Gaston Deschamps L’auteur de la Vie des chambres , du Cœur de l’eau, des Cloches du dimanche et de Au fil de l’âme murmure si bas, si bas, ses chansons tristes, que souvent sa voix hésite, s’éteint et que sa pensée fuit, dans un clair-obscur de limbes. […] Rodenbach nous satisfait par ses condensations de mots lorsqu’il dépeint, par exemple, des eaux : Une eau candide où le matin se clarifie Comme si l’Univers cessait au fil de l’âme, ou définit des yeux : Reliquaires du sang de tous les soirs tombants ou bien Sites où chaque automne a légué de ses brumes. […] C’est quand il parle des eaux calmes, des eaux presque mortes, et qu’il assimile les silencieux aquariums aux cerveaux humains, où les idées glissent ou rampent, où les actinies s’entr’ouvrent un instant, c’est par le détail heureux qu’il est poète.
. — La Souffrance des eaux (1899). — Le Tombeau de Stéphane Mallarmé (1899). […] Signoret, lui, arrive et, sans se soucier des insanités qui purent contaminer la beauté des choses, il chante, les bois, les eaux, les nuages, les roses, toutes banales vérités qui ont cependant la sublimité éternelle de Dieu et qui sont les prototypes primitifs des fortes œuvres des hauts génies, depuis Virgile jusqu’au vicomte de Chateaubriand et au divin vieux maître Camille Corot. […] Edward Sansot-Orland La Souffrance des eaux, d’Emmanuel Signoret, est une œuvre qu’il nous plaît de saluer avec une admiration toute spéciale et comparable à celle qui pouvait emplir l’âme d’un Athénien quand un marbre nouveau de […] La Souffrance des eaux est un de ces chefs-d’œuvre éternels devant lesquels on reste ébloui, presque aveuglé… [Anthologie-Revue (février 1899).] […] L’un d’eux, La Souffrance des eaux, a été remarqué par l’Académie française, qui a couronné son auteur en juillet 1899.
» À l’extrémité de cette plaine virgilienne de la Bresse, on rencontre tout à coup, au lieu de l’eau stagnante et fiévreuse des prairies de la Dombe, une rivière bleue comme le firmament de la Suisse italienne, joueuse comme des enfants sur des cailloux, écumante comme l’eau de savon battue par le battoir de la lessiveuse, gazouillante comme une volée de tourterelles bleues et blanches abattues sur un champ de lin en fleurs, jetant ses petits flocons d’écume çà et là sur son cours comme ces oiseaux éparpillant leurs plumes en se peignant du bec sur les touffes du lin ; on s’arrête tout étonné sur la grève des cailloux arrondis par le roulis éternel de cette rivière de montagne, débouchant, tout étonnée elle-même, dans la plaine. […] Cette route est serpentante comme la couleuvre d’eau bleue qui se glisse à vos pieds à travers les prairies étroites et les petits caps de rocher qui servent de lit à la rivière. […] Des groupes de jolies pêcheuses, trempant leurs jambes nues dans l’eau transparente, et se jetant, avec de joyeux rires, les gouttelettes de l’eau de leurs filets au visage, forment à chaque tournant sous vos yeux de vrais paysages du Poussin. […] L’éclat du soleil d’été qui s’y répercute dans sa nappe éblouit la vallée entière d’une fumée de lumière, d’une sorte de brouillard de rayons qui double tout à coup le jour de la surface de la vallée, comme une glace double la clarté dans une chambre obscure ; on ne voit pas encore le lac qu’on voit déjà sa lueur monter dans le ciel comme un incendie des eaux ; on regrette de ne pas pénétrer dans cette gorge éblouissante, qui mène le voyageur par une avenue d’eau et de forêts à Genève ; mais la route de Franche-Comté continue à suivre la rivière d’Ain, et on la côtoie de village en village sur des collines qui s’élèvent insensiblement et par une vallée qui se rétrécit toujours. […] Sur la route, au-dessus de la chaussée, les filets d’eau, gouttières des neiges, suintent à travers les gros blocs de roche, remparts cyclopéens de ces métairies.
La vieille n’avait ni enfant ni captive et devait faire son ménage elle-même ; mais il advint que, depuis qu’elle avait déposé dans le canari des restes de Takisé, elle trouvait chaque jour sa case balayée et ses canaris remplis d’eau jusqu’au bord. […] Ce fut Takisé qui apporta l’eau, mais l’étranger était tellement ravi de sa beauté qu’il ne put boire. […] Avant même de boire l’eau qu’on lui offrait, il appela sa préférée « Takisé ! […] » Telle était l’idée fixe du sartyi qui courut aussitôt vers le cours d’eau, suivi de son ancienne favorite. […] La favorite d’autrefois, qui avait un sincère amour pour son mari, prit la forme d’un caïman et entra dans l’eau, elle aussi, pour ne pas quitter le sartyi.
Enfin on étend toute la masse avec assez d’eau pour en faire un litre. […] On dissout 40 grammes de sulfate de cuivre cristallisé dans 160 grammes d’eau. […] Barreswil, qu’un grain de raisin mûr ait été broyé dans un litre d’eau pour qu’on puisse constater que cette eau a acquis la propriété de réduire le sel de cuivre. […] C’est alors qu’on a ajouté de l’eau au mélange pour dissoudre le sucre. […] Nous avons choisi quatre chiens de même âge et à peu près de même taille : le premier ne recevait que de l’eau pure, le deuxième de l’eau plus de la graisse, le troisième de l’eau plus de la gélatine, le quatrième de l’eau plus de la fécule.
Le sieur Sotinet ne boit que de l’eau : cela est de notoriété publique. […] Un homme, qui a été toute sa vie dans les aides, ne boit que de l’eau ! […] Dans six semaines ou deux mois, vous conviendrez qu’une banqueroute et un coup d’épée dans l’eau ne sont quasi que la même chose. […] Pour cela, il a fallu faire de grandes dépenses pour sa part, et il a avancé quatre cent mille livres, dont il se doit rembourser sur la première eau qui sera vendue. […] … si l’eau se vend bien, comme je n’en doute pas, nous retirerons peut-être notre somme.
Retté a la nostalgie de l’eau. Que ce soit la mer merveilleuse, tout enguirlandée de varechs et de madrépores, comme une galaxie d’étoiles roses ; que ce soit le fleuve, où tant de fois il admira rouler le Bateau Ivre ; que ce soit le lac plat, ou Autre décor, une eau de songe et jamais grise ; que ce soit la source bruissante en cascatelles d’écume, ou la fontaine de girandes lumineuses, ses yeux avides de cliquetis et de clarté s’amusent puérilement des perles blanches et des cristallines paroles grêles des gouttes d’eau. […] Ainsi : Et vainqueurs de l’amour nous allons sur la mer… Vers des flots caressés d’un murmure de voiles S’abolissaient languissamment des chants d’oiselles… Ô gracile unisson de nuit, de lune et d’eau, Vagules mémorant des morts frêles de flûtes ! Vois : la rive en la brume assourdit ses volutes… Barque sillant très lentement l’eau musicale… Au bruit doux des roseaux, par l’ennui de la brise.
L’Ohio, le roi des fleuves, reflétait dans ses eaux paisibles ces belles teintes automnales qui dorent et bronzent les feuillages, à l’approche de l’hiver. […] Rien ne ridait la surface de l’eau, que notre rame seule agitait. […] Rarement, entre ses mains, son instrument s’embrouille et se mêle, tandis qu’avec une incomparable dextérité il les tire de l’eau l’un après l’autre. […] Au contraire, quand l’eau se trouve basse, il n’est pas de trou écarté, pas de remous à l’abri de quelque pierre, pas de place recouverte de bois flotté, où l’on ne puisse se promettre ample capture. […] Je repliai ma ligne, et donnai un grand coup de baguette dans l’eau, de manière à atteindre presque le poisson.
Et c’est à Yédogawa, endroit célèbre par sa fraîcheur et d’où vient dans un conduit l’eau excellente baptisée eau pour le thé, des pêcheurs dans leurs barques. […] La surface de l’eau de Sansaka de la province de Kahi. […] Norimon porté dans l’eau. […] Un Japonais qui va boire une coupe d’eau s’arrête un moment étonné et charmé devant le microscopique cône de la montagne reflété dans l’eau qu’il porte à ses lèvres. […] Une grenouille nageant au-dessus de l’eau.
Pendant l’été, il plonge et vit de poisson ; mais, pendant les longs hivers de la contrée, il s’éloigne des eaux glacées et se nourrit, comme les autres Martes, de Souris et d’autres animaux terrestres. […] De même, à l’égard du Merle d’eau (Cinclus aquaticus), le plus subtil observateur ne pourrait soupçonner, en examinant son cadavre, ses habitudes sub-aquatiques. Cependant ce membre anormal de la famille toute terrestre des Merles ne se nourrit qu’en plongeant, s’accrochant aux pierres avec ses pieds, et se servant de ses ailes sous l’eau. […] Et pourtant il y a des Oies terrestres qui ont, comme les autres, les pieds palmés, et qui, cependant, ne vont que rarement ou même jamais à l’eau. […] Cependant la Poule d’eau (Gallinula chloropus) est presque aussi aquatique que la Foulque et le Râle des Genêts (Rallus crex) presque aussi terrestre que la Caille ou la Perdrix.
Un enfant de mon pays, un jeune homme qui boit comme moi les eaux de la Durance et du Rhône, est ici, chez moi, en ce moment. […] si dans un verre d’eau vous aviez vu cette gentillesse et cette grâce reflétées, d’un trait vous l’auriez bue ! […] L’auditoire enthousiasmé oublie d’abreuver les six paires de bœufs dans la rigole d’eau courante. […] que l’eau pleuve de mes yeux ! […] « Rousse comme une tortillade, une alerte jeune fille d’un large filet étendait les plis, trempés d’eau, sur un figuier.
On voit au premier de ces paysages à gauche un grand rocher dont le pied est baigné par des eaux traversées par des voyageurs entre lesquels une femme portant un enfant sur son dos ; autour de cette femme quelques moutons ; puis une autre femme, à cheval tenant un petit chien, ensuite son mari arrêté, et fesant boire son cheval. à droite, des eaux, d’autres passagers et un lointain. […] Ils sont prolongés de la droite vers la gauche, et semblent diviser le paysage en deux ; des eaux en baignent le pied. à droite, sur la rive de ces eaux, on voit deux pâtres sur leurs chevaux ; plus sur le devant, entre eux, une chèvre. […] Plus sur la gauche et le fond, un valet qui vient de poser à terre deux seaux d’eau pour les chevaux.
Ils doivent laisser ce patrimoine dans des lieux qui jouissent d’un air sain, qui possèdent des sources d’eaux vives, et dont la situation naturellement forte leur assure un asile dans le cas où les cités périraient ; il faut enfin que ce patrimoine comprenne de vastes campagnes assez riches pour nourrir les malheureux qui, dans la ruine des cités voisines, viendraient s’y réfugier, les cultiveraient, et en reconnaîtraient le propriétaire pour seigneur. […] C’est par rapport aux sources vives dont nous avons parlé, que les politiques regardent la communauté des eaux comme l’occasion de l’union des familles. […] Les Romains célébraient les mariages par l’emploi solennel de l’eau et du feu : parce que les premiers mariages furent contractés naturellement par des hommes et des femmes qui avaient l’eau et le feu en commun, comme membres de la même famille, et dans l’origine comme frères et sœurs. […] Mais à cette époque où les hommes avaient encore tout l’orgueil farouche de la liberté bestiale, cette simplicité grossière où ils se contentaient des productions spontanées de la nature pour aliments, de l’eau des fontaines pour boisson, et des cavernes pour abri pendant leur sommeil ; dans cette égalité naturelle où tous les pères étaient souverains de leur famille, on ne peut comprendre comment la fraude ou la force eussent assujéti tous les hommes à un seul.
Elle m’apporta des raisins, des châtaignes et de l’eau glacée pour ma part de son bonheur ; je remportai, moi, son image. […] J’entendais un léger suintement d’eau filtrer dans les rochers au bas de la cabane. Je voyais les grandes ombres noires des châtaigniers velouter un peu le rocher, derrière la maison ; j’y montai pour jouir de deux bienfaits inespérés de la saison : de l’eau et du frais. […] Est-ce que l’eau du Cerchio, qui brille là-bas sous l’arche du pont de marbre de Lucques, se souvient des gouttes d’eau de notre source, où boivent nos chèvres et nos brebis ? […] ajouta Fior d’Aliza en entendant deux rossignols qui luttaient de musique nocturne au fond du ravin, près de l’eau.
Elles ont la faculté inondante ; et comme l’eau, elles sont incompressibles. […] Elle a débordé et maintenant elle fait eau partout il faut que ce soit une loi de la nature expansive de ces doux êtres : mais les femmes, même les plus contenues, deviennent incontinentes, dès qu’elles ont une plume à la main ! […] Mme Raoul de Navery, un bas-bleu qui se trempe dans l’eau bénite pour y perdre, en s’y lavant, son diable de bleu, mais sans y parvenir, Mme Raoul de Navery, l’homme des Jésuites, a bien fini par envahir le feuilleton catholique, à force d’écrire et de filtrer chez les libraires pieux. […] Celui de Mme de Chandeneux n’est qu’une dissolution de toutes les couleurs des livres qu’elle a lus, dans le verre d’eau de sa manière qu’on voudrait quelquefois plus pur… Je l’ai déjà dit de Mme de Chandeneux, elle a la plume légère. […] Son temps s’est imbibé d’elle comme l’éponge s’imbibe d’eau.
Deux grands bassins encadrés de marbre noirci par les années clapotaient doucement au milieu des terrasses ; chacun de ces bassins avait au milieu de l’eau un groupe de sculpture vernissé de mousses, où des Neptunes, des Naïades, des dauphins, vomissaient de leurs gueules, ou distillaient de leurs cheveux, ou faisaient jaillir de leurs tridents des jets d’eau en léger gazouillement, qui répandaient un son d’harmonica dans les jardins et jusque dans les salles de la demeure. À l’angle extérieur d’une de ces terrasses on descendait par une voûte souterraine en cailloutage dans une grotte rustique d’où l’on voyait glisser, comme des cygnes sur une pièce d’eau, les voiles de la mer Adriatique. […] L’eau qui découlait des bassins par une rigole de marbre, traversait la grotte avec un léger gazouillement entre des joncs. […] Leurs légers frémissements à la moindre brise d’été remplissaient l’air et la grotte d’harmonies fugitives, semblables à des plaintes d’eau ou à des chuchotements de voix humaines qui se parlent tout bas. […] On n’y entendait guère que le pas lourd et régulier du vieux majordome de la maison, qui parcourait les corridors pour porter des cruches d’eau aux portes des chambres des hôtes, et le jaillissement monotone des jets d’eau retombant en notes argentines dans les bassins de la cour intérieure.
Il surgit comme la fleur de l’herbe et il est foulé aux pieds ; il fuit comme l’eau, il glisse comme l’ombre. […] Il est comme l’eau écoulée d’un lac, comme le fleuve tari ; il ne revient plus. […] « Les eaux se durcissent comme la pierre, et la surface de l’abîme s’affermit. […] et des torrents d’eaux descendront-ils sur toi ? […] « La fumée sort de ses narines comme d’un vase rempli d’eau bouillante.
Mais l’âme s’en pénètre ; elle se plonge, entière, Dans l’heureuse beauté de ce monde charmant ; Elle se sent oiseau, fleur, eau vive et lumière. […] Mais, parmi les roseaux, On entend respirer un fleuve dont les eaux Pleines de reflets d’or coulent presque sans ride. […] En vain, pour l’égayer, ses compagnes nageant Se lancent au hasard l’eau que leur main effleure, Et folles, pour hâter le pas traînant de l’heure, Entrechoquent leurs voix et leurs rires d’argent. Pour des jeux plus savants un couple adroit s’isole ; Chacune à son tour plonge et remonte à fleur d’eau, D’une main sur son front retenant, son bandeau, De l’autre saisissant sa voisine à l’épaule. Parfois tous ces beaux corps par les bras reliés De suaves rondeurs font une chaîne rose, Où sur chaque poitrine une tête repose ; L’eau trahit par un flot l’essor caché des pieds.
« C’est lui qui, propice aux enfans d’Athamas, les portoit jadis à travers les eaux. […] « Près de lui les Dieux ont placé ce Taureau également fameux, qui mérita d’être transporté parmi les astres, pour avoir porté sur les eaux une Vierge plus chérie de Jupiter, & favorisée d’un sort plus heureux. […] Celui-ci, penchant son urne, inonde les champs de ses eaux. […] Ailleurs mille animaux divers paroissent épars ; ailleurs encore l’Eridan, ce Roi des fleuves, la double couronne, la lyre, & le vaisseau célebre, qui, voguant le premier sur les eaux, brava les tempêtes, ont formé chacun leur constellation.
La guinnârou vient aussitôt, saisit Ahmed et ses animaux et les dépose sur la rive opposée du cours d’eau. […] Elle appelle le chat et le chien et leur dit : « Mettez-vous à l’eau immédiatement, traversez le fleuve et rendez-vous à la case de votre maître. […] Arrivés au fleuve, le chat grimpe sur le chien qui va le passer à la nage mais, quand ils sont au milieu de l’eau, le chien lui dit : « Montre-moi cette bague ; moi aussi je veux la voir. » Le chat prend la bague pour la faire voir à son camarade, mais elle lui échappe et tombe à l’eau.
ils périront privés de leur mère, nos deux chers enfants, ainsi que les poissons meurent privés d’eau dans le lit du fleuve desséché. […] » Elle dit, son mari la serre contre son cœur, et leurs larmes se confondent en une seule eau en coulant lentement de leurs yeux. […] Il lui donna pour nom le nom des oiseaux qui planaient sur sa tête au moment où il l’avait recueillie au bord de l’eau. […] Toi, chère Sacountala, va, sans perdre de temps, à l’ermitage, chercher des fruits dignes d’être offerts à notre hôte : cette eau, en attendant, peut servir à rafraîchir ses pieds fatigués. […] Vénérable ermite, vous vous rappelez sans doute ce texte de la loi sacrée : Accompagne ton ami jusqu’à ce que tu rencontres de l’eau !
Il lui saisit l’oreille, et lui plongeant le visage dans l’eau : “Ah ! […] Dans ce laps de temps, les fortifications d’Alexandrie seraient achevées ; cette ville serait une des plus fortes places de l’Europe ; … l’arsenal de construction maritime serait terminé ; par le moyen du canal de Rahmaniéh, le Nil arriverait toute l’année dans le port vieux, et permettrait la navigation aux plus grandes djermes ; tout le commerce de Rosette et presque tout celui de Damiette y seraient concentrés, ainsi que tous les établissements civils et militaires ; Alexandrie serait déjà une ville riche ; l’eau du Nil, répandue autour d’elle, fertiliserait un grand nombre de campagnes, ce serait à la fois un séjour agréable, sain et sûr ; la communication entre les deux mers serait ouverte ; les chantiers de Suez seraient établis ; les fortifications protégeraient la ville et le port ; des irrigations du canal et de vastes citernes fourniraient des eaux pour cultiver les environs de la ville… Les denrées coloniales, le sucre, le coton, le riz, l’indigo, couvriraient toute la Haute-Égypte et remplaceraient les produits de Saint-Domingue. » Puis, de dix années de domination il passe à cinquante ; l’horizon s’est étendu ; l’imagination du guerrier civilisateur a pris son essor, et les réalités grandioses achèvent de se dessiner, de se lever à ses yeux de toutes parts : « Mais que serait ce beau pays, après cinquante ans de prospérité et de bon gouvernement ? […] Mille écluses maîtriseraient et distribueraient l’inondation sur toutes les parties du territoire ; les huit ou dix milliards de toises cubes d’eau qui se perdent chaque année dans la mer, seraient réparties dans toutes les parties basses du désert, dans le lac Mœris, le lac Maréotis et le Fleuve sans eau, jusqu’aux Oasis et beaucoup plus loin du côté de l’ouest, — du côté de l’est, dans les Lacs Amers et toutes les parties basses de l’Isthme de Suez et des déserts entre la mer Rouge et le Nil ; un grand nombre de pompes à feu, de moulins à vent, élèveraient les eaux dans des châteaux d’eau, d’où elles seraient tirées pour l’arrosage ; de nombreuses émigrations, arrivées du fond de l’Afrique, de l’Arabie, de la Syrie, de la Grèce, de la France, de l’Italie, de la Pologne, de l’Allemagne, quadrupleraient sa population ; le commerce des Indes aurait repris son ancienne route par la force irrésistible du niveau… » Le mot de civilisation ne s’est pas rencontré encore ; il n’échappe qu’à la fin et aux dernières lignes, comme le résumé de tout le tableau ; il introduit avec lui et implique l’idée morale, qui a pu paraître jusque-là assez absente : « Après cinquante ans de possession, la civilisation se serait répandue dans l’intérieur de l’Afrique par le Sennaar, l’Abyssinie, le Darfour, le Fezzan ; plusieurs grandes nations seraient appelées à jouir des bienfaits des arts, des sciences, de la religion du vrai Dieu ; car c’est par l’Égypte que les peuples du centre de l’Afrique doivent recevoir la lumière et le bonheur !
Elle est, comme en du verre, enclose en du silence, Toute vouée à son spectacle intérieur, A sa sorte de vie intime et sous marine, Où des rêves ont lui dans l’eau toute argentine. […] L’aquarium prend en pitié les autres eaux. L’aquarium les plaint, toutes ces eaux vassales Que la vie intéresse, et s’y associant ; Tandis que lui, de son seul songe est conscient ; Il n’a pas d’autre but que ses fêtes mentales Et l’anoblissement de l’univers qu’il est ; Eau de l’aquarium dont la pâleur miroite. […] Ce n’est pas l’eau solitaire et croupie de l’étang qui est pure ; c’est l’eau violente, frémissante et cristalline du torrent qui est pure. […] Non seulement la fonction normale de la chair et du sexe ne détruit pas la vie de la pensée, mais elle lui communique la force nécessaire pour créer, elle alimente et renouvelle sa fécondité, comme l’eau du fleuve fertilise la terre desséchée, incapable de produire d’elle-même.
Hyeronimo alla puiser de l’eau dans le creux de ses deux mains pour laver et démêler ses beaux cheveux blonds, humides de sang et poudrés de terre. […] Qu’allions-nous devenir avec de l’eau au lieu de lait pour assaisonner nos châtaignes sèches et nos figues coriaces ? […] Nous nous regardions quelquefois ainsi par badinage jusqu’à ce que l’eau du cœur nous montât de fatigue dans les yeux ; mais cette eau était aussi pure que celle de la grotte au soleil. […] J’étais bien aise qu’il ne sût pas où j’étais, et bien fâchée de ce qu’il ne venait pas me surprendre ; le moindre saut d’un petit poisson hors de l’eau, la moindre branche d’osier qu’un oiseau faisait tressauter en s’envolant me faisaient tressaillir ; quelquefois même je pleurais sans savoir de quoi, puis je riais quand il n’y avait pas sujet de rire ; enfin une quenouille emmêlée de contradiction, quoi ! […] Puis, quand je n’entendis plus les cris de ma tante qui me rappelait, malgré le frère, à la cabane, et que je fus parvenue au bord de la plaine, où les passants et les chars de maïs commençaient à élever les bruits et la poussière du matin sur les routes des villages et des villas, je tombai plutôt que je ne m’assis sur le bord du sentier, à l’endroit où il va se rejoindre aux grandes routes, sous le petit pont sans eau qui sert à passer le torrent pendant l’hiver pour aller de Lucques au palais de Saltochio.
On était si las de la rhétorique de ce lâche menteur trop admiré, qu’on trouva d’une sensation délicieuse un livre rapide, de courte haleine, où la passion, la bavarde passion, savait en finir, et avalait ce verre d’eau du suicide, comme dit Stendhal, sans même penser à cette vieillerie de l’enseignement chrétien qui avait été la loi morale de l’Europe. […] Dans le courant de mars 1773, Goethe écrivait à Kestner ces mots qu’il aura pu mettre dans le Divan plus tard, qu’on dirait traduits d’un poète arabe et qui sont superbes, — littérairement parlant : « Je marche à travers des déserts où il n’y a pas d’eau. […] Diderot disait : « Il faut que l’eau soit naïvement de l’eau. » S’il avait raison pour l’eau des fontaines, qu’aurait-il dit de l’eau des larmes ?
L’air s’azure et s’irise, les cours d’eau murmurent sur le gravier. […] L’eau murmure tout bas, l’écume crève et tournoie irisée sous le soleil. […] Des grondements coururent dans les nuages et une trombe d’eau s’abattit soudain. […] Stendhal y acheta d’excellente eau de Portugal. […] L’eau est dans la cruche ; qu’il la trouve.
Un vaste bassin d’eau si azurée qu’elle en paraît noire, et si profonde que la sonde n’en atteint pas le fond, occupe toute l’étendue de l’antre. […] Je n’entends que les bœufs qui mugissent, les moutons qui bêlent, les oiseaux qui gazouillent, les eaux qui bruissent ; la seule femme qui s’offre à mes regards est une servante noire, sèche et brûlée comme un désert de Libye. […] « Je m’y tiens à midi ; le matin je vais sur les collines plus hautes ; le soir dans les prés ou dans le voisinage de la fontaine de Vaucluse, ou dans ce petit jardin dans l’île en bas de la grotte, à l’ombre du rocher au milieu des eaux. […] Rienzi, en effet, jetait cette capitale dans sa propre démence ; quelques jours après l’assaut où les Colonne avaient péri, il conduisit son fils vers le bourbier rempli d’eau et de sang où le corps du plus jeune de ces princes gisait encore. Il prit cette eau sanglante et fétide dans le creux de sa main, et il en aspergea la tête de son fils en le proclamant chevalier de la Victoire.
et que ta mémoire S’enfonce avec la vie au cœur de cette eau noire ! […] Sa main n’écarta pas son long manteau de deuil Pour puiser l’eau bénite au bord de l’urne sainte. […] Ou t’en vas-tu si belle, à l’heure du silence, Tomber comme une perle au sein profond des eaux ? […] Lisez au début la comparaison sublime entre Rolla, qui n’a que trois ans à vivre avant son suicide calculé à jour fixe, et entre la cavale du désert qui n’a que trois jours à marcher sans eau dans le sable avant de mourir aussi de soif. […] Crois-tu donc que je sois comme le vent d’automne, Qui se nourrit de pleurs jusque sur un tombeau, Et pour qui la douleur n’est qu’une goutte d’eau ?
On sait la vie qu’ils y menèrent, et quels charmants contes pour rire et pour aimer naquirent de leurs loisirs d’été à l’ombre des arbres, au gazouillement des eaux et aux roucoulements des colombes. […] Est-ce que je ne fais pas bien chanter mes gouttes d’eau dans mon bassin de mousse, pour attirer le rossignol nocturne, qui vient boire ce ses mélodies dans ma source, sous les pervenches du jardin ? […] En se confondant par petits bouquets avec les prairies à mi-côte, il forme une espèce de golfe herbeux, où la pente naturelle amène et recueille ses eaux. […] Mais l’extrême fraîcheur de ces feuilles, éternellement trempées dans le froid et dans l’eau de cette grotte d’ombre, empêche de s’y arrêter longtemps ; un petit sentier humide conduit en quelques pas à une halte, aussi ombragée, mais moins ténébreuse. […] Une eau mystérieuse a baigné vos genoux !
Il me suffit de recueillir l’eau sortie du vase plein et de la peser, pour savoir d’avance le poids qu’a perdu le corps plongé. […] Chez l’enfant, grâce aux noms appris et compris, la même perception évoque en outre le mot eau ; la même image évoque en outre le mot froid, et les deux mots eau, froid, associés entre eux par contagion, font un second couple surajouté. […] L’enfant a d’abord prononcé que toutes les eaux sont froides ; s’il met les doigts dans une bouilloire retirée du feu, il se déjuge et n’attribue plus la froideur qu’à l’eau prise à certaine température. […] Par exemple, voici deux vases dans chacun desquels il y a six litres d’eau ; je verse trois litres d’eau dans le premier et trois litres d’eau dans le second ; je mesure ensuite les deux quantités d’eau ainsi accrues et je trouve que dans chaque vase il y a neuf litres d’eau. Je retire alors cinq litres d’eau du premier vase et cinq litres d’eau du second, puis je mesure les deux quantités d’eau ainsi diminuées, et je trouve que dans chaque vase il reste quatre litres d’eau. — Chacun de ces cas est une expérience.
L’esprit, subitement peuplé de leur foule remuante, ressemble à une boîte de rotifères desséchés, inertes depuis dix ans, et qui, tout d’un coup, saupoudrés d’eau, recommencent à vivre et à fourmiller. […] À la feuille des annonces, je vois l’indication d’un dépôt d’eaux minérales, avec les noms des pharmaciens qui les vendaient dans les principales villes de France. […] Tout était expliqué ; ma mémoire, excellente pour les mots, gardait le souvenir de ces noms associés, sur lesquels mes yeux avaient dû se porter, alors que je cherchais (et cela avait eu lieu deux mois auparavant) un dépôt d’eaux minérales. […] Par exemple, quand, après avoir revu la ligne serpentine du sentier, je m’imagine tournant la tête à gauche, je revois le lac ardoisé et sa broderie de paillettes luisantes, au-delà les montagnes en pyramides qui descendent toutes vertes jusque dans l’eau ; en effet, le bord extrême de la côte confine au lac, la surface uniforme est rayée de franges brillantes, l’autre côté de l’eau rejoint les verdures et les coteaux qui montent ; ainsi, la fin de chaque image coïncide avec le commencement de l’autre, et partant l’autre entre en résurrection quand la première disparaît. […] Ainsi, la mémoire humaine est un vaste bassin où l’expérience journalière déverse incessamment divers ruisseaux d’eaux tièdes ; ces eaux plus légères restent à la surface, recouvrant les autres ; puis, refroidies à leur tour, elles descendent au fond par portions et par degrés, et c’est l’afflux ultérieur qui fait la nouvelle superficie.
. — Au fil de l’eau (1877). — Poèmes de Paris (1880). — Poésies d’Albert Mérat (1898). […] Emmanuel Des Essarts Par ce volume excellent (Au fil de l’eau) comme par l’ensemble de son œuvre, Albert Mérat a conquis sa place au premier rang des jeunes poètes. […] Mérat a publié les Chimères, les Villes de marbre, que l’Académie française orna de son vert laurier, Au fil de l’eau et les Poèmes de Paris.
Dans le premier il y avait de l’eau ; dans le dernier aussi, mais rien dans celui du milieu. […] Grand trou, creusé en entonnoir et peu profond, destiné à recevoir les eaux de pluie ou à atteindre une nappe d’eau peu éloignée.
Le tonneau sans fond qu’elles ne peuvent remplir est l’image de la plaine d’Argos qui, sous l’ardeur du soleil, absorbe incessamment l’eau que les pluies versent à son sol aride. […] brise l’ennemi. — Au souffle de tes narines, les eaux se sont amoncelées. — L’ennemi disait : Je poursuivrai, j’atteindrai, je partagerai le butin, et mon âme s’en assouvira. — Tu as soufflé de ton haleine, la mer les a couverts : comme le plomb, ils se sont enfoncés dans les eaux profondes. » — Et les filles de Danaos leur répondent d’une mer à l’autre : — « Ô Zeus ! […] Marchez, misérables, et en suite à travers l’eau salée ! […] Qu’est-ce pour lui que ce Zeus grec né d’hier, auprès d’Ammon-Ra, l’Éternel qui vogue sur les eaux célestes, « debout dans la barque des millions d’années », entouré des quatre grands Singes en prière, et ceint des anneaux du serpent Mehem ? […] Elles reviennent ensuite à la source sombre qui leur filtre cette eau plus vaine que celle que boit le désert ; et la procession désolée tourne dans ce circuit éternel.
Berkeley j’eusse tenté moi-même quelques expériences, on ne savait pas même combien de temps des graines pouvaient résister à l’action nuisible de l’eau de mer. […] Cette idée me conduisit à faire sécher des tiges et des branches de 94 plantes, portant toutes des fruits mûrs, et je les plaçai ensuite sur de l’eau de mer. […] Les poissons d’eau douce avalent les graines de beaucoup de plantes terrestres ou aquatiques ; ces poissons sont fréquemment dévorés par des oiseaux ; des graines peuvent ainsi être transportées d’un endroit à un autre. […] On peut dire que les eaux de la vie ont coulé pendant une courte période à la fois du nord et du sud vers l’équateur où elles se sont croisées ; mais elles ont coulé avec plus de force du nord, de manière à inonder le sud. […] L’entassement des matières éjectées aurait depuis fait émerger d’endroit en endroit une île de lave, bâtie sur les flancs d’autres roches cachées sous les eaux, comme les îles de corail se sont elles-mêmes élevées sur ces cratères à fleur d’eau.
Ils sont le verre d’eau à la fleur d’orange qu’on boit, le soir, après les karricks indiens et le porto gingembre d’un dîner vif. Ce n’est qu’un verre d’eau, mais qui a des qualités d’eau et qui vient à temps. […] Il tourne au gris-poussière, et encore la poussière qui est naïvement de la poussière, comme de l’eau est de l’eau : je ne la méprise pas, mais je hais la poussière des affectations.
Ils passaient et repassaient au-dessus de l’eau, la femelle conduisant toujours le mâle qui reproduisait, après elle, toutes les capricieuses sinuosités de son vol. […] L’eau devenait plus profonde en même temps que la fange de son lit ; je redoublai de prudence, et je pus enfin atteindre le bord. […] En automne, au moment où des milliers d’oiseaux fuient le nord et se rapprochent du soleil, laissez votre barque effleurer l’eau du Mississipi. […] Les canards de toute espèce, les poules d’eau, les outardes fuient par bataillons serrés, que le cours de l’eau emporte ; proies que l’aigle dédaigne, et que ce mépris sauve de la mort. […] Mais alors son ennemi craint encore qu’il n’aille tomber dans l’eau du fleuve.
L’eau est claire d’une clarté légèrement savonneuse, et la terre est l’amie des essences rares, des arbustes à fleurs, des arbres au feuillage pourpre, au feuillage panaché, et cette verdure et cette floraison poussent dans l’eau. […] Des reflets de cette étendue immense d’eau, comme des reflets d’un miroir frappé de soleil, la rive, les arbres, la villa, sont tout brillantés des éclairs d’une lumière courante. […] Et tout en humant l’eau odorante, il s’échappe à dire : « Au fait, je me suis procuré un beau morceau de jade ! […] C’est, comme si j’allais en un rêve, conduit par mon frère sur une eau morte, dans un paysage de l’autre monde. […] J’emporte de là une sécheresse de bouche, que l’eau de mer d’une douzaine d’huîtres peut seule rafraîchir.
Brizeux aima mieux toute sa vie se soumettre à bien des gênes que de prendre sur son cours d’eau poétique un filet suffisant pour faire tourner quotidiennement le moulin. […] Voici de lui un tout petit couplet, un air détaché qui est aussi daté de Grenade et qui fait songer : J’ai laissé de mon sein de neige Tomber un œillet rouge à l’eau.. […] Des orangers, des cyprès sont plantés sur chaque bord… La perspective est terminée par une galerie-portique à jets d’eau, à colonnes de marbre, comme le patio des myrtes de l’Alhambra. Le canal fait un coude, et vous pénétrez dans d’autres enceintes ornées de pièces d’eau et dont les murs conservent des traces de fresques du xvie siècle… Au milieu d’un de ces bassins s’épanouit, comme une immense corbeille, un gigantesque laurier-rose d’un éclat et d’une beauté incomparables. […] Ses belles fleurs jaillissaient avec toute l’ardeur du désir vers la pure lumière du ciel ; ses nobles feuilles, taillées tout exprès par la nature pour couronner la gloire, lavées par la bruine des jets d’eau, étincelaient comme des émeraudes au soleil.
Il y en a de grands de l’autre côté de l’eau. […] On l’humecte d’eau rose la première fois, pour ôter la senteur de la terre, et puis on le pend à l’air, plein d’eau et un linge mouillé autour. […] Il y a en cette ville quantité de profondes caves, où le peuple va puiser l’eau à boire. […] L’eau en est aussi fraîche quand on la tire que celle qui est à la glace. […] Un canal d’eau claire, qui en fait le tour, sort d’un bassin d’eau qui est à l’entrée, et se rend dans un autre qui est au bout.
Il le prend avec sa trompe et, au moment de le tuer, la gratitude de l’eau, du sable, des branches d’arbres, le sauve, et l’éléphant le rejette à l’eau. […] Ce sont ces deux fameux robinets d’eau froide et d’eau chaude, dans une cuvette d’un coin de la chambre, qu’on est dans l’impossibilité de déplacer, et qui est de la plus grande incommodité, pour se laver ; et c’est cet éclairage au gaz, placé au milieu de la pièce, qui ne vous permet pas de lire au lit, près duquel il n’y a ni bougeoir, ni allumettes ; et c’est le service des domestiques, qui ne brossent jamais les habits. […] Là-dessus, la comtesse montait en voiture, se faisait conduire au bord de la Seine, et jetait la pierre à l’eau. […] L’arrangement accepté, voici un plongeur, sous son scaphandre, au fond du lac, un plongeur qui reste sous l’eau cinq heures, s’il vous plaît… J’avais été convoqué, et j’ai pu le photographier, au moment où il sortait de l’eau, avec des objets détachés du bateau. […] Peut-être déjà souffrant du foie, et buveur d’eau de Vichy, était-ce un commencement de fatigue cérébrale ?
ô douces veillées Dont les images mouillées Flottent dans l’eau de nos yeux ! […] Les bras tendus vers vous, je crois vous ressaisir, Comme on croit dans les eaux embrasser des visages Dont le miroir trompeur réfléchit les images, Mais glace le baiser aux lèvres du désir. […] Je l’aspirais comme des lèvres qui se collent à l’embouchure d’une fontaine d’eau pure ; je lui tendais mes deux mains ouvertes, mes doigts élargis, comme un mendiant qu’on a fait entrer au foyer d’hiver, et qui prend, comme on dit ici, un air de feu. […] Les arbres et les murs, oui ; cela ne change pas de place ; mais les hommes, non : cela va, cela vient, aujourd’hui ici, demain là ; cela court comme de l’eau, cela change comme le vent ; à moins de les voir, on ne sait pas à qui l’on parle, et je ne les vois plus. […] Je marchai vers la fosse avec eux, et je jetai à mon tour les gouttes d’eau, image des gouttes de larmes, sur le cercueil de la jeune fille, et je rentrai sans avoir osé regarder le pauvre père !
L’eau était trop profonde. […] Il court après tous les oiseaux qu’il trouve sur son chemin. — La mère alla à l’église, la fille se mit en chemin, jusqu’à ce que, au bord de l’eau, un pêcheur, le pêcheur de son père elle trouva. « Ô pêcheur, dit-elle, pêcheur, pêcheur de mon père, pêche donc une fois pour moi, tu en seras récompensé. — Il jeta ses filets dans l’eau, les plombs touchaient le fond. […] Apportez de l’eau de rose Aussi de l’eau-de-vie, Ô beau rossignolet, Apportez de l’eau de rose Aussi de l’eau-de-vie.
Ils les nomment : la chose, l’être, la créature de brousse (kongomorho bambara, moutâné ndâzi) l’homme de l’eau (moutâné rouha), le maître de l’eau (diandiam en peuhl)70. […] Guinné de la terre et des profondeurs souterraines, guinné de l’air, guinné du feu, guinné de l’eau. […] Il y a même de ces villages au fond de l’eau pour les guilo-guina et les faro83. […] Les faro rongent certaines parties du corps des gens qu’elles ont entraînés au fond de l’eau. […] Génie de l’eau.
Avec quelle transparente harmonie ces nymphes rieuses et dansantes répètent les bruits et simulent les tournoiements des eaux vives ! […] Toutes les divinités des eaux douces venaient se fondre, comme des affluents, dans l’immense famille des Océanides. […] Aussi conçoit-on moins ces nymphes secourables sous la figure de femmes incarnées que sous celle des formes flottantes qui se modèlent vaguement sous les eaux. […] C’était une sorte de Roi-Fainéant des eaux, relégué aux confins du monde, dans les brumes d’un pôle inconnu. […] Elle évitera ses eaux irritables, et tournera vers le Caucase, dont ses bonds enjamberont les cimes.
À l’ordinaire, c’est-à-dire quand le bâton est tout entier dans l’air ou dans l’eau, si une moitié des rayons est infléchie par rapport à l’autre, le bâton est effectivement courbé ; mais ce n’est là que l’ordinaire. […] -H… étant hypnotisé, on plaça devant lui un verre d’eau pure qu’on l’amena à prendre pour du brandy. Il le loua comme excellent — cette eau avait bien pour lui le goût du brandy — et il en demanda d’autre tout en buvant avec avidité. — Dans un second cas, J. K…, étant dans le même état anormal, fut invité à boire un peu d’eau fraîche, et tandis qu’il obéissait, l’opérateur en but un peu lui-même qu’il cracha aussitôt en employant une expression de dégoût et d’horreur. Immédiatement cet acte suggéra fortement au sujet que l’eau était mauvaise ou même empoisonnée, si bien que dans cette persuasion il la rejeta avec horreur… » — Même illusion quand l’image suggérée est celle d’une sensation de tact.
Témoin ces vers datés de la roche d’Onelle, qui se rapportent à l’automne de 1832 : Les siècles ont creusé dans la roche vieillie Des creux où vont dormir des gouttes d’eau de pluie, Et l’oiseau voyageur, qui s’y pose le soir, Plonge son bec avide en ce pur réservoir. Ici je viens pleurer sur la roche d’Onelle De mon premier amour l’illusion cruelle ; Ici mon cœur souffrant en pleurs vient s’épancher… Mes pleurs vont s’amasser dans le creux du rocher… Si vous passez ici, colombes passagères, Gardez-vous de ces eaux : les larmes sont amères. […] Lui, dont l’instinct est d’aller, d’errer, de poursuivre l’infini dans les souffles, dans les murmures des vents et des eaux, dans les odeurs germinales et les parfums ; lui qui dira, en projetant des voyages : « Il y aura du charme à errer. […] La nature est fraîche, rayonnante ; là terre semble savourer avec volupté l’eau qui lui apporte la vie. […] C’est dans l’application seulement que Guérin se trouve en défaut comme nous-même nous avons pu l’être, mais il l’est plus qu’il ne le faudrait et beaucoup trop ; il s’en remet surtout trop au hasard, et l’on peut dire de lui ce qu’il dit d’un autre de ses amis, que cela s’en va de chez lui comme l’eau d’une fontaine.
Le poëte est en voyage : un soir, plus triste que de coutume, plus en proie aux pensées du doute et du mal, il monte au haut d’un de ces beffrois lugubres qu’il aime ; il y voit l’énorme cloche immobile, sommeillante, ou plutôt vibrante encore d’une vibration obscure, murmurante de je ne sais quelle confuse rumeur : Car même en sommeillant, sans souffle et sans clartés, Toujours le volcan fume et la cloche soupire ; Toujours de cet airain la prière transpire, Et l’on n’endort pas plus la cloche aux sons pieux Que l’eau sur l’Océan ou le vent dans les cieux ! […] Dans la pièce xxxiii, sur une vue d’église le soir, il montre l’orgue silencieux : La main n’était plus là qui, vivante et jetant Le bruit par tous les pores, Tout à l’heure pressait le clavier palpitant Plein de notes sonores, Et les faisait jaillir sous son doigt souverain Qui se crispe et s’allonge, Et ruisseler le long des grands tubes d’airain Comme l’eau d’une éponge. Qu’on me démontre, tant qu’on le voudra, l’exactitude de la comparaison, et l’harmonie coulant le long des tuyaux, comme ferait l’eau d’une éponge dans un lavage général de l’orgue, l’impression que j’en éprouve est déplaisante, désobligeante ; et, loin de l’augmenter, elle amoindrit tout l’effet des beaux vers précédents, effet déjà compromis par ce doigt qui se crispe et s’allonge. […] En lisant cela, l’esprit n’a pas eu le temps de se détacher de ce mot si rude, cramponner, qu’il lui faut déjà passer à ce qu’il y a de plus fluide et mobile, à la goutte d’eau qui tremble au bout de la branche. […] qui plus haut, nous l’avons vu, lui a fait comparer l’harmonie de l’orgue à l’eau d’une éponge, et parler du sourire fatal de la résignation à propos de Pétrarque, lui a inspiré d’introduire dans la composition de son volume deux couleurs qui se heurtent, deux encens qui se repoussent.
Au nord, l’Océan bat les falaises blanchâtres ou noie les terres plates ; les coups de ce bélier monotone qui heurte obstinément la grève, l’entassement de ces eaux stériles qui assiègent l’embouchure des fleuves, la joie des vagues indomptées qui s’entre-choquent follement sur la plaine sans limites, font descendre au fond du coeur des émotions tragiques ; la mer est un hôte disproportionné et sauvage dont le voisinage laisse toujours dans l’homme un fond d’inquiétude et d’accablement. — En avançant vers l’est, vous rencontrez la grasse Flandre, antique nourrice de la vie corporelle, ses plaines immenses toutes regorgeantes d’une abondance grossière, ses prairies peuplées de troupeaux couchés qui ruminent, ses larges fleuves qui tournoient paisiblement à pleins bords sous les bateaux chargés, ses nuages noirâtres tachés de blancheurs éclatantes qui abattent incessamment leurs averses sur la verdure, son ciel changeant, plein de violents contrastes, et qui répand une beauté poétique sur sa lourde fécondité. — Au sortir de ce grand potager, le Rhin apparaît, et l’on remonte vers la France. Le magnifique fleuve déploie le cortège de ses eaux bleues entre deux rangées de montagnes aussi nobles que lui ; leurs cimes s’allongent par étages jusqu’au bout de l’horizon dont la ceinture lumineuse les accueille et les relie ; le soleil pose une splendeur sereine sur leurs vieux flancs tailladés, sur leur dôme de forêts toujours vivantes ; le soir, ces grandes images flottent dans des ondulations d’or et de pourpre, et le fleuve couché dans la brume ressemble à un roi heureux et pacifique qui, avant de s’endormir, rassemble autour de lui les plis dorés de son manteau. […] Une raie de peupliers solitaires au bout d’un champ grisâtre, un bouleau frêle qui tremble dans une clairière de genêts, l’éclair passager d’un ruisseau à travers les lentilles d’eau qui l’obstruent, la teinte délicate dont l’éloignement revêt quelque bois écarté, voilà les beautés de notre paysage ; il paraît plat aux yeux qui se sont reposés sur la noble architecture des montagnes méridionales, ou qui se sont nourris de la verdure surabondante et de la végétation héroïque du nord ; les grandes lignes, les fortes couleurs y manquent ; mais les contours sinueux, les nuances légères, toutes les grâces fuyantes y viennent amuser l’agile esprit qui les contemple, le toucher parfois, sans l’exalter ni l’accabler. — Si vous entrez plus avant dans la vraie Champagne, ces sources de poésie s’appauvrissent et s’affinent encore. […] Ils écrivent sans images ni figures, aisément, tranquillement, avec la suite d’une eau claire et coulante. […] Vous êtes remonté à la source de l’esprit gaulois ; vous y avez vu le grand réservoir primitif d’où tous les courants sortent, et vous avez trouvé que l’eau est la même dans le réservoir et dans les courants.
Dans son Histoire des Français et dans son Histoire des Républiques d’Italie, Sismondi est froid comme l’eau des glaciers de la Suisse, dont il n’a pas la pureté, mais, après tout, c’est une grande masse de faits comme l’eau des glaciers est une grande masse d’eau. […] Sismondi ne fut point, lui, amoureux de Madame de Staël, mais, quand il mettait la tête hors de ses livres comme une carpe met la sienne hors de l’eau, il l’admirait naïvement et passait sa vie à l’entendre.
En effet, on en a grand besoin ; mais je t’avouerai que c’est la dernière chose à laquelle on pense : de l’eau, de l’eau, de l’eau fraîche, voilà ce qu’on cherche ! […] Après avoir fait un bon souper du reste de notre mouton d’El-Arich, après nous être bien couchés sur nos tartelettes de lit, après nous être laissé aller au plus délicieux sommeil, tout à coup nous nous réveillons flottants et soulevés par l’eau ; un orage affreux venait d’éclater, et, dans quelques minutes, le lieu charmant que nous avions choisi, maigre quelques charognes qui en faisaient l’ornement, se transforma en une espèce de naumachie, de laquelle nous sommes sortis de nos personnes, mais laissant tous nos effets prenant une leçon de natation. […] Voyageur sincère, il est mobile ; il réfléchit comme une eau courante tout ce qu’il traverse. […] Un jour, dans une de ses courses en Algérie, il avait fait une première remarque : il lisait la Bible, et voyant une jeune femme arabe venir chercher de l’eau à un puit, il crut avoir sous les yeux la parfaite représentation de Rebecca à la fontaine, lorsque la fille de Bathuel, portant sa cruche sur son épaule gauche, la laissait glisser sur son bras droit pour donner à boire au serviteur d’Abraham : c’est ainsi du moins qu’il s’expliquait ce mouvement et ce jeu de scène. […] Quand même je saurais écrire, il me serait impossible de te donner une idée de tout ce que j’ai éprouvé dans cette grande boîte à quintessence de mort, lançant de toutes parts sur l’eau ses mille langues de feu et obscurcissant le beau ciel bleu d’Orient par des tourbillons de fumée… Chère Louise !
Les seaux d’eau dont les cochers lavent les voitures dans les cours, prennent pour moi des bruissements et des fraîcheurs de jets d’eau de l’Alhambra. […] L’estomac semble dégager la pensée, comme ces plantes qui suent instantanément par les feuilles, l’eau dont on a arrosé leur terreau. […] L’eau me semble rouler la flore de l’Orient et l’Orient même. […] Ce soir, au bord de l’eau, la crécelle lointaine des rainettes ; par instants, le cri guttural du tire-arache dans les roseaux ; un poisson qui saute ; des arbres qui font dans le ciel une ombre mouillée comme dans l’eau, et dans toute cette nature, la paix de la nuit, de la mort. […] Il a ajouté que dans l’Asie Mineure, pays de hautes montagnes et de plaines inondées une partie de l’année, il existe un brouillard opalisé, dans lequel les couleurs baignent et scintillent comme dans une évaporation d’eau de perle, leur donnant l’harmonie la plus chatoyante… Bref, une poétique palette des Mille et Un Jours.
Cela fait, il se livre à sa sensation ; il exprime comme s’il était seul ; il en jouit ; sa pensée atteint d’elle même au style le plus noble ; et, pour en peindre l’élan, l’ampleur et la magnificence, il faudrait la comparer à quelque eau impétueuse qui tout à la fois monte, bouillonne et resplendit. […] Le mammifère jeté dans l’air respire par des poumons que l’air vient baigner ; les branchies du poisson montent dans sa tête, vont toucher l’oxygène dans l’eau qui le contient, et se munissent d’ouïes pour rejeter cette eau inutile ; le poulet renfermé dans l’œuf respire, par les vaisseaux de l’allantoïde, l’air qui traverse la coquille poreuse ; le fœtus du mammifère reçoit l’air par la communication des vaisseaux de sa mère et des siens. […] Certaines larves de diptères respirent l’air par des tubes, et leurs nymphes devenues aquatiques respirent l’air de l’eau par des faisceaux de branchies attachés au thorax. […] Nous avons ainsi transformé la multitude disséminée des faits en une hiérarchie de propositions, dont la première, créatrice universelle, engendre un groupe de propositions subordonnées, qui, à leur tour, produisent chacune un nouveau groupe, et ainsi de suite, jusqu’à ce qu’apparaissent les détails multipliés et les faits particuliers de l’observation sensible, comme on voit dans un jet d’eau la gerbe du sommet s’étaler sur le premier plateau, tomber sur les assises par des flots chaque fois plus nombreux, et descendre d’étage en étage, jusqu’à ce qu’enfin ses eaux s’amassent dans le dernier bassin, où nos doigts les touchent.
Cet Auteur, qui passoit la plus grande partie de son temps au cabaret, avoit tant d'aversion pour l'eau, que, pour marquer le peu de cas qu'il faisoit d'un homme dont il avoit à se plaindre, je te méprise, lui disoit-il dans sa colere, comme un verre d'eau.
C’est un délicieux bosquet de haute verdure, sillonné par d’abondantes eaux qui sortent en partie d’un grand bassin rond, de construction antique (Aïn-Medawara). […] A l’autre extrémité de la plaine (toujours en suivant la mer), on rencontre un emplacement de ville (Khan-Minyeh), de très belles eaux (Aïn-et-Tin), un joli chemin, étroit et profond, taillé dans le roc, que certainement Jésus a souvent suivi, et qui sert de passage entre la plaine de Génésareth et le talus septentrional du lac. À un quart d’heure de là, on traverse une petite rivière d’eau salée (Aïn-Tabiga), sortant de terre par plusieurs larges sources à quelques pas du lac, et s’y jetant au milieu d’un épais fourré de verdure. […] Mais les eaux sont toujours légères et transparentes 404. […] Les eaux, d’un azur céleste, profondément encaissées entre des roches brûlantes, semblent, quand on les regarde du haut des montagnes de Safed, occuper le fond d’une coupe d’or.
L’eau était débordée et toutes les barques cachées. […] Tu peux t’en convaincre toi-même: l’eau est débordée et le courant est très-fort. […] Hagene restait toujours de ce côté-ci de l’eau. […] Hagene reconnut à cela qu’il n’y avait pas à éviter le sort qu’avaient prédit les sauvages femmes des eaux. […] De toutes parts le sang des guerriers morts coulait par les ouvertures et par les trous destinés à dégager les eaux.
Il éblouit beaucoup les yeux, il dit peu de chose au cœur, à moins qu’il ne soit prière et qu’il ne fonde en larmes comme la nuée éclatante fond en eau, comme David fondait en gémissements sur sa couche de cendres. […] Entre les racines gonflées de siècles de ce hêtre, un puits naturel, dont on pouvait toucher l’eau avec la main, paraissait dormir sous un nuage de feuilles mortes, tombées du hêtre sur son orifice. […] À travers le rideau léger de leurs troncs à peine festonnés de feuilles basses, on voyait luire au soleil, en bas, l’eau dormante et argentée de l’étang. […] la jeune servante qui porte l’eau et la cuvette dans les chambres des étrangers ? […] C’est là qu’étaient creusés de larges lavoirs où coulait avec abondance une eau pure propre à nettoyer les vêtements, même les plus souillés.
Là, des eaux captives ou détournées de leur cours, ne jaillissant que pour croupir ; des dieux pétrifiés ; des arbres transplantés de leur sol natal, arrachés de leur climat, privés même de leur forme, de leurs fruits, et forcés de subir les grotesques caprices de la serpe et du cordeau ; partout enfin l’ordre naturel contrarié, interverti, bouleversé, détruit. […] Les gouttes d’eau suivent leur pente et font des fleuves, qui feront des mers ; les semences choisissent leur terrain et produisent une forêt. […] Il existe certaines eaux qui, si vous y plongez une fleur, un fruit, un oiseau, ne vous les rendent, au bout de quelque temps, que revêtus d’une épaisse croûte de pierre, sous laquelle on devine encore, il est vrai, leur forme primitive, mais le parfum, la saveur, la vie, ont disparu.
Les colombes qui boivent ses eaux, ont toujours des œufs dans leur nid, et les fleurs qui croissent sur ses bords, toujours des boutons sur leur tige. Il était convenable que la sainte des forêts fît des miracles doux comme les mousses qu’elle habite, charmants comme les eaux qui la voilent. […] Le prêtre célébra la messe des naufragés, et les matelots suspendirent leurs habits trempés d’eau de mer, en ex voto, aux murs de la chapelle.
Le génie riche, léger et naturellement éloquent d’Horace, est en effet ce qu’il y a de plus attique dans les écrivains romains : l’eau pure de la source se reconnaît jusque dans l’égout. […] Quant au vin, il le chantait, mais il ne le buvait pas depuis longtemps ; l’eau limpide de la source, rafraîchie par la neige du mont Lucrétile, était sa seule boisson. […] dit-il : un domaine rustique d’une étendue aussi bornée que mes désirs, une source d’eau vive auprès de la maison, un toit ombragé par un petit bocage. […] Il ne mangeait que du pain bis, de petits poissons, des fromages battus du lait de ses vaches, des figues vertes des deux saisons ; il ne buvait qu’un vin ordinaire trempé d’eau. […] Une source assez abondante pour former un ruisseau et lui donner son nom coule, aussi fraîche, aussi limpide que l’Hèbre qui baigne la Thrace ; son eau est salutaire à la tête, salutaire à l’estomac.
Ces seigneurs et ces dames parées qui passent leur vie à représenter ne se trouvent à leur aise qu’entre des panneaux sculptés, devant des glaces resplendissantes ; s’ils mettent le pied par terre, c’est sur des allées ratissées ; s’ils souffrent les bois et les eaux, ce sont des eaux lancées en gerbes par des monstres d’airain ; ce sont des bois alignés en charmilles. […] Descendons d’un degré ; un nouveau monde paraît, encore plus simple et plus calme, celui des plantes, des pierres, des nuages, des eaux, de toutes les choses qui semblent inanimées. […] Nous n’avons plus dans l’esprit de forme précise dont nous souhaitions l’accomplissement, ou dont nous redoutions la gêne ; nous nous laissons vivre ; nous nous trouvons à l’aise ; nous sommes comme au bord d’un fleuve, occupés à suivre les petits flots qui se dressent et luisent, contents de suivre leurs teintes verdâtres, de voir l’eau transparente regorger et s’étaler sur la grève où elle aboutit. […] Un amas de remarques s’assemblent en lui sans qu’il le veuille et forment une impression unique, comme des eaux accourant de toutes parts s’engorgent dans un réservoir d’où elles vont partir pour un autre voyage et par d’autres canaux. […] Ils vont en troupe à une source profonde pour laper avec leurs langues étroites la surface de l’eau noire, vomissant le sang du meurtre ; leur coeur ne tremble point dans leurs poitrine, et leur ventre chargé de viande gémit. — (Chant XVI, 15.)
Le bargello rentra dans son greffe, et sa femme, survenant à son tour, m’enseigna complaisamment tout ce que j’avais à faire dans la maison : à aider le cuisinier dans les cuisines, à tirer de l’eau au puits, à balayer les escaliers et la cour, à nourrir les deux gros dogues qui grondaient aux deux portes, à jeter du grain aux colombes, à faire les parts justes de pain, de soupe et d’eau aux prisonniers, même à porter trois fois par jour une écuelle de lait à la captive de la deuxième loge pour l’aider à mieux nourrir son enfant, qu’elle ne suffisait pas à allaiter par suite du chagrin qui la consumait, la pauvre jeune mère ! […] Quand l’enfant, sans soupçon, fut assis par terre, occupé à tresser sa première natte, j’ouvris la seconde porte donnant sur la cour du cloître, une corbeille de criblure de froment à la main pour les ramiers, et je me dirigeai vers le puits, pour tirer l’eau dans les auges et pour en remplir les cruches des prisonniers. […] Mes yeux se voilaient, mes tempes battaient, des gouttes de sueur froide suintaient de mon front ; quand je fus à une enjambée ou deux de la lucarne ferrée, au fond de laquelle j’allais apercevoir celui qu’ils appelaient le meurtrier, mes jambes refusèrent tout à fait de faire un dernier pas, mes mains froides s’ouvrirent d’elles-mêmes, le trousseau de clefs d’un côté, la cruche pleine d’eau de l’autre, tombèrent à la fois sur les dalles, et je tombai moi-même contre la muraille, entre le trousseau sonore et la cruche d’eau cassée. […] Je ramassai les clefs, je balayai les tessons de la cruche dans la cour, et je revins sur mes pas, comme si j’allais chercher un autre vase pour porter son eau au meurtrier. […] CCX Pendant que j’entendais sans lever la tête de dessus le pavé, que je faisais semblant de laver avec mon eau et mon éponge, Dieu sait ce que je pensais en moi-même de la justice des homme qui voit le crime et qui ne lit pas dans les cœurs.
Nous avions besoin d’un verre d’eau fraîche. […] Or, dans mon pays, tout à côté du sien, quand le cidre, notre hydromel de paysans, a été coupé avec de l’eau et qu’il n’a plus sa franchise et sa vaillance première ; quand son ambre pâli ne pétille plus, on ne l’appelle pas encore « du petit baire », ce dernier des noms et cette dernière des nuances, mais on dit : « c’est du mitoyen. » Eh bien ! […] Il a été coupé avec de l’eau de Seine, — et précisément avec celle-là qui passe sous le pont des Arts — et bien en face de l’Institut ! […] Il tremble que la civilisation ne passe son agréable rouleau sur la terre vierge et âpre de son pays, et il se jette tête baissée dans cette civilisation, absolument comme Gribouille se jette dans l’eau de peur de se mouiller. […] ou Le Bon Jésus allait sur l’eau, qui expriment plus de Bretagne, à elles seules, qu’il n’y en a dans beaucoup de ses descriptions où il s’est efforcé d’en mettre.
Hier on est venu s’informer, chez moi, si j’avais de l’eau à tous les étages. […] La mare d’Auteuil a son petit monticule défoncé par les charrettes, et ses ombrages gisent dans une eau souillée. […] Sous le ciel sans lune et sans gaz, la Seine roule une eau sombre, une eau de Phlégéton. […] Tout est contre nous ; si le froid et le bombardement continuent, il n’y aura pas d’eau pour éteindre les incendies. Toute l’eau, dans les maisons, est presque de la glace, jusqu’au coin de la cheminée.
L’art qui médite, qui édifie, qui vit en lui-même et dans son œuvre, l’art peut se représenter aux yeux par quelque château antique et vénérable que baigne un fleuve, par un monastère sur la rive, par un rocher immobile et majestueux ; mais, de chacun de ces rochers ou de ces châteaux, la vue, bien qu’immense, ne va pas à tous les autres points, et beaucoup de ces nobles monuments, de ces merveilleux paysages, s’ignorent en quelque sorte les uns les autres ; or la critique, dont la loi est la mobilité et la succession, circule comme le fleuve à leur base, les entoure, les baigne, les réfléchit dans ses eaux, et transporte avec facilité, de l’un à l’autre, le voyageur qui les veut connaître. […] on y puise à même de l’âme, pour ainsi dire, comme en une eau courante. […] Gautier, l’eau ne court que sous une surface glacée et miroitante au soleil ; il a trop oublié que lui-même, quelque part, a dit heureusement : Que votre poésie, aux vers calmes et frais, Soit pour les cœurs souffrants comme ces cours d’eau vive Où vont boire les cerfs dans l’ombre des forêts.
. — Sur l’eau (1888). — Le Rosier de Madame Husson (1888). — La Main gauche (1889). — Fort comme la mort (1889). — L’Inutile Beauté (1890). — Notre cœur (1890). — La Vie errante (1890). — Musotte (1891). […] Ce sont en effet des vers, d’excellents vers que ceux d’Au bord de l’eau et de Vénus rustique, d’une allure aisée, construits solidement et exactement rimés ; mais ce ne sont point des vers de poète.
Elle était sans feu, sans pain, sans eau pour boire, couchée sur du chanvre et des pommes de terre qu’elle tenait là pour les préserver de la gelée. […] Je trouve si peu de chose à dire de mes jours, qui se ressemblent souvent comme des gouttes d’eau, que je n’en dis rien. […] Nous avons un lavoir, que tu n’as pas vu, à la Moulinasse, assez grand et plein d’eau, qui embellit cet enfoncement et attire les oiseaux qui aiment le frais pour chanter. […] Tout est plein pour nous d’une merveilleuse bonté ; vois la rose qui, après avoir donné du miel à l’abeille, un baume à l’air, nous offre encore une eau si douce pour les yeux malades. […] C’est joli de laver, de voir passer des poissons, des flots, des brins d’herbe, des feuilles, des fleurs tombées, de suivre cela et je ne sais quoi au fil de l’eau.
Les deux fiancés m’avaient adossée sur mon séant contre le parapet du pont, à l’ombre, et ils me regardaient doucement avec de belle eau dans les yeux ; on voyait qu’ils attendaient, pour questionner, que je leur parlasse moi-même la première ; mais je n’osais pas seulement lever un regard sur tout ce beau monde pour lui dire le remercîment que je me sentais dans le cœur. […] — C’est la soif, disait le petit bouvier, en m’apportant une gorgée d’eau du Cerchio dans une feuille de muguet. […] C’était bientôt vu, monsieur ; en cinq pas, on faisait le tour de cette chambre haute, il n’y avait qu’une voûte de pierre blanchie à la chaux comme les murailles, un lit bien propre, une cruche de cuivre pleine d’eau claire et une chaise de bois, où le porte-clefs jetait sa veste et son trousseau de clefs, en se couchant. […] Il y a bien des innocents et des innocentes dans le nombre ; il ne faut pas leur tendre leur morceau de pain et leur verre d’eau au bout d’une barre de fer : il est assez amer sans cela le pain des prisons ; viens, mon garçon, que je te montre ton ouvrage de tous les jours, et que je t’apprenne ton métier. […] On ne voyait rien au fond de leur loge à demi obscure qu’un grabat, une cruche d’eau et une litière de paille fraîche semblable à celle que nous étendions dans l’étable sous nos chèvres.
Il n’y en a pas de plus unie, de plus bourgeoise : vie de célibataire rangé, casanier, dont les événements sont un voyage aux eaux ou un accès d’asthme. […] Cependant il n’ignora point tout à fait Les forêts, les eaux, les prairies, Mères des douces rêveries. […] Émule de Chapelain autant que de Malherbe, il s’éleva même jusqu’à l’ode, et lançant l’invective contre les Anglais forcenés, il prédit des batailles navales, des cadavres flottant sur les eaux, et les « baleines du Nord » courant en foule à cette proie. […] Sirop d’abricot, lait d’ânesse, tous les remèdes avaient été inutiles : on envoya Despréaux prendre les eaux de Bourbon, de juillet à septembre 1687. […] Bourdier s’étant retiré pour n’être pas témoin d’une entreprise aussi téméraire » ; l’éclatant monosyllabe qu’il articula en sortant de l’eau, et que jamais il ne put arriver depuis à faire sortir une seconde fois de son gosier ; enfin son retour à Paris, et toutes les recettes dont il essaye, sans confiance et jamais tout à fait sans espoir, tisane d’érysimum, grains de myrrhe transparente, et même simple eau de poulet, qui avait rendu la voix à un chantre de Notre-Dame : tout cela fait une comédie digne de Molière.
M. de Talleyrand allait ordinairement aux eaux tous les étés. […] Il écrivait, des eaux de Bourbon, à une amie de Paris, femme d’un de ses anciens collègues, ministre de Napoléon : « 10 juin (1827). « Les bains de Mme de Dino ont été retardés par les pluies, ce qui fait qu’elle a passé quatre ou cinq jours fort inutilement dans le plus vilain endroit du monde : elle n’a pu commencer son traitement d’eaux qu’hier. — Vous ne me mandez point de nouvelles, et je suis tout près de vous en remercier. […] — Il sort de ma chambre un buveur d’eau abîmé de rhumatismes et qui en conséquence voit tout en noir : le présent et l’avenir lui fournissent un beau champ qu’il exploite toute la journée. […] Il a fait un tel temps depuis quinze jours que je ne sais si les eaux m’ont fait du bien ou du mal. — Pauline37 a été mon seul plaisir.
L’eau que l’homme buvait, couché à plat ventre, sur la berge humide, il la rapporte maintenant du fleuve, dans l’amphore d’argile durcie à la chaleur d’un brasier. […] Pourquoi en parles-tu à l’Eau et à la Lumière ? […] Chez Hésiode, comme dans le Rig-Véda, le Soleil et l’Air, le Feu et l’Eau, la Foudre et les Vents transparaissent sous les noms sacrés qui les désignent, sans les personnifier tout à fait. […] Il ordonna à Héphestos de la pétrir avec de la terre et de l’eau, à l’image des plus belles déesses. […] Ses larmes viennent de la femme, comme l’eau de la nue.
Sur le devant, à terre, dans l’espace vide que laissent les figures, proche des pieds de la mère, une poule qui conduit ses poussins auxquels la petite fille jette du pain ; une terrine pleine d’eau, et sur le bord de la terrine, un poussin, le bec en l’air, pour laisser descendre dans son jabot l’eau qu’il a bue. […] C’est d’ailleurs un grand paysagiste, un grand peintre d’arbres, de forêts, d’eaux, de montagnes, de chaumières et d’animaux.
Les hommes sobres achètent une tranche de pastèque ou un gros concombre qu’ils mordent à belles dents comme une pomme. » Point d’ivrognes : ils sont grands buveurs, mais d’eau pure, « S’ils entrent dans un cabaret, c’est pour jaser » ; au café, « ils demandent une tasse de café d’un sou, un verre d’eau, du feu pour allumer leurs cigarettes, un journal et un jeu de dominos : voilà de quoi les occuper toute la journée ». […] Ils couchent sur un las de roseaux, se baignent tous les jours dans les froides eaux de l’Eurotas, mangent peu et vite, vivent plus mal à la ville qu’au camp ; c’est qu’un futur soldat doit s’endurcir. […] Il y a des divinités, notamment celles des eaux courantes, des bois et des montagnes, qui sont toujours restées transparentes. […] Là, toute la légende, toutes les cérémonies, tous les noms divins élevaient dans l’esprit un vague et grandiose souvenir des premières luttes et des premiers pas de la civilisation humaine ; dans le demi-jour du mythe, l’homme entrevoyait la lutte antique et féconde de l’eau, de la terre et du feu, la terre émergeant des eaux, devenant féconde, se couvrant de bonnes plantes, de grains et d’arbres nourriciers, se peuplant et s’humanisant sous la main des puissances secrètes qui entrechoquent les éléments sauvages, et peu à peu, à travers leur désordre, établissent l’ascendant de l’esprit. […] Un autre de ses plus vieux surnoms, Tritogénie, née des eaux, rappelait aussi qu’elle était née des eaux célestes, ou faisait penser au miroitement lumineux des flots.
Au milieu de ce chemin il y avait un lavoir plein de belle eau bleue et bordé de cinq ou six jeunes et belles filles de Milly. […] Voilà la mare creusée dans le roc vif au pied du toit pour recueillir l’eau des pluies et arroser le jardin l’été ! […] Nous buvions un peu d’eau fraîche, et nous nous reposions à notre aisance, car nous n’étions pas pressées, n’ayant que trois lieues à faire dans une longue journée. […] Il y avait une petite mare d’eau pleine d’herbes et de feuilles qui la tenaient chaude pendant l’hiver. […] Après une longue station au bord de l’eau, la petite fille nous conduisit sur la rive du bois, et un grand chêne qu’on appelle le chêne de Jocelyn, du nom du livre où ce poëme fut écrit.
Il reprend par sa belle vie le sens de la tradition ; il s’éprend naturellement de Racine et de Chénier ; il écrit d’admirables églogues d’une pureté classique ; il devient enfin, tous les jours, plus vigoureusement organisé. » L’heure de volupté s’écoule, insaisissable, Comme l’eau qu’illumine un long rayon du soir, Et mon âme, sachant que tout est périssable, Comprend la vanité même du désespoir… Le chant du rossignol module sa tristesse Et lui donne l’extase ardente du sanglot ; Car tous les bruits du soir ont accru son ivresse : Chants, feuillages froissés, vent sonore sur l’eau. […] Joseph-Marie Bosc, poète de la nature, très ému, très doux, très souple dont les vers sont pleins de parfums et d’eaux chantantes (Du Printemps aux Automnes), Roger Frêne (Paysages de l’Âme et de la Terre), Daniel Thaly (La Cité du Sud), Georges Gaudion (Des Petits Pas sur le sable) et Louis Estève. […] Hirsch a puisé dans une eau mélodieuse avec une coupe de pur cristal ». […] Dans le gris du ciel qui s’y reflète Ainsi qu’un arbre mort qui mire son squelette, Veux-tu que nous penchions notre aube sur cette eau ? […] À la corne d’un bois il a surpris les dieux Sylvestres épiant le sommeil des meunières Dont la gorge s’enflait sous les vertes lumières Que tamisait un arbre au bord courant des eaux.
Qu’on leur plonge la main dans l’eau, ils savent que c’est un liquide à cause de l’impression cutanée, mais en agitant la main ils n’éprouvent pas cette molle résistance qui fournit la notion de fluidité aqueuse, et ils ne savent s’ils se remuent dans l’air ou dans l’eau. […] Helmholtz distingue les couleurs successives suivantes : le rouge, l’orangé, le jaune d’or, le jaune pur, le jaune vert, le vert pur, le bleu vert, le bleu d’eau, le bleu cyanéen, l’indigo, le violet et l’ultraviolet. […] Landry, une surface polie d’une légère couche de talc, et qu’on engage une personne non prévenue à y promener la pulpe du doigt, elle croit toucher un corps gras ou huileux… » — Soit une table de marbre où l’on a semé des gouttes d’eau. […] Cela est si vrai que la main plongée dans l’eau ne perçoit point l’humidité, non plus que, plongée dans l’huile, elle ne perçoit l’oléagineux. En effet, les corps qu’une couche intermédiaire d’eau fait adhérer n’adhèrent plus quand ils sont plongés dans l’eau ; de même, des corps plongés dans l’huile… La peau peut recevoir des impressions par les deux faces, l’une superficielle, l’autre profonde.
Observez par exemple ce que désigne le mot eau ou le mot boire ; eau désigne un groupe de caractères qui se rencontre toujours le même dans une infinité de liquides, dans celui des puits, des fleuves, des sources, de la mer ; boire désigne un groupe de caractères qui se rencontre toujours le même dans une infinité d’actions, dans toutes celles par lesquelles un homme ou un animal fait couler un liquide dans sa bouche et dans son estomac. […] Le manuel qu’il livre aux commençants a mille pages, et il faudrait je ne sais combien d’atlas et de volumes pour contenir la figure et l’énumération de toutes les parties qu’à l’œil nu il a constatées. — S’il arme son œil du microscope, ce nombre se multiplie au centuple ; Lyonnet n’a pas eu trop de vingt ans pour décrire la chenille du saule. — Au-delà de notre microscope, des instruments plus puissants accroîtraient encore notre connaissance ; il est visible que dans cette voie la recherche n’a pas de terme. — Pareillement, voici un corps inorganique, de l’eau ; l’idée que j’en ai est celle d’un liquide, sans odeur ni couleur, transparent, bon à boire, qui peut devenir glace ou vapeur ; rien de plus ; du groupe énorme des caractères ou propriétés physiques et chimiques qui s’accompagnent et constituent l’eau, je ne sais pas autre chose. […] Au commencement du siècle, la découverte du potassium et du sodium a montré qu’au contact de certains métaux l’eau se décompose à froid ; c’était là un caractère nouveau. Si nous avions en main les corps simples inconnus que les raies du spectre nous indiquent aujourd’hui dans les étoiles, et si nous pouvions soumettre l’eau à leur action, très certainement l’eau manifesterait des propriétés inconnues qu’il faudrait ajouter à sa liste. — En attendant, pour tout objet, cette liste, en vain allongée, reste toujours ouverte ; et l’idée que nous avons d’une espèce, d’un genre, bref d’une file quelconque de caractères généraux, ne comprend jamais et ne peut jamais comprendre qu’un fragment limité de leur chaîne illimitée. […] Parmi les corps que nous examinons, il y en a qui nous semblent homogènes, c’est-à-dire composés de particules toutes parfaitement semblables, sauf la différence des emplacements qu’elles ont dans le corps ; tel est un litre d’eau bien pure, un morceau d’or affiné.
« Il trempe alors dans l’eau claire et glacée ses lèvres sèches, et il agite l’eau courante avec ses mains pour faire évaporer l’ardeur de ses veines, etc... » La forêt enchantée du Tasse, imitée de cette aventure de l’Arioste et d’abord imitée de Virgile, se rencontre merveilleusement racontée ici pour la première fois en italien moderne. […] « Dans ces doux entretiens, partout où un jeune arbre à la tige droite et élancée croissait au bord d’une source ou sur la rive d’un courant d’eau limpide, son écorce était à l’instant gravée avec l’aiguille d’Angélique ou avec le couteau de Médor. […] c’est bien cela, s’écria la charmante enfant, en applaudissant à ma critique ; il me semblait à chaque instant que le poète, en se moquant de lui et de moi, me jetait de l’eau tiède et de l’eau glacée dans le cœur ! […] Tout cet édifice, tous ces jardins, toutes ces eaux, tous ces murmures, rappelaient tellement les demeures enchantées où l’Arioste avait égaré nos imaginations depuis un mois de merveille en merveille, d’amour en amour, qu’en vérité je ne savais pas bien si j’étais dans le songe ou dans la réalité. « Adieu ! m’écriai-je tout bas, belle halte de ma jeunesse, où j’ai fait plus de rêves impossibles qu’il n’y a de stances dans le poète de Ferrare, d’étoiles dans cette voie lactée, de fleurs sur les orangers de la terrasse, de gouttes jaillissantes dans le bassin des trois jets d’eau !
C’est certainement un gentil motif d’idylle, charmant peut-être dans l’original, que celui qui se présente à nous, ainsi traduit : Mona Sur le bord de la rivière, les pieds dans l’eau, assise sur le gazon frais, un soir Mòna Daoulas était dans la prairie, sous les aulnes verts. […] Sur la branche un petit oiseau dit alors, par son chant : « Ne troublez pas l’eau, ô jeune fille, de cette façon, avec vos deux petits pieds ; Car je ne pourrai plus y voir mon image, ni davantage les étoiles du ciel : écoutez la prière d’un petit oiseau, ne troublez pas l’eau, la belle enfant ! » Monik répondit alors à l’oiseau qui lui parlait de la sorte : « Ne crains rien, l’eau troublée sans tarder redevient claire et limpide ; Mais hélas ! […] Siméon Pécontal, Aniel, qui se trouve dans son recueil de Ballades et Légendes ; la voici : Aniel baigne ses pieds, pensive, Aux bords d’un paisible ruisseau ; Un cygne, amant de cette rive, Lui dit : Pourquoi troubles-tu l’eau ?
Il faudrait « écurer le bié du moulin et la rivière dont les débordements gâtent la grande prairie, réparer les chaussées des deux étangs, réparer l’église qui est à la charge du seigneur, et dont les couvertures notamment sont dans un état affreux, les eaux pénétrant à travers la voûte », réparer les chemins qui sont aussi à la charge du seigneur, et qui pendant l’hiver sont dans un état déplorable. « Il paraît qu’on ne s’est jamais occupé du rétablissement et réparation de ces chemins. » Le sol de la terre de Blet est excellent, mais il faudrait des saignées et fossés pour l’écoulement des eaux, sans quoi les bas-fonds continueront à ne produire que des mauvaises herbes. […] Le château de Blet n’a pas été habité depuis 1748 ; aussi presque tous les meubles sont pourris et hors d’usage ; ils valaient 7 612 livres en 1748 ; ils ne sont plus estimés qu’à 1 000 livres. « Le moulin à eau occasionne presque autant de dépense qu’il produit de revenu. » — « On ne connaît point l’usage de la chaux pour l’engrais des terres labourables », et pourtant « dans le pays la chaux est à vil prix ». […] Le gruyer du seigneur juge de toutes les affaires concernant les eaux et forêts, usages, délits, pêche et chasse. […] « Madame Louise m’a souvent répété qu’à l’âge de douze ans elle n’avait point encore parcouru la totalité de son alphabet… Il s’agissait de décider irrévocablement si un oiseau d’eau était maigre ou gras.
Un grand silence règne dans leur enceinte où tout est paisible, l’air, les eaux et la lumière. […] Ils y coururent ; et après s’être désaltérés avec ses eaux plus claires que le cristal, ils cueillirent et mangèrent un peu de cresson qui croissait sur ses bords. […] Le bruit de ses eaux effraya Virginie ; elle n’osa y mettre les pieds, pour la passer à gué. […] Au pied du rocher est un enfoncement d’où sort une fontaine qui forme une petite flaque d’eau au milieu d’un pré d’herbe fine. […] Elle planta ce fruit sur le bord de cette flaque d’eau afin que l’arbre qu’il produirait servît un jour d’époque à la naissance de son fils.
EUGÈNE SCRIBE (Le Verre d’eau.) […] Il ouvrit la brèche dans Bertrand et Raton (novembre 1833), et récidiva avec plus ou moins de bonheur dans les quatre ou cinq pièces suivantes, et en particulier dans les Indépendants, dans la Calomnie, et l’autre soir en tout éclat dans le Verre d’eau. […] Mais plusieurs de nos remarques trouveront mieux place à propos du Verre d’eau, dont il est temps de dire quelque chose. Et d’abord, pourquoi le Verre d’eau ? […] Dans le drame politique qui se joue presque en regard du Verre d’eau, il y a de ces conditions réunies de tristesse et de contradictions en grand dont je parlais tout à l’heure, et qui seraient capables d’éclipser même la haute comédie.
Ainsi que l’a dit Victor Hugo, La fauvette à la tête blonde Dans la goutte d’eau boit un monde : Immensités ! […] L’art de l’homme, comme celui de la nature, consiste à mettre en effet dans la goutte d’eau un monde : la fauvette ne sentira que la fraîcheur vivifiante de la goutte d’eau, le philosophe et le savant apercevront dans la goutte d’eau les immensités. […] Hugo, et le mot a toujours servi ; de là l’impossibilité d’exprimer l’émotion. » — « Eh bien non, répond Guyau, et c’est là ce qu’il y a de désolant pour le poète, l’émotion la plus personnelle n’est pas si neuve ; au moins a-t-elle un fond éternel ; notre cœur même a déjà servi à la nature, comme son soleil, ses arbres ses eaux et ses parfums ; les amours de nos vierges ont trois cent mille ans, et la plus grande jeunesse que nous puissions espérer pour nous ou pour nos fils est semblable à celle du matin, à celle de la joyeuse aurore, dont le sourire est encadré dans le cercle sombre de la nuit : nuit et mort, ce sont les deux ressources de la nature pour se rajeunir à jamais. » La masse des sensations humaines et des sentiments simples est sensiblement la même à travers la durée et l’espace, mais ce qui s’accroît constamment et se modifie pour la société humaine, c’est la masse des idées et des connaissances, qui elles-mêmes réagissent sur les sentiments. « L’intelligence peut seule exprimer dans une œuvre extérieure le suc de la vie, faire servir notre passage ici-bas à quelque chose, nous assigner une fonction, un rôle, une œuvre très minime dont le résultat a pourtant chance de survivre à l’instant qui passe. […] Il y a de la poésie dans la rue par laquelle je passe tous les jours et dont j’ai, pour ainsi dire, compté chaque pavé, mais il est beaucoup plus difficile de me la faire sentir que celle d’une petite rue italienne ou espagnole, de quelque coin de pays exotique. » Il s’agit de rendre de la fraîcheur à des sensations fanées, « de trouver du nouveau dans ce qui est vieux comme la vie de tous les jours, de faire sortir l’imprévu de l’habituel ; » et pour cela le seul vrai moyen est d’approfondir le réel, d’aller par-delà les surfaces auxquelles s’arrêtent d’habitude nos regards, d’apercevoir quelque chose de nouveau là où tous avaient regardé auparavant. « La vie réelle et commune, c’est le rocher d’Aaron, rocher aride, qui fatigue le regard ; il y a pourtant un point où l’on peut, en frappant, faire jaillir une source fraîche, douce à la vue et aux membres, espoir de tout un peuple : il faut frapper à ce point, et non à côté ; il faut sentir le frisson de l’eau vive à travers la pierre dure et ingrate. » Guyau passe en revue et analyse finement les divers moyens d’échapper air trivial, d’embellir pour nous la réalité sans la fausser ; et ces moyens constituent « une sorte d’idéalisme à la disposition du naturalisme même ».
En hiver, c’est un autre supplice, le supplice de l’eau. […] L’eau ruisselle des murs, suinte des plafonds, des planchers. […] Il se demandait où pouvaient bien aller, sur leur pente ininterrompue, les eaux inquiètes. […] Une grande passion est une rosée d’eau lustrale. […] Et l’on n’a qu’à laisser tremper sa ligne au fil de l’eau.
Quoi qu’il en soit, il s’évade encore en accomplissant un acte de sauvetage sur un vaisseau de guerre ; puis, se laissant en apparence tomber à la mer et nageant entre deux eaux, il disparaît de nouveau. […] En revenant, il trouve la pauvre petite Cosette, fille de Fantine, que l’hôtesse impitoyable, la Thénardier, a envoyée chercher de l’eau dans un seau plus grand qu’elle, à la fontaine du bois, dans la nuit. […] Toussaint apportait les provisions, et Jean Valjean allait lui-même chercher l’eau à une prise d’eau qui était tout proche sur le boulevard. […] ne fût-ce que par l’identité de la loi, l’évolution de la comète dans le firmament au tournoiement de l’infusoire dans la goutte d’eau. […] On détruit l’effet de ce qu’on exagère : c’est le fleuve qui rejette son écume sur ses bords, pour que l’eau ne soit pas troublée ; qui peut accuser le fleuve de purifier l’écume ?
Il l’a purifié par ses rites, lavé du sang des victimes et des eaux lustrales ; Pallas, sa grande sœur, achèvera son œuvre. […] Déesse physique à sa plus lointaine origine, conçue par les eaux, montant avec elles vers l’éther qui les condense en vapeurs et les résout en orage, Pallas avait été d’abord l’Éclair qui fend le front nuageux du ciel. […] De l’air natal, elle gardait la chasteté vive et l’énergie fortifiante, la limpidité des eaux s’était fixée dans ses yeux brillants (Glaucopis). […] Poséidon frappa le roc de son trident, et le Cheval en bondit, né d’un grand flot d’eau marine dont il a l’encolure ondoyante et la blanche écume. […] Que Pallas décide et prononce, elles s’en remettent à son jugement. — Oreste parle à son tour, il a expié, il s’est purifié, l’eau lustrale a lavé son crime.
Vers la fin de votre campagne d’Italie, votre manchot (Baraguay d’Hilliers) vint me trouver, et me dit : “Je me fous de l’Italie, je me fous de la France, je me fous de vous, et je vais prendre les eaux, dont j’ai besoin ! […] On m’a couché sur un divan de la salle à manger, les jambes en l’air, on m’a jeté de l’eau de Cologne à la figure, la princesse m’a été chercher son éventail aux abeilles d’or — et je suis revenu. […] Je trouve le premier épisode : une halte de bohémiens dans un paysage vague, dont je prendrais l’eau, le ciel, les plantages, sur le bord de la Seine. […] Avec un pinceau écrasé et aux poils presque secs, il rend l’extrémité duveteuse de la plume, de la façon la plus extraordinaire, et modèle, avec des plans dans la demi-teinte, en un gris noyé dans l’eau, le plus savant et le plus moelleux dessin de nature de la poitrine de l’oiseau noir. […] Puis, quand le panneau a été ainsi préparé, ainsi avancé, ne voilà-t-il pas que notre peintre japonais s’est mis à le laver à grandes eaux, donnant, sur la tête colorée des oiseaux, de petits coups de pouce, amortissant, et ne laissant sur le papier que la vision effacée, de ce qui y était tout à l’heure.
Le vrai curare paraît conserver son activité d’une manière indéfinie, même à l’état de solution dans l’eau. […] Les infusoires libres et disséminés à la surface de la terre trouvent ces conditions dans les eaux où ils vivent. […] Ils y vivent comme les animaux aquatiques dans l’eau, et de même qu’il faut renouveler l’eau qui s’altère et perd ses éléments nutritifs, de même il faut renouveler, au moyen de la circulation, le sang qui perd son oxygène et se charge d’acide carbonique. […] Nous savons comment l’eau peut se faire ; mais pourquoi la combinaison d’un volume d’oxygène et de deux volumes d’hydrogène donne-t-elle de l’eau, nous n’en savons rien, nous ne pouvons pas le savoir, et nous ne devons pas le chercher. […] L’eau n’a apporté rien autre chose, ni force ni principe.
« Là où le pin élancé et le peuplier à l’écorce blanche aiment à entrelacer leur ombre propice sous leurs rameaux, là où la source vive et murmurante s’efforce de creuser un lit oblique à ses eaux légèrement agitées sur sa pente. […] « Il faudra les laisser, ces vastes et délicieux jardins, ce palais, cette maison des champs baignée par les eaux jaunissantes du Tibre ! […] « S’il lui plaît de s’étendre tantôt sous un vieux chêne, tantôt sur un moelleux gazon, les eaux profondes du fleuve roulent sous ses yeux entre leurs rives élevées, les oiseaux gazouillent dans les branches, les sources répandent, en murmurant, leurs eaux courantes et l’invitent par leur bruit monotone à de légers assoupissements ; mais quand la saison d’hiver ramène les pluies, les foudres et les neiges dans le ciel, il pousse, aux aboiements de sa meute de chiens, les féroces sangliers dans les toiles qu’il leur a tendues, ou bien, sur des baguettes invisibles, il tend le filet à larges mailles aux grives gourmandes qui viennent s’y abattre ; il prend au lacet le lièvre peureux ou la grue voyageuse, proie enviée de son foyer. […] L’eau vive, qui dans nos villes s’efforce de briser dans sa rapidité ses conduits de plomb, est-elle plus limpide que celle qui tremble et murmure ici entre ses rives inclinées ? […] Le petit billet suivant à son ami Bullatius, pour le détourner de longs voyages, est un véritable jet d’eau de proverbes jaillissant en vers d’une seule gerbe, plus sonores et plus étincelants que le cristal.
Ainsi David et les prophètes sont les poètes de l’aride et monotone Judée, ce rocher calciné des feux du soleil, où l’ombre du figuier et la goutte d’eau dans le creux du ravin sont les rêves des poètes et même des rois, et où l’âme, à défaut de la nature, s’entretient avec Dieu pour se consoler de la petitesse et de la stérilité de la terre. […] Il a promis à l’homme hébété de chiffres que l’association transformerait jusqu’à sa nature physique et jusqu’aux éléments immuables de la création : la terre, l’océan, l’air, l’eau, le feu, les planètes mêmes, ces écrins éclatants de Dieu. […] ta confidence aux nuits ; Tu n’as pas de secret pour mon âme, depuis Tes hurlements d’hiver dans le mât qui se brise, Jusqu’à la demi-voix de l’impalpable brise Qui sème, en imitant des bruissements d’eau, L’écume du granit en grains sur mon manteau. […] Sur les flancs calcinés de cette arène avare Le pain est graveleux, l’eau tiède, l’ombre rare ; Mais, fier de s’y tracer un sentier non frayé, Il regarde son ciel et dit : Je l’ai payé ! […] … Demandez-lui s’il pense, immergé dans l’eau vive, Ce qu’il pensait naguère accroupi sur la rive !
Depuis deux jours on vivait dans l’eau, on avait à peine mangé, à peine dormi, et la force des hommes diminuait. […] Prise d’une nausée abominable, Catherine avait craché l’eau qui lui restait à la bouche. […] … L’eau mouillait ses pieds. […] Elle avait de l’eau jusqu’au-dessus de la cheville. […] Maintenant elle avait de l’eau à mi-jambe.
On dirait avec Le Clerc De Montmercy, qui ne veut devoir l’aisance à personne : un grabat dans un grenier sous les tuiles, une cruche d’eau, un morceau de pain dur et moisi et des livres… et l’on suivrait la pente de son goût. […] Tenez, monsieur, vous ressemblez comme deux gouttes d’eau à un certain Christ de Brenet qui est maintenant au sallon… — Et l’autre tout courroucé : parlez donc, monsieur, est-ce que vous me prenez pour un jean-foutre ?
Tout à fait à droite et sur le devant, au milieu des eaux, le rocher auquel Andromède étoit attachée. […] Elle est sortie de l’eau. […] Les eaux du bain sont sur le devant. Et ces eaux peintes comme à l’ordinaire. […] Voyez ce vaisseau, il vient d’être lancé à l’eau ; et sa proue dorée sort de chez Guibert.
Le fleuve à grand bruit roule une eau rapide et jaune ; Le vent trempe en sifflant les brins d’herbe dans l’eau256. […] Une vapeur, une goutte d’eau, suffit pour le tuer. […] L’eau agitée n’était plus qu’un miroir trouble Sur lequel rien ne se reflétait nettement. Il attendit que l’eau se fût rendormie, N’osant bouger, Le cœur battant à grands coups. Et, à mesure que les rides de l’eau s’élargissaient et se mouraient, Il vit l’apparition se reformer.
Des poésies de l’époque des Thang, la philosophie épicurienne au bord des eaux, l’éternelle invitation à la tasse, font vaguement rêver à un Horace de Rotterdam. […] L’eau de la Seine va, une eau qui ne paraît pas aller ; elle est d’un vert décoloré, du vert neutre qu’ont les eaux aveugles dans un souterrain. […] Au-dessus de l’eau couleur d’étain, la perspective des deux ponts se rejoint et se perd dans un brouillard de pierres, dans une fumée de toits. […] Et je l’entends crier dans l’escalier : « Approchez donc un « verre d’eau à Monsieur ! […] Au loin, un ciel assombri sur une mer aux troubles clartés, laissées dans l’eau par le soleil disparu, et où des silhouettes de gros bateaux échoués mettent des souvenirs de naufrages.
Les chevaux, effrayés des salves de canon qu’on tirait par honneur, et aussi du bruit des eaux de l’écluse, se sont emportés. […] Le prince de Joinville allait étudier quelque invention de bateau à vapeur dont il s’occupe pour son métier de marin, et, une fois dans les eaux de la Tamise, ils ont été faire visite à la reine.
On peut aller sans peur vers Max Elskamp et accepter la corbeille de fruits qu’il nous offre dorée « par un printemps très doux », et boire au puits qu’il a creusé et d’où jaillissent « des eaux heureuses », des eaux fraîches et pleines d’amour.
L’eau qui est à gauche sur le devant n’a jamais été mieux imitée par personne, ni le fluide, ni l’herbe qui en sort. La nayade, statue mauvaise d’exécution, fait bien pour l’ordonnance, et se peint avec vérité dans le fond de l’eau.
Il donna à sa première épouse l’ordre de faire chauffer de l’eau pour ses ablutions. […] Il reste de l’eau là-bas.
Ils se retirent la nuit dans des tanières où ils vivent de pain noir, d’eau et de racines. […] Ici, dans quatre élections, « les habitants ne vivent presque que de sarrasin », et depuis cinq ans les pommes ayant manqué, ils n’ont que de l’eau pour boisson. […] Dans tel village de Normandie, presque tous les habitants, sans en excepter les fermiers et les propriétaires, mangent du pain d’orge et boivent de l’eau, vivent comme les plus malheureux des hommes, afin de subvenir au payement des impôts dont ils sont surchargés. » Dans la même province, à Forges, « bien des malheureux mangent du pain d’avoine, et d’autres du son mouillé, ce qui a causé la mort de plusieurs enfants630 ». […] Le peuple ressemble à un homme qui marcherait dans un étang, ayant de l’eau jusqu’à la bouche ; à la moindre dépression du sol, au moindre flot, il perd pied, enfonce et suffoque. En vain la charité ancienne et l’humanité nouvelle s’ingénient pour lui venir en aide : l’eau est trop haute.
L’égoïsme féroce du cruel compagnon de route et l’aumône d’un peu d’eau, payée d’un prix exorbitant. […] L’enfant promis à un génie (de l’eau dans la plupart des cas), promesse qui n’est pas tenue : Cf. […] La découverte d’une source là où ne la soupçonnaient pas les gens du village privé d’eau. […] : bruit de l’eau jetée à la volée et qui retombe dans l’eau = Floc ! […] : bruit d’un objet tombant dans l’eau et s’y engloutissant = Plouf ?
Joubert, aux épanchements d’une veine abondante et riche, les sautillements et les murmures d’un ruisseau : petits bruits, petits mouvements, très agréables sans doute quand il s’agit d’un filet d’eau resserré qui roule sur des cailloux, mais allure insupportable et fausse quand on l’attribue à une eau large, qui coule à plein canal sur un sable très fin. […] Tantôt au bord de l’eau, tantôt sous le feuillage, L’un chez l’autre étaient réunis. […] si tu pouvais passer l’eau ! […] Cela fait, et le bâtiment Mis à l’eau, le lapin entre tout doucement Dans le léger esquif, s’assied sur son derrière, Tandis que devant lui la sarcelle nageant Tire le brin de jonc, et s’en va dirigeant Cette nef à son cœur si chère.
Il admire également la clarté brillante d’un jour pur & serein, & les nuages orageux portés sur les aîles des tempêtes, & le calme auguste de la Nature qui se tait dans le fond des Forêts, & l’écho du Tonnerre qui du haut de son trône terrible & ténébreux, gronde avec majesté sous un Ciel déchiré par l’éclair, & le fleuve majestueux qui promenant lentement ses eaux, répete ses bords enchantés, & les vagues mugissantes qui frappent & blanchissent d’arides rochers de leur écume, & l’aspect magnifique d’un vaste & superbe Palais, & les débris antiques des colomnes renversées & rongées par la lime des tems. […] Assis sous un ombrage frais, couché près du cristal des eaux, tu souriois à la Nature, & la Nature te couronnoit de ses fleurs. Je ne t’oublirai pas énergique la Bruyere, toi qui portas une vûe si pénétrante dans les replis du cœur humain ; en apprenant à me connoître, j’apprendrai à pardonner aux hommes ; mais quand la nuit étendra ses voiles sombres, que les mortels fatigués se livreront au repos, au milieu du silence des nuits, tu m’entraineras hors des limites du monde, audacieux Milton, un voile impénétrable couvroit ta paupiere, mais ton œil intellectuel apperçut cet esprit qui porté sur les eaux appella l’Univers de l’abîme du néant. […] Je vois Tompson monté sur un Vaisseau prêt à fondre dans l’abîme ; il semble oublier le péril, il contemple les superbes images de cette horrible tempête, ce sombre effrayant qui colore la Nature attristée, & la lueur rapide des éclairs réfléchie sur les eaux ; passionné pour son Art, il s’écrie : O !
Piganiol de la Force remarque, d’après un autre écrivain aussi spirituel que lui, que le corps de ce ministre ambitieux est placé dans le même endroit où étoient auparavant les latrines du collège de Calvi : « Soit, dit-il, que la providence, qui gouverne tout, ait voulu humilier, après sa mort, un homme qui avoit joué un si grand rôle dans le monde ; soit qu’elle ait voulu confondre l’orgueil des hommes, en leur faisant voir où se terminent les honneurs qu’ils estiment le plus. » Corneille étoit de Rouen, fils d’un maître des eaux & forêts. […] Dont on n’a retenu que ces vers sur un quarré d’eau : La cane s’humecter de la bourbe de l’eau, D’une voix enrouée & d’un battement d’aîle, Animer le canard qui languit auprès d’elle.
Il incline vers l’eau morte du souvenir le songe mélancolique de ses yeux ; mais parfois, levant vers les horizons prochains sa jeune tète volontaire, il éperd des mots d’espoir, de matin et de soleil. […] Pilon parle de Toutes ces voiles qui s’étalent sur l’eau brune.
Il s’agit de façonner avec cette terre un objet creux qui retienne l’eau. […] Enfin, les eaux douces cèdent et fondent sous les baisers puissants des eaux amères : la boule berce l’accomplissement des noces. […] L’eau est également partout, et non pas seulement dans les liquides. […] Quintoa : L’Eau, de mer, milieu, organique, p. 445. […] Quintou, L’Eau de mer, milieu organique, p. 433.
L’eau presse de tous côtés les félons qui tramaient contre l’Église. […] Au bout de la rade coulait une eau brillante, jaillie d’une grotte entourée de peupliers. […] Elle ne l’arrosait jamais sinon d’eau de rose, ou de fleurs d’oranger, ou bien de ses larmes. […] Chat échaudé craint l’eau froide ! […] Il avait fini par agacer jusqu’aux cygnes d’une grande pièce d’eau.
Dans cette nature, la jeune poétesse entre pieds nus et prend un contact direct avec elle : L’herbe est froide à mes pieds comme de l’eau qui coule. […] Voici l’abeille, qui de « pollen empoussière ses bottes », tandis que « les branches d’un tilleul disent des messes basses » et que, des cloches de moutons « versent leurs eaux dolentes ». […] Elle-même ne veut rien connaître du monde, où « l’amour est cruel » ; elle veut « faire simplement son devoir d’eau courante ». […] Ce rebondissement de la dernière note simule bien la seconde d’arrêt, d’hésitation presque, de l’eau qui coule, et le tournoiement un peu saccadé de la roue qui reçoit ce halètement de la cascade. […] Il sait que Jésus, dont il envie Le pied fort et léger qui va serein sur les eaux, a marché sur la mer.
Avec la véritable méthode de faire toutes sortes d’eaux et de liqueurs, fortes, raffraichissantes, à la mode d’Italie. […] Pour le porteur d’eau : 5 s. […] » Samedi 15 septembre Une pauvre vieille sœur, très ingénue, est envoyée aux eaux de Bains, où les eaux se prennent dans une piscine. […] L’eau du fleuve, toute remuante, toute vagueuse, et où les lueurs d’émeraude et les lueurs de rubis des bateaux, semblent mettre les ondes bigarrées d’une étoffe zinzolin. […] Là, est son Vireloque, exécuté avec ce procédé d’un fusain fixé, lavé à grandes eaux colorées, et largement relevé de gouache : procédé donnant à une aquarelle, la solidité d’une peinture à l’huile.
L’asphalte brillant, lavé de lueurs fugaces et d’ombres allongées, ainsi que dans l’eau courante d’un fleuve. […] Mais d’aimables figures de cabaretiers, et une rivière à deux pas, avec de l’eau claire où l’on voit des poissons, — et tout proche la forêt. […] Je me sens le nuage qui passe, la feuille qui remue, l’eau qui coule. […] Deux fenêtres donnent sur la Seine, et laissent voir la grande eau et les bateaux qui passent. […] Dans le mouvement de son refus, un peu de l’eau de la tasse, choquée par lui, tomba sur sa tunique.
Triste vie et précaire, comme devant une bête de proie ; les Frisons, dans leurs lois antiques, parlent déjà de la ligue qu’ils ont fait ensemble contre « le féroce Océan. » Même pendant le calme, cette mer reste inclémente. « Devant les yeux s’étale le grand désert des eaux ; au-dessus voguent les nuées, ces grises et informes filles de l’air, qui de la mer avec leurs seaux de brouillards, puisent l’eau, la traînent à grand’peine, et la laissent retomber dans la mer, besogne triste, inutile et fastidieuse10. » « À plat ventre étendu, l’informe vent du nord, comme un vieillard grognon, babille d’une voix gémissante et mystérieuse, et raconte de folles histoires. » Pluie, vent et houle, il n’y a de place ici que pour les pensées sinistres ou mélancoliques. […] Ils allèrent vers la bauge, dans un endroit désert, refuge des loups, près des promontoires où le vent souffle, où « un torrent des montagnes se précipitant sous l’obscurité des collines, faisait un flux sous la terre. » « Les bois se tenant par leurs racines avançaient leur ombre au-dessus de l’eau. […] Chaque fois qu’il y pense, il la voit intérieurement, comme une rapide apparition lumineuse, et chaque fois sous une face nouvelle, tantôt ondulant sur les vagues limoneuses entre deux bandes « d’écume », tantôt allongeant sur l’eau son ombre énorme, noire, haute comme celle « d’un château, « tantôt enfermant dans ses « flancs caverneux » le fourmillement infini des animaux entassés. […] Sans compter les baies, golfes et canaux, la seizième partie du pays est occupée par les eaux. […] Monstres de l’eau.
Là, les pavés sont secs, les ruisseaux n’ont ni boue ni eau, l’herbe croît le long des murs. […] Entre ce hangar et la fenêtre de la cuisine se suspend le garde-manger, au-dessous duquel tombent les eaux grasses de l’évier. […] Çà et là, s’élèvent des masses de gravier sur lesquelles l’eau se brise en y formant des franges où reluit le soleil. Les amaryllis, le nénufar, le lis d’eau, les joncs, les flox, décorent les rives de leurs magnifiques tapisseries. […] Admirables prosateurs, détestables philosophes, préparant, pour désaltérer le peuple, non de l’eau salubre, mais de l’opium ivre de rêves et de convulsions !
Il a chanté le Bonnet à poil de Coppée, les Pieds de Péladan, le Rhum et eau de Verlaine, le monocle et les cigares de Moréas, la jaquette de du Plessys, le Geste de Laurent Tailhade, etc. […] J’ai vu partout, ses traits multipliés, À l’eau, à l’huile, à la cire, à la colle. […] Une trombe d’eau s’abat avec un bruit formidable.
Oui, dans ce Paris de 1891, au ciel inclément, dans ce Paris, dévasté de cyclones, où l’on gèle en mai ; et où l’excès de la sécheresse, en juin, force la municipalité à substituer, dans plusieurs arrondissements, l’eau de Seine à l’eau potable ; dans ce Paris, où les troubles atmosphériques semblent expliquer l’effervescence des esprits ; dans ce Paris, désemparé, en proie à la fièvre et aux orages politiques, aux rues barrées d’agents et encombrées de tumultueuses manifestations démagogiques ou chauvines, de cortèges de grèves incessants (garçons de cafés, employés d’omnibus et de chemin de fer) ; dans ce Paris, où l’année a commencé par l’exécution de Michel Eyraud et où chaque soir des camelots hurlent un crime retentissant (Assassinats de Cholet et de la petite Neut, affaires Bemicat, Souffrain, Doré et Berlant, Pezon, Sorré, de Moor. […] Dans l’autre cas, de l’eau sucrée avec du rhum, fruit quelquefois d’une contribution des camarades.
Qu’avais-je besoin de savoir leur nom et leurs affaires, moi, passeur d’eau ? […] L’officier de quart et les matelots ne disaient rien et regardaient comme moi l’ombre du brick sur l’eau. […] criait-elle ; et son ami s’appuyait sur elle, et se penchait, et ne regardait pas l’eau, parce qu’il la regardait d’un air tout attendri. […] Je fumai un cigare que je trouvais amer, et je le crachai dans l’eau. […] je l’aurais fait ; je me souciais de la vie comme de l’eau qui tombe là, tenez… Je m’en souciais bien !
L’eau me semble rouler la flore de l’Orient et l’Orient même. […] Et la description reprend : « Ce soir, au bord de l’eau, la crécelle lointaine des rainettes ; par instants, le cri guttural du tire-arache dans les roseaux ; un poisson qui saute ; des arbres qui font dans le ciel une ombre mouillée comme dans l’eau, et dans toute cette nature la paix de la nuit, de la mort. […] … Il s’agit bien de montrer ici un homme qui passe ; là un pâtre qui conduit ses bestiaux ; ailleurs un voyageur qui se repose ; en un autre endroit, un pêcheur, la ligne à la main et les yeux attachés sur les eaux ? […] Changement de couleurs aussi dans les tentures : on n’aime plus que les nuances tendres : le mauve, le vert d’eau, le jaune soufre, le rose passé plaisent aux regards raffinés par la délicatesse de leurs teintes. […] Mais, si l’on continue sa route, voici des allées sinueuses, des accidents de terrain, des eaux courantes, un joli petit lac dont les rivages capricieux sont ombragés de grands arbres, de jolis petits rochers tapissés de mousse, des montagnes de trente pieds de haut, une Suisse en miniature.
Puis, tout le monde se jeta à l’eau. […] L’orage avait donné à la campagne comme un premier coup meurtrier et les feuilles d’or les jonchaient, ces sillons trempés de cette eau irisée. […] Elle croit à la vertu des hommes, à la joie de la lumière, à l’éternelle beauté du ciel, des eaux et des fleurs. […] Le Braz : « Ma mère a vu la ville d’Is s’élever au-dessus des eaux. […] Ils se plurent en compagnie de Thaïs, de Paphnuce et de Nicias à regarder l’eau trouble du Nil et à déchiffrer des papyrus.
Celui-là, il se fâche, il a le hoquet, mais du moins ilparle ; il y en a qui, en s’efforçant de parler, ne réussissent qu’à suer sang et eau et à défaillir ; celui-ci, parexemple, que vous ne sauriez reconnaître, car il n’a quebien rarement donné : « Orateur prompt à se cabrer aumoindre bruit, sujet à voir ses pensées s’enfuir commeune volée d’oiseaux qu’un geste effarouche, et qui faitrage contre lui-même, mais en vain, d’être si malaguerri. Toute son énergie est dans la paume de sa main dont il frappe la tribune, afin de s’animer au monologue ; toute sa mémoire est au fond du verre d’eau sucrée. » Mais je crois que nous avons changé de tribune : nous sommes à la Chambre des Pairs ; une voix sourde se fait entendre (M. Portalis) ; le respectable orateur ne se fie pas, comme le précédent, au verre d’eau sucrée, souffleur trop souvent capricieux : « Il arrive toujours ayant à la bouche un commencement d’improvisation dont la suite est toujours sous son bras, dans de certains petits papiers dont il ne se sépare guère… » Et sur ces petits papiers, ô merveille ! […] Tout nous riait, les eaux, les bois, les moissons mûres… Est-ce moi qui passai par là ?
On a poétisé la vie de ce bourgeois de province, sensuel et flâneur, qui n’eut ni volonté, ni sens moral, ni énergie pour aucun devoir, qui ne sut faire ni sa charge de maître des eaux et forêts, ni sa fonction de chef de famille. […] Il goûte voluptueusement Les forêts, les eaux, les prairies, Mères des douces rêveries. […] Biographie : Né à Château-Thierry, le 8 juillet 1621, fils d’un maître des eaux et forêts, Jean de La Fontaine étudia à l’oratoire de Reims et à Saint-Magloire de Paris ; puis il vécut oisivement dans sa ville natale, parmi ses amis, Pintrel, traducteur de Sénèque, Maucroix, traducteur de Platon. En 1647, il se marie, et prend une charge de maître des eaux et forêts.
Ainsi, lorsqu’au sortir d’une scène d’orage, où il a secouru et longtemps veillé Julie évanouie, Raphaël nous décrit, au matin, l’abbaye de Hautecombe, avec son architecture vivante de ronces, de lierres flottants, de giroflées suspendues, de plantes grimpantes, avec son luxe de soleil, de parfums, de murmures, de saintes psalmodies des vents, des eaux, des oiseaux, des échos sonores…, quand il s’écrie : « La Nature est le grand prêtre, le grand décorateur, le grand poète sacré et le grand musicien de Dieu » ; il se sent obligé presque aussitôt de nous avertir qu’il n’a songé à tout cela que depuis : « Je n’étais pas, en ce moment, assez maître de mes pensées, dit-il, pour me rendre compte à moi-même de ces vagues réflexions. » Pourquoi donc alors venir nous en rendre compte avec ce double faste de métaphysique et de couleurs ? […] Car la poésie est l’essence des choses, et il faut bien se garder d’étendre la goutte d’essence dans une masse d’eau ou dans des flots de couleur. […] Et encore : Il y avait dans nos âmes assez de vie et assez d’amour pour animer toute cette nature, eaux, ciel, terre, rochers, arbres, cèdre et hysope, et pour leur faire rendre des soupirs, des ardeurs, des étreintes, des voix, des cris, des parfums, des flammes, etc., etc. […] Pour ne parler que littérature, dans toutes ces pages et dans cent autres, l’auteur abuse démesurément des harmonies, des images champêtres, de la verdure, des murmures et des eaux.
Il semble que, quand elle revient au logis du poète, elle pose sa cruche à côté d’un broc de clairet, un peu faible, mais savoureux, sentant fort son terroir, pas traître, sans ivresse profonde, sans bouquet complexe (en tout cas, c’est du vrai vin), que le poète a été chercher dans son cellier ; et il tend tour à tour à son lecteur le gobelet de vin et le verre d’eau. […] Il n’a tort que quand il coupe eau et vin, c’est alors d’un plaisir moins franc.
À gauche des chevaux sont abattus ; un guerrier renversé sur le visage a l’épaule traversée d’un javelot qui s’est rompu dans la blessure ; le sang ruisselle sur le cadavre, et sur la crinière blanche d’un cheval, et dégoutte de cette crinière dans les eaux du fleuve qui en sont ensanglantées. […] Cet homme traversé du javelot rompu dont le sang va mouiller la crinière blanche du cheval abattu et teindre les eaux, donne de la terreur.
Il a été écrivain d’instinct, naïvement, comme « de l’eau est de l’eau », dirait Diderot encore ; — il a été écrivain d’imagination et de sentiment comme on doit l’être quand on veut élargir sa renommée et donner au talent qu’on a l’air et l’espace, sans lesquels il n’est jamais qu’une fleur rare, dans un vase précieux, étiolée !
Le moi ne peut jamais avoir une connaissance du non-moi, sans être indissolublement uni au non-moi ; tout comme l’oxygène ne peut s’unir à l’hydrogène pour former de l’eau, sans se fondre ainsi que l’hydrogène dans un tertium quid. […] Il attribuerait le changement non à l’hydrogène, qui lui est nécessairement inconnu, mais à l’eau, la seule forme sous laquelle l’hydrogène lui est connu. Il trouverait dans sa conscience l’état nommé eau, qui serait fort différent de son état antérieur ; et il supposerait que cet état, si différent de l’état précédent, est une représentation de ce qui le cause. Nous pouvons donc dire : quoique dans le cas précédent, l’hydrogène ne puisse exister pour l’oxygène que dans l’identité des deux comme eau, ce n’est pas une preuve que l’hydrogène ne puisse exister dans d’autres rapports avec d’autres gaz. […] On connaissait beaucoup de faits comme ceux-ci : un mal de dent qui disparait quand on entre chez le dentiste ; prendre de l’eau en s’imaginant que c’est de l’émétique, et vomir, etc.
— La duchesse d’Orléans boit un verre d’eau et meurt : donc elle est morte de ce verre d’eau ; donc elle a été empoisonnée. — Pourquoi François Ier, pourquoi Louis XIV ont-ils à un certain moment changé leur politique, donné une direction imprévue aux affaires, commis des fautes qu’ils n’eussent pas dû commettre ? Michelet réduit toute la question au bulletin de leur santé : cause véritable, je le veux bien, mais non pas cause unique ni même cause dominante. — L’eau, pour le poisson, est une condition de l’existence : ce n’est pas la cause. — La biche que tue Ascagne au VIIe livre de l’Énéide est l’occasion, non la cause de la guerre entre les Troyens et les Rutules. — Enfin on connaît les abus fameux qu’on a faits des causes finales : Pourquoi l’homme a-t-il un nez ?
. — Il réclame l’hommage de la terre et de l’eau aux cités hellènes. — Réponse de Sparte et d’Athènes. […] » Son premier acte fut d’envoyer aux cités grecques des hérauts chargés de leur réclamer la poignée de terre et la cruche d’eau, hommage formel de vassalité, symbole parlant de la sujétion. […] Avec une de ces ironies littérales que l’antiquité appliquait souvent aux supplices, les Spartiates jetèrent dans un puits le héraut de Darius, en lui criant d’aller y prendre la terre et l’eau pour le roi.
Gœthe lui-même, le Gœthe de Werther et de Faust, est ressorti de ces eaux pétrifiantes en caillou, — pierre du Rhin, — de diamant qu’il était ; car le diamant, ce n’est pas une pierre, c’est une flamme ! […] L’auteur d’Impressions, au lieu de se plonger là où disparut Gœthe, a tâté l’eau, mais l’eau est implacable et elle l’a figé dans ses plis.
Mais si, tout bonnement, je me jette à l’eau sans avoir peur, je me soutiendrai d’abord sur l’eau tant bien que mal en me débattant contre elle, et peu à peu je m’adapterai à ce nouveau milieu, j’apprendrai à nager. […] Celui qui se jette à l’eau, n’ayant jamais connu que la résistance de la terre ferme, se noierait tout de suite s’il ne se débattait pas contre la fluidité du nouveau milieu ; force lui est de se cramponner à ce que l’eau lui présente encore, pour ainsi dire, de solidité. […] Entrez dans l’eau, et, quand vous saurez nager, vous comprendrez que le mécanisme de la natation se rattache à celui de la marche. […] De fait, quand je dis que mon eau placée sur mon réchaud va bouillir aujourd’hui comme elle faisait hier, et que cela est d’une absolue nécessité je sens confusément que mon imagination transporte le réchaud d’aujourd’hui sur celui d’hier, la casserole sur la casserole, l’eau sur l’eau, la durée qui s’écoule sur la durée qui s’écoule, et que le reste paraît dès lors devoir coïncider aussi, par la même raison qui fait que les troisièmes côtés de deux triangles qu’on superpose coïncident si les deux premiers coïncident déjà ensemble. […] L’opération consiste à se servir de l’énergie solaire pour fixer le carbone de l’acide carbonique, et, par là, à emmagasiner cette énergie comme on emmagasinerait celle d’un porteur d’eau en l’employant à remplir un réservoir surélevé : l’eau une fois montée pourra mettre en mouvement, comme on voudra et quand on voudra, un moulin ou une turbine.
Il y mit l’écho des houles, le mouvement des marées, le grand murmure des eaux marines. […] Il fournit des armes aux insurgents d’Amérique et fonde à Paris la Compagnie des Eaux. […] Sa barque descendit la Loire au fil de l’eau. […] Où est Anet aux belles eaux, et Clagny avec ses étangs ? […] L’eau des bassins verdie et calme s’attarde en un rêve miroitant.
Les courtisanes elles-mêmes ne se privaient pas de ces offrandes, et l’une d’elles, Calliclée, en se retirant, faisait comme Laïs, mais d’un air plus satisfait, et consacrait à Vénus ses instruments de toilette, devenus inutiles : « Cet Amour d’argent, une frange pour la cheville du pied, ce tour lesbien de cheveux foncés, une bandelette transparente pour soutenir le sein, ce miroir de bronze, ce large peigne de buis qui coule comme à pleine eau dans l’onde de la chevelure5, — voilà ce qu’ayant gagné ce qu’elle voulait, ô libérale Vénus, Calliclée vient déposer dans ton sanctuaire. » A côté de cela, une petite fille pieuse et fervente, — elle ou ses parents, — s’adressait à la déesse Rhéa pour obtenir d’arriver au seuil de l’hyménée dans toute sa fleur et sa fraîcheur : « Ô toi qui règnes sur le mont Dindyme et sur les crêtes de la Phrygie brûlante, Mère auguste des dieux, que par toi la petite Aristodice, la fille de Siléné, arrive fraîche et belle jusqu’à l’hyménée, jusqu’à la couche nuptiale, terme de sa vie de jeune fille ; elle le mérite pour avoir bien souvent, et dans le vestibule de ton temple et devant l’autel, agité çà et là (dans une sainte fureur) sa chevelure virginale ! […] Un voyageur altéré, Aristoclès, a bu avec plaisir de l’eau d’une source où se voyaient des statues de Nymphes, œuvre rustique des bergers ; reconnaissant, il offre aux Nymphes elles-mêmes la coupe dans laquelle il a bu, pour qu’elle serve aux autres passants qui auront soif comme lui : « Onde fraîche qui jaillis d’un double rocher ; salut ! […] l’eau chaude et vaseuse de ce ravin où paissent des brebis, mais va un peu au-delà du tertre où tu vois des génisses, et là, auprès d’un pin cher aux bergers, tu trouveras une eau murmurante jaillissant d’une roche et plus froide que les neiges du Nord. » Mais voici la plus belle épigramme pastorale de Léonidas, et, selon moi, son chef-d’œuvre ; c’est le testament bucolique, le souhait suprême d’un ancien berger : « Bergers qui menez paître sur la crête de cette montagne vos chèvres et vos brebis à longues laines, accordez à Clitagoras, de par la Terre, une grâce légère mais bien douce, faites-le par égard pour la souterraine Proserpine. […] Toutes corrections faites, voici l’ordre suivi dans cette exacte dévotion : il y a d’abord les statues en bois des Nymphes, puis les réservoirs qui forment bain pour y boire ; enfin le poète parle des statuettes plus petites (et comme des poupées), des Nymphes placées dans l’eau. » (Note de M.
Vous retournez la tête, et vous cherchez d’où vient le bruit qui vous frappe : c’est celui d’une large nappe d’eau qui tombe du sommet d’un des rochers que vous avez d’abord apperçus. On ne sait ce que deviennent ces eaux qui auraient dû inonder tout le devant de la scène, et vous arrêter dès le premier pas, mais n’importe. […] Près de ce vaisseau, une paysane assise, un bras appuyé sur les bords du vaisseau, tenant de cette main un instrument de laiterie, l’autre bras pendant et dans la main un pot plein de lait qui se répand, tandis que la paysane s’amuse à considérer les caresses de deux pigeons qu’un pâtre debout à côté d’elle lui montre sur une troisième fabrique de gros bois arrondis et formant une espèce de réservoir d’eau, une auge où un petit courant est dirigé par un canal qu’on voit par derrière. à gauche, du même côté sur le fond, c’est une espèce singulière de colombier imitant une grande cage en pain de sucre, avec des rebords et des ouvertures tout autour, et soutenue sur cinq ou six longues perches inclinées les unes vers les autres. […] Sur ce massif, c’est une cuvette soutenue par des enfans debout et dont les eaux sont reçues dans un bassin. […] Si j’allais plus loin, j’entrerais dans un bocage ; mais je suis arrêté par une large mare d’eaux qui me font sortir de la toile.
Je suis même moins choqué par le populaire de l’eau d’ânon que par microphotographie ou bio-bibliographie ; les deux mots par quoi les bonnes femmes s’expliquent à elles-mêmes le mystérieux laudanum ont au moins le mérite de leur sonorité française ; d’ailleurs laudanum n’est lui-même qu’une corruption dont il a été impossible d’analyser les éléments primitifs118. […] Le sens abstrait d’écoper dérive tout naturellement du sens concret primitif : la corvée de vider l’eau qui s’amasse au fond d’un bateau.
Les intransigeants, ou, si l’on veut, les prophètes d’aujourd’hui ne se nourrissent pas exclusivement de l’eau du Jourdain et des racines du Carmel. […] On l’avait baptisé dans l’eau lustrale où le Rédempteur a prétendu laver les péchés du monde. […] On ne fait guère plus de cas de ses semblables que des gouttes d’eau qui glissent en perles sur la feuille du lotus. […] Il aime à regarder les eaux, les arbres, les fleurs, « un petit bois au bord d’une onde pure », quelque « route fleurie ». […] On y trouve une infinité de choses qui furent longtemps séparées, et qu’associe notre soif d’impressions inédites et d’effets nouveaux : cierges d’églises et chandelles d’hôtels garnis, vases sacrés et vaisselle diabolique, eau bénite et eau de Chypre, encens, esbouquet, métaphysique fougueuse, insatiables péchés.
N’ayant pas construit les secondes, je ne sais pas tout ce qu’elles contiennent, et, au fragment que j’en possède, il me faut ajouter, par des découvertes ultérieures, tous les fragments que je ne possède pas. — Qu’est-ce que ce refroidissement de la vapeur d’eau ? […] D’où il suit que, passé une certaine période, le gaz, dont les molécules sont suffisamment rapprochées, doit devenir liquide, et que la vapeur d’eau doit devenir eau. Or on sait d’ailleurs par induction la limite où pour la vapeur d’eau finit cette période ; c’est tel degré du thermomètre pour telle quantité de vapeur d’eau suspendue dans l’air. […] Par exemple, le maximum de densité ou de rapprochement des molécules de l’eau est à + 4 degrés et non pas au-dessous. […] On a trouvé à Plombières, dans le béton sur lequel les Romains avaient bâti, des aiguilles de granit que depuis dix-huit cents ans l’infiltration des eaux y avaient formées. — M.
Telle chute d’eau a la force de mouvoir une roue et n’a pas la force de mouvoir une roue plus lourde ; Cela signifie que, les muscles du cheval étant contractés, le chariot de cinq mille kilogrammes avancera et l’autre chariot n’avancera pas ; que l’eau tombant sur les palettes la première roue tournera et la seconde ne tournera pas, Il n’y a là que des liaisons, l’une entre la contraction musculaire du cheval et le déplacement d’un chariot, l’autre entre la chute de l’eau et la révolution d’une roue. […] La force de la contraction musculaire est double, si le chariot traîné pèse dix mille kilogrammes au lieu de cinq mille ; la force de la chute d’eau est double, si la roue mise en révolution est deux fois plus pesante que la première.
Ce talent naturel comme la voix, n’allez pas croire pourtant que cette rêveuse, cette abandonnée, cette troublée qui jetait ses cris éloquents autour d’elle ou laissait tomber ses soupirs, chantât comme Ophélie entre le saule et l’eau : non ! […] Les ramiers s’en vont où l’été les emmène, L’eau court après l’eau qui fuit sans s’égarer, Le chêne grandit sous les bras du grand chêne, L’homme revient seul où son cœur le ramène, Où les vieux tombeaux l’attirent pour pleurer.
. — L’artiste initié au secret divin de l’art entend la voix de la nature qui raconte ses mystères infinis par les arbres, par les plantes, par les fleurs, par les eaux et par les montagnes. […] Sans doute tu n’as pas songé que les feuilles des tilleuls, que les pins, les platanes étaient plus conformes à la nature, que le fond était plus vaporeux, les eaux plus profondes ; mais l’esprit qui plane sur cet ensemble t’élevait dans une sphère dont l’éclat t’enivrait. » Or c’est précisément cet esprit d’ensemble qui respire dans les paysages de M.
Sans doute on peut écrire poto, rato, gato, morso, nivo, sous prétexte que dans ces mots le son final est rendu plus nettement et plus clairement par o que par eau. […] Il faut encore observer que le signe eau contient une force secrète rigoureusement attachée au groupe des trois lettres qui le déterminent ; il représente à la fois le son o et le son el 65.
Avec la foule des instruments qu’il a créés, l’homme sépare et façonne sans peine les bois, les métaux et les pierres ; avec les cabestans, les leviers et les roues, il soulève et transporte des fardeaux immenses ; avec le secours de l’eau, il communique un mouvement perpétuel et rapide à de vastes machines ; avec le secours de l’air, il fait moudre ses grains et mouvoir ses vaisseaux ; avec le secours du feu, il fait monter l’eau dans ses pompes, sépare les rochers, creuse les mines.
À peine un sentier pour se glisser à travers ces balayures des arts qui couvrent toute la terre ; et le fer de nos chevaux glissait et se brisait à chaque pas sur l’acanthe polie des corniches, ou sur le sein de neige d’un torse de femme : l’eau seule de la rivière de Balbek se faisant jour parmi ces lits de fragments, et lavant de son écume murmurante les brisures de ces marbres qui font obstacle à son cours. Au-delà de ces écumes de débris qui forment de véritables dunes de marbre, la colline de Balbek, plate-forme de mille pas de long, de sept cents pieds de large, toute bâtie de mains d’hommes, en pierres de taille, dont quelques-unes ont cinquante à soixante pieds de longueur sur vingt à vingt-deux d’élévation, mais la plupart de quinze à trente ; cette colline de granit taillé se présentait à nous, par son extrémité orientale, avec ses bases profondes et ses revêtements incommensurables, où trois morceaux de granit forment cent quatre-vingts pieds de développement, et près de quatre mille pieds de surface, avec les larges embouchures de ses voûtes souterraines où l’eau de la rivière s’engouffrait en bondissant, où le vent jetait avec l’eau des murmures semblables aux volées lointaines des grandes cloches de nos cathédrales. […] Le vent de sa chute arrivait jusqu’à nous en emportant comme de légers brouillards la fumée de l’eau à mille couleurs, la promenait çà et là sur toute la vallée ou la suspendait en rosée aux branches des arbustes et aux aspérités du roc. […] Ce spectacle nous saisit tellement d’abord que nous n’arrêtâmes nos regards sur aucun détail de la vallée ; mais quand le premier éblouissement fut passé et que notre œil put percer à travers la vapeur flottante du soir et des eaux, une scène d’une autre nature se déroula peu à peu devant nous. […] Pipe où le tabac passe dans l’eau avant d’arriver à la bouche.
aqua, eau. […] Et des plic-ploc solitaires d’opalins jets d’eau balsamyrrhée. […] — Enlever ou affaiblir avec de l’eau. […] Les blancheurs d’eau qui s’effilent en minces luisures sur les vitres des lampadaires. […] Cela institue d’immenses perspectives d’eau verte montuant sous un ciel froid.
Une nuit, il crut la voir en songe répandre une si grande quantité d’eau, que non-seulement elle inondait la ville où il faisait son séjour, mais qu’il lui sembla même que toute l’Asie en était couverte. […] Ils se lavent deux fois le jour dans l’eau froide et deux fois la nuit. […] Les gardes la suivirent, et, lorsqu’elle fut arrivée près du fleuve, ils virent qu’elle commença par faire boire son cheval, qu’après l’avoir abreuvé, elle remplit d’eau sa cruche, et qu’elle reprit le même chemin, portant l’eau sur sa tête, tirant après elle le cheval, dont elle repassa la bride dans son bras, et tournant son fuseau. […] Ils étaient chargés de se rendre près d’Amyntas et de lui demander, au nom de Darius, l’eau et la terre. […] « La députation, conduite en présence d’Amyntas, lui demanda la terre et l’eau pour Darius : Amyntas les donna, et invita ensuite les députés à recevoir chez lui l’hospitalité.
Depuis la Bible et Homère, quels noms n’a-t-on pas donné à cette rumeur des eaux ? […] Des bancs de brume voyagent, au ras des eaux, sur l’océan hyperborée. […] Il les suit, — jamais bien loin de l’eau, puisqu’un instinct les retient au bord. […] On lui trouve dans l’esprit le tour, le fond d’accent de ceux qui se gargarisent avec l’eau de la Garonne. […] L’eau très claire a ses gourmets.
Les déserts ont pris sous notre culte un caractère plus triste, plus grave, plus sublime ; le dôme des forêts s’est exhaussé ; les fleuves ont brisé leurs petites urnes, pour ne plus verser que les eaux de l’abîme du sommet des montagnes : le vrai Dieu, en rentrant dans ses œuvres, a donné son immensité à la nature. […] Des sylvains et des naïades peuvent frapper agréablement l’imagination, pourvu qu’ils ne soient pas sans cesse reproduits ; nous ne voulons point …… Chasser les Tritons de l’empire des eaux, Ôter à Pan sa flûte, aux Parques leurs ciseaux… Mais, enfin, qu’est-ce que tout cela laisse au fond de l’âme ?
De là souvent un peuple qui aime à rire ne voit que diable et qu’enfer. » Il se réservait pourtant de grands et sombres tableaux à retracer : « Lorsqu’il sera question des sacrifices humains, ne pas oublier ce que partout on a appelé les jugements de Dieu, les fers rouges, l’eau bouillante, les combats particuliers. […] Je veux qu’on imite les anciens, a-t-il écrit en tête d’un petit fragment du poème d’Oppien sur la Chasse 56 ; il ne fait pas autre chose ; il se reprend aux anciens de plus haut qu’on n’avait fait sous Racine et Boileau ; il y revient comme un jet d’eau à sa source, et par-delà le Louis XIV : sans trop s’en douter, et avec plus de goût, il tente de nouveau l’œuvre de Ronsard57. […] Son cadavre fût-il suspendu sur un abîme à la pointe d’un rocher ou enfoncé dans l’eau infecte d’un gouffre, il lui procurera un tombeau. » « Voici, ajoute-t-il, une chanson écrite sous le règne d’Yao, 2, 350 ans avant Jésus-Christ. […] Je bois l’eau de mon puits, je me nourris des fruits de mon champ. […] … L’autre a dit à sa sœur : Ma sœur, une fontaine Coule dans ce bosquet… (L’oie ni le canard n’en ont jamais souillé les eaux, ni leurs cris… Viens, nous y trouverons une boisson pure, et nous y baignerons notre tête et nos ailes, et mon bec ira polir ton plumage. — Elles vont, elles se promènent en roucoulant au bord de l’eau ; elles boivent, se baignent, mangent ; puis, sur un rameau, leurs becs s’entrelacent : elles se polissent leur plumage l’une à l’autre).
Le sentier ruisselait de verdure et d’eau vive, Tournait autour des houx que l’eau froide ravive ; Leurs grains rouges semblaient des grappes de corail. […] Cet escalier tournant qui descendait plus sombre, Les chants de ce bouvreuil dans ce bois effeuillé, Les eaux vives courant sur le caillou mouillé, Cette gorge sonore où la brise apaisée Accompagnait si bien le rêve ou la pensée, Cette marche en avant comme un pas aux combats, Ce haut isolement des tumultes d’en bas, Ce grand cloître des bois propice à la lecture Et la libre amitié dans la libre nature... […] L’eau qui pleure. […] Je travaillais, comme je fais aujourd’hui, d’un labeur mercenaire pour soutenir sur l’eau ceux qui périssaient de ma perte. […] Quoi qu’il en soit, ses grands yeux, d’un bleu sombre où l’azur et la nuit luttaient, sous de très longs cils, comme l’ombre du bord et le bleu du large sur la mer pour en nuancer l’éclat et la profondeur ; ses grands yeux, dis-je, ne pouvaient plus rien acquérir de plus achevé par les années (que des larmes peut-être) ; ils luisaient comme deux étoiles de première eau sous l’arc d’un front proéminent ; leur seule impression, c’était le génie.
Messieurs de l’Ordre Composite en philosophie, les Compliqués d’Hegel et de Strauss, de Condillac et d’Auguste Comte, les hommes du dédain transcendant, comme Renan, qui en est l’inventeur et le professeur, ou de la plaisanterie athée, comme Taine, sont bien capables de comparer à un verre d’eau ce livre d’une simplicité transparente et brillante à la fois, et qui ressemble vraiment à de l’eau de source, traversée par un rayon du jour ! Mais, pour notre part, nous remercions très fort Caro de ce verre d’eau, limpide et frais, qu’il nous donne, et dont nous avions un cruel besoin après ces effroyables boissons que nous avons, tout ce temps, été obligés d’absorber, et qui nous ont été versées par tant d’empoisonneurs contemporains !
On ruisselle toujours de l’eau dans laquelle on se plonge. […] Rien de moins difficile que de faire pleurer ; Excepté les larmes que l’admiration fait couler, excepté celles de César devant la statue d’Alexandre, je méprise assez cette eau qui coule et je la laisse couler… Saint Maur, qui est d’un naturel trop franc et trop à pleine main pour jamais rien affecter, tempère, sous le dictame de son esprit, les tristesses qui sont le fonds commun de la misérable nature humaine. […] … Corrégien de coloris, sanguin blond, qui peint rose plutôt qu’écarlate, il se tient dans un milieu d’art réfléchi, mais qui quelquefois pousse en haut et devient superbe, comme un jet d’eau ensoleillé jaillissant tout à coup d’une mer calme.
Il avait versé de l’eau dans ce vin de feu… Il avait glissé sur les mœurs de ce peuple si fièrement sérieux et si sombrement grave, avec la petite rose de la gaîté française à la bouche. […] Ce n’est guères que la langue de l’abbé Prévost, le verre d’eau claire qui ne se change point en vin et pour lequel il n’y a pas de noces de Cana. […] C’était, pour son talent, s’en aller en eau de boudin.
« Lorsqu’elles sont parvenues au lit merveilleux du fleuve, là où sont les lavoirs pour toute l’année et où surabonde une eau bonne à enlever toutes les souillures, elles détachent les mules et les chassent vers le fleuve impétueux pour s’y repaître d’une herbe savoureuse. Elles enlèvent ensuite du char sur leurs bras les vêtements, les plongent dans l’eau limpide et les foulent dans les réservoirs en luttant de vitesse. […] On rencontre encore dans nos îles et sur notre continent, près des sources ou des fleuves, ces fosses où l’eau se renouvelait, et où on venait fouler le linge sous les pieds. […] Cette espèce de danse que du temps des hommes primitifs les laveuses exécutaient dans les fosses limpides, devait être bien autrement gracieuse que leurs incommodes génuflexions d’aujourd’hui auprès d’une eau qui rougit leurs mains et leurs bras. […] Moïse, sauvé des eaux du Nil.
Voilà des années que les Bilboquets de la chimie et de la physique nous promettent, tous les matins, un miracle, un élément, un métal nouveau, prennent solennellement l’engagement de nous chauffer avec des ronds de cuivre dans de l’eau, de nous nourrir ou de nous tuer avec rien, de faire de nous tous des centenaires, etc., etc. […] Elle-même n’a nullement gardé rancune d’avoir été, sur les ordres de notre grand-père, plusieurs fois plongée dans la pièce d’eau, pour lui rafraîchir le sang, quand elle éprouvait la tentation de se marier. […] Il ne reste plus de la magnifique abbaye que de quoi faire la plus belle propriété mélancolique de France, soixante-dix arpents d’eau où se mirent des arbres centenaires renfermant, écroulées à leurs pieds, des pierres de taille à bâtir un petit Versailles. […] * * * — Vu, en allant à la Bibliothèque, un spectacle très humoristique, très fantaisiste : un gros chien de Terre-Neuve s’élançant avec des aboiements furieux contre un des jets d’eau de la Fontaine Louvois, et s’efforçant de le mordre, de le mettre en pièces, de l’étrangler, et revenant vingt fois, trente fois, avec des contorsions enragées et risibles contre le jet d’eau toujours jaillissant. […] Pas un palais, des fleurs, des eaux chantantes, un entour féerique, des peintures, des femmes nuagées de gaze : ce qui invitait, et qui conviait et qui allumait les sens de l’antiquité, tout cet art magnifique enfin, ouvrant la porte du lupanar romain.
Et la résolution allait être prise définitivement, et j’allais vous demander, ainsi qu’à Zola, la somme de 500 francs, lorsque dans un autre dîner chez Daudet, où se trouvait Porel, on parlait de la représentation du Théâtre-Français, tombée dans l’eau. […] Dans les derniers temps de sa vie, un jour Daudet lui contait ceci : passant sur la place du Carrousel, par une de ces journées d’août, où cette place a la chaleur torride du désert, il voyait, derrière une voiture d’arrosage, un papillon traverser toute la place, dans la fraîcheur de l’eau tombant en pluie, et Daudet s’extasiait sur l’intelligence de l’insecte, et le joli de la chose. […] Il m’examine, m’ausculte longuement, au bout de quoi, en dépit de mes convictions intimes, et de tout ce que je peux lui dire de mes maux, il m’affirme qu’il n’y a ni néphrétisme, ni hépatisme chez moi, que je suis un rhumatisant, un rhumatisant ayant un rhumatisme sur l’estomac, et qu’il me faut les eaux de Plombières. […] Et encore dans cette description, l’épithète glauque, appliquée à l’eau, cette vieille épithète si employée, devenue si commune, le fait s’écrier : « Est-ce assez précieux ! […] Je ne lui ferai pas l’injure de demander, qu’on le juge d’après son roman des Eaux printanières !
Selon lui, l’action du soleil sur la terre, alors couverte par les eaux, fit saillir des pellicules, matrices d’organismes imparfaits, qui plus tard, se développant par degrés, donnèrent naissance à toutes les espèces actuellement vivantes. Les ancêtres de l’homme furent des animaux aquatiques analogues aux poissons : ils habitaient les eaux bourbeuses et s’habituèrent lentement à vivre sur la terre ferme à mesure que le soleil la desséchait. […] Thalès remarque que les semences des êtres vivans sont humides ; il en conclut que l’eau, ou l’humide, est le principe universel. […] Ainsi le lion est le seul animal dont les petits naissent les yeux ouverts ; les poissons de mer ne se nourrissent pas de l’eau salée, mais de cette portion d’eau douce que l’eau salée renferme ; les chiennes et les truies n’ont tant de petits que parce qu’elles ont plusieurs matrices ; en Libye, où les ânes sont de très grande taille, ils ne couvrent jamais que des jumens rasées, de tous leurs crins, car si elles avaient encore cet ornement qui les pare si bien, elles ne recevraient pas de tels maris : curieuse intuition, pour le dire en passant, du principe de la sélection, sexuelle, dont Ch. […] Il admettra, par exemple, qu’en Libye, « où il ne pleut point, les animaux se rencontrent dans le petit nombre d’endroits où il y a de l’eau.
. — En chimie, tous les fondements de la science, l’oxygène, l’azote, l’hydrogène isolés, la composition de l’eau, la théorie de la combustion, la nomenclature chimique, l’analyse quantitative, l’indestructibilité de la matière et du poids, bref les découvertes de Scheele, de Priestley, de Cavendish et de Stahl, couronnées par la théorie et la langue définitives de Lavoisier. — En minéralogie, le goniomètre, la fixité des angles et les premières lois de dérivation par Romé de Lisle, puis la découverte des types et la déduction mathématique des formes secondaires par Haüy. — En géologie, les suites et la vérification de la théorie de Newton, la figure exacte de la terre, l’aplatissement des pôles, le renflement de l’équateur328, la cause et la loi des marées, la fluidité primitive de la planète, la persistance de la chaleur centrale ; puis, avec Buffon, Desmarets, Hutton, Werner, l’origine aqueuse ou ignée des roches, la stratification des terrains, la structure fossile des couches, le séjour prolongé et répété de la mer sur les continents, le lent dépôt des débris animaux et végétaux, la prodigieuse antiquité de la vie, les dénudations, les cassures, les transformations graduelles du relief terrestre329, et à la fin le tableau grandiose où Buffon trace en traits approximatifs l’histoire entière de notre globe, depuis le moment où il n’était qu’une masse de lave ardente jusqu’à l’époque où notre espèce, après tant d’autres espèces détruites ou survivantes, a pu l’habiter Sur cette science de la matière brute, on voit en même temps s’élever la science de la matière organisée. […] On pénètre dans le bas-fond du règne animal ; Réaumur publie ses admirables mémoires sur les insectes, et Lyonnet emploie vingt ans à figurer la chenille du saule ; Spallanzani ressuscite ses rotifères, Trembley découpe son polype d’eau douce, Needham fait apparaître ses infusoires. […] Qu’est-ce que le tracas de notre fourmilière à côté de cette tragédie minérale à laquelle nous n’avons pas assisté, combats de l’eau et du feu, épaississement de la croûte, formation de l’océan universel, construction et séparation des continents ? […] Depuis la fluidité ardente de la planète jusqu’à la chute des eaux vaporisées, trente-cinq mille ans.
Ainsi encore Taine, poursuivant la « philosophie de l’art » en différents pays, n’a garde d’oublier que les habitants y furent et y sont toujours façonnés par les mille influences de la terre, de l’eau, de l’air ambiants. […] Il est certain encore que le voisinage des fleuves endigués, régularisés, n’est plus aussi périlleux qu’il pouvait l’être lorsque les cours d’eau n’étaient, pour la plupart, que des torrents fangeux, s’étalant en nappes immenses après une pluie d’orage ou à la fonte des neiges. […] Elle a été le refuge des druides et la forteresse inexpugnable des Celtes ; fidèle à elle-même, elle se cramponne aujourd’hui d’une étreinte désespérée au catholicisme qui décline et à la monarchie qui s’en va ; et en même temps vaincue dans sa lutte contre les vagues, perdant chaque mois, presque chaque jour, quelques-uns des siens au milieu des écueils, elle a peur encore des sorciers et des korrigans ; elle est convaincue que tous les ans, à la Toussaint, les noyés remontent à la surface des eaux et pour rien au monde elle ne mettrait une barque à flot ce jour-là ; elle abonde en légendes tristes ; elle est pleine de fantômes vagabonds ; et par cela même elle a gardé une physionomie archaïque, qui, non seulement se reflète dans les œuvres de ses enfants, mais l’a rendue chère aux écrivains et aux artistes de notre siècle. […] Bernardin de Saint-Pierre, qui habita l’île de France, qui rêva d’aller établir une colonie en plein cœur de l’Asie, sur les bords de la mer d’Aral, avait à peine huit ans qu’il s’enfuyait de la maison paternelle pour vivre de racines et d’eau pure, comme les Pères du désert, dont il avait lu ou entendu lire les légendes.
Sur les deux bords, des êtres ondoyants et attentifs sont assis qui, une ligne à la main, essaient de capter dans l’eau ricaneuse le reflet fuyant et frémissant de l’ombre qu’ils sont. […] Mais elle retomba plus écrasée, murmurant : — L’eau du fleuve ne remonte pas vers sa source. […] Et le fantôme, branlant la tête, déclara : — Non, Léthé, toutes tes eaux ne suffiraient point à me faire oublier cette nuit désastreuse, cette nuit effroyable où, pendant que dormaient paisibles mes camarades d’École… Mais le démiurge ordonna sévèrement : — Tais-toi. Cette eau se traverse en silence.