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1200. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « M. EUGÈNE SCRIBE (Le Verre d’eau.) » pp. 118-145

Mais, comme à Hercule, la vertu d’une part et le plaisir de l’autre ne vinrent pas en personne s’offrir à lui pour l’éprouver ; entre la grande et haute comédie et un genre sans brodequins et moins littéraire, il n’eut pas à choisir : ce dernier seul se présenta. […] Et ici je ne ferai qu’exprimer une idée, un regret qu’on me suggère, mais que je sais partagé par les personnes les mieux entendues de la Comédie-Française elle-même67. […] Scribe, comme tous, a sa forme favorite sans doute, mais il la dissimule mieux que personne, et il déjoue par sa variété. […] Scribe achève de prouver qu’il suffit à toutes les conditions de la scène française où il a pied désormais plus que personne.

1201. (1889) Histoire de la littérature française. Tome III (16e éd.) « Chapitre douzième. »

Cette déclaration, dans une préface où La Bruyère répond à toutes sortes d’attaques, n’est donc qu’une précaution du côté des dévots ; elle ne doit tromper personne sur le caractère plus philosophique que religieux de sa morale. […] Tant qu’on n’avait vu au gouvernement qu’un roi moins la royauté, comme Richelieu, ou qu’un habile homme d’affaires comme Mazarin, personne n’avait eu au-dessus de sa tête quelque chose d’assez grand pour se trouver petit, et, par cette comparaison, arriver à une juste idée de soi. […] Il y avait une sorte de proportion en toutes choses, et la plus grande des sociétés modernes se laissait voir dans ce moment de repos, où il faut prendre le portrait des nations comme des personnes. […] La conformité du lecteur avec le livre est donc complète ; il y retrouve tout ceux qu’il connaît, et il y figure de sa personne.

1202. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Huet, évêque d’Avranches, par M. Christian Bartholmèss. (1850.) » pp. 163-186

J’ai consulté bien des savants : Huet, cet évêque d’Avranche, Qui pour la Bible toujours penche, Prétend qu’un usage si beau Vient de Noé………………… Soyez donc la plume la plus savante de l’Europe, l’homme de la plus vaste lecture qui fut jamais, le dernier de cette forte race des savants du xve et du xvie  siècle, joignez-y dans votre personne et dans votre procédé tout ce qui constituait l’homme poli, l’homme du monde et même de Cour, ce qu’on appelait l’honnête homme sous Louis XIV, et tout cela pour que, sitôt après vous, on ne sache plus que votre nom, et qu’on n’y rattache qu’une idée vague, un sourire né d’une plaisanterie ! […] J’ai vu les lettres décliner et tomber enfin dans une décadence presque entière ; car je ne connais presque personne aujourd’hui que l’on puisse appeler véritablement savant. […] « Je puis donc dire, ajoutait Huet, que j’ai vu fleurir et mourir les Lettres, et que je leur ai survécu. » Ce qu’il disait là, ce n’était point par esprit chagrin, ni en qualité de vieillard qui dénigre le présent et se plaît à glorifier le passé ; personne n’eut l’esprit plus uni, plus égal et moins chagrin que Huet. […] Huet naquit à Caen, en 1630, d’un père déjà vieillard, qui lui communiqua peut-être de ce tempérament rassis et de cette égalité d’âme qui le distingua dans toute sa longue vie ; d’une mère jeune, spirituelle, « d’une humeur charmante, d’un entretien enjoué, d’un esprit délicat et pénétrant, qui savait remarquer finement le ridicule des choses et des personnes ».

1203. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « L’abbé Galiani. » pp. 421-442

Marmontel disait de lui également : « L’abbé Galiani était de sa personne le plus joli petit Arlequin qu’eût produit l’Italie ; mais, sur les épaules de cet Arlequin, était la tête de Machiavel. » Ce nom d’Arlequin qui revient ici est caractéristique de Galiani. […] Il ajoutait encore que l’incrédule, celui qui persiste à l’être à tous les instants, fait un vrai tour de force ; qu’il ressemble à « un danseur de corde qui fait les tours les plus incroyables en l’air, voltigeant autour de sa corde ; il remplit de frayeur et d’étonnement tous les spectateurs, et personne n’est tenté de le suivre ou de l’imiter ». […] Je sais à présent quelles sont les personnes qui m’ont le plus intéressé à Paris ; dans les premières années je ne les distinguais pas. » Le jour où il perd Mme d’Épinay, ce jour-là seulement son âme se brise, sa vie parisienne est close ; le Galiani parisien meurt avec elle, le Galiani napolitain continue de végéter. Une femme de Paris, Mme Du Bocage, lui avait proposé de remplacer auprès de lui Mme d’Épinay comme correspondante, pour le tenir au courant des choses et des personnes ; il refuse cette distraction et ce soulagement : Il n’y en a plus pour moi, s’écrie-t-il avec un accent qu’on ne saurait méconnaître ; j’ai vécu, j’ai donné de sages conseils, j’ai servi l’État et mon maître, j’ai tenu lieu de père à une famille nombreuse ; j’ai écrit pour le bonheur de mes semblables ; et, dans cet âge où l’amitié devient plus nécessaire, j’ai perdu tous mes amis !

1204. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Madame Émile de Girardin. (Poésies. — Élégies. — Napoline. — Cléopâtre. — Lettres parisiennes, etc., etc.) » pp. 384-406

On sent que, dès l’origine, la source intérieure, intime, n’est pas très abondante, et que cette chevalerie de tête et de cœur, dont le poète s’exalte un moment, ne saurait longtemps tenir devant l’esprit qui est tout à côté dans la même personne, et qui va tout déjouer. […] Jouée pour la première fois au Théâtre-Français, le 13 novembre 1847, cette tragédie eut quelques soirs de succès, j’étais à cette première représentation, et j’en jouis encore, ainsi que de toute cette salle brillante, de cette foule d’élite, de cette jeunesse élégante et empressée à un triomphe que personne n’avait le mauvais goût de contester. […] Bien peu de personnes seraient capables d’en faire autant. […] Il est temps de le dire, Mme de Girardin comme femme, et là où elle se montre de sa personne, paraît bien supérieure, jusqu’ici, à ce qu’elle a été comme auteur.

1205. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Mirabeau et Sophie. — II. (Lettres écrites du donjon de Vincennes.) » pp. 29-50

Le Noir, lieutenant général de police, homme bon et humain, touché dès l’abord de la situation de Mirabeau, lui permit de correspondre avec Sophie et avec quelques autres personnes, à la condition que les lettres passeraient par les mains de M.  […] Personne au monde, qu’elle et son amant, n’a été puni de leur erreur, si vous appelez ainsi leur démarche. […] C’est un amateur empressé, curieux, qui traverse le pays, interroge chacun au passage, ne dédaigne personne et ne songe évidemment qu’à s’instruire. […] M. de Buffon est le plus grand homme de son siècle et de bien d’autres… » Et il dit quelque part dans une de ses notes manuscrites de Vincennes : On peut justement appliquer à M. de Buffon ce que Quintilien dit d’Homère : « Hunc nemo in magnis, etc. » — Jamais personne ne le surpassera en élévation dans les grands sujets, en justesse et en propriété de termes dans les petits.

1206. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Rivarol. » pp. 62-84

Sa vanité s’en accommodait aussi, car, en causant, il se trouvait tout naturellement le premier ; personne, lui présent, ne songeait à lui disputer cette prééminence. […] Rendez-vous de la France et de l’Europe, Paris n’est la patrie de personne, et on ne peut que rire d’un homme qui se dit citoyen de Paris. […] Marié, mais séparé de sa femme, qui n’était pas exempte de quelque extravagance, il avait emmené avec lui une petite personne appelée Manette, qui joue un certain rôle dans sa vie intime : c’est cette personne à qui il conseillait, comme elle ne savait pas lire, de ne jamais l’apprendre ; la pièce de vers très connue qu’il lui adressa se terminait ainsi : Ayez toujours pour moi du goût comme un bon fruit,        Et de l’esprit comme une rose.

1207. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Le comte-pacha de Bonneval. » pp. 499-522

J’ai eu part à tant de négociations et d’affaires très secrètes de tous les États ennemis de la France, que des gens de cabinet trouveraient au moins de quoi s’amuser agréablement par des choses très variées et assez extraordinaires, que personne ne sait que moi, ou peu de gens qui ont intérêt qu’on les mette en oubli. […] Quoique j’aie lieu de croire qu’il ne vous est rien arrivé, personne n’en parlant, je ne puis m’empêcher de joindre à ma peine mille alarmes, qui me mettent dans un état que vous ne comprenez point, puisque vous pouvez être deux mois sans me donner le moindre signe de vie. […] Par un tact qui est propre aux femmes, elle se rejette sur la parenté et n’appelle plus que cousin celui qu’elle voulait nommer d’un nom plus doux : Adieu, mon cher cousin ; rendez-en à une personne qui n’en rendra jamais qu’à vous, mon cœur vous étant sacrifié sans partage. […] La tête de Bonneval s’exalte ; il sort évidemment du droit sens, et nous le retrouvons ce que nous l’avons précédemment trouvé avec Chamillart, et bien au-delà : Les personnes de ma naissance ont trois maîtres : Dieu, leur honneur, et leur souverain… Nous ne devons rien à ce dernier qui puisse choquer les deux premiers.

1208. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Le maréchal Marmont, duc de Raguse. — II. (Suite.) » pp. 23-46

M. de Montessuy, ancien aide de camp du maréchal, lui fut envoyé de Paris cette journée même du 1er avril, avec des lettres de personnes considérables et de tout point honorables, et des sollicitations de tout genre. […] Une réponse fut faite en ce sens par Marmont aux ouvertures du prince de Schwarzenberg, et, en attendant l’acceptation définitive, une autre lettre fut préparée par lui et adressée à l’Empereur, dans laquelle il lui disait qu’ayant rempli ce qu’il devait au salut de la patrie, il venait désormais remettre en ses mains sa tête et sa personne. […] On parlait de l’expédition d’Alger ; bien des personnes en haut lieu paraissaient la croire impossible. […] Il jugea ces mesures comme tout homme sensé les appréciait alors ; il en parla ainsi à toutes les personnes qu’il vit dans la journée, et à l’Institut même : « Jamais insulte plus grande n’avait été faite au bon sens d’une nation. » Et j’irai ici au-devant de toute méprise.

1209. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Mémoires de Daniel de Cosnac, archevêque d’Aix. (2 vol. in 8º. — 1852.) » pp. 283-304

Pour peu qu’ils ressemblassent à cet échantillon de sa personne, combien ils devaient être divertissants ! […] Le ministre alléguait l’ordre du roi, qui prétendait qu’il n’y eût personne en son royaume qui disputât la préséance aux gouverneurs qui représentaient sa personne. […] Le Tellier en revint alors à sa réplique souveraine, et à remontrer que M. de Lesdiguières représentait la personne du roi : « Avouez du moins, monsieur, lui dit Cosnac comme poussé à bout, qu’on est fort excusable de s’y méprendre, puisque jamais copie n’a moins ressemblé à son original. » Cette repartie brusque (et flatteuse) acheva de déconcerter le ministre et fit rire le roi, « et ce fut par là, dit Cosnac, que finit cette affaire ».

1210. (1864) William Shakespeare « Conclusion — Livre I. Après la mort — Shakespeare — L’Angleterre »

Le calife Almanzor fait cracher le peuple sur Averroès à la porte de la mosquée de Cordoue, le duc d’York crache en personne sur Milton, un Rohan, quasi prince, duc ne daigne, Rohan suis, essaye d’assassiner Voltaire à coups de bâton, Descartes est chassé de France de par Aristote, Tasse paye un baiser à une princesse de vingt ans de cabanon, Louis XV met Diderot à Vincennes, ce sont là des incidents, ne faut-il pas qu’il y ait des nuages ? […] Au-dessus de Newton il y a Kopernic et Galilée ; au-dessus de Bacon il y a Descartes et Kant ; au-dessus de Cromwell il y a Danton et Bonaparte ; au-dessus de Shakespeare, il n’y a personne. […] Admiration universelle, un grand peuple entre en frénésie, une grande ville tombe en pâmoison, on loue un balcon sur le passage du jeune homme cinq cents guinées, on s’entasse, on se presse, on se foule aux roues de sa voiture, sept femmes sont écrasées par l’enthousiasme, leurs petits enfants sont ramassés morts sous les pieds, cent personnes, un peu étouffées, sont portées à l’hôpital, la joie est inexprimable. […] Toute confiance est due au comité du Jubilé de Shakespeare, comité composé de personnes hautement distinguées dans la presse, la pairie, la littérature, le théâtre et l’église.

1211. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Notes et éclaircissements. [Œuvres complètes, tome XII] »

Quelques personnes ont été choquées de notre assertion, faute d’avoir bien compris ce que nous voulions dire. […] » Trois choses contribuent ordinairement à rendre un orateur agréable et efficace : la personne de celui qui parle, la beauté des choses qu’il traite, la manière ingénieuse dont il les explique : et la raison en est évidente ; car l’estime de l’orateur prépare une attention favorable, les belles choses nourrissent l’esprit, et l’adresse de les expliquer d’une manière qui plaise, les fait doucement entrer dans le cœur ; mais de la manière que se représente le prédicateur dont je parle, il est bien aisé de juger qu’il n’a aucun de ces avantages. […] De là vient qu’il dit aux Corinthiens : « J’ai été au milieu de vous avec beaucoup de crainte et d’infirmité222 » ; d’où il est aisé de comprendre combien sa personne était méprisable. […] Il poussera encore plus loin ses conquêtes, il abattra aux pieds du Sauveur la majesté des faisceaux romains en la personne d’un proconsul, et il fera trembler dans leurs tribunaux les juges devant lesquels on le cite.

1212. (1860) Ceci n’est pas un livre « Hors barrières » pp. 241-298

C’est risible, — et personne n’en rit. […] Personne ne le connaissait. […] D’abord, il fit mine de se diriger vers l’autre extrémité de la salle, mais, la force de l’habitude l’emportant, il tourna lentement sur sa canne et son parapluie, — et vint s’asseoir tout à côté de moi, à la table accoutumée. — N’y aurait-il pas des attractions irrésistibles entre certains objets et certaines personnes ? […] … Ne dites à personne qui je suis… » ……………………………………………………………………… Depuis, le petit vieux et moi nous avons passé bien des soirées ensemble ; et je vous redirai peut-être un jour les révélations curieuses qu’il me faisait, quand nous allions, le jeudi, entendre la musique sur les Allées Neuves.

1213. (1895) Les œuvres et les hommes. Journalistes et polémistes, chroniqueurs et pamphlétaires. XV « Philarète Chasles » pp. 147-177

À force de chercher, de plonger, de s’égailler dans tous les bouquins de la littérature européenne, il avait des initiatives ; il tirait aux idées et faisait lever de bons et beaux lièvres, qu’on s’étonnait bien de voir trotter dans la grande allée ratissée du Journal des Débats, où il ne passe jamais personne ! […] et subtils, économes de la vie du patient, plus barbares que les bourreaux qui rompent ses os. » N’est-ce pas là une impertinente et impudente mauvaise plaisanterie, et le bourreau subtil, mais qui de cette fois n’exécute personne, n’est-il pas le sophiste qui veut meurtrir l’Église avec de telles subtilités ? […] C’était enfin tout le xixe  siècle encagé dans un livre et montré comme une bête féroce, avec toutes ses bêtes, féroces ou non… Vous vous rappelez aussi comme nous saluâmes en espérance l’avènement de ce livre, où Chasles avait dû graver, pendant des années, tous ses ressentiments ; car Chasles, comme tous les hommes de talent, avait senti souvent le talent outragé dans sa personne. […] Personne avait-il plus que Chasles cohabité avec tous les génies de toutes les civilisations, au milieu desquels on ne vit pas impunément et qui vous élèvent de façon à ne pouvoir jamais descendre ?

1214. (1870) Portraits contemporains. Tome IV (4e éd.) « M. FAURIEL. —  première partie  » pp. 126-268

Mais la personne chez qui nous dînions ayant, par erreur, supposé qu’ils étaient connus, en a dit, avec bonne intention, et avec le désir de servir F. […] C’est une des personnes qui vous aiment et vous apprécient le mieux, et que je voudrais le plus voir heureuse ; et je sais combien des preuves de votre amitié y contribueraient. […] Convenez qu’il a dû être pénible pour moi de les voir ainsi méconnaître par vous, que j’avais cru plus capable que personne de les apprécier. […] L’Italie, aux diverses époques, a toujours tant influé sur la France par sa littérature, qu’il était bon qu’à un certain moment la France le lui rendît en la personne d’un si noble poëte dramatique. […] Le secret des lettres était très-peu respecté à cette époque, et l’on s’écrivait le plus souvent sous le couvert d’autres personnes : d’ailleurs, Fauriel étant en voyage, cette précaution devenait presque nécessaire.

1215. (1927) Des romantiques à nous

Ces questions, en effet, étaient condamnées à sommeiller, sinon dans les esprits mêmes, dont personne n’est le maître, au moins dans les productions littéraires. […] Je n’exclus pas pour cela la part du dénigrement et des sentiments peu avouables à l’égard des gloires et des personnes. […] Chacune peut s’excepter en personne des dures vérités adressées à son sexe en général et y reconnaître tout le portrait de la voisine. […] Aujourd’hui, dans le domaine littéraire du moins, personne n’est plus dupe de cette fable nuageuse. […] Il ne demandait la permission à personne.

1216. (1912) Pages de critique et de doctrine. Vol I, « I. Notes de rhétorique contemporaine », « II. Notes de critique psychologique »

Oui, l’unité d’objet manque, mais une autre unité se dégage, celle de la personne. […] À ce prestige de la personne s’ajoutèrent deux autres influences. […] Cette personne collective, elle-même, par quels éléments est-elle constituée ? […] Il a possédé, plus que personne, l’extraordinaire don d’assimilation propre à sa race. […] J’ai réuni autour de ma personne des hommes qui naguère se détestaient.

1217. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « AUGUSTE BARBIER, Il Pianto, poëme, 2e édition » pp. 235-242

Jules Lefèvre, le même qui a combattu naguère sous Varsovie, dans un poëme intitulé le Clocher de Saint-Marc, publié il y a environ sept ans, avait essayé une peinture sincère, expressive, mais que trop de labeur avait trahie et que les souvenirs récents de Byron avaient surchargée ; les personnes, enfin, qui épient attentivement le progrès de la chose poétique, savaient que M. […] Son poëme se divise en quatre masses principales ou chants : 1° le Campo Santo à Pise ; c’est le vieil art toscan catholique au Moyen-Age que l’auteur y ranime dans la personne et dans l’œuvre du peintre Orcagna, contemporain de Dante ; 2° le Campo Vaccino, ou le Forum romain ; solitude, dévastation, mort ; la majesté écrasante des ruines encadrant la misère et l’ignominie d’aujourd’hui ; 3° Chiaia, la plage de Naples où pêchait Masaniello : c’est un mâle dialogue entre un pêcheur sans nom, qui sera Masaniello si l’on veut, et Salvator Rosa ; les espérances de liberté n’ont jamais parlé un plus poétique langage ; 4° Bianca, ou Venise, c’est-à-dire cette divine volupté italienne que l’étranger du nord achète et profane comme une esclave. — Telle est la distribution générale du poëme, à laquelle il faut joindre, pour en avoir l’idée complète, un prologue et un épilogue, puis, dans l’intervalle de chaque chant, un triple sonnet sur les grands statuaires, peintres et compositeurs, Michel-Ange, Raphaël, Cimarosa, etc. ; l’ordonnance en un mot ne ressemble pas mal à un palais composé de quatre masses ou carrés (les quatre chants), avec un moindre pavillon à l’extrémité de chaque aile (prologue et épilogue), et avec trois statues (les sonnets) dans chaque intervalle des carrés, en tout neuf statues.

1218. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Première partie. Préparation générale — Chapitre VII. Éducation de la sensibilité »

Que de fois arrive-t-il que, faute de se connaître, on écrit d’un style qui ne représente pas la personne qu’on est ! […] Il fallait se former soi-même : dans le monde, dans les lectures, au théâtre, payer de sa personne, et ne pas s’endormir ; hors de soi, ni en soi, on n’avait de souffleur, qui dispensât de la peine.

1219. (1889) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Quatrième série « Contes de Noël »

L’auteur nous confie que, dans son enfance, il aimait déjà toutes les femmes, comme il a continué de faire au grand séminaire de Montpellier, Donc, le jeune Ferdinand a treize ans ; il apprend le latin chez son oncle l’abbé Fulcran, curé de Lignières-sur-Graveson ; celle qu’il aime, c’est Mlle Méniquette, une jolie personne de vingt ans, mi-paysanne et mi-bourgeoise, fille de M.  […] Mais non : personne ne l’a vu.

1220. (1885) Préfaces tirées des Œuvres complètes de Victor Hugo « Préfaces des romans — Préfaces de « Han d’Islande » (1823-1833) — Préface d’avril 1823 »

Il a instamment prié le mauvais plaisant d’apprendre que tous les journalistes, indistinctement, sont des soleils d’urbanité, de savoir et de bonne foi, et de ne pas lui faire l’injure de croire qu’il fût du nombre de ces citoyens ingrats, toujours prêts à adresser aux dictateurs du goût et du génie ce méchant vers d’un vieux poëte : Tenez-vous dans vos peaux et ne jugez personne ; que pour lui, enfin, il était loin de penser que la peau du lion ne fût pas la peau véritable de ces populaires seigneurs. […] Il lui reste à remercier les huit où dix personnes qui ont eu la bonté de lire son ouvrage en entier, comme le constate le succès vraiment prodigieux qu’il a obtenu ; il témoigne également toute sa gratitude à celles de ses jolies lectrices qui, lui assure-t-on, ont bien voulu se faire d’après son livre un certain idéal de l’auteur de Han d’Islande ; il est infiniment flatté qu’elles veuillent bien lui accorder des cheveux rouges, une barbe crépue et des yeux hagards ; il est confus qu’elles daignent lui faire l’honneur de croire qu’il ne coupe jamais ses ongles ; mais il les supplie à genoux d’être bien convaincues qu’il ne pousse pas encore la férocité jusqu’à dévorer les petits enfants vivants ; du reste, tous ces faits seront fixés lorsque sa renommée sera montée jusqu’au niveau de celles des auteurs de Lolotte et Fanfan ou de Monsieur Botte, hommes transcendants, jumeaux de génie et de goût, Arcades ambo ; et qu’on placera en tête de ses œuvres son portrait, terribiles visu formæ , et sa biographie, domestica facta .

1221. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Première partie — Section 40, si le pouvoir de la peinture sur les hommes est plus grand que le pouvoir de la poësie » pp. 393-405

Enfin il n’y a personne qui n’ait eu l’occasion de remarquer plusieurs fois dans sa vie combien il étoit plus facile de faire concevoir aux hommes tout ce qu’on veut leur faire comprendre ou imaginer, par le moïen des yeux que par le moïen des oreilles. […] Pour alléguer des faits plus positifs, lorsqu’on brûla le corps de Jules Cesar, il n’y avoit personne dans Rome qui ne se fut fait raconter les circonstances de cet assassinat.

1222. (1860) Ceci n’est pas un livre « Les arrière-petits-fils. Sotie parisienne — Premier tableau » pp. 180-195

Personne ne dit plus mot ? […] Une fois, deux fois, trois fois, personne ne dit mot ?

1223. (1895) Les œuvres et les hommes. Journalistes et polémistes, chroniqueurs et pamphlétaires. XV « Edmond About » pp. 63-72

Ce n’est qu’une imposture de froideur qui ne trompe personne. […] Cette histoire de la Grèce contemporaine ne modifiera l’opinion de personne sur la Grèce, par la très bonne raison qu’elle est l’opinion de tout le monde sur ce pays.

1224. (1861) La Fontaine et ses fables « Deuxième partie — Chapitre I. Les personnages »

Oui, reprit le lion, c’est bravement crié ; Si je ne connaissais ta personne et ta race,     J’en serais moi-même effrayé. […] Le chien romain est un grossier esclave, goinfre et vil, qui ne voit dans son métier que les profits de son ventre, trop heureux d’attraper « les morceaux que lui jettent les esclaves et les ragoûts dont personne ne veut. » Le chien français est plus délicat ; ses aubaines sont « des os de poulet et de pigeon, sans parler de mainte caresse. » Il ne décrit pas longuement sa servitude comme fait l’autre. […] Malgré sa politesse, le gentilhomme ne peut parler sans choquer, parce qu’il ne peut se rencontrer avec personne sans prendre le haut bout. […] La Fontaine plus que personne eût été son ami, et la feuillette n’eût point été de trop entre le fabuliste et le curé. […] La Fontaine ne songe à réhabiliter personne ; mais, quand vient l’occasion, il trouve ces traits pénétrants et cette pitié contagieuse qui prouvent qu’un homme d’esprit est aussi un homme de coeur.

1225. (1856) Cours familier de littérature. II « Xe entretien » pp. 217-327

Sa verte nuit retentissait sous nos pas ; nous n’avions personne pour nous conduire ; nous marchions à la lueur de la gloire qui devait nous désigner d’elle-même la maison du poète. […] Il ne m’est jamais arrivé de rencontrer personne sur ces grèves désertes qui correspondaient aux steppes les plus inhabités de ce littoral de la Savoie. […] Ces lignes nous ont été communiquées récemment par une personne qui lui fut chère, et qui revoit sa physionomie à travers le temps, à travers la mort. […] Sa peau avait cette pâleur mate particulière aux personnes pensives. […] Elle était sincère chez M. de Bonald, homme honnête, pieux, convaincu, qui ne cherchait à tromper personne.

1226. (1767) Salon de 1767 « Peintures — Vernet » pp. 130-167

C’était le cicerone de la contrée ; il en faisait les honneurs aux nouveaux venus, et personne ne s’entendait mieux à ménager à son spectateur la surprise du premier coup d’œil. […] Pourquoi personne ne partage-t-il avec moi le charme, la beauté de ce site ? […] Nous aimons le plaisir en personne, et la douleur en peinture. […] Je fesais en moi-même l’éloge de la médiocrité qui met également à l’abri du blâme et de l’envie, et je me demandais pourquoi cependant personne ne voudrait perdre de sa sensibilité et devenir médiocre ? […] J’ai ouï dire à des personnes qui avaient fréquenté longtemps les bords de la mer, qu’elles reconnaissaient sur cette toile ce ciel, ces nuées, ce temps, toute cette composition.

1227. (1862) Portraits littéraires. Tome II (nouv. éd.) « M. de Fontanes »

A cette idée générale se joignait chez lui une inspiration de bonté et d’obligeance infinie pour les personnes, qui faisait dans le détail sa direction la plus ordinaire. […] Une fois, après avoir passé six semaines presque sans interruption à Courbevoie, il écrivit à une personne amie d’y venir, si elle avait un moment : celle-ci accourut. […] Millevoye n’eût jamais été pour personne un héritier présomptif bien vivace et bien dangereux : mais Lamartine naissant ! […] Non pas toutefois qu’il fût sans rapports directs avec le pavillon Marsan même, et sans affection particulière pour les personnes ; mais il n’eût contribué qu’à modérer. […] Cet impia fata dans une église catholique ne choque personne.

1228. (1848) Études sur la littérature française au XIXe siècle. Tome III. Sainte-Beuve, Edgar Quinet, Michelet, etc.

Quant à Madame de Pontivy, je sais mieux que personne la cause : celle que vous rapportez à mon goût de psychologie fine est même plus spécieuse que vraie. Et cette nouvelle n’a été écrite qu’en vue d’une seule personne et pour la lui faire lire, et pour lui en faire agréer et partager le sentiment. […] 20 déc. 1840 : Il ne faut scandaliser personne, surtout dans le dernier numéro de l’année et de la série. […] » Mais personne n’ajoutera : « On l’entend bien, du moins ». […] C’est ainsi qu’il attache l’intérêt le plus solennel et presque le plus tendre à la personne de Jésus-Christ et à son ministère de douleurs.

1229. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « M. Charles Magnin ou un érudit écrivain. »

Le XVe siècle, dans la personne de ses Marmontel, de ses La Harpe, de Voltaire lui-même, n’en chercha et n’en ambitionna jamais d’autre. […] Vitet l’a fait mieux que personne, avec le goût et la supériorité qu’on lui connaît. […] Magnin était fort favorable au divorce pour des motifs philosophiques qui étonneront ceux qui ne l’ont vu que dans les dernières années, et encore peut-être pour d’autres motifs plus secrets et plus particuliers, qui n’étonneraient personne parmi ceux qui savent les mobiles habituels du cœur humain. […] Chacun, dans les groupes intellectuels qu’il traverse et dans les combinaisons de personnes où il se trouve mêlé, rencontre dès sa jeunesse ses affinités, ses attractions au moral comme aussi ses antipathies et ses déplaisances. […] Magnin, tel que je l’ai connu avant que la maladie fût venue l’affaiblir et attrister ses dernières années ; j’ai besoin de rassembler en quelques mots les impressions que m’a laissées sa personne en des saisons meilleures, et de fixer aux yeux de tous comme aux miens l’idée de sa vie, de ses mœurs, de son habitude studieuse, réfléchie, une sensible et parlante image qui ne puisse se confondre avec nulle autre.

1230. (1866) Cours familier de littérature. XXI « CXXIVe entretien. Fior d’Aliza (suite) » pp. 257-320

En effet, une chose qui, par sa nature, n’offense ni un individu ni une nation, n’est point une injure ; jamais une vague déclamation contre les vices d’un siècle ou d’un peuple n’a offensé réellement une nation ou une époque ; et jamais ces déclamations, quelque violentes, quelque injustes qu’on les suppose, n’ont été sérieusement reprochées à leurs auteurs ; l’opinion, juste en ce point, a senti que ce qui frappait dans le vague était innocent, par là même que cela ne nuisait à personne. […] Quoique M. de Lamartine rejette à bon droit ce rôle d’insulteur public qu’on a voulu lui faire jouer malgré lui, il ne veut pour personne, pas même pour une nation, s’abaisser au rôle de suppliant ou à celui d’adulateur : l’un lui messied autant que l’autre. […] Chapitre II XLIII Pendant le mois que je passai dans mon lit à me guérir de ma blessure, les personnes les plus distinguées de Florence se firent écrire à ma porte, et je compris, par cet empressement, que le pays était satisfait et que la réconciliation était complète. […] Il avait épousé et amené à Florence une jeune et belle Danoise, la fameuse Ida Brown, devenue comtesse de Bombelles, aussi bonne que belle, douée d’une voix et d’un talent musical égaux peut-être aux charmes de madame Malibran, rassemblant presque tous les jours dans son salon les admirateurs passionnés de sa personne et de son art. […] personne de nous ne sait ni lire ni écrire ; qui est-ce qui nous l’apprendrait ?

1231. (1892) Boileau « Chapitre I. L’homme » pp. 5-43

Et n’eussent-ils fait que lui apprendre du grec et du latin, il leur serait encore plus redevable qu’à personne : car lui ouvrir l’intelligence des anciens, c’était lui mettre en main la clef de sa future doctrine. […] Il est singulier que, de Racine et de Boileau, Mme de Montespan, la maîtresse sensuelle et passionnée, préfère le raisonnable et froid Boileau : tandis que c’est Mme de Maintenon, la sage et discrète personne, qui préfère la poésie tendre et troublante de Racine. […] Tous les lundis, le Premier Président réunissait à sa table vingt-six personnes, magistrats, érudits, poètes, gens d’Église. […] Dieu était nécessaire à sa raison ; et c’était le Dieu de sa raison qu’il adorait dans les Trois personnes du Dieu catholique. […] Les querelles littéraires n’avaient jamais eu d’influence sur son humeur, ni de contre-coup sur sa vie ; l’affaire de Phèdre et les menaces du duc de Nevers n’avaient été qu’un incident vite oublié ; il s’était réconcilié avec Quinault, avec Boursault, avec Perrault, sans effort, et de bon cœur, n’ayant jamais été l’ennemi que des idées, et non des personnes.

1232. (1914) Enquête : Les prix littéraires (Les Marges)

Georges Pioch Quand bien même tous ceux qui répondront à votre enquête seraient d’accord pour souhaiter la suppression des prix littéraires, ces prix n’en seraient pas moins offerts — ce qui est assez naturel puisqu’ils sont fondés — ni moins sollicités : — ce qui ne fait honneur à personne. […] Mais avoir été remarqué sans y avoir prétendu ; avoir été choisi, sans s’y être personnellement ingénié, par des littérateurs que l’on aime et respecte dans leur œuvre, cela m’a toujours semblé être très réconfortant et, même, très honorable… Et puis il faut exister… Or, je n’apprends sans doute à personne que gagner son pain, c’est généralement, perdre le meilleur de sa vie… Mais on peut, au moins, s’épargner de mendier, même un peu de renom. […] Ils ne font de mal à personne et font du bien à quelques-uns. […] Au surplus, ces prix échoient de temps en temps à un jeune écrivain de talent, tandis qu’un échec de cet ordre n’a jamais empêché personne de réussir. L’Académie française refusa à Taine le prix Bordin : il n’en est pas moins Taine, et personne ne connaît seulement le nom de son concurrent.

1233. (1888) Préfaces et manifestes littéraires « Romans et nouvelles » pp. 3-80

ce qui fait le livre mauvais, je le sais mieux que personne ! […] Un poumon est perdu et l’autre tout comme… » Et il faut revenir à la malade, lui verser de la sérénité avec notre sourire, lui faire espérer sa convalescence dans tout l’air de nos personnes… Puis une hâte nous prend de fuir l’appartement, et cette pauvre femme. […] Je savais bien qu’elle était condamnée ; mais l’avoir vue jeudi, si vivante encore, presque heureuse, gaie… Et nous voilà tous les deux marchant dans le salon avec cette pensée que fait la mort des personnes : Nous ne la reverrons plus ! […] Il ne me paraît pas qu’elle soit morte ; j’ai seulement d’elle le sentiment d’une personne disparue. […] Et à l’égard de ces hommes, c’était une ardeur si extravagante, si maladive, si démente, qu’elle — l’honnêteté en personne autrefois — nous volait, nous prenait des pièces de vingt francs sur des rouleaux de cent francs, pour que les amoureux qu’elle payait, ne la quittassent pas.

1234. (1886) Quelques écrivains français. Flaubert, Zola, Hugo, Goncourt, Huysmans, etc. « Victor Hugo » pp. 106-155

Rien qu’à le voir on devinait cette science empreinte dans les gestes de sa personne et dans les plis de sa robe. […] II Toute personne familière avec l’œuvre de M.  […] Une autre catégorie d’œuvres à laquelle ressortissent la plupart des Orientales, la Légende des siècles, une pièce comme les Burgrave s et un roman comme Notre-Dame de Paris, fait se demander par quelle prodigieuse disposition sentimentale, le poète parvient à se faire le porte-voix, presqu’ému, d’une suite de personnes étrangères et mortes, dont il épouse les causes et les passions avec une infatigable versatilité. […] Il n’a jamais paru à personne que les gens d’intelligence simple, soient nécessairement des orateurs copieux, tandis que le contraire semble vrai. […] Et celles-ci étant l’équivalent non de l’idée, depuis longtemps oubliée, mais des premiers mots dans laquelle elle était conçue, il suit qu’elles paraîtront d’habitude imprévues, incohérentes, neuves et curieuses aux personnes habituées à penser en pensées.

1235. (1889) Les œuvres et les hommes. Les poètes (deuxième série). XI « Victor Hugo »

Personne plus que Hugo ne se cogne aux mots. […] On a parlé pour la première fois sans respect de choses qui n’auraient dû étonner personne, tant elles font partie du genre de talent de Hugo, tant elles participent à la double essence de l’homme et de l’écrivain ! […] … L’auteur des Petites Épopées, — ces préludes magnifiques d’un concert plus magnifique que j’espérais, — le poète de La Légende des Siècles, qui nous a peint si bien Charlemagne et Roland, pouvait mieux que personne mettre debout ces figures colossales et faire tourner alentour le cycle Carlovingien. […] Seulement, Béranger a le style de ses idées et Hugo n’a pas le style des siennes, et rien n’est plus déplaisant que le contraste de la platitude de ses idées avec la redondance de sa poésie… Rien de plus choquant que de voir ce diable de grand vers dont personne ne nie que Hugo ait la puissance, et qui ne devrait dire que des choses proportionnées à sa grandeur, ne débagouler que des choses ineptes et vulgaires sur l’une des plus grandes questions (si ce n’est la plus grande) qui puisse occuper l’humanité. […] Pendant son rêve, et c’est là tout son rêve, il fait quelques conversations avec plusieurs personnes : avec le Patriarche de Constantinople ; avec les Rois — (quels Rois ?

1236. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « Ernest Feydeau » pp. 106-143

Inventé ou réel, le héros anonyme de ce récit, où l’on ne nomme personne, et qui ressemble au linge démarqué des suicidés ou des criminels, ce héros n’est qu’un enfant, et sa maîtresse, qui lui plante incessamment ce soufflet sur la face, « vous êtes un enfant », lui dit la vérité. […] Il les a bien ramassés, il les a bien ouverts tout grands, ces fruits cruels, ces fruits funestes, pour qu’on vît mieux l’immonde poussière qui emplit la bouche qui y mord… C’est là le mérite de ce livre d’une immoralité inconsciente, ou Dieu elle devoir n’apparaissent une seule fois dans la pensée de personne, et qui, par là, n’est plus qu’un daguerréotype, l’exact daguerréotype, peut-être, de la triste société de l’auteur, Maîtrisé par son sujet beaucoup plus qu’il ne le maîtrise, l’auteur de Fanny a de la force et beaucoup de talent quand il est dans son sujet, mais il n’en a point quand il faudrait être au-dessus. […] Ernest Feydeau, est un jeune homme fatal, comme toute la race d’où il vient, qui raconte à la première personne les malheurs de sa vie jusqu’à sa mort, que M.  […] Sainte-Beuve l’avait ondoyé sur le front byronien de Daniel, mais aujourd’hui il l’a tenu sur les fonts de baptême de la publicité, dans la personne de Catherine d’Overmeire, et il a répondu, à haute et intelligible voix, de son talent devant les hommes et devant Dieu. Personne ne se serait douté assurément de ce goût de paternité spirituelle et d’adoption de M. 

1237. (1902) Le problème du style. Questions d’art, de littérature et de grammaire

Victor Hugo prétendait ne lire que les livres que personne ne lit. […] Je n’ai pas remarqué que les livres que personne ne lit soient plus absurdes que ceux que tout le monde lit. […] Il faut dire que peu de personnes sont à ce point dénuées de mémoire ou d’imagination visuelle. […] Ne croirait-on pas lire la célèbre réclame des « pilules roses pour personnes pâles » ? […] Personne.

1238. (1887) George Sand

N’est-ce pas le faux et l’invraisemblable en personne ? […] Écrire est, pour certaines personnes, aussi naturel que respirer. […] il n’y avait plus personne. […] Personne n’a mieux compris qu’elle et mieux exprimé la nécessité de l’étude pour l’art. […] Il ne s’agit pas de mettre sa personne en scène.

1239. (1924) Intérieurs : Baudelaire, Fromentin, Amiel

Dominique est comme un paysage de personnes, d’où on ne peut enlever aucun arbre, où on ne peut en ajouter aucun. […] Et l’espèce d’hypocondrie froide et élégante qui perçait dans toute sa personne prouvait que, si quelque chose survivait au découragement de beaucoup d’ambitions si vulgaires, c’était à la fois le dégoût de lui-même avec l’amour excessif du bien-être. » Le découragement vient de ce qu’il ne sert à personne. […] Je n’ai vu personne entrer dans la vie avec moins d’idéal et plus de sang-froid, ni envisager sa destinée d’un regard plus ferme en y comptant moins de ressources ». […] « J’ai déjà lu des journaux intimes et dirigé plusieurs néophytes et plusieurs jeunes personnes. […] Il a possédé plus que personne ce qui fait l’esprit de la critique, il n’a pas possédé ce qui en fait la matérialité.

1240. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre IV. L’âge moderne. — Chapitre II. Lord Byron. » pp. 334-423

. —  Opposition entre le poëte de l’univers et le poëte de la personne. […] Il se peint dans ses héros, mais en noir, de telle façon que personne ne peut manquer de le reconnaître et de le croire beaucoup pire qu’il n’est. […] Sont-ce des abstractions ou des personnes ? […] Enfin, les voilà, nos dieux ; nous ne les travestissons plus, comme nos ancêtres, en idoles ou en personnes ; nous les apercevons tels qu’ils sont en eux-mêmes, et nous n’avons pas besoin pour cela de renoncer à la poésie, ni de rompre avec le passé. […] Si Goëthe a été le poëte de l’univers, Byron a été le poëte de la personne, et si le génie allemand dans l’un a trouvé son interprète, le génie anglais dans l’autre a trouvé le sien.

1241. (1896) Journal des Goncourt. Tome IX (1892-1895 et index général) « Année 1894 » pp. 185-293

La découverte des bécasses l’avait amené bientôt à la trouvaille, dans un petit lac voisin, d’écrevisses que personne ne mangeait, et il fallait l’entendre décrire les merveilleux courts-bouillons qu’il fabriquait. […] * * * Maintenant quelle était la dépense, par jour, de ces trente-six personnes : écoutons Audiger. […] On donne aussi par jour à chaque personne trois sous de pain, ou une livre et demie : ce qui fait, y compris le pain pour les potages : 5 l. 8 s. […] Il y a ici une jeune fille qui se marie, et qui a refusé un laboureur très bien de sa personne, pour épouser un sculpteur en pierre, disant : Ce n’est pas un laboureur, mais un sculpteur. […] M. d’Ocagne conte spirituellement le dîner Louis XI, organisé par Loti, à Rochefort, et où il a assisté avec sa femme, en compagnie d’une trentaine de personnes.

1242. (1898) Impressions de théâtre. Dixième série

À ce mot de sa femme : « Personne n’aurait fait ce que tu as fait », il répond : « Peut-être. C’est que personne n’avait mes facultés. […] Hervieu n’est pas une personne très agréable, il ne s’ensuit point qu’elle ait tort. […] C’est que la personne de Jésus en est absente. […] Dans Froufrou même, la plus sérieuse et la plus humaine de ses pièces, personne n’est méchant.

1243. (1895) La vie et les livres. Deuxième série pp. -364

Huysmans et quelques autres personnes, il y a, en réalité, un mouvement ininterrompu, qu’il était facile de prévoir. […] Quelques épiceries silencieuses, où de pieuses personnes attendent, derrière leur comptoir, de rares clients. […] Seuls, les fantômes de lettres se vantent de ne ressembler à rien ni à personne. […] Il n’est personne ici-bas qui ne puisse profiter de ses discours et de ses avertissements. […] Ces métaphores, tirées de la vaseline et de la graisse, sont faites pour offenser le goût des personnes délicates.

1244. (1890) Journal des Goncourt. Tome IV (1870-1871) « Année 1871 » pp. 180-366

Personne ne sait rien de positif. […] Je crois qu’il a été donné à peu de personnes d’être, à deux fois, témoin d’un aussi héroïque et aussi simple mépris de la mort. […] Il croit que sans la précaution qu’il avait eue de garnir son avant de sacs de terre, personne n’aurait survécu. […] … Ils ne savent donc pas que je ne demande que la conservation de ma personne et de Saint-Gratien, ma liberté individuelle, comme je l’ai écrit à M.  […] Les personnes qui me sont le plus sympathiques, je ne suis plus sûr de les aimer ; quant aux choses, elles ont perdu pour moi leur attractivité.

1245. (1887) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Troisième série « Edmond et Jules de Goncourt »

Renan considère le roman comme un genre inférieur et peu digne, pour parler sa langue, des « personnes sérieuses », lorsque la science, la critique et l’histoire sont là qui offrent un meilleur emploi de nos facultés. […] Elles étaient pour lui parlantes et frappantes comme les personnes… Cette âme qui se dégage des milieux de l’homme avait un écho au fond de Charles… Cette sensitivité nerveuse, cette secousse continue des impressions, désagréables pour la plupart, et choquant les délicatesses intimes de Charles plus souvent qu’elles ne le caressaient, avaient fait de Charles un mélancolique… Charles n’avait qu’un amour, qu’un dévouement, qu’une foi : les lettres. […] MM. de Goncourt, ces nerveux, sont, dans leurs romans inquiets, les grands peintres des maladies nerveuses  Charles Demailly, Coriolis, Germinie, Mme Gervaisais, même la sœur Philomène et Renée « la mélancolique tintamarresque » sont à des degrés divers des névropathes, des personnes d’une sensibilité excessive et douloureuse et qui dégénère aisément en maladie, et par là aussi sont excellemment « modernes ». Charles Demailly, homme de lettres, épouse par amour une jolie actrice, Marthe, petite personne jolie, sotte et sèche, qui le prend en haine, le calomnie, le torture dans son cœur et dans son honneur et le précipite enfin dans la folie incurable. […] Qui de nous, en y regardant d’un peu près, n’a surpris en soi, ou autour de soi, même chez les personnes qu’il pensait connaître le mieux, des phénomènes qui déroutent, des volontés ou des faiblesses qu’on ne s’explique pas entièrement, des effets dont les causes en partie se dérobent et qui font parler de la fatalité ou des nerfs, deux manières de nommer l’inconnu ?

1246. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Lettres sur l’éducation des filles, par Mme de Maintenon » pp. 105-120

Sans trop presser cette conjecture, il est du moins certain qu’il songea à combler un désir discret de la personne qu’il venait d’associer devant Dieu à sa destinée domestique. […] Une lettre de Mme de Maintenon à Mme de Fontaines, maîtresse générale des classes, du 20 septembre 1691, expose cet état périlleux et cette crise ; elle sent d’ailleurs et convient avec sincérité que c’est elle-même qui a introduit le mal, et elle prend tout sur son compte : La peine que j’ai sur les filles de Saint-Cyr ne se peut réparer que par le temps et par un changement entier de l’éducation que, nous leur avons donnée jusqu’à celle heure ; il est bien juste que j’en souffre, puisque j’y ai contribué plus que personne, et je serai bien heureuse si Dieu ne m’en punit pas plus sévèrement. […] L’idée si élevée de faire de Saint-Cyr un abri et un foyer chrétien, un refuge et une école de simplicité vertueuse et pure, à mesure que la corruption et la grossièreté augmentent parmi les jeunes femmes de la Cour, se montre à découvert dans ces lettres de Mme de Maintenon : Que ne donnerais-je pas, s’écrie-t-elle (octobre 1703), parlant à l’une des maîtresses, pour que vos filles vissent d’aussi près que je le vois combien nos jours sont longs ici, je ne dis pas seulement pour des personnes revenues des folies de la jeunesse, je dis pour la jeunesse même qui meurt d’ennui parce qu’elle voudrait se divertir continuellement et qu’elle ne trouve rien qui contente ce désir insatiable de plaisir !

1247. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Journal de Dangeau. tomes III, IV et V » pp. 316-332

Louis XIV part le 17 mars 1691 pour se mettre en personne à la tête de son armée de Flandre. […] Il renonce désormais à être général et à aller de sa personne à la guerre. […] [NdA] On a ici pour auxiliaire de Dangeau Racine en personne, qui dans une lettre à Boileau, datée du camp de Gévries, le 21 mai 1692, décrit une revue qu’a passée le roi.

1248. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Mémoires du duc de Luynes sur la Cour de Louis XV, publiés par MM. L. Dussieux et E. Soulié. » pp. 369-384

Ces sortes de journaux qui, à quelques années de distance, deviennent nécessaires aux contemporains eux-mêmes, s’ils veulent apporter de l’ordre et de la précision dans leurs souvenirs, augmentent de prix, au bout d’un siècle, pour la postérité qui y apprend quantité de choses qu’on ne sait plus, et que presque personne n’a songé à écrire. […] Chauvelin, il disait : « Il s’ennuyait de ce que je vivais trop longtemps ; c’est un défaut dont je n’ai pas envie de me corriger si tôt. » Rencontrant dans un de ses salons, au milieu de trente personnes, M. de Bissy, dont on lui avait apparemment rapporté quelque propos, il va droit à lui, et le regardant en face : « Monsieur, vous voyez que je me porte bien ; cependant je ne mets point de rouge pour me donner un bon visage. » M. de Puységur, qui avait quatre-vingt-quatre ans77, demandait depuis longtemps d’être chevalier de l’Ordre, et il pressait là-dessus le cardinal, qui lui répondit tout naturellement : « Monsieur, il faut un peu attendre. » L’archevêque de Paris, M. de Vintimille, fort âgé, mais un peu moins que le cardinal, sollicitait un régiment pour son neveu, et faisait remarquer au cardinal qu’il importait de l’obtenir promptement, d’autant plus que, quand lui, oncle, ne serait plus là, ce serait pour le jeune homme un grand appui de moins : « Soyez tranquille, répondait le cardinal, je m’engage à lui servir de père et de protecteur. » Sur quoi M. de Vintimille, malgré toute sa politesse, ne put s’empêcher d’éclater : « Pour moi, monseigneur, je sens bien que je suis mortel, mais je me recommande à Votre Immortalité. » Jamais on n’a mieux compris qu’en lisant les présents mémoires cette lente et coriace ténacité, ce doux et câlin acharnement au pouvoir qui caractérise l’ancien précepteur de Louis XV. […] Les Mémoires du duc de Luynes nous découvrent une chose assez neuve, le règne très prolongé de Mme de Mailly comme maîtresse, et nous fixent sur son étendue chronologique ; ils le font, en effet, remonter avec certitude jusqu’à 1733, c’est-à-dire à un temps où personne n’en avait le soupçon.

1249. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) «  Œuvres et correspondance inédites de M. de Tocqueville — II » pp. 107-121

Molé provoqua une fort belle réponse de cet homme d’État ; je la citerai ici tout entière, parce qu’en y faisant la part d’une certaine vivacité qui tenait aux circonstances et aussi à la délicatesse chatouilleuse des deux personnes, on y trouve une leçon gravement donnée, et d’un ton fort digne ; il y respire un sentiment fort élevé de la puissance publique que M.  […] M. de Tocqueville posait un peu pour l’observation méthodique, profonde et raisonnée… » Il ne posait pas, c’était l’attitude naturelle de son esprit, de toute sa personne ; mais il faisait un peu cet effet aux militaires, à ceux qui ont l’esprit prompt, l’observation facile et nette, et même brusque : ce sont des familles d’esprits différentes et même opposées ; il n’y a rien d’étonnant que quelque antipathie se prononce. […] J’admirais autant que personne, tout en m’étonnant un peu de cette éloquence disproportionnée au sujet ; et, comme j’aime aussi la liberté à ma manière, je fus tenté de demander s’il y avait désormais une orthodoxie académique établie sur M. 

1250. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Le général Joubert. Extraits de sa correspondance inédite. — Étude sur sa vie, par M. Edmond Chevrier. — I » pp. 146-160

Joubert se rendait compte mieux que personne de la responsabilité d’un chef de troupe, et dans un de ses purs d’inquiétude il la résumait ainsi : À chaque heure répondre de la vie de plusieurs milliers d’hommes ; hasarder à propos la vie de ses soldats pour la leur sauver ; ne négliger aucune précaution pour se défendre des embuscades et des surprises de nuit ; voir dans cette lutte continuelle succomber ses amis, ses connaissances, par les blessures ou les maladies : il y a là de quoi tourmenter un homme. […] Personne n’est moins enivré après la victoire, personne n’est plus méfiant que lui de l’avenir.

1251. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Le général Joubert. Extraits de sa correspondance inédite. — Étude sur sa vie, par M. Edmond Chevrier. — III » pp. 174-189

Conservez cet esprit d’union et de discipline qui fera notre force et qui assure à tous les Français le maintien d’un gouvernement libre, et le respect des personnes et des propriétés. […] On s’agitait, on se cotisait pour faire un sauveur en plusieurs personnes. […] M. de Sémonville, que nous avons connu de tout temps si actif, si empressé à se mêler du jeu des événements publics et de leurs chances, avait enlacé Joubert par le plus sûr des liens ; une jeune personne charmante, sa belle-fille32, avait fait impression sur le cœur du général, et allait devenir sa femme.

1252. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Mélanges religieux, historiques, politiques et littéraires. par M. Louis Veuillot. » pp. 44-63

Veuillot, pour un tel acte accompli dans le secret de la conscience, n’a besoin d’aucun garant, et il a donné, ce me semble, assez de gages publics et fait assez de sacrifices à sa cause pour que personne ne mette en doute sa sincérité quand il dit : Je crois. […] Trop sévère pour Montaigne qui « de sa personne lui agrée peu », il ne me paraît pas injuste pour Saint-Simon. […] Est-il possible, en insistant avec vigueur, amertumeet satire (si surtout on en a le goût et le talent, si laverve vous pousse, si les doigts vous démangent sanscesse, si l’on porte jusque dans l’Univers beaucoup de son tempérament de Chignac), — est-il possible, dis-je, en arrangeant, ainsi son monde, de ne pas produire uneffet tout contraire à celui qu’on prétend chercher, dene pas instituer un combat à outrance, de ne pas rendre bientôt odieuses et la personne même de l’attaquant etjusqu’aux doctrines ?

1253. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Campagnes de la Révolution Française. Dans les Pyrénées-Orientales (1793-1795) »

Original dans sa personne et dans son allure, marchant nu-tête, couronné de ses cheveux blancs, appuyé sur son bourdon de pèlerin, ressemblant autant à un patriarche qu’à un soldat, il enflammait les siens, fascinait les adversaires et semait déjà autour de lui la légende. […] Il dut cette faveur d’exception aux nombreux témoignages qui arrivèrent en foule du Midi, à la franchise de son langage, à l’originalité de sa personne, et, qui sait ? […] Il avait toutes les qualités d’un vieux militaire : extrêmement brave de sa personne, il aimait les braves et en était aimé ; il était bon, quoique vif, très actif, juste, avait le coup d’œil militaire, le sang-froid et de l’opiniâtreté dans le combat. » Dugommier avait, du premier coup d’œil, apprécié le jeune commandant d’artillerie qui le secondait si bien.

1254. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Mémoire de Foucault. Intendant sous Louis XIV »

Ce père de Foucault, un peu bourru, et qui prêtait au comique, eut l’idée, déjà vieux et depuis longtemps, affublé comme le Malade imaginaire, d’épouser en secondes noces Mlle Bossuet, la sœur du grandi évêque, personne elle-même d’un caractère singulier et qui se maria malgré sa famille ; il y eut bientôt incompatibilité d’humeur entre les époux, et séparation […] Mais, chose à remarquer, et qui se reproduit plus ou moins dans presque toutes les familles dites parlementaires de ce temps-là : fils d’un père chagrin, bizarre et dur, il sécularise les qualités plus que solides de ce premier original, il les tempère, il les adoucit, il les civilise et les montre en sa personne applicables à bien des emplois, et même assez ornées de politesse et de belles-lettres ; mais il ne parvient point à les léguer à son fils, lequel, en revanche, sera un dissipateur, un franc libertin et pis encore. […] Et puis, quand, tout cela sera fait et parfait, quand il se sera maintenu au premier rang des ministres du second ordre force de zèle et de miracles administratifs ; quand il pourra se vanter auprès du roi d’avoir accompli ses désirs les plus chers, d’avoir converti vingt-deux mille âmes sur vingt-deux mille, moins quelques centaines, et cela dans l’espace d’environ seize mois ; quand il aura plus que personne contribué, par cette fausse apparence d’une réussite aisée, au fatal Édit qui s’ensuivit ; lorsqu’il aura inscrit de gaieté de cœur son nom dans l’histoire au-dessous de celui de Baville, ce même, honnête homme s’en ira jouir de sa réputation acquise, dans une intendance heureuse et plus facile, il s’y fera aimer, aimer surtout des savants qu’il assemblera et présidera volontiers, et avec une entière compétence ; il fondera des chaires, il fera des fouilles, il découvrira d’antiques cités enfouies, en même temps qu’il embellira les cités nouvelles ; il recherchera des manuscrits, il aura un riche cabinet de médailles, il sera auprès des curieux l’aménité même et recueillera pour tant de services pacifiques et d’attentions bien placées des éloges universels.

1255. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Salammbô par M. Gustave Flaubert. » pp. 31-51

Cependant Hamilcar, sans qu’on s’explique trop comment, reprit encore une fois le dessus, et après une suite de marches et d’actions habilement ménagées, il fit si bien qu’il enferma les étrangers dans un lieu, dans une espèce de champ clos appelé La Hache, parce que le terrain offrait assez la forme de cet instrument ; il les y réduisit d’abord à une telle famine qu’ils se virent contraints de se dévorer les uns les autres ; et finalement, après s’être saisi de la personne de leurs chefs, qui étaient venus parlementer auprès de lui, il écrasa avec ses éléphants ou tailla en pièces toute cette armée, dont pas un soldat ne réchappa : elle n’était pas moindre que de quarante mille hommes. […] Giscon, le général carthaginois, est obligé de venir en personne, à cette heure de nuit, leur donner des explications qui ne font que les irriter. […] Elle n’adore la déesse voluptueuse et féconde que sous sa forme la plus éthérée, la plus pure, celle de la lune ; c’est une Elvire sentimentale, qui a un pied dans le Sacré-Cœur : « Personne encore ne la connaissait.

1256. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Souvenirs d’un diplomate. La Pologne (1811-1813), par le baron Bignon. »

Le roi de Saxe n’avait voulu établir de vice-roi, ni en titre ni de fait ; il n’avait délégué le pouvoir à personne et s’en était réservé la plénitude, « précisément parce qu’il ne voulait l’exercer qu’avec mesure. » Il en résultait bien des lenteurs et des embarras. […] Il ne lui parla dans leur première conversation que de son prédécesseur, M. de Bnnau, « homme d’honneur, disait-il, qui avait possédé l’estime et la bienveillance de l’Empereur. » M. de Senfft eut de la peine à pénétrer chez Mme de Talleyrand, « dont la froide sottise n’invitait pas à y retourner. » C’est ainsi qu’on parle de certaines personnes quand on écrit à l’étranger et qu’on est véridique. […] La grâce de son esprit et le charme de son commerce ont toujours conservé pour eux le même attrait. » Ces Mémoires sont écrits à la troisième personne et je dois en avertir, car je les cite textuellement en ayant l’air de les analyser.

1257. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Les cinq derniers mois de la vie de Racine »

Racine ce que j’apprenais et le priai de former lui-même le langage que je tiendrais aux personnes qui m’en parleraient comme me croyant son ami. […] On est très-content de part et d’autre et des personnes et des biens. […] Il est en danger, mais si bien disposé qu’il témoigne plus craindre le retour de la santé que la fin de sa vie. — « Je n’ai jamais eu la force de faire pénitence, disait-il confidemment le dernier jour à une personne.

1258. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « GLANES, PÖESIES PAR MADEMOISELLE LOUISE BERTIN. » pp. 307-327

Les Roches, terrain neutre, asile hospitalier, prêtèrent leurs beaux ombrages, leurs allées tournantes, leur gaie rivière et leur île des Conférences à ces essais, bientôt désintéressés et plutôt affectueux, qu’on fit des esprits et des personnes. […] Quelle est aujourd’hui l’apparence d’ensemble, la classification des personnes, des individus marquants, telle qu’elle s’observe assez bien au regard ? […] Quant aux personnes, je fais trois groupes de poëtes parmi ceux de ce temps, c’est-à-dire parmi ceux des vingt dernières années.

1259. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Sur la reprise de Bérénice au Théâtre-Français »

Il est bon que la conscience intérieure que chaque talent porte naturellement en soi prenne ainsi forme au dehors et se représente à temps dans la personne d’un ami, d’un juge assidu qu’on respecte ; il n’y a plus moyen de l’oublier ni de l’éluder. […] Une personne, un talent, ne sont pas bien connus à fond, tant qu’on n’a pas touché ce point-là. […] Ce qui me frappe en elle, si j’osais me permettre de la juger d’un mot, ce n’est pas seulement qu’elle soit une grande actrice, c’est combien elle est une personne distinguée.

1260. (1796) De l’influence des passions sur le bonheur des individus et des nations « Section première. Des passions. — Chapitre VII. De l’esprit de parti. »

Ses amis assurent, qu’il aurait écrit contre son opinion ; qu’il l’aurait et désavouée et combattue ouvertement, sans confier à personne le secret de ses efforts, s’il avait cru que ce moyen pouvait servir à faire triompher la cause de cette opinion même. […] L’esprit de parti unit les hommes entre eux par l’intérêt d’une haine commune, mais non par l’estime ou l’attrait du cœur ; il anéantit les affections qui existent dans l’âme, pour y substituer des liens formés seulement par les rapports d’opinion : l’on sait moins de gré à un homme de ce qu’il fait pour vous que pour votre cause ; vous avoir sauvé la vie est un mérite beaucoup moins grand à vos yeux que de penser comme vous ; et, par un code singulier, l’on n’établit les relations d’attachement et de reconnaissance qu’entre les personnes du même avis : la limite de son opinion est aussi celle de ses devoirs ; et si l’on reçoit, dans quelques circonstances, des secours d’un homme qui suit un parti contraire au sien, il semble que la confraternité humaine n’existe plus avec lui, et que le service qu’il vous a rendu est un hasard qu’on doit totalement séparer de celui qui l’a fait naître. […] Les hommes d’esprit qui, dans toute autre circonstance, cherchent à se distinguer, ne se servent jamais alors, que du petit nombre d’idées qui leur sont communes avec les plus bornés d’entre ceux de la même opinion : il y a une sorte de cercle magique tracé autour du sujet de ralliement que tout le parti parcourt et que personne ne peut franchir ; soit qu’on redoute, en multipliant ses raisonnements, d’offrir un plus grand nombre de points d’attaque à ses ennemis ; soit que la passion ait également dans tous les hommes plus d’identité que d’étendue, plus de force que de variété ; placés à l’extrême d’une idée comme des soldats à leur poste, jamais vous ne pourrez les décider à venir à la découverte d’un autre point de vue de la question, et tenant à quelques principes comme à des chefs, à des opinions, comme à des serments, on dirait que vous leur proposez une trahison quand vous voulez les engager à examiner, à s’occuper d’une idée nouvelle, à combiner de nouveaux rapports.

1261. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre XIV. La commedia dell’arte au temps de Molière (à partir de 1662) » pp. 265-292

La troupe se composant de dix personnes, chacune d’elles avait au moins cinq cents écus d’assuré. […] Scaramouche est chargé de l’éducation d’un fils de famille qui suit une intrigue amoureuse avec une jeune personne du voisinage. […] Il monte, en effet, trouve la jeune personne endormie.

1262. (1890) L’avenir de la science « XII »

Il devait préférer la méthode plus commode de la « science orientale, libre, isolée, volant plus qu’elle ne marche, présentant dans toute sa personne quelque chose d’aérien et de surnaturel, livrant au vent ses cheveux qui s’échappent d’une mitre orientale, son pied dédaigneux ne semblant toucher la terre que pour la quitter ». […] De l’aveu même des Israélites, la littérature talmudico-rabbinique ne sera plus étudiée de personne dans un siècle. […] Personne n’est donc inutile dans l’humanité.

1263. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Pensées de Pascal. Édition nouvelle avec notes et commentaires, par M. E. Havet. » pp. 523-539

Pascal, tout d’abord, commence par rejeter les preuves de l’existence de Dieu tirées de la nature : « J’admire, dit-il ironiquement, avec quelle hardiesse ces personnes entreprennent de parler de Dieu, en adressant leurs discours aux impies. […] La manière émue dont ce grand esprit souffrant et en prière nous parle de ce qu’il y a de plus particulier dans la religion, de Jésus-Christ en personne, est faite pour gagner tous les cœurs, pour leur inspirer je ne sais quoi de profond et leur imprimer à jamais un respect attendri. […] Le livre de Pascal, dans l’état où il nous est venu, et dans la hardiesse ou le décousu des restitutions récentes, ne saurait être pour personne un livre d’apologétique exact et complet : ce ne peut être qu’une lecture ennoblissante, et qui reporte l’âme dans la sphère morale et religieuse d’où trop d’intérêts vulgaires la font déchoir aisément.

1264. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Monsieur Walckenaer. » pp. 165-181

Il tenait à l’une de ces familles de riche bourgeoisie qui avaient des occasions continuelles et même des liaisons avec les personnes du plus haut rang et de la première qualité. […] Cette personne avait mis aux mains de sa petite fille les Contes de Perrault, et elle demandait à M.  […] Combien de personnes n’ont-elles pas adressé tout bas à M. 

1265. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Saint Anselme, par M. de Rémusat. » pp. 362-377

Il est arrivé, en effet, que, ce drame une fois terminé, l’auteur qui l’avait lu et relu dans le monde avec applaudissement, fut pressé de le publier ; il hésita, il consulta, et, comme il s’adressa à un homme grave (M. de Broglie), il lui fut conseillé de laisser là l’imagination sur la personne et l’âme d’Abélard, et d’en venir à l’étude même de sa philosophie. […] Rempli au-dedans de la lumière pénétrante de la sagesse, il savait, dit-on, si sûrement discerner les mœurs des personnes de tout sexe et de tout âge, que, lorsqu’il en discourait ensuite, il semblait, en l’écoutant, qu’on se sentait révéler les secrets de son propre cœur. […] Il avait trouvé quelqu’un de tel dans la personne de Lanfranc, archevêque de Cantorbéry avant saint Anselme.

1266. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome second — Livre cinquième. Principales idées-forces, leur genèse et leur influence — Chapitre troisième. L’idée-force du moi et son influence »

Si, après tout, le moi individuel de demain, si le moi incertain de l’avenir est lui-même une « conception symbolique », un prolongement idéal de ma personne dans le temps, et si cependant il mérite bien d’être appelé moi en vertu de son lien avec le moi actuel, je puis aussi appeler moi la conception symbolique de ma personne en tant que prolongée dans autrui et fondue avec un ensemble de volontés qui poursuivent la même fin. […] Ce qui a encore accusé le contraste de la pensée impersonnelle avec la personne individuelle, c’est la vie en société, parce que la pensée impersonnelle est au fond une pensée sociale : c’est ce qu’on nommait chez les anciens la raison commune, ϰοινὸς λόγος, et ce qu’on nomme encore le sens commun.

1267. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Lawrence Sterne »

Stapfer, qui y a regardé, prouve que le reproche de Byron n’a pas le moindre fondement, et que personne n’a le droit de l’articuler. […] lisez seulement dix lignes de ces deux écrivains à qui on ne peut comparer personne, et vous avez, dans ces dix lignes, entiers et visibles, ces deux esprits, véritables et charmants phénomènes qui sont une gracieuseté du bon Dieu faite à l’intelligence humaine, et qui n’ont, littérairement, ni ancêtres ni postérité, apparemment pour que les hommes ne pussent pas compter sur un tel bonheur tous les jours ! […] Lawrence Sterne, sa personne et ses ouvrages, par M. 

1268. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XXXIII. Des éloges ou panégyriques adressés à Louis XIV. Jugement sur ce prince. »

Je ne parle pas de la quantité innombrable de poètes, qui, n’ayant que du zèle sans talents, étaient vils ou empressés sans plaire, et composaient de petites épîtres obscures et des sonnets sur le roi, que ni lui, ni personne ne lisait. […] Louis XIV eut dans son caractère je ne sais quoi d’exagéré qui se répandit sur sa personne, comme sur tout son règne. […] Il répandit sur toute sa personne, et mit dans ses regards même, une affectation de grandeur qui avait un peu besoin de sa réputation et de son rang pour ne pas étonner, et semblait vouloir commander le respect plutôt que l’attendre.

1269. (1895) Impressions de théâtre. Huitième série

Personne. […] Personne. […] Personne encor. […] Personne. […] Personne.

1270. (1929) Amiel ou la part du rêve

Il n’appartient à aucun parti. « Dans nos radicaux, écrit-il quelques semaines après sa nomination, je ne goûte ni les personnes ni les théories ; dans nos conservateurs, j’apprécie les personnes, mais peu les maximes. » De leur côté, les conservateurs se refusent à apprécier sa personne à cause des maximes de ceux qui l’ont mis en place, et ceux qui l’ont mis en place s’aperçoivent bientôt qu’il n’est pas des leurs. […] Amiel, dans sa famille, ne s’est brouillé avec personne, mais il a toujours pensé qu’il se montrait meilleur parent qu’on ne l’était avec lui. […] Personne n’aperçut ces grains de mil. […] S’il ne trouve personne avec qui bavarder dans les pensions de famille, ce lui est, durant ses vacances, un motif suffisant de quitter son coteau de Charnex. […] Amiel a éprouvé mieux que personne les inconvénients qu’il y a à être le citoyen d’un si petit État.

1271. (1859) Cours familier de littérature. VIII « XLIVe entretien. Examen critique de l’Histoire de l’Empire, par M. Thiers » pp. 81-176

Personne, selon nous, ne les possède de notre temps à un plus haut degré que M.  […] On la pardonne, parce qu’elle est naïve comme toute grâce et qu’elle n’humilie personne en s’exaltant elle-même. […] personne, car ce sont les balances de Dieu dans la main des hommes !  […] Bonaparte paraissait d’autant plus grand à cette époque qu’il n’avait à se mesurer avec personne. […] Il estimait Kléber pour ses grandes qualités militaires, mais ne plaçait personne, ni pour les talents, ni pour le caractère, à côté de Desaix.

1272. (1861) Cours familier de littérature. XII « LXXe entretien. Critique de l’Histoire des Girondins » pp. 185-304

Je n’avais fait confidence de ces vers à personne ; j’étais à cent vingt lieues de Paris ; l’imprimeur seul à qui j’avais adressé le manuscrit du poème connaissait ces vers. […] Je ne réserverais que ma personne, qui ne m’appartient pas, puisqu’elle appartient à la cause de la dynastie légitime et de la liberté conservatrice. — J’irai donc », lui dis-je. […] Mais, comme il n’avait trahi personne, il les dominait du front par l’estime qu’on lui portait même dans les rangs de l’opposition coalisée. […] Je n’avais ni communauté d’opinions, ni aucun lien d’idées avec lui ; j’avais simplement du goût pour sa personne. […] Personne, excepté M. de Montalivet, n’en peut parler plus véridiquement.

1273. (1899) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Septième série « Discours prononcé à la société des visiteurs des pauvres. » pp. 230-304

Pour en arriver là, les personnes pieuses trouvent une aide merveilleuse dans leur foi. […] Donc, nous inclinons à croire finalement, avec l’auteur, que Piégois, qui certes ne vaut pas grand’chose, vaut pourtant mieux que ce sec et lâche Henri Tasselin, qui n’a encore volé personne, mais qui est sans entrailles. […] Il dit au banquier Tasselin (j’abrège ses propos et j’en intervertis l’ordre, mais cela vous est égal) : « Vous êtes, quoique personne ne s’en doute encore, dans de mauvaises affaires. […] … » Puis, elle se calme ; elle ne peut s’empêcher de trouver Mikils un peu ridicule, de le voir « comme un pauvre être diminué qu’on plaint avec un sourire », et « de le traiter presque dans sa pensée comme feraient les gens du monde et les personnes sans religion ni bonté ». […] Et c’est de quoi j’ai pris mon parti, et de quoi se sont émues certaines personnes « de la religion ».

1274. (1879) À propos de « l’Assommoir »

Les peintres de scandale par amour du scandale trouvent des amateurs qui les achètent, mais personne qui ose élever la voix pour les défendre. […] Les uns attribuaient ses jugements sévères à une vile jalousie ; d’autres, à un intérêt de spéculateur du plus bas étage ; personne ne soupçonna qu’il pût être sincère. […] Coupeau saluant une personne invisible. […] Elle était complaisante pour elle et pour les autres, tâchait uniquement d’arranger les choses de façon à ce que personne n’eût trop d’ennui. […] Cela est plein d’enseignements et d’une haute moralité   Mais le vice en blouse, le vice qui ronge et corrompt la classe inférieure de la société, il ne peut intéresser personne !

1275. (1932) Les deux sources de la morale et de la religion « La religion dynamique »

Personne ne tirera de là un argument contre la musique. […] A cette indication s’attachera le philosophe qui tient Dieu pour une personne et qui ne veut pourtant pas donner dans un grossier anthropomorphisme. […] La personne coïncide alors avec cette émotion ; jamais pourtant elle ne fut à tel point elle-même — elle est simplifiée, unifiée, intensifiée. […] Ce n’est pourtant l’amour de personne. […] Une personne fait l’effet d’être simple ; le monde matériel est d’une complexité qui défie toute imagination : la plus petite parcelle visible de matière est déjà elle-même un monde.

1276. (1928) Quelques témoignages : hommes et idées. Tome II

La gloire posthume de Sorel est aussi singulière que le fut sa personne elle-même. […] La principale était d’un ordre plus élevé encore et qui intéressait le fond le plus intime de sa personne. […] Cette incessante affirmation de sa personne s’accompagne de la plus incohérente instabilité. […] Il en est une autre qui tient à celle-là et que le maréchal J’offre a pratiquée, jusque dans la gloire ; l’effacement de la personne. […] Il a identifié ainsi la plupart des noms de lieux et de personnes cités dans le roman.

1277. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Appendice » pp. 511-516

Léon Laya, renouvellent avec fraîcheur et dans un tour bien moderne ce thème, si cher à l’ancienne comédie depuis et même avant Les Adelphes de Térence, de deux pères ou oncles, l’un sévère, l’autre indulgent, et qui, par ce régime contraire auquel ils soumettent leurs fils ou leurs neveux, arrivent en leur personne à un résultat opposé qui juge la méthode et donne en définitive gain de cause à l’indulgence. […] Pourtant il faut savoir encore sur quelle terre elle tombe, cette semence aisée qui demande si peu de culture, cette doctrine du laisser-faire et du laisser-aller ; car, comme le dit, chez Térence encore, le vieillard le plus indulgent : “Il y a bien des marques dans l’homme d’après lesquelles on peut distinguer lorsque deux personnes font une même chose, et qui permettent souvent de dire : ‘Celui-ci peut le faire, celui-là ne le peut pas ; non que la chose soit différente en elle-même, mais c’est que ceux qui la font sont différents.’”

1278. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Poésies d’André Chénier »

Camille, on le savait déjà, c’est Mme de Bonneuil, « belle et spirituelle personne dont la fille épousa depuis Regnault de Saint-Jean-d’Angely. » Au lieu d’une Daphné, inventée par M. de Latouche qui avait mal lu ou voulu mal lire le chiffre à demi mystérieux, Dr., il faut lire d’Arcy ; l’honneur d’avoir deviné le tendre hiéroglyphe revient à M.  […] Nous avons vu de cette jolie personne un portrait d’une extrême délicatesse.

1279. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « La poésie »

Il m’est arrivé quelquefois de causer littérature avec des personnes du sexe, réputées d’ailleurs fort instruites, et dont quelques-unes même étaient ou avaient été des institutrices distinguées ; elles savaient des mots, des définitions qu’elles répétaient de confiance ; elles avaient lu des extraits, elles en étaient presque toutes plus ou moins aux morceaux choisis de Noël et Laplace. […] Paul Albert n’a eu pour cela qu’à substituer la méthode vivante et historique aux formules et aux définitions de la vieille rhétorique qui, chassée déjà de partout ailleurs, s’était comme réfugiée dans les pensionnats et institutions de jeunes personnes.

1280. (1874) Premiers lundis. Tome I « Ferdinand Denis »

Il y a une singulière expression de mélancolie dans toute la personne de ce jeune guerrier à moitié sauvage, dont l’amour et la douleur ont développé l’âme. […] L’auteur a donc voulu, ce me semble, démontrer en sa personne l’influence complète des scènes de la nature sur le génie.

1281. (1874) Premiers lundis. Tome II « Poésie — Poésie — I. Hymnes sacrées par Édouard Turquety. »

Turquety, puis la plus haute expression de l’humanité dans la personne du pape. » Plus d’éminents poètes religieux se sont jetés de nos jours dans un christianisme vague, plus M.  […] La question d’ailleurs n’est pas dans les genres ; elle est toute dans les personnes et dans les talents.

1282. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — V — Vigny, Alfred de (1797-1863) »

Théodore de Banville Non seulement il était un soldat, un gentilhomme, un comte, mais il paraissait tout cela et voulait le paraître, non certes par une vaine gloriole, mais par amour pour les poètes pauvres et misérables de tous les âges, dont il s’était fait le représentant et l’avocat, et parce qu’il forçait ainsi le stupide vulgaire à les honorer dans sa personne irréprochable. Alfred de Vigny, ce fut là un des côtés les plus saisissants de son originalité, sentit mieux que personne combien les poètes à travers le temps revivent en ceux qui leur succèdent et sont solidaires les uns des autres.

1283. (1897) Le monde où l’on imprime « Chapitre XIV. Moralistes à succès : Dumas, Bourget, Prévost » pp. 170-180

Mais personne n’atteindra la force d’invention de Rousseau en cette matière […] Catulle Mendès flétrissait déjà les jeunes personnes qui apprennent tout du vice, et livrent tout de leur corps, — moins la bagatelle.

1284. (1920) La mêlée symboliste. I. 1870-1890 « Jules Laforgue » pp. 36-47

Ysaye, le pianiste, quelques parents lointains dans une voiture avec Mme Jules Laforgue, Paul Bourget, Fénéon, Moréas, Adam et moi ; et la montée lente, lente à travers la rue des Plantes, à travers les quartiers sales, de misère, d’incurie et de nonchalance, où le crime social suait à toutes les fenêtres pavoisées de linge sale, aux devantures sang de bœuf, rues fermées, muettes, obscures, sans intelligence, la ville telle que la rejettent sur ses barrières les quartiers de luxe, sourds et égoïstes ; on avait dépassé si vite ces quartiers de couvents égoïstes et clos où quelques baguettes dépouillées de branches accentuent ces tristesses de dimanche et d’automne qu’il avait dites dans ses Complaintes, et, parmi le demi-silence, nous arrivons à ce cimetière de Bagneux, alors neuf, plus sinistre encore d’être vide, avec des morts comme sous des plates-bandes de croix de bois, concessions provisoires, comme dit bêtement le langage officiel, et, sur la tombe fraîche, avec l’empressement, auprès du convoi, du menuisier à qui on a commandé la croix de bois et qui s’informe si c’est bien son client qui passe, avec trop de mots dits trop haut, on voit, du fiacre, Mme Laforgue riant d’un gloussement déchirant et sans pleurs, et sur cet effondrement de deux vies, personne de nous ne pensait à la rhétorique tumulaire6. » Jules Laforgue représente le type accompli de l’intellectuel en 1880. […] …………………………………………………… Avec le bruit d’un vol d’oiseaux de nuit qui passe Ses manches blanches font vaguement par l’espace Des gestes fous auxquels personne ne répond.

1285. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre II. Recherche des vérités générales » pp. 113-119

On établit ainsi, à des points de vue aussi divers que possible, des groupes sympathiques et l’on aboutit, pourvu qu’on procède avec toute la prudence que réclame la logique, à des constatations dont l’intérêt ne saurait échapper à personne. […] Le calcul des probabilités indique, à un ou deux près, le nombre des morts et des mariages qui se produiront en un pays dans l’espace d’une année ; il ne saurait apprendre si telle personne désignée se mariera ou mourra durant ces douze mois.

1286. (1824) Notes sur les fables de La Fontaine « Livre sixième. »

Ce sont de ces verbes que les grammairiens appellent impersonnels, parce que personne n’agit par eux ; mais La Fontaine a si bien préparé ces deux expressions, par ce mot tranche de roi des airs ; ces mots, pleut, vente, semblent en cette occasion si naturels et si nécessaires, qu’il y aurait de la pédanterie à les critiquer. […] On ne cesse de s’étonner de trouver un pareil vers dans La Fontaine, lui qui dit ailleurs : On ne peut trop louer trois sortes de personnes, Les dieux, sa maîtresse et son roi.

1287. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre premier. Vue générale des épopées chrétiennes. — Chapitre III. Paradis perdu. »

Nous observerons encore que le chantre d’Éden, à l’exemple du chantre de l’Ausonie, est devenu original en s’appropriant des richesses étrangères : l’écrivain original n’est pas celui qui n’imite personne, mais celui que personne ne peut imiter.

1288. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre XVI. Mme de Saman »

Si après renseignement préalable, quelqu’un, — n’importe qui, — avait osé publier sur Mme de Saman, qui n’a pas, je crois, toujours porté ce nom-là en littérature, le livre qu’elle vient de publier sur elle et eût dit à la troisième personne ce qu’elle dit, elle, à la première, à quel effroyable procès en diffamation ne serait-il pas exposé ? […] Il le faut pour une raison plus haute que la personnalité d’une femme qui dénoue sa ceinture aux confidences, — à des confidences scandaleuses que, certes, personne ne lui demandait.

1289. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « Philippe II »

Très au-dessous de Charles-Quint, son père, dont il n’avait, si l’on en croit ses portraits, que la mâchoire lourde et les poils roux dans une face inanimée et pâle ; ce scribe, qui écrivait ses ordres, défiant qu’il était jusque de l’écho de sa voix ; ce solitaire, noir de costume, de solitude et de silence, et qui cachait le roi net (el rey netto), au fond de l’Escurial, comme s’il eût voulu y cacher la netteté de sa médiocrité royale ; Philippe II, ingrat pour ses meilleurs serviteurs, jaloux de son frère don Juan, le vainqueur de Lépante, jaloux d’Alexandre Farnèse, jaloux de tout homme supérieur comme d’un despote qui menaçait son despotisme, Forneron l’a très bien jugé, réduit à sa personne humaine, dans le dernier chapitre de son ouvrage, résumé dont la forte empreinte restera marquée sur sa mémoire, comme il a bien jugé aussi Élisabeth, plus difficile à juger encore, parce qu’elle eut le succès pour elle et qu’on ne la voit qu’à travers le préjugé de sa gloire. […] Dans un temps où l’on n’avait pas vu que Mayenne, — le dernier des Guise, de toutes les manières, — mais le grand Guise lui-même, le magnifique Balafré, le charmeur de la France, recevoir vingt-cinq mille écus par mois du roi d’Espagne, non pour les besoins de son parti, — ce qui eût été légitime, — mais pour les besoins de sa maison, de son luxe et de sa personne ; quand les plus grands seigneurs de France tendaient leurs mains gantées d’acier, et les évêques leurs mitres de soie, à l’argent du roi d’Espagne qui y tombait ; quand partout, dans l’abominable politique du temps, il n’y a que gens qui se marchandent, espions tout prêts qui se proposent, assassins qui s’achètent, la Ligue ne fut pas plus innocente que les autres des vices qui dévoraient son siècle, et elle y ajouta le sien, qui était d’être une Démocratie… Philippe II fut ruiné, du reste, avant d’avoir acheté la France, et les victoires d’Henri IV firent le reste.

1290. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « Alexandre Dumas fils » pp. 281-291

disent ses amis… Au xixe  siècle, en l’an de grâce 1866, Dumas fils, qui lave, brosse et vernit ses moindres petits mots avant de les risquer dans la circulation, tutoie le printemps et la nature et leur parle comme si c’étaient des personnes ! […] Personne, pas même eux, ne pourrait être dupe d’un si enragé maquillage, et c’est là surtout ce qui doit déconsidérer le plus profondément aujourd’hui Dumas, comme romancier. — L’immoralité des tableaux est une fière chance de succès, sans doute, mais la déclamation rend tout insupportable, même le vice, pour les vicieux qui l’aiment.

1291. (1862) Les œuvres et les hommes. Les poètes (première série). III « M. Pierre Dupont. Poésies et Chansons, — Études littéraires. »

Mais j’atteste qu’il ne l’a pas toujours ; j’atteste qu’en voyant cette gargouille à vociférations de cabaret, personne ne pourrait reconnaître la bouche pensive et souriante du chaste poète des Véroniques. […] La vraie gloire de Béranger, dans la postérité, sera quelques romances, d’un sentiment éternel, auxquelles personne ne pense que les âmes tendres qu’elles font rêver et qui, pour cette raison, n’en parlent pas.

1292. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre V. Les contemporains. — Chapitre III. La critique et l’histoire. Macaulay. »

On a bien des fois traité cette question en France ; on la traite encore aujourd’hui ; mais personne n’y a porté plus de bon sens, des raisons plus pratiques, des arguments plus palpables. […] Qui pouvait prévoir que Pope, une fois dans sa vie, serait capable de faire ce qu’il ne put faire lui-même une seconde fois, et ce que personne autre n’a jamais fait ? […] La longue procession était fermée par le duc de Norfolk, comte maréchal du royaume, par les grands dignitaires, par les frères et fils du roi ; le prince de Galles venait le dernier, remarquable par la beauté de sa personne et par sa noble attitude. […] Personne n’a si bien enseigné et si bien su l’histoire. […] Elle est populaire ; personne n’explique mieux et n’explique autant que Macaulay.

1293. (1898) Politiques et moralistes du dix-neuvième siècle. Troisième série

Personne n’a détesté quelqu’un plus violemment que Stendhal son père. […] Personne n’a moins eu le génie épique que Stendhal. […] Seulement il y a très longtemps qu’on s’est aperçu que cette information complète de la nature de l’humanité, personne ne l’a, que cette « loi » tirée de cette complète information, personne ne la tient, et que ce savant, possesseur de la loi, tout un chacun croit l’être et personne ne l’est. […] Ses enquêtes sur les autres furent d’apaisants oublis de sa personne. […] Personne n’a nié la philosophie de l’histoire et toutes les philosophies de l’histoire plus constamment.

1294. (1904) Propos littéraires. Deuxième série

Vous ne trouverez personne pour vous secourir ; c’est bien évident. Vous ne trouverez personne pour vous plaindre, c’est bien naturel. […] C’est donc un personnage et une personne ? […] Dans la philosophie de Hegel Lassalle trouvait, non sans raison, car elle y est, l’idée de l’État personne morale et peut-être seule personne morale. […] L’orateur intervient de sa personne, de ses émotions, de sa sensibilité, dans ses discours.

1295. (1920) Impressions de théâtre. Onzième série

… Quelle différence seroit entre la personne et les animaux, n’étoit l’instruction ?  […] puisque personne ne veut Lui parler, je Lui parlerai, moi !  […] N’y aurait-il personne pour reprendre la tradition de Molière ? […] Et, voyez-vous, dans cette pièce-là, personne ne prend l’amour au tragique, oh ! […] Cette jeune fille n’est point une créature mortelle : c’est la Tragédie en personne.

1296. (1927) Approximations. Deuxième série

Personne aujourd’hui ne conteste sérieusement les moyens de Degas : c’est pourquoi je me sens plus à l’aise pour insister sur ce point. […] Sans doute le style de Pascal est un, en ce sens que tout dans les Pensées reçoit, subit le sceau d’une même personne, et de la plus impérieuse ; mais cette personne — irréductible en son noyau, — sous combien d’aspects ne se manifeste-t-elle pas dont chacun entraîne à sa suite son langage propre. […] Le second jouit de la considération universelle, mais presque personne ne s’y intéresse. […] Personne aujourd’hui ne vit avec la même intensité que Rivière ; personne n’est aussi radicalement soustrait à ce royaume des ombres que trop souvent nous constituons ici-bas. […] Personne n’ignore aujourd’hui que Gérard d’Houville est le pseudonyme de Mme Henri de Régnier, [(1875-1963).

1297. (1864) Le roman contemporain

Personne ne vous y accusera ; vous seule pourriez vous y accuser. […] L’intervention de ces deux personnes dans le même récit sauve ce qu’une confession personnelle aurait eu de trop direct. […] Personne ne la croit, et elle ne se croit pas non plus. […] Qu’y a-t-il de commun entre une personne qui prie et une personne qui ne prie pas ? […] Personne n’en savait davantage.

1298. (1894) Études littéraires : seizième siècle

Personne plus que lui n’a contribué à faire l’histoire, en ayant l’air de rester témoin curieux plus qu’acteur. […] C’était plein de vieux livres auxquels personne ne touchait. […] Mais c’est qu’il l’est comme personne chez nous ni peut-être ailleurs ne l’a été. […] Personne n’a mieux vu que Rabelais. […] Personne n’est moins dogmatique que Montaigne qui a commencé ses études à quatre ans, pour ne pas dire à six mois ; personne n’est plus dogmatique que Rousseau qui a commencé les siennes vers la quarantaine.

1299. (1884) La légende du Parnasse contemporain

Ce sont ici des opinions personnelles et que nous ne prétendons imposer à personne. […] Par exemple, si personne ne faisait de beaux vers, on peut dire que tout le monde en faisait de mauvais ! […] Dame, elle ne craint personne. […] Personne ne saurait créer un poète. […] Il n’est personne qui les ignore et vous les relisez si souvent.

1300. (1896) Les Jeunes, études et portraits

À la satisfaction de son propre désir il sacrifie les intérêts de beaucoup de personnes. […] Mais personne ne parle de recommencer Homère et Shakespeare. […] Personne n’a rien vu. […] C’est une plaisanterie dont au surplus personne n’est dupe. […] Une autre personne doit venir ; elle ne vient pas.

1301. (1899) Arabesques pp. 1-223

D’ailleurs cette prétention reste parfaitement illusoire : au vrai, personne n’est plus partial que ceux qui se disent impartiaux. […] Néanmoins, sauf cet ami, personne, dans la littérature, ne me soutint. […] Les jeunes gens, — ceux de vingt à vingt-cinq ans, — subissent, plus que personne, l’anxiété dont nous souffrons tous. […] On n’y rencontre personne, hormis quelques vieillards écroulés qui sommeillent, un journal à la main, sur des bancs vermoulus. […] Plusieurs personnes le croient… Qui le prouve ?

1302. (1765) Articles de l’Encyclopédie pp. 5482-9849

Une belle personne n’aura point de graces dans le visage, si la bouche est fermee sans sourire, si les yeux sont sans douceur. […] Avoir de la grace, s’entend de la chose & de la personne. […] La bonne grace appartient à la personne seulement. […] C’est en Espagne un nom appellatif honorifique, distinctif, que le roi donne aux personnes qu’il veut honorer. […] Un homme de quelque naissance ou un peu illustré, ne donne ce nom à personne.

1303. (1870) De l’intelligence. Deuxième partie : Les diverses sortes de connaissances « Livre deuxième. La connaissance des corps — Chapitre II. La perception extérieure et l’éducation des sens » pp. 123-196

L’enceinte s’attache à la personne, et désormais l’idée que j’ai de moi est inséparable de l’idée que j’ai de mon corps. […] Il s’oppose ainsi non seulement à moi, mais encore à l’enclos où je situe ma personne, et de cette façon, pour la première fois, il est véritablement extérieur. […] M. de Jaager dit à la personne sur laquelle il fait l’expérience de toucher la clef électrique de la main gauche lorsqu’elle recevra le choc électrique du côté droit, et de la main droite quand elle recevra le choc électrique du côté gauche. […] Tantôt la personne sait d’avance que le choc viendra de tel côté, du côté droit par exemple ; alors l’intervalle entre le choc qu’elle reçoit et le signal consécutif qu’elle donne est de vingt centièmes de seconde. Tantôt la personne ne sait pas d’avance de quel côté viendra le choc, et le choc vient du côté droit par exemple ; alors l’intervalle entre le choc qu’elle reçoit et le signal consécutif qu’elle donne est de vingt-sept centièmes de seconde.

1304. (1896) Essai sur le naturisme pp. 13-150

Mais les personnes qui l’entreprirent semblèrent ignorer que l’organisme intellectuel se transforme au cours des siècles, et que — comme l’a démontré M.  […] C’est le temps des sites invraisemblables où les poètes placeront des personnes fabuleuses qui seront leurs sentiments objectivés. […] Car l’ignorance de son tempérament fut le signe distinctif de sa personne où s’alliaient, sans la moindre méthode, l’inconscience et l’instinct. […] Mais cela n’est pas d’usage, et d’ailleurs serait futile, car les personnes qui éliront ce poète pour confident retrouveront, dans son œuvre, le mémorial de sa vie transcendantale. […] Les personnes soucieuses de cette question trouveront des documents fort précieux dans le livre de M. 

1305. (1895) Journal des Goncourt. Tome VIII (1889-1891) « Année 1891 » pp. 197-291

C’était, disait-il, le coquet surplis avec lequel il servait la messe, l’élégante calotte qu’il avait sur ses cheveux bouclés, les compliments sur sa charmante petite personne, les louanges sur sa jolie voix de ténorino, qui lui donnaient l’air d’un enfant confit en dévotion. […] Là-dedans, au milieu de ce mobilier d’un autre siècle, l’ovale délicat de son pâle visage, ses yeux noirs doux et profonds, la sveltesse de sa personne longuette, lui donnent quelque chose d’une apparition, d’un séduisant et souriant fantôme ; caractère que je retrouve dans son portrait pastellé par Helleu. […] Elle est émerveillée de la connaissance que j’ai de la femme, et me cite le passage, où je décris le côté ankylosé que prenait le côté droit ou le côté gauche de la Faustin, quand ce côté se trouvait près d’un embêtant, déclarant qu’elle sent en elle, comme une dilatation de son être près d’une personne sympathique. […] Voyant un moment les yeux du docteur se tourner vers le petit plâtre, d’un geste allant de sa mère à sa triste personne, elle disait : « C’est cela seul qui peut me faire supporter la vie, la vie telle que je l’ai !  […] Voici une de ces choses qu’il serait pour tout le monde de la plus grande utilité de savoir, et que personne ne dit ou n’imprime, et que très peu de personnes savent.

1306. (1864) Cours familier de littérature. XVII « XCIXe entretien. Benvenuto Cellini (1re partie) » pp. 153-232

Toutes les personnes qui étaient présentes lui demandèrent, en le félicitant, quel nom il voulait donner à cet enfant ? […] Volontiers, madame, lui répondis-je ; et sur-le-champ je lui en fis un petit dessin, et je le fis d’autant mieux, que je prenais plaisir à m’entretenir avec une si belle et si aimable personne. […] Celui qui me l’avait apporté vint tout en sueur pour le reprendre, disant que son maître l’avait demandé pour le montrer à quelques personnes. […] Ce jeune homme n’était connu de personne, était ordinairement mal vêtu, et sortait peu de sa maison, s’appliquant continuellement à l’étude du latin. […] Le pape ne s’en défendit pas ; mais il voulut que le cardinal lui livrât ma personne, en retour de cette grâce. — Mais si Votre Sainteté lui a pardonné, que dira-t-on d’elle et de moi dans le monde ?

1307. (1864) Cours familier de littérature. XVIII « CIIIe entretien. Aristote. Traduction complète par M. Barthélemy Saint-Hilaire (1re partie) » pp. 5-96

Après le meurtre de Clitus, Alexandre désespéré s’enferma dans sa tente et ne voulut voir personne. […] Il assure même que ce philosophe était innocent de l’attentat contre la personne du roi. […] Aussi est-ce bien à tort que quelques personnes refusent toute raison aux esclaves et ne veulent jamais leur donner que des ordres ; il faut au contraire les reprendre avec plus d’indulgence encore que les enfants. […] Une autorité conférée par l’âge ne peut irriter la jalousie, ni enfler la vanité de personne, surtout lorsque chacun est assuré d’obtenir avec les années la même prérogative. […] En supposant même que personne ne s’appauvrisse, l’État n’en passe pas moins de l’oligarchie à la démagogie, si la masse des pauvre s’accroît, et de la démocratie à l’oligarchie, si les riches deviennent plus puissants que le peuple, selon que les uns se relâchent et que les autres s’appliquent au travail.

1308. (1899) Les industriels du roman populaire, suivi de : L’état actuel du roman populaire (enquête) [articles de la Revue des Revues] pp. 1-403

Et pourquoi se mettraient-ils martel en tête, à propos d’un chimérique résultat, que personne ne réclame d’eux ? […] Personne ne se désintéresse plus vite et plus complètement qu’eux-mêmes du sort de la copie, la vague copie, dont ils ont assuré le rendement métallique. […] Quelle rage vous est venue de vous dénigrer en personne dans le feuilleton qui paraît chaque jour, sous votre nom ? […] L’abondance dans les paroles et la prolixité dans les discours passent généralement pour être le péché mignon des personnes du sexe. […] Et je regrettai, en regardant cela, qu’il ne fût pas possible d’étendre ces investigations au cerveau des personnes adonnées à la lecture des feuilletons populaires.

1309. (1772) Bibliothèque d’un homme de goût, ou Avis sur le choix des meilleurs livres écrits en notre langue sur tous les genres de sciences et de littérature. Tome I « Bibliotheque d’un homme de goût. — Chapitre I. Des poëtes anciens. » pp. 2-93

Ses ouvrages sont plus connus que sa personne. […] A la place des Originaux, que peu de personnes sont en état de lire aujourdhui, c’est une ressource pour notre paresse & notre ignorance, de les trouver tellement traduits & expliqués par le P. […] Il n’y a personne, dit-il, qui ne convienne que Marolles dans sa traduction est ridicule & barbare, & Martignac aussi plat qu’ignorant. […] Je crois d’ailleurs que peu de personnes auront approuvé la liberté que M. le Noble a prise dans cette traduction. […] Un Poëte françois très-boursouflé, préféroit l’enflure de Lucain au sage enthousiasme de Virgile ; presque personne n’a été de son avis.

1310. (1898) L’esprit nouveau dans la vie artistique, sociale et religieuse « III — Bossuet et la France moderne »

Je sais encore que si cette même vérité la conduit un jour aux abîmes, d’où les forces unies de toutes les divinités du globe ne parviendraient pas à la retirer, il n’y aura personne à maudire, nul principe à renier : car c’est Dieu lui-même qui l’aura voulu, la France ayant obéi à son devoir de fille soumise. […] Dans ses prêches comme dans ses livres, durant toute sa vie, il les poursuivit, dans leur personne et dans leur doctrine, de son mépris et de sa haine. […] Cet acharnement passionné, personne d’ailleurs ne le contesta, et ses nombreux admirateurs lui en font gloire. […] pour mériter la haine, non seulement des protestants, mais de tous les hommes de bonne foi, à moins de se substituer en personne aux dragons, ou de chasser à coups de fouet, hors des frontières, tous ceux qui, comme lui, n’avaient pas le bonheur d’être catholiques, apostoliques et romains ? […] La souplesse, la bassesse, l’air admirant, dépendant, rampant, plus que tout, l’air de néant sinon par lui, étaient les uniques voies de lui plaire…81 » Bossuet comprit mieux que personne de quel moyen il fallait user pour conquérir la confiance du roi.

1311. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Ma biographie »

Le libraire, honnête homme, Paulin, savait cela mieux que personne, et il m’en a toujours su gré jusqu’à la fin. […] Sainte-Beuve nous a souvent raconté dans quelles circonstances il avait fait connaissance de l’un de ses oncles paternels : c’était la première personne qu’il avait vue en arrivant à Paris, en 1818. […] Sainte Beuve se trouvait en compagnie du vieux M. de Feletz, administrateur de la bibliothèque Mazarine, dans son appartement à l’Institut même, avec quelques personnes. […] Or il était arrivé que la personne qui était ainsi montée sur les toits était un membre de l’Institut, logé dans le palais, M.  […] Sainte-Beuve n’avait jamais parlé de cela à personne, et je pourrais me tromper sur l’écriture bien ancienne des trois mots manuscrits qui me feraient croire que cette brochure est de son père.

1312. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « M. BALLANCHE. » pp. 1-51

Vers l’âge de dix-huit ans, il resta trois années entières sans sortir ; il n’était pas seul pourtant, et avait toujours nombreuse compagnie de jeunes gens et de jeunes personnes. […] Plus d’une fois il eut de ces hallucinations qui restituent un instant la forme et l’existence à des personnes dont on pleure la mort, ou qui rendent présentes celles dont on regrette l’absence…. » C’est ainsi qu’ayant perdu sa mère en 1802, M. […] Cette personne distinguée, la même que celle qui mourut le 14 août 1823, fit ce pèlerinage, vers 1808, avec un guide jeune et prudent, qui était l’un des amis de son père et qu’elle désigne sous le nom de M. […] En s’élevant sur la montagne, la jeune personne à l’imagination sensible et pieuse remarque que les fleurs y sont la plupart d’un bleu pâle comme le ciel de cette contrée, qu’elles ne penchent point sur la terre comme celles de nos plaines : « Presque toutes celles que nous vîmes, ajoute-t-elle, étaient de petites cloches. […] Son visage avait été défiguré par une opération, mais n’était point du tout laid pour cela ; ses yeux étaient brillants, larges et intelligents ; la joue était enflée d’un côté comme par une fluxion ; l’aspect général était simple, peut-être un peu trop ; mais la plus remarquable bienveillance dans toute sa personne, sa voix et ses manières, donnaient la plus agréable impression à tous ceux qui avaient quelque discernement.

1313. (1739) Vie de Molière

On tâchera d’éviter cet écueil dans cette courte histoire de la vie de Molière ; on ne dira de sa propre personne, que ce qu’on a cru vrai et digne d’être rapporté ; et on ne hasardera sur ses ouvrages rien qui soit contraire aux sentiments du public éclairé. […] On disait que Molière en était le père : le soin avec lequel on avait répandu cette calomnie, fit que plusieurs personnes prirent celui de la réfuter. […] Il n’est permis de s’adresser aux personnes que quand ce sont des hommes publiquement déshonorés, comme Rolet et Wasp. […] Mais si on ne reprocha rien à la conduite et au style, on se souleva un peu contre le sujet même de la pièce ; quelques personnes se révoltèrent contre une comédie, dans laquelle une femme mariée donne un rendez-vous à son amant. […] Molière voyant tant d’ennemis qui allaient attaquer sa personne encore plus que sa pièce, voulut laisser ces premières fureurs se calmer : il fut un an sans donner Le Tartuffe ; il le lisait seulement dans quelques maisons choisies, où la superstition ne dominait pas.

1314. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « M. LEBRUN (Reprise de Marie Stuart.) » pp. 146-189

. — Et là-dessus on s’est mis à désirer de réentendre ces pièces immortelles, éclipsées un long moment, et dans lesquelles tant de personnes de la société recommençaient aussi à aimer les souvenirs de leur propre jeunesse. […] Lebrun, à son tour, vient de contribuer autant que personne, par son vote actif et persistant, à faire cesser au sein de l’Académie l’absence trop marquée d’un illustre novateur100. […] Il faut savoir, pour tout entendre, que la personne qui avait rapporté ce mot, Mme Caroline de B…, dame du palais de Madame-mère, avait été la première passion de Bonaparte jeune, quand il était en garnison à Valence. […] On lit au tome III des Mémoires d’Ouvrard : « Au mois de septembre 1826, Talma se trouvant à dîner à la Conciergerie avec plusieurs personnes, à la fin du dîner la conversation tomba sur le théâtre. — Que pensez-vous du romantique ? […] … L’auteur de Marie Stuart lui fournit le sujet d’une foule d’idées que je n’ai entendu exprimer à personne.

1315. (1865) Cours familier de littérature. XIX « CXIIe entretien. La Science ou Le Cosmos, par M. de Humboldt (1re partie). Littérature scientifique » pp. 221-288

Il y réussit pendant qu’il vivait ; personne n’avait intérêt à s’inscrire en faux contre cette renommée un peu surfaite, et il jouit pendant quatre-vingt-dix ans de cette gloire convenue et en apparence inviolable. […] Homme naturel, grand de sa propre grandeur, modeste, paisible, et ne demandant à personne une grandeur supérieure à celle que Dieu lui avait permis de développer pour sa patrie. […] Quand il était assis, il paraissait courbé et parlait en regardant à terre, ou bien il levait les yeux pour attendre la réponse des personnes auxquelles il s’adressait. Une bienveillance inexprimable brillait sur sa physionomie, quand il reconnaissait dans une personne étrangère un homme d’esprit. […] Dans les derniers temps, il éprouva de nombreuses indispositions, surtout des refroidissements, qui prirent chez lui le caractère de la grippe, et, toutes les fois que la nouvelle de sa maladie se répandait, tout le monde savant y prenait la part la plus affectueuse, les journaux en donnaient des bulletins, et les princes et les princesses s’informaient, ou par le télégraphe ou en personne, de l’état de sa santé.

1316. (1886) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Deuxième série « M. Deschanel et le romantisme de Racine »

Et combien de personnes vont aux leçons de votre docteur   Deux ou trois mille, dit Kou-Tu-Fong  Oh ! […] Mais c’est un compte difficile à établir, et peut-être quelques personnes se délectent à la lecture de Racine, qui ne le disent pas, n’en ayant point l’occasion. […] Il ne faut pas oublier que Molière se vengea en jouant sur son théâtre la Folle querelle de Subligny, et que plus tard les deux poètes se réconcilièrent, comme on le voit par le prologue de la Psyché de La Fontaine : cela prouve, sans doute, la bonté de Molière, que personne ne conteste ; mais cela montre peut-être aussi que la conduite de Racine n’avait pas été si noire ni si impardonnable. […] Racine a eu tort de flatter Mme de Montespan s’il ne l’aimait pas : on ne saurait le blâmer d’avoir loué Mme de Maintenon, qui avait du goût pour lui, pour laquelle il semble avoir eu beaucoup d’affection, qui était pieuse à une époque où il était lui-même dévot, et qui, enfin, était peut-être plus femme qu’on ne croirait : ces personnes graves, décentes et avisées, ont parfois de grandes séductions. […] Sous le coup d’une grande douleur, telle que la perte ou la trahison d’une personne chèrement aimée, le simple est secoué tout entier, ne s’appartient plus, s’abandonne volontiers aux démonstrations bruyantes ; mais souvent, s’il souffre avec violence, il se console avec rapidité.

1317. (1890) L’avenir de la science « XXIII »

Innocente illusion qui ne convertit personne et n’inspire aux raffinés qu’une très facile résignation. On lit avec plaisir ces éloquentes déclamations ; on les accepte comme des thèmes donnés, mais, quoi qu’en dise Voltaire, il ne prend envie à personne en lisant Rousseau de marcher à quatre pieds. […] Les simples prennent la chose au sérieux, à peu près comme si ces pantins étaient des personnes réelles ; les habiles s’en amusent, lors même qu’ils verraient un peu le fil ; car, après tout, ils savent fort bien qu’il y en a un. […] Ces moments sont rares et fugitifs ; habituellement nous vivons en face d’une tierce personne, qui empêche l’effrayant contact du moi contre lui-même. […] J’espère bien que personne ne m’accusera jamais d’être matérialiste, et pourtant je regarde l’hypothèse de deux substances accolées pour former l’homme comme une des plus grossières imaginations qu’on se soit faites en philosophie.

1318. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Gui Patin. — II. (Fin.) » pp. 110-133

On lit, en tête du recueil des Plus Belles Lettres françaises par Richelet, un jugement fort exact et fort net sur Gui Patin et sur sa personne ; ses lettres y sont louées pour leurs bonnes parties, pour leur liberté et leur enjouement, pour les bons contes et les faits curieux qu’elles renferment : « Ces choses, dit-on, doivent obliger à n’en point regarder de si près le langage : car il n’est pas toujours selon Vaugelas ni Patru. » Ainsi, du temps de la jeunesse de Gui Patin, il y avait une séparation bien marquée dans le genre épistolaire : d’un côté, l’art, et rien que l’art et la rhétorique, comme chez Balzac et ceux de cette école ; de l’autre côté, le naturel, et rien que le naturel, avec tous ses hasards et ses crudités comme chez Gui Patin. […] « Scaliger a été, par ses bonnes parties, un des plus grands hommes qui aient vécu depuis les Apôtres. » Et le médecin Fernel, ce moderne héritier de Galien, Gui Patin a, pour l’honorer, des paroles sans mesure ; il disait un jour à une personne de cette famille, « qu’il tiendrait à plus grande gloire d’être descendu de Fernel que d’être roi d’Écosse ou parent de l’empereur de Constantinople ». […] C’est un trait de plus dans le portrait de Gui Patin que ce dédain pour les personnes du sexe au moment où elles s’établissaient plus généralement dans la société, et où elles allaient y introduire ce qui surtout lui manquait, à lui et aux autres savants cantonnés dans les corps, je veux dire la politesse. […] Il fut soupçonné d’avoir introduit en France des libelles contraires au roi ou aux personnes royales.

1319. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Journal et Mémoires, de Mathieu Marais, publiés, par M. De Lescure  »

Cette belle personne de l’âge de seize ans, qu’il se choisit pour se récréer la vue et pour s’entretenir avec elle lorsqu’il demeurerait seul, plutôt que pour aucun usage auquel il la pût appliquer, en ferait le principal ornement. L’indisposition de son mari, mais surtout la beauté, la jeunesse et l’esprit galant de cette dame n’ont fait aucun tort à sa vertu, et quoique les personnes qui soupiraient pour elle fussent des plus riches du royaume et de la plus haute qualité, elle a mérité l’estime générale de tout le monde par la sagesse de sa conduite ; et on lui doit même cette justice de dire qu’elle s’est piquée d’une belle amitié conjugale sans en pratiquer les principales actions. » Certes, c’est là un témoignage qui compte de la part d’un contemporain, d’un homme qui ne passe pas pour trop scrupuleux et qui s’exprime en général assez librement. […] Quoi qu’il en soit du degré où il admettait le scepticisme de Bayle, il nous représente mieux que personne le mouvement de ferveur et d’enthousiasme qui signala en France l’apparition de ce fameux Dictionnaire ; car cet ouvrage qu’on se borne aujourd’hui à consulter et à ouvrir par places, se lisait tout entier, se dévorait à sa naissance. […] Dans le passage cité de Phèdre et que Bayle applique à Boileau, il y a : Naris emunctæ senex, Ésope, ce vieillard au nez fin ; Bayle, en citant, a eu le soin d’oublier ce vieillard ; personne, en effet, n’est charmé de s’entendre appeler vieillard, même en latin, et même dans un compliment.

1320. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre III. Les grands artistes classiques — Chapitre I. Les mondains : La Rochefoucauld, Retz, Madame de Sévigné »

Mme de Sablé s’était retirée depuis 1659 auprès de Port-Royal, ajoutant la dévotion à tous ces défauts et qualités qui composaient sa charmante personne. […] En un mot, elle est artiste, et comme telle, sa personne n’est pas la mesure de son œuvre ; par cette riche faculté de représentation qu’elle possède, elle se donne des émotions que la simple affection ne ferait pas naître, et elle émeut plus qu’elle n’a elle-même d’émotion. […] Et si l’horizon de Mme de Sévigné est plus large, si elle a des inquiétudes plus hautes et plus philosophiques, Mme de Maintenon a une expérience sûre et profonde de la nature humaine et des tempéraments individuels, une de ces expériences d’institutrice et de directrice d’âmes à qui rien ne se dérobe : on aime à entendre une personne de si bon sens et si bien informée, qui a perdu ses illusions sans en trop vouloir à autrui. […] Mme de la Fayette361, que La Rochefoucauld estimait la femme la plus vraie qu’il eût connue, était une fine et adroite personne, très intelligente et point sentimentale, dont le style est, avec celui de Bussy, et mieux encore, la perfection du style mondain : elle a un style aisé, vif, sans affectation, sobre et net, lumineux plutôt qu’outré, sans passion ni grands éclats ni ampleur de geste, avec une pointe sèche de gaieté, et une malice aiguë, parfois meurtrière.

1321. (1889) Histoire de la littérature française. Tome IV (16e éd.) « Chapitre neuvième »

Comment une société tombée en dissolution parce que tout le monde veut la gouverner, et personne gratuitement, va-t-elle se relever sur ses bases, et quelles sont ces bases ? […] Sa justice même paraît lui coûter, et il gâte les louanges données aux talents par des doutes sur la sincérité des personnes. […] Et pourtant, dans la passion de l’incrédule, l’impartialité du génie se fait jour par moments, et de la même plume qui rapetissait les choses il a tracé des personnes des portraits qui les grandissent. […] Personne n’en a eu plus que Voltaire.

1322. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Livre I : La politique — Chapitre III : Examen de la doctrine de Tocqueville »

Sans doute c’est là un des effets et une des tendances de la démocratie, c’est surtout un de ses écueils ; mais la démocratie a une racine plus noble et plus pure, elle ne vient pas seulement du désir de partager les biens de la terre : elle vient du désir plus élevé de faire respecter sa personne et ses droits ; l’amour de l’égalité dans ce qu’il a de meilleur n’est autre chose que le respect de soi-même et la défense de sa dignité. […] Personne aujourd’hui ne frappe plus et n’est plus frappé au nom de Dieu ; personne ne prétend plus à usurper les droits et à devancer les arrêts du souverain juge. » Il est enfin une troisième liberté qui tend à grandir de plus en plus : c’est la liberté industrielle. […] Elle a inspiré ces belles maximes éparses dans sa correspondance : « En toutes choses, il faut viser à la perfection ; — ce monde appartient à l’énergie ; — la grande maladie de l’âme, c’est le froid. » Sa vie même a été une confirmation de ses doctrines ; c’était une nature noble et haute, admirablement sincère, ayant toujours devant les yeux la grandeur morale ; c’était une personne, une âme, un caractère.

1323. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Histoire littéraire de la France. Ouvrage commencé par les Bénédictins et continué par des membres de l’Institut. (Tome XII, 1853.) » pp. 273-290

En un mot, pour la gloire de notre nation, recueillir en un corps d’histoire tout ce qui concerne la littérature française, c’est ce que personne n’avait encore exécuté et ce qu’entreprit le courageux solitaire. […] Pour se mettre tout entier à une telle œuvre en dérobant son nom, en ne citant que ceux des personnes à qui l’on a obligation de quelque secours et communication bienveillante ; pour se résoudre à aborder sur son chemin tous les auteurs quelconques qui ont écrit, les ennuyeux, les épineux, les scolastiques, les sages, les menteurs, les frivoles, et ceux qui édifient et ceux qui scandalisent ; pour s’engager à rendre de tous un compte honnête, scrupuleux et impartial, en vue de l’exactitude et même de la charité, il fallait avoir un zèle et une candeur primitive qui n’est pas étrangère à l’âme des vrais et purs studieux, mais que la religion ici consacrait et arrosait pour ainsi dire d’une douceur et, je ne crois pas profaner ce mot, d’une bénédiction secrète. […] Je suis venue de toi me plaindre ; mais je ne trouve qui me fasse droit ; car tu ne crains ni menace de personne, ni colère, ni paroles. » — La malheureuse Pinte, en parlant ainsi, tomba pâmée sur le carreau, et toutes les autres de même à la fois.

1324. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Le buste de l’abbé Prévost. » pp. 122-139

Était-ce bien pour l’abbé Prévost, pour l’auteur de ces romans et de ces mille écrits qu’ils n’ont point lus, que se pressaient vers la ville, dès le matin du dimanche 23, les habitants des communes rurales d’alentour, tellement que le travail des moulins chômait et qu’il ne restait dans les villages qu’une seule personne par maison pour la garde des enfants et des bestiaux ? […] Delalleau, recteur de l’académie départementale, et autres personnes notables et de distinction, appelés par leur rang ou invités, parmi lesquels on remarquait M.  […] J’ai vécu dans le commerce et avec l’estime de tout ce qu’il y a de personnes de distinction ; et, si vous me permettez ce badinage, je n’aurai point d’embarras à vous fléchir quand il ne me faudra que le témoignage et la protection des ambassadeurs réunis de toute l’Europe.

1325. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Marivaux. — II. (Fin.) » pp. 364-380

Il suppose que, dans un voyage à Versailles, son paysan se rencontre en voiture avec trois autres personnes, dont un vieil officier, chevalier de Saint-Louis, et un jeune homme qui se trouve être Crébillon (sans qu’il soit nommé). […] Ce sont deux personnes, la marquise et Ergaste, qui font état avant tout de parler franc et d’être sincères. […] Il était atteint de ce mal particulier que nous avons vu à certains amours-propres pointilleux de notre temps82 et qu’on a appelé le rhumatisme littéraire : « Je n’ai vu de mes jours à cet égard, nous dit Collé, personne d’aussi chatouilleux que lui ; il fallait le louer et caresser continuellement comme une jolie femme. » Les portraits de Marivaux nous le représentent avec la physionomie fine, spirituelle, bienveillante, mais inquiète et travaillée.

1326. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Geoffroy de Villehardouin. — I. » pp. 381-397

Il n’y avait plus qu’à obtenir la ratification du grand Conseil et la sanction du peuple : le doge eut sans peine la première et procéda habilement à procurer la seconde, en prenant à part quarante, puis cent, puis deux cents personnes. […] Commynes trouve là pour doge un Barbarigo, homme sage et fin, moins grandiose que le Dandolo d’autrefois, mais une « douce et aimable personne ». […] Mais que fera ce bon doge aveugle et nonagénaire, ainsi croisé, en ces temps de rude guerre et où il s’agissait surtout pour les chefs de payer de leur personne ?

1327. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Le maréchal de Villars — I » pp. 39-56

» La mère de Villars était une personne de beaucoup d’esprit, de raillerie et de finesse. […] Personne n’a été moins honteux à demander des grâces et des grades ; il savait les pouvoir payer ensuite, et qu’il les mériterait hautement après les avoir reçus. […] Le maréchal, bien qu’il eût de l’amitié pour Villars et qu’un jour, qu’il le voyait en habit brodé d’or s’exposant sur une brèche, il s’échappa jusqu’à lui dire : « Jeune homme, si Dieu te laisse vivre, tu auras ma place plutôt que personne », ne fit point dans le cas présent ce qu’il désirait : « Et cela fut heureux pour le marquis de Villars, ajoutent les Mémoires ; car d’être demeuré dans cette brigade lui valut d’avoir la meilleure part à quatre actions considérables qui se passèrent dans le reste de cette campagne. » Ce petit désagrément, qui tourna si bien, servit dans la suite à le persuader tout à fait de sa bonne chance et le guérit pour toujours de demander ni même, à ce qu’il assure, de désirer d’être plutôt dans un corps que dans un autre.

1328. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Correspondance de Buffon, publiée par M. Nadault de Buffon » pp. 320-337

Les encyclopédistes et leur entreprise, au début, sont de même jugés par lui favorablement ; mais il se liera peu avec les personnes, et n’entrera point dans les passions et les excès de la coterie. […] Diderot, qui venait de causer avec Buffon et de l’entendre se louer, disait de lui un peu ironiquement : « J’aime les hommes qui ont une grande confiance dans leurs talents. » D’Alembert faisait plus ; il raillait Buffon, il le méconnaissait, n’appréciant ni ses talents ni sa personne. […] honneur à lui jusque dans leur personne encore !

1329. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Essais de politique et de littérature. Par M. Prevost-Paradol. »

D’autres fois, pourtant, cette ironie se perd un peu en se prolongeant et n’est plus sensible qu’à bien peu de personnes. […] — Mais vous êtes bien coalisés vous-mêmes, nous dit-il ; car je vois des personnes de toute sorte et de toute origine dans vos rangs. […] La cause libérale, comme elle s’intitule, avait eu à subir depuis 1848 bien des affronts, des échecs et des désagréments ; mais je ne crois pas que, dans la personne de quelques-uns de ses chefs, tels que je les connais, elle dût éprouver d’humiliation plus sensible que celle de voir un ancien secrétaire du Château, l’ancien avocat des dotations princières, le chroniqueur des voyages officiels d’où il écrivait au débotté : « Le prince a fort réussi » ; un homme de collège à la cour et un homme de cour au collège, M. 

1330. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Louis XIV et le duc de Bourgogne, par M. Michelet »

Quand elle le prend, on dirait que c’est un ressort de machine qui se démonte tout à coup : il est comme on dépeint les possédés ; sa raison est comme à l’envers ; c’est la déraison elle-même en personne. […] Représentons-nous Fénelon lisant à haute voix cette lettre qu’il vient d’ouvrir, en présence du duc de Bourgogne et d’une ou deux des personnes attachées à son éducation, un matin, à déjeuner. […] Virgile descendu aux Enfers et arrivant aux Champs-Élysées y est reçu par le berger Aristée en personne, qui a rang parmi les demi-dieux, et il est introduit dans le groupe des poètes.

1331. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Halévy, secrétaire perpétuel. »

Raoul-Rochette ne fit point ainsi : il était bien de sa personne, et le sachant ; beau diseur ; il a de la pompe, de la dignité, du grandiose, et aussi des fleurs. […] N’avons-nous donc parmi nous personne qui sache pertinemment parler de nous et de nos travaux ? […] Je n’ai pas du tout approuvé, dans l’Éloge du baron boucher-Desnoyers, graveur, cet encadrement trop fleuri, cette scène de début dans un jardin : « Plusieurs personnes se trouvaient réunies chez M. 

1332. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Salammbô par M. Gustave Flaubert. (Suite.) » pp. 52-72

Mâtho, revêtu du voile rayonnant, les effraye, passe au travers d’eux tous, personne ne se risquant à l’approcher ni à le toucher ; il s’éloigne et traverse ainsi la ville, que le bruit de son audace et de son crime a éveillée et soulevée. […] Spendius le furet, et qui n’est jamais embarrassé de sa personne, s’est sauvé par quelque autre issue : il a couru, il a sauté, il a glissé, il s’est jeté à la nage. […] Spendius, peu brave de sa personne, se rattrape par les stratagèmes ; il a fait des siennes en cette dernière circonstance, et moyennant un troupeau de porcs enduits de bitume et auxquels il a mis le feu, il a effrayé et culbuté les éléphants du vainqueur.

1333. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « La comtesse d’Albany par M. Saint-René Taillandier. »

Et qu’était-ce d’abord que cette noble et quasi royale personne, morte en 1824, qui avait titre la comtesse d’Albany, et qui bien qu’en partie Française par les opinions, par les relations, par les lectures, n’a jamais été naturalisée comme elle l’aurait pu l’être au cœur et au centre de notre monde français ? […] Saint-René Taillandier d’une singulière exigence envers la belle et noble personne dont il s’est fait le biographe et le peintre après M. de Reumont : « On voudrait savoir, dit-il, quel a été le rôle de la princesse auprès d’un tel mari ; on voudrait savoir si elle a exercé quelque influence sur sa conduite, si elle a tenté de relever son cœur, de le rappeler au sentiment de lui-même, si elle a essayé enfin de guérir le malade avant de s’en détourner avec dégoût. […] Je ne demande pas une admiration excessive pour Mme d’Albany que j’aurai bientôt à définir, sous sa forme dernière, comme une personne gracieuse, distinguée et surtout sensée, comme une vraie reine de salon et une maîtresse de maison parfaite, dont la mort, en 1824, mit le deuil dans Florence et fut une perte pour la société européenne tout entière ; mais, à considérer sa vie telle qu’elle sut la réparer et la fixer, je ne vois pas qu’il y ait lieu ni prétexte contre elle, de la part d’un esprit juste, à aucun anathème.

1334. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « De la poésie en 1865. (suite.) »

La jeunesse est sujette à prendre au pied de la lettre tout ce qui s’écrit ; et, ce qui doit donner à penser à ceux qui écrivent, elle met ses actions, sa personne et sa vie au bout des phrases ; elle s’embarque, corps et âme, sur la foi des paroles. […] Bien des personnes qui ont connu Veyrat dans sa vie parisienne sont, grâce à Dieu, encore vivantes et peuvent se souvenir. […] Il avait retrouvé une sœur d’une nature pareille à la sienne, mais plus forte et mieux conservée, une sœur à la Pascal, si l’on peut dire, supérieure et fondatrice d’établissements religieux, une personne des plus considérées dans son Ordre ; il lui adressa ses plus doux et ses plus intimes épanchements.

1335. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « De la poésie en 1865. (suite et fin.) »

Il avait épuisé depuis longtemps à Paris la dose d’admiration et d’attention dont nous sommes capables et qui est disponible chez nous pour les choses et les personnes de passage. […] C’étaient là des fautes de goût que peu de personnes par-delà sentirent. […] Il y avait cinq croix sur son drap funéraire : il n’y avait pas cinq personnes à suivre son cercueil. » 65.

1336. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Les cinq derniers mois de la vie de Racine. (suite et fin.) »

A part la résurrection d’un mort, d’un Lazare, miracle réservé au seul Jésus en personne, je ne crois pas qu’il y eût une seule guérison surnaturelle et miraculeuse qu’il repoussât, si elle était faite au nom du Christ et par l’intercession d’un saint, ce saint fût-il un des hommes du jour. […] Racine : je les tire d’une lettre que m’a écrite une personne qui se trouva au petit discours que fit l’ecclésiastique de Saint-Sulpice qui avait accompagné le corps et qui le présenta, et à la réponse que fît le confesseur de la maison, nommé M.  […] Il y ajouta quelques mots sur la tempête qui s’était élevée contre la maison et qui avait obligé des personnes qui s’y étaient retirées à s’en séparer ; que, pour le défunt, les ronces et les épines avaient étouffé pendant un temps ces précieuses semences que son cœur y avait reçues ; mais que, comme on avait lieu d’avoir une humble créance qu’il était une de ces heureuses plantes que le Père céleste a plantées lui-même pour ne souffrir jamais qu’elles fassent entièrement déracinées 108, elle avait repris vigueur et avait porté son fruit en son temps.

1337. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Millevoye »

Les poëtes particulièrement (notons ceci) sont très-sujets à rencontrer d’honnêtes personnes, d’ailleurs instruites et sensées, mais qui ne semblent occupées que de les détourner de leur vrai talent. […] Il n’était pas encore malade et au lait d’ânesse, et certaines historiettes que des personnes, qui d’ailleurs l’ont connu, se sont plu à broder sur son compte, ne sont, je le répète, que des jeux d’imagination, et comme une sorte de légende romanesque qu’on a essayé de rattacher au nom de l’auteur de la Chute des Feuilles et du Poëte mourant. […] La mode ayant changé en poésie, les nouveaux venus le méprisent, les moraux le conspuent, personne ne le défend.

1338. (1796) De l’influence des passions sur le bonheur des individus et des nations « Section première. Des passions. — Chapitre premier. De l’amour de la gloire »

Le public se plaît à donner à celui qui possède ; et, comme ce sultan des Arabes, qui s’éloignait d’un ami poursuivi par l’infortune, parce qu’il craignait la contagion de la fatalité ; les revers éloignent les ambitieux, les faibles, les indifférents, tous ceux enfin qui trouvent, avec quelque raison, que l’éclat de la gloire doit frapper involontairement ; que c’est à elle à commander le tribut qu’elle demande ; que la gloire se compose des dons de la nature et du hasard, et que personne n’ayant le besoin d’admirer ; celui qui veut ce sentiment ne l’obtient point de la volonté, mais de la surprise, et le doit aux résultats du talent, bien plus qu’à la propre valeur de ce talent même. […] comme personne ne s’occupe d’eux, personne ne songe à les attaquer.

1339. (1870) De l’intelligence. Première partie : Les éléments de la connaissance « Livre quatrième. Les conditions physiques des événements moraux — Chapitre III. La personne humaine et l’individu physiologique » pp. 337-356

La personne humaine et l’individu physiologique Sommaire. […] Opinion commune sur la personne humaine et sur ses facultés. — Sens du mot faculté ou pouvoir. — Forces mécaniques. — Force de la volonté. — Ces mots ne désignent aucun être occulte. — Ils ne désignent qu’un caractère d’un événement, à savoir, la particularité qu’il a d’être suivi constamment par un autre. — Illusion métaphysique qui érige les forces en essences distinctes. […] IV Cela posé, on comprend sans difficulté la liaison de la personne humaine avec l’individu physiologique.

1340. (1886) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Deuxième série « J.-J. Weiss  »

Sarcey — sa personne, sa critique et son style — est une impression de rotondité. […] Mais personne ne le cria plus haut que M.  […] … Je ne sais si personne de notre temps a eu plus d’esprit que M. 

1341. (1914) Enquête : L’Académie française (Les Marges)

Les lettres patentes de 1637 restreignirent dès l’origine l’action de l’Académie française à un double objet en lui enjoignant, ainsi qu’à ses membres, de ne connaître « que de l’ornement, embellissement et augmentation de la langue française, et des livres qui seront faits par eux, et par autres personnes qui le désireront et voudront » ; A. — De la langue. […] Mais quand ils seraient quarante, la « personne civile et morale » — combien civile, morale et même puérile !  […] Richelieu eut au génie ; ce dont il fut châtié en la personne de M. 

1342. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre XVI. Les derniers temps de la comédie italienne en France » pp. 311-338

Mais pour des comédiens français, la nature les fait en dormant : elle les forme de la même pâte que les perroquets, qui ne disent que ce qu’on leur apprend par cœur : au lieu qu’un Italien tire tout de son propre fonds, n’emprunte l’esprit de personne pour parler ; semblables à ces rossignols éloquents, qui varient leurs ramages suivant leurs différents caprices. […] Je ne ferais cela pour personne du monde ; mais puisque vous le souhaitez et que monsieur de La Ressource m’en prie… LE DOCTEUR. […] Vous n’ignorez pas que plusieurs personnes ont entrepris d’amener à leurs dépens la rivière d’Ourq à Paris, dans la vue de vendre l’eau bien cher à ceux qui en ont besoin.

1343. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Marie Stuart, par M. Mignet. (2 vol. in-8º. — Paulin, 1851.) » pp. 409-426

Marie Stuart a succombé de sa personne et dans celle de ses descendants ; Charles Ier sous la hache, Jacques II par l’exil, ont continué et accru son héritage de fautes, d’imprudences et de calamités : la race entière a été retranchée et a paru mériter de l’être. […] Une telle conduite et de tels actes, qui se couronnèrent par sa fuite inconsidérée en Angleterre et par l’imprudent abandon de sa personne aux mains d’Élisabeth, semblent bien peu propres à faire de Marie Stuart l’héroïne touchante et pathétique qu’on est accoutumé de chérir et d’admirer. […] L’humanité, la pitié, la religion, la grâce poétique suprême, toutes ces puissances invincibles et immortelles se sentent intéressées dans sa personne, et crient pour elle à travers les âges.

1344. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Ducis. » pp. 456-473

Mais, même avant Talma, et du temps de Brizard ou de Larive, La Harpe sentait bien qu’il y avait là-dessous une force supérieure cachée : « C’est bien heureux, disait-il en parlant de Ducis, que cet homme n’ait pas le sens commun ; il nous écraserait tous. » Personne ne fit, dans le temps, à Ducis les vraies objections ; on lui reprochait de trop imiter Shakespeare, et non pas de l’imiter mal. […] La première phrase du discours de réception de Ducis (4 mars 1779) fut saluée d’un long applaudissement : « Messieurs, il est des grands hommes à qui l’on succède et que personne ne remplace… » Ainsi Voltaire fut remplacé et célébré par celui même dont il avait tant de fois parlé comme d’un auteur wisigoth ou allobroge et ne sachant pas écrire : Vous avez vu sans doute Hamlet, écrivait-il à d’Argental lors de la première pièce de Ducis qui eut du succès ; les Ombres vont devenir à la mode ; j’ai ouvert modestement la carrière, on va y courir à bride abattue : domandava acqua, non tempesta. […] Mme Roland, cette femme d’esprit, et qui n’était pas si déclamatoire que quelques personnes l’ont pensé, a fort bien raillé ces scènes sentimentales où les acteurs trop sincères oubliaient qu’il y avait des témoins désintéressés et froids.

1345. (1903) Zola pp. 3-31

Personne, du reste, ne fit la moindre attention à cet arbre généalogique et on lut les diverses histoires des Rougon et des Macquart sans se préoccuper un seul instant de savoir à quel degré tel Macquart était parent de tel Rougon et comment tel Rougon était allié à tel Macquart. […] Mais ce dont on s’aperçut surtout, c’est que personne ne se trompait plus que M.  […] La grande âme contemptrice et désolée de Chateaubriand, si souvent retrouvée partiellement par Musset, par Gautier, par Vigny, par Lamartine lui-même, le tempérament neurasthénique des romantiques, est l’âme même, intime et profonde, du romantisme ; et si Vigny est considéré à présent, plus que tout autre, comme le représentant du romantisme, c’est que du romantisme il a négligé le magasin des accessoires, mais exprimé plus fortement que personne l’esprit même.

1346. (1908) Les œuvres et les hommes XXIV. Voyageurs et romanciers « Hippolyte Babou »

Par sa taille élevée, par son embonpoint majestueux, qui rappelait le contour d’un beau vase antique, par ses blanches mains de velours, par sa haute mine impertinente que j’ai retrouvée plus tard dans un portrait du cardinal de Rohan, par l’ensemble de sa physionomie et la dignité de sa personne, dom Bazin était né prélat… » C’est à ce païen innocent, « qui faisait le signe de la croix en scandant le vers : O fons Bandusiæ splendidior vitro !  […] Jamais personne n’a senti plus vivement que Babou leurs inconvénients, leur ennui et leur ridicule ; jamais personne n’a eu plus complète l’agaçante perception de la médiocrité, pire que la sottise !

1347. (1903) Considérations sur quelques écoles poétiques contemporaines pp. 3-31

En dernière analyse, Hugo et le Parnasse, ne peuvent que se voir refléter dans les personnes les plus distinguées de leurs élèves. […] Toutes ces œuvres, pour n’être pas rimées, n’en ont pas moins une poésie charmante, si, par ce nom, l’on entend le don d’exprimer d’une manière rare des idées, ou de décrire des paysages au moyen d’images choisies ; et aussi, selon la belle expression de Diderot : tout ce qu’il y a d’élevé, de touchant dans une œuvre d’art, dans le caractère ou la beauté d’une personne ou même dans une production naturelle. Personne ne l’a montré avec plus de clarté que M. 

1348. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre VIII : M. Cousin érudit et philologue »

Aujourd’hui cette construction a priori est si fort en ruines que personne ne songe plus à la renverser. […] Cousin devient amoureux d’un texte ; épris du manuscrit qu’il devine, il se met en campagne, il écrit à l’un, fait écrire à l’autre, et poursuit une lettre de Descartes ou un fragment de Malebranche avec une opiniâtreté et un enthousiasme que personne n’a plus. […] Il apprit, en écoutant le langage exquis des gens de cour et des gens du monde, la différence du style enflé et du style noble, du style vague et du style élevé ; il se dépouilla d’une certaine rouille philosophique qu’il avait contractée en théologie, et comprit que, lorsqu’on faisait le portrait de personnes si élégantes et si mondaines, il ne fallait pas y apporter les habitudes philosophiques que la Sorbonne conservait dans ses argumentations d’apparat.

1349. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Le maréchal de Villars — V » pp. 123-131

Personne ne connaît mieux que vous les Champs élysées, et personne assurément ne peut entendre à y être mieux reçu ; ainsi les consolations que vous m’y faites espérer doivent vous flatter plus que moi.

1350. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Histoire de la querelle des anciens et des modernes par M. Hippolyte Rigault — I » pp. 143-149

La Motte était le point de réunion de l’assemblée, et personne n’y était plus propre que lui, par le ton de politesse qu’il mettait dans la discussion. […] Et M. d’Argenson, qui est sans gêne dans son tête-à-tête et dont tous les jugements d’ailleurs ne sont pas articles de foi, note dans ce volume de l’abbé de Pons qu’il vient de lire « un petit traité De l’origine des âmes qui est, dit-il, une miniature de métaphysique. » L’abbé Trublet, autorité peu considérable en matière le goût, mais témoin exact des faits, nous dit de son côté : Je n’ai connu personne qui écrivît plus facilement que l’abbé de Pons, quoique d’un style très singulier et en apparence très recherché.

1351. (1874) Premiers lundis. Tome I « Diderot : Mémoires, correspondance et ouvrages inédits — I »

C’est en vain qu’elle tendra les mains au ciel et qu’elle appellera sa mère ; le ciel ni sa mère ne l’entendront plus ; ses cris seront perdus dans la forêt ; personne ne viendra qui la délivre du satyre ; et quand le satyre l’aura surprise une fois aux environs de sa demeure, elle y retournera pour être surprise encore. […] L’auteur, qui avait eu l’occasion de voir continuellement Louis XV dans ses chasses, parle de ce roi d’un ton de vérité plutôt bienveillante ; mais il insiste autant que personne sur sa timidité, sa défiance de lui-même, son impuissance totale de s’appliquer, et cette inertie, cette apathie incurable, qui ne fit que croître avec les années. » La Nouvelle lettre de Junius, publiée en 1872 chez Michel Lévy, fait penser (notamment page 10) à cet écrit posthume de Georges Leroy.

1352. (1874) Premiers lundis. Tome II « E. Lerminier. De l’influence de la philosophie du xviiie  siècle sur la législation et la sociabilité du xixe . »

Il y a quelques jours, pour exhorter à l’histoire et détourner des vagues rêveries la jeunesse, il lui échappait, à propos de l’auteur d’Adolphe, une sortie sans motif contre la lâcheté d’Obermann que personne ne songeait à proposer en exemple, et il se trouvait ainsi injurieux à son insu, injuste envers un moraliste rigoureux qui cherche à sa manière, dans ses voies obscures, l’utilité et le bien des hommes. […] Béranger, le poète, me disait un jour qu’une fois que les hommes, les grands hommes vivants, étaient faits types et statues (et il m’en citait quelques-uns), il fallait bien se garder de les briser, de les rabaisser pour le plaisir de les trouver plus ressemblants dans le détail ; car, même en ne ressemblant pas exactement à la personne réelle, ces statues consacrées et meilleures deviennent une noble image de plus offerte à l’admiration des hommes.

1353. (1874) Premiers lundis. Tome II « Henri Heine. De la France. »

Ainsi, dans les excellents articles qu’il a publiés sur la littérature allemande, le Ion a pu choquer les personnes les mieux disposées à ces points de vue nouveaux. […] Or, les bras fourrés des doctrinaires ne sont guère solides quand il s’agit de résister à une attaque de fait ; la pensée immuable ne jugeait pas qu’il fût l’heure encore de se mettre en personne sur la brèche.

1354. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Troisième partie. Beaux-arts et littérature. — Livre V. Harmonies de la religion chrétienne avec les scènes de la nature et les passions du cœur humain. — Chapitre II. Harmonies physiques. — Suite des Monuments religieux ; Couvents maronites, coptes, etc. »

Or, personne ne peut comparer un Indien du Canada à Socrate, bien que le premier soit, rigoureusement parlant, aussi moral que le second ; ou bien il faudrait soutenir que la paix des passions non développées dans l’enfant a la même excellence que la paix des passions domptées dans l’homme ; que l’être à pures sensations est égal à l’être pensant, ce qui reviendrait à dire que faiblesse est aussi belle que force. Un petit lac ne ravage pas ses bords, et personne n’en est étonné ; son impuissance fait son repos : mais on aime le calme sur la mer, parce qu’elle a le pouvoir des orages, et l’on admire le silence de l’abîme, parce qu’il vient de la profondeur même des eaux.

1355. (1767) Salon de 1767 « Les deux académies » pp. 340-345

C’est, leur dis-je, que personne ne se mêle de la vôtre, et que nous avons quarante oies qui gardent le capitole ; comparaison qui leur parut d’autant plus juste qu’ainsi que les oies romaines, les nôtres gardent le capitole et ne le défendent pas. […] D’autres ont avoué que le bas-relief de Milot était excellent à la vérité, mais que Moette était plus habile ; et on leur a demandé à quoi bon le concours si on jugeait la personne et non l’ouvrage.

1356. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « Les Philippiques de la Grange-Chancel »

C’est à Sceaux qu’on avait arrangé la machine infernale de ces vers fulminants qui devaient faire sauter le Régent et qui ne firent sauter personne, pas même l’aveugle qui les vendit un sou à la porte de Saint-Roch au sortir de la messe un dimanche ! […] Il ne manque pas une carte à ce château de cartes d’une gloire qui croula silencieusement un jour, — comme un château de cartes abattu sans que personne ait soufflé !

1357. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Dante »

Eh bien, c’est cette tendance à dissoudre les grands poètes dans leurs siècles, et en particulier dans le sien cette escarboucle de Dante, avec laquelle personne n’a le droit de se donner des airs de Cléopâtre, c’est cette tendance universelle et autorisée que je ne trouve pas dans le livre de M.  […] Magnier a été plus long, et il devait l’être, sur le livre immense dont la beauté intellectuelle a créé au profit de la personne morale du Dante une si grandiose illusion ; c’est là que le jeune critique a ramassé tout son effort pour être juge, et il a jugé le livre.

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