Si ses Pieces ne sont pas toujours la peinture fidelle de nos mœurs ; si elles manquent quelquefois de cette force comique, de cette chaleur dans l’action, de cette vivacité dans le dialogue, qui caractérisent Moliere : ses plans sont du moins toujours agréables, toujours variés ; son style est aisé, correct, & souvent gracieux, comme on peut en juger par le François à Londres, le Babillard, l’Homme du Jour, & deux ou trois autres de ses Pieces qui seront toujours revues avec plaisir.
Les Anglois les regardent comme des sources abondantes, capables de féconder la sécheresse naturelle de leur imagination ; & leurs Auteurs, dit-on, ne manquent jamais de les lire, quand ils veulent travailler dans le même genre.
François de Sales disoit, à ce sujet, qu’il n’avoit trouvé personne assez sincere pour faire un pareil aveu ; le jugement, ajouta-t-il, est une piece de laquelle ceux qui en manquent davantage pensent en être mieux fournis.
Etre tout à la fois plagiaires & détracteurs des Ecrivains qu’on met à contribution, c’est manquer à la reconnoissance & à l’honnêteté, mais c’est suivre une méthode assez ordinaire à plusieurs Gens de Lettres.
Pluche a fait encore une Histoire du Ciel, en 2 volumes, un Livre sur la Mécanique des Langues, & une Concorde de la Géographie des âges, Ouvrages estimables, & écrits selon le génie de l’Auteur, qui ne manque ni de sagacité, ni de méthode, ni d’élégance.
Quelques Critiques se sont plaint de ne pas trouver, dans son style, cette politesse & ces graces, but actuel des efforts de tous nos Ecrivains ; mais quand il ne seroit pas injuste de lui reprocher d'avoir manqué de ces qualités, qui n'etoient encore qu'en germe, nous doutons qu'elles soient préférables à cette noblesse simple & naturelle, à cette aisance moëlleuse & toujours soutenue, qui regnent dans sa Traduction & dans tous les Ecrits qui ont paru quelque temps après lui.
Nous avons beaucoup d’artistes ; peu de bons ; pas un excellent ; ils choisissent de beaux sujets ; mais la force leur manque ; ils n’ont ni esprit, ni élévation, ni chaleur, ni imagination.
Mais le ménagement a manqué ; l’innovation, par moments, est allée jusqu’à la gageure ; il semble que le poëte se soit amusé à outrer les coups. […] Théophile Gautier en manque trop souvent dans sa poésie et surtout dans ses romans.
Dans les tragédies, comme dans les poèmes, on est sans cesse frappé de ce qui manquait aux affections du cœur, lorsque les femmes n’étaient point appelées à sentir ni à juger. […] On dit, avec raison, qu’on ne pourrait pas mettre sur le théâtre français la plupart des pièces grecques, exactement traduites : ce ne sont point quelques négligences de l’art qui empêcheraient d’applaudir à tant de beautés originales ; mais on aurait de la peine à supporter maintenant un certain manque de délicatesse dans les expressions sensibles.
Malherbe proscrivait toute licence et toute faiblesse, cacophonie, inversion, hiatus, enjambement, manque de césure. […] Mais on peut dire que Malherbe a manqué de clairvoyance sur un point essentiel : il n’a pas su reconnaître ou créer la forme poétique de cet esprit nouveau, qu’il était le premier à manifester.
Il semble pourtant que le peu d’importance que l’on attache parmi nous à l’enseignement supérieur, le manque total de quelque institution qui corresponde à ce que sont les universités allemandes en soient une des principales causes 61. […] À part quelques cours d’un caractère tout spécial, le manque d’un auditoire constant et obligé ne permet pas une exposition d’un caractère bien scientifique.
Il n’est pas sûr que la Terre ne manque pas sa destinée, comme cela est probablement arrivé à des mondes innombrables ; il est même possible que notre temps soit un jour considéré comme le point culminant après lequel l’humanité n’aura fait que déchoir ; mais l’univers ne connaît pas le découragement ; il recommencera sans fin l’œuvre avortée ; chaque échec le laisse jeune, alerte, plein d’illusions. […] Vise, vise encore le but que tu manques depuis l’éternité ; tâche d’enfiler le trou imperceptible du pertuis qui mène à un autre ciel.
Au contraire, les lettres qui nous manquent nous montreraient madame de Sévigné livrée à elle-même, jetant ses premiers regards sur la société, sur ses connaissances, sur ses amis ; réglant son esprit à mesure qu’il se développe, sa conduite, à mesure qu’elle avance entre les écueils du grand monde ; répandant l’admiration, faisant naître l’amour dans tout ce qui l’entoure, et restant attentive et vigilante sur elle-même. […] On y lit aussi que l’hôtel d’Albret et l’hôtel de Richelieu « étaient une suite et une imitation de l’hôtel de Rambouillet, quoiqu’avec des correctifs, et qu’il leur manquât un Voiture pour en faire passer à la postérité les plaisirs et les amusements. » Avant les hôtels d’Albret et de Richelieu, j’aurais dû citer en première ligne les cercles de mademoiselle de Montpensier.
Dumont, entre autres, a publié contre moi un long article vaticinatoire et violent, qui prouve que son auteur non seulement manque de courtoisie, mais ne comprend pas grand’chose à la littérature et au style27. […] Une plaine quelconque… Et il ajoute : « L’originalité, la forte empreinte d’un génie vigoureux manque à Fénelon.
je ne crains pas que le petit nombre de bons poètes soit offensé d’un dégoût si légitime ; mais je m’attends bien qu’il soulèvera contre moi tout le bas Parnasse, des auteurs de pièces sifflées, des rimailleurs qui ont manqué le prix de l’Académie Française, et qui le manqueraient pendant cent ans, quoique les juges n’y soient pas toujours difficiles ; en un mot, qui défendent leur art aussi mal qu’ils l’exercent ; voilà mes redoutables adversaires.
Malheureusement, cette fière fortune, cette magnifique gloire d’une volonté médiocre lui manqua. […] Louis XVI, en s’abandonnant avec cette insouciance à sa pente naturelle, manquait à ses intérêts d’époux autant qu’à sa position.
Mais les bontés de Dieu furent inutiles, et Chamfort manqua tout, — la vie et la gloire. […] Et cela n’a pas manqué.
… Ou il doit recommencer sérieusement, ce qui ne manquerait pas de hardiesse, la comédie de Molière, cette comédie des Précieuses, qui n’a point passé comme le temps qu’elle a peint, et dans laquelle tout est resté aussi vrai et aussi réel que cet éternel bonhomme que Molière met partout, ce Gorgibus qui est Chrysale ailleurs, et Orgon, et même Sganarelle ; car Sganarelle, c’est Gorgibus avec quelques années de moins et une… circonstance de plus ; ou bien — ce qui serait beaucoup plus crâne encore — il doit être, ce livre, la défense enfin arborée des Madelon et des Cathos contre les moqueries de Molière, la négation des ridicules mortels qu’il leur a prêtés, et la cause épousée par un spiritualiste du xixe siècle de ces idéales méconnues qui tendaient à s’élever au dernier bien des choses, et voulaient des sentiments, des mœurs et une langue où tout fût azur, où tout fût éther ! […] Je ne crois point que la rage de la biographie ait rattrapé plus loin ce qui s’y noyait, disparu, caricatures exhumées auxquelles il fallait un Hogarth, mais auxquelles l’Hogarth a manqué.
Le duc de Saint-Simon, cet oisif ambitieux et superbe, à qui les événements firent manquer le pouvoir (heureusement !) […] condamna pendant quelque temps au bonnet rouge, à la carmagnole et aux pataquès, cette société toute de soie et de beau langage, mais où l’homme manquait par-dessous !
Tous, et je passe les noms de ces marionnettes d’historiens, à qui l’Histoire a tiré le fil quand elle ne l’a pas cassé, furent pris ou d’une admiration ou d’une horreur qui n’étaient plus des sentiments, mais des vertiges… L’historien froid, l’historien que l’Histoire ne mène pas, et qui, même, ne mène pas l’Histoire, — car être mené par l’Histoire ou la mener, c’est tout un pour la vérité, et c’est ici que l’esclave vaut bien le despote, — l’historien impartial qui ne se soucie que de l’exactitude ou de la justesse de son observation, a manqué jusqu’alors. […] La Révolution de Thermidor n’a guères été portée plus de neuf mois dans les flancs sanglants de cette Révolution française, qu’on peut bien appeler, sans lui manquer de respect, une prostituée, puisqu’elle a été violée successivement par tous les partis qui l’ont caressée.
Eh bien, ce que le philosophe furibond ne manqua pas certainement d’appeler une capucinade, n’a-t-il pas influé sur l’esprit de Sainte-Beuve, trop détaché des choses religieuses pour bien comprendre, dans ses sévérités comme dans ses indulgences, dans ses ombres comme dans ses lueurs, cette capucine de bonne volonté, qui abaissa de bonne heure sur ses yeux restés pénétrants la pointe de son bonnet de dévote et qui le garda, jusqu’à sa mort, comme le capuchon de sa vieillesse, sans que pour cela ses anciens yeux d’escarboucle brillassent moins fort et vissent moins clair ? […] En France, ce fut Louis XIV chez Madame de Maintenon, Louis XV, déjà moins attique, chez Madame de Pompadour, et ce qui nous reste de cette desserte des siècles va tout à l’heure nous manquer.
Je n’ai point à examiner si cette peur, qui était pour l’âme immatérielle de Pascal ce que serait une hypertrophie pour nos cœurs de chair, était légitime ou exagérée, mauvaise ou salutaire ; si elle avait le droit philosophique ou religieux d’exister, ou si elle n’était pas plutôt un manque d’équilibre et un égarement dans des facultés toutes-puissantes. […] Débris grandioses auxquels les articulations manquent : mais quel prodigieux organisme ne font-ils pas supposer ?
La thèse orthodoxe de l’auteur des Esprits est trop savante, trop étoffée, trop imposante ; l’auteur est trop au courant des sciences naturelles et médicales de son époque ; il a même, ici et là, trop de cette puissance de plaisanterie qui ne manque jamais en France aux écrivains supérieurs, et qui circule au sein des graves discussions auxquelles il se livre comme l’Esprit dormait sur les eaux, pour que la risée qui peut accueillir sa thèse soit bien forte. […] À part ses conséquences, — et ces conséquences, si elles étaient légitimes, feraient table rase de tout ce que le monde moderne tient pour vrai en philosophie et replaceraient la théologie à sa vraie place, c’est-à-dire à la tête de toutes les sciences, même naturelles, — à part ces conséquences à outrance, ne manqueront pas de dire certaines gens, le mémoire adressé par M. de M*** à l’Académie des sciences morales et politiques a encore une importance considérable.
… C’est cette vie-là d’Alfred de Musset qui nous manque, et puisqu’il ne l’a pas écrite, puisqu’il ne s’est pas appesanti sur elle, qui nous manquera probablement toujours… S’il l’avait écrite, on l’aurait jugé ; et on ne peut que le deviner, ce tendre cœur qui vivait de son cœur quand on le croyait un mondain frivole, et qui mourut de son cœur quand on le croyait un mondain vicié.
Plus tard, des esprits curieux, obstinés, plus occupés de mots que de choses, de plus de métier que d’inspiration, des travailleurs à la loupe et à la lampe, des émailleurs, des archaïstes, reprirent le Sonnet en sous-œuvre et lui donnèrent un éclat solide, une netteté de camée et une perfection de burin qui, en France du moins, lui avaient toujours manqué. […] En vérité, quand on lit quelques-uns des sonnets du recueil qu’il publie aujourd’hui, on se dit que l’Inspiré doit être bien près du Volontaire dans le nouveau poète qui vient de nous naître, et que le souffle sacré, — qu’on a ou qu’on n’a pas, mais qu’aucun travail ne donne quand il manque, — doit reposer en puissance, dans l’homme qui a écrit des vers comme ceux-ci, en attendant l’heure des œuvres vastes : Toi, Moi.
; quelle que soit l’intention qui anime en secret Elle et Lui, c’est un scandale sans doute que ce livre, un misérable scandale, qui n’est pas fait pour agiter deux jours une saine et honnête littérature ; mais, hors cela, c’est un coup manqué ! […] On y verra que, pour manquer d’esprit, on ne remplit pas toutes les conditions du génie.
Quelle que soit l’intention, que Dieu seul peut juger (et qu’il jugera, madame), quelle que soit l’intention qui anime en secret Lui et Elle, c’est un scandale sans doute, que ce livre, un misérable scandale, qui n’est pas fait pour agiter deux jours une saine et honnête littérature ; mais, hors cela, c’est un coup manqué ! […] On y verra que, pour manquer d’esprit, on ne remplit pas toutes les conditions du génie.
Et ce manque radical d’originalité dans le sujet et les personnages des Victimes d’amour, il est aussi dans les détails. […] Malot mettent trop de corruption comme on met trop de rouge, et le novice observateur manque son effet, pour vouloir en faire trop.
Ce penseur à moitié de pensée et à deux réminiscences sait bien ce qui manque à la Russie : il sait aussi ce qui lui manque à lui !
Cette découverte les trouble comme un manque de piété filiale, en attendant qu’elle flatte leur orgueil. […] La physionomie manque un peu de flamme. […] Il ne lui manquait que de savoir filer, et c’est ce que je lui ai appris. […] Il y a de bien jolies choses, mais le décousu et le manque de bon sens m’ont frappé. […] Sa volonté malade manquait au sien et ne venait pas à son secours.
Le temps a manqué pour le compléter. […] Nous terminions notre précédent Discours en remarquant que toute la poésie de l’époque est empreinte de ce caractère de profonde désolation qui ne peut manquer de se manifester dans une crise de renouvellement. […] Mais s’inspirer uniquement du passé, refaire ce qui a été fait, c’est imiter, c’est traduire, c’est manquer son époque ; c’est faire de l’art intermédiaire, de l’art qui n’a pas sa place marquée dans la vie de l’art. […] Il n’a manqué à leurs auteurs que d’avoir été élevés dans quelque pays de civilisation arriérée, et nourris dès leur enfance de ballades et d’histoires merveilleuses : avec cela ils auraient pu faire des romans historiques, non seulement sur les traditions de leur nourrice, mais sur d’autres pays et d’autres temps. […] Elle n’a pas de ciel et elle ne se lie pas à la terre ; la foi, l’espérance et la charité lui manquent, comme à celle de Lamartine.
Et pour lui-même, lui qui n’a pas trouvé la philosophie digne d’une heure de peine, qui, après avoir goûté de la gloire attachée aux découvertes de la science, s’en est lassé comme d’un vain amusement, lui qui a rompu tout lien avec la terre, quel risque affreux, s’il manque de se convaincre, si cette chaîne, dont il forme un raisonnement, vient à se rompre dans ses mains ? […] Il pouvait lui venir même de la science ; car il en faisait plus d’estime que de la philosophie, et s’il l’avait quittée, c’est moins par manque de créance dans ses découvertes, que parce qu’il préférait les vérités qui touchent l’âme à celles qui n’intéressent que le corps. […] Mais ce n’est ni par l’enthousiasme du Psalmiste, ni par l’imagination échauffée des ascètes, que cette prière s’élève si haut ; c’est par des raisons qui se déduisent les unes des autres, et se succèdent comme les degrés d’une échelle mystique : on sent qu’aucun échelon ne manquera sous les pieds de Pascal. […] On l’a dit, on pourrait le croire, sans manquer de respect à cette grande mémoire. […] Aussi la société moderne se manquerait-elle à elle-même, si Démosthène, défendant sa ville contre l’ambition de Philippe, la touchait plus que Pascal défendant les vérités de la morale, l’honneur chrétien, la vie humaine, au prix où l’a mise le christianisme, contre des sophistes qui autorisaient le vice, la calomnie et l’homicide.
Or, en ce même temps, un Canard ou un Héron pourrait voler à une distance d’au moins six à sept cents milles, et ne manquerait pas de s’abattre sur un étang ou un ruisseau de l’île océanique ou de toute autre terre éloignée vers laquelle le vent l’aurait poussé à travers la mer. […] Il est peu probable qu’ils s’abattent à la surface de la mer, de sorte que la terre de leurs pieds ne risque point d’être lavée pendant la traversée ; et ils ne sauraient manquer, en prenant terre, de voler immédiatement jusqu’aux bords des eaux douces qu’ils ont accoutumé de fréquenter. […] C’est en effet ce qu’on devrait attendre d’après ma théorie, ces îles étant situées si près les unes des autres qu’elles ne peuvent guère manquer de recevoir des émigrants, soit de la même source originaire, soit les unes des autres. […] Nous voyons pourquoi des groupes entiers d’organismes, tels que les Batraciens et les Mammifères terrestres, manquent aux îles océaniques ; tandis que même les plus isolées d’entre elles possèdent leurs espèces particulières de mammifères aériens, c’est-à-dire de Chauves-Souris. […] Ainsi, la durée de chaque espèce et groupe d’espèce est continue dans la succession des âges : du moins, les exceptions à cette règle sont si rares, qu’elles peuvent, avec droit, être attribuées à ce que nous n’avons pas encore découvert en quelque dépôt intermédiaire les formes qui paraissent y manquer, bien qu’on les trouve dans les formations immédiatement inférieures ou supérieures.
Car il lui manque le levain de la religion. […] » C’est qu’il manquait à Renan la forte préparation du théâtre. […] Cela ne manque pas de piquant. […] On ne manquera pas de crier à la camaraderie. […] Ce ne sont pas les renseignements qui nous manquent.
Le manque de goût, c’est le manque de choix dans le sujet, et cela aussi, cela surtout, est manque de goût. […] Un des éléments manque : le contentement de soi-même. […] Tolstoï trouve à Shakespeare sont les suivants ; Shakespeare manque de mesure. […] Il faut savoir que, tout compte fait, Hebbel ne manquait pas absolument de cœur. […] De même, comme Phèdre est manquée !
On manque d’air et de recul. […] Larousse manque absolument de critique et de sérieux. […] Joseph Fabre ne manquerait pas de leur accommoder avec amour. […] Mais si un grand capitaine a manqué à la France, la France ne s’est pas manqué à elle-même. […] Ce qui nous manque, c’est surtout la tradition et l’habitude.
Niais, dans de plus modestes quadri, vues de pâturages normands, prises au détour d’un sentier fleuri d’églantines, avec, au fond, des arbres qui bleuissent, il y a quelques papillotages de tour qui font ressembler cette Normandie à un multicolore paysage de songe aux environs d’Yeddo… Ce qui manque un peu à M.
Un avant-propos nous en avertit : « Le manque de continuité dans la facture du présent volume ne paraît point s’expliquer.
Léon Riotor a fait paraître un poème inspiré par une légende ou un lied en prose qui pourrait bien nous venir des bruines de la Hollande : non pas que ce poème manque de clarté, mais à cause du charme particulier à ces bords des mers du Nord qui semble s’en dégager.
Ce tableau abrégé de l’Histoire générale, commence au premier Empire d’Assyrie, & finit vers le milieu du Regne de Louis XV, en cela plus complet que le sublime Discours de Bossuet sur l’Histoire universelle, mais peu propre, malgré tout son mérite, à nous dédommager de ce qui manque à ce dernier Ouvrage.
L’unique maniere de M. l’Abbé Coyer, pour traiter les sujets graves, est l’ironie, maniere toujours sûre de manquer son effet, si elle est trop continue & trop uniforme, comme dans ses Ouvrages.
Par-là, ses Traductions, quoique purement écrites, manquent souvent d’élégance, de force, & de chaleur.
Il y a quelqu’un en tout ceci qui a manqué de tact et de discrétion tout le premier et ce n’est pas nous.
L’intelligence et le talent, voilà, je crois, une distinction qui n’a guère jamais été faite en critique littéraire ; elle est pourtant capitale… Aurier manqua de quelques années pour s’harmoniser définitivement… Presque rien de ce que nous connaissons de lui, en fait de vers, n’avait reçu la septième correction.
Au moins ces fortes de Compilations, si aisées à faire, devroient-elles avoir le mérite du choix ; mais le choix est la premiere chose qu’on y annonce, & la premiere qui y manque.
Cet Auteur devoit s’attendre à de nouvelles injures ; elles ne lui ont pas manqué.
Lafontaine, qui lui a prodigué des éloges dans plusieurs de ses Fables, dans le beau Discours, entre autres, où il réfute le systême de Descartes sur l'ame des bêtes, ne l'a jamais louée sur le talent des Vers ; ce qu'il n'eût pas manqué de faire, si elle en avoit été douée.
D’ailleurs, Saint-Amand ne manqua jamais du nécessaire, quoiqu’il ne fût pas riche, à la vérité.
coq-faisan doré de la Chine . il s’en manque bien que ce coq soit de la force de la poule.
Si nous supposons encore que ce polonois raisonneur, vienne à bout de persuader à ses compatriotes qu’on est capable de juger d’un poëme dont on n’entend point la langue, après en avoir lû la traduction et la critique, ils ne manqueront pas de prononcer que Chapelain est meilleur poëte que le grand Corneille.
Et que de veuves dans Paris Souhaiteraient d’être comme elle, Pour ne pas manquer de maris ! […] S’il a manqué d’amour, manque-t-il de mémoire ? […] Rien ne manqua au triomphe du jeune poète, ni les ennemis, ni les envieux. […] Or chacun sait combien est punissable une sentinelle qui manque à son devoir. […] A la fin tous les mensonges de Dorante, par leur nombre même, et par ses étourderies, ses manques de mémoire, ou autrement, se découvrent l’un après l’autre.
Ici encore les déceptions ne manquèrent pas. […] C’était ressemblant, paraît-il, mais cela manquait d’originalité. […] Cette conception manque tout à fait à Mme Sand. […] Les imbéciles manquent de tout, je les plains. […] L’art n’est pas un don qui puisse se passer d’un savoir étendu dans tous les sens… Vous pouvez être frappé du manque de solidité de la plupart des écrits et des productions actuelles : tout vient du manque d’étude.
Il manque autour d’eux ce je ne sais quoi qui les baigne comme d’un fluide pénétrant et fait qu’ils se prolongent en notre esprit et le mènent de rêve en rêve.
Il auroit dû résister à leurs sollicitations & à celles de Palaprat, qui se joignit à eux ; car nous osons assurer que la Piece que nous avons lue en manuscrit, a beaucoup perdu par ces retranchemens, quoique le Public l’ait toujours goûtée, sans s’appercevoir de ce qui y manque.
Mais quand je pense que j’ai moins employé de temps à examiner deux cents morceaux, qu’il n’en faudrait accorder à trois ou quatre pour en bien juger ; quand j’apprécie scrupuleusement la petite dose de mon expérience et de mes lumières avec la témérité dont je prononce, et surtout lorsque je vois que moins ignorant d’un sallon à un autre, je suis plus réservé, plus timide, et que je présume avec raison qu’il ne me manque peut-être que d’avoir vu davantage pour être plus juste, je me frappe la poitrine, et je demande pardon à Dieu, aux hommes et à vous, mon père, et de mes critiques hasardées et de mes éloges inconsidérés.
Il a son revolver et fait feu sur Benoît, le manque. […] L’opinion publique manqua de finesse et de souplesse. […] L’histoire, vaste et minutieuse, ne va pas lui manquer. […] Et Benedetti n’y a point manqué. […] On n’y a point manqué ?
On aurait mauvaise grâce — et les railleries ne manqueraient point, — si l’on partageait entre l’idéalisme et le réalisme une admiration artistique. […] Encore la critique va-t-elle être réduite, avant peu, à se servir elle-même : car le moment semble prochain où les bras vont manquer à la littérature. […] Et avec le secours de toutes ces pièces supplémentaires, qui avaient manqué à Mme Barine, un écrivain anglais, M. […] La méthode était simple, mais elle ne pouvait manquer de s’user bientôt. […] À les prendre dans un sens trop littéral, on ne peut manquer d’amoindrir la personnalité du saint.
Plein de bonne foi, il soutenoit des gens qu’on accusoit d’en manquer. […] D’autre part, les cardinaux de Bissy & de Fleuri se plaignent qu’on manque de respect à Rome. […] Le jésuite ne manqua pas de rappeller ce trait si flatteur pour la société. […] Le mot de consubstantialité manque à la déclaration, & ce mot est essentiel. […] La correction & le fini manquent totalement aux poësies de Santeuil.
Ce qui manque à presque tous les dégénérés, c’est le sens de la moralité et du droit. […] En tout cas, c’est un phénomène qui manque rarement chez le dégénéré. […] La conséquence de la faiblesse ou du manque de volonté est l’incapacité d’attention. […] Aux plus bas degrés de la dégénérescence, dans l’idiotisme, l’attention manque absolument. […] Charles Morice la responsabilité du manque de sens de la tournure de phrase finale.
Quant aux acteurs visibles, puisque chacun d’eux ne renferme en lui-même qu’un moment de l’Unité divine, ils doivent, sans être de pâles et froides allégories, manquer de richesse intérieure. […] En dépit de la présence du chœur, la comédie manquerait de deux choses essentielles à l’art : de poésie et de moralité. Elle manquerait de poésie. […] Elle manquerait de moralité. […] Mais, maintenant, si le personnage s’absorbe tout entier dans ce but, en soi faux, et cela sérieusement, comme constituant le fond même de son existence, au point que si celui-ci se dérobe sous lui, il s’y attache d’autant plus et se trouve d’autant plus malheureux, une pareille représentation manque de ce qui est l’essence du comique.
Dans la conscience du présent, nous avons vu que la caractéristique est un sentiment d’actualité, une sorte d’adéquation de la conscience à son objet, qui fait qu’elle n’a pas le sentiment de quelque chose qui lui manque. […] Il faut, outre ces caractères, qu’il y ait le sentiment d’équation entre la conscience et son objet, excluant le sentiment de manque, conséquemment de tension. […] C’est que l’intensité produit alors, comme première conséquence, la substitution possible de l’image à l’objet même, puis, comme seconde conséquence, le sentiment de possession, d’adéquation, avec disparition de toute tension et de tout manque. […] Pareillement, du côté du passé, nous avons vu que l’image-souvenir a un caractère particulier qui n’est pas seulement une intensité et une clarté plus faibles, mais une relation de potentialité à actualité, de manque à possession, de non-équation à équation. S’il s’agit d’un objet agréable, il y a cette impression de manque qui se traduit par le regret, il y a l’attitude de la volonté qui voudrait retenir ce qui lui échappe.
Les nationalités ne pouvaient manquer de se soulever contre une liberté imposée par les armes. […] Nous aurions manqué l’un et l’autre ou de sincérité ou de dignité. […] Or, la politique étant de sa nature une chose courte, temporaire, mobile comme les événements, les systèmes, les factions qui sont les éléments de la politique, la grandeur et l’immortalité du sujet manquent souvent au poète politique. […] Ni cette éducation qui forme les mœurs, ni cette instruction qui achève l’esprit, n’avaient totalement manqué à Béranger. […] J’ai manqué ma vocation ; j’aurais été un grand financier. » — Je le crois, lui répondis-je, et surtout un très grand politique.
Si dans Tycho-Brahé qu’il effleure, dans Leibnitz, dans Gibbon, n’importe où, à côté de lui, il y a un mot, un détail qui prête à l’imagination, à l’émotion du critique, soyez sûr qu’il ne le manque pas ; il le dégage comme le point à faire saillir et à éclairer. […] Villemain, dans le domaine infini de sa connaissance littéraire, mena à sa suite et à côté de lui cette rapide jeunesse, ouvrant pour elle dans la belle forêt trois ou quatre longues perspectives, là même où les routes royales des grands siècles manquaient ; mais ces perspectives, si heureusement ouvertes par lui et qui suffisent à marquer son glorieux passage, se refermeraient derrière, si de nouveaux venus ne travaillaient à les tenir libres, à les limiter et à les paver pour ainsi dire : c’est l’heure maintenant de ne plus traverser la forêt, comme Élisabeth à Windsor, comme François Ier en chasse brillante dans celle de Fontainebleau, mais de s’y établir en ingénieurs, hélas ! […] Dans cette chaire où il monte avec une négligence qui, pour être extrême, n’est pas disgracieuse, dans cette chaire où il se courbe, sur laquelle il frappe, avec un manque apparent de gravité qui donne le démenti aux préceptes de Cicéron, et qui brave le deformitas agendi interdit à l’orateur, écoutez-le ! […] J’aurais cru manquer de goût que d’aller m’adresser directement à M.
Voilà, en effet, Mme de Krüdner, telle qu’elle aurait dû venir pour remplir toute sa destinée, pour ne pas être seulement un romancier charmant et bientôt une illuminée qui fit sourire, pour ne pas manquer, comme il lui est arrivé, cette seconde partie de son rôle et d’une vie qu’elle avait voulu rendre sans réserve à Dieu, à la charité, à l’œuvre de la sainte parole, au salut et au renouvellement du monde. […] Les particularités de sa première vie sont déjà bien loin : elle avait atteint vingt ans avant que la Révolution française eût commencé ; n’ayant encore aucune célébrité ni prétention littéraire, elle était simplement une femme à la mode : tout ce que sa grâce, son esprit et son âme ne manquèrent pas alors d’inspirer ou de ressentir, n’a laissé que des traces légères comme elle. […] Mais d’autres émotions survinrent : elle n’y retourna pas ; et c’est dans ce peu de suite que, chez Mme de Krüdner, le manque de discipline, d’ordre fixe, et aussi de doctrine arrêtée, se fait surtout sentir. […] Charles Eynard, à qui l’on doit déjà une Vie du célèbre médecin Tissot, prépare depuis longtemps une biographie complète de Mme de Krüdner : renseignements intimes, lettres originales, rien ne lui aura manqué, surtout pour la portion religieuse.
Je ne manquais jamais de me mêler à ces rondes, et je bondissais de joie naïve et précoce, en tenant par mes deux mains les mains complaisantes des plus jeunes et des plus jolies faneuses du pays. […] mon pauvre Didier, rentre dans ton bon sens et ravale ta joie et ta chanson ; tu ne seras jamais que le jouet de tout le monde et de la Jumelle. » À ces mots, qui jetèrent tout à coup le froid de la moquerie sur le feu de l’enthousiasme, le petit Didier, concevant un humble doute, sentit son cœur lui manquer dans la poitrine. […] Un jour qu’il n’y avait eu que du pain de munition et quelques tranches de jambon fumé sur la table, Dietrich regarda de Lisle avec une sérénité triste et lui dit : « L’abondance manque à nos festins, mais qu’importe si l’enthousiasme ne manque pas à nos fêtes civiques et le courage aux cœurs de nos soldats ?
Il était grand et mince comme ceux qui ne tiennent au sol que par l’extrémité inférieure, les pieds, et qui semblent prêts à s’élever dans l’atmosphère ; il ne lui manquait de l’esprit pur que les ailes ; sa tête oblongue avait l’organe du spiritualisme pieux, une proéminence visible au sommet du crâne, cette coupole intérieure où les spiritualistes contemplent et adorent d’instinct la divinité de leur pensée. […] C’est le signe de l’étude, donné par la nature ou par l’habitude, à tous ceux dont la vocation est de penser ; malheur à ceux dont le menton manque ou fuit en arrière ! la base manque à la main qui veut appuyer le visage. Ceux-là ont la légèreté de l’oiseau ; ils ne se posent pas, ils ne ruminent rien, ils effleurent tout avec les ailes, figures sans contrepoids, qui manquent de balancier pour se tenir en équilibre sur le vide de leurs facultés.
L’envie n’est autre chose que le sentiment de quelque qualité qu’un autre possède et qui manque en nous. […] C’est la fidélité des catastrophes ; n’y manquons pas, le ridicule est le père des régicides. […] « L’air va bientôt manquer dans l’espace où tu voles. […] Les Thénardier sont des vampires humains suçant le sang des morts et des blessés sur le champ de bataille, volant un enfant à la pauvre mère Fantine, volant leurs propres hôtes, volant ou cherchant à voler les trésors qu’ils n’ont pas enterrés, cherchant à voler Marius par le chantage de la dénonciation, et s’en allant avec le prix de leurs crimes voler en Amérique, parce que le terrain du vol leur manque en Europe.
— Monte, jeune pifferaro, dirent-ils tous en me faisant place, il ne nous manquait qu’un ménétrier, dont nous n’avons point au village, pour jouer de la zampogne sur le devant du char de noces en rentrant en ville et en nous promenant dans les rues aux yeux ravis de la foule, tu nous en serviras quand tu seras rafraîchi ; et puis, à la nuit tombée, tu feras danser la noce chez la mère de la mariée, si tu sais aussi des airs de tarentelle, comme tu sais si bien des airs d’église. […] — Oui, n’y manque pas, mon garçon, ajouta la bonne femme, nous aurons quelque chose à te dire, mon mari et moi, car ta face d’innocence me plaît, et ce serait dommage qu’une boule de neige comme ça s’en allât rouler dans la boue des ruisseaux et se fondre dans un égout, faute d’une main propre pour la ramasser encore pure. […] Ma voix n’irait pas jusqu’à ces profondeurs ; la sienne ne monterait pas jusqu’à ces hauteurs ; et puis, si nous parvenions à nous parler, tout le monde entendrait ce que nous nous serions dit, et le bargello et sa femme, si bons pour moi parce qu’ils ne me connaissent pas, ne manqueraient pas d’éventer qui je suis et de me jeter dehors comme une fille perdue et mal déguisée, qui cherche à se rejoindre à son amant ou à son complice. […] Je n’aurais pas de répugnance à voir des malheureux, surtout si, sans manquer à mes devoirs, je pouvais les soulager d’une partie de leurs peines.
Il ne répara jamais le manque d’études fortes77, et il fut toujours le disciple de Jean Lemaire et de Jean Marot, son père lesquels n’avaient songé qu’à perfectionner, sous le rapport du mètre, la langue poétique de Jean de Meung et de Villon. […] C’est une destinée bien humble ; aussi ne suis-je pas surpris qu’à l’époque même de la faveur de cette poésie, il se préparât sourdement une réaction qui, au prix de quelques excès, devait protester contre cet affadissement du viril esprit français, ayant perdu sa naïveté dans son commerce avec les raffinements de l’Italie, toujours attaché au présent, et songeant bien plus à acquérir de l’adresse sur un instrument borné et qui manquait d’âme, qu’à en inventer un nouveau. […] Une préface des poésies de Du Bellay en donne l’indication qui manque dans le manifeste. […] Saint-Gelais ne manqua pas d’en faire des risées devant le roi et dans les compagnies.
L’affiche manquait aux murs. […] ; Gerdès, dont l’imprimerie avait été occupée par la troupe, hanté par l’idée qu’on pouvait prendre certaines phrases d’un chapitre politique du livre pour des allusions à l’événement du jour, et au fond tout plein de méfiance pour ce titre bizarre, incompréhensible, cabalistique, et dans lequel il craignait qu’on ne vît un rappel dissimulé du 18 brumaire ; Gerdès, qui manquait d’héroïsme, avait, de son propre mouvement, jeté le paquet d’affiches au feu. […] Eh bien, au moment de me mettre à ce travail, je trouve que les livres écrits sur les femmes par les hommes, manquent, manquent… de la collaboration féminine, — et je serais désireux de l’avoir, cette collaboration, et non pas d’une seule femme, mais d’un très grand nombre.
* * * — Expression d’un marchand d’eau-de-vie artiste : « Oui, c’est de l’eau-de-vie… mais pas de l’eau-de-vie qui donne chaud sous les ongles. » Vendredi 9 février Zola disait hier chez Daudet « que nous avions un malheur… que nous avions trop besoin de nous faire plaisir… qu’il fallait, que la page que nous écrivions, nous donnât aussitôt, après sa fabrication, le petit bonheur d’une harmonie, d’un tour, d’un orné, auquel nous sommes habitués dès l’enfance. » * * * — M…, un modiste de filles, déclarait qu’il n’habillait pas les femmes du monde, parce qu’elles manquaient de conversation. […] Le manque d’intrigue ne me suffit plus. […] On déplore leur manque d’entrain, de gaieté, de jeunesse, et cela amène à constater la tristesse de toute la jeune génération contemporaine, et je dis que c’est tout simple : que la jeunesse ne peut être que triste, dans un pays sans gloire, et où la vie est très chère. […] autrefois on avait déjà la théorie… maintenant on a les deux : la théorie et la pratique. » Samedi 11 août Dans Saint-Simon à la peinture, à l’admirable peinture des gens, manque malheureusement la peinture des choses.
J’avais même échangé à bout portant trois coups de revolver avec un officier bavarois qui m’avait manqué ». […] Dieu ne manquera pas de me l’indiquer à son heure ; ma responsabilité sera d’y être alors préparé le mieux possible. […] C’est à la troisième attaque de la tranchée de Lubeck que Joseph Hudault trouva la mort, dans les conditions que précise sa citation à l’ordre de l’armée : Officier très distingué, animé de sentiments très élevés et d’un patriotisme ardent, a été blessé au bras le 28 septembre 1915, en tête de sa section, qu’il conduisait sur le terrain pour la placer face à son objectif d’attaque ; a refusé de se faire soigner pour ne pas manquer l’assaut qui devait suivre ce mouvement ; est glorieusement tombé au cours de cet assaut. […] Il semble que notre vocabulaire formé sur les coteaux modérés de la vie et approprié à nos occupations quotidiennes manque de termes pour nommer ces états extraordinaires et solennels.
Charles Baudelaire Pour moi, j’avoue sincèrement, quand même j’y sentirais un ridicule, que j’ai toujours eu quelque sympathie pour ce malheureux écrivain dont le génie manqué, plein d’ambition et de maladresse, n’a su produire que des ébauches minutieuses, des éclairs orageux, des figures dont quelque chose de trop bizarre, dans l’accoutrement ou dans la voix, altère la native grandeur.
Anonyme S’il manque de souplesse et de couleur, il possède, par contre, de réelles qualités d’énergie.
Pour remarquer les fautes relatives d’un poëme, il faut se rappeller ce qu’on a déja vû ou entendu, et retourner pour ainsi dire sur ses pas afin de comparer les objets qui manquent de rapport ou de proportion.
Quand je serai, arrivé, il faudra que j’aille sur-le-champ à Versailles, dont je ne partirai qu’après avoir consommé l’affaire, ou l’avoir entièrement manquée. Vous me mandez que, si je ne suis pas à Paris aujourd’hui jeudi, la chose est manquée pour moi. Dites à vos messieurs qu’elle ne sera manquée que pour eux, que c’est à moi qu’on a promis le privilège, et que, quand je l’aurai une fois, je choisirai la compagnie qui me plaira.
Je me manquai au point, disait-il plus tard dans ses lettres à Voltaire, de parler de vous avec cette hauteur qui n’est pas même permise à la supériorité. […] Je vous prie d’arranger bien vite vos affaires, car vous me manquez beaucoup ici ; de plus, l’endroit qui vous rappelle sans cesse l’objet de votre tristesse, l’augmenterait, et le séjour de Berlin l’effacera. […] Je vous prie de mettre promptement ordre à vos affaires, car vous me manquez beaucoup ici.
. — Ce serait un bonhomme, disait-il encore, s’il n’était point si cupide de gloire et si jaloux de tous ceux qui en ont acquis par leurs ouvrages, surtout en fait de traduction. » Dans tous ces passages, et dans d’autres que je supprime, Chapelain n’a pas manqué de bien saisir et de noter cette faculté (dirai-je heureuse ?) […] Il s’agit de propos de quartier que Jean Rou, en bon voisin, n’a pas manqué d’enregistrer avec un malin plaisir évident, qui se rattache à la différence des communions et à la question du célibat ecclésiastique. […] J’y opposerai seulement une certaine page des mémoires de Marolles où il se représente, sans y être obligé, comme singulièrement attaché à la pudeur, et n’ayant jamais manqué en rien d’essentiel aux devoirs de sa condition, et aussi cette autre page où, déplorant en 1650 la mort d’une petite fille née en son logis et sœur des deux autres personnes dont parle Jean Rou, il la regrette en des termes si touchants, si expressifs et si publics, que véritablement il ne semble pas soupçonner qu’on puisse attribuer sa douleur à un sentiment plus personnel : « Cela fait bien voir, dit-il simplement, ce que peut quelquefois la tendresse de l’innocence sur le cœur d’un philosophe quand il ne s’est pas dépouillé de toute humanité. » — Cette remarque faite pour l’acquit de ma conscience, chacun en croira pourtant ce qu’il voudra.
. ; mais ayant remarqué que cette faveur accordée ne faisait que maltraiter les peuples en enorgueillissant quelques coquins de bourgeois qui faisaient bientôt une tyrannie de leurs magistratures, j’arrêtai cela, y étant intendant, et dans une célèbre occasion, qui fut le sacre de Louis XV à Reims : et je me fis écrire une lettre par le secrétaire d’État de la province, qui marquait que les magistrats seraient renouvelés malgré cette circonstance, et que l’on se proposait de les faire renouveler annuellement, malgré toute remontrance et nonobstant toute occasion quelconque, et cela par les principes des motifs allégués ci-dessus, savoir leur négligence et abus quand on manquait à les renouveler annuellement ; et je fis imprimer et afficher cette lettre dans tous les carrefours de mes villes. […] Chauvelin lui-même et d’obtenir un des portefeuilles qui faisaient partie de sa dépouille, le portefeuille des Affaires étrangères : « Je ne postulai point, mais on postula pour moi… Je vaux peu, mais je brûle d’amour pour le bonheur de mes citoyens, et, si cela était bien connu, certainement on me voudrait en place. » Aux environs de ce temps-là, dans les mois et les années qui suivent, on le voit successivement en passe ou en idée de devenir ou premier président du Parlement, ou secrétaire d’État à la guerre ; — chancelier de France (si M. le Chancelier, qui a soixante-neuf ans, venait à manquer) ; — contrôleur général, ou même surintendant et duc à brevet ; — premier ministre enfin ; car il a toutes ces visées, et il les indique ou les expose au fur et à mesure des occasions. […] Un autre jour encore (et ceci sera une de ses idées favorites), il déplore de voir manquer l’occasion de chasser pour toujours d’Italie les empereurs d’Allemagne.
La règle précise et rigoureuse, en pareil cas, est de ne pas tant raisonner sur les éventualités, et de ne point capituler tant qu’on n’éprouve pas le manque absolu de vivres et de munitions. […] Les approches de la maison, environnée de terres labourables, de prairies, d’étangs et de belles fermes, offraient, à la vue des sites variés, mais qui manquaient de mouvement, et auxquels la proximité des forêts donnait quelque chose de grave et de mélancolique. […] Cette espèce de novice qui assiste aux offices de matines et qui recule d’effroi, ce chartreux manqué, et qui le fût probablement devenu en d’autres temps, nous le plaçons en regard du thermidorien intrépide et de l’artilleur improvisé de Mayence.
Le mot est mal choisi ; et, en général, dès que M. de Pontmartin veut élever son style, il lui arrive de manquer de propriété dans les termes. […] s’écrie M. de Pontmartin, et n’est-ce pas déjà y manquer que d’y prétendre ? […] Ma conclusion bien sincère sur l’ensemble du talent de M. de Pontmartin, et malgré toutes ces critiques auxquelles je me suis vu forcé, ayant à combattre avec lui pied à pied et me trouvant réduit à la défensive, est qu’il y a de la distinction, de l’élégance, que c’est un homme d’esprit et d’un esprit délicat, auquel il n’a manqué qu’une meilleure école, et plus de fermeté dans le jugement et dans le caractère, pour sortir de la morale de convention et pour atteindre à la vraie mesure humaine, sans laquelle il n’est pas de grand goût, de goût véritable.
Il paraît bien que le manque de munitions, de vivres, de mulets, était porté sur cette frontière à un degré qu’on a peine à se figurer. […] Il écrivait au roi, en lui adressant un mémoire sur les besoins de son armée (8 décembre 1693) : « Je connais parfaitement, Sire, la conséquence des dépenses ; mais il vaudrait mieux qu’elles fussent diminuées sur le nombre des troupes et que celles que l’on a fussent servies de leurs besoins essentiels et nécessaires… J’importune Sa Majesté dans ce mémoire de grands et petits détails, parce qu’il n’y en a aucun d’indifférent sur cette frontière, où les choses les plus nécessaires manquent tout d’un coup, pour lesquelles on n’a presque pas d’attention ailleurs. […] Tessé écrivait à Barbezieux, à la fin de janvier 1694 : « L’important, c’est de cacher sur cette frontière l’indigence d’argent ; il y a six mois que nous vivons d’emprunt. » Cet état de pénurie se prolongea ; au mois de mai suivant il y avait tout à craindre du manque de payement des troupes ; dans une apostille de lettre au ministre.
Les éléments constitutionnels lui manquaient, comme aussi l’autorité à cet égard et l’ardeur d’une conviction. […] Avait-il raison, au contraire, comme le soutient sir Henry Bulwer, de saisir avec habileté le joint et de ne pas manquer l’occasion de diviser tes grandes puissances ? […] Puisque M. de Talleyrand se prononçait, Louis-Philippe pouvait se risquer. — Et comme ne manquerait pas de le dire M.
C’est une chose bien remarquable, comme, en avançant dans la vie et en se laissant faire avec simplicité, on apprécie à mesure davantage un plus grand nombre d’êtres et d’objets, d’individus et d’œuvres, qui nous avaient semblé d’abord manquer à certaines conditions, proclamées par nous indispensables, dans là ferveur des premiers systèmes. […] Or, depuis ce moment, l’expédition collective fut manquée ou accomplie, selon qu’on veut l’entendre, et chaque chef, poussant individuellement de son côté, poursuit à travers le siècle, par des voies plus ou moins larges, sa destinée, ses projets, la conquête de la glorieuse Toison. […] Elle n’y a pas manqué jusqu’ici ; et si, contre l’usage, ses paroles harmonieuses n’ont pas été guérissantes pour elle, elles n’ont pas du moins été inutiles à d’autres ; elles ont aidé dans l’ombre bien des cœurs de femmes à pleurer.
Dans cette voie si périlleuse de la biographie contemporaine, il a su éviter les écueils de plus d’un genre, et atteindre le but qu’il s’était proposé : de la loyauté, de l’indépendance, aucune passion dénigrante, de bonnes informations, la vie publique racontée avec intelligence et avec bon sens, la vie privée touchée avec tact, ce sont là des mérites dont il a eu l’occasion de faire preuve bien des fois en les appliquant à une si grande variété de noms célèbres tant en France qu’à l’étranger ; cela compense ce que sa manière laisse à désirer peut-être au point de vue purement littéraire, et ce qui doit manquer aussi à ses jugements en qualité originale, car l’étendue même de son cadre lui impose un éclectisme mitigé. […] N’ai-je pas remarqué tout le premier qu’il lui avait manqué, aussi bien qu’à Jean-Jacques, les soins et la tendresse d’une mère ? […] Ce genre d’explication rentre tout à fait dans l’opinion de Fauriel telle que je l’ai trouvée exprimée dans ses papiers ; celui-ci comparait Benjamin Constant à La Rochefoucauld en un sens : il attribuait le manque de principes qu’on lui voyait, et ce mépris des hommes qui s’affichait jusqu’à travers son républicanisme d’alors, au premier monde dans lequel il avait vécu.
Ce défaut d’ordre dans l’exposition n’est que le signe d’un manque d’unité dans la conception. […] Dès lors, en possession des définitions nécessaires, Montesquieu va faire une construction d’une hardiesse singulière : il va monter pièce à pièce ces trois grandes machines politiques, république, | monarchie, despotisme, chacune en son type idéal ; il va montrer comment toutes les lois particulières s’adaptent au principe fondamental de la constitution, faisant sortir le bonheur et le malheur, le progrès et la ruine des États du plus ou moins d’adaptation, du plus ou moins de cohésion et de concordance de toutes les institutions, exposant comment, par le manque ou la disconvenance de telle pièce, tel peuple s’est détruit, comment, par l’invention ou le remaniement de telle disposition législative, tel autre se serait arrêté sur la pente de sa décadence. […] Il fait abstraction de l’homme, et le traite comme une matière inerte et passive : si bien que, dans son idée, un système de lois bien conçu ne peut manquer de mener n’importe quel peuple, en quelque sorte sans qu’il s’en mêle, à son maximum de puissance et de prospérité.
Il s’occupe d’agronomie, passe ses vacances dans ses domaines, les parcourt en guêtres et en habit de chasse, cause avec les paysans, s’intéresse à leur sort, va voir l’instituteur, offre aux élèves de l’école primaire des livrets de caisse d’épargne, préside dans son canton les comices agricoles, gémit sur la désertion des campagnes et se plaint que l’agriculture manque de bras. […] Tous les mariages manquent. […] Dès lors le malheur s’abat sur la ferme ; les récoltes manquent, les bestiaux meurent, et Buré chaque nuit voit revenir le pendu… Il vient enfin supplier Fleuse de le délivrer ; il se traîne au bord de la fosse où le berger vient justement de prendre un loup… Le loup saute par-dessus Buré fou de terreur et qui se croit changé en « garou »… Le malheureux s’adresse à Marin Langevin, un marchand de miel, un gars qui en sait long, et lui promet la main de sa fille s’il « conjure le sort ».
Quelques Flamands s’y adonnent aussi et, je crois, avec plus de bonheur ; je connais des strophes où ne manquent ni la grâce ni l’énergie, bien qu’elles allégorisent ; mais quelle vie intérieure plus profonde elles auraient eue sans ce défaut ! […] Chez lui les images restent concordantes, mais en tel de ses livres, c’est moins peut-être par leur harmonie que par leur manque de variété, malgré toute la richesse imaginative de ce poète. […] D’habitude elle naît d’un manque d’imaginative et est le défaut commun des littérateurs moins artistes que poètes.
Or, sur plusieurs points importants, les monographies manquent encore, en sorte que l’auteur est réduit à recueillir çà et là quelques notions éparses et de seconde main, souvent fort inexactes. […] Mais le véritable défaut, c’est le manque d’organisation et de contrôle. […] Or si la première, que le temps et le manque d’imprimerie ont si énormément simplifiée pour nous, a suffi pour occuper tant de laborieuses vies, que sera-ce de la nôtre, qu’il faudra extraire d’une si prodigieuse masse de documents ?
Lui manqua-t-il, en effet, quelque chose ? il ne lui manqua que des défauts. […] elle nous manque.
Il confesse que l’amour de la popularité fut longtemps son faible et son idole, et que, s’il dévia un moment de la droiture de sa ligne, ce fut pour la ressaisir quand il la vit près de s’échapper : Dès qu’un homme faible, a-t-il remarqué, sent échapper la popularité, il fait mille efforts pour la retenir, et, pour l’ordinaire, ce moment est celui où on manque le plus à son opinion, et où l’on peut se laisser entraîner aux plus folles et aux plus funestes extravagances. — Pour un homme de caractère, l’abus contraire serait plutôt à craindre, et, tout comme l’autre y eût mis de la lâcheté, il serait enclin à y mettre du dépit. […] On avait manqué le port, et il fallait faire double traversée : « Ce n’est plus le voyage de l’Amérique, disait ingénieusement Barnave, c’est celui de l’Inde. » Mais il n’en concluait pourtant pas au découragement ni au désespoir, et il écrivait de Grenoble à l’un des Lameth (31 mars 1792) : « Des hommes qui ont excessivement voulu une révolution ne peuvent pas, au milieu du chemin, manquer de tête ou de courage. » Ce noble sentiment de dévouement et de foi à sa cause ne l’abandonna jamais, même au milieu des dégoûts et des ingratitudes ; il en a consacré l’expression dans une page généreuse qui résume tout son examen final de conscience en politique : (1792).
Royer-Collard avait coutume de dire « que ce qui manquait le plus de nos jours, c’était le respect dans l’ordre moral, et l’attention dans l’ordre intellectuel ». […] Il n’avait pas été long à sentir ce qui manquait à cet enfant qu’il voulait former, et dont il avait fait l’occupation et le but de sa vie : En scrutant à fond votre personne, lui disait-il, je n’ai, Dieu merci, découvert jusqu’ici aucun vice du cœur ni aucune faiblesse de la tête ; mais j’ai découvert de la paresse, de l’inattention et de l’indifférence, défauts qui ne sont pardonnables que dans les personnes âgées, qui, sur le déclin de leur vie, quand la santé et la vivacité tombent, ont une espèce de droit à cette sorte de tranquillité. […] Or, c’est précisément ce feu sacré, cette étincelle qui fait les Achille, les Alexandre et les César, être le premier en tout ce qu’on entreprend, c’est cette devise des grands cœurs et qui est celle des hommes éminents en tout genre, que la nature avait tout d’abord négligé de mettre dans l’âme honnête, mais foncièrement médiocre, du petit Stanhope : Vous paraissez manquer, lui disait son père, de ce vivida vis animi qui anime, qui excite la plupart des jeunes gens à plaire, à briller, à effacer les autres. — Quand j’étais à votre âge, lui dit-il encore, j’aurais été honteux qu’un autre eût mieux appris sa leçon, l’eût emporté sur moi à aucun jeu, et je n’aurais trouvé de repos que je n’eusse repris l’avantage.
On n’a jamais mieux compris qu’en lisant les premiers écrits de Fontenelle ce mot de Vauvenargues : « Il faut avoir de l’âme pour avoir du goût. » Fontenelle manque de goût avec tout l’esprit du monde, parce que le cœur et l’âme sont absents et muets en lui, parce que le pectus et l’affectus (comme diraient les anciens) ne lui parlent jamais. […] Il ne manquait autre chose à tant de beaux ouvrages, dit Fontenelle, sinon qu’il fût vrai que la dent était d’or. […] On a remarqué que, dans sa première manière, il y avait une sorte de contradiction et d’antithèse entre le ton, qui était mesquin et précieux, et le fond de la pensée, qui allait au réel et au solide ; il en résultait une disproportion et un manque de concert qui faisait du tissu de son style comme une épigramme continuelle.
D’un autre côté, ceux qui s’arment de ce qu’un homme d’esprit a fait pour en conclure qu’il ne saurait faire autre chose, ces personnes-là, sous l’Empire ; ne manquaient pas de répéter, quand on leur parlait des écrits sérieux de M. […] Fiévée a manqué, sur ce point, du goût qui tient au sentiment du respect et à celui des proportions. […] Il ne lui manqua rien de ce qui constituait alors un royaliste comme il faut, et il s’arrêta à temps pour pouvoir ensuite reparaître un constitutionnel libéral.
Il lui manque, — autant que l’on peut décider sur des traductions qui, révisées par l’auteur, doivent être tenues pour exactes, — le style coloré, la nervosité de notre français moderne, la manie du mot nouveau et des copulations significatives de vocables, nos recherches de sonorités et de cadences, tout l’art précis et défini de nos maîtres prosateurs modernes. […] Tout n’est que fumée et vapeur, pensait-il, tout paraît perpétuellement changer, une image remplace l’autre, les phénomènes, succèdent aux phénomènes mais en réalité tout reste la même chose ; tout se précipite tout se dépêche d’aller on ne sait où, et tout s’évanouit sans laisser de trace, sans avoir rien atteint ; le vent a soufflé d’ailleurs, tout se jette du côté opposé, et là recommence sans relâche le même jeu fiévreux et stérile. » Ailleurs ces passages attristés ne manquent pas, et même dans les pages les plus souriantes, on voit que la plume est tenue par un homme qui connaît la vanité d’énormément de choses, qui s’en afflige, qui s’en persuade et ne peut cependant se résigner à la vanité de son propre être. […] Avec une intelligence très belle, une âme très noble, des sens non pas acérés, mais déliés et attentifs, ce géant débonnaire et lent qu’était Tourguénef, eut le défaut et l’infortune de manquer d’une vue arrêtée sur le futur, d’ignorer en l’homme ce qu’il y a de générique, de gros et de fort, de ne ressentir ni haines ni enthousiasmes violents, de vivre en dépaysé et en dilettante.
En pareille occurrence, la raison géométrique de multiplication, dont le résultat ne manque jamais d’être surprenant, rend compte de l’accroissement extraordinaire et de la grande diffusion de ces espèces naturalisées dans leur nouvelle patrie. […] La quantité des subsistances propres à chaque espèce marque donc naturellement la limite extrême de son accroissement ; mais très fréquemment ce n’est pas autant le manque de nourriture que l’appétit d’autres animaux qui détermine le nombre moyen des individus d’une espèce. […] Ce paragraphe, ajouté par l’auteur, manque aux éditions antérieures à 1870 sauf la seconde édition allemande.
À ses défauts et aux faiblesses de son livre, on la reconnaîtrait pour telle encore, car elle y manque de ce qui manque à toutes les femmes, même à celles que le monde, toujours un peu séduit quand il s’agit de femmes, appelle galamment des génies, je veux dire de force constructive et de grande originalité. […] On voudrait citer davantage ; l’espace manque, mais partout de la première page jusqu’à la dernière, c’est du Michelet qu’on croirait sincère, tant il est réussi !
Pauvre grand homme manqué, qui s’était cassé à force de se courber sous tous ces plafonds, il rejetait loin de lui toute cette poussière humaine qu’il avait cru faire tressaillir, comme le baladin rejette de son tambour de basque les grains de sable que le bruit de l’instrument qui vibre faisait tressauter sur la peau sonore ! […] Pourquoi M. de Lescure, très digne par son érudition, par la hardiesse et la sûreté de son goût et surtout par son enthousiasme pour Rivarol, de nous le donner intégral, a-t-il imité, — avec des qualités nouvelles, je le reconnais, — mais a-t-il imité cependant les éditeurs par fragments qui l’ont précédé, au lieu de nous enrichir d’une Édition complète des Œuvres de Rivarol qui va manquer encore, — qui peut-être manquera toujours ?
et que nous avons encore de beaux fragments de ce grand poète, qui s’est manqué, en recommençant trente-six fois. […] Il manque à sa mère… Et ce n’est pas tout ! […] Il a une Clotilde : il ne lui manque plus que saint Remi16.
Ne dites donc pas que la nature d’un être prédit sa destinée ; tout au plus elle l’indique, par conjectures probables, réserve faite des causes extérieures qui peuvent se jeter à la traverse et des conditions extérieures qui peuvent manquer. […] C’est un décret de Dieu ; or, un décret de Dieu ne peut manquer de s’accomplir ; s’il ne s’accomplit pas ici-bas, il s’accomplira ailleurs ; puisque mes aspirations infinies seront contentées, et ne peuvent l’être dans la vie présente, elles le seront dans la vie future ; il y a donc une vie future. — D’autre part, Dieu est juste. […] On ne le jugea ni hautain, ni insociable, ni malade ; et lorsqu’on parlait de lui en son absence, la sympathie ne manquait jamais au respect.
Lui étranger, il aurait manqué en cela du plus simple esprit de conduite. […] L’Université française a bien des qualités, mais, à la prendre par le haut, elle a toujours manqué essentiellement de générosité.
La circonstance la plus apparente dans la carrière du chansonnier, l’occasion politique, qui avait décidé du cours de sa verve, venait de manquer brusquement, après quinze ans d’escarmouches et de combats : il semblait qu’il fût désarmé par le triomphe. […] Mais, si le volume n’avait contenu que ces deux ordres de pièces, les plus neuves et originales beautés qui illustrent celui-ci y auraient manqué.
L’on a mis enfin dans le discours tout l’ordre et toute la netteté dont il est capable : cela conduit insensiblement à y mettre de l’esprit. » Certes Fléchier, plus qu’aucun, avait réussi à donner ou à rendre au style toutes ces qualités requises par La Bruyère, et ce n’était pas l’esprit non plus qui lui avait manqué pour l’y ajouter insensiblement. […] Fléchier, simple témoin, amené là par occasion, n’avait dû prendre le tout que comme une représentation dont il rend compte ; et, parce qu’il y eut à la fin un mariage d’un de ces Messieurs avec une demoiselle du pays, il ne manque pas de faire remarquer que la pièce, si sanglante d’abord, se termine heureusement comme une tragi-comédie.
Victorin Fabre lui-même manqua essentiellement de l’exquis en littérature ; après ses premiers essais, qui ont du ton, du nombre, du mouvement, des passages d’éclat, de nobles pensées, mais qui ne sont que d’un disciple encore, on put croire un moment qu’il allait se dégager et prendre son essor avec aisance ; l’Éloge de La Bruyère donnait lieu de l’espérer ; mais l’Éloge de Montaigne, remarquable pourtant, ne tint pas cette promesse ; l’auteur, en cet heureux sujet, n’eut rien de libre ni de léger ; en voulant approfondir, il s’aheurta, il fut rocailleux, il commençait à se montrer pesant. […] Après une leçon à l’Athénée peu applaudie, on se voit déjà comme Caton après Pharsale ; et, si l’on vient à manquer l’Académie, on se dit que c’est qu’on est un des vaincus de Waterloo.
Pourtant, même dans ces cas d’une poésie tout intime et mouillée de larmes, il ne faudrait pas manquer à la franchise par fausse indulgence. […] Après tout, l’essentiel et durable entretien des poëtes, celui qui ne leur manque ni ne leur pèse jamais, qui ne perd rien, en se renouvelant, de sa sérénité idéale ni de sa suave autorité, ils ne doivent pas le chercher trop au dehors ; il leur appartient à eux-mêmes de se le donner.
Poëte d’un vrai talent, doué par la nature de qualités riches et rares, amoureux de la gloire immortelle et capable de longues entreprises, il ne lui a manqué peut-être au début qu’une de ces disciplines saines, et fortes qui ouvrent les accès du grand par les côtés solides, et qui tarissent dans sa source, et sans lui laisser le temps de grossir, la veine du faux goût. […] Soumet, qui avait été auditeur sous l’Empire : « L’Empereur n’eût pas manqué sans doute de vous nommer auditeur », il a fait sourire le récipiendaire lui-même.
Sir Walter Scott, avons-nous dit, prononce la clôture de la Révolution à la mort de Robespierre ; mais il ne tient pas à lui qu’elle n’ait été terminée plus tôt, et les projets de répression qu’il expose à ce sujet n’eussent pas manqué, si on les avait suivis, de tout rétablir dans l’ordre dès la journée du 14 juillet, qu’il appelle par inadvertance le 12 juillet. […] on peut juger de la bigarrure : il n’y manque plus que la girafe.
L’incertitude de nos mœurs publiques, notre mobilité oublieuse, les revirements fougueux de chaque jeunesse nouvelle qui survenait, ont dû en grande partie tenir à ce manque de guides naturels établis et imposants. […] Nous sommes de celle-ci, de la République constitutionnelle, et non de la République démocratique, etc. » Et les distinctions abonderaient à l’appui : pour les inculquer dans la pratique, il ne s’agirait que de trouver un John Adams, quelque patriote illustre dont le caractère se fût lassé ; il n’en manquerait pas ; on en ferait un d’ailleurs, un, n’importe lequel, bien gouvernemental, un Casimir Perier, ou plutôt, comme la frénésie de tribune ne serait plus de mise, un M.
Mais la lenteur du préambule, le grand nombre de personnages trop mollement dessinés, et une teinte romanesque à la Montolieu répandue sur l’ensemble, empêchent l’effet d’être vif et réel, bien que la facilité, la grâce et une certaine onction ne manquent pas. […] Ballanche et plusieurs fragments inédits jusqu’à ce jour, ont été recueillis dans cette publication précieuse qui manquait à l’étude de la philosophie contemporaine.
Les essais dans ce genre ont encore plus mal réussi aux Anglais qu’aux autres peuples ; ils manquent essentiellement de grâce dans tout ce qui exige de la légèreté d’esprit : ils manquent de cette promptitude, de cette facilité, de cette aisance, qui s’acquiert par le commerce habituel avec les hommes réunis en société dans le seul but de se plaire.
N’y sont-ils pas assez portés, ceux-ci par manque de fonds, ceux-là par la faveur qui s’attache à toute chose nouvelle ? […] Cependant le galant ne manque pas aux réunions de Sceaux.
Un autre caractère de la sensibilité humaine est la discordance de nos inclinations ; le manque de coordination interne de nos sentiments ; ce sont les désharmonies et les contradictions de notre sensibilité. […] On peut admettre, pour faire la part de la sociabilité, que l’incohérence sentimentale qui caractérise la sensibilité humaine est en partie créée ou tout au moins favorisée par l’état de discorde et d’incohérence des institutions sociales, par ce que les sociologues appellent le manque d’intégration sociale.
La conviction de tous est que la Thora bien observée ne peut manquer de donner la parfaite félicité. […] Le manque de chronologie certaine pour les textes zends et pehlvis laisse planer beaucoup de doute sur ces rapprochements entre les croyances juives et persanes.
Nous savons qu’on ne manquera pas de rappeler quelques bulles du Saint-Siège, ou quelques décrets de la Sorbonne, qui condamnent telle ou telle découverte philosophique ; mais, aussi, combien ne pourrait-on pas citer d’arrêts de la cour de Rome en faveur de ces mêmes découvertes ? […] Platon, ce génie si amoureux des hautes sciences, dit formellement, dans un de ses plus beaux ouvrages, que les hautes études ne sont pas utiles à tous, mais seulement à un petit nombre ; et il ajoute cette réflexion, confirmée par l’expérience, « qu’une ignorance absolue n’est ni le mal le plus grand, ni le plus à craindre, et qu’un amas de connaissances mal digérées est bien pis encore149. » Ainsi, si la religion avait besoin d’être justifiée à ce sujet, nous ne manquerions pas d’autorités chez les anciens, ni même chez les modernes.
Mme de Blocqueville, qui n’a rien, — et je l’en félicite, — des idées et des sentiments de Mme Sand, n’a pas eu plus qu’elle la force qui lui a manqué. […] … Les femmes, en voyant tant de grimaces d’esprit enlaidissantes, tant de disgrâce voulue, tant de recherche et de gaucherie, en seront-elles plus femmes et garderont-elles leur second charmant petit sexe contre ce troisième grand sexe du bas-bleu, qui a toujours manqué le premier ?
II Encore une fois, c’est la Cosaque promise dans le titre que je voudrais et que tout le monde voudra… C’est elle qui m’y fait faux bond et qui m’y manque, car une femme qui raconte publiquement ses amours n’est pas plus une merveille cosaque que française. […] IV Il en est d’autres qui valent mieux et qui sont peut-être à sa portée… On dit qu’elle a un grand talent de musicienne, — un vrai talent d’artiste, — et comme écrivain, — écrivain en français, — cette Cosaque n’en manque pas non plus.
Même dans Une faiblesse de Minerve, le plus récent de ses livres, qui, du moins, témoigne de plus d’attention, d’observation et de repli que ses romans si superficiellement militaires l’intérêt principal du récit qui est l’intérêt du dénouement, repose tout entier sur une méprise encore ; sur la substitution d’une personne à une autre, espèce de tour de passe-passe, manqué dans l’imagination du lecteur, par la manière dont on le raconte. […] Avec une telle visée, du reste, on conçoit que le style de celle qui l’a manque de solidité.
… Est-il permis de manquer d’intérêt et de vie quand il s’agit du peuple le plus curieux et le moins connu, quoiqu’on en ait immensément parlé, de ce peuple magot et falot qui ressemble aux visions produites par l’opium qu’il fume, et qu’on pourrait appeler le plus fantastique de tous les peuples ? […] Ils ont rapproché des travaux épars çà et là, et ils ont formé de ces détails une espèce de synchrétisme historique où la confusion des faits entassés produit quelque chose de très chinois, car cela manque entièrement de perspective et de cette clarté qui est la vie des livres écrits en français.
Les législations n’ont jamais manqué en France sur cette chose plus forte qu’elles et contre laquelle toutes, en définitive, ont été impuissantes. […] Or, ce n’est pas à présent, quand les pouvoirs publics perdent de leur autorité et en sacrifient chaque jour davantage, ce n’est pas quand le droit criminel, si sévère autrefois, est presque devenu, à force de s’adoucir, le droit au crime, quand des législateurs collectifs ont remplacé par l’irresponsabilité du nombre la responsabilité du législateur unitaire, qu’on peut espérer contre le duel la loi efficace qui, en France, a toujours manqué.
II Thèse qui se pose d’elle-même, mais impopulaire maintenant, mais inacceptable, et que ne manquera pas de discuter ou de méconnaître tout ce qui a plume, dans un temps d’engins de guerre perfectionnés où tout tremble devant la matière toute-puissante, et où l’idéal, c’est la paix entre les nations désarmées. […] Seulement, dans un temps où la philosophie émet sur la nature humaine les notions les plus orgueilleusement fausses et la pousse à toutes les indépendances et à toutes les révoltes, et où la philanthropie, à son tour, bave d’attendrissement sur l’homme et sur le bonheur qui lui a toujours manqué, à ce pauvre homme !
Les héros, qui n’abondent pas plus en littérature qu’en histoire, ont donc, Byron excepté, manqué contre Horace. […] Du moins, l’Horace de Passy, dont la gloire est déjà baissée, sentait la patrie et pleura Sainte-Hélène… Et quant à l’autre Horace français dont Louis XIV fut l’Auguste, ce Boileau qui n’admettait pas Dieu pour être tranquille, cette âme droite, sérieuse, austère, qui tira toute sa poésie de la raison, cette maîtresse faculté de l’homme, l’Horace latin ne sert qu’à montrer combien il est grand, malgré l’imagination qui lui manque.
» Le cœur de Shakespeare, son caractère, ses actes, les milieux qui ont joué sur sa pensée ou qui l’ont pénétrée, enfin tout ce qui est le secret même de son génie en en faisant l’originalité, tout cela a manqué jusqu’ici, et tellement même qu’on a fini par dire, — dogmatiquement et comme si c’était la dispense de toute découverte : « Shakespeare est le seul biographe de Shakespeare ! […] Parce que Guizot n’a pas d’imagination dans le style et qu’il a souvent des raideurs dans la pensée, il ne faut pas croire qu’il manque de coup d’œil littéraire.
Nous avons eu Linguet, le paradoxal et incorrect Linguet, à qui la Révolution coupa la langue et la tête sans qu’il nous ait manqué grand-chose ! […] Et c’est par là que cet homme, nommé grand homme un peu trop vite, manqua, selon moi, l’absolue grandeur.
Ajoutez à cela qu’il avait ce qui manquait à Gibbon : il était chrétien. […] Les intermédiaires politiques manquaient.
Le sentiment d’ordre moral qui manque à tant d’intelligences de notre époque ne lui manque pas, quoiqu’il soit en lui troublé et confus.
Elle continua d’aimer l’époux auquel Dieu l’avait unie, quoiqu’il fût indigne d’elle, et pour que son destin fût accompli, pour que rien ne manquât à son calice d’amertumes, elle souffrit plus de la mort sanglante de son mari qu’elle n’avait souffert de sa vie, — de sa mort qui fut un crime encore, mais du moins qui ne le fut pas envers elle. […] Elle se dépouilla des derniers songes, et, quand ce fut fini, cette veuve de saint Paul, à la fidélité immortelle, ne crut pas manquer de foi à son époux, cet époux sanglant du billot de Toulouse qu’elle avait toujours dans la pensée, en choisissant un autre époux, sanglant aussi, le divin Époux de la Croix.
… Diderot dit quelque part que, dans les peintures des grands peintres, ce qu’il y a de plus beau, ce sont les laissés… Il entend par là les choses qu’ils n’y mettent pas quoiqu’elles soient dans le sujet, et que les artistes médiocres ne manqueraient pas d’y mettre. […] Ce chouan manqué, qui n’avait pu l’être comme il l’aurait été du temps de Charette, avait le génie de l’action et la lestesse d’exécution des chouans militaires, et il le prouva dans deux occasions, dans deux aventures de police rapportées par son biographe.
Ce penseur à moitié de pensée et à deux réminiscences, sait bien ce qui manque à la Russie ; il sait aussi ce qui lui manque, à lui !
Il manque son coup… « Si la Russie, dit-il, entre en Allemagne, il n’y a plus qu’à accepter, en y ajoutant, le mot de Napoléon : l’Europe sera républicaine ou cosaque… si elle n’est catholique », et pourtant rien de tout cela n’est arrivé. […] Nous, catholiques du dix-neuvième siècle, nous n’avions à opposer aux trois colosses de la philosophie que deux hommes de hauteur qui en valaient bien trois, il est vrai, de Maistre et de Bonald, mais il nous manquait le troisième.
Mais comme propagande d’idées elle se perdra : en France, par son lyrisme et sa candeur même ; en Allemagne, par son manque de science réelle et de profondeur. […] C’est un coup manqué dans l’ordre de la pensée.
… Pour tout dire avec un seul mot : verrons-nous enfin se lever parmi nous, du milieu des têtes à discussion qui pullulent, la tête à conception qui manque toujours ? […] Il a créé l’éclectisme, mais cet éclectisme, insuffisant, ne l’abandonne-t-il pas pour un spiritualisme moins compromis, la seconde tente de ce Thabor qui n’en verra pas de troisième, malgré cette promesse fallacieuse d’une théodicée que Lerminier, le meilleur critique en ces matières, et l’uomo di sasso de Cousin, ne manque jamais l’occasion de lui rappeler de sa plume la plus cruellement respectueuse ?
La Critique, qui pèse la gloire au poids du chef-d’œuvre, ne voit que le chef-d’œuvre, et à ses inflexibles yeux les plus grandes puissances intellectuelles qui, pour une raison ou pour une autre, ont manqué le chef-d’œuvre, ne comptent pas ! […] Lyrique, élégiaque, didactique (car il y a, toujours dans le troisième volume de ses Œuvres, un poème didactique de QUINZE chants intitulé L’Univers), ce magnus parens dans l’Histoire littéraire avait l’étoffe de tout, — mais remploi de l’étoffe qui est l’Art, qui est le fini, qui est la beauté accomplie, lui manquait.
Ce feu bien fait devait être le livre de Gourdon, dont la main naturellement était fort capable de bien le construire du pied à la cime, mais qui, justement, après l’avoir arrangé avec beaucoup de soin et d’aptitude dans son milieu et dans sa base, tout à coup, par la cime, l’a manqué ! […] Ce qui manque, en effet, à ce soldat, ce qui fait tache à sa physionomie, c’est la foi religieuse, qu’on avait moins qu’à présent du temps de Jean Gigon dans l’armée, et dont l’enfant trouvé, devenu soldat pour mourir soldat, devait avoir encore plus besoin que le maréchal de Turenne.
Or, ce sont ces lueurs et ces feux-là qui manquent à Aubryet. […] IV Ce n’est point par un dénouement qui aurait pu être superbe et qui est manqué dans le livre d’Aubryet, que pèche le roman d’Albéric Second.
Doué des qualités que je caractériserai tout à l’heure et qui ne manquent ni d’élévation ni de force, il s’est particulièrement, presque exclusivement consacré à ce genre de roman, qui représente dans l’art le matérialisme et la démocratie, et qui ferait le tour du monde, comme le drapeau de la Révolution, si la Critique, qui ne veut pas que les grandes notions littéraires périssent, ne lui barrait pas le chemin ! […] Ce n’est pas la force de production qui lui manque, c’est la force de la gestation.
Les vétérans de la presse le savent ; les gens du monde qui s’y trouvent jetés à l’improviste courent grand risque de sortir de leur rôle et de se laisser surprendre à tout ce qui ne manque pas de les assiéger.
La musique de son vers se cadence sur des rythmes connus et sa rythmique manque encore moins de richesse que d’aristocratie.
Mais la volonté qui est l’aile du génie manqua toujours à ce poète inquiet, chaste, platonique et précieusement timoré jusque dans ses hardiesses.
Mais personne, jamais, ne manquera d’avoir bonne opinion de soi. […] Ce légionnaire qui, parmi les putains entassées au pied de la croix, ne pouvait manquer de reconnaître la croupe experte de Marie-Magdeleine, ainsi ne fera point à Jésus, l’hommage de la moindre petite sécrétion prostatique. […] Diderot, Lénine n’ont d’ailleurs point manqué de s’en prendre à cette affirmation du vieil idéaliste Berkeley : L’objet et la sensation ne sont qu’une seule chose (are the same thing) et ne peuvent être abstraits l’un de l’autre. […] Mais, sous les précautions oratoires de ses suiveurs, on retrouve la grossièreté bien réaliste du carabin classique dont la turlupinade, avec l’âge, ne manque jamais de tourner à l’esprit fort. […] Seule, une telle inspiration nous rapproche de cet équateur (enfin à ne plus confondre avec le tiède, écœurant juste milieu) dont un point brûlant ne peut manquer de s’offrir, quelque jour, à la rencontre des lignes nées aux antipodes, aux pôles de l’homme.
Ajoutez enfin que la biographie des maîtres manque entièrement. […] Là encore la vénération leur manque. […] Quand Alexandre les réunit de force pour conquérir l’Asie, les Lacédémoniens manquent à l’appel. […] Si le sérieux et la grandeur manquent à leurs conceptions religieuses, si l’assiette et la durée manquent à leur établissement politique, ils sont exempts des déformations morales que la grandeur de la religion ou de l’État impose à la nature humaine. […] Même dans l’allemand, où cet inconvénient est moindre, le fil conducteur manque.
On pense bien que les pages piquantes n’y manquent pas. […] Hervieu, c’est peut-être l’hypocrisie qui manque le plus à son livre. […] La veine gauloise n’y manque pas, naturellement. […] Ici précisément deux pages manquent dans le manuscrit et c’est dommage. […] Il s’en faut de beaucoup et les vœux à formuler ne manquent pas.
Son style, plein de pompe et d’harmonie, manque de nuances, de sensibilité et de douceur, tandis que celui de Bernardin de Saint-Pierre, simple comme la nature, semble destiné à la peindre dans sa grâce et dans sa sublimité. […] Elle aime de l’amour des anges, et sa dernière action est sublime, car au moment où elle peut espérer d’être heureuse, elle donne sa vie pour ne pas manquer à la pudeur. […] Il faut qu’il croie en Dieu et qu’il le serve à ma manière… Je ne voudrais pas être votre femme, si ce n’était pour faire ensemble notre salut. » Ce dernier sentiment avait quelque chose de délicat, que M. de Saint-Pierre ne manqua pas de remarquer dans sa réponse, mais sans s’expliquer sur l’objet principal. […] Mon refus d’écrire en sa faveur pouvait être suivi de ma mort ; mais j’étais résolu de perdre la tête plutôt que ma conscience: et si le pouvoir et les bienfaits de ce despote, qui voyait à ses pieds la république consternée le combler d’adulations, et qui avait entre ses mains ma fortune et ma vie, n’ont pu me faire parler pour manquer à l’humanité, il n’est aucune puissance qui pût me faire écrire pour manquer à la Divinité, qui m’a donné le courage de ne pas fléchir le genou devant un tyran. […] Voyez si les larmes y manquent et si jamais on les fit couler avec des paroles moins ambitieuses.
Assurément, les manuels ne nous manquent point. […] Or, un tel empire moral, s’il a illustré la race, plus que la gloire des armes, n’a pas manqué de peser lourdement sur la pensée française. […] Le trouble, l’enthousiasme ou l’effroi ne manquent pas d’y bouleverser bientôt sa logique première et sa lucidité. […] « Ses héros manquent de proportion, il les a pourvus d’emphatiques pensées. […] Tout ce qui s’écarte de l’ordre universel l’exaspère profondément, le choque comme un manque de goût ou encore comme une faute d’accord.
Puis le mariage suivi d’un voyage en Italie, où il manque toujours le couronnement de l’édifice. […] * * * — Le manque de rapport entre le revenu et la dépense de la vie actuelle, doit amener fatalement le viager de la fortune, de la rente, de l’argent. […] Le seul changement est que peut-être les nouveaux domestiques, dans leur service, manquent de grâce. […] * * * — Quand l’homme vieillit, il éprouve le besoin d’une chose qui ne lui manquait pas du tout dans sa jeunesse : le silence. […] Ainsi cette femme qui nous parlait, a manqué deux couronnes impériales.
Que me manque-t-il ? […] Il me semble que si elle était là, dans son vêtement négligé, que je tinsse sa main, que son admiration se joignît à la mienne, j’admirerais bien davantage ; il me manque un sentiment que je cherche et qu’elle seule peut m’inspirer. […] L’abbé en colère prononçait qu’il n’y aurait point de promenade, en effet il n’y en eut point, et selon l’usage, les élèves et moi nous fûmes châtiés de la faute du maître, car les enfants ne manquent guère à leurs devoirs que parce que les maîtres ne sont pas au leur. […] Il y a plusieurs petites observations, que j’ai presque toujours faites, c’est que les spectateurs au jeu ne manquent guère de prendre parti pour le plus fort, de se liguer avec la fortune, et de quitter des joueurs excellens qui n’intéressaient pas leur jeu, pour s’attrouper autour de pitoyables joueurs qui risquaient des masses d’or. […] C’est l’affaire du moment, de l’état du corps, de l’état de l’âme ; une petite querelle domestique, une caresse faite le matin à sa femme, avant que d’aller à l’attelier : deux gouttes de fluide perdues et qui renfermaient tout le feu, toute la chaleur, tout le génie ; un enfant qui a dit ou fait une sottise, un ami qui a manqué de délicatesse, une maîtresse qui aura accueilli trop familièrement un indifférent ; que sais-je ?
Alexandre Dumas Barthélemy est de haute taille, Méry de taille ordinaire ; Barthélemy est froid comme une glace, Méry ardent comme la flamme ; Barthélemy muet et concentré, Méry loquace et tout en dehors ; Barthélemy manque d’esprit dans la conversation, Méry est une cascade de mots, un paquet d’étincelles, un feu d’artifice.
Dès qu’ils rencontrent un Athlete réel, ils esquivent le combat, & croient suppléer, par des pantalonnades, à ce qui leur manque du côté de la vigueur.
Nous n’ignorons pas que les Philosophes & leurs partisans en pensent ou en parlent bien différemment ; mais nous nous faisons gloire de manifester ce que nous pensons du mérite des Auteurs, & nous invitons celui-ci à ne point se laisser aveugler sur les qualités qui lui manquent, par les applaudissemens des Sectateurs d’une Morale ennemie de celle qu’il prêche : leur suffrage n’est propre qu’à humilier l’Orateur Evangélique & Chrétien.
De mauvaises Pieces de Théatre, quand nous manquons d’Hommes de génie, seuls capables d’en donner de bonnes.
C'étoit bien assez que le Public se fût apperçu que cet Ouvrage manque souvent de chaleur, de force, d'élévation ; que l'élégance en est communément froide, la versification foible, les Vers pénibles & solitaires, la monotonie fatigante, la philosophie trop forcée & infiniment parasite, &c.
Les préceptes n’en sont ni fins ni nouveaux ; tout ce qu’on peut dire, c’est que la versification en est facile & correcte, sans que ces deux qualités puissent faire oublier qu’elle manque de noblesse & d’élégance.
Toutefois on doit en user sobrement, parce qu’elle n’est pas d’un goût assez pur : elle manque surtout de grandeur ; car, en empruntant quelque chose de son pouvoir aux hommes, ceux-ci lui communiquent leur petitesse.
Nous ne doutons point que Voltaire, s’il avait été religieux, n’eût excellé en histoire ; il ne lui manque que de la gravité, et, malgré ses imperfections, c’est peut-être encore, après Bossuet, le premier historien de la France.
« Ce livre, disait Monti, est une montagne aride et sauvage qui recèle des mines d’or. » La comparaison manque de justesse.
Ce trait manque dans Esope, et ce défaut rend son histoire invraisemblable. […] Voici par exemple une fable de Phèdre ; il lui manque bien peu pour être vive et jolie : « Un jour, dans un pré, une grenouille vit un boeuf ; et, envieuse d’une telle grandeur, elle enfla sa peau ridée, puis demanda à ses enfants si elle était plus grosse que le boeuf. […] Ce dernier trait est d’un paysan et manque dans l’autre récit. […] Comme il était naturellement pitoyable, il dit en lui même : « Il est vrai que ces animaux sont ennemis des hommes, mais aussi les bonnes actions sont très-estimables, et quiconque sème la graine des bonnes oeuvres ne peut manquer de cueillir le fruit des bénédictions. » Après avoir fait cette réflexion, il prit un sac qu’il avait, et l’ayant attaché au bout de sa lance, il le tendit à la couleuvre, qui se jeta aussitôt dedans. […] Les « parleurs » ont dû être stupéfaits de se sentir touchés ; cet homme a manqué à toutes les règles.
Un effort pour secouer le joug de l’autorité, mais un effort à la fois timide et désordonné, fougueux et éphémère, se gaspillant en intrigues et en aventures, condamné à l’impuissance par son incohérence même, capable d’exciter une révolte, incapable d’opérer une révolution, parce qu’il manque à ces velléités d’émancipation le sérieux, l’esprit de suite, des principes nettement formulés. […] Ce prince de l’Eglise qui lésine et triche au jeu n’est pas fait pour inspirer le respect, et certaines aventures de son passé ne sont pas de nature à lui donner l’ascendant qui lui manque. […] Il leur manquait l’intelligence et le sentiment des grandes transformations sociales. […] Car le duc de Guise était un des plus grands personnages de son temps, avec des talents supérieurs auxquels il ne manqua que d’oser pour commencer dès lors la quatrième dynastie. […] Il n’a certes pas manqué d’hommes qui, aimant mieux obtenir le succès que le mériter, se sont abaissés au niveau d’une foule ignorante au lieu de travailler à l’élever jusqu’aux purs sommets de l’idéal humain.
Aucun œil du soleil ne tarit les rayons ; Sous le flot des épis la terre inculte plie, Le linceul, pour couvrir leur race ensevelie, Manque-t-il donc aux nations ? […] Ces prosateurs et ces poètes faillirent imprimer à la langue, aux idées, aux vers, ce caractère d’originalité qui manqua après eux à notre littérature. […] Ces prophètes raisonneurs de l’Église devenue littéraire ont donné à la langue, avec la période de Cicéron, la gravité, la majesté, l’autorité de l’accent qui manquaient, jusqu’à eux, au génie gaulois de leur patrie. […] « Jetez les yeux de toutes parts », dit Bossuet : « voilà ce qu’a pu faire la magnificence et la piété pour honorer un héros : des titres, des inscriptions, vaines marques de ce qui n’est plus ; des figures qui semblent pleurer autour d’un tombeau, et de fragiles images d’une douleur que le temps emporte avec tout le reste ; des colonnes qui semblent vouloir porter jusqu’au ciel le magnifique témoignage de notre néant ; et rien enfin ne manque dans tous ces honneurs, que celui à qui on les rend. […] L’espace nous manque ; nous le prendrons dans l’entretien suivant, et nous dirons pourquoi nous ne désespérons pas d’une littérature qui a peut-être autant de chefs-d’œuvre dans l’avenir qu’elle en a dans le passé.
Je ne te demande pas des vivres, j’en ai pour aller plus loin, et quand j’en manquerais, mon arc et mes flèches m’en fourniraient plus qu’il ne m’en faut. […] Vous avez le faire, mais l’idéal vous manque. […] Il manque encore bien des choses, et de technique et d’idéal à cet artiste pour être excellent ; mais il a de la couleur et de la couleur vraie, mais il a le pinceau hardi, facile et sûr ; il ne tient qu’à lui d’acquérir le reste. […] " son maître peut lui répondre : sot, tu admires une sottise et cependant tu manques à ton devoir. […] Heureusement je ne sais plus ce que c’est, et je ne me répéterai pas ; mais en revanche je regrette beaucoup l’occasion qui se présente et que je manque bien malgré moi de vous parler du temps où nous aimions le vin et où les plus honnêtes gens ne rougissaient pas d’aller à la taverne.