenne garde ; j’ai de la patience, mais j’ai aussi de bons bras, de bons camarades, une bonne lame, et, à certains moments, la résolution ferme, coûte que coûte, de lui planter ma lame jusqu’au manche dans le gosier. » X Ainsi pensait sir John Fortescue, chancelier d’Angleterre sous Henri VI, exilé en France pendant la guerre des Deux Roses, un des plus anciens prosateurs, et le premier qui ait jugé et expliqué la constitution de son pays148. « C’est la lâcheté, dit-il, et le manque de cœur et de courage qui empêche les Français de se soulever, et non la pauvreté149. […] Il y a déjà longtemps que les exactions de la cour romaine ont provoqué les réclamations publiques161 et que le haut clergé est impopulaire ; on se plaint que les plus grands bénéfices soient livrés par le pape à des étrangers qui ne résident pas ; que tel Italien inconnu en Angleterre possède à lui seul cinquante à soixante bénéfices en Angleterre ; que l’argent anglais coule à flots vers Rome, et que les clercs, n’étant plus jugés que par les clercs, se livrent à leurs vices et abusent de l’impunité. […] Voilà ce que les lourds Saxons ont commencé à découvrir ; la conscience germanique s’est éveillée et aussi le bon sens anglais, l’énergie personnelle, la résolution de juger et de décider seul, par soi et pour soi.

1406. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre III. L’âge classique. — Chapitre II. Dryden. »

L’abolition des tenures féodales, l’augmentation énorme du commerce et de la richesse, l’affluence des propriétaires, qui mettaient des fermiers à leur place et venaient à Londres pour goûter les plaisirs de la ville et chercher les faveurs du roi, avaient installé au sommet de la société, ici comme en France, la classe, l’autorité, les mœurs et les goûts des gens du monde, hommes de salons et de loisir, amateurs de plaisir, de conversation, d’esprit et de savoir-vivre, occupés de la pièce en vogue moins pour se divertir que pour la juger. […] » Jugez combien ces plaques de couleur font contraste sur le sobre dessin de la dissertation française. […] Ce serait le traiter trop rigoureusement que de le juger toujours en regard de Shakspeare ; même à côté de Shakspeare, et avec la même matière, on peut faire une belle œuvre ; seulement, le lecteur est tenu d’oublier pour un instant le grand inventeur, le créateur inépuisable d’âmes véhémentes et originales, de considérer l’imitateur tout seul et sans lui imposer une comparaison qui l’accablerait. […] Une sorte de vision possédait l’artiste ; les paysages et les événements se déroulaient dans son esprit comme dans la nature ; il concentrait dans un éclair tous les détails et toutes les forces qui composent un être, et cette image agissait et se développait en lui comme l’objet hors de lui ; il imitait ses personnages, il entendait leurs paroles ; il trouvait plus aisé de les répéter toutes palpitantes que de raconter ou d’expliquer leurs sentiments ; il ne jugeait pas, il voyait ; il était involontairement acteur et mime ; le drame était son œuvre naturelle, parce que les personnages y parlent et que l’auteur n’y parle pas. […] Vers le mois d’avril 1700, il essaya de sortir ; son pied foulé se gangrena ; on voulut tenter l’opération, mais il jugea que ce qui lui restait de santé et de bonheur n’en valait pas la peine.

1407. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre IV. L’âge moderne. — Chapitre II. Lord Byron. » pp. 334-423

Dans ce collier de pierreries orientales, on a découvert les verroteries, et Byron, qui ne les aimait qu’à demi, avait mieux jugé que ses juges. Encore avait-il mal jugé ; les morceaux qu’il préférait sont les plus faux. […] Dès l’abord, il les avait vus ; les vrais artistes sont perspicaces ; c’est en cela qu’ils nous surpassent ; nous jugeons d’après des ouï-dire et des phrases toutes faites, en badauds ; ils jugent d’après les faits et les choses, en originaux : à vingt-deux ans il avait vu l’ennui né de la contrainte désoler toute la high life. « Là se tient debout la noble hôtesse, qui restera sur ses jambes — même à la trois-millième révérence. —  Les ducs royaux, les dames grimpent l’escalier encombré, et à chaque fois avancent d’un pouce1297. » — « Il faut aller voir à la campagne, écrivait-il, ce que les journaux appellent une compagnie choisie d’hôtes de distinction, notamment les gentlemen après dîner, les jours de chasse, et la soirée qui suit, et les femmes qui ont l’air d’avoir chassé, ou plutôt d’avoir été chassées… Je me rappelle un dîner à la ville chez lord C…, composé de gens peu nombreux, mais choisis entre les plus amusants. […] C’est bien jugé, et vous savez votre art.

1408. (1836) Portraits littéraires. Tome II pp. 1-523

Il suffit donc d’ouvrir l’histoire pour juger la théorie de M.  […] C’est pourquoi il y aurait de l’injustice à juger sévèrement Geffroy dans le rôle de Philippe II. […] Après avoir blâmé si sévèrement les silhouettes de Bossuet, l’auteur devait s’attendre à être jugé sans indulgence. […] Mais jugée absolument, sans tenir compte du lieu et de la date, que signifie cette sentence ? […] juger l’habileté, le bonheur ou la puissance de leurs études ?

1409. (1910) Victor-Marie, comte Hugo pp. 4-265

Ces quelques propos, ces quatre mots que vous avez jugés, que de bonne foi vous avez trouvés offensants, vous ne les avez jugés, vous ne les avez trouvés offensants que parce que vous les avez entendus dans le sens bourgeois, sur le plan bourgeois, dans le langage bourgeois. […] Il sait votre dessein ; jugez de ses alarmes. […] Je n’ai jamais eu l’intention de juger votre courage, de juger votre cœur. […] Ne jugez pas afin que vous ne soyez pas jugés, c’est l’une des paroles les plus redoutables qui aient été prononcées, l’une de celles qui me sont partout présentes. […] J’ai une telle horreur du jugement que j’aimerais mieux condamner un homme, que de le juger.

1410. (1898) Ceux qu’on lit : 1896 pp. 3-361

Geffroy a écrites sur la partie de la vie que Blanqui consacra à ces études, pour le juger définitivement. […] C’est ce que je fais et, dans ce livre rempli de jolies pièces, je prends quelques fragments de celle-ci dont l’harmonie, la placidité peuvent permettre de juger du reste. […] Que de choses évoque ce livre intéressant et qui nous permet de juger Rousseau sur d’autres témoignages que sur le sien propre, sur celui des faits que M.  […] L’auteur, esclave de la vérité, ne l’a pas jugé bon ; qu’il soit fait selon sa volonté ! […] Dès le début de ses études, le père de celui qui devait être le général Paulin se dirigea vers les sciences mathématiques, le dessin et l’architecture ; de là l’éducation que reçut notre héros, éducation quelque peu sévère, comme on en jugera.

1411. (1903) La vie et les livres. Sixième série pp. 1-297

Cependant, c’est un des hommes qui respectent le moins l’autorité de la « chose jugée ». […] Mme de Rémusat, Thiers, Mignet, Michelet ont cru que le conseil de guerre du 20 mars 1804 avait jugé par ordre. […] Elle jugea que « vingt batailles gagnées vont bien à la jeunesse, à la pâleur et à une sorte d’épuisement ». […] Et il le jugea ainsi : « M. de Choiseul a toutes les qualités et les défauts d’un homme de cour. […] Et les bons Hollandais jugeaient, en somme, que la « pilule » ainsi « dorée » n’était pas difficile à avaler.

1412. (1861) La Fontaine et ses fables « Deuxième partie — Chapitre I. Les personnages »

44 Ses prévôts y seraient pour régler la cérémonie et pour ranger l’assistance. » Car il faut que tout, même les choses mortuaires, soient en bel ordre, et dans une telle cour, une douleur non compassée messiérait. « Jugez si chacun s’y trouva. » Le prince sanglota et les courtisans se mouchèrent, chacun avec son geste propre, « en son patois », chacun tâchant de prendre la note du monarque. […] 78 Il regarde les jambons de son hôte, demande leur âge, loue leur mine, « les reçoit, et de bon coeur, déjeune très bien, comme aussi sa famille, chiens, chevaux et valets, tous gens bien endentés. » Cela l’égaye et il s’humanise, il daigne causer, juger, entrer dans les questions intimes. […] A côté de lui un cordonnier d’Athènes qui jugeait, votait, allait à la guerre, et pour tous meubles avait un lit et deux cruches de terre, était un noble. […] Jugez si chacun s’y trouva.

1413. (1863) Cours familier de littérature. XVI « XCIVe entretien. Alfred de Vigny (1re partie) » pp. 225-319

« — Ce sera celui que vous jugerez à propos, répondit Cinq-Mars. […] Voici comment, dans le secret de son amour-propre, il le jugea lui-même le jour où il déposa la plume encore humide et chaude qui venait de l’écrire. […] « Puisse cette forme ne pas être renversée par l’assemblée qui la jugera dans six mois ! […] — Arrêté, jugé, condamné !

1414. (1867) Cours familier de littérature. XXIV « CXLIIe entretien. Littérature cosmopolite. Les voyageurs »

On peut juger quelle riche pièce c’est, tant par le prix qu’elle coûte que par le nombre des chameaux qu’il faut pour la porter, qui est de deux cent quatre-vingts. […] Il toucha le plat en divers endroits, et le jugea à vingt-trois carats et demi, et me dit qu’il le garantissait à ce titre. […] Cela est vrai, la chose passerait pour une espèce d’infamie ; et de plus, ils disent qu’en voyant les habits d’une dame, on peut juger dessus de sa taille et de sa façon, et faire avec cela des sortiléges sur sa personne. […] Quand je le mettais adroitement sur ce sujet pour leur donner le moyen d’en parler, ils me répondaient: « Il y a beaucoup de richesses ; Dieu seul en sait le compte ; personne ne se voudrait donner la peine d’en lire le registre ; cela est infini. » Lorsque j’étais au trésor, on tira un rideau de devant un mur, que je vis tout couvert de sacs, rangés l’un sur l’autre, jusqu’à la voûte ; il y pouvait avoir quelque trois mille sacs, que je jugeai à leur forme être des sacs d’argent.

1415. (1870) De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés « De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés — Chapitre VI : Difficultés de la théorie »

Cependant, autant que j’en puis juger, je crois que le plus grand nombre ne sont qu’apparentes ; et même celles qui sont réelles ne me paraissent pas absolument inconciliables avec ma théorie. […] La sélection naturelle ne saurait produire la perfection absolue ; et, autant que j’en puis juger, je ne crois pas non plus qu’on puisse la rencontrer dans la nature. Nos autorités scientifiques les plus compétentes ne jugent pas encore parfaite la correction de l’aberration de la lumière dans l’œil, le plus parfait cependant de tous les organes. […] Mais la sélection naturelle ne saurait nécessairement produire la perfection absolue ; et, autant que nous en pouvons juger avec nos facultés bornées, cette perfection absolue ne se trouve en effet nulle part.

1416. (1903) Articles de la Revue bleue (1903) pp. 175-627

Il faudrait dire douze, s’il avait jugé bon de faire une étude nouvelle, après tant de devanciers, sur Byron. […] Pourtant, je ne voudrais pas, en insistant, attrister le noble poète qui a eu l’idée de ce concours, et je crois qu’il serait tout au moins prématuré de condamner son initiative généreuse avant qu’on ait pu la juger d’après ses résultats. […] En réalité, pour nous qui jugeons maintenant de loin, et d’une manière tout à fait désintéressée des disputes entre les écoles littéraires qui nous ont précédés, nous croyons discerner clairement pourquoi elles ne se comprenaient pas. […] Quand on aura accepté l’e muet comme muet dans le vers ; quand on aura fait rimer les pluriels avec les singuliers de même son ; quand le hiatus, jugé tolérable dans l’intérieur des mots ne choquera plus, s’il n’est pas cacophonique, entre deux mots différents ; quand enfin on aura fait leur place aux accents toniques et qu’on aura augmenté d’une ou deux le nombre possible les coupes ou césures, on aura réalisé à peu près toutes les réformes techniques aujourd’hui possibles.

1417. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Histoire du Consulat et de l’Empire, par M. Thiers, Tome xix. (L’île d’Elbe, — L’acte additionnel. — Le champ de mai.) » pp. 275-284

Tacite, là où il est beau et où il se déploie, est un grand peintre ; il est même, a-t-on dit, le plus grand peintre de l’Antiquité ; mais j’ai tant de peine, je l’avoue, à comprendre chez lui certains contournements de pensée, qu’il m’est difficile de croire que ce soit là l’unique manière de bien dire, ou même l’unique manière de bien voir et de juger.

1418. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « George Sand — George Sand, Indiana (1832) »

Ce n’est pas une analyse que j’essaye ; mais j’avais besoin de préciser les situations pour juger les caractères.

1419. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Virgile et Constantin le Grand par M. J.-P. Rossignol. »

Ce volume, qui doit être suivi d’une seconde partie, est un premier pas dans cette voie d’application où nos vœux l’appellent et où de plus compétents le jugeront.

1420. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Pensées »

L’humanité est plus grossière et plus forte en appétits que cela ; c’est comme si l’on voulait juger de l’ensemble d’une végétation rustique par quelques fleurs panachées de la serre du Luxembourg.

1421. (1874) Premiers lundis. Tome II « Poésie — Alexandre Dumas. Mademoiselle de Belle-Isle. »

Il ne laisse pas d’être singulier qu’on en soit venu, sans s’en douter, à ce point que, pour juger de la vraisemblance d’une œuvre dramatique, il faille presque approfondir un cas de médecine légale : je saute dessus ; le public a fait de même.

1422. (1796) De l’influence des passions sur le bonheur des individus et des nations « Section II. Des sentiments qui sont l’intermédiaire entre les passions, et les ressources qu’on trouve en soi. — Chapitre IV. De la religion. »

Dès qu’on est à l’abri du remord, on ignore ces repentirs du cœur ou de l’esprit qui s’accusent du hasard même, et jugent de la résolution par ses effets.

1423. (1899) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Septième série « Réponse à M. Dubout. » pp. 305-316

et j’ai le chagrin de la juger comme au premier jour.

1424. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — R — Rostand, Edmond (1868-1918) »

Quant à la langue et aux vers, vous avez pu en juger !

1425. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre XV. La commedia dell’arte au temps de Molière et après lui (à partir de 1668) » pp. 293-309

Nous avons remarqué précédemment que le Convitato di pietra fit très probablement plus d’un emprunt au Dom Juan de Molière qui avait fait sur la scène une courte apparition, car tandis que Molière était contraint de retirer son œuvre du théâtre, les Italiens continuaient de jouer impunément leur parade qui ne scandalisait personne ; ce qu’on jugeait condamnable le mardi cessait de l’être le mercredi, et Arlequin, voyant son maître s’engouffrer dans la flamme infernale, pouvait s’écrier : « Mes gages !

1426. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Deuxième partie. Ce qui peut être objet d’étude scientifique dans une œuvre littéraire — Chapitre III. L’analyse externe d’une œuvre littéraire » pp. 48-55

xxv, De l’institution des enfants ; xxvi, C’est folie de rapporter le vray et le faulx au jugement de notre suffisance ; xxvii, De l’amitié ; xxviii, Vingt-neuf sonnets d’Estienne de la Boétie ; xxix, De la modération ; xxx, Des cannibales ; xxxi, Qu’il fault sobrement se mesler de juger des ordonnances divines ; xxxii, De fuir les voluptez au prix de la vie, etc.

1427. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XXVIII » pp. 305-318

La Bruyère, dans la préface qui précède son discours de réception à l’Académie française, s’élève contre ces gens « qui, au lieu de prendre pour eux les divers traits semés dans un ouvrage, s’appliquent à découvrir lesquels et donnent au public de longues listes ou clefs des originaux auxquels ils ont jugé à propos de les appliquer.

1428. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome II « Querelles générales, ou querelles sur de grands sujets. — Première Partie. Des Langues Françoise et Latine. — De la langue Françoise. » pp. 159-174

Ce travail l’a mis plus à portée que tout autre de juger de l’abus qu’on fait souvent des droits réels de l’usage.

1429. (1824) Notes sur les fables de La Fontaine « Livre huitième. »

En effet, une idée fausse qui nous empêche de porter sur une chose un jugement sain, est comme un voile interposé entre nous et l’objet que nous voulons juger.

1430. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Seconde partie — Section 9, des obstacles qui retardent le progrès des jeunes artisans » pp. 93-109

Il faut que l’oeil d’un peintre soit accoûtumé de bonne heure à juger par une operation sûre et facile en même-temps, quel effet doit faire un certain mêlange, ou bien une certaine opposition de couleur, quel effet doit faire une figure d’une certaine hauteur dans un grouppe, et quel effet un certain grouppe fera dans le tableau, après que le tableau sera colorié.

1431. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Seconde partie — Section 12, des siecles illustres et de la part que les causes morales ont au progrès des arts » pp. 128-144

Comme nous voïons présentement qu’il se forme de temps en temps des congrès où les représentans des rois et des peuples qui composent la societé des nations, s’assemblent pour terminer des guerres et pour regler la destinée des états ; de même il se formoit alors de temps en temps des assemblées, où ce qu’il y avoit de plus illustre dans la Grece, se rendoit pour juger quel étoit le plus grand peintre, le poëte le plus touchant et le meilleur athlete.

1432. (1799) Jugements sur Rousseau [posth.]

Si dans ce moment on s’était pressé de le juger, on se trouverait aujourd’hui bien ridicule ; et il est un exemple qu’il ne faut pas se hâter de prononcer sur les hommes avant d’être bien sûr qu’ils sont à leur place.

1433. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre III. Mme Sophie Gay »

Mais cette réimpression n’en est pas moins intelligente, comme toute réimpression d’œuvres complètes, qui ramène sous le regard, en une seule fois, les forces éparpillées d’un esprit qu’il s’agit de juger définitivement, et qui peut être aussi regardée comme le dernier coup de sonde donné à l’opinion publique.

1434. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre XII. Mme la Princesse de Belgiojoso »

Mme de Belgiojoso ne l’a pas jugée.

1435. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « Deux diplomates »

Donoso Cortès n’avait pas prévu davantage que l’Empire, sorti d’un coup d’État et qu’il a bien jugé dans son effet immédiat, serait un temps d’arrêt infligé, pendant dix-huit ans, à la Révolution, qui n’a vaincu que parce que l’Empire, mal inspiré, après l’avoir été si bien, s’est lâchement abandonné à elle.

1436. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « Lenient » pp. 287-299

… Le brid’oisonisme historique, s’il était conséquent, s’abstiendrait de juger, mais alors il ne serait plus cette chose moderne et ineffable, le brid’oisonisme.

1437. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « M. Eugène Talbot » pp. 315-326

Jugez par là de ce qu’était cette langue générale du seizième siècle, qu’imitait Pascal, puisque le pauvre secrétaire gringalet d’Odet de Chatillon, resté obscur comme un insecte dans sa poutre, la parlait et récrivait aussi bien que Montaigne !

1438. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « Marie-Antoinette » pp. 171-184

Dans cette lumière qu’il faut allumer, et que MM. de Goncourt n’ont pas allumée, on distingue, on discerne jusqu’au fond mystérieux, mais clair, de cette merveilleuse source d’innocence ; on peut enfin juger cette vie, dont on dira encore : « Est-ce sûr ? 

1439. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « XII. Marie-Antoinette, par MM. Jules et Edmond de Goncourt » pp. 283-295

Dans cette lumière qu’il faut allumer, et que MM. de Goncourt n’ont pas allumée, on distingue, on discerne jusqu’au fond mystérieux, mais clair, de cette merveilleuse source d’innocence ; on peut enfin juger cette vie, dont on ose dire encore « Est-ce sûr ? 

1440. (1888) Les œuvres et les hommes. Les Historiens. X. « Léopold Ranke » pp. 1-14

l’historien ne peut pas plus oublier sa personnalité morale quand il écrit l’Histoire, que le critique lui-même qui va le juger.

1441. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « VI. Jules Simon »

… Est-ce le rachat d’un ancien silence, jugé impertinent par la Maison dans laquelle MM. 

1442. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XIV. M. Auguste Martin »

Louis-Auguste Martin, l’auteur de plusieurs ouvrages que je n’ai pas lus, que je n’ai pas besoin de lire, celui-ci me suffisant pour juger l’homme qui doit être, j’en suis sûr, de la plus profonde unité.

1443. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « Francis Lacombe »

Dans cette vaste constitution, il sera juste de voir figurer un syndicat chargé de représenter chaque profession au sein de la société générale ; de surveiller officiellement l’éducation des apprentis dans le ressort de chaque groupe industriel ; de juger tous les différends des fabricants entre eux ou les différends des chefs d’ateliers avec les ouvriers, afin que le moindre oubli des lois de l’humanité de la part du premier envers le dernier soit frappé d’une réprobation générale et flétri par le stigmate du déshonneur ; de veiller à l’exécution de la loi constitutive librement consentie et à la distribution des secours accordés aux travailleurs pauvres et nécessiteux sur la caisse de la communauté, qu’alimenteront les versements pécuniaires et fixes de tous les associés ; de blâmer, de condamner à une amende quelconque, et même au besoin d’exclure de l’association, tel fabricant ou chef d’atelier qui, par une production mauvaise ou quelque autre délit commis, soit envers les ouvriers soit envers les acheteurs, compromettrait les intérêts moraux ou matériels de toute une industrie. » Certes !

1444. (1862) Les œuvres et les hommes. Les poètes (première série). III « M. de Vigny. Œuvres complètes. — Les Poèmes. »

Certes, toute cette partie des œuvres de l’homme qui a écrit Stello, Grandeur et Servitude militaires, Cinq-Mars, Chatterton, La Maréchale d’Ancre, et traduit Othello et Shylock avec une précision qui est une création dans la langue, toute cette partie si considérable mérite d’être prise à part et jugée, en soi, par la Critique, et voilà pourquoi nous l’y mettons, à part, pour, dans d’autres volumes2, l’y retrouver.

1445. (1862) Les œuvres et les hommes. Les poètes (première série). III « M. Pécontal. Volberg, poème. — Légendes et Ballades. »

On en jugera par les premiers vers venus qui nous tombent sous la main, en ouvrant son poème : ……..

1446. (1908) Les œuvres et les hommes XXIV. Voyageurs et romanciers « Feuillet de Gonches »

III Ainsi, voilà le reproche à faire à ces Contes d’un vieil enfant, que les enfants sentiront peut-être, avec leur imagination vierge et le velouté sensible de leur ignorance, mais qui doivent être, en définitive, jugés par des hommes.

1447. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre quatrième. Du cours que suit l’histoire des nations — Chapitre VII. Dernières preuves à l’appui de nos principes sur la marche des sociétés » pp. 342-354

On jugera aussi si l’un a eu raison de croire jusqu’ici que Tarquin l’Ancien prétendit donner aux nations dans la formule dont nous venons de parler, un modèle pour les cas semblables. — Ainsi le droit des gens héroïques du Latium resta gravé dans ce titre de la loi des douze tables : si quis nexum faciet mancipiumque uti lingua nuncupassit ita jus esto .

1448. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Première partie. — Chapitre V. »

On ne peut en juger assez par quelques vers que le hasard nous a transmis ; mais la conjecture est vraisemblable.

1449. (1890) Dramaturges et romanciers

Voilà le type du jeune Français moderne quand il est réellement moral et bien doué ; jugez un peu de ce qu’il doit être quand il est immoral et sans esprit. […] La Petite Comtesse a été jugée très sévèrement ; on l’a, entre autres choses, accusée d’être une histoire improbable, impossible, que sais-je ? […] C’est toujours une grande souffrance que d’être tiré et sollicité en sens contraire, mais ici le martyre n’a rien en que de délicieux, à en juger par les œuvres qui en ont été le produit. […] Elle peut répondre, il est vrai, que des considérations trop élevées seraient déplacées dans l’examen des œuvres futiles ou imparfaites qu’elle est appelée à juger. […] On lit dans certains traités de rhétorique que la meilleure manière de juger un auteur est de le juger dans son propre style-et à l’aide même des procédés qui lui sont familiers.

1450. (1898) Manuel de l’histoire de la littérature française « Livre III. L’Âge moderne (1801-1875) » pp. 388-524

Correspondance de Lamartine, 13 avril 1819] ; et Lamartine écrit à de Maistre, le 17 mars 1820 : « M. de Bonald et vous, Monsieur le Comte… Vous avez fondé une école impérissable de haute philosophie et de politiques chrétiennes… elle portera ses fruits, et ils sont jugés d’avance. » Il a dû peut-être au contact ou à la conversation des de Maistre, des Lamennais et des Bonald cette vigueur et cette fermeté qui l’ont un moment dégagé du vague où il aspirait à se perdre ; et sans eux les Méditations ne seraient peut-être que « pures comme l’air, tristes comme la mort, et douces comme du velours » [Cf. sa lettre du 13 avril 1819]. […] « Il y a deux intentions dans la publication de ce livre, y disait le jeune poète, l’intention littéraire et l’intention politique, mais dans la pensée de l’auteur la dernière est la conséquence de la première, car l’histoire des hommes ne présente de poésie que jugée du haut des idées monarchiques et des croyances religieuses. » N’est-ce pas ici le lieu de rappeler que dès avant la publication des Odes, Victor Hugo était en relations étroites avec Lamennais ? […] Il n’y a pas d’histoire des choses contemporaines ; les mots eux-mêmes sont contradictoires ; et pour juger les hommes ou les œuvres de notre temps, nous manquons à la fois de la liberté, du recul, et des documents nécessaires. […] Paul Janet, La Philosophie de Lamennais] ; — et qui contient d’ailleurs quelques-unes de ses plus belles pages [Cf. son Esthétique]. — Mais ses grandes œuvres demeurent ses premières œuvres ; — et c’est d’après elles qu’il faut juger l’écrivain ; — qui offre cette singularité d’être l’un des moins personnels qu’il y ait dans son style ; — tout en étant l’un des plus « entiers » dans ses idées ; — et l’un des plus puissants de ce temps. — Qu’aussi bien sa manière, très dure à ses débuts, dans l’Essai sur l’indifférence, t.  […] 2º L’Homme et l’Écrivain ; — et que pour les comprendre, — mais surtout pour les juger, — il faut se représenter Alexandre Dumas fils — comme ayant affecté toute sa vie l’allure d’un révolté ; — dont l’indépendance aurait d’ailleurs été limitée — par ce besoin de plaire ; — et, pour plaire, de complaire à l’opinion — qui est toujours l’écueil de l’auteur dramatique.

1451. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Théocrite »

Mais qui est-ce qui nous jugera ? […] Cet homme d’esprit, qui manquait de plusieurs sens, se croyait fort en état de juger des diverses sortes de peintures, et en particulier de celles de l’amour : « Les anciens, dit-il dans son discours sur l’Églogue, n’ont guère traité l’amour que par ce qu’il a de physique et de grossier ; ils n’y ont presque vu qu’un besoin animal qu’ils ont daigné rarement déguiser sous les couleurs d’une tendresse délicate. […] Nous en sommes au moment où Delphis prend la parole ; et quoique ce soit Simétha qui nous le traduise, quoiqu’on nous rendant son discours elle continue certainement de le trouver plein de séduction et tout fait pour persuader, il nous est impossible, à nous qui sommes de sang-froid, de ne pas juger que ce beau Delphis était passablement fat et qu’il ne s’est guère donné la peine de paraître amoureux.

1452. (1858) Cours familier de littérature. VI « XXXIVe entretien. Littérature, philosophie, et politique de la Chine » pp. 221-315

Ils jugent ridiculement ce peuple ancêtre sur quelques grotesques en porcelaine, jouets d’enfants qu’on vend à Canton aux matelots de nos navires. Que penseraient-ils des publicistes chinois s’ils nous jugeaient nous-mêmes, nous Européens, sur ces caricatures, ignobles débauches d’art, qu’on dessine à Londres ou à Paris pour défigurer nos grands hommes et pour dérider nos populaces ? […] Pour bien juger la littérature politique d’un peuple, ce n’est pas à la renaissance, c’est à la pleine maturité de ce peuple qu’il faut l’étudier ; c’est donc dans les écrits littéraires et philosophiques du plus grand littérateur, du plus grand philosophe et du plus grand politique de la Chine que nous allons retrouver ces livres sacrés commentés, réformés et élucidés sous sa main.

1453. (1890) L’avenir de la science « XVII » p. 357

Le suffrage universel suppose deux choses : 1° que tous sont compétents pour juger les questions gouvernementales ; 2° qu’il n’y a pas, à l’époque où il est établi, de dogme absolu ; que l’humanité, à ce moment, est sans foi et dans cet état que M.  […] Ce qui fait que ces actes de l’Inquisition du Moyen Âge nous indignent, c’est que nous les jugeons au point de vue de notre âge sceptique ; il est trop clair, en effet, que de nos jours, où il n’y a plus de dogme, de tels faits seraient exécrables. […] C’est pour cela qu’il faut juger tout autrement les persécutions de l’Église au Moyen Âge et dans les temps modernes.

1454. (1864) William Shakespeare « Première partie — Livre II. Les génies »

On peut juger de la cruauté des romains par l’atrocité des gaulois. […] C’est là que Socrate avait été jugé. […] Les hauts faits de don Quichotte, ses coups d’éperon, sa grande lance en arrêt, sont jugés par l’âne, connaisseur en moulins.

1455. (1856) Cours familier de littérature. II « XIIe entretien » pp. 429-507

« J’étais le père des nécessiteux, et, quand la cause que j’avais à juger m’était obscure, je ne négligeais aucune peine pour la bien connaître. » VIII Et le monde tout entier, tel qu’il est, avec ses injustices, ses reproches, ses impatiences contre l’infortune qui se plaint, et même contre celle qui se tait, n’apparaît-il pas dans toute sa vérité par la voix des amis faux ou durs de l’homme juste, abattu devant eux dans la poussière ? […] La conscience est une faculté innée, chargée par le Créateur de juger et de gouverner l’âme. […] XVII Mais puisque cette seconde faculté, le sentiment, imprime à l’âme, par les passions, par le plaisir et par la douleur, une activité organique qu’elle n’aurait pas eue si elle n’eût été qu’intelligence, il lui fallait, pour diriger et juger cette activité, une troisième faculté d’une nature supérieure à l’intelligence et au sentiment.

1456. (1857) Cours familier de littérature. III « XVIe entretien. Boileau » pp. 241-326

C’est ce procès, si souvent débattu de nos jours avec la partialité et avec la passion des querelles d’esprit, que nous allons essayer de juger à notre tour, en comprenant bien et en faisant bien comprendre cet homme d’achoppement, Boileau. […] Le premier devoir et le premier droit d’un homme qui écrit sur la littérature universelle du genre humain, c’est d’être lui-même universel, c’est de s’élever par conséquent au-dessus des amours-propres, des préjugés, des superstitions d’esprit, des fanatismes nationaux de sa patrie et de son temps, pour juger les hommes par leurs œuvres et non par leurs prétentions. […] Dante, le Tasse, Pétrarque, Arioste étaient pour lui des livres fermés ; il ne pouvait juger ces grands esprits dont il ignorait la langue.

1457. (1857) Cours familier de littérature. IV « XXe entretien. Dante. Deuxième partie » pp. 81-160

C’est ce que tu vas entendre, et tu jugeras après si ce monstre m’a assez torturé. […] Jugez-en par les citations que je puise, non au hasard, mais presque à toutes les pages de ce délicieux pèlerinage à travers les larmes, que la prière console et que l’espérance essuie. […] Que l’Italie et la France du dix-neuvième siècle s’extasient à froid sur ces peintures monacales d’un paradis du treizième siècle ; que le fanatisme du moyen âge compare de telles conceptions et une telle langue aux conceptions élyséennes ou chrétiennes d’Homère, de Virgile, du Tasse, de Milton, de Fénelon, de Pétrarque, de Klopstock même dans sa Messiade, nous ne le comprenons que dans ceux qui jugent sur parole, et qui ne se sont pas donné, comme nous, la tâche rude de suivre vers à vers, pendant quatre-vingt-seize chants, ce rêveur immortel dans cet égarement mystique de son incontestable génie.

1458. (1906) La nouvelle littérature, 1895-1905 « Deuxième partie. L’évolution des genres — Chapitre III. Le roman » pp. 135-201

Transformée, « civilisée », cette jeune paysanne reprend conscience d’elle-même et devenue « indulgente » pour la beauté des autres, admiratrice même de cette beauté et par conséquent délivrée du souci d’être mal jugée, indépendante enfin, armée d’une conception de l’honneur plus personnelle et plus fière que celle qui lui était imposée, elle connaît des bonheurs insoupçonnés, une quiétude profonde et douce. […] Il n’était ni satanique, ni byronien, ni moyenâgeux, ni clair de lune… Jean de Tinan, au contraire, aimait la vie quoi qu’on ait pu dire d’elle, et bien résolu à ne point la prendre sur sa mauvaise réputation et à l’éprouver par lui-même, en jeune homme, quitte ensuite à la juger en homme50 », cet amour de la vie le poussa à réagir contre le romantisme. […] À juger sainement, il semblerait que, dans un temps où les femmes s’obstinent à vouloir être sincères, l’auteur du Petit Ami n’ait pas voulu leur laisser le monopole de la franchise.

1459. (1903) La renaissance classique pp. -

Nous nous mettrons en garde contre notre impression première, qui nous ferait juger monstrueux ou ridicules des individus que nous n’aurions pas assez pénétrés. […] Nous en croirons le témoignage de nos yeux et nous jugerons à la façon du peuple, dont l’instinct reconnaît sans hésiter « les êtres de race », — exemplaires uniques d’une perfection relative, devant lesquels tous les autres tombent au niveau d’ébauches grossières ou manquées. […] Effarés devant ce débordement, nous acceptons au hasard tout ce qu’on nous apporte, résignés à tout subir plutôt que de nous contraindre à lier les deux idées nécessaires pour juger cette marchandise et la renvoyer à son lieu d’origine.

1460. (1929) Critique et conférences (Œuvres posthumes III)

Jugez-en et ne riez pas trop de lui. […] Juger donc ! […] Je réponds qu’il faut attendre encore avant de juger ce cas très sérieux et très curieux d’un homme jeune, riche, porteur d’un grand nom, se livrant, cette fois, à la critique ouverte et franche. […] Chambige jugé par Verlaine « Chambige n’est pas et n’a jamais été ce qu’en littérature il est convenu d’appeler un décadent. […] Mais quelques esprits délicats de nos jours, heurtés par le côté bassement matériel de l’amour, par le prosaïsme des rapports journaliers, frappés de l’incomplet des formes féminines, du manque d’esthétique de leur amitié toujours peu sûre, ont jugé que la passion ordinaire ne pouvait jamais atteindre à ce haut point de désintéressement où se joue l’amitié entre hommes.

1461. (1895) Impressions de théâtre. Huitième série

Peut-être le public y trouverait-il çà et là un peu d’austérité, et jugerait-il aussi que Lindsey résiste un peu trop aisément à la tentation. […] Jugez si l’héroïque et naïf et violemment idéaliste colonel Fougas, retombant, après trois quarts de siècle, en pleine veulerie de la troisième République, doit être épouffé, et s’il doit épouffer les autres ! […] Quelques-uns ont jugé que cette conception manquait peut-être d’ampleur. […] Oui, dans cette vie que nous menons, où l’on n’a au fond pour objectif que l’argent, la vanité et le plaisir, où jamais on ne rentre en soi pour se juger et où, d’ailleurs, les principes manquent au nom desquels on se jugerait, la notion du bien et du mal finit par s’abolir en nous, et presque aucun de nous ne sait plus ce qu’il vaut moralement, ni ne se doute combien il vaut peu. […] Ils m’ont jugé pittoresque, beau à ma façon, — et irresponsable, comme le loup lâché à travers la forêt.

1462. (1886) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Première série

Il faudrait vivre toujours dehors, toujours dans la rue ou sur la place publique, toujours juger, toujours voter, toujours s’occuper de la politique, et cependant ne pas faire œuvre de ses dix doigts. […] Elle appartient le plus souvent et le plus vite à ceux qui ont coutume de juger avec assurance et d’après des principes arrêtés. […] Il aime juger. […] Et c’est pourquoi, encore qu’il y ait beaucoup à dire sur Bouvard et Pécuchet et que ce soit un livre franchement mauvais à le juger d’après les principes de M.  […] Des journaux, l’ayant senti, se sont avisés de donner des contes en guise de premiers-Paris, et le public a jugé que, contes pour contes, ceux-là étaient plus divertissants.

1463. (1920) Impressions de théâtre. Onzième série

Juger toujours, c’est peut-être ne jamais jouir. […] J’ai un peu de chagrin et de dépit, — et un étonnement que vous jugerez naturel, — d’avoir été assez bête pour ne pas trouver cela tout seul. […] Jugez plutôt. […] Il ne m’en faut pas plus pour le juger. […] Jugez-en d’ailleurs par le sujet.

1464. (1909) Nos femmes de lettres pp. -238

Ce sont là, on voudra bien le reconnaître, les meilleures garanties extérieures pour les juger littérairement. […] Libre au moraliste de faire telle réserve qu’il jugera bonne sur cet affaissement, sur ce perpétuel abandon de soi-même qui rend possible une création comme celle-ci. […] Jugez-en d’après ces soupirs ! […] Je me représente le plus déterminé des Misogynes, et, pour n’en citer qu’un, le plus illustre, Schopenhauer, revenant sur cette terre, et choisissant dans son écritoire la plus aiguë de ses plumes pour juger la production féminine de ce temps. […] Comment y demeurerait-il insensible, lui surtout qui ne saurait manquer de reconnaître en celles qu’il va juger tout un groupe de jeunes initiées ?

1465. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Werther. Correspondance de Goethe et de Kestner, traduite par M. L. Poley » pp. 289-315

Or, jugez de l’impression pénible qu’il dut faire à une première lecture sur les deux jeunes époux, qui y voyaient toute leur liaison de ces quatre divins mois dans la vallée de la Lahn divulguée en même temps et comme profanée par un mélange avec d’autres événements et des circonstances étrangères, moins délicates et moins pures. […] » Goethe s’empressa de répondre, d’expliquer, de se justilier, de demander un répit à ses amis irrités et alarmés pour qu’ils pussent juger de l’effet général avec plus de sang-froid et au vrai point de vue : « Il faut, mes chers irrités, que je vous écrive tout de suite pour en débarrasser mon cœur.

1466. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Madame Desbordes-Valmore. »

… « Si je vous vois un jour comme je le souhaite vivement, aurez-vous la patience et la courageuse franchise de m’apprendre ce qui est mal et ce qui est bien dans un style que je ne sais pas juger moi-même ? […] Jugez : toutes les misères à Lyon passant à travers la mienne ; vingt, trente mille ouvriers cherchant jour par jour un peu de pain, un peu de feu, un vêtement pour ne pas tout à fait mourir.

1467. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « L’Académie française »

. — Mais bientôt, vers le milieu de l’hiver, après janvier, l’ordre des travaux, l’examen des livres à juger, dont quelques-uns curieux ou importants, la matière académique enfin, force l’attention, occupe et ressaisit tout le monde. […] Halphen, redevient toute littéraire : c’est un prix de 1,500 francs à décerner tous les trois ans, l’Académie ayant le choix de l’ouvrage « qu’elle jugera à la fois le plus remarquable au point de vue littéraire ou historique et le plus digne au point de vue moral ».

1468. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Œuvres françaises de Joachim Du Bellay. [III] »

La lettre est du 31 juillet 1559 ; elle répond à de durs reproches du cardinal, dont on lui avait fait part ; en voici les passages les plus significatifs : « … Vous entendrez donc, s’il vous plaît, Monseigneur, qu’étant à votre service à Rome, je passois quelquefois le temps à la poésie latine et françoise, non tant pour plaisir que je prisse que pour un relâchement de mon esprit occupé aux affaires que pouvez juger, et quelquefois passionné selon les occurrences, comme se peut facilement découvrir par la lecture de mes écrits, lesquels je ne faisois lors en intention de les faire publier, ains me contentois de les laisser voir à ceux de votre maison qui m’étoient plus familiers. […] Par là, Monseigneur, vous pourrez juger si mon livre a été si mal reçu et interprété des personnages d’honneur comme de ceux qui vous l’ont envoyé avec persuasion si peu à moi avantageuse… » Du Bellay continue, en se défendant d’avoir voulu en rien toucher à l’honneur de Son Éminence, ce qui serait à lui « non une méchanceté, mais un vrai parricide et sacrilège ».

1469. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « La Bruyère »

On y voit trace d’une manière de juger littéralement l’illustre auteur, qui devait âtre partagée de plus d’un esprit classique à la fin du xviie et au commencement du xviiie  siècle : c’est le développement et, selon moi, l’éclaircissement du mot un peu obscur de Boileau à Racine. […] Il a peint les autres dans son amas d’invectives, et dans le discours qu’il a prononcé il s’est peint lui-même… Fier de sept éditions que ses Portraits satyriques ont fait faire de son merveilleux ouvrage, il exagère son mérite… » Et le Mercure conclut, en remuant sottement sa propre injure, que tout le monde a jugé du discours qu’il était directement au-dessous de rien.

1470. (1867) Cours familier de littérature. XXIV « CXLIVe entretien. Mélanges »

Je le retrouvai à Bourges, président du jury national chargé de juger l’insurrection étourdie à laquelle on a donné le nom de M.  […] Soyez bien persuadé que pas une ligne n’en paraîtra avant d’avoir subi les retouches que ma conscience et vos conseils jugeront propres à enlever à ce livre les dangers qui vous ont frappé.

1471. (1824) Observations sur la tragédie romantique pp. 5-40

Mais franchement, nous dirions plutôt : comparez Hanna à Œnone, et jugez de la distance entre Jodelle et Racine ; seulement ici c’est Jodelle qui vient cent ans après que Racine a paru. […] L’unique donnée est la catastrophe, et les spectateurs ont droit de la redemander telle qu’elle est dans leurs souvenirs : puisque le poète l’a choisie, c’est qu’il l’a jugée immédiatement tragique.

1472. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre I. La littérature pendant la Révolution et l’Empire — Chapitre IV. Chateaubriand »

Il a mieux jugé que la plupart des conseillers de Charles X la situation créée par la Révolution : nécessité de rassurer les acquéreurs de biens nationaux, impossibilité de supprimer la presse, et nécessité, si c’est un mal, de vivre avec ce mal. […] Tirer la conclusion définitive de la querelle des anciens et des modernes, montrer qu’à l’art moderne il faut une inspiration moderne (Chateaubriand disait chrétienne), ne pas mépriser l’antiquité, mais, en dehors d’elle, reconnaître les beautés des littératures italienne, anglaise, allemande, écarter les anciennes règles qui ne sont plus que mécanisme et chicane, et juger des œuvres par la vérité de l’expression et l’intensité de l’impression, mettre le christianisme à sa place comme une riche source de poésie et de pittoresque, et détruire le préjugé classique que Boileau a consacré avec le christianisme, rétablir le moyen âge. l’art gothique, l’histoire de France, classer la Bible parmi les chefs-d’œuvre littéraires de l’humanité, rejeter la mythologie comme rapetissant la nature, et découvrir une nature plus grande, plus pathétique, plus belle, dans cette immensité débarrassée des petites personnes divines qui y allaient, venaient, et tracassaient, faire de la représentation de cette nature un des principaux objets de l’art, et l’autre de l’expression des plus intimes émotions de l’âme, ramener partout le travail littéraire à la création artistique, et lui assigner toujours pour fin la manifestation ou l’invention du beau, ouvrir en passant toutes les sources du lyrisme comme du naturalisme, et mettre d’un coup la littérature dans la voie dont elle n’atteindra pas le bout en un siècle : voilà, pêle-mêle et sommairement, quelques-unes des divinations supérieures qui placent ce livre à côté de l’étude de Mme de Staël sur l’Allemagne.

1473. (1911) Enquête sur la question du latin (Les Marges)

2º Ne jugez-vous pas qu’on puisse, sans arrière-pensée politique, désirer que soit rétabli l’enseignement du latin ? […] — dans toutes les professions à base scientifique : observez la classe des ingénieurs, celle des médecins, celle des chimistes, physiciens, physiologistes, astronomes, etc…, vous verrez comme le primaire y domine, l’homme qui s’est spécialisé trop tôt et qui, en dehors de sa science (dont nous ne pouvons juger, puisque nous sommes des profanes) est lamentablement ignorant.

1474. (1854) Histoire de la littérature française. Tome I « Livre I — Chapitre premier »

Et de même que, pour juger du caractère d’un homme, vous ne l’irez pas prendre un jour où quelque désordre de santé l’aura dérangé de même pour apprécier l’esprit d’une nation, vous ne vous arrêterez pas à quelques égarements d’un jour, dont elle sera revenue le lendemain. […] On ne distingue pas par la langue les méchants écrivains des bons, et, parmi ceux qui sont jugés les meilleurs, on n’en choisit pas dont la langue doive faire autorité.

1475. (1863) Le réalisme épique dans le roman pp. 840-860

À n’en juger que par deux œuvres qu’un succès bruyant plutôt que sérieux désigne à l’attention de la critique, entre le réalisme de Goethe et le nôtre, il y a plus qu’un contraste, il y a un abîme. […] Si elle n’était pas justiciable de la critique médicale autant et plus que de la critique littéraire, comment juger l’intérêt qu’elle prend aux tortures de son amant, la curiosité qui l’enivre, la révélation qui se produit en elle, l’amour enfin, l’amour qui éclate dans sa conscience réveillée, à la vue de ce malheureux écorché, de cette longue forme rouge, qui marche toujours, toujours, les yeux attachés sur les siens ?

1476. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Chamfort. » pp. 539-566

Chamfort, ne sachant que faire pour subsister, se fit adresser d’abord à un vieux procureur en qualité de dernier clerc : le vieux procureur jugea qu’il était propre à mieux, et en fit le précepteur de son fils, qui avait à peine quelques années de moins. […] On peut sourire de bien des traits en lisant ce discours que Mirabeau comparait à un pamphlet de Lucien, mais le procédé est jugé moralement.

1477. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome premier — Livre troisième. Le souvenir. Son rapport à l’appétit et au mouvement. — Chapitre troisième. La reconnaissance des souvenirs. Son rapport à l’appétit et au mouvement. »

De là encore une sphère d’intensités plus ou moins grandes et de qualités distinctives, dans laquelle viennent se ranger non seulement toutes nos impressions sensibles, mais toutes les réactions motrices correspondantes : juger et « objectiver », c’est mesurer l’intensité et la qualité de la réaction nécessaire pour répondre à une impression ; c’est avoir conscience de la force centrifuge en rapport avec la force centripète, dans une représentation ou idée quelconque. […] Reconnaître, en effet, c’est juger, comparer, projeter les choses à l’extérieur, dans l’espace et dans le temps ; or, c’est la tendance au mouvement, inhérente à toute image, qui lui donne cette force de projection et d’extériorité, par laquelle sont engendrées les formes du temps et de l’espace84.

1478. (1913) Le bovarysme « Première partie : Pathologie du bovarysme — Chapitre V. Le Bovarysme des collectivités : sa forme idéologique »

Nombre d’esprits jugent en effet que la collectivité française est actuellement en proie à ce Bovarysme qui consiste à prendre pour une vérité universelle, indiscutable et dogmatique une attitude d’utilité préparée par une autre nation en vue de ses propres besoins. […] On jugeait, en effet, qu’il n’était pas seul offensé par un crime qui mettait en péril le bonheur et la sécurité de tous les ascendants.

1479. (1887) Journal des Goncourt. Tome I (1851-1861) « Année 1856 » pp. 121-159

Tout amoureux qu’il est de l’exhumation d’infimes personnalités, de petites médiocrités d’art provinciales, et qui condamnent cet esprit distingué et original à des travaux au-dessous de lui, Chennevières caresse toujours, à l’horizon de sa pensée, quelque petit conte normand ou vendéen : un entre autres, qui serait l’histoire d’un jeune homme prenant le fusil dans la levée d’armes en 1832, et jugé et mis au Mont Saint-Michel, et là, développant la politique qu’aurait pu faire prévaloir le parti légitimiste d’alors, la politique de la décentralisation, qui était la politique de la duchesse de Berry. […] Passionnée pour monter à cheval, pour conduire un panier, elle se trouve mal à la vue d’une goutte de sang, a la terreur enfantine du vendredi, du nombre treize, possède tout l’assemblage des superstitions et des faiblesses humaines et aimables chez une femme : faiblesses mêlées à d’originales coquetteries, celle du pied par exemple qu’elle a le plus petit du monde, et qu’elle porte toujours chaussé d’un soulier découvert à talon… Mal jugée et décriée par les femmes et les petites âmes qui ont l’horreur de la franchise d’une nature, elle est faite pour être aimée d’une amitié amoureuse par des contempteurs comme nous des âmes viles et hypocrites du monde.

1480. (1891) Journal des Goncourt. Tome V (1872-1877) « Année 1877 » pp. 308-348

mon Dieu, je me moque comme vous de ce mot naturalisme, et cependant, je le répéterai, parce qu’il faut un baptême aux choses, pour que le public les croie neuves… Voyez-vous, je fais deux parts dans ce que j’écris, il y a mes œuvres, avec lesquelles on me juge et avec lesquelles je désire être jugé, puis il y a mon feuilleton du Bien public, mes articles de Russie, ma correspondance de Marseille, qui ne me sont de rien, que je rejette, et qui ne sont que pour faire mousser mes livres. […] * * * — Saint-Simon jugé par Mme du Deffand : « Le style est abominable, les portraits mal faits, l’auteur n’était point un homme d’esprit. » Jeudi 11 octobre Il y a chez moi une aversion telle de la politique, qu’aujourd’hui, où c’est vraiment un devoir de voter, je m’abstiens… J’aurais passé toute ma vie, sans voter une seule fois !

1481. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Livre V : La religion — Chapitre II : Examen critique des méditations chrétiennes de M. Guizot »

Si nous n’avons pas d’autorité, vous n’en avez pas davantage, et vous tombez dans une contradiction qui au moins nous fait défaut : c’est qu’il y a un livre sacré et divin, auquel vous devez vous soumettre, et ce livre, c’est vous qui le jugez. Vous appelez Dieu à votre propre tribunal ; vous jugez en dernier ressort de la parole sainte !

1482. (1772) Bibliothèque d’un homme de goût, ou Avis sur le choix des meilleurs livres écrits en notre langue sur tous les genres de sciences et de littérature. Tome II « Bibliotheque d’un homme de goût — Chapitre III. Des Livres nécessaires pour l’étude de l’Histoire sacrée & ecclésiastique. » pp. 32-86

Mais vivant au milieu de payens qui haïssoient & méprisoient sa nation, il diminue autant qu’il peut la foi que l’on doit aux miracles ; & quand il parle de certains effets d’une Providence extraordinaire de Dieu dans la conduite de son peuple, il ajoute à son récit qu’on peut croire de ces merveilles ce qu’on en jugera à propos. […] Rien n’est mieux pensé que ce qu’il dit sur ces matieres ; & il nous a donné dans ces huit discours tous les éclaircissemens nécessaires pour juger sainement des révolutions arrivées dans la Religion.

1483. (1913) La Fontaine « VII. Ses fables. »

Est-ce à la tienne à juger de la nôtre ? […] La cigogne, à en juger par sa physionomie, a été admirablement saisie par La Fontaine.

1484. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « Michelet » pp. 167-205

Michelet, le Michelet de 1847, regardé, vu et jugé à la lumière des événements qui se sont produits depuis 1847, quelle expérience et quelle leçon ! […] … Tous les moyens pour atteindre à cette fraternité sublime, — impossible, selon nous, chrétiens, en dehors des voies religieuses et surnaturelles, — Michelet nous les donne dans son Cours, et nous allons les juger.

1485. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « Du docteur Pusey et de son influence en Angleterre »

Pour les bien juger, dans leur source comme dans leurs conséquences, il ne faut pas perdre de vue que l’anglo-catholicisme est du catholicisme encore, faussé, il est vrai, adultérisé par une haine impie et stupide contre Rome, mais pourtant du catholicisme, et du catholicisme protestant à son tour contre le Protestantisme de Henri VIII, c’est-à-dire le circonscrivant. […] — pourrait bien se montrer encore une fois dans la Grande-Bretagne… Que l’église réformée ou protestante tomberait alors, sinon par la forme, au moins par l’identité de la doctrine, dans l’apostasie romaine, et, certainement, si les personnes qui soutiennent les idées du Tract’s Magazine continuaient de les répandre, une telle éventualité ne serait pas seulement possible, mais probable… » Comme on peut en juger, l’aveu est formel, et il est d’un ennemi.

1486. (1879) L’esthétique naturaliste. Article de la Revue des deux mondes pp. 415-432

L’Évangile a dit qu’il fallait juger les arbres d’après leur fruit. […] Mais c’est notre droit de critique d’interroger ceux qui le suivent et se réclament de lui, qu’il encourage et protège, pour juger ce que valent ses théories, pour montrer ce qu’elles préconisent, d’où elles partent, où elles conduisent.

1487. (1906) Les idées égalitaires. Étude sociologique « Deuxième partie — Chapitre II. La qualité des unités sociales. Homogénéité et hétérogénéité »

Ces considérations permettent peut-être de juger une théorie qui a vite fait fortune : celle qui veut que fatalement la division du travail, condition nécessaire de tout progrès humain comme de tout perfectionnement biologique, entraîne l’inégalité. […] L’esprit qui a vu se succéder tant d’assimilations différentes se déshabitue de juger les gens sur l’étiquette qu’ils prennent, et, comme le veut l’égalitarisme, essaie de découvrir, sous l’uniforme momentané des collectivités, la valeur propre à l’individu.

1488. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « BRIZEUX et AUGUSTE BARBIER, Marie. — Iambes. » pp. 222-234

Mais chez l’auteur de Marie, tout cela est si habilement fondu, si intimement élaboré au sein d’une mélancolie personnelle et d’une originalité indigène, que la critique la plus pénétrante ne saurait démêler qu’une confuse réminiscence dans ce produit vivant d’un art achevé, et que si elle voulait marquer d’un nom ce fruit nouveau, elle serait contrainte d’y rattacher simplement le nom du poëte ; mais nous qui jugeons combien est sincère la modestie qui nous l’a caché81, nous ne prendrons pas sur nous de lui faire violence ; et pour conclure, nous nous bornerons à citer la plus touchante, à notre gré, des élégies que le nom de Marie décore : Partout des cris de mort et d’alarme !

1489. (1874) Premiers lundis. Tome I « Espoir et vœu du mouvement littéraire et poétique après la Révolution de 1830. »

Juillet 1830 étant venu interrompre d’un coup le développement de poésie et de critique auquel tant de jeunes esprits se confiaient de plus en plus, nous qui acceptions cette révolution tout entière et qui la jugions alors d’une bien autre portée qu’on n’a vu depuis, nous tâchions, dès les premiers moments, de remettre l’art en accord avec les destinées nouvelles que nous supposions à la société, et de le rallier à elle dans une direction agrandie et encourageante.

1490. (1895) Histoire de la littérature française « Cinquième partie. Le dix-huitième siècle — Livre II. Les formes d’art — Chapitre II. La tragédie »

Il ne put s’empêcher d’être frappé, pendant son séjour en Angleterre, de la sauvage énergie des pièces de Shakespeare, de l’intensité des passions, de la rapidité sensible de l’action matérielle : et si barbares qu’il les jugeât, elles lui firent paraître nos tragédies bien languissantes et bien froides.

1491. (1892) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Cinquième série « Édouard Rod »

Jugez plutôt.

1492. (1897) Le monde où l’on imprime « Chapitre XXI. Le littérateur chez les peintres » pp. 269-282

Les coloristes violents du paysage et du nu, les Émile Bernard, les Van Gogh, les de Groux, les Lautrec, les Anquetin, antérieurs aussi à nous, et jugés.

1493. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — T. — article » pp. 326-344

Il vous dira qu' il doit gouverner comme la Nature, par des principes invariables & simples, bien organiser l'ensemble, pour que les détails roulent d'eux-mêmes ; qu'il doit, pour bien juger d'un seul ressort, regarder la machine entiere, calculer l'influence de toutes les parties les unes sur les autres & de chacune sur le tout, saisir la multitude des rapports entre les intérêts qui paroissent éloignés ; qu'il doit faire concourir les divisions même à l'harmonie du tout, veiller sans cesse à retrancher la somme des maux qu'entraînent l'embarras de chaque jour, le tourment des affaires, le choc & le contraste éternel de ce qui seroit possible dans la Nature & de ce qui cesse de l'être par les passions *.

1494. (1905) Les ennemis de l’art d’écrire. Réponse aux objections de MM. F. Brunetière, Emile Faguet, Adolphe Brisson, Rémy de Gourmont, Ernest Charles, G. Lanson, G. Pélissier, Octave Uzanne, Léon Blum, A. Mazel, C. Vergniol, etc… « VII »

Comment peut-il même juger une traduction ?

1495. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre II. Mme Le Normand »

Il faut surprendre les yeux qu’on aime, quand ils s’ouvrent tout grands le matin, pour juger de la pureté de leur cristallin, sous cette lumière d’aurore, et pour bien savoir ce que c’est que la beauté de deux beaux yeux !

1496. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre VIII. Mme Edgar Quinet »

Je ne le trouvais pas assez froidi, — ni moi non plus — pour y toucher ; — pour juger impartialement cette époque de malheur et de honte que nous avons là traversée… Ce n’est pas quand nous sommes à moitié pris encore, sans être des Titans, sous la montagne qui nous a écrasés, qu’on peut porter un jugement historique sur des événements et des hommes contre lesquels on doit avoir des ressentiments implacables : les ressentiments du mal qu’ils nous ont fait et des humiliations que nous leur devons !

1497. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « Royalistes et Républicains »

Il l’a montré d’après les faits et aussi d’après les hommes qui les jugèrent, ces faits, ou qui se mesurèrent avec ces faits pour en être vaincus et terrassés.

1498. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « César Daly »

À qui peut la juger il est évident que cette œuvre, qui a demandé tant d’années, ce hardi et magnifique travail exécuté sur la cathédrale de France la plus effrayante de beauté et la plus désespérante pour qui oserait se charger d’y porter la main, peuvent faire pressentir à la critique un architecte créateur pour plus tard, un architecte, enfin, pour le propre compte de son génie !

1499. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « M. Taine » pp. 231-243

Taine, qui a oublié sa théorie et a jugé, comme tous les juges, d’après des principes établis dans sa tête, qu’après tout Carlyle était au-dessous de lord Macaulay.

1500. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « Lettres d’une mère à son fils » pp. 157-170

Rivarol disait, avec la belle voix d’or de son esprit : « La grandeur de nos facultés dépend de Dieu, mais de nous dépend leur harmonie. » Quel que soit donc celui des trois systèmes sur la nature humaine que l’on adopte, il est d’observation indéniable qu’il y a au fond de nous-mêmes une tendance prononcée à nous croire le centre de tout, à ne juger les choses que par rapport à nous, à traverser incessamment et dans tous les sens le plan de l’ordre avec mépris, et même les armes à la main.

1501. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « Vauvenargues » pp. 185-198

Ceci est particulièrement intéressant, instructif, excellent et nécessaire à connaître pour juger d’un talent que Voltaire s’est amusé à grandir outre mesure, et d’une moralité que ses éloges ont rendue suspecte.

1502. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « XVI. M. E. Forgues. Correspondance de Nelson, chez Charpentier » pp. 341-353

Ce fut un poète heureux comme il y en a dans toutes les littératures, pour la délectable mystification des sots qui se croient littéraires et se mêlent de juger.

1503. (1888) Les œuvres et les hommes. Les Historiens. X. « M. Henri de L’Épinois » pp. 83-97

Aux immunités personnelles et réelles, à l’exemption de la juridiction ordinaire, qui accordait aux clercs de ne pouvoir être traduits devant les tribunaux séculiers et de faire juger leurs causes, en matière même temporelle, par les tribunaux ecclésiastiques, s’ajouta l’arbitrage des évêques, qui prit le caractère d’une véritable juridiction et qui fit que les tribunaux séculiers purent dès lors être récusés par ceux qui désiraient soumettre les procès civils aux tribunaux ecclésiastiques.

1504. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « Madame Du Deffand »

Elle était trop l’aveugle clairvoyante pour ne pas le juger et le mépriser, mais aussi elle était trop faible et trop asservie pour ne pas l’implorer toujours !

1505. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « Nelson »

Ce fut un poète heureux comme il y en a dans toutes les littératures, pour la délectable mystification des sots qui se croient littéraires et se mêlent de juger.

1506. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Valmiki »

Encore une fois, nous le répétons, on peut passer beaucoup à un traducteur, comme à un voyageur qui revient de fort loin, mais il est des bornes pourtant à l’affirmation et à l’enthousiasme, surtout quand le traducteur est un homme de science et d’esprit qui, s’il ne s’agissait pas de son fétiche hindou, aurait le sentiment des choses poétiques tout aussi sûr et aussi net que nous qui le jugeons.

1507. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XI. Gorini »

Les prêtres vraiment prêtres n’ont ni nos manières de juger, ni nos manières de sentir la vie ; ils ne se laissent pas conduire par l’influence de nos misérables sentimentalités, et d’ailleurs peut-il y avoir une solitude pour qui fait descendre son Dieu tous les matins dans sa poitrine ?

1508. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XV. Vauvenargues »

Ceci est particulièrement intéressant, instructif, excellent et nécessaire à connaître pour juger d’un talent, que Voltaire s’est amusé à grandir outre mesure, et d’une moralité que ses éloges ont rendue suspecte.

1509. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « Ch. de Rémusat. Abélard, drame philosophique » pp. 237-250

Heureusement que l’ange de l’Église n’a pas eu besoin de dessécher le nerf de la cuisse d’un Jacob qui n’était plus jeune quand il voulait lutter encore, et qui ne fut jamais musculeux… L’Église, qui a condamné, en concile, Abélard, n’assemblera pas de concile pour juger les Abélards modernes.

1510. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « Georges Caumont. Jugements d’un mourant sur la vie » pp. 417-429

— ajoute-t-il en insistant, — je ne crois pas au ciel, mais je crois à l’enfer, où ma place est marquée de toute éternité ; à un enfer où l’inique Jeffries qui doit me juger m’ôtera, pour me confondre, le sentiment de l’iniquité divine, et par ses tout-puissants prestiges, domptant, éblouissant, affolant ma conscience, me fera avouer en grinçant des dents que l’injustice est juste, que l’horreur est clémente, qu’une faiblesse d’un instant exige une éternité de peine infinie ; que le péché originel, la prédestination, le petit nombre des élus, la damnation de Socrate et des enfants non baptisés, sont des miracles de miséricorde, et qu’il est juste et très juste qu’éternellement avec eux je hurle, et qu’éternellement ils râlent avec moi !!!

1511. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « L’abbé Brispot »

Quatre livraisons de son ouvrage, qui formera un magnifique volume grand in-4º, ont déjà paru, et par le cintre de ce portique commencé, on peut déjà juger de la grandeur et de l’entente de l’édifice.

1512. (1909) Les œuvres et les hommes. Philosophes et écrivains religieux et politiques. XXV « Gérard Du Boulan »

Son Alceste est faux, ridiculement faux ; mais le xviie  siècle, dont il le fait l’expression dans une de ses plus méprisables manifestations, mais le xviie  siècle est, dans son livre, regardé d’une vue nette et courageusement jugé.

1513. (1902) Les œuvres et les hommes. Le roman contemporain. XVIII « Ferdinand Fabre »

Ainsi, dans la grande scène, que l’auteur de Tigrane a eu l’art d’amener, de l’ouverture du cercueil de l’évêque de Roquebrun, et qui rappelle le déterrement du Pape Formose (une des plus grandes scènes à décrire de l’Histoire ecclésiastique et même à juger), Ferdinand Fabre nous a très bien peint son abbé, foudroyé d’envie dévorante et d’ambition exaspérée à la vue de ce cadavre enseveli dans ses éblouissants insignes d’évêque, et lui fait porter des mains qu’il ne peut retenir vers cette mitre et cet anneau qui lui soutirent le cœur de la poitrine.

1514. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « Mm. Jules et Edmond de Goncourt. » pp. 189-201

Or, comme il n’y avait là à attendre ni manière nouvelle de regarder et de juger cette société méprisable en tout, depuis ses mœurs jusqu’à ses arts, ni manière nouvelle non plus dans le procédé pour la peindre, car on ne renouvelle son talent qu’en agissant fortement sur le fond même de sa pensée, nous n’eussions plus parlé de MM. de Goncourt.

1515. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « Edgar Poe » pp. 339-351

Tel est le double caractère du talent, de l’homme et de l’œuvre que la traduction française, qui est très-bien faite, nous a mis à même de juger : la peur et ses transes, la curiosité et ses soifs, la peur et la curiosité du surnaturel dont on doute, et, pour l’expliquer, toutes les folies d’une époque et d’un pays matérialiste qui effraye autant qu’il attire.

1516. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XXVII. Des panégyriques ou éloges adressés à Louis XIII, au cardinal de Richelieu, et au cardinal Mazarin. »

C’est à ceux qui ont étudié l’histoire, à juger sur les faits.

1517. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [1] Rapport pp. -218

Une seconde fois, Monsieur le Ministre, vous avez consenti à penser que je n’avais pas tort ; et, grâce à vous, les poètes jugés sans ménagement ou non nommés dans le Rapport trouveront dans le Dictionnaire une large réparation de mes erreurs ou de mes oublis. […] Il est vraiment extraordinaire que, dans les premières pages de son Tableau de la poésie française, Sainte-Beuve ait jugé avec tant de légèreté un poète si intimement attendri, aux scrupules si douloureux. […] « Parlerai-je aussi de ceux qui jugeaient bon d’informer leurs contemporains de l’amour qu’ils portaient à leurs mères ? […] Et comme il nous pressait d’y venir, le cher ami qui n’écrivait qu’à nous seuls, n’avait confiance qu’en nous, ne voulait être jugé que par nous ! […] Vous n’ignorez pas à quel point ils saccagèrent la technique qu’ils jugeaient vieillie, que je crois éternelle.

1518. (1883) Essais sur la littérature anglaise pp. 1-364

Emerson, qui a si excellemment jugé cette faculté d’activité, aurait pu pousser beaucoup plus loin son analyse. […] L’individu isolé se place en dehors de la civilisation tout entière et s’attribue le droit de la juger. […] Comme Prospero, Shakespeare avait passé l’été de la vie, et, comme lui, il semble juger que cette époque est l’heure véritable de la retraite. […] Shakespeare s’était donc bien jugé, et la mort, qui approchait rapidement, ne lui donna que trop raison. […] Il a été jugé avec sévérité par les théologiens du parti opposé au sien.

1519. (1895) La vie et les livres. Deuxième série pp. -364

Et sur le vu de son nom et de son titre, vous le jugez apparemment burlesque. […] Ses professeurs et quelques-uns de ses camarades jugèrent cette façon d’écrire saugrenue et insolite. […] Nous avons trop senti et trop jugé, trop espéré et trop détruit. […] Origène, saint Augustin, Hegel et Schopenhauer proposent leurs opinions qui sont jugées saugrenues. […] Il ahurit le lecteur par de copieux commentaires où Palestrina, Orlando Lassus, Haendel, Bach, Haydn, Lesueur, Wagner, Berlioz, César Franck sont examinés, jugés et ordinairement condamnés.

1520. (1905) Études et portraits. Portraits d’écrivains‌ et notes d’esthétique‌. Tome I.

La noblesse et le clergé, il les jugea d’un mot : « Ils ont », disait-il, « oublié ce principe : Res eodem modo conservantur quo generantur… Les fortunes se conservent par les mérites qui les ont acquises. » Quant aux utopies des démocrates, il n’y croyait point. […] Qui pouvait en juger parmi ses contemporains, ivres d’engouement, et parmi ses successeurs, aveugles d’injustice ? […] Parlant d’un projet de régicide, Jacques Vingtras s’écrie : « Il aurait fallu être en bande et que personne ne fût spécialement l’assassin… » Apercevez-vous là, même dans la révolte, le civilisé, pour qui la conscience des autres existe et qui ne peut pas se sentir jugé ? […] Il a eu beau choisir un sujet situé aux antipodes de son mondé moral, le raconter tout uniment et sans une seule réflexion, maintenir chacun de ses personnages à un même plan d’indifférente impartialité, ne pas juger, ne pas conclure, sa vision de l’existence le révèle tout entier. […] Au demeurant ces juges méritaient eux-mêmes d’être jugés et avec sévérité, car ils se permettaient nombre d’erreurs.

1521. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre IV. L’âge moderne. — Chapitre I. Les idées et les œuvres. » pp. 234-333

Néanmoins l’esprit longtemps fatigué par l’uniformité d’une perspective monotone et désolée fixera ses yeux avec joie sur tout objet qui mettra un peu de variété dans ses contemplations, ne serait-ce qu’un chat jouant avec sa queue1190. » Somme toute, il avait le cœur trop délicat et trop pur : pieux, irréprochable, austère, il se jugeait indigne d’aller à l’église, ou même de prier Dieu. « Ceux qui ont trouvé un Dieu et qui ont la permission de l’adorer ont trouvé un trésor dont ils n’ont qu’une idée bien maigre et bien bornée, si haut qu’ils le prisent. […] Jugez si des Anglais peuvent réussir en ce genre. […] Jugez par là de ses goûts et de son assiduité d’antiquaire. […] Nous reconnaissons, si vous voulez, que vos sentiments sont intéressants ; encore pourriez-vous vous dispenser de nous les faire passer tous en revue. « Hier, j’ai lu le Parfait pêcheur de Walton ; sonnet. —  Le dimanche de Pâques, j’étais dans une vallée du Westmoreland ; autre sonnet. —  Avant-hier, par mes questions trop pressantes, j’ai poussé mon petit garçon à mentir ; poëme. —  Je vais me promener sur le continent et en Écosse ; poésies sur tous les incidents, monuments, documents du voyage. » Vous jugez donc vos émotions bien précieuses, que vous les mettez toutes sous verre ? […] Il jugea la société par l’oppression qu’il subissait, et l’homme par la générosité qu’il sentait en lui-même, crut que l’homme était bon et la société mauvaise, et qu’il n’y avait qu’à supprimer les institutions établies pour faire de la terre « un paradis. » Il devint républicain, communiste, prêcha la fraternité, l’amour, même l’abstinence des viandes, et, comme moyen, l’abolition des rois, des prêtres et de Dieu1230.

1522. (1891) La vie littéraire. Troisième série pp. -396

Elle répugne trop à son esprit autoritaire et méthodique, qui veut toujours classer et toujours juger. […] Quelle philosophie jugée par les mœurs n’a pas d’abord été condamnée ? […] Louk la jugea médiocre ; il ne se dissimulait pas que son ami avait l’esprit un peu épais. […] Elle jugea avec raison qu’elle ne pouvait se dispenser de le recevoir. […] Il s’empara de Schnoudi, le fit juger et condamner à mort.

1523. (1899) Musiciens et philosophes pp. 3-371

Il parle de cette œuvre avec la radicale incompétence d’un aveugle qui jugerait un Rembrandt. […] Il ne comprend pas que l’art ne doit pas être jugé bon ou mauvais selon le sujet et la matière qu’il traite. […] Si c’est à leur puissance de contagion qu’il faut uniquement juger les productions de l’Art, où irons-nous ? […] Il se « surmonte » constamment, sans manifester d’ailleurs à l’égard de sa propre pensée cette « mystérieuse hostilité » qu’il estimait nécessaire pour juger sainement. […] Les Orientaux, au contraire, ont dû pratiquer très tôt l’harmonie, à en juger par le nombre, l’importance et la complication des instruments dont, de temps immémorial, ils se servent pour accompagner leurs chants.

1524. (1927) Des romantiques à nous

Puisse le lecteur juger qu’elles font passer dans cette matière confuse quelque filet de lumière ! […] La plupart de ces demandes visent des passages jugés offensants pour la croyance catholique. […] Il faudrait entendre exécuter au théâtre l’une et l’autre de bout en bout et juger de l’effet. […] Ce sont réserves de principe qui montrent avec quelle prudence la question doit être jugée. […] Wagner en jugeait un peu vite.

1525. (1925) Feux tournants. Nouveaux portraits contemporains

De son enfance, il passera tout à coup à un âge où une maturité soudaine lui permet de juger d’un trait lucide tous ceux qui l’entourent. […] Sainte-Beuve et Taine voudront moins juger qu’expliquer. […] Mais ne jugeons pas vite un esprit qui provoque tant de commentaires irrités. […] Jean-Christophe jugeait la France avec plus de lucidité que son propre pays. Ce qui sépare Romain Rolland de notre génération, c’est que nous voulons nous juger nous-mêmes ; et le travail pour l’établissement de la paix, ne nous paraît pas du seul domaine littéraire.

1526. (1925) Portraits et souvenirs

Il jugeait un usage comme un tableau, une foule comme un paysage, un esprit comme un cristal, car la pensée a ses réfractions. […] Comme il doit juger encore en sa tête de marbre ses compagnons de jardin ! […] J’ai pu juger par moi-même avec quel enthousiasme José-Maria de Heredia aimait cette pittoresque et mélancolique contrée. […] Mais il ne se plaît pas seulement à nous faire connaître ses héros, il nous aide à juger des qualités qu’ils ont déployées en leurs difficiles travaux. […] Jugez la joie d’un polisson de dix ans !

1527. (1870) De l’intelligence. Deuxième partie : Les diverses sortes de connaissances « Livre deuxième. La connaissance des corps — Chapitre II. La perception extérieure et l’éducation des sens » pp. 123-196

. — À la substance corporelle jugée permanente correspondent une possibilité et une nécessité permanentes de sensations et, en général, d’événements. — Toute perception extérieure se réduit à l’assertion d’un fait général pensé avec ses conditions. — Concordance ordinaire de la loi réelle et de la loi mentale. — Adaptation générale de l’ordre interne à l’ordre externe. — Établissement spontané, perfection progressive, mécanisme très simple de cette adaptation. […] Partant, quelques-uns d’entre eux avaient appris à diriger leur regard, et, jusqu’à un certain point, ils savaient, d’après l’affaiblissement des couleurs, juger de la distance. […] En un instant, par une simple diminution de la convergence des yeux, nous jugeons qu’un objet est de vingt pas plus éloigné qu’un autre. En un instant, par un simple mouvement continu de l’œil, nous jugeons que telle surface est carrée ou triangulaire.

1528. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Lamartine — Note »

Lainé plus énergique et moins fébrile, aussi pur, assistant, non sans une ombre de tristesse, à l’orgie parlementaire, à ce marché d’intrigues et de corruptions qui se démena durant tout le règne de Louis-Philippe, et sans y prendre d’autre part que de s’y pencher de temps en temps, et d’y plonger le regard pour le juger avec honnêteté et dégoût et pour le flétrir (comme il fit à un moment pour la coalition sous le ministère Molé), mais, je le répète, sans jamais en revendiquer profit pour lui ni en tirer prétexte à des combinaisons ambitieuses : je l’eusse voulu, en un mot, plus platonique et plus désintéressé, plus parfait qu’il n’est donné sans doute à la nature humaine de l’être.

1529. (1862) Portraits littéraires. Tome II (nouv. éd.) « Appendice à l’article sur Joseph de Maistre »

A lire les dernières pages des Soirées de Rothaval, je crois voir un homme qui a entendu durant plus de deux heures une discussion vive, animée, étincelante de saillies et même d’invectives, soutenue par le plus intrépide des contradicteurs, et qui, prenant son voisin sous le bras, l’emmène dans l’embrasure d’une croisée, pour lui dire à voix basse : « Vous allez peut-être me juger bien hardi, mais je trouve que cet homme va un peu loin. »  — L’épigraphe qui devrait se lire en toutes lettres au frontispice des écrits de M. de Maistre est assurément celle-ci : A bon entendeur salut !

1530. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre II. Des tragédies grecques » pp. 95-112

Dans les tragédies, comme dans les poèmes, on est sans cesse frappé de ce qui manquait aux affections du cœur, lorsque les femmes n’étaient point appelées à sentir ni à juger.

1531. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre I. La préparations des chefs-d’œuvre — Chapitre IV. La langue française au xviie  »

Mais elle était en réalité, elle fut pendant tout le siècle l’expression très fidèle de l’esprit qui prévalait dans la société polie ; et si l’on voulait se convaincre qu’il ne faut pas juger tout le siècle par ses grands écrivains, on n’aurait qu’à regarder comment ils furent toujours, par le nombre, une minorité, et, par le goût, une opposition dans l’Académie.

1532. (1889) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Quatrième série « Stendhal, son journal, 1801-1814, publié par MM. Casimir Stryienski et François de Nion. »

C’est que, nous avons beau faire effort pour nous affranchir, il est des cas où, en vertu de notre éducation, nous fixons malgré nous des limites à la liberté d’esprit, et nous sommes tout prêts à la nommer autrement quand elle insulte à certains sentiments que nous jugeons sacrés et hors de discussion.

1533. (1897) Le monde où l’on imprime « Chapitre XV. Les jeunes maîtres du roman : Paul Hervieu, Alfred Capus, Jules Renard » pp. 181-195

Il s’abstient de juger.

1534. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — F. — article » pp. 272-292

Nous ne parlons pas de ses Ouvrages ascétiques ; c’est à la piété à les juger.

1535. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome II « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Jean-Baptiste Rousseau, et Joseph Saurin. » pp. 28-46

On a fait ces vers : Ci gît Boindin, je ne sçais où ; Mais, en quelque lieu qu’il repose, Il fut ou bien sage, ou bien fou ; Je vous laisse à juger la chose *.

1536. (1767) Salon de 1767 « Peintures — Renou » pp. 301-307

Si Boileau avait raison de dire : la plus belle pensée ne peut plaire à l’esprit, quand l’oreille est blessée jugez d’un chant sous lequel l’harmonie serait raboteuse et dure, d’un tableau qui pèche par l’accord des couleurs et l’entente des ombres et des lumières.

1537. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre IV. Mme Émile de Girardin »

Une fois le poëte ou l’âme poétique mis hors de question en Mme de Girardin, nous sommes plus libre pour juger ce qu’elle a introduit d’artificiel et de volontaire dans son être ému ou inspiré.

1538. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « Louis XVI et sa cour »

Pour juger Louis XVI, c’est un guide assez curieux.

1539. (1905) Les œuvres et les hommes. De l’histoire. XX. « La Paix et la Trêve de Dieu »

Nous l’avons dit déjà, l’auteur de la Paix et la Trêve de Dieu ne voit pas la déduction des faits et leur ensemble, mais, ce qui est bien plus grave encore, il n’a pas le sentiment de l’importance de chacun de ces faits que sa fonction d’historien l’appelle à juger.

1540. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « XVII. Mémoires du duc de Luynes, publiés par MM. Dussieux et Soulier » pp. 355-368

Juger douze volumes par quatre paraîtra peut-être bien léger aux esprits graves ; mais je les supplie de remarquer que ce n’est pas du tout le texte, en soi, de ces quatre volumes publiés qui me fait induire le texte des huit qui vont suivre, c’est quelque chose d’un peu plus profond.

1541. (1888) Les œuvres et les hommes. Les Historiens. X. « M. Oscar de Vallée » pp. 275-289

Oscar de Vallée a voulu juger.

1542. (1895) Les œuvres et les hommes. Journalistes et polémistes, chroniqueurs et pamphlétaires. XV « Armand Carrel » pp. 15-29

Voilà ce qu’il ne faut jamais perdre de vue quand on veut bien juger Carrel.

1543. (1895) Les œuvres et les hommes. Journalistes et polémistes, chroniqueurs et pamphlétaires. XV « Eugène Pelletan » pp. 203-217

Béranger, seul de tous ces hommes exagérés ou faussés en mal ou en bien, Béranger seul est étonnamment bien jugé.

1544. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « Balzac »

Et, cela étant reconnu et irréfragablement certain, la Critique n’a point ici à s’occuper du génie de Balzac, incontestable comme la lumière, ni de ses Œuvres, pour lesquelles, s’il était nécessaire de les analyser et de les juger, il faudrait l’étendue d’un Cours de littérature, mais elle va s’occuper de son âme, de sa personne morale, à Balzac, aperçue, soupçonnée à travers son génie, mais vue — et pour la première fois — dans le plein jour d’une Correspondance qui montre la plus magnifique nature dans sa complète réalité !

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