Sa voix était grave, douce, timbrée comme l’émotion voilée d’une confidence. […] XVII M. de Talleyrand avait passé ses années d’obscurité volontaire en Amérique, pauvre, solitaire, errant, sans agir, sans écrire, sans faire retentir son nom en Europe par aucune voix de la renommée. […] Presque aussi orateur et plus homme d’action que son maître, Danton, sans aucune utopie sociale et sans aucun fanatisme républicain, n’avait au fond que le geste frénétique et la voix tonnante du démagogue enchérisseur de popularité sur ses rivaux de clubs et de tribunes ; mais il avait autant que Mirabeau ce qu’on peut appeler le coup d’œil de l’Europe. […] La France ne se levait pas à sa voix : elle le regardait comme on regarde un gladiateur bien lutter et bien mourir ; mais elle avait séparé sa fortune de la sienne. […] Soulever et calmer les tempêtes de tribune, de presse, de place publique, ou les apaiser du geste et de la voix, était un rôle qui n’allait pas au souverain diplomate.
N’entend-on plus sur le sommet du Liban la voix des prophètes ? […] « Le gazouillement des oiseaux qui saluent l’aurore, le fleuve qui murmure, le zéphyr qui se joue avec les ondes et soupire à travers les feuillages, la réveillent aux premiers rayons du jour : elle ouvre des yeux languissants et promène ses regards sur les asiles solitaires des bergers ; elle croit entendre une voix qui la rappelle à la douleur et aux larmes. […] D’une voix mourante, elle prononce en tombant ces paroles dernières : « Ami, tu as vaincu ; je te pardonne : toi-même, pardonne à mon malheur. […] Il sent trembler sa main, tandis qu’il détache le casque et qu’il découvre le visage du guerrier inconnu : il la voit, il la reconnaît ; il reste sans voix et sans mouvement : ô fatale vue ! […] Immobile, sans couleur et sans voix, rien ne vit plus en lui que son désespoir.
le peuple le bafoue, le chasse ; le peuple entend la voix du poète, et l’acclame, triomphalement… Beckmesser, pourtant, est satisfait ; dans un mémoire pour l’Institut, il a prouvé la folie de Walther ; et Pogner, par déférence, lui a laissé la dot d’Eva. […] Associés successivement, appelés à coopérer tous à un même résultat, les arts avaient fourni, par leur concours, le moyen de rendre intelligibles à un peuple assemblé les buts les plus élevés et les plus profonds de l’humanité ; puis les différentes parties constituantes de l’art s’étaient séparées, et désormais, au lieu d’être l’instituteur et l’inspirateur de la voix publique, l’art n’était, plus que l’agréable passe-temps de l’amateur, et, tandis que la multitude courait aux combats de gladiateurs ou de bêtes féroces dont on faisait l’amusement public, les plus délicats égayaient leur solitude en s’occupant des lettres ou de la peinture. […] Le petit nocturne à deux voix, traité dans la manière de Gounod : Ô nuit sereine, ô nuit profonde, a certainement de la grâce, de même que la cavatine du ténor qui suit : Si dans tes bras, exauçant mon désir. […] Les voix s’y marient très heureusement, et toute cette partie n’a absolument rien de révolutionnaire. […] , La Patrie (24 mars) : M. de Thémines : Rassurez-vous ; je ne vous parlerai pas des Maîtres Chanteurs, poème et musique de Richard Wagner… M. de Thémines, qui « admire, tout autant que le fait le plus acharné et le plus convaincu wagnérien, la partie symphonique des œuvres du grand pontife », ne peut comprendre que Richard Wagner n’ait point voulu écrire des cavatines pour « des voix comme celles de la Patti ou de Faure, de Krauss ou de Richard, de Lassalle ou de Talazac. » … Si par malheur et par impossible, on donnait les Maîtres Chanteurs à Paris, j’en parlerais — contraint et forcé.
Un homme qui se sent digne par ses talents et son génie de devenir célèbre, n’a qu’à laisser faire la voix publique, ne point s’empresser à lui dicter ce qu’elle doit dire, et attendre, si l’on peut parler ainsi, que la renommée vienne prendre ses ordres ; bientôt elle imposera silence à toutes les voix subalternes, comme la force du son fondamental dans un bel accord anéantit toutes les dissonances qui tendent à altérer son harmonie. […] Devenus en quelque manière compatriotes, ils en adoptent les passions, parce qu’ils en ont les intérêts ; l’extrême supériorité ne peut entièrement étouffer la voix de l’envie ; et il faut attendre qu’on ne soit plus, pour recevoir sa récompense de cette postérité réelle, devant laquelle la jalousie s’éclipse, et tous les petits objets disparaissent. […] On est donc convenu que la naissance et la fortune seraient le principe le plus marqué d’inégalité parmi les hommes, par la même raison que tout se décide dans les compagnies à la pluralité des voix, quoique souvent l’avis du plus grand nombre ne soit pas le meilleur. […] Aussi les éloges qu’il reçoit ne se bornent pas au suffrage de ses sujets ; ratifiés par toute l’Europe, dont la voix unanime est la pierre de touche du mérite des souverains, ils le seront par le jugement des siècles futurs, qu’on peut lui annoncer d’avance parce qu’il n’a point à le redouter.
Toute la Suisse française est dans ce cas ; ancien pays roman qui s’est dégagé comme il a pu de la langue intermédiaire du moyen âge, et qui, au XVIe siècle, a élevé sa voix aussi haut que nous-mêmes dans les controverses plus ou moins éloquentes d’alors. […] Combien n’y a-t-il pas eu, autour de ce Léman de Genève ou de Vaud, de jeunes cœurs poétiques dont la voix n’est pas sortie du cadre heureux, étroit pourtant, et qui, en face des doux et sublimes spectacles, au sein même du bonheur et des vertus, et tout en bénissant, se sont sentis parfois comme étouffés ! […] Dans le recueil des Deux voix, par Juste et Caroline Olivier. […] On a réimprimé ses discours en deux volumes (in-8°, Genève, 1829), sous le titre de la Voix du Pasteur ; mais, pour les mieux accommoder à l’édification des fidèles réformés, on en a souvent modifié le texte.
La voix est près de manquer au corbeau lui-même, dont les croassements annoncent l’entrée fatale de Duncan dans l’intérieur de mes murailles. — Venez, venez, esprits qui excitez les pensées homicides ; dépouillez-moi de mon sexe en cet instant, et remplissez-moi du sommet de la tête jusqu’à la plante des pieds, remplissez-moi de la plus atroce cruauté. […] D’ailleurs ce Duncan est né d’un caractère si doux, il a rempli sa tâche de roi d’une manière si irréprochable, que ses vertus, comme des anges à la voix de trompette, s’élèveront contre la damnable atrocité du crime de sa destruction ; et la pitié, semblable à un pauvre petit nouveau-né tout nu, fendant les tourbillons, ou portée comme un chérubin au ciel sur les invisibles courriers de l’air, frappera si vivement tous les yeux de l’horreur de cette action que leurs larmes en éteindront le souffle du vent. […] Il m’a semblé entendre une voix crier : « Plus de sommeil ! […] Dans le lieu où nous couchions, les cheminées ont été abattues par le vent : l’on a, dit-on, entendu dans les airs les lamentations, d’horribles cris de mort, et des voix prédisant avec des accents terribles d’affreux bouleversements, des événements confus, nouvellement éclos du sein de ces temps désastreux.
Mais j’entends la voix d’une âme qui chante à l’occasion de ces objets : elle ne me les montre pas, elle se montre par eux à moi, et le paysage est un hymne. […] Les Voix intérieures mêlent toutes les inspirations des deux recueils précédents : pensives méditations sur les faits du jour, délicieux appels à l’enfance, banales leçons aux épicuriens et aux riches, paysages précis et pittoresques, graves consultations sur le mal du siècle. […] Il n’est pas encore la voix du peuple : il n’a pas encore capté, pour remplir sa poésie, un des grands courants du siècle. […] Voix intérieures, XXVUI (passim).
Et moi je trouve le bouquin très fort, dit une voix nette comme un tranchant10. […] Mme Gervaisais, jeune veuve riche, intelligente et d’esprit indépendant, vient à Rome avec son petit enfant, s’éprend de la Rome païenne, puis s’en détache, subit ensuite dans son imagination et dans son cœur la Rome chrétienne, est décidément convertie par une maladie de son petit garçon et sa guérison miraculeuse, est prise d’une dévotion exigeante et insatiable, se livre à un directeur féroce, s’enfonce dans un ascétisme sombre, renonce à tout, même à l’amour maternel, s’éveille pourtant de cette folie à la voix de son frère, un soldat, qui l’éclairé brusquement sur son mal et qui veut la sauver ; mais elle tombe morte avant de quitter Rome, sous la bénédiction du pape Près d’elle, un autre malade, le petit Pierre-Charles, un bel enfant idiot, d’une sensibilité violente et qui aime furieusement sa mère. « La musique et son cœur, c’était tout cet enfant, un cœur où semblait avoir reflué, l’élargissant, ce qui lui manquait de tous les autres côtés. […] Voyez dans Sœur Philomène, l’agonie de Romaine, à qui l’on vient de couper le sein, le délire impie de la mourante, entrecoupé, dans la grande salle d’hôpital où souffrent tant de malheureuses, par la voix de la sœur récitant la prière du soir : « Hélas ! […] L’épithète étant toujours, dans cette manière d’écrire, le mot le plus important, voici des tournures qui mettent l’épithète au premier plan en la transformant en substantif neutre (à la façon des Grecs) : «… Mais c’était le ciel surtout qui donnait à tout une apparence éteinte avec une lumière grise et terne d’éclipsé, empoussiérant le mousseux des toits, le fruste des murs…37 » — «… Des voix fragiles et poignantes attaquant les nerfs avec l’imprévu et l’antinaturel du son38. » — « Et il mit une note presque dure dans le bénin de sa parole inlassable et coulante39. » Les mots abstraits surabondent dans cette prose si vivante : ce qui semble contradictoire, mais s’explique avec un très petit effort de réflexion.
* * * — La Revue des Deux Mondes, ces temps-ci, a déclaré par la voix de M. de Brunetière, qu’il y avait plus de vérité, d’observation, dans un roman de Gaboriau ou de Ponson du Terrail, que dans tous les romans de mon frère et de moi. […] Et presque aussitôt il m’a entretenu, avec une certaine terreur sur le visage, de la captation, qu’il sentait se glisser autour de lui, — et de la captation caressante avec la voix italienne, et de la captation brutale de l’homme qui affiche son amitié pour vous par des contradictions violentes, et en un mot, de toutes les captations, menées avec les diplomaties et les ruses de la cupidité. […] Baron s’approche de lui, et avec la voix comique qu’on lui connaît, lui dit : « Toi, tu sais, nous t’avons oublié en 93, mais la prochaine fois, nous ne te manquerons pas ! […] Le beau, l’adorable Zézé, tout à coup se renversant dans sa petite chaise, jette avec des larmes dans la voix : « Je ne veux plus mâcher… je trouve ça ennuyeux !
On l’avait accusé de n’avoir pas donné sa voix à Duclos pour l’Académie française ; cela avait mis entre eux du froid ; il prend soin de se justifier. […] Voici quelques-unes des idées et des réserves de Duclos au sujet du livre de Beccaria, et dont il s’ouvre de vive voix à l’auteur même : Après lui avoir fait compliment sur le caractère d’humanité qui l’avait inspiré, je ne lui dissimulai point que je n’étais pas de son sentiment sur la conclusion qui tend à proscrire la peine de mort pour quelque crime que ce puisse être.
Jeannin, comme député de la Bourgogne qui avait titre de premier duché-pairie de France, dut opiner le premier33 ; il appuya le parti de la modération et de la paix, de toutes les raisons qui lui semblaient considérables, et il décida la pluralité des voix (sept contre cinq) dans le même sens. […] Lui et moi avions été nommés pour porter cette parole ; mais il me surmonta en voix, en ayant obtenu sept, et moi cinq seulement : si le sort fût tombé sur moi, je me fusse bien gardé d’user de cette perfidie, et je m’en fusse acquitté en homme de bien34.
il est poète, quoiqu’il n’ait pas la sainte fureur, ni cet aiguillon de désir et d’ennui, qui a été notre fureur à nous, le besoin inassouvi de sentir ; bienqu’il n’ait pas eu la rage de courir tout d’abord à toutesles fleurs et de mordre à tous les fruits ; — il l’est, bien qu’il ne fouille pas avec acharnement dans son propre cœur pour y aiguiser la vie, et qu’il ne s’ouvre pas les flancs (comme on l’a dit du pélican), pour y nourrir de son sang ses petits, les enfants de ses rêves ; — il l’est, bien qu’il n’ait jamais été emporté à corps perdu sur le cheval de Mazeppa, et qu’il n’ait jamais crié, au moment où le coursier sans frein changeait de route : « J’irai peut-être trop loin dans ce sens-là comme dans l’autre, mais n’importe, j’irai toujours. » — Il l’est, poète, bien qu’il n’ait jamais su passer comme vous, en un instant, ô Chantre aimable de Rolla et de Namouna, de la passion délirante à l’ironie moqueuse et légère ; il est, dis-je, poète à sa manière, parce qu’il est élevé, recueilli, ami de la solitude et de la nature, parce qu’il écoute l’écho des bois, la voix des monts agitateurs de feuilles, et qu’il l’interprète avec dignité, avec largeur et harmonie, bien qu’à la façon des oracles. […] Mais en conscience, je ne savais pas M. de Laprade si étouffé ni si comprimé dans sa voix et dans ses pensées ; je ne le savais pas si mal apparenté avec le régime actuel5.
En même temps, quatre Indiens font un petit bal à la moresque ; enfin les perroquets s’envolent des mains de leurs maîtres et les laissent désespérés de cette perte ; après quoi s’achève la pièce, et s’en vont tous s’embarquer pour la guerre de Troie. » La Finta Pazza obtint un brillant succès, auquel les cantatrices, « la gentille et jolie Gabrielle Locatelli, qui était une vraie lumière de l’harmonie, Giulia Gabrielli et Marguerite Bertolazzi, dont la voix était si ravissante qu’on ne pouvait les louer dignement », paraissent avoir eu la plus grande part33. […] À la page 6 de l’imprimé, on lit : « Flore sera représentée par la gentille et jolie Louise-Gabrielle Locatelli, dite Lucile, qui, avec sa vivacité, fera connaître qu’elle est une vraie lumière de l’harmonie. » À la page 7 : « Cette scène sera chantée, et Thétis sera représentée par la signora Giulia Gabrielli, nommée Diane, laquelle à merveille fera connaître sa colère et son amour. » Même page : « Le prologue de cette pièce sera exécuté par la très excellente Marguerite Bertolazzi, dont la voix est si ravissante, que je ne puis la louer assez dignement. » Une scène est suivie de cette note : « Cette scène sera toute sans musique, mais si bien dite qu’elle fera presque oublier l’harmonie passée. » 34.
mon enfant, ta voix dans le bois de Boulogne… Je ne veux pas ouvrir ses livres, parce que je voudrais tout lire, et tout citer, et qu’on ne songe au dire ici qu’un adieu. […] Et qu’on souhaite le départ de l’homme d’esprit vers quelque fabrique, où c’est l’heure de mettre en pages, afin que reparaisse, de dernières minutes, voix baissée, paupières closes, pour la fuite plus mesurée et savourée du rêve, le délicieux maître, le poète.
Schuré oppose au parti pris de stagnation de l’Église contemporaine la parole de Saint Thomas : « La foi est le courage de l’esprit qui s’élance en avant, sûr de trouver la vérité. » Il estime avec Charles Morice que l’ère des révélations n’est pas close et que, seuls, les poètes ont le privilège d’ouïr et d’interpréter les voix du Mystère. […] Là, en pleine foire foraine de Montmartre, à deux pas du Moulin-Rouge où triomphent Grille-d’égout, la Goulue et Valentin-le-désossé, dont les entrechats suffisent à combler le vœu esthétique des foules, une élite de cœurs fervents s’emploie à retourner aux sources de la lumière et à cueillir le rameau de l’antique sagesse, et, comme si tout à coup le monde s’était reculé de milliers d’années, la voix d’Hermès trismégiste se met à retentir, fraîche comme au premier jour.
Despréaux ayant été retenu, pour une extinction de voix, aux eaux de Bourbon, y manqua d’argent ; Boursault l’apprend, & lui fait accepter deux cent louis. […] Linière mourut ferme dans ses principes, aussi bien que Saint-Pavin, quoiqu’on ait publié qu’il s’étoit converti au bruit d’une voix effrayante qu’il avoit cru entendre à la mort de Théophile.
Cette idée, ou, si l’on veut, le caprice, faisoit exercer sur les enfans qu’on destinoit à ce métier, la même cruauté qu’on exerce encore dans quelques païs sur les enfans dont on ne veut point que la voix muë. […] Apparemment que le son de cette flute imitoit mieux le son de la voix humaine que les autres, et comme l’imitent nos flutes traversieres.
dire que tu vas ce soir au Ranelagh, tandis que moi je reste assis plein de tristesse dans ma solitude, comme le prophète quand la voix lui parla et lui dit : Que fais-tu donc, Élie ? […] Seulement, comme les femmes les plus belles, qui font de leur beauté leur première esclave, n’ont pas éternellement à leurs ordres tout leur regard ou toute leur voix pour s’en servir à point nommé, les grands artistes, ces femmes de la Pensée, n’ont pas non plus toujours à commandement l’inspiration qui les fait eux-mêmes… Mais alors, ce ne sont plus eux !
Quelle voix d’orgueil et de perdition peut nous inciter à jouir et à savoir, quand vivre signifie expier, quand la mort seule peut nous ouvrir les portes de la connaissance ? […] Mais lorsque vous concluez de la brusque reculade d’un petit nombre d’affaiblis à la marche en arrière de l’humanité, comment voulez-vous que cette humanité, par la voix de ses individus conscients, ne salue pas vos paroles dérisoires de sa plus cinglante moquerie ?
À la fin, ce grand concert de panégyriques cessa : tout se tut ; et la voix de la postérité se fit entendre. […] Dans ces moments où tout fuit, mais où la vertu reste ; où les flatteries et les éloges de cinquante années se taisent pour laisser élever la voix de la conscience et de la vérité qui ne meurt pas, où l’âme tranquille et courageuse pèse dans un calme terrible tout ce qui a été, et seule avec elle-même, apprécie les crimes, les succès, les victoires, et toutes ces tristes grandeurs humaines qui vont la quitter ; dans ces moments il se reprocha d’avoir sacrifié à un vain désir de gloire la félicité des peuples.
D’ailleurs, son ton, ses yeux, sa voix, tous ses mouvements, de concert avec la passion qui l’anime, persuadent que cette passion est vraie. […] On le lit en silence : chaque homme avec qui il converse est isolé : le sentiment est solitaire, l’orateur lui-même est absent ; ni les inflexions de sa voix, ni les traits de son visage, ne vous attestent la vérité de ce qu’il dit.
La voix grave de l’orateur ajoutait, nous écrit-on, à la solennité du langage, et on pouvait croire par moments qu’on entendait moins le directeur de l’Académie française s’adressant à un spirituel confrère, que le président d’une loge de francs-maçons recevant un nouvel initié.
La réjouissance finie, les misérables, plus nombreux, se retrouvent aussi moins résignés… Des voix autorisées nous diront que ces fêtes sont les fêtes de la paix et de la fraternité ; et jamais nous n’aurons entendu plus de solennelles facéties et de sottises officielles.
Bouchor, ce pour quoi nous l’aimons, c’est qu’il a entendu la voix profonde qui conseille au poète, en ce temps, de se ressouvenir des plus anciennes leçons, d’écouter l’enseignement immémorial des mages primitifs, de se pencher au bord des métaphysiques et des religions antiques.
De même que tous les volumes se relient les uns aux autres, se font suite et se pénètrent par l’idée générale et les motifs musicaux, comme les instants d’un drame lyrique, de même tous les poèmes sont solidaires et se complètent, voix multiples pour un dire unique.
Après, vint Mercure, qui pria Orphée de continuer les doux airs de sa musique, l’assurant que, non seulement les bêtes farouches, mais les étoiles du ciel danseraient au son de sa voix.
qui pouvait douter de ta beauté, lorsque Fénélon et Bossuet occupaient tes chaires, lorsque Bourdaloue instruisait d’une voix grave un monarque alors heureux, à qui, dans ses revers, le ciel miséricordieux réservait le doux Massillon !
Ce n’est pas moi, seigneur… Cette voix vient du Bosphore ; c’est Champfleury-Pacha qui passe en caïque.
Le socialisme de nos jours a ramassé l’erreur, tombée déjà de tant de mains ; mais, en cela plus heureux que le prêtre qui fit taire en lui les voix de la science, il l’a ramassée avec une avidité d’ignorance qui, du moins, sauve sa bonne foi.
Ainsi, par exemple, un grand ouvrage de Lerminier sur les Législateurs et les Constitutions de la Grèce antique, — un livre pensé, médité, presque une découverte en histoire, — et dont la Critique, par parenthèse, préoccupée des choses présentes, commérant d’une voix hâtée sur des œuvres éphémères, n’a pas pu ou voulu parler comme elle le devait.
Tel était le cas pour Furetière, — Furetière, un homme de lettres énorme, qui a fatigué les mille voix de la renommée de son temps, et sur la mémoire duquel s’est assis un profond silence.
Quand un chuchotement court ainsi dans le peuple, toutes les voix officielles crient inutilement ; la nation a rencontré son poëme, elle bouche ses oreilles aux importuns qui tâchent de l’en distraire, et bientôt elle le chantera de toute sa voix et de tout son cœur. […] Toujours le redoutable visage et la voix grondante du dominateur irrésistible apparaissent derrière ses instruments. […] Il avait lancé sa balle et allait recommencer, quand une voix dardée du ciel entra soudainement dans son âme : « Veux-tu quitter tes péchés et aller au ciel, ou garder tes péchés et aller en enfer ? […] Ils entendaient des voix de la cité, des voix éclatantes qui disaient : Dites à la fille de Sion : Regarde, ton salut vient ; regarde, sa récompense est avec lui. […] Voici l’abrégé des événements : Du haut du ciel, une voix a crié vengeance contre la cité de la Destruction où vit un pécheur nommé Chrétien.
Avant lui, ce ne sont que des noms sans voix ou des voix sans nom : les Linus, les Musée, les Orphée qui viennent de la Thrace, on ne sait d’où, et Homère. […] Mais Zeus est pourtant sage de leur avoir refusé la voix. […] Ils commandent le geste, l’attitude, le jeu de la physionomie, l’inflexion de la voix. […] Mais de la foule des voix montèrent qui lui demandaient pourquoi il ne parlait point de prier pour le Roi. […] Dieu ne lui parlait pas seulement par la voix des vents et des flots ; il lui parlait par la voix des anges et des morts, hommes ou bêtes ; et Dieu parlait comme lui.
Cette grosse voix, ce gros rire, ce brusque remercîment d’un homme qui sait agir et crier mieux que parler, annoncent la manière dont il va traiter les plébéiens. […] Et la voix, comme la trompette de l’ange, l’appelle par tous ses titres : Glamis a tué le sommeil, et pour cela Cawdor — ne dormira plus, Macbeth ne dormira plus ! […] Les muscles crispés, les yeux dilatés, la bouche entr’ouverte par une terreur monstrueuse, il le regarde branler sa tête sanglante, et crie de cette voix rauque qu’on n’entend que dans les cabanons des fous : Je t’en prie, vois ici ! […] Vous êtes bien pressé, si le babil de cette voix fraîche et sonore ne sait pas vous retenir. […] Sa forte voix virile, — revenant au fausset enfantin, ne rend plus que les sons grêles — d’un sifflet ou d’un chalumeau.
Le tonnerre était donc bien à sa place : c’est la voix de Moloch resté en dehors. […] Il a visiblement songé à imiter Byron, il lui a pris de son ton, de son air et de l’allure de ses stances ; il s’est souvenu tantôt d’Ossian, tantôt de Léopardi et de bien d’autres ; mais certainement aussi il s’en est encore plus inspiré que souvenu ; l’écho d’une pensée étrangère, en traversant cette âme et cet esprit de poëte si français, si parisien, devenait à l’instant une voix de plus, une voix toute différente, ayant son timbre à soi et son accent.
Le grand poëte ne lisait pas lui-même ; il eût craint peut-être en certains moments les éclats de son cœur et l’émotion de sa voix. […] Littérairement, il n’y avait qu’une voix pour saluer le fondateur, parmi nous, de la poésie d’imagination, le seul dont la parole ne pâlissait pas dans l’éclair d’Austerlitz. […] Voilà celle pourtant qui plus tard brillera si poétique et si belle, dont le front pâle se nuancera de toute sérieuse pensée, qu’il comparera muette et inclinée à un Génie funèbre, et qui sera pour lui la Muse, quand, dans une des promenades au grand mail, il lui parlera avec ravissement de la solitude, et qu’elle lui dira d’une voix de sœur qui admire : « Tu devrais peindre cela. » La grand’mère maternelle du chevalier habitait à l’Abbaye, hameau voisin de Plancoët, avec une vieille sœur non mariée, mademoiselle de Boisteilleul.
Ne faut-il pas attendre que la voix revienne ? » C’est de cette habitude, de cette nécessité de chanter avec toute espèce de voix, d’avoir de la verve à toute heure, que sont nés la plupart des défauts littéraires de notre temps. […] Il paraît qu’une première fois, en 1691, et sans le solliciter, La Bruyère avait obtenu sept voix pour l’Académie par le bon office de Bussy, dont ainsi la chatouilleuse prudence (il est permis de le croire) prenait les devants et se mettait en mesure avec l’auteur des Caractères.
Je sais une personne née dans une petite ville de province qui peut raconter avec la dernière exactitude toutes les circonstances d’une visite de l’impératrice Marie-Louise en 1811, dire sa toilette, les toilettes des dames et des jeunes filles chargées de la recevoir, entendre intérieurement le son de sa voix, revoir ses gestes, sa physionomie, les attitudes des personnes chargées de la complimenter, et bien d’autres choses. — Ce qui rend ces résurrections plus remarquables encore, c’est que souvent elles se font sans que jamais dans tout l’intervalle l’image ait reparu. […] On revoit le geste et la courbure du dos d’un ancien hôte, le corsage carré, les longs plis d’une robe amarante ; on entend presque des timbres de voix qui, depuis si longtemps, sont muettes ; on approche du puits, et l’on retrouve le sentiment de terreur vague que, tout petit, on éprouvait, lorsque, se haussant sur la pointe du pied, on apercevait la profondeur obscure, et le reflet de l’eau froide, tremblotante, à une distance qui semblait infinie. […] Le bourdonnement et les articulations de la voix lui étaient restés dans les oreilles.
Le poëte est semblable aux oiseaux de passage Qui ne bâtissent point leurs nids sur le rivage, Qui ne se posent pas sur les rameaux des bois ; Nonchalamment bercés sur le courant de l’onde, Ils passent en chantant loin des bords ; et le monde Ne connaît rien d’eux que leur voix. […] Je les leur lus sans difficulté, mais non sans que ma voix entrecoupée leur révélât l’émotion très-vive dont j’étais encore agité. […] C’est la Bible des derniers temps ; il n’y a plus qu’une voix dans la nature, un homme grand nous a parlé.
Toutes les fois que j’ai voulu acheter un coin de terre quelconque, une voix intérieure m’en a empêché. […] Ce n’est pas ma faute si, par suite du mauvais goût du temps, un filet de voix claire a retenti au milieu de notre nuit, comme répercuté par mille échos. […] Malgré de sensibles défauts, malgré l’humilité de son origine, ce fils de paysans et de pauvres marins, couvert du triple ridicule d’échappé de séminaire, de clerc défroqué, de cuistre endurci, on l’a tout d’abord accueilli, écouté, choyé même, uniquement parce qu’on trouvait dans sa voix des accents sincères.
Et toutes ces pensées, jusque-là silencieuses, forment un chœur innombrable dont la voix retentit en vous. […] Le vrai poète est celui qui réveille ces voix. […] Ce soir, dans le silence de la nuit, j’entends une petite voix qui sort des rideaux blancs du berceau.
Qu’un écolier, pour mieux réfléchir, évoque l’image d’un ami qui l’écoute, cela est d’un âge où la raison s’essaye et se forme ; et, de même, la voix de la conscience ne se fait vraiment entendre que dans la jeunesse de l’humanité ou chez les hommes dont on dit qu’ils restent éternellement jeunes ; la parfaite maturité de la raison se passe de ces illusions. […] Il faudrait dire que le penseur solitaire, que le paysan taciturne entend des voix intérieures, que nous sommes tous, suivant le sexe, des Socrate ou des Jeanne d’Arc. Mais ni Socrate ni Jeanne d’Arc n’entendaient toujours, l’un son démon, l’autre ses voix, et c’est pour cela sans doute que, lorsque le son surhumain se faisait entendre, ils le distinguaient de leur propre parole intérieure.
Drames, romans, nouvelles, beaux-arts et jusqu’aux modes, tout, depuis trente ans, a porté, plus ou moins, l’empreinte de ce règne dont l’abbé Galiani disait avec son filet de voix claire : « Il y a des empires qui ne sont jolis que dans leur décadence », et pour lequel les Austères révolutionnaires de l’histoire, séduits comme des bourgeois par des duchesses, se sont parfois senti une indulgence, — que l’on comprend très bien, du reste, quand on regarde ce règne et ce temps, entre leurs trois grandes cariatides, Rousseau, Montesquieu et Voltaire. […] Capefigue, finissant sa carrière d’historien sensé, grave et religieux, par des amours de jeune homme, ont porté coup à son aplomb et à sa confiance, et que ces reproches venant jusque de voix amies (car nous aimons M. […] Capefigue de la voix qu’on a quand on chante dans la nuit, trappistes de théâtre, puritains de spéculation et de Bourse, avons-nous bien le droit, au milieu de nos Thébaïdes de plaisir, de nous montrer si impitoyables pour le siècle de nos aïeux ?
Le spiritualisme par la voix de ses disciples tient ce langage : « Vous nous affirmez que le monde n’est pas tout entier dans nos insipides fadaises, que le monde est plus rude et plus varié. […] S’il y a une excuse possible à de tels écarts, c’est que nous avons rêvé d’élargir l’humanité et que nous l’avons mise jusque dans les pierres des chemins. » Je n’ai jamais pu croire que la griserie du grand air eût diminué un écrivain, ni que donner une voix aux choses de la nature fût une petitesse pour un romancier : je crois même que cette communion avec la vie universelle est la condition des grandes œuvres. […] Mais je crois que leur voix ne sera vraiment prophétique que si, dépassant le cercle étroit du matérialisme et du document, ils en appellent à cette large vérité toujours trahie, à ce panthéisme ardemment pressenti, au sein desquels doivent grandir l’art et la pensée.
Si une forte voix est signe d’une bonne constitution, celui-ci paraîtrait doué d’une constitution robuste. […] J’imagine que, si le petit Jupiter de la fable avait fait autant de tapage, les corybantes ne seraient pas venus à bout de couvrir sa voix et de cacher son existence au vieux Saturne. […] Les temps du naturalisme sont venus ; une voix a été entendue annonçant que le règne des faux dieux était passé et que le grand Pan est mort.
La poésie, en un mot, existait en dehors de la parole et du chant liturgique qui se produisaient au milieu du temple, comme la voix sortie de ses entrailles. […] Des enseignements si neufs et si féconds nous semblent communiqués d’en haut par une voix dont le poète ne fait que nous traduire les paroles. […] Vous écoutez en vain ; la voix désirée, la voix divine qui profère la parole créatrice restera muette en vous, muette même en face de la nature ! […] La poésie primitive est une voix spontanée sortie de la conscience même des générations. […] De grands docteurs les ont admis parmi les voix prophétiques de la venue de l’Homme-Dieu, et l’Église ne les a jamais exclus de la tradition antérieure au Christ.
Il semble que la voix humaine soit en train de changer de nature, et que désormais elle se propose de rivaliser avec les murmures des esprits. […] cela n’est plus aussi doux maintenant que tout à l’heure. » Entendez-vous cette voix doucement énervée ? […] Elle nous fait entendre la voix de l’esprit sans nous dire d’où il vient ni où il va. […] À ce moment suprême où tournent les destinées de l’Espagne, Cervantes fut la voix qui exprima le touchant et douloureux mélange de sentiments du peuple espagnol à l’égard de ses maîtres, voix discrète et singulièrement respectueuse qui s’enveloppe d’allégories et que la postérité seule a pu entendre. […] Dans cette stérilité, dans ce silence de toutes les voix de la nature, il trouva pourtant, ai-je dit, paix et douceur.
Vers 1820, un très-jeune homme qui était reçu chez M. de Maistre, et qui s’effrayait de lui voir entre les mains quelque tome tout grec de Pindare ou de Platon, fut un jour fort étonné de lui entendre chanter de sa voix la plus joviale et la plus fausse quelques couplets du vieux temps, la Tentation de saint Antoine, par exemple. […] Celui qui domine, cette idée de gouvernement providentiel dont nous parlons, qui s’y Jessine en deux ou trois grands chapitres, et que l’auteur reprendra plus tard avec prédilection et raffinement, ne se produit ici que justifié par la grandeur même de la catastrophe : la voix de Dieu s’élance toute majestueuse du milieu des orages du Sinaï. […] Dans ce désert habituel, il ne savait pas combien sa voix était haute et perçante, car rien ne lui renvoyait sa voix. […] Nous donc, son disciple aussi, son disciple libre et respectueux, si notre voix avait la moindre valeur en tel sujet, au milieu de voix si hautes et si imposantes, nous lui dirions : « Consolez-vous, Ombre illustre ! […] Il vint en effet ; et comme je lui disais qu’il n’aurait pas dû venir ce jour-là, car il paraissait très-fatigué d’avoir monté notre escalier, il me répondit, en baissant la voix pour que sa fille qui l’accompagnait ne l’entendît pas : J’ai voulu venir aujourd’hui, car je ne pourrai plus revenir, et cela avec un sourire si calme et si naturel que l’on aurait cru qu’il s’agissait d’un petit secret qui aurait pu causer quelque contrariété.
On pourrait dire aussi que Soumet récite à l’un de ses amis quelques vers de sa Clytemnestre, de sa voix la plus flûtée, et ajoute : « En voilà, mon cher, et du meilleur, on vous en fera ainsi tant que vous en voudrez. » Le succès de Lucrèce, si légitime qu’il soit, me suggère ces deux pensées, ces deux petits axiomes critiques : 1° En France, pour réussir en matière littéraire, il ne faut rien de trop, mais toujours et avant tout une certaine mesure.
Les trois dames, effrayées du choix, veillent toute la nuit et tiennent conseil : et le matin, Berthe, d’une voix de velours, demande pour elle et pour ses sœurs aux prétendants de ne les suivre à l’autel que voilées : c’est un vœu fait par modestie !
Puis enfin, comme je flânais, en fumant un cigare, sous les arceaux d’une longue rue à arcades, comme la rue du Pô à Turin, j’entendis des voix éloignées qui prononçaient mon nom ; je me retournai, restant un instant immobile et dans l’attente, et peu à peu je vis autour de moi les camarades qui venaient de me relever et me soutenaient encore de leurs mains. — Aucune impression douloureuse n’a été le résultat de cet accident, qui n’eut point de suite et ne s’est jamais renouvelé. »
Il leur emprunte, à chacun, la qualité particulière de leur lyrisme, voire même des expressions qui leur sont propres, au point que, par exemple, lue isolément, la strophe que je signale serait attribuée au poète des Voix de la montagne .
Est-elle une voix visible, une langue peinte de la pensée ?
Ce sont des marmousets roides et droits, plantés en ligne, armés de fusils et de baïonnettes avec la cartouche et le baudrier, tournant à droite et à gauche, à la voix et au geste d’un de leurs frères.
N’entends-tu pas la voix de la surprise et de l’admiration qui s’élève de tous côtés ?
Il faut bien que les gens du métier se trompent souvent, puisque leurs jugemens sont ordinairement cassez par ceux du public, dont la voix fit toujours la destinée des ouvrages.
… (Bruit de voix, cliquetis d’armes dans la rue.
Le rebours serait plutôt vrai, et l’on pourrait ainsi retourner l’axiome : « On n’est pas original, on le devient. » Les écrivains véritablement originaux ont, il me semble, voix au chapitre, et ce sont eux qu’il faut entendre, On sait comment Taine a créé son style.
Quand le renard s’approche du corbeau pour lui voler son fromage, il débute en papelard, pieusement et avec précaution, en suivant les généalogies ; il lui nomme « son bon père, don Rohart qui si bien chantait » ; il loue sa voix qui est « si claire et si épurge. » Au mieux du monde chantissiez, si vous vous gardissiez des noix. » Renard est un Scapin, un artiste en inventions, non pas un simple gourmand ; il aime la fourberie pour elle-même ; il jouit de sa supériorité, il prolonge la moquerie. […] Puis il fait conduire les soixante mille prisonniers dans une plaine. « Là, ils entendirent les anges du ciel — qui disaient : Seigneurs, tuez, tuez. — N’en épargnez pas ; coupez-leur la tête. — Le roi Richard entendit la voix des anges, et remercia Dieu et sa sainte croix131. » Là-dessus, on les décapite tous ; quand il prend une ville, c’est sa coutume de faire tout égorger, enfants et femmes. […] Les prélats pèsent durement sur le peuple par leurs droits, leurs tribunaux et leurs dîmes, et, tout d’un coup, parmi les bavardages agréables ou les radotages monotones des versificateurs normands, on entend tonner contre eux la voix indignée d’un Saxon, d’un homme du peuple et d’un opprimé. […] Il semble qu’avec la liberté de l’action, la liberté de l’esprit va paraître, que ces communes vont penser, parler, que sous la littérature officielle, imitée de France, une nouvelle littérature va paraître, et que l’Angleterre, la vraie Angleterre, à demi muette depuis la conquête, va enfin trouver une voix. […] Poëme sur le Hibou et le Rossignol, qui disputent pour savoir qui a la plus belle voix.
Byron, trop petit et ne pouvant combattre le bourreau, s’approcha de lui rouge de fureur, les larmes aux yeux, et d’une voix tremblante demanda combien il voulait donner de coups. « Qu’est-ce que cela te fait, petit drôle ? […] Il en a employé les ressorts moteurs à sa façon, pour son but propre, de sorte qu’aucun d’eux ne reste le même, et c’est pour cette raison surtout que je ne saurais trop admirer son génie. » En effet, l’œuvre était originale. « Je n’ai jamais lu le Faust de Gœthe, écrivait Byron, car je ne sais pas l’allemand ; mais Matthew Monk Lewis, en 1816, à Coligny, m’en traduisit la plus grande partie de vive voix, et naturellement j’en fus très-frappé. […] Considérez ces forêts, elles semblent inertes ; mais les feuilles respirent, et la séve y monte insensiblement, à travers les troncs massifs et les branches, jusque dans les minces rameaux étendus comme des doigts ouverts au bout des tiges ; elle emplit des canaux gorgés, elle suinte en formes vivantes, elle comble les frêles chatons de poussières fécondantes, elle répand à profusion dans l’air qui fermente les vapeurs et les senteurs ; cet air lumineux, ce dôme de verdure, cette longue colonnade de troncs, ce sol silencieux travaillent et se transforment ; ils accomplissent une œuvre, et le cœur du poëte n’a qu’à les écouter pour trouver une voix à leurs instincts obscurs. […] Je n’ai plus de repos, — je ne sais pas ce que je demande, ni ce que je cherche. — Je sens seulement ce que tu es et ce que je suis. — Et pourtant je voudrais une fois encore, avant de périr, — entendre la musique de ta voix. […] Ils virent leurs yeux noirs darder une flamme — chacun dans ceux de l’autre, et voyant cela, — leurs lèvres se rapprochèrent et se collèrent en un baiser1311… — Ils étaient seuls, mais non point seuls comme ceux — qui renfermés dans une chambre prennent cela pour la solitude, — L’Océan silencieux, la baie sous le ciel plein d’étoiles, — la rougeur du crépuscule qui de moment en moment baissait, — les sables sans voix, les cavernes où l’on entendait l’eau tomber goutte à goutte, — tout autour d’eux resserrait leurs bras entrelacés, — comme s’il n’y eût point de vie sous le ciel — hors la leur, et comme si cette vie n’eût pu jamais mourir1312. » Excellent moment, n’est-ce pas, pour apporter ici vos formulaires et vos catéchismes !
Toujours les mêmes êtres sont reproduits, semblables de taille, de traits, et de visage, et s’il faut déclarer notre impression franchement la voix de l’amante ne nous paraît qu’un écho lointain de l’Haïdée de Byron, et le cœur du héros, qu’une ombre rapetissée de Childe Harold. […] Dans tout ce bruit de cymbales et de tambours dont on est assourdi, on devine que la voix des personnages, bien que fort enflée, ne saurait beaucoup se faire entendre. […] Une petite mendiante chantait près de lui dans la rue ; sa voix était fausse, mais touchante. […] Il y court, en effet, et comme il se tient sur le pont, regardant couler les eaux profondes, voici qu’il entend tout à coup sortir du sein du fleuve une voix creuse et tremblotante, interrompue par des quintes de toux, en un mot une voix de vieillard qui le salue et s’empresse de lui conter en gémissant mille infortunes. […] Janin s’élève sur le ton du dithyrambe, il est au fond de très bonne foi, et la voix lui tremble et les larmes lui roulent dans les yeux avec une sincérité parfaite.
Sa voix alla se briser contre le mur, sans l’entamer. […] Et j’entends aussi sa voix, toute proche encore, qui me dit : « Voyons, Mirbeau, quand donc me donnerez-vous quelques-uns de ces iris japonais ? […] Car la voix de M. […] … Était-il sincère, quand il me parlait de sa mort avec cette voix tranquille, et cette paix qui donnait à son visage pâli comme un rayonnement ? […] Ce que je sais, c’est que, pour ne pas trop m’attendrir sur moi-même, je goûtais des joies amères à me répéter souvent que je n’étais pas le seul ainsi, qu’il y avait bien d’autres voix que la mienne, et plus chères, parmi toutes « les voix qui se sont tues ».
Tout à coup, il s’anima ; sa voix devint mordante et forte. […] Mais le peuple juif est-il docile à la voix de ces derniers nabis ? […] Et voici que, de nouveau, il entendit la voix, et la voix lui dit : « Tu n’entreras pas au royaume des cieux, puisque tu n’as pas réussi à devenir plus savant que tu n’étais ! […] Ceux-là furent, en morale, indifférents comme la nature dont ils sont les voix. […] Mais c’était la voix d’une lépreuse qui, agitant sa clochette, s’en allait dans la cité des Misérables.
Par exemple, il a inventé « une voix » qui appelle Œdipe, qui répète « Œdipe ! […] Cette voix dans la coulisse est trop ou trop peu. […] Paul Mounet est un bon spectre et a une bonne voix de spectre, pour autant que je peux me connaître en cela. […] Sauf un peu de trouble au début, par quoi sa voix s’est trouvée un peu voilée, elle a été divine dans ce rôle d’Hermione. […] Une voix même crie en mon cœur oppressé : Tremble, tremble, Néron, ton empire est passé !
Molière, s’écria du parterre une voix de vieillard enthousiasmé ; voilà enfin la bonne comédie ! […] Mes yeux et mes soupirs vous l’ont dit mille fois ; Et, pour mieux m’expliquer, j’emploie ici la voix. […] Élève de Molière, elle devint une excellente actrice: sa voix était si touchante, qu’on eût dit, suivant un auteur contemporain, qu’elle avait véritablement dans le cœur la passion qui n’était que dans sa bouche. « Remarquez, dit-il, que la Molière et La Grange font voir beaucoup de jugement dans leur récit, et que leur jeu continue encore lors même que leur rôle est fini. […] Elle entre par là dans le ridicule des femmes qu’elle veut jouer ; mais enfin, avec tous ces avantages, elle ne plairait pas tant, si sa voix était moins touchante: elle en est si persuadée elle-même, que l’on voit bien qu’elle prend autant de divers tons qu’elle a de rôles différents. » 21. […] » prononçant ces mots d’un son de voix varié qui les rendait plus plaisants.
Sur les pas des chœurs de Sophocle, et inspiré par la muse de la douleur, le poëte s’attachait à peindre l’histoire même de l’homme, de cet être qui, aux termes de l’énigme, n’a qu’une voix et n’est debout qu’un instant, l’histoire de ses misères, de ses faiblesses, de ses félicités trompeuses, suivies d’amers retours. […] L’heureux séjour d’Orphée en Samothrace, son chaste hymen avec Eurydice, ses entretiens avec la Sibylle mourante, son intervention au milieu des farouches combats, son refus de l’amour d’Érigone, ses bienfaits partout présents, sa personne toujours lointaine ou passagère, suffiraient à justifier les naïves paroles dans lesquelles le poëte se rend témoignage à lui-même : « Qu’il me soit permis d’affirmer que l’inspiration à laquelle j’obéis est plus près que celle de Virgile des inspirations primitives… Oui, j’ai plus que Virgile, incomparablement plus, le sentiment de ces choses que j’oserai appeler divines. » — « N’y a-t-il pas une voix dans les choses ? » s’écrie dans l’Orphée notre poëte théosophe ; or, cette voix, M. […] Son visage avait été défiguré par une opération, mais n’était point du tout laid pour cela ; ses yeux étaient brillants, larges et intelligents ; la joue était enflée d’un côté comme par une fluxion ; l’aspect général était simple, peut-être un peu trop ; mais la plus remarquable bienveillance dans toute sa personne, sa voix et ses manières, donnaient la plus agréable impression à tous ceux qui avaient quelque discernement.
Cette grosse voix joyeuse, ce bavardage intarissable et magnifique ne sont plus de mise. […] Et là-dessus l’imagination travaille ; le poëte entend déjà cette voix qui va gronder.) […] Le barbare parle, et tout de suite le grand vers imposant soutient sa voix. […] La brusquerie, les interrogations pressées comme les coups d’une hache de guerre, la puissante voix tendue et grondante, la hardiesse qui prend corps à corps l’adversaire et le frappe en face, annoncent le barbare.
L’antiquité, au contraire, ce témoin plus rapproché que nous des origines, s’accorde à représenter ses premiers ancêtres comme des créatures douées de plus de jeunesse, de plus de force, de plus de facultés. « Sur ce point, dit-il, il n’y a pas de dissonance : les initiés, les philosophes, les poètes, l’histoire, la fable, l’Asie et l’Europe n’ont qu’une voix. […] C’est au milieu de cette solitude et de cette espèce de vide formé autour de lui qu’il vit seul avec sa femelle et ses petits, qui lui font connaître la voix de l’homme ; sans eux il n’en connaîtrait que les gémissements… Un signal lugubre est donné ; un ministre abject de la justice vient frapper à sa porte et l’avertir qu’on a besoin de lui. […] Une voix intérieure me dit une foule de choses que je ne veux pas écrire. […] Il s’arrêtait à chaque instant, comme rappelé par quelque voix intérieure derrière lui, et il improvisait des souvenirs, des plaisanteries ou des sublimités de philosophie qui nous faisaient passer des larmes au fou rire et du fou rire de la jeunesse à l’enthousiasme de l’admiration.
J’ai trouvé comme lui dans l’entier sacrifice Cette perle cachée au fond de mon calice, Cette voix qui bénit à tout prix, en tout lieu. […] Cette philosophie a un accent de familiarité à la fois confidentielle et sublime qui semble rapprocher la voix de l’homme de l’oreille de Dieu, et la voix de Dieu de l’oreille de l’homme. […] Heureuses encore une fois les oreilles qui écoutent, non la voix qui retentit au dehors, mais la vérité qui enseigne au dedans !
Cette voix d’un mourant avait tant de solennité ! […] Un tel livre était l’hymne du spiritualisme chanté par une voix émue sur les débris de la littérature matérialiste qui venait d’apostasier Dieu, l’âme, l’immortalité, la liberté, et de se ravaler au service et à la glorification de la tyrannie. […] « Ma fille, lui dit-il avec une voix émue, que la bénédiction de Dieu soit avec toi. […] La chambre de ma fille sera déserte ; sa place à notre table ne sera plus occupée ; c’est en vain que je prêterai l’oreille à ses pas, à sa voix.
Dans les comédies d’intrigue, on apercevait, sortant de la coulisse, la main du poète faisant mouvoir par un fil tous ses personnages ; sous leurs intonations diverses on entendait sa voix. Dans la comédie de caractère, le poète disparaît ; ces gens-là ne lui appartiennent pas ; chacun a son visage, sa voix, et n’a que l’esprit qu’il peut. […] Aux Mascarilles il substitua un premier crayon de ces valets qui font partie de la maison, qui ont voix aux conseils de l’honnête bourgeois, et font payer leur dévouement par plus d’une impertinence. […] Ses colères contre sa fille Armande, sur le dos de laquelle il battrait volontiers sa femme, s’il n’était si bon homme ; sa résolution de résister à Philaminte, quand elle est loin ; sa première charge, pleine de vigueur, quand elle paraît ; le secours qu’il tire d’abord de son bon sens et de la révolte involontaire d’un esprit droit contre un esprit faux, puis, à mesure que Philaminte élève la voix, sa fermeté tombant, son caractère retirant peu à peu ce que son bon sens a avancé, le mari cédant avec la persuasion qu’il ne fait que transiger ; tout cela, c’est la nature observée avec profondeur et rendue avec la plus fine gaieté.
Ils regrettent comme Rousseau, de ne pas être nés Romains. « Si j’avais vécu dans ce temps-là, écrit André Chénier160, je n’aurais point fait des Arts d’aimer, des poésies molles, amoureuses… J’aurais, jeune Romain, au sénat, aux combats, Usé pour la patrie et ma voix et mon bras ; Et si du grand César l’invincible génie A Pharsale eût fait vaincre enfin la tyrannie, J’aurais su, finissant comme j’avais vécu, Sur les bords africains défait et non vaincu, Fils de la liberté, parmi ses funérailles, D’un poignard vertueux déchirer mes entrailles. […] C’est une révolte qui éclate à la voix du tribun improvisé. […] Et Thiers dit alors à Cousin : « Je donnerai ma voix à M. […] S’il est critique, il découvrira des beautés cachées dans le livre ou la pièce de l’éminent confrère dont il espère la voix ; il ménagera l’opinion de tel salon qui est une antichambre connue de la docte assemblée parmi laquelle il désire siéger.
Les voix y jouent le rôle d’instruments humains, le texte sert, seulement, à revêtir les morceaux d’un caractère religieux plus défini. […] Une seule chose nous restera dans l’esprit, dominant le tumulte du Drame : la figure de ce farouche Coriolan dont la fierté est en lutte avec la voix intérieure de sa conscience, voix qu’appuie, plus haut encore et plus puissamment, la propre Mère de Coriolan ; et, de tout le développement dramatique, une seule vision nous restera, la victoire de cette voix sur la fierté du héros, le brisement de la résistance d’une âme forte surnaturellement.
Tous ceux qui ont vu et connu Mme Balletti, dite au théâtre et dans la société Silvia, ont parlé d’elle comme parlent de Mlle Mars ceux qui l’ont vue à quinze ans : « Action, voix, esprit, physionomie, maintien, et une grande connaissance du cœur humain », Silvia possédait tout cela. […] J’ai ouï dire que Mlle Mars elle-même avait peu de sensibilité proprement dite ; mais elle était née pour jouer du Marivaux avec cette ingénuité habile, avec cet art du naturel, avec cet organe charmant, enchanteur, et cette voix sonore à travers laquelle se dessinaient les moindres intentions comme les perles dans une eau limpide.
Pourtant, plume en main (si tant est que lui-même il tînt la plume), ou en se disant qu’il allait dicter et composer, il était quelque peu gêné dans l’expression de ses pensées, et, bien qu’il en produisît le principal, il n’en donnait et n’en fixait qu’une partie : de vive voix, dans les occasions et en présence des gens, il était, on doit le croire, bien autrement large et abondant. […] Alors, Geoffroy de Villehardouin, le maréchal de Champagne, prit la parole par l’accord et par la volonté des autres, et commença à dire en telle manière : « Seigneurs, les barons de France les plus hauts et les plus puissants nous ont vers vous envoyés, et vous crient merci pour qu’il vous prenne pitié de la cité de Jérusalem, qui est en servage des mécréants, et pour que vous vouliez, en honneur de Dieu, les aider à venger la honte de Jésus-Christ ; et par ce motif vous ont-ils choisis qu’ils savent bien que nulle nation, ni gent qui soit sur mer, n’ont si grand pouvoir comme vous avez, et en partant nous commandèrent que nous eussions à en tomber à vos pieds, et de ne point nous en relever que vous ne l’ayez accordé. » « Et alors les six députés s’agenouillèrent, pleurant beaucoup ; et le doge et tous les autres commencèrent à pleurer de la pitié qu’ils en eurent, et s’écrièrent tous d’une voix, et tendant les mains en haut : « Nous l’octroyons !
L’astronome Lalande venait de mourir : l’Académie des sciences élut Arago pour le remplacer, le 18 septembre 1809, à la majorité de quarante-sept voix sur cinquante-deux. […] Il en résulta, indépendamment des comptes rendus hebdomadaires de vive voix auxquels il excellait, une série de notices et de biographies qu’il nous est donné jusqu’à un certain point de juger.
[NdA] Et encore dans une lettre que je recommande aux curieux, adressée à la duchesse douairière de Mortemart (11 octobre 1710) : « Quand nous n’entendons pas cette voix intime et délicate de l’Esprit qui est l’âme de notre âme, c’est une marque que nous ne nous taisons point pour l’écouter. Sa voix n’est point quelque chose d’étrange : Dieu est dans notre âme, comme notre âme dans notre corps. » Et ce qui suit.
Le maître parle ; on obéit à sa voix. […] Il y avait quelque chose de si imposant dans l’effet des lumières, dans les sons si sévères de l’orgue et les voix des chanteurs, que j’en ai été pénétré : j’aurais voulu y être arrivé plus tôt.
Par cette raison principalement, je le crois autant au-dessous de l’excellent, où la voix publique le place, qu’au-dessus du médiocre qu’il attaque avec succès dans ses satires ; et je suis persuadé que le temps, qui met le vrai prix aux auteurs, ne placera pas celui-ci au premier rang où son siècle le place. […] Chacun d’eux, lorsqu’il est reçu dans ce corps, prononce un discours comme pour montrer de nouveau et de vive voix qu’il est digne du choix qu’on a fait en sa personne, et ce discours qui servira de modèle à d’autres, et qui montre sur quoi principalement un orateur a bonne grâce de s’exercer, doit contenir des éloges, des éloges donnés aux vivants et aux morts.
Je ne parle pas de ce talent de professeur qu’il ne tenait qu’à lui de pousser et de développer ; car, pour peu qu’il l’eût voulu, il serait aujourd’hui l’un des maîtres et l’une des voix écoutées en Sorbonne. […] Enfin justice s’est faite, le bon goût a été vengé ; un véritable homme d’esprit, de talent et de tact est venu rendre inutile cet empressé vétéran. — Je ne sais ce qu’on fera et je n’ai pas voix au chapitre ; mais, à ne compter que les services, il mériterait bien d’être de l’Académie avant lui.
Ballanche présent et qui, en telle matière, avait voix au chapitre, dit aussi son mot et insista sur les difficultés. […] » dit-il d’une voix ferme ; et à peine ces mots eurent-ils été prononcés, que tous les élèves crièrent à plusieurs reprises : « Vive Maurice !
Jasmin n’avait guère faibli d’ailleurs, et il soutenait jusque dans son dernier volume, avec une sorte d’aisance et une verve de tempérament, cette dureté de condition qui condamne les artistes toujours en scène à se répéter, à repasser sur les mêmes tons, à tirer de leur chanterelle jusqu’à la dernière note, à jouer de leur voix jusqu’à la dernière corde. […] Luzel a déjà dû s’impatienter, s’il nous lit, et je suis sûr que, s’il était à portée de voix, il aurait demandé plus d’une fois la parole ; car, lui, il a la prétention d’être dans un cas tout différent : « Nous autres Bretons, dit-il dans sa préface, nous avons l’avantage précieux de posséder une langue à nous : je dis langue et je repousse vigoureusement le mot flétrissant de patois. » Loin de moi l’idée de le contredire et de porter atteinte à sa patriotique pensée !
Alcée se met donc à chanter en ces termes : Des sociétés temporelles Le premier lien est la voix, Qu’en divers sons l’homme, à son choix, Modifie et fléchit pour elles ; Signes communs et naturels, Où les âmes incorporelles Se tracent aux sens corporels. […] Ses allégories sont jugées tout d’une voix : baroques, métaphysiques, sophistiquées, sèches, inextricables, nul défaut n’y manque.
Retrouver aujourd’hui cette prononciation enfantine, entendre sa voix comme je l’ai entendue dans ce passé effacé, lointain, où les souvenirs ne rencontrent que la mort, cela me fait peur ». […] Je souffre, je souffre, je crois, comme il n’a été donné à aucun être aimant de souffrir… » Puis, le 24 avril : « Dans la lecture d’un volume qu’il lit et qu’il interrompt, il cherche où il en est, et après avoir longtemps fatigué le volume de la promenade de ses mains dessus, il me jette d’une voix timide : Où en suis-je ?
. — D’abord le naturel en est exclu ; tout y est arrangé, apprêté, le décor, le costume, l’attitude, le son de voix, les paroles, les idées et jusqu’aux sentiments. « La rareté d’un sentiment vrai est si grande, disait M. de V., que, lorsque je reviens de Versailles, je m’arrête quelquefois dans les rues à regarder un chien ronger un os297. » L’homme, s’étant livré tout entier au monde, n’avait gardé pour soi aucune portion de sa personne, et les convenances, comme autant de lianes, avaient enlacé toute la substance de son être et tout le détail de son action. […] On a des amies de cœur pour qui « on éprouve quelque chose de si vif et de si tendre que véritablement c’est de la passion », et qu’on ne peut se passer de voir trois fois par jour. « Toutes les fois que des amies se disent des choses sensibles, elles doivent subitement prendre une petite voix claire et traînante, se regarder tendrement en penchant la tête, et s’embrasser souvent », sauf à bâiller tout bas au bout d’un quart d’heure et à s’endormir de concert parce qu’elles n’ont plus rien à se dire.
»208 C’est le même homme dont « la voix d’airain, semblable au cri d’une trompette », renverse dans la plaine les Troyens et leurs chars, et qui, le pied sur la poitrine d’Hector suppliant, l’insulte et le menace : « Chien, ne me supplie ni par mes genoux ni par mes parents. […] Si enfin l’usage impérieux nous contraint de la mettre à part, nous en ferons une exclamation, un regret, un souhait de poëte ; elle prendra un tour éloquent, comique ou touchant ; elle perdra son apparence didactique, en devenant un mouvement de l’âme ; on entendra, en l’écoutant, la voix passionnée d’un homme ; elle sera couverte sous un sentiment, et la poésie la revendiquera en jetant sur elle une poignée de ses fleurs. — Il sera facile alors d’animer le récit qui la confirme.
Entre les deux partis extrêmes, un parti de modérés, amis de la paix, de l’ordre et de l’union, sa forma et peu à peu éleva la voix. […] Ce sont d’abord les deux charlatans, espagnol et lorrain, qui débitent le précieux Catholicon : symbole expressif des ambitions qui entretenaient la guerre civile ; puis le pittoresque tohu-bohu de la procession ligueuse, charge plaisante de la réelle procession de 1590, mais en même temps véridique peinture de toutes les mascarades révolutionnaires : enfin les États, et cette fameuse suite de discours où, par un spirituel emploi de procédé satirique, chacun des meneurs vient se déshabiller lui-même devant le public, et livrer le secret de son égoïsme, jusqu’à ce que, dans la bouche de D’Aubray, la voix de la saine et honnête bourgeoisie française, tour à tour indignée, ironique ou piteuse, se fasse entendre.
Voyez encore, dans les Femmes d’artistes, le ménage de ce pauvre poète marié à une Italienne du peuple, jadis belle, maintenant empâtée et vulgaire, qui mène son mari comme un petit garçon et qui tout à coup, au milieu d’une discussion intéressante, lui crie d’une voix bête et brutale comme un coup d’escopette : « Hé ! […] » — Est-ce que cette phrase : « Tais-toi, boulanger, je t’en prie », ne vous remet pas sous les yeux toute la scène de la Diligence de Beaucaire 96, le rémouleur immobile sous sa casquette pendant que ce farceur de boulanger conte les aventures de la jolie rémouleuse Qui a pu lire le Phare des Sanguinaires 97 et oublier le gros Plutarque à tranches rouges, toute la bibliothèque du phare, et, parmi les grondements de la mer, dans le crépitement de la flamme et le bruit de l’huile qui s’égoutte et de la chaîne qui se dévide, la voix du gardien psalmodiant la vie de Démétrius de Phalère Vous souvenez-vous de ce qu’on trouve au fond du portefeuille de Bixiou98 le vieux caricaturiste aveugle, le funèbre et féroce blagueur : « Cheveux de Céline coupés le 13 mai ?
» * * * Nous passions devant le Napolitain lorsqu’une voix grêle et pointue, une voix étrange de fausset, nous héla.
Le Jésus qui a fondé le vrai royaume de Dieu, le royaume des doux et des humbles, voilà le Jésus des premiers jours 224, jours chastes et sans mélange où la voix de son Père retentissait en son sein avec un timbre plus pur. […] La voix du jeune charpentier prit tout à coup une douceur extraordinaire.
Voltaire à l’Académie française, et il avait réuni presque toutes les voix. […] La correspondance de Thomas avec Ducis (1778-1785) commence à nous donner jour sur la vie intérieure du tragique plein de bonhomie, que Thomas comparait au père Bridaine : « Vous êtes, lui disait-il, le missionnaire du théâtre ; vous faites la tragédie comme le père Bridaine faisait ses sermons, parlant d’une voix de tonnerre, criant, pleurant, effrayant l’auditoire comme on effraie des enfants par des contes terribles… » Il exprimait assez bien par là ce que son ami avait d’inculte, d’outré et de populaire.
Le Voyage d’Anacharsis avait paru depuis quelques mois, et le succès allait aux nues : une place devint vacante à l’Académie française par la mort du grammairien Beauzée, et Barthélemy, choisi tout d’une voix pour lui succéder, fut reçu dans la séance publique de la Saint-Louis (août 1789). […] Il trouva partout de l’écho, et il n’y eut qu’une voix opposante : ce fut celle d’un auteur autrefois très protégé de la Cour, Laignelot, qui avait fait une tragédie d’Agis quelques années avant la publication et le succès d’Anacharsis, et qui en avait conçu de la jalousie de métier.
La main glisse sur le peplum, esquisse le geste de le rejeter, pendant que les épaules frémissent ; puis remonte vers le front et esquisse le geste de repousser les cheveux sur les épaules ; puis, fatiguée de l’effort, retombe et traîne pendant que Phèdre dit d’une voix qui languit : Tout m’afflige et me nuit et conspire à me nuire. […] Joad, traversant le théâtre pour venir au-devant d’Abner, doit parler, doit avoir parlé pour qu’on lui réponde « oui », et, ne provoquant ce « oui » que par un geste, est un peu étrange et il semble avoir une extinction de voix ; ou semble être étourdi par la surprise et il n’y a vraiment pas lieu.
Il a su prêter à toutes ces voix gémissantes un accent de vérité qui éveille la compassion sans jamais exciter le dégoût. […] Sue avait déjà pris ce parti malencontreux dans la Vigie de Koat-Ven ; mais il aurait dû recueillir les voix et ne pas renouveler une faute généralement blâmée. […] S’il parle des choses qu’il ignore, s’il confond les hommes et les temps, s’il traite l’histoire comme un pays conquis, pas une voix ne s’élèvera pour l’accuser d’outrecuidance ; pas une voix n’osera le tancer comme un écolier paresseux et le renvoyer à l’étude. […] Leur voix se fait-elle entendre parmi ces voix confuses ? […] Si la société refuse de le consulter sur ses prochaines destinées, elle tombera dans le désordre et la confusion ; mais il est généreux et magnanime, et à l’heure du péril sa voix ne refusera pas de se faire entendre.
La curiosité pourtant ne s’est pas ralentie ; plus universelle sans être moins vive, elle n’a presque fait, en passant d’un siècle à l’autre, que descendre des salons dans le public ; et voici qu’elle accueille aujourd’hui ces deux volumes d’anecdotes de plus de cinq cents pages chacun, aussi avidement qu’elle écoutait, vers 1770, madame de Genlis, ou madame Suard, ou telle autre dame lettrée, arrivée de Ferney la veille, et distribuant à demi voix, dans un cercle discret, ses délicieuses confidences.
Ils retournerent à Paris faire leur rapport juridique, & le Monde savant convaincu que M. de Voltaire étoit mentis & Grœcœ Linguœ non compos, il fut délibéré, d’une voix unanime, de lui envoyer un Rudiment Grec, un Répétiteur du Collége Mazarin, & un Prêtre d’Eleusine pour le fesser, d’après son systême, en qualité de Pénitent ou d’Initié.
Il y a dans les langues une beauté visible que l’on diminue en introduisant dans la cité verbale des figures étrangères, des voix dissonantes.
……………………………………………… Mais Dieu fait sur ces fils, dans le vice obstinés, Tonner l’arrêt des coups qui leur sont destinés ; Et par un saint héros, dont la voix les menace, Leur annonce leur perte et celle de leur race.
Ainsi la poësie fait des personnages allegoriques imparfaits, quand elle prête des sentimens aux bois, aux fleuves, en un mot quand elle fait penser et parler tous les êtres inanimez, ou quand élevant les animaux au-dessus de leur sphere, elle leur prête plus de raison qu’ils n’en ont, et la voix articulée qui leur manque.
Ce lyrisme faux ou vrai, mais qui est l’accent, le fond de la voix de la littérature du xixe siècle, ne résonne jamais dans son expression pour en doubler l’éclat ou la portée.
Il s’y joint la douce voix d’une mère et notre main dans sa main.
Celle-ci le fait juger par l’Aréopage et, les voix s’étant partagées, prononce l’absolution. […] Il y en a une, Mlle Montaland, qui vous a une de ces voix ! […] Ni la voix de Roméo ? […] Et comme il fait sonner sa voix ! […] Et tes yeux, et ta voix !
Répondez-moi, du moins, dit enfin Mathilde du ton de voix le plus suppliant, mais sans oser regarder Julien. […] Ecoutez les voix qu’entend Valentin dans le Campo Santo de Pise après avoir reçu la lettre où Gillette lui avoue à la fois son infidélité et son amour. « Hâte-toi d’aimer et de vivre… » semblait dire en mourant la petite rose prête à se flétrir. […] La guitare tintait, mais les notes ne furent pas douces avant qu’elles n’eussent passé par ton chant. — De même que la lune sur le faible et froid étincellement du ciel verse sa bénigne splendeur, de même ta voix si tendre, aux cordes sans âme a donné la sienne. — Les étoiles se réveilleront, quoique la lune dorme toute une heure de plus, ce soir ; nulle feuille ne remuera tandis que le serein de ta mélodie éparpille son enchantement. — Bien que le son anéantisse, chante encore, chante avec ta chère voix qui porte jusqu’à nous un accent de quelque monde loin du nôtre, où la musique et le clair de lune et le sentiment ne sont qu’unbg. […] La voix baisse chez Toulet dans l’instant que chargée, — jamais plus émouvante que lorsque sonne le couvre-feu. […] Car un son de voix aussi authentique ne saurait appartenir à un personnage qui le fût moins, — et cependant il y a dans la nature, partant dans l’amour de François quelque chose d’assez exceptionnel pour qu’il risque d’être méconnu.
Il lui semble à chaque cri qu’elle pousse, que non sa voix seule, mais toute elle-même, parcourt et couvre au galop la place autour d’elle. […] On n’oserait la lire à voix trop haute : sa gracilité mystérieuse oblige au recueillement. […] … Des voix s’élèvent, en longues haleines, Et l’aube en rumeur est pleine de conseils ; Écoute : tout chante ! […] Pardonnez-moi, mon Dieu, si j’en reste sans voix : Mon âme est une enfant et ne sait pas sourire. […] vite alors, haussant la voix, L’Ave Maria dans les bois… Et voilà la troisième chanson du petit pèlerin à Notre-Dame de Montaigu.
Dites-lui d’immoler aux pieds de la femme aimée sa vanité, son orgueil, la voix intérieure qui lui promet la gloire, et les transports de la foule enivrée ! […] Pourquoi n’en serait-il pas en poésie comme dans le vieux palais de nos souverains, où une voix solennelle criait autrefois après chaque agonie royale : Le roi est mort : Vive le roi ! […] J’admire le sacrifice de Georges, pouvant, sans manquer à la loi, garder la fortune de sa mère, et n’écoutant que la voix de l’honneur, qui lui ordonne de payer à tout prix les dettes paternelles. […] voix de la terre ou des étoiles, appel furtif d’une âme en peine, plainte d’un oiseau blessé, murmure d’amour ou de tristesse, que voulait-il ? […] « À la gloire de madame de Longueville, nous dit-il en terminant son introduction, il n’a manqué que la voix de Bossuet.
Jules Case n’a pas gagné, une fois de plus, — ou du moins une seule voix, celle de l’amitié un peu répandue de M. […] Havard spécule depuis tant d’années ; Qu’Ernest Hello, qui fut oublié toute sa vie, le serait encore sans la voix de M. […] Pincez une seule corde, vous avez la voix dans le désert égoïste et partial : pincez les cinq, voici l’expansive charité, voici la symphonie. […] Parfois j’entends une voix d’apocalypse, voix maligne et sainte ensemble, me crier : « Un jour les Aigles fondront sur les Crapauds, — et les Crapauds l’auront voulu !!! […] et une voix me répond : — À cet été !
j’ai fait une action honteuse quand j’ai vendu ma voix aux artisans des misères publiques, à ceux qui vivent des sueurs populaires et ne se soucient pas de remédier aux tortures que leur égoïsme enfante et perpétue ! […] Son ironie ne lui était souvent qu’un masque ou une attitude. «… Au sortir d’une conversation où j’aurai, par l’excès de mes dédains, étonné des âmes éteintes, j’irai dévorer en pleurant quelque puéril récit d’amour… Un son de voix, un regard, me jettent dans des chimères de tendresse et de mélancolie d’où je ne puis plus sortir. […] Plusieurs, m’écoutant parler, disent : « Celui-ci gagnera le ciel… » Et moi, je voudrais monter sur une tour, et crier d’une telle voix que tous les chrétiens qui sont dans le monde puissent l’entendre : « Oh ! […] Je ne suis point la voix qui gâte le peuple ; je condamne mes fautes et je ne cherche pas, en les justifiant par d’abominables théories, à faire des complices et des victimes… Continuellement, chez lui, sous l’auteur on retrouve l’homme, et cela est un charme. […] Si je n’aimais la vérité, je me condamnerais au silence ; mais la vérité a encore sa force dans les plus humbles voix, et elle commande la hardiesse aux plus humbles esprits.
Sans la France, , sans la voix de la France, ce clairon du matin qui éveille les peuples, sans la langue française et sans madame de Staël, qui la parlait si bien, Gœthe n’aurait fait que son bruit allemand, — un glouglou dans une bouteille d’encre ! […] La France, la trop hospitalière et trop badaude France, crut à cette voix qu’elle aimait. […] — Gœthe, qui était apte à tout, ce qui équivaut à dire qu’il n’avait la vocation de rien, n’était pas plus pourvu de la scientifique que de la littéraire… Médiocre en science comme en littérature, mais attentif, et, par le fait de l’attention, arrivant jusqu’à un certain degré de sagacité relative, il eut le mérite, en histoire naturelle, d’entrevoir l’unité de composition, mais le bonheur (plus grand que le mérite) d’avoir, pour le dire et l’apprendre au inonde, la grande voix de Geoffroy Saint-Hilaire, qui, lui, la démontra, et qui reconnut, avec la magnanime bonne foi du génie, que Gœthe en avait eu la lueur… La métamorphose des plantes fut, en botanique, un titre pour Gœthe, dans l’ordre de la science, ainsi qu’en anatomie la découverte de l’os intermaxillaire. […] Ingres tenait plus à son archet qu’à son pinceau, et mademoiselle Mars à sa voix chantée, qui était médiocre, plus qu’à sa voix parlée, qui était divine.
Beaucoup de gens seraient lecteurs, acteurs, chanteurs et orateurs, s’ils avaient de l’aplomb et s’ils ne rougissaient pas du son de leur voix. […] Par intervalles, il élève sa voix en passant sur les monts et répand ses eaux débordées autour des colonnades des forêts et des pyramides des tombeaux indiens ; c’est le Nil des déserts. […] Sa voix était douce, son aspect noble et gracieux, son langage animé et son attrait déjà fort grand. […] Leurs premières voix, dites-vous, sont des pleurs ? […] N’ayant rien de libre que la voix, comment ne s’en serviraient-ils pas pour se plaindre ?
Le corps entier, l’extérieur, jusqu’au ton de la voix, tout devait porter la marque de la pénitence et de la grâce. Le puritain discourait en paroles traînantes, d’un accent solennel, avec une sorte de nasillement, comme pour détruire la vivacité de la conversation et la mélodie de la voix naturelle. […] Dire qu’il a vu une vision ou entendu une voix, c’est dire qu’il a eu un rêve qui tenait du sommeil et de la veille. […] Son sang s’émeut alors, un flot de fureur lui monte à la face, et il lui crie tout bas d’une voix sifflante : « Ah ! […] Sa poésie ressemble à une de ces jolies femmes maniérées, attifées, occupées à pencher la tête, à murmurer d’une voix flûtée des choses communes qu’elles ne pensent guère, agréables pourtant dans leur parure trop enrubannée, et qui plairaient tout à fait si elles ne songeaient pas à plaire toujours.
On sent à chaque strophe que l’auteur, en écrivant, cède à l’irrésistible entraînement de sa pensée ; qu’avant de se préoccuper de la beauté littéraire de son œuvre, il écoute la voix d’un devoir impérieux. […] Les Voix intérieures, publiées l’année dernière, ressemblent à un arrêt prononcé par M. […] Mais la forme que leur a prêtée l’auteur des Voix intérieures est tellement verbeuse, tellement prolixe, que la sympathie devient impossible. […] À proprement parler, la poésie, telle qu’elle se révèle dans les Voix intérieures, est un fleuve sans source et sans rivage. […] Or, les Chants du crépuscule et les Voix intérieures nous autorisent à croire qu’il a dédaigné l’étude des questions philosophiques et politiques.
nous sommes la voix perpétuelle — Et ce qui vit en nous, les éphémères, Est éternel en soi, étant la Vie ; Notre art n’est pas un art de lignes et de sphères : Nous sommes, c’est assez ; Soyons, à toute voix ! […] L’enjambement est un « truc », un trompe-l’œil, ses effets sont restreints ; la plupart du temps il interrompt la période et arrête sans raison la voix qui s’y appuie. […] Bien qu’elle sache aujourd’hui tout, d’avance, Et qu’elle entende l’âme, avant la voix. […] « L’Europe entière parle par sa voix, et cette voix s’élève au-dessus du siècle présent26. » Déjà son œuvre inspire un grand nombre d’imitateurs, elle est le moteur initial de quantités d’énergies lyriques décidées à évoquer les inventions modernes et, derrière ces inventions, les forces cosmiques. […] La voix divine prêche la vie simple et l’amour des humbles.
Mais déjà la nation élevait la voix, les questions les plus sérieuses de l’ordre social étaient soulevées, et les réformes réclamées hautement.
Jeté par sa position militaire dans le midi de la France, pendant les premières années de nos troubles, transporté tour à tour d’Uzès à Avignon et de Carpentras à Jalès, il aurait pu sans doute nous exposer avec clarté et franchise les déplorables agitations de ces provinces tant de fois ensanglantées ; nous dire comment la patrie des plus ardents fauteurs de l’ordre nouveau se trouva si proche du camp où le régime ancien se retrancha ; comment ces Cévennes, encore retentissantes de la voix des pasteurs proscrits, prêtèrent leurs asiles à la monarchie et à la religion déchues de Louis XIV ; comment, en un mot, les partis se caractérisèrent dans ces vives contrées, s’y constituèrent en présence l’un de l’autre, d’autant plus terribles et inexorables qu’ils s’alimentaient de rivalités plus immédiates et pour ainsi dire plus domestiques, que de vieilles haines inextinguibles se rallumaient aux haines récentes, et que les séductions étrangères les plus habilement ménagées s’y combinaient avec ce qu’ont de plus irrésistible et de plus spontané les mouvements populaires.
Comme si l’humanité n’eût pu rester délaissée, il s’éleva pour elle des voix parmi ceux mêmes qui l’avaient outragée si longtemps ; et tandis que l’insensée frénésie d’Hébert invoquait de nouvelles horreurs, et que la politique froide et louche de Robespierre en méditait silencieusement, un troisième parti s’isola d’eux, leur cria d’arrêter, qu’il était las de meurtre, et que le glaive devait reposer après la victoire.
Et que le rossignol, de sa voix pure et belle, Me raconte que mai fleurit encor nos champs. » Le précis de la guerre durant ces quatre dernières années est un résumé, un peu oratoire, des nombreuses relations récemment publiées.
Pauvre et triste temps que cette fin du xe siècle où se fait entendre à nous la voix grêle qui dit la vie et la mort de saint Léger.
Il y a de belles Étoiles au ciel, l’Enfant baigne dans la source la blancheur de ses pieds, les statues se découpent sur l’émeraude du Parc et le Poète chante, chante à voix hautaine et vibrante, si forte qu’elle briserait bien Syrinx et si douce ; parfois, qu’elle ferait pleurer de joie les choses.
quelles voix inconnues, quand les vents viennent à s’élever !
Il n’y eut sur le St Barthelemi qu’il exposa au dernier Salon, qu’une seule voix, et ce fut celle de l’admiration.
La nature dont ils font entendre la voix supplée à leur insuffisance.
Ces endroits se prononcent naturellement d’un ton de voix plus élevé que les endroits serieux.
Je suis obligé, bien qu’à regret, d’y renvoyer le lecteur curieux, pour ne pas trop abonder ici en ces sortes d’images12 ; mais j’oserai citer au long le sonnet xiv, admirable de sensibilité, et qui fléchirait les plus sévères ; à lui seul il resterait la couronne immortelle de Louise : Tant que mes yeux pourront larmes espandre, A l’heur passé avec toi regretter ; Et qu’aux sanglots et soupirs résister Pourra ma voix, et un peu faire entendre ; Tant que ma main pourra les cordes tendre Du mignard luth, pour tes grâces chanter ; Tant que l’esprit se voudra contenter De ne vouloir rien fors que toi comprendre ; Je ne souhaite encore point mourir. Mais quand mes yeux je sentirai tarir, Ma voix cassée et ma main impuissante, Et mon esprit en ce mortel séjour Ne pouvant plus montrer signe d’amante, Prîrai la Mort noircir mon plus clair jour ! […] Je le croirais d’autant plus que le reste du signalement semble indiquer la même dame au doux chant et à la belle voix αύδἠεσσϰ, comme a dit Homère de Circé.
. — Et cependant, du moins, tout ce que je voyais alors agissait sur moi pour me ranimer ; tout me faisait fête dans la nature ; c’était vraiment un concert de la terre, des cieux, de la mer, des forêts et des hommes ; c’était une harmonie ineffable, qui me pénétrait, que je méditais et que je respirais à loisir ; et quand je croyais y avoir dignement mêlé ma voix à mon tour, par un travail et par un succès égal à mes forces et au ton du chœur qui m’environnait, j’étais heureux ; — oui, j’étais heureux, quoique seul ; heureux par la nature et avec Dieu. […] Voici quelques vers commencés que nous trouvons dans ses papiers : Thérèse, que les Dieux firent en vain si belle, Vous que vos seuls dédains ont su trouver fidèle, Dont l’esprit s’éblouit à ses seules lueurs, Qui des combats du cœur n’aimez que la victoire, Et qui rêvez d’amour comme on rêve de gloire, L’œil fier et non voilé de pleurs ; Vous qu’en secret jamais un nom ne vient distraire, Qui n’aimez qu’à compter, comme une reine altière, La foule des vassaux s’empressant sur vos pas ; Vous à qui leurs cent voix sont douces à comprendre, Mais qui n’eûtes jamais une âme pour entendre Des vœux qu’on murmure plus bas ; Thérèse, pour longtemps adieu ! […] Après un moment de silence : « Hélène, lui dit-il d’une voix troublée, je vous ai affligée, et pourtant je vous jure… » — « Moi, monsieur ?
Voici ce que je me répondis, en croyant véritablement entendre la voix creuse et impassible, la voix lapidaire de l’oracle des cabinets : X « Il y a deux partis à prendre, quand on est maître absolu de ses décisions, le lendemain d’un événement qui a fait table rase en Europe, quand on est la France de 1848 et qu’on s’appelle république : on peut se placer en idée sur le terrain des ambitions napoléoniennes, des ressentiments de Waterloo, des vengeances militaires, des humiliations populaires, des propagandes insurrectionnelles, des appels des peuples contre tous les trônes ; on peut faire appel à toutes les turbulences soldatesques ou populaires ; jeter au vent tous les traités, toutes les cartes géographiques qui limitent les nations ; lever, au chant d’une Marseillaise agressive, un million de soldats lassés de la charrue ou de l’atelier ; les lancer, comme des proclamations vivantes, par toutes les routes de la France, sur toutes les routes de l’Italie, de l’Espagne, de l’Allemagne, de la Belgique, de la Hollande, et promener ces quatorze armées révolutionnaires avec le drapeau de l’insurrection universelle des peuples contre les rois, la grande Jacquerie moderne, le rêve de tous les démagogues et de tous les forcenés de gloire, contre toutes les bases sociales, contre tous les pouvoirs et contre toutes les paix du continent. […] « En six semaines, les frontières de tous les peuples voisins de la France seront franchies, les populaces debout, les soldats étonnés sous les armes, les uns se ralliant à la voix et aux amorces de l’insurrection soldatesque, les autres se pressant autour de leurs souverains pour les défendre ; ceux-ci abandonnant leurs rois pour un autre, comme nous le voyons en ce moment en Italie ; ceux-là arborant le lendemain le drapeau qu’ils défendaient la veille ; l’enthousiasme, la terreur, l’indiscipline, l’anarchie soldatesque partout, le règne transitoire de cinq ou six cents Marius de caserne faisant ou défaisant des républiques ou des démagogies partout ; la France pendant quelques jours triomphante, comme coryphée de ces saturnales de la guerre, sur toute la ligne de ses frontières débordées.
« Les portes du temple s’ouvrirent d’elles-mêmes, raconte Tacite, et on entendit une voix, plus forte que toute voix humaine, dire : Les Dieux s’en vont. » XXXV Ici, la page est déchirée, et le livre des histoires, interrompu par la mort de Rome, attend sous quelques monceaux de cendres qu’un heureux hasard rende la parole à la plus grande voix de l’antiquité……………………………………………………………………… XXXVI Les Annales de Tacite sont de la même main, mais d’une main plus magistrale encore et plus ferme.
Moi, je crierai mes peines, J’élèverai la voix vers Celui que je hais. […] Sombre douleur de l’homme, ô voix triste et profonde, Plus forte que les bruits innombrables du monde, Cri de l’âme, sanglot du cœur supplicié, Qui t’entend sans frémir d’amour et de pitié ? […] Si desséché qu’il soit par l’extase, si avant qu’il se soit enfoncé dans le nirvâna, le solitaire, « rêvant comme un dieu fait d’un bloc sec et rude », sent à leur voix suppliante remuer en lui quelque chose d’humain et « entend chanter l’oiseau de ses jeunes années ».
Pour tant de jeunes, il n’y a pas de maîtres, ni de talents : rien que des « voix » à ménager, — des « voix politiques » ! […] Deux jeunes écrivains étaient en présence et se partageaient les voix de l’Académie.
Quand le vieux Merlin des légendes traverse les forêts armoricaines, triste, désolé, voyant la science bardique déchoir et les anciennes croyances s’effacer devant une foi nouvelle, c’est l’oiseau qui lui crie, perdu en la profondeur des feuillages : « Merlin, Merlin, il n’y a d’autre dieu que Dieu. » S’inspirant du symbole, Wagner a fait de l’oiseau une « voix de la nature » : il lui a donné pour cela, légèrement modifiée, la mélodie que chantait Woglinde, la première fille du Rhin, su début de Rheingold. […] Enfin, cette voix de l’oiseau, c’est l’écho même de nos pensées ; c’est de notre désir qu’elle parle, elle ne nous annonce que nos propres rêves : « Joyeuse dans la peine, ma chanson chante l’amour … les cœurs seuls la comprennent, qui désirent ! […] Si la voix des Océanides résonne encore pour nous, de même résonneront, sans s’éteindre jamais, la plainte des filles du Rhin pleurant l’or perdu, le dernier chant de Brunnhilde, l’adieu de Lohengrin, les chœurs des pèlerins disant la grâce, l’hymne d’Iseult mourante, le cantique suprême du Parsifal.
A son brusque abord, à sa voix cassante, à la raideur hostile de toute sa personne, M. de Jalin devine un ennemi secret dans ce visiteur, et il le lui dit d’une façon si nette, il le questionne avec tant de tact et de loyauté, qu’il l’oblige bientôt à se déclarer. […] Olivier, lui, n’hésite pas ; il emploie d’abord l’insinuation, le demi-mot, l’ironie ; mais l’Africain reste invulnérable à ces armes légères de la plaisanterie parisienne ; elles le froncent sans l’entamer, ses traits se tendent, sa physionomie s’assombrit, sa voix redevient âpre, brève, menaçante ; il demande des preuves. […] Il ne professe pas, il ne déclame pas, il n’enfle pas sa voix pour imiter le tonnerre ; il a, envers les femmes, ce terrible don de familiarité auquel nulle ne résiste ; il les flagelle, comme on fouette l’Amour dans les anciens trumeaux, avec une verge de roses ; mais, le fouet donné, il est capable de faire de sa verge un bouquet, et de l’offrir, un genou en terre, à sa pénitente.
le traqueur d’une voix sourde et brusque et coupée par des temps, comme s’il semait, en marchant, des maximes et des axiomes : « Besoin de pluie… tuyaux engorgés… alors ils sortent… » Devant nous, à vingt pas du traqueur, trottine quelque chose de grisâtre qui s’arrête, puis repart flairant : « Trim ! […] La duchesse, une femme très forte avec un peu de la voix d’une harengère, mais avec un beau port de corps et de grandes manières. […] Un regard baissé vers la terre, avec des mouvements de corps impérieux et une voix autoritaire.
Il peut bien obliger un homme à faire quelques plaintes en paroles interrompues, mais non pas un discours de suite et tout raisonné : ou bien il faudrait que le poète usât d’une telle adresse en la composition de ce monologue, que l’acteur dût élever sa voix en récitant certaines paroles seulement, et la modérer en d’autres ; et cela, afin qu’il soit vraisemblable que l’autre acteur, qui l’écoute de loin, puisse entendre les unes comme prononcées tout haut, et par l’effet d’une passion qui éclaterait à diverses reprises, mais non pas les autres, comme étant prononcées tout bas. Or, pour dire ce qui me semble de cette composition, il faudrait que l’autre acteur, après la parole prononcée d’une voix fort haute par celui qui ferait ce monologue, dît quelques paroles d’étonnement et de joie, selon le sujet, et qu’il se fâchât de ne pouvoir ouïr le reste ; quelquefois même, quand l’acteur qui ferait le monologue retiendrait sa voix, il faudrait que l’autre remarquât toutes ses actions, comme d’un homme qui rêverait profondément et qui serait travaillé d’une violente inquiétude.
De cette puissante voix qui se fait entendre tout à la fois dans vos ouvrages, dans les journaux, dans les salons vous avez dit : « L’art dramatique n’est point connu en France, nos prédécesseurs n’y entendaient rien, nos pères ont eu tort de rire, ou d’éprouver de vives émotions à la représentation de leurs anciens ouvrages, il n’y a de vrai beau que la nature, moi seul je ferai connaître aux Français le vrai beau. » À ces paroles mémorables cent novateurs ont répondu par des cris de joie ; vous êtes tout à coup devenu leur prophète, leur Dieu ; vous avez parlé, ils vous ont écouté avec respect ; vous avez prêché votre loi, ils ont suivi vos préceptes ; vous avez ordonné des chefs-d’œuvre, ils ont travaillé ; enfin vous avez opéré vos miracles, et les théâtres sont tombés. […] Enfin ils ont prouvé, par l’inconséquence de leur conduite, en sacrifiant avec un dévouement empressé aux idées fausses d’une secte impie en littérature, en accueillant avec un enthousiasme féroce les monstruosités qui leur ont été offertes, en mêlant leur voix injurieuse aux détracteurs des immortels auteurs qui avaient fait de leur théâtre le premier de l’Europe, qu’ils voulaient renoncer à l’honneur d’être les dignes interprètes des hommes de génie qui font encore la gloire de la France et l’admiration du monde entier. […] Sans doute la persévérance qu’on a dans ses opinions prouve la grande conviction que l’on a de son droit ; mais quand la voix publique condamne l’objet de nos récriminations, il est plus que déraisonnable de ne pas céder, ou du moins de ne pas réclamer contre elle avec douceur et politesse.
C’est de ceux-là qu’une dame indulgente a dit un jour : « Ces hommes-là ont du bon : avec eux, on est toujours sûre d’avoir été aimée. » Eh bien, je crois que La Fontaine était précisément de ces maris-là et que c’est avec une demi-sincérité qu’il cajolait de sa voix, comme il a dit quelque part, qu’il cajolait de sa voix MlIe de La Fontaine, comme le Renard cajolait le Corbeau. […] Ce qui m’en plut davantage fut le ton de voix et les yeux.
Ernest Feydeau12 I Voici, enfin, le premier démenti qu’on ait donné à toute la littérature de ce temps ; malheureusement, la voix qui le donne n’est pas assez forte. […] Sainte-Beuve l’avait ondoyé sur le front byronien de Daniel, mais aujourd’hui il l’a tenu sur les fonts de baptême de la publicité, dans la personne de Catherine d’Overmeire, et il a répondu, à haute et intelligible voix, de son talent devant les hommes et devant Dieu. […] Feydeau, qu’une voix pleine d’autorité nous a vanté comme un chef-d’œuvre.
Thiers n’a-t-il pas eu une centaine de mille voix aux élections de 1848 ? […] On veut voir l’homme, étudier sa physionomie, chercher les traces de ses passions ; on veut entrer dans sa vie, on l’anime, on se représente ses gestes, sa démarche, le son de sa voix. […] Galimard, c’est n’avoir pas l’esprit fraternel et méconnaître la voix du sang. […] La voix de M. […] où donc est cette voix ?
Comme eux, il a écouté la voix du jeune charpentier, les choses divines que proclamait sa divine ignorance. […] C’est le moment où Schopenhauer conquit sa grande popularité : sa voix désolée fut écoutée comme une voix de sage ; ses âpres aphorismes parurent résumer l’expérience de ce siècle vieillissant et déçu ; il sembla que sa théorie du malheur universel, établie en pleine prospérité, avait été rêvée comme une sorte de prophétie. […] Une voix répond aussitôt : « Pour qu’il en agisse de même envers vous. » Nous voici donc dans la pire des morales, celle de l’intérêt, qui n’est qu’un calcul. […] L’humanité ne prête qu’une attention distraite à la voix de la raison, qu’elle sait changeante et faible. […] Mais voici que des hommes passaient : ils ont entendu la grande voix qui tonnait contre eux.
La voix est claire. […] Jamais le mal universel n’avait été envisagé d’un cœur aussi pur, enseigné d’une voix aussi douce. […] Elle était plus vaine de sa voix que de sa beauté. Cette voix s’étendait à trois octaves moins deux notes. […] — Sire, dit le doyen d’une voix affaiblie par le travail et par l’âge, voici notre nouvel ouvrage.
Entendez un chanteur hardi et passionné : quand il entraîne sa voix où va son inspiration et sa pensée, quand il court aux effets sans s’inquiéter si son instrument le suivra, vous n’êtes pas tranquille, vous ne respirez pas… C’est qu’arrivé aux notes élevées, sa voix lui va manquer. […] » dit une voix dont trembla le Thabor ! […] » dit l’autre voix du fond des cieux venue. […] Y était-il désigné par la voix publique ? […] Les trente voix auxquelles Mirabeau imposait silence, ce sont les ennemis littéraires de M.
Nous avons retrouvé l’accent libre de l’émotion pleine, et nous avons reconnu une voix d’homme dans ces vers sur Locksley Hall : Sa joue était pâle et plus mince qu’il ne fallait pour son âge ; — et ses yeux, avec une attention muette, étaient suspendus à tous mes mouvements. […] La troisième fois enfin il la lance : « La grande épée jeta des éclairs sous la splendeur de la lune, — et fit dans l’air une arche de clarté, — comme le rayonnement d’aube boréale — qui jaillit lorsque les îles mouvantes de l’hiver s’entrechoquent — la nuit, parmi les bruits de la mer du Nord. — Mais avant que l’épée eût touché la surface, — un bras s’éleva, vêtu de velours blanc, mystique, merveilleux, — et la saisit par la poignée, et la brandit trois fois ; — puis s’enfonça avec elle dans la mer1541. » Alors Arthur, se soulevant douloureusement et respirant avec peine, ordonne à sire Bedivere de le charger sur ses épaules et de le porter jusqu’au rivage. « Hâte-toi, hâte-toi, car je crains qu’il ne soit trop tard, et je crois que je vais mourir. » Ils arrivent ainsi, le long des cavernes glacées et des roches retentissantes, jusqu’au bord du lac où « s’étalent les longues gloires de la lune d’hiver. » — « Là s’était arrêtée une barque sombre, — noire comme une écharpe funèbre de la proue à la poupe ; — tout le pont était couvert de formes majestueuses, — avec des robes noires et des capuchons noirs, comme en songe ; auprès d’elles, — trois reines avec des couronnes d’or ; de leurs lèvres partit — un cri qui monta en frémissant jusqu’aux étoiles palpitantes. — Et comme si ce n’était qu’une voix, il y eut un grand éclat de lamentations, pareil à un vent qui crie — toute la nuit dans une terre déserte, où personne ne vient — et n’est venu depuis le commencement du monde1542. Alors Arthur murmura : Place-moi dans la barque. — Ils vinrent à la barque ; là les trois reines — étendirent leurs mains et prirent le roi et pleurèrent. — Mais celle qui était la plus grande entre elles toutes, — et la plus belle, mit la tête du roi dans son giron — et défit le casque brisé, et l’appela par son nom en pleurant tout haut1543. » La barque se détache, et Arthur, élevant sa voix lente, console sire Bedivere qui s’afflige sur le rivage, et prononçant ces paroles d’adieu, héroïques et solennelles : « Le vieil ordre change, cédant la place au nouveau ; — et Dieu s’accomplit lui-même en plusieurs façons, — de peur qu’une bonne coutume étant seule ne corrompe le monde […] On ne sera point troublé en fermant le livre ; on pourra, en le quittant, écouter sans contraste la voix grave du maître de maison qui, devant les domestiques agenouillés, prononce la prière du soir.
Les savants de l’Europe ont beau élever la voix pour célébrer ces anciennes nations, ils ne peuvent presque en parler que d’imagination, puisqu’ils ne les connaissent que par des étrangers qui, les ayant connues trop tard, n’en ont parlé que par occasion, et ont laissé beaucoup d’obscurités dans les fragments disparates qu’ils ont recueillis de leur histoire. […] Il accorda son kin, et le pinçant de manière à en tirer des sons mieux nourris et plus vigoureux que de coutume, il modula indifféremment sur tous les tons ; il chanta même à pleine voix, et accompagna ses chants de son instrument ; dès lors sa porte ne fut plus fermée à personne, mais on le sollicita en vain de reprendre ses fonctions publiques. […] Ni les prêtres, ni les princes, ni les peuples n’avaient intérêt à étouffer sa voix dans son sang. […] Malgré sa répugnance à sortir de ses études philosophiques pour se mêler aux soins du gouvernement, il consentit, à la voix du peuple et du roi, à prendre provisoirement en main le gouvernement pour rétablir l’ordre, les mœurs, la justice, la hiérarchie dans l’État.
Écoute surtout ce petit sifflement qui sort parfois de dessous la braise comme une voix qui chante. […] L’oiseau n’a eu que peur, puis il s’est trouvé si content qu’il s’est mis à chanter de toutes ses forces, comme pour me remercier et m’assurer que la frayeur ne lui avait pas ôté la voix. […] « À mon réveil, j’ai entendu le rossignol, mais rien qu’un soupir, un signe de voix. […] Je l’aimais, elle était blanche, et chaque matin c’était la première voix que j’entendais sous ma fenêtre, tant l’hiver que l’été.
Jeudi 24 novembre Pillaut parlait curieusement ce soir, du son de la voix des anciens violons et violes d’amours, qui n’est pas une voix de gorge mais plutôt une voix de baryton : une voix un peu nasillarde.
On n’en finirait vraiment pas s’il fallait relever toutes les images de ce genre qui sont répandues dans ses vers ; son inspiration poétique emprunte plus d’une fois les apparences du cauchemar : Moi, mon âme est fêlée, et lorsqu’en ses ennuis Elle veut de ses chants peupler l’air froid des nuits, Il arrive souvent que sa voix affaiblie Semble le râle épais d’un blessé qu’on oublie Au bord d’un lac de sang, sous un grand tas de morts, Et qui meurt, sans bouger, dans d’immenses efforts319 Il finit par se demander lui-même, non sans quelque raison : Ne suis-je pas un faux accord Dans la divine symphonie ? […] Dante Gabriel Bossetti, par exemple, nous peindra ainsi la reine Blanchelys : Ses yeux ressemblaient à l’intérieur de la vague ; Il ne pesait pas plus qu’un roseau, Son doux corps, délicatement mince ; Et semblable au bruissement de l’eau, Sa voix plaintive322. […] Et Shelley, décrivant les fleurs d’un jardin, dira : Le perce-neige et puis la violette s’élevèrent du Mouillé d’une sol chaude pluie, et leur souffle était mêlé A la fraîche odeur de la terre, comme la voix à l’instrument. […] En prose, même obscurité voulue, avec un mélange de mots français, latins, grecs, et de mots qui ne sont d’aucune langue : — « Parmi l’air le plus pur de désastre, où le plus puissant lien une voix disparate, un point sévèrement noir ou quelque rouvre de trop d’ans s’opposait à l’intégral salut d’amour, et la velléité dès lors inerte demeurait, et muette sans même la conscience mélancolique de son mutisme. » Ces phrases relativement fort claires sont extraites du Traité du verbe de Verlaine, — car ils croient avoir inventé un verbe nouveau.
Cette langue russe, combinée d’énergie tartare, de mélodie grecque, de mollesse slave, de rêverie allemande, de clarté française, instrument à mille voix, comme l’orgue des basiliques, est éminemment propre au lyrisme, au gémissement de la mélancolie du Nord, comme à l’enthousiasme religieux du Midi. […] L’Italie est pleine d’hommes de la même trempe de cœur et d’esprit, auxquels il ne manque que la voix. […] C’est le son de voix d’une personne aimée, inséparable de l’enchantement produit sur nous par la personne elle-même. Dès qu’on met le pied sur le sol italien, on entend cette voix dans tous les murmures, dans tous les arbres, dans toutes les vagues, dans tous les vents, comme dans tous les vers.
Il ne tonnait pas dans la chaire, il n’épouvantait pas l’auditoire par la force de ses mouvements et l’éclat de sa voix ; non : mais, par sa douce persuasion, il versait en eux, comme naturellement, ces sentiments qui attendrissent et qui se manifestent par les larmes et le silence. […] N’oublions jamais en le lisant qu’il y manque celui qui les animait de son action modérée et de sa personne, celui dont la voix avait tous les tons de l’âme, et dont le grand acteur Baron disait après l’avoir entendu : « Voilà un orateur !
L’accueil plein de bonté que nous lit ce vieillard illustre, la vive et tendre impression que firent sur moi sa vue et l’accent de sa voix, est un des plus doux souvenirs qui me restent de mon jeune âge. […] Avec lui expira la dernière et la plus abondamment éloquente, la plus cicéronienne des grandes voix qui avaient rempli et remué le siècle de Louis XIV.
Rome même entendra sa voix, et un jour cette ville maîtresse se tiendra bien plus honorée d’une lettre du stvle de Paul, adressée à ses citoyens, que de tant de fameuses harangues qu’elle a entendues de son Cicéron. […] Il tonnait un peu dans le vide en ces moments, ou plutôt dans un espace trop étroit : sa voix était trop forte pour le vaisseau.
Buffon se croyait des droits sur lui, et, à la première élection, il demanda à Bailly sa voix pour l’abbé Maury, depuis longtemps célèbre par ses Panégyriques. […] Chacun les nommait avec une voix attendrie ; et j’eus quelque part, dit Bailly, à ces témoignages de sensibilité et de reconnaissance publique.
Pour Corneille il n’y a nulle difficulté ; c’est son frère Thomas qui est nommé tout d’une voix. Pour la place de M. de Cordemoy, il y eut plus de partage : Bergeret, secrétaire du cabinet du roi, avait à combattre un concurrent qui se présentait avec bien des titres : « Il y avait une grande brigue pour Ménage, nous dit Dangeau, mais Bergeret eut dix-sept voix, et Ménage n’en eut que douze.
Dieu m’est témoin, vieux pères, que ma seule joie, c’est que parfois je songe que je suis votre conscience, et que, par moi, vous arrivez à la vie et à la voix. » Et voilà l’homme qu’une partie de la jeunesse française refuserait d’écouter avec respect, parlant dans sa chaire des études et des lettres religieuses et sacrées, sous prétexte qu’il a, comme critique, des opinions particulières ! […] Pour moi (et j’ai le droit, ayant souffert, à mon heure et vu ma faible voix étouffée, d’avoir un avis sur ces questions de la parole publique), il me semble que devant des générations vraiment libérales dans le sens le plus large et le plus civilisé, devant une jeunesse en qui le sentiment religieux, sincère ne serait pas redevenu un fanatisme, il ne devrait y avoir nulle difficulté après réflexion, et que le malentendu entre M.
Cependant vous avez eu le temps de remarquer que les chœurs mollissent et que les voix de femmes surtout manquent de vigueur dans l’attaque, qu’un trombone a émis un son d’une justesse douteuse ; et, la messe finie, vous sortez en vous demandant comment il se fait que les chœurs français soient si inférieurs à ceux de l’Allemagne et en regrettant vivement qu’une musique aussi belle ne soit pas rendue avec toute la perfection désirable. […] Je ne nie pas que, sur certaines questions d’intérêt et d’utilité commune, où chacun peut être informé et renseigné, la voix de tous, dans nos siècles instruits et adoucis, n’ait sa part de raison et même de sagesse ; par la force même des choses et par le seul cours des saisons, les idées mûrissent.
Dans l’Antiquité, les peuples, tels que la poésie ou l’histoire nous les montre, les peuples des différentes cités et des petits États, dans leurs mouvements impétueux et leurs révolutions, se décidaient d’eux-mêmes au gré de leurs passions, et, à défaut de presse, par la voix de leurs orateurs ; ou bien, quand l’oracle avait parlé, aveuglément superstitieux qu’ils étaient, ils lui obéissaient en aveugles. Chez les modernes, il y a progrès : les oracles sont muets ; la voix des dieux et de ceux qui les faisaient parler n’est plus fatalement obéie ; les peuples pensent : et pourtant il y a toujours l’empire des mots, la puissance des déclamations de tout genre, des sophismes spécieux, ces autres formes d’idoles ; il y a la mobilité naturelle aux hommes, le jeu presque mécanique des actions et des réactions, mille causes combinées d’où résultent on ne sait comment, à certains jours, des souffles généraux qui deviendront plus tard des tempêtes ; et lorsqu’une fois il s’est établi parmi les peuples un mauvais courant de pensées et de sentiments, oracle ou non, il y a danger, si une main bien prudente et bien ferme n’est au gouvernail, qu’ils n’y obéissent en aveugles comme à un mauvais génie.
Cette réforme, toutefois, qui consistait à substituer l’a à l’o dans tous les mots où l’o se prononçait a, ne passa point tout d’une voix de son vivant : elle n’était point admise encore dans la quatrième édition du Dictionnaire de l’Académie, qui parut en 1762. […] On objecte toujours l’usage ; mais il y a une distinction à faire, et que Dumarsais dès le principe a établie : c’est la prononciation qui est un usage, mais l’écriture est un art, et tout art est de nature à se perfectionner. « L’écriture, a dit Voltaire, est la peinture de la voix : plus elle est ressemblante, meilleure elle est. » Il importe sans doute, parmi tous les changements et les retouches que réclamerait la raison, de savoir se borner et choisir, afin de ne point introduire d’un seul coup trop de différences entre les textes déjà imprimés et ceux qu’on réimprimerait à nouveau ; il faut les réformer, non les travestir.
Au moment où cette belle jeune femme au regard sombre emmène avec elle son frère à cheval, fusil sur l’épaule, et sourit d’une joie maligne, on est comme miss Nevil, et un frisson vous prend : il semble qu’Orso soit ressaisi par la voix fanatique du sang, et qu’il entré sous l’influence barbare. […] … ô voix, est-ce bien toi qui arrives à mon oreille ?
Les discours de réception se ressentirent de la publicité dès le premier jour : « Mais j’élève ma voix insensiblement, disait Fléchier, et je sens qu’animé par votre présence, par le sujet de mon discours (l’éloge de Louis XIV), par la majesté de ce lieu (le Louvre), j’entreprends de dire foiblement ce que vous avez dit, ce que vous direz avec tant de force… » Dès ce moment, le ton ne baissa plus ; la dimension du remercîment se contint pourtant dans d’assez justes limites, et la harangue, durant bien des années, ne passa guère la demi-heure. […] quand on a la voix belle, pourquoi ne pas chanter juste toujours ?
Quand elle avait des petits à nourrir, elle venait encore avec moi, mais à un moment donné, elle m’abandonnait, s’enfuyait en courant, la tête basse, en évitant autant que possible mon regard et ma voix. […] Elle se révèle dans l’enchaînement de nos idées, dans la forme que prennent chez nous les impressions et les désirs, dans le moindre de nos actes, dans les mille détails de notre vie psychique, dans le timbre irréductible que revêt en passant par chacun de nous la grande voix de l’humanité.