Une race qui peut sentir, penser et s’exprimer avec cet accent, est vraiment digne d’échanger sa parole avec la parole surnaturelle et de converser avec son Créateur. […] Voilà pourquoi mes paroles sont grosses de gémissements. […] Est-ce Celui qui vous a donné la vie et la parole ? […] Si j’ai mal parlé, je n’ajouterai pas une parole à ma faute ! […] Mais à quoi sert la parole écrite, si ce n’est à révéler sa pensée ?
Les personnes qui rient de tout, et auprès desquelles un bon mot a toujours raison, se sont autorisées quelquefois d’une parole de Mme Cornuel sur Bourdaloue ; elle disait : « Le père Bourdaloue surfait dans la chaire, mais dans le confessionnal il donne à bon marché. » Ce n’est là qu’un joli mot de société. […] s’écriait-il, tandis que vous me confierez le ministère de votre sainte parole, je prêcherai ces deux vérités sans les séparer jamais : la première, que vous êtes un Dieu terrible dans vos jugements, et la seconde, que vous êtes le père des miséricordes et le Dieu de toute consolation. […] Ne le mettez pas à un si haut prix qu’ils n’aient pas de quoi l’acheter. » Bourdaloue, étudié dans le détail, offrirait le plus bel exemple de la parole chrétienne édifiante et convaincante, appliquée à tous les usages et distribuée comme le pain de chaque jour, depuis les sermons prêchés à la Cour ou sous les voûtes de Notre-Dame jusqu’aux simples exhortations pour les assemblées de charité. […] Mais il avait une trop haute idée de la parole chrétienne pour ne pas la préparer toujours à l’avance, sachant combien les termes en doivent être mesurés : il n’improvisait pas, il aimait mieux redire ses sermons, en y adaptant des portions nouvelles pour les circonstances particulières. […] Il avait eu le temps de voir les éclatants débuts de Massillon, et il les avait salués de cette parole prononcée pour la première fois par saint Jean-Baptiste, parole de précurseur où le vieil athlète vaincu disparaît dans le chrétien, et où la tristesse inévitable de celui qui finit se retourne en vœux et en bénédictions vers celui qui commence : « Illum oportet crescere, me autem minui… À lui désormais de grandir et de croître, à moi de m’effacer et de décliner !
Ne nous lassons pas de le revoir de près, cet homme le plus puissant par la parole, le plus véritablement éloquent que nous ayons eu dans notre langue ; ne cessons de lui accorder tout ce qui lui est dû, et cependant ne lui accordons pas toute chose. […] Bossuet, doué par la nature d’une parole puissante, abondante, qui se verse d’elle-même et tombe comme les fleuves « du sein de Jupiter », n’a pas besoin de chercher des idées si loin ni d’inventer un ordre de choses autre que celui qu’il trouve tout fait autour de lui. […] Ce soin de chercher, de s’ingénier, de creuser sans cesse, de prétendre reconstruire l’entendement humain de fond en comble, appartient surtout aux esprits tournés en dedans, à parole rentrée et difficile comme Hegel, à parole rare et dense comme Sieyès ou Spinoza. […] Bossuet, lui, n’eut jamais de ces ambitions ni de ces fièvres ; dans sa stalle ou dans sa chaire, assis, debout, il a cru et raisonné, jusque dans ses orages de parole, d’une manière tranquille, auguste, et en commandant à tous l’obéissance et la foi. […] Mais quelle rareté cependant, quelle bonne fortune unique de rencontrer un talent à la fois si élevé, si audacieux de jet, si sublime, et si sûr ; tant d’essor et d’aventure même (pour peu qu’il l’eût voulu) dans la parole, tant de sagesse et de régularité dans le conseil et dans la conduite !
Ne les trouvez-vous pas savoureuses, ces naïves paroles, dans la bouche d’un homme chargé de diriger l’instruction de plusieurs centaines d’enfants ? […] » C’est avec des paroles aussi françaises qu’on se console d’ignorer ce qui s’accomplit au dehors. […] Si des paroles aussi graves avaient été prononcées par tels autres écrivains de réputation moins assise, il est évident qu’elles auraient passé pour de puériles exagérations. […] Que signifient ces paroles mémorables ? […] » Cette amère parole de Moltke, (en élargissant son application), vaut d’être méditée.
En s’y reportant lui-même à son tour, en repassant sur ses anciennes traces, le maître vient d’y répandre la lumière qui est inséparable de sa plume comme de sa parole ; il n’a pu sans doute rendre à ces premiers canevas tout le développement et tout le souffle qui s’est évanoui avec l’improvisation même ; mais il a su y mettre partout la précision, la netteté, l’élégance, indépendamment de quelques riches et neuves portions dont il les a relevés ; il a su faire enfin de cette suite de volumes sérieux un sujet de vive et intéressante lecture. […] C’est qu’alors toute parole portait coup, et entrait pour ainsi dire dans le vif. […] Dès le premier jour, et lors même que la jeune parole n’aspire encore qu’à continuer celle du grave prédécesseur, on y sent courir un principe d’ardeur et de zèle qui était de nature à se communiquer aussitôt et à électriser les esprits. […] Aussi, malgré les premiers étonnements et les hauts cris que soulève toute idée nouvelle, l’éclectisme, servi par la belle parole et l’infatigable activité de son promoteur, a fait fortune avec les années, et son nom est devenu celui même de l’école philosophique moderne. […] Aussi cet esprit de feu qui avait animé sa parole publique ne lui a pas fait défaut dans la solitude du cabinet, et l’ancien travail refondu en est ressorti très-vivant.
Il s’y serait bien opposé, si Gêrnôt ne l’avait attaqué par des paroles injurieuses. […] « — Que signifient ces paroles ? […] comme il a payé cher les paroles injurieuses que dame Kriemhilt a adressées à la belle Brunhilt ! […] Le noble prince ne répondit rien, mais ces paroles troublèrent son âme et assombrirent son humeur. […] Dietrîch et Hildebrant entendirent ces paroles.
Il montra avec M. de Bonald et les catholiques que la parole n’a pu être inventée primordialement, qu’elle a été nécessaire et préexistante à la pensée, qu’elle a été donnée par Dieu à l’homme naturellement social ; mais, en arrivant aux temps de la parole écrite et imprimée, il montrait avec les autres philosophes la pensée humaine s’affranchissant peu à peu du joug de cette parole devenue plus matérielle et plus pesante, brisant l’enveloppe, acquérant des ailes, et dès lors s’élançant librement à de nouvelles croyances sociales, à de nouvelles interprétations religieuses. […] Il appelait impatiemment son tour et avait hâte de dire une parole de justice. Son tour arriva ; il s’élança à la tribune, des murmures accueillirent ses premiers mots, puis des menaces ; il se troubla, et par degrés ses paroles changèrent de sens, jusqu’à ce qu’enfin, comme à l’Homme sans nom, une parole inconnue, une parole qui n’était pas la sienne, vint se placer sur ses lèvres. […] Je remarque seulement dans les Prolégomènes le magisme de la parole, le magisme de l’homme sur la nature, expressions qui doivent être empruntées au mystérieux théosophe. […] Jamais il n’eut une parole ni une pensée pour rien demander en retour de son entier dévouement : le plaisir de regarder et d’écouter lui suffisait.
les paroles y chantées : vagues, sans précision littéraire, presque quelconques (discours des amants, discours de Mark), elles n’existent (hors deux ou trois explications de l’anecdote établie) que parce que le musicien voulait faire chanter à ses voix des paroles articulées. […] J’essaierai si par des paroles le Parsifal se peut enseigner l’œuvre accomplie de nos ultimes modernités. […] Et voilà un subit apaisement, l’entrée d’une naïveté, et l’éveil des douces offres enfleuries d’être, annonciatrices de celle qui devait venir ; Kundry ; des paroles ultérieurement survenues ; « vie et joie te saluent ! […] Mais celui qui en l’Incarnation chrétienne fit la Révélation et le Mystère, voulut qu’à intervalles une plus grande lumière illuminât sa parole ; et il permit des prophètes et des apôtres. […] Et vinrent ensuite, au travers des siècles, les renouveleurs de la parole, depuis les Pères de l’Église jusqu’à ces vénérables confesseurs du Port-Royal hardis de toute vérité parmi l’âge des hypocrisies.
On sent, en lisant ces paroles unies et en s’approchant de près du personnage, combien il y avait peu, dans la religion toute réelle et pratique de ce temps-là, de cette poésie que nous y avons mise après coup pour accommoder l’idée à notre goût d’aujourd’hui et pour nous reprendre à la croyance par l’imagination. […] En général, Rancé coupe court aux paroles ; il va au fait, et le fait pour lui, c’est l’éternité à laquelle il rapporte toutes choses. […] Ces paroles du plus excellent de tous les livres après l’Écriture sainte me reviennent, et je ne puis m’empêcher de vous les dire : Disce humiliari, pulvis atque cinis. Voilà, Monsieur, la pensée la plus naturelle et la plus utile que puisse nous donner la vue du plus superbe de tous les tombeaux. » Sur quoi l’abbé Nicaise, en vrai littérateur qu’il est, s’empare des paroles mêmes de Rancé pour en faire un nouvel enrichissement à son tombeau et à sa dissertation ; il n’a garde de laisser tomber de si magnifiques pensées sans en profiter comme auteur, sinon comme homme. C’est ainsi que Balzac, si l’on s’en souvient, profitait des paroles de Saint-Cyran.
la langue, qui est le principal organe de la parole, se prend pour la parole : c’est une méchante langue, c’est-à-dire, c’est un médisant avoir la langue bien pendue, c’est avoir le talent de la parole, c’est parler facilement. […] Ainsi l’ironie fait une satire, avec les mêmes paroles dont le discours ordinaire fait un éloge. […] Ce sont les paroles du p. […] Entendre une expression litéralement, c’est la prendre au pié de la lettre. (…) ; c’est le sens que les paroles signifient immédiatement, (…). […] En françois doner parole veut dire promettre ; en latin etc.
Dans tout ce que j’ai lu de histoire littéraire et morale du xviie siècle, je n’ai rencontré d’autres paroles attribuées à madame de Rambouillet que celles-ci : « Les esprits doux, et amateurs des belles lettres, ne trouvent jamais leur compte à la campagne26. » Aucune biographie, même la plus riche eu noms inconnus et dignes de l’être, n’a trouvé de quoi faire un article de qu’être lignes sur cette femme dont la maison fut si célèbre : preuve incontestable qu’elle n’a jamais fait parler d’elle. […] Au défaut d’écrits ou de paroles attribués à la marquise de Rambouillet, j’ai fait des recherches pour connaître l’objet le plus ordinaire de ses conversations intimes. […] Le commerce des paroles doit être leur plus douce occupation. […] Les grâces parurent encore sous les empereurs, mais elles parurent seules, car la majesté des paroles se perdit avec la liberté. » L’auteur rapporte les paroles de Cassius à Brutus avant les ides de mars : « Ces paroles, madame, sont les dernières que prononça la république avant de rendre l’âme… C’était le caractère de l’esprit de Rome, citait la langue naturelle de la majesté. » L’auteur finit par des observations sur les monuments qui restent de la conversation et des mœurs privées des Romains ; il exprime ses regrets sur leur rareté.
De toute la génération qui vient, il est peut-être à ce point de vue celui qui a le plus approché du définitif ; ses vers s’arrêtent lorsqu’il sied, chaque parole comme chaque strophe s’incline vers ses limites naturelles, et le poème s’érige par ses propres forces. […] Et non seulement pour cette ressemblance extérieure que l’un composa des vers libres et l’autre des vers inégaux ; plutôt parce que leur parole écrite fut sincère et fidèle, — et plus encore parce que tous deux ils ont participé du génie populaire. […] Paul Verlaine avait compris la saveur des paroles et des tours populaires et maints poèmes furent enlacés de ces virides guirlandes. […] Griffin, arc-bouté déjà et prêt au corps à corps, exalte l’énergie, la parole qu’affirme ou remplace le geste. […] Camille Lemonnier, qui le pratique avec maîtrise, en a rappelé par d’éloquentes paroles la puissance trop souvent oubliée.
Il semble, en effet, qu’alors l’Écriture sainte, associée, avec tant de grandeur, aux cérémonies du culte, aux solennités funèbres et à tous les triomphes de la parole chrétienne, ait fait tort, même auprès des imaginations les plus savantes, à la poésie du chantre de Thèbes. […] À ses yeux, « les beautés de ce poëte consistent principalement dans le nombre, dans l’arrangement des paroles ». […] Mais l’image entière, le tableau appartient à l’ordre de leur génie ; et c’est leur voix qu’on entend dans ces paroles de Bossuet. […] On y verrait ce même art, ou plutôt cette création spontanée, cette création par le verbe du génie, sans matière préexistante, qui tire de soi la grandeur que les choses n’ont pas, en même temps que, d’instinct et sans hausser la voix, elle s’égale par la parole à tout ce qui est sublime dans la nature, ou dans l’homme. […] On dirait même qu’il ne ménage pas les orateurs de la grande cité, dans cette Néméenne où, rappelant l’innocence calomniée d’Ajax, il s’écrie : « Une odieuse éloquence s’élevait déjà entourée d’un cortège de flatteuses paroles, armée de ruses et faisant le mal par l’insulte.
Il ne vota pas sans faire de grandes réserves, sans adresser au gouvernement des paroles sévères et pleines d’émotion au sujet des troubles de juin. […] Messieurs, c’est avec un profond regret que je prononce ces paroles. […] On a dit qu’on sentait ce jour-là dans sa parole l’accent d’un homme de bien irrité ; et, en effet, il devait l’être. […] De telles paroles dans une autre bouche eussent fait sourire : on savait qu’elles n’étaient que vraies et sincères chez M. de Broglie. […] Il n’y a point pris jusqu’ici la parole, et il doit s’y sentir par moments un peu dépaysé.
L’abbé Maury n’était pas homme en effet, à cette date, à se consacrer purement au ministère de la parole chrétienne : il n’avait ni assez de foi ni assez de charité pour semer en terre si ingrate, et pour entrer en lutte avec tous les vents du siècle. […] En vain l’abbé Maury chercha-t-il à se faire interrompre, s’interrompit-il lui-même, se plaignit-il qu’on ne voulait pas l’entendre ; en vain, abandonnant et reprenant le sujet principal de son discours, se perdit-il dans les digressions les plus étrangères, interpella-t-il personnellement Mirabeau et lui jeta-t-il vingt fois le gant de la parole ; au moindre mouvement d’impatience qui s’élevait dans l’Assemblée : « Attendez, monsieur l’abbé, disait Alexandre Lameth avec un sang-froid désespérant, je vous ai promis la parole, je vous la maintiendrai. » Et, se tournant vers les interrupteurs : « Messieurs, écoutez M. l’abbé Maury : il a la parole ; je ne souffrirai pas qu’on l’interrompe. » Ayant ainsi expliqué au long tout ce jeu de scène et de coulisse, Ferrières termine en disant : « Après deux grandes heures de divagations, tantôt éloquentes, tantôt ennuyeuses, l’abbé Maury descendit de la tribune, furieux de ce qu’on ne l’en avait pas chassé, et si hors de lui, qu’il ne songea pas même à prendre de conclusions. » Or, quand on lit dans les Œuvres de l’abbé Maury, ou même dans l’Histoire parlementaire de MM. […] À propos des décrets que provoquait la résistance du clergé à la Constitution civile, voyant quelques-uns de ses amis essayer de les combattre : « Laissez-les faire, répétait l’abbé Maury, nous aimons leurs décrets, il nous en faut encore trois ou quatre. » S’il disait là ce qu’il ne fallait pas dire, en revanche sa parole agressive, provocante, irritante, arrachait bien souvent au côté gauche le secret que la tactique des meneurs aurait voulu dérober. […] L’effet que le cardinal Maury fit sur le comte de Maistre répondit peu sans doute à l’attente de ce dernier, et il fut frappé de rencontrer, chez un personnage aussi célèbre et aussi hautement considéré en politique, un si grand nombre de propositions hasardées, irréfléchies, de ces paroles en l’air et de ces légèretés robustes qui retombent de tout leur poids sur celui qui les dit. […] Et un moment après, voulant citer en latin les dernières paroles de Ganganelli expirant, le cardinal Maury lâcha un solécisme, et M. de Maistre, devant qui cela ne pouvait passer inaperçu, remarque qu’avec un tel système d’études, ce n’est pas étonnant en effet qu’il ait donné un soufflet à la syntaxe.
Lebrun, en prenant la parole pour répondre à M. […] Les paroles qu’il a prononcées sur l’exécrable forfait du 1456, sur ces tentatives sauvages « et d’autant plus irritées et féroces que la main qui les réprime est plus puissante et qu’elle présente plus de garanties à l’ordre français et européen », paroles qui correspondaient à d’autres, non moins énergiques, sorties du cœur de M. […] L’Académie se devait à elle-même non moins qu’à l’empereur de ne pas laisser passer un tel acte infernal sans qu’on distinguât sa parole d’indignation entre toutes celles qui s’élèvent.
C’est une des facultés les plus naturelles et les plus universelles de l’homme que de reproduire en lui par l’imagination et la pensée, et en dehors de lui par l’art et par la parole, l’univers matériel et l’univers moral au sein duquel il a été placé par la Providence. […] Le cinquième élément nécessaire de cette création ou de cette poésie, c’est le don d’exprimer par la parole ce que nous voyons et ce que nous sentons en nous-mêmes, de produire en dehors ce qui nous remue en dedans, de peindre avec les mots, de donner pour ainsi dire aux paroles la couleur, l’impression, le mouvement, la palpitation, la vie, la jouissance ou la douleur qu’éprouvent les fibres de notre propre cœur à la vue des objets que nous imaginons. […] je vous répondrai : Parce que la parole chantée est plus belle que la parole simplement parlée. Mais si vous allez plus loin, et si vous me demandez : Pourquoi la parole chantée est-elle plus belle que la parole parlée ? je vous répondrai que je n’en sais rien, et qu’il faut le demander à celui qui a fait les sens et l’oreille de l’homme plus voluptueusement impressionnés par la cadence, par la symétrie, par la mesure et par la mélodie des sons et des mots, que par les sons et les mots inharmoniques jetés au hasard ; je vous répondrai que le rythme et l’harmonie sont deux lois mystérieuses de la nature qui constituent la souveraine beauté ou l’ordre dans la parole.
Je lui répondis que ses paroles m’impressionnaient vivement, et que je les jugeais dignes d’être portées à la connaissance du Pape, auquel j’allais les transmettre. […] Les paroles de Sa Sainteté confirmèrent l’ambassadeur dans l’idée qu’il avait eue d’abord. […] « Le frère du premier consul prit alors la parole. […] « Il serait trop long de rapporter tout ce que nous échangeâmes de paroles dans cette conversation interminable, qui me coûta, je le répète, des sueurs de mort. […] Mes paroles, tout en augmentant la tristesse commune, ne modifièrent pourtant pas notre résolution.
Quand il fait parler Napoléon, il le traduit volontiers et le paraphrase plutôt que de le citer dans ses paroles textuelles, brusques, incisives, saccadées, impératives. […] Ce procédé qu’il emploie si bien avec l’empereur Alexandre, il l’applique un peu trop uniformément en général aux paroles de Napoléon ; il en a tant lu et vu de curieux échantillons qu’on aimerait à avoir le texte même, dût le papier en être déchiré quelquefois. J’ai sous les yeux des paroles vraies de Napoléon telles qu’elles ont été prononcées dans un entretien avec M. […] Toutefois, n’oublions pas qu’on est ici avec Napoléon, non seulement le plus grand guerrier et héros des temps modernes, mais un des hommes qui ont le plus traduit et livré leur propre nature par des paroles. On aimerait plus souvent à entendre ces paroles telles qu’elles furent, telles qu’elles jaillirent de ses lèvres et volèrent au but ou au-delà du but, et comme M.
Guizot à côté de lui, tel qu’il fut un peu plus tard, revêtant le système de toute la force et de la fierté de sa parole, et lui donnant tout son décorum. […] J’en ai les principaux moments très présents et, en le voulant bien, je crois que je retrouverais, notées par moi avec curiosité et sur le temps même, ces diverses phases de sa parole publique. […] Il est, parmi nous, l’exemple le plus éclatant de ce genre d’illusion que crée le talent de la parole porté à ce degré. […] En présence des grandes questions de gouvernement, la parole est à la fois puissante et très insuffisante ; elle prépare et n’achève pas ; il faut s’en servir sans s’y confier. » Et pourtant il est clair aujourd’hui pour tous, que lui et ses amis s’y sont trop confiés. […] Thiers, du maréchal Soult, ce Gascon sérieux doué « d’une indifférence et, pour ainsi dire, d’une aptitude volontaire à une sorte de polygamie politique » ; du maréchal Lobau, soldat franc, à la parole brusque et brève « comme s’il eût été pressé de ne plus parler ?
Quelquefois il ne peut s’empêcher d’être étonné de ses excès et de ses fougues : malgré son chagrin, il sourit des paroles extravagantes qui lut ont échappé. […] Au bas, on lit ces paroles, qui, comme vous savez, sont aussi d’Horace ; Turpiler atrum desinit in piscem. […] Il fallait user tour à tour, avec un ménagement et une dextérité extrême, du frein et de l’éperon, et plus souvent encore d’une parole douce, d’un toucher de main délicat. […] Et lui-même, Hésiode, il est tout prêt pourtant de céder au charme ; mais, revenant un peu à lui et se ravisant, il prononce ces paroles pleines de jalousie et d’indignation : « Virgile, tu as fait des vers plus durables que l’airain et que le bronze ! […] Les paroles de neige de Nestor, les tendresses de nourrice de Phœnix s’y fondaient, pour la tempérer, avec la moelle des lions.
les gens de lettres par des choix d’une littérature moins spéciale, et par toutes les sortes de variétés que présentent, dans une société comme la nôtre, les applications publiques de la parole : à la bonne heure ! […] Les habitudes, les applications de leur parole, ou sobre et proportionnée, ou abondante et féconde, en font des orateurs des plus distincts. […] Il ne lui en est resté, dans le style et dans la parole, que l’indispensable. […] Ces joutes brillantes des princes de la parole ne sont-elles pas un pur jeu et en pure perte ? […] La parole lisse, unie, polie, quand on la retrouve, en tire du charme.
C’était pour moi, dans son enfance, quelque chose de doux et de charmant d’écouter sa petite parole trébuchant contre ces deux consonnes, et ses colères contre sa nou-ice. […] Je le prends dans mes bras, je le soulève, je l’embrasse, alors ses lèvres jettent avec effort des sons qui ne sont plus des paroles, des murmures, des bruissements douloureux qui ne disent rien. […] Serait-ce, mon Dieu, une paralysie de la parole ?… Cela se calme un peu, au bout d’une heure, sans qu’il puisse dire d’autres paroles que des oui et des non avec des yeux troubles qui n’ont plus l’air de me comprendre. […] comme dans sa première crise, il ne put que proférer des sons qui n’étaient plus des paroles.
En effet, je remonte des paroles (écrites ou parlées) de mes semblables aux faits et idées qu’elles représentent : ce qui est une association. […] Mon idée de Périclès ou d’une personne existante que je n’ai jamais vue, correspond à un objet réel existant ou ayant été existant dans le monde de la sensation : cependant, comme mon idée est dérivée non de l’objet, mais des paroles d’une autre personne, mon idée n’est pas une copie de l’original, mais une copie de la copie d’un autre : c’est une idée d’idée. […] Findlater, d’après Garnett, donne l’exemple d’une déclinaison et d’une conjugaison en Wotiak, au moyen d’affixes pronominaux : pi-i — fils de moi pi-ed — fils de toi pi-cs — fils de lui pi-mi — fils de nous pi-dy — fils de vous pi-zy — fils d’eux bera-i — parole de moi (je parle). berct-d — parole de toi bera-s — parole de lui bera-my — parole de nous bera-dy — parole de vous bera-zy — parole d’eux.
je suis appelé à parler sur la tombe d’un ami intime, j’écris ce discours le matin même de la cérémonie funèbre ; je le prononce devant des témoins amis et émus ; le Moniteur, où j’écrivais alors, insère le lendemain les paroles qui sont l’éloge du mort ; si d’autres feuilles, des journaux de médecine et de science les reproduisent, j’y suis totalement étranger et je n’ai eu nullement à m’en mêler : ces journaux n’ont vu dans mon Éloge funèbre que la mémoire du médecin, homme de bien, que j’y célébrais. […] Sainte-Beuve, l’un des plus anciens amis du docteur Paulin, a prononcé sur la tombe les paroles suivantes : « Messieurs, vous avez désiré que nous ne quittions pas, sans lui adresser un dernier adieu, les restes du médecin habile, de l’ami excellent, du cœur dévoué que nous perdons. C’est pour obéir à ce vœu de l’amitié que je me hasarde à élever la voix dans un lieu et dans une circonstance où le silence ému est encore la plus éloquente des paroles. […] Le docteur Joulin ne veut pas de cette parole jetée en avant tout d’abord : « sans lui adresser un dernier adieu. » Mais si l’on est plein de son objet, si tous les assistants n’ont qu’une seule et unique pensée, personne ne se trompe quand on dit lui de prime abord ; on en aie droit, on en a le besoin. […] Dans tous les cas, je suis de ceux qui, placés entre une légère faute grammaticale qui disparaît dans le débit, et une faute de goût qui, au contraire, choquerait tout le monde, se laisseraient plutôt aller à la première ; et quittassions eût été une faute de goût, une parole choquante.
Du tourbillon ailé qui l’approche, sortent des paroles qui sont des caresses, un murmure fraternel et tendre. […] Mais à chaque parole de prudence, il se raidit dans son défi opiniâtre. […] Ma langue se révolte contre la parole ! […] La parole est l’échange suprême, et l’interprète des dieux doit avoir la langue habile et agile. […] Il ne pouvait rétracter ni parjurer sa parole ; un dieu bienveillant se trouva pour remplir la condition du rachat.
Ajoutons ici que l’âme éprouve le besoin ou l’instinct de s’exprimer, selon la nature de ses sensations, tantôt en paroles, tantôt en chant. […] De là la musique, ce chant sans paroles, qui s’écrit en notes intraduisibles dans aucune langue, et qui dit cependant à l’oreille de l’homme plus de choses, et des choses plus douces et plus fortes, qu’aucune parole articulée n’en peut exprimer. […] Sa voix plus accentuée et plus rapprochée nous permettait de saisir à l’oreille ses paroles confuses et désordonnées. Ces paroles étaient à son insu une ode ou un dithyrambe. […] ruisseaux qui me coupez la parole en tombant de l’écluse !
Siegmund debout, arrachant la miraculeuse épée, quand l’orchestre répand ses prodigieuses fanfares ; et, les yeux fermés ou les yeux ouverts, pendant que chante la musique et que les paroles résonnent portées par des voix aussi absolument abstraites que les instruments de l’orchestre, volontiers nous localisons paroles et musiques, et, bien aisément, spontanément, nous recréons votre action scénique, votre mimique, vos décors et tout le drame. […] Nous avons reconnu combien il importe que maintenant cet art Chrétien et Aryen prenne la parole en France ; nous comprendrons aussi combien il importe que cet art soit correctement perçu. […] C’est une parole qui doit être chantée purement et prononcée précisément, parce que pureté et précision sont l’essence de cette parole. Cette parole dit à travers le monde : que la lumière soit ! […] Schwickerath donne le 20 et 21 avril, une audition du 3e acte de Parsifal et des Sept paroles de Schütz.
M. le président ayant alors accordé la parole aux orateurs inscrits dont le tour était venu, trois de ces orateurs, M. […] Rouland, je renonce à la parole, d’autant plus que je voulais parler dans le même sens que l’éloquent ministre d’État. […] La parole est à M. […] Sainte-Beuve a la parole. […] Si l’on me retire la parole, on me la retirera.
comme il boit ses paroles ! […] Enfin, ce que les contemporains racontent de son action, achève d’expliquer son succès, un des plus éclatants qu’ait obtenus la parole humaine. […] Il s’en faut en effet que sa parole soit aussi hardie que son sentiment. […] Croyant ces choses communes utiles à son propos, il ne voulait pas avouer, en les ornant, que des paroles utiles peuvent n’être pas assez belles. […] Les paroles suscitent les choses, à peu près comme dans certaines poésies les rimes appellent les vers.
On l’employait dans les cours étrangères à la rédaction des actes ; on la prenait pour la langue naturelle des hommes : si un sourd-muet, disait-on, recouvrait la parole, il parlerait le français de Paris. […] En lisant les sermons de saint Bernard, le plus grand parmi les théologiens de cette période, je l’admire moins sur cette cime élevée où il se tient, égalant quelquefois ses paroles aux paroles sacrées, que je ne m’étonne de le voir si indifférent au détail de la vie humaine, comme s’il l’ignorait, ou le trouvait au-dessous de ses extases. Jésus lui-même n’avait-il donc pas indiqué cette voie au christianisme, par tant de paroles à la fois pleines d’une connaissance infinie de l’homme et de compassion pour ses misères ? […] De temps en temps, quelques paroles soutiennent contre le désespoir celui qui n’est que le néant par rapport à celui qui est l’être. […] » A ces étranges paroles, raconte Mathieu Paris28, il perdit tout à coup la voix et devint non-seulement muet, mais idiot.
Sa cécité presque absolue le mettait dans l’impossibilité de lire et d’écrire : il n’en suivait pas moins tous les mouvements de l’assemblée, maintenait l’ordre avec fermeté, et, connaissant la place de chaque membre dont il distinguait merveilleusement le son de voix, il ne commettait jamais la moindre erreur en accordant ou refusant la parole. […] On ne tarde pas, quand on s’est familiarisé avec lui, à reconnaître quelques-unes de ces paroles, la plupart dignes d’être retenues. […] Je ne sais si Portalis s’était fait relire cet épisode avant de prendre la parole pour ses naufragés, mais ce même sentiment de piété, qui est propre à Virgile, respire dans son discours. […] Ces belles paroles, à en bien pénétrer le sens, expriment toute la pensée morale du Code civil et le seul esprit général par lequel il nous soit permis de l’envisager ici. Mais, en lisant ces paroles si ménagées, ne sentons-nous pas l’esprit de Portalis lui-même qui se traduit jusque dans sa langue et dans sa manière de dire ?
Dans le grand monde, tant de gens ont le désir de parler, tant de paroles attendent avec impatience le moment et l’occasion de se placer entre tant de paroles, qu’on fait taire ceux qui parlent longuement ou obscurément, en ne les écoutant pas. […] Ce qui distingue le langage des femmes du grand monde et de la cour, du langage commun, c’est moins l’usage de certains tours, de certaines formes et de certaines expressions réputées nobles et élégantes, que l’ignorance parfaite des paroles et des locutions grossières, qui ont pris naissance dans le peuple. […] Quoi qu’il en soit, la vanité de la haute bourgeoisie qui veut toujours ressembler à la cour, finit par imiter à la longue sa réserve dans l’usage de la parole, son ignorance des locutions liasses, ainsi que ses actions et ses manières.
. — Les Libres Paroles (1847). — Les Chroniques rimées (1850). — Cartes sur table, nouvelles (1855). — La Païenne, roman (1857). — La Sibylle, roman (1859). — Gaston, roman (1860). — Les Poètes (1862). — Le Secret de Polichinelle, roman (1862). […] Laurent Pichat s’est fait remarquer par ses Libres Paroles (1847), où il a trouvé, pour l’expression de ses sentiments, de ses doutes, de ses interrogations généreuses, plus d’une action et d’un cri où l’on surprend comme un écho de Byron. […] Poète de combat, il l’est dans la poésie mâle et sobre, élégante et lamartinienne des Libres Paroles, des Chroniques rimées, d’Avant le jour.
Les jugements héroïques, récemment dérivés des jugements divins ne faisaient point acception de causes ou de personnes, et s’observaient avec un respect scrupuleux des paroles. Des jugements divins resta ce qu’on appelait la religion des paroles, religio verborum ; généralement les choses divines sont exprimées par des formules consacrées dans lesquelles on ne peut changer une lettre ; aussi dans les anciennes formules de la jurisprudence romaine, imitée des formules sacrées, on disait : une virgule de moins, la cause est perdue ; qui cadit virgulâ, caussâ cadit. […] Ce respect inflexible de la parole dans les temps héroïques montre bien qu’Agamemnon ne pouvait rompre le vœu téméraire qu’il avait fait d’immoler Iphigénie. C’est pour avoir méconnu le dessein de la Providence [qui voulut qu’aux temps héroïques la parole fût considérée comme irrévocable] que Lucrèce prononce, au sujet de l’action d’Agamemnon, cette exclamation impie, Tantùm religio potuit suadere malorum ! […] Dans les temps barbares, on doit trouver une jurisprudence rigoureusement attachée aux paroles ; c’est proprement le droit des gens, fas gentium.
Pâris l’attendrit par de douces paroles. […] que la terre amoncelée couvre mon corps sans vie avant que j’entende ces paroles et que je te sache enlevée de ce palais ! […] ” « En achevant ces paroles, Hector reprend son casque ombragé d’une crinière épaisse. […] C’est le Phidias de la parole, sept siècles avant le Phidias du ciseau. […] Celui qui a le bonheur de posséder ses parents vivants le repousse de sa table en l’offensant par d’amères paroles.
Dans les années où l’abbé Bossuet, lié avec les prêtres de la mission, avec saint Vincent de Paul et avec son successeur, faisait à Saint-Lazare les entretiens ou conférences pour l’ordination des jeunes prêtres, soit à Pâques, soit à la Pentecôte, les ordinands choisissaient de préférence le temps où il devait faire ces instructions pour se préparer aux ordres, et Fleury fut de ce nombre ; lorsqu’il quitta la profession d’avocat pour embrasser la prêtrise, il voulut être un des fruits de cette excellente parole de Bossuet. […] Bossuet avait en lui, dans sa mâle et ferme parole et jusque dans ses fortes tendresses, quelque chose qui devait lui faire goûter médiocrement, en effet, cette qualité traînante, agréable et un peu amollie qui plaît tant à d’autres chez Fénelon, chez Massillon, et qu’aura plus tard aussi Bernardin de Saint-Pierre. […] Quant à ce qui est dit, en un autre endroit du journal, de plus fort et de plus dur encore contre Fénelon, que Bossuet « tranche avoir été toute sa vie un parfait hypocrite », ce sont de ces paroles regrettables qui peuvent échapper dans le laisser-aller d’un tête-à-tête familier, et que celui même qui les a prononcées ne reconnaîtrait pas s’il les voyait produites au grand jour : faiblesses et traces de l’humanité, qu’il est fâcheux que Le Dieu ait recueillies et qu’il ait comme trahies en les révélant. […] Qui trouverait plaisir à surprendre la plus magnifique des paroles humaines à l’instant où elle balbutie ? […] — Qu’elle est certaine, et que je n’en ai jamais eu aucun doute », repartit Bossuet ; et la sincérité de cette parole éclate à nos yeux dans tout ce que nous lisons aujourd’hui à son sujet.
Désormais ils ont trouvé leur roi, ils vont le suivre ; nulle parole laïque ou ecclésiastique ne prévaudra contre sa parole ; ils lui ont soumis leur conduite, ils exposeront pour lui leurs corps et leurs vies, et s’il le faut, pour lui rester fidèles, un jour viendra où ils renverseront l’État. […] » Ce sont là les vraies paroles de la loyauté et de la conscience. […] Peu d’hommes, par leur vie et leur parole, ont mieux que celui-ci mérité des hommes. […] Ils lisent et pèsent chacune de ces paroles. — « Abomination. […] Paroles à Carlostad : « Tu crois apparemment que l’ivrogne Christ, ayant trop bu à souper, a étourdi ses disciples de paroles superflues. » 377.
Ceux de MM. les sénateurs qui désireront répondre auront la parole. […] nous avons de la peine à suivre vos paroles : c’est dans votre intérêt même que je me permets cette interruption. […] Dans ce tumulte où deux minorités, sans s’être coalisées, faisaient nombre, où chacun prenait au hasard la parole, M. […] Joubert, a dit une belle parole : « Les vieilles religions ressemblent à ces vieux vins généreux qui échauffent le cœur, mais qui n’enflamment plus la tête. » Combien je voudrais que cette parole se vérifiât parmi nous ! […] Dumas n’a pas entendu la parole que je viens de prononcer ; je reconnais M.
Chaque fois qu’il prend la parole, son premier mot est : « Mon Dieu ! […] En fait d’enseignement par la parole, le moyen, pas plus que le temps, ne fait rien à l’affaire. […] Engagé dans la politique par son talent de parole, son inclination était restée fidèle aux affaires. […] Cependant ses paroles ne sentaient pas l’orgueil. […] Le jeune homme répéta les paroles de son frère en y enchérissant.
Lamennais se laissa circonvenir, se soumit, se rétracta ; puis, se relevant aussitôt, il lança ses admirables Paroles d’un croyant, qui firent une sensation profonde. […] Il mettait au service de son irréductible individualisme une parole incisive, nerveuse, volontiers insolente, dissolvante des idées et meurtrière aux personnes. […] Et ce fut lui peut-être qui réalisa pour les contemporains l’idéal de l’orateur universitaire : il avait la parole vivante et brillante, la phrase ample et facile, relevée de traits fins ou spirituels. […] Sa parole claire, nerveuse, chaude, s’adapte finement à l’état des consciences contemporaines ; comme Lacordaire, le P. […] Les Paroles d’un croyant furent écrites en 1833, en quelques jours, à la Chesnaie, près de Dinan, où il s’était retiré.
Je ne parle pas des bourreaux et de leurs aides, ni des hommes politiques, ces lâches professionnels : un pareil tas d’immondices est au-dessous de la parole. […] Tu t’inclines donc, pensée lâche, devant la justice des juges ; et leurs paroles, même quand plus rien de matériel ne les sanctionne, te paraissent dignes d’autre chose qu’un haussement d’épaules. […] Tout en secouant à vos paroles enthousiastes une tête sceptique, j’aime votre pensée et le sentiment d’où elle jaillit. […] Avant que d’écrire ou d’agir, le classique apprend à penser, et geste ou parole lui semblent beaux qui expriment directement et clairement le pouvoir absolu de la raison. […] Au lieu de délivrer d’une parole vaillante et juste l’Individu prisonnier apparent des sociaux, il l’insulte pêle-mêle avec eux.
tu as le don de la parole, tu as de la jeunesse, tu sais conter un récit héroïque : raconte de nouveau ce livre royal, et cherche par là la gloire auprès des grands. » Cet ami lui abrégea les recherches, lui procura un certain recueil déjà fait, et le poète, voyant la matière en sa puissance, sentit sa tristesse se convertir en joie. […] Il triompha, dans un défi, de tous les poètes de Cour, et le sultan, dans un moment d’enthousiasme, lui donna ce surnom de Ferdousi (car ce n’était pas son premier nom) ; Ferdousi veut dire l’homme du paradis, celui qui fait de la terre un paradis par l’enchantement de sa parole. […] Cependant le sultan Mahmoud avait reconnu son injustice, et il envoyait au poète les cent mille pièces d’or qu’il lui devait, avec une robe d’honneur et des paroles d’excuse. […] Le jeune homme, le vertueux Iredji, est averti par son père même du mauvais dessein de ses aînés, mais il ne veut employer avec eux d’autres armes que la persuasion, et, regardant son vieux père avec tendresse, il lui dit ces belles paroles : Ô Roi ! […] En entendant ces paroles qui semblent sortir d’une âme amie, le cœur de Sohrab s’élance, il a un pressentiment soudain ; il demande ingénument au guerrier s’il n’est pas celui qu’il cherche, s’il n’est pas l’illustre Roustem.
Son témoignage subsiste donc ; car si d’Aubigné médit volontiers, il n’est pas menteur, et sur un point de déclaration aussi formelle sa parole compte. […] On retrouve dans ces paroles et dans cette sollicitude de d’Aubigné le vieux compagnon et le vieux brave qui sait que le jeu des armes égale tout. […] Cependant d’O, à la tête de plusieurs gentilshommes catholiques, vient porter la parole et sommer en quelque sorte Henri IV, en recueillant la couronne, d’en accepter en même temps toutes les conditions : la première est de rentrer au giron de l’Église ; c’est à ce prix qu’il dépouillera du coup le roi de Navarre et ses misères pour revêtir d’emblée le bonheur et l’excellence d’un roi de France. […] La mémoire de votre père et les prières de votre roi depuis trois heures sont-elles évanouies, avec la révérence qu’on doit aux paroles d’un ami mourant ? […] Elle lui sait gré avant tout d’être un peintre, et de ce don énergique et coloré de la parole par lequel elle est mise en vive communication avec le passé.
Le mariage fut donc convenu et l’on échangea sa foi et sa parole. […] Le capitan accepte sa parole. […] Mais, satisfait de la fidélité de Flaminio à sa parole, il renonce à la jeune fille et la cède à son ami. […] Ayant fini, il prend la parole, et attirant toute l’attention de Burattino qui l’écoute la bouche béante, il lui fait un discours en trois points sur l’indélicatesse des voleurs et sur les châtiments rigoureux qui les attendent. […] On comprend ce que l’acteur français Des Lauriers, surnommé Bruscambille, disait, à quelque temps de là, dans un de ses prologues en parlant de la farce française : « Je puis dire avec vérité que la plus chaste comédie italienne est cent fois plus dépravée de paroles et d’actions qu’aucune des nôtres. » Bornons-nous à quelques indications sur ce point délicat.
Quel est celui qui parle, et à qui la parole est-elle adressée ? […] Ces cailloux, qui prennent la parole, offrent de plus une sorte de personnification presque inconnue au poète de l’Ionie113. […] Quand Démodocus recommençait ses chants, et que les anciens l’excitaient à continuer (car ils étaient charmés de ses paroles), Ulysse s’enveloppait la tête de nouveau, et recommençait à pleurer. » Ce sont des beautés de cette nature qui, de siècle en siècle, ont assuré à Homère la première place entre les plus grands génies. […] Ulysse fait à Télémaque un long raisonnement pour lui prouver qu’il est son père : Joseph n’a pas besoin de tant de paroles avec les fils de Jacob. […] « Nestor, cet orateur des Pyliens, cette bouche éloquente dont les paroles étaient plus douces que le miel, se leva au milieu de l’assemblée.
Des changements survenus dans notre manière d’apprécier et de juger notre littérature nationale Parmi les phénomènes que présente l’état actuel des choses, il en est qui frappent plus que d’autres, selon la disposition différente des esprits différents, Celui sur lequel je désire arrêter en ce moment l’attention, parce que je le crois de la plus grande importance, c’est le discrédit de la parole et la confusion du langage. Je préviens, au reste, qu’ici, comme dans toute la suite de cet écrit, je prends la parole dans le sens le plus général et le plus étendu. […] Par opposition à la littérature classique, on a nommé littérature romantique celle où l’on professe une plus grande indépendance des règles, où l’on se permet de nouvelles alliances de mots, et surtout de nouvelles inventions de style ; où l’on secoue les lois de l’analogie, où l’imitation étend son domaine, où la pensée fait effort contre la parole fixée, la parole écrite ; où les sujets sont tirés des traditions modernes. […] Mais je demande si déjà nous n’avons pas besoin de nous rappeler la personne même de Bossuet, et l’assemblée imposante devant laquelle il parlait, et l’autorité de sa parole, fortifiée par le caractère auguste dont il était revêtu, et l’empire irrésistible de doctrines non contestées, et toutes les gloires et toutes les renommées de cette époque si brillante, et tous les souvenirs de la vieille monarchie, pour sentir les éminentes beautés de l’Oraison funèbre du grand Condé. […] Il est devenu comme le contemporain de ces textes sacrés qui se mêlent à ses paroles d’une manière à la fois si audacieuse et si naturelle.
En d’autres termes, il a voulu savoir si le comte de Chambord avait en lui l’esprit séculaire et chrétien de l’ancienne monarchie française, et si son éducation, ses idées et ses actes, qui ne sont encore que des paroles et des déclarations brillantes de loyauté, ne brillent pas trop aussi de cet esprit moderne inquiétant pour sa politique dans l’avenir, au cas où la France le reconnaîtrait un jour pour son roi moins pour une loyauté à laquelle elle ne se fierait peut-être pas, si elle était seule, que pour cet esprit moderne qui s’appelle, par duperie ou par trahison, « le libéralisme », mais qui n’est au fond que l’esprit même de la révolution… Recherche douloureuse, dans laquelle l’auteur du livre que voici a tenu le flambeau d’une main ferme ! Il n’a rien omis de toutes les diverses déclarations du comte de Chambord, à ses amis en particulier et à tous les Français en masse, depuis 1848 jusqu’en 1879, et il a opposé au Syllabus, dont le prince reconnaît verbalement l’autorité souveraine, des opinions et des déclarations qui en sont la négation explicite ; et non seulement il a cité en détail ces paroles, qui sont déjà des actes, mais il a prouvé qu’avec l’éducation que le dernier des rois de France a reçue il devait nécessairement les prononcer. […] Parole effroyable, mais qui, pour celui qui l’a écrite, exprime une chose plus effroyable encore et dont on ne peut donner trop d’effroi : la révolution acceptée lâchement par la royauté contre l’Église, sa mère, et contre elle-même… Et, en effet, aux yeux de ceux-là qui croient que la constitution de la monarchie française était essentiellement catholique, c’est comme si Henri IV avait pu devenir roi de France sans cesser d’être protestant… III Et pas de doute que l’auteur de la Reine Blanche, saint Louis et le comte de Chambord, n’eût été de ceux-là s’il avait vécu au xvie siècle. […] Il cite (page 99) les paroles mélancoliques et familières que Pie IX prononça un jour devant les membres du Sacré Collège, en se promenant dans les jardins du Vatican. […] Il a abdiqué le trône d’Espagne et il s’en est allé de son royaume avant que son peuple ne l’en ait chassé… Les paroles du pontife ont été une prophétie.
Voici ses propres paroles. […] Au lieu d’imiter et d’exprimer le sens des paroles, elle ne sert qu’à l’énerver, qu’à l’anéantir. […] En effet, le chant des paroles doit imiter le langage naturel des passions humaines, plûtôt que le chant des tarins et des sereins de Canarie, lequel notre musique s’attache tant à contrefaire avec ses passages et ses cadences si vantées. […] La méprise vient de que Roland Lassé a pris à la tête de plusieurs oeuvres dont les paroles sont latines, le surplus d’Orlandus Lassus , en latinisant son surnom suivant l’usage de ce temps-là.
Toute l’autorité de la vertu publique, toute la majesté du peuple romain, se levaient avec lui quand il se levait pour prendre la parole. […] L’âme d’un seul homme est le foyer du monde, et sa parole est l’écho de l’univers. […] Sa parole éclata comme un prodige de perfection, inconnue jusqu’à ce jeune homme, dans la discussion des causes privées. […] La pensée s’y précipite sans haleine en paroles courtes, comme si l’impatience et l’indignation essoufflaient le génie. […] … » Les sanglots du peuple coupèrent ses dernières paroles : Mirabeau ne fit jamais pleurer.
Du reste je ne sais quel mauvais vent de contradiction soufflait, ce soir, dans la causerie et les paroles du salon. […] La nuit tombait doucement, et la parole du vieillard devenait, de plus en plus, une parole de clair-obscur, une parole s’approchant du grand silence. […] » Et elle imite l’horrible bégayement de l’homme frappé d’une hémiplégie. « Il a retrouvé la parole, mais il a un bras et tout un côté qu’il ne peut remuer. […] » Cela est dit non avec un sourire, une grâce de parole, une légèreté de paradoxe : c’est formulé en axiome dur, tranchant, absolu. […] Il a la parole nerveuse qui se presse et sort par saccades, et une espèce d’inquiétude générale qui le fait appeler, à tout moment, son fils, qu’il craint de voir écraser par les voitures.
Mais il faut bien se garder de confondre, comme on l’a fait souvent, la parole avec le langage. La faculté de produire et de moduler des sons par les organes de la voix nous a été donnée avec l’intelligence, avec la vie : la parole est un don de Dieu. […] Nous aurons à étudier ce qui peut donner à la parole toute sa force, au langage toute sa puissance, à la pantomime toute son expression. […] Aussi est-ce par la lecture à haute voix que nous commencerons nos études sur l’art de la parole. […] On ne respirait pas de peur qu’un souffle étouffât ses paroles.
Alors Madame Adam prononce des paroles graves : « Richard Wagner a été accueilli jadis dans un salon libéral ; et il a, traîtreusement, consenti à laisser intervenir pour autoriser Tannhaeuser à l’Opéra, la maîtresse d’un autre Salon ! […] Mais ce qui frappe surtout dans ces chansons populaires, c’est la concordance extraordinaire entre les paroles et les airs ; dans dix, vingt chansons, sur des sujets pareils on retrouve la même tournure mélodique. […] D’abord, ils ne composent pas eux-mêmes les paroles et l’intrigue de leurs drames. […] Pourvu que les émotions des personnages nous soient données en même temps que leurs paroles et leurs actes, qu’importe la manière dont nous les percevons ? […] C’est à quoi doivent nous servir les paroles si jeunes et si chaudes qu’il a écrites sur Bellini, il y a cinquante ans.
Et ensuite, lorsque, lui, l’Expérimentateur, est pour longtemps épars, de, induisant et déduisant plus vite et plus loin, d’un nœud d’intuitions authentiquer en une parole d’émotion multiple ordonnée des phonétiques valeurs, le plus du présent et le plus de l’avenir : en Synthèse, et en Hypothèse. […] Quant aux preuves directrices à exalter par le Poète, hors de l’arrivée à nous du savoir assez disant partiellement pour une unanime vérité, une Œuvre trop immense et simple est à venir : en une adéquate parole, le poème de toutes Activités vitales pénétré des intuitions d’une philosophie de la Matière en mouvement évolutive, — ou, poétiquement, sa Métaphysique. […] De même qu’entre le geste muet et l’émotion l’analogie se dénonce, de même les sensations de douleur, de plaisir, de stupeur, de quiétude, se traduiront en la sorte de geste sonore qu’est, en première parole, le son guttural. […] (Nous ne noterons que pour mémoire des assertions vraiment trop puériles que : la mesure du vers est le résultat d’une entente entre la raison, qui organise le mouvement de la parole, et notre pouvoir de sensation qui limite la dite organisation, pour la mieux sentir !) […] … Et ainsi s’authentique une poésie qu’on peut dire imitative, d’imiter de l’Univers, par la parole, la musique, la plastique et l’art pictural, — les rythmes.
Je demeure d’accord avec Scaliger, que c’est un défaut du théâtre ; et je l’excuse avec lui par la nécessité de la représentation, étant impossible de représenter les pensées d’un homme autrement que par ses paroles. […] Or, pour dire ce qui me semble de cette composition, il faudrait que l’autre acteur, après la parole prononcée d’une voix fort haute par celui qui ferait ce monologue, dît quelques paroles d’étonnement et de joie, selon le sujet, et qu’il se fâchât de ne pouvoir ouïr le reste ; quelquefois même, quand l’acteur qui ferait le monologue retiendrait sa voix, il faudrait que l’autre remarquât toutes ses actions, comme d’un homme qui rêverait profondément et qui serait travaillé d’une violente inquiétude. […] Mais il n’est pas nécessaire qu’un acteur prenne la parole, pour avoir part au dialogue. […] Tout cela répond à des mouvements aperçus qui, quelquefois plus expressifs que la parole, font sentir du moins le dialogue de la passion, dans les endroits même où l’on n’entend qu’un personnage. […] Dans tous les cas, l’aparté est fort court ; il serait à souhaiter qu’il ne fût que d’un mot, parce que, dans l’exacte vérité, il nous peut échapper une parole qui n’est pas entendue de celui à qui l’on parle.
Elle dut commencer par des signes, des gestes, des indications matérielles dans un rapport naturel avec les idées : aussi λόγος, parole, eut en outre chez les Hébreux le sens d’action, chez les Grecs celui de chose. […] Mais, à mesure que l’esprit humain se développa, à mesure que l’on trouva les paroles qui signifient des formes abstraites, ou des genres comprenant leurs espèces, ou unissant les parties en leurs entiers, les expressions des premiers hommes devinrent des figures. […] Les philologues ont adopté sur parole l’opinion que la signification des langues vulgaires est arbitraire. […] Les premières paroles humaines furent ensuite les interjections, ces mots qui échappent dans le premier mouvement des passions violentes, et qui dans toutes les langues sont monosyllabiques. […] Si le vers héroïque fut d’abord spondaïque, on ne peut l’attribuer, comme le fait la tradition vulgaire, à l’effroi inspiré par le serpent Python ; l’effroi précipite les idées et les paroles plutôt qu’il ne les ralentit.
Joseph de Maistre, qui distinguait toujours entre la cour et le cabinet autrichien, avait eu des paroles fort vives ; car il ne pouvait s’empêcher de les avoir fort vives, fort ardentes, sur tous les sujets qui lui traversaient la pensée. […] sur l’effet de sa parole et sur le choc électrique direct qu’il aurait pu produire dans ce tête-à-tête, — que dis-je ? […] mais il nous plaît comme cela, pourvu que ce soit à bâtons rompus que nous l’écoutions et non quand il dogmatise ; que de vues chemin faisant, que de paroles qui restent et qu’on emporte ! […] À propos de ces conversions qu’on lui reprochait d’avoir favorisées, et dont l’une, celle de Mme Swetchine, est devenue littérairement un fait éclatant, il a de singulières paroles, et qui marquent bien l’esprit et l’accent d’aristocratie qu’il portait en tout. […] Barbey d’Aurevilly qui a pris soin lui-même de relever mon omission dans un article inséré dans le journal Le Pays (décembre 1860), et il l’a fait en auteur qui se montre fort piqué qu’on ne garde pas souvenir de ses paroles et de ses phrases.
C’est dans ce songe qu’il va voir figurer les religions diverses, depuis les plus grossières jusqu’à la plus pure, depuis les formes les plus brutales du naturalisme et de la sensualité jusqu’à la révélation de la parole la plus simple, la plus divine, la plus humaine, celle du sermon sur la montagne. […] En un mot, Rousseau ne fait dans ce morceau que mettre en action et commenter sous forme dramatique cette parole de la profession de foi du vicaire : « Oui, si la vie et la mort de Socrate sont d’un sage, la vie et la mort de Jésus sont d’un Dieu. » Et s’il conclut encore moins dans le songe que dans les pages de l’Émile, s’il n’éveille pas son philosophe pour tirer de lui un dernier mot, c’est qu’il n’a pas voulu le lui faire dire, c’est qu’il n’a pas osé conclure, et qu’il a reculé devant toute parole qui ne serait pas un hommage au Christ. […] Le songe du philosophe, dans lequel il se croit transporté au milieu d’un édifice immense surmonté d’un dôme éblouissant que soutiennent sept statues colossales au lieu de colonnes, les sept statues représentant chacune la divinisation monstrueuse de l’un des sept péchés capitaux, — ce songe, dans tout son détail emphatique et concerté, me rappelle certaines allégories des Paroles d’un croyant. […] Monsieur, cela n’y fait rien ; je prendrai tout de même… » — « Non, monsieur, je n’ai pas l’habitude de livrer de la musique en cet état ; j’ai voulu vous donner cette explication, car je ne manque jamais à ma parole. » — « Mais, monsieur… » — « Non, monsieur ; je vous demande seulement quelques jours pour refaire la copie. » Le jeune homme avait peine à sortir : Rousseau lui-même s’oublie ; la conversation se renoue et s’engage. « Jeune homme, à quoi vous destinez-vous ? […] Rousseau n’a jamais écrit, en parlant des amours-propres empressés à se mettre en avant : « Il est vrai qu’on a grand soin de couvrir le motif de cet empressement du fond des belles paroles » (page 287) ; mais il a sans doute écrit : du fard des belles paroles.
Homère fait lancer à ses héros « des paroles ailées » ; les ailes de la parole d’Étéocle sont les plumes qui portent la flèche droit au but. […] Aussi Étéocle oppose-t-il à ces mécréants des guerriers pieux et modestes : Mélanipos « qui hait les paroles impudentes », Polyphontès aimé d’Artémis, Actor « qui méprise la jactance, mais qui sait agir ». […] Némésis aux écoutes, n’y trouverait pas une parole qui pût l’irriter contre lui. […] Voilà déjà vingt ans que je suis veuve, abandonnant ma patrie et jamais tu ne m’as dit une parole injurieuse ou dure. […] Ici l’art disparaît, le son étouffe la parole, la poésie fait place à une musique déchirante qui tire de chaque mot la note du cri, l’éclat du sanglot.
C’était pour moi, dans son enfance, quelque chose de doux et de charmant d’écouter sa petite parole trébuchante contre ces deux consonnes, et ses tolères contre sa nou-ice. […] Alors ses lèvres jettent, avec effort, des sons qui ne sont plus des paroles, des murmures, des bruissements douloureux qui ne disent rien. […] une paralysie de la parole… Cela se calme un peu, au bout d’une heure, sans qu’il puisse dire d’autres paroles que des oui et des non, avec des yeux troubles, qui n’ont plus l’air de me comprendre. […] Me voici relevé et remplaçant Pélagie près du lit de mon pauvre et cher frère, qui n’a pas repris la parole, qui n’a pas repris connaissance, depuis jeudi à deux heures de l’après-midi. […] comme dans sa première crise, il ne put que proférer des sons qui n’étaient plus des paroles.
Jamais on n’en a tiré une parole, si ce n’est quand elle dit qu’on lui ôte ce qu’elle a dans la tête. […] J’ai tenu parole à son pauvre petit mari, et, en vérité, je ne me repens pas. […] « Voilà que la parole humaine cesse d’être l’expression des idées seulement, elle devient la parole par excellence, la parole sacrée entre toutes les paroles, comme si elle était née avec le premier mot qu’ait dit la langue de l’homme ; et comme si, après elle, il n’y avait plus un mot digne d’être prononcé, elle devient la promesse de l’homme à l’homme, bénie par tous les peuples ; elle devient le serment même, parce que vous y ajoutez le mot : Honneur. « Dès lors, chacun a sa parole et s’y attache comme à sa vie. […] Cette parole est belle partout, et partout consacrée.
Beethoven était et est toujours resté symphoniste ; cependant, il ressentit le besoin impérieux, dans la IXe Symphonie et dans la Missa, d’adjoindre à sa symphonie des paroles et des voix humaines, pour en préciseras sensations. […] Les paroles n’auraient pu que diminuer cette perfection. […] » et ces paroles sont portées par une mélodie qui, sereine et douce, monte et plane sur quelques mesures, durant lesquelles l’angélique présence semble être divulguée à nos yeux. […] » Tout musicien qu’il est, Wagner n’en reste pas moins, il est vrai, poëte et prosateur distingué ; mais quelque poëte qu’il soit, il ne trouve que dans la musique la complète formule de son sentiment, si bien que seul il pourrait nous dire s’il adapte ses paroles à ses mélodies, ou s’il cherche des mélodies à ses paroles. […] Or, pour la rapidité de notre parole, nous avons atténué extrêmement cette vision du sens attaché aux mots.
Ses moindres paroles ont toujours un certain sel qui leur donne de la force et de l’agrément. […] Quelques paroles sévères de Louis XIV vengèrent le poète de la brutalité du grand seigneur. […] C’est d’ailleurs le sort de telles paroles, que le prince qui a le cœur assez haut pour ne pas s’en fâcher a toujours l’esprit assez délicat pour en goûter les grâces. […] La parole sacrée n’a toute sa force contre l’orgueil de la vie que quand cet orgueil a été humilié, et que l’homme qui s’est « enivré du vin des passions » en a senti la lie. […] Devenu évêque de Condom, il imagina cette manière inouïe de déplorer la mort des personnes royales, qui devait surpasser toutes les merveilles de la parole humaine.
. — Belles paroles de Louis XIV. — Action de Denain. — Retour de fortune. […] Louis XIV, en le recevant à Marly dans le courant de mars, au plus fort de tous ses deuils de famille, lui avait dit ces paroles qu’il faut savoir gré au maréchal de nous avoir textuellement conservées : Vous voyez mon état, monsieur le maréchal. […] Dans le cas présent, ces paroles du grand roi sont d’autant plus belles qu'elles lui sortaient du cœur et n’étaient pas faites pour être redites. Et on en a la preuve assez particulière : lorsqu’en 1744 Viliars fut nommé de l’Académie française et qu’il fit son discours de réception, il eut l’idée de l’orner de ces paroles généreuses de Louis XIV, à lui adressées avant la campagne de Denain, et qui l’y avaient enhardi. […] Tout s’ajoute donc, et même une sorte de modestie, pour rendre plus respectable et plus digne de mémoire le sentiment qui dicta ces royales et patriotiques paroles.
L’abbé Le Dieu n’a pas le dessein de diminuer Bossuet, mais il soumet son illustre maître à une épreuve à laquelle pas une grande figure ne résisterait ; il note jour par jour, à l’époque de la maladie dernière et du déclin, tous les actes et toutes les paroles de faiblesse qui lui échappent, jusqu’aux plaintes et doléances auxquelles on se laisse aller la nuit quand on se croit seul, et dans cette observation il porte un esprit de petitesse qui se prononce de plus en plus en avançant, un esprit bas qui n’est pas moins dangereux que ne le serait une malignité subtile. […] Déjà, dans le premier volume du journal, j’avais relevé de tristes paroles sur Fénelon, de ces paroles faites pour être ensevelies, et que Le Dieu avait pris plaisir à surprendre sur les lèvres de son maître et à noter. Si Bossuet a une grande parole, ce n’est pas celle-là qu’il répète ; s’il a une parole ordinaire ou familière, c’est celle dont il s’empare de préférence, et il la rend triviale en l’écrivant. […] Bossuet donne raison à Mécène et à la fable si connue : « Pourvu qu’en somme je vive… » Ce dimanche 7 d’octobre 1703, M. de Meaux a paru fort gai, à son réveil, d’avoir bien dormi toute la nuit, et de joie il lui est échappé cette parole : « Je vois bien que Dieu veut me conserver. » Il a ensuite entendu la messe dans sa chapelle et s’est encore recouché jusqu’à son dîner. […] Ici nous lui donnons la parole sans l’interrompre ; c’est lui, ou plutôt c’est nous avec lui, tant il copie et verbalise exactement !
Ce qui décrédite dans cet ouvrage les paroles dirigées contre les précieuses, ce sont des in décences pires que les plus ridicules affectations. […] « Je ne vois, dit l’auteur de la pièce, rien de si ridicule que cette délicatesse d’honneur qui prend tout en mauvaise part, donne un sens criminel aux plus innocentes paroles, et s’offense de l’ombre des choses. […] On est ravi de découvrir ce qu’il y peut avoir à redire ; et, pour tomber dans l’exemple, il y avait l’autre jours des femmes à cette comédie, vis-à-vis de la loge où nous étions, qui, par les mines qu’elles affectèrent durant toute la pièce, leurs détournements de tête, et leurs cachements de visage, firent dire de tous côtés cent sottises de leur conduite, que l’on n’aurait pas dites sans cela ; et quelqu’un même des laquais cria tout haut, qu’elles étaient plus chastes des oreilles que de tout le reste du corps 59. » L’autorité que je reconnais à Molière ne m’empêchera pas de dire qu’il y a peu de bonne foi à reprocher aux critiques d’avoir donné un sens criminel aux plus innocentes paroles et de s’offenser de l’ombre des choses. Ce n’est pas criminelles qu’on a estimé ces paroles, c’est indécentes.
Tout ce qui suit passe sur le fond solennel et lumineux d’une autre vie ; et, il n’y a plus de parole sans portée ni d’attitude sans conséquences. […] Et l’extraordinaire petite Madge, la fille du moulin, qui en trois gestes et trois paroles nous révèle une vie presque aussi fantasquement profonde que celle de la miraculeuse Hilde d’Ibsen. […] Et Bûchette et Jeanie, qui regarde en dedans, et Ilsée, Ilsée qui est l’apparition la plus essentielle que je sache ; et Marjolaine qui, la nuit, jette des grains de sable contre les sept cruches multicolores et pleines de rêves, et Cice, la petite sœur de Cendrillon, Cice et son chat qui attendent le prince ; et Lily, puis Monelle qui revient… Je ne puis tout citer de ces pages, les plus parfaites qui soient dans nos littératures, les plus simples et les plus religieusement profondes qu’il m’ait été donné de lire, et qui, par je ne sais quel sortilège admirable, semblent flotter sans cesse entre, deux éternités indécises… Je ne puis tout citer ; mais, cependant, la Fuite de Monelle, cette Fuite de Monelle qui est un chef-d’œuvre d’une incomparable douceur, et sa patience et son royaume et sa résurrection, lorsque ce livre se renferme sur d’autres paroles de l’enfant, qui entourent d’âme toute l’œuvre, comme les vieilles villes étaient entourées d’eau… [Mercure de France (août 1894).]
Platon s’arrête ici comme l’esprit humain ; il s’embarrasse dans ses paroles équivoques, et il ne conclut pas, parce qu’il n’y a évidemment rien à conclure. […] Nous ne vous en donnerons ici qu’un exemple ; il y en a presque autant que de pages dans ce pire des jeux d’esprit, le jeu de mots, le son pris pour l’idée, la parole pervertie de son sens. […] « Plusieurs fois, pendant notre entretien, Thrasymaque s’était efforcé de prendre la parole pour nous contredire. […] Mais, lorsque la discussion s’arrêta, et que j’eus prononcé ces dernières paroles, il ne put se contenir plus longtemps, et, prenant son élan comme une bête sauvage, il vint à nous comme pour nous mettre en pièces. […] On y roulerait jusqu’au néant, et c’est là cependant ce qu’on fait étudier ou admirer sur parole au genre humain, depuis plus de deux mille ans !
En partant pour Troie, Agamemnon avait confié Clytemnestre à un aëde vénérable, prêtre des Muses, plein de paroles sacrées et de chants sublimes. […] Chalcas, dont le Chœur rappelle les paroles, ne dit pas en quoi Agamemnon et Ménélas furent coupables de ce vol d’aigles fondant sur une proie fourvoyée chez eux. […] Honorez-moi comme un homme, et non comme un dieu. » — Par ces sages paroles, Agamemnon s’efforce de se mettre en état de grâce avec Némésis, l’ennemie des superbes. […] L’expiation prochaine le purifie et le transfigure ; ses paroles sonnent l’accent de la dernière heure, elles respirent la paix de l’accomplissement. […] Ici l’oracle est instantané, le meurtre qu’il annonce suit sa parole aussi rapidement que le coup de foudre suit l’éclair.
Quelles paroles furent prononcées là, je n’ai pas à le dire, mais un fait d’une importance capitale en surgit, la création de l’Internationale, ou plus exactement de l’Association internationale des travailleurs. […] Loin de jeter sur l’humanité qui les entoure de ses vagues mouvantes un regard de hauteur ou de mépris, ces hommes nouveaux n’ont pour elle que des paroles d’amour ou de forte espérance, en se déclarant liés à elle par toutes leurs fibres, par tous leurs désirs. […] Action et rêve se combinent ; il combat pour l’amour et rêve de liberté plus entière, il lutte pour la liberté et rêve d’amour plus chaleureux, avec les mêmes paroles ardentes et bouillonnantes où s’enfle et tourbillonne un plein souffle de nature. […] Mais la fausse et faible parole chrétienne s’efface à mesure que grandit la réelle et forte parole humaine. […] J’ai une foi profonde dans cette parole de Michelet : « La Sociabilité est un sens éternel qui se réveillera.
La beauté des paroles voilà, à ses yeux, la beauté extérieure. […] cette belle parole qui surgit, impromptue à nos lèvres comme une étoile au crépuscule ! […] On sent, à la vibration éteinte de sa parole, la vieillesse de sa race. […] Ce poète élégiaque, à vrai dire, ne composa pas d’élégies, il fit sangloter des paroles. […] Voilà pourquoi quelques-unes de ses paroles se présentent, défaillantes, pareilles à de fraîches épousées.
Il est possible qu’à ce moment où il entrait dans la célébrité, il ait commis quelque imprudence de ce genre, et les railleurs à l’affût, ne pouvant ôter à sa parole puissante de son onction et de son charme, essayèrent de lui ôter de son autorité. […] Ces paroles pourraient s’écrire comme épigraphe et comme sentence en tête du Recueil tout entier de Maurepas. […] Telles étaient les paroles dont Massillon, continuateur en ceci de Fénelon, nourrissait ses discours, et qu’il proférait au nom du christianisme. […] Il ne m’appartient pas de faire le rigoriste, ni de m’inscrire contre cette magie de l’expression et de la parole qui faisait que Voltaire ici ne se formalisait pas du fond : pourtant, Massillon n’est-il pas un peu jugé par ce goût même si déclaré que Voltaire avait pour lui, et par cette faveur singulière dont il jouissait de ne pas déplaire à l’adversaire ? […] Massillon établit sa paraphrase morale sur un texte qu’il déroule verset par verset et qu’il gradue ; il met sa gerbe avec ordre et l’assoit en quelque sorte sur les roues du char sacré : la marche en est égale, cadencée, nombreuse ; au lieu que la parole de Bossuet se confond le plus souvent avec le char lui-même, avec la roue enflammée qui emporte le Prophète.
M. de Chateaubriand, à la tribune des Pairs, eut ce jour-là de nobles paroles, et, cet autre jour, il en eut de malheureuses… » Sur les violences matérielles et les horreurs qui ensanglantèrent le Midi, on est unanime ; mais là encore on essaye de n’en pas trop dire et de limiter l’indignation ; on n’emprunte que discrètement à l’effroi de la tradition populaire qui a survécu et qui subsiste encore ; on craint de paraître donner dans la légende qui grossit les faits et les transfigure : à ce travail honorable, entrepris par de bons esprits qui ont oublié d’être de grands peintres, le courant incendiaire qui traversa alors et dévora toute une partie de la France, se dissipe et s’évapore ; l’atmosphère embrasée du temps ne se traduit point au milieu de ces justes, mais froides analyses ; l’air échappe à travers les mailles du filet, et c’est encore dans les historiens d’une seule pièce, d’une seule et uniforme nuance comme Vaulabelle, dans ce récit ferme, tendu et sombre, où se dresse énergiquement passion contre passion, qu’on reçoit le plus au vif et en toute franchise l’impression et le sentiment des fureurs qui caractérisent le fanatisme royaliste à cette époque. […] Mais M. de Richelieu avait commis la faute de prendre pour ministre de l’intérieur, sans le connaître, un ancien préfet de l’Empire, devenu singulièrement cher aux royalistes, M. de Vaublanc, esprit léger, présomptueux, ne doutant de rien, tranchant de l’homme d’État, se payant de paroles creuses, — « une outre gonflée de vent », comme on l’appelait, ou encore « une cymbale retentissante », — disant à qui voulait l’entendre : « J’aime les difficultés, je les cherche, j’en ai besoin, c’est mon fort. » Il se flattait en effet de résoudre toutes les difficultés par des moyens à lui et qu’il n’a jamais révélés. […] Domingon, s’approchant pour prêter serment, voulut commenter sa pensée : « Je demande, dit-il, à mon seigneur et roi la parole pour… » Il fut interrompu par le duc de Richelieu qui, après s’être incliné vers le roi comme pour recevoir ses ordres, rappela que l’usage immémorial de la monarchie ne permettait pas, dans des occasions semblables, de prendre la parole en présence du monarque sans sa permission, et ordonna, au nom de Sa Majesté, de continuer l’appel nominal. […] M. de Villèle notamment, sans éclat de parole, sans agrément de débit, nasillonneur, mais plein de ressources et d’habileté sur le terrain positif de la discussion et dans le pied-à-pied des débats, M. de Villèle, vers la fin de la session, fit ses preuves de tacticien parlementaire consommé. […] Mais pour des talents de tribune et prédestinés par la nature aux triomphes de la parole, ces difficultés, ces périls ne sont qu’un attrait et un ressort de plus : aussi cette Chambre introuvable fut-elle un théâtre d’éclatant début et de succès, et pour M.
Il n’y a plus d’éloquence religieuse après Massillon, du moins dans l’église catholique : car lorsque Rousseau parle sur la Providence et la conscience, sur la religion et sur la morale, nous avons reconnu dans sa parole une inspiration protestante ; notre grand orateur philosophique est un prêcheur de Genève. […] Il avait la parole facile, fluide, animée cependant et ardente : il n’était ni profond ni précis, mais il s’échauffait au son de sa propre parole, et il devenait entraînant. […] L’éloquence était un moyen de gouvernement, presque une nécessité pour ce parvenu qui, régnant par l’admiration et la confiance, devait entretenir la foi en son infaillible génie : il fallait que dans chacune de ses paroles il fit sentir la supériorité dont il tenait son droit. […] Dès qu’il ouvre la bouche, Napoléon est orateur ; car il règle sa parole pour enlever à ceux à qui il parle, individus ou peuples, contemporains ou postérité, la liberté de leur jugement, pour asservir leurs esprits ou leurs volontés. […] On comprendrait mal sa domination, si on ne voyait l’appui qu’elle trouva dans sa parole : à cet égard, l’éloquence a été pour lui ce qu’elle était pour les chefs des démocraties anciennes635 .
« Entre tous ceux que j’ai jamais connus, dit Commynes, le plus sage pour se tirer d’un mauvais pas en temps d’adversité, c’étoit le roi Louis XI, notre maître, et le plus humble en paroles et en habits. » Et il nous initie au procédé de Louis XI, à sa manière de gagner les gens, de les pratiquer, de ne se point rebuter d’un premier refus. […] Ce fut quand Charles eut la preuve qu’au même moment où le roi venait pour le leurrer de belles paroles et le faire revenir sur les conditions onéreuses du traité juré, il excitait sous main les Liégeois révoltés contre lui. […] « La parole du roi, dit un contemporain de Commynes, étoit tant douce et vertueuse, qu’elle endormoit comme la Sirène tous ceux qui lui présentoient oreilles. » Homère nous vante les paroles de miel d’Ulysse. […] Louis XI était de cette race et avait reçu en partage le même don, celui de manier les esprits par son accent et par les caresses de sa parole. […] Il était à table ; il perdit subitement la parole ; il voulait s’approcher de la fenêtre ; mais, croyant bien faire, on l’en empêcha, et on le retint près du feu.
Les événements lui rendaient la parole, en lui donnant raison. […] Sa parole est magistrale comme son génie. […] Ce qui veut dire qu’il est nécessaire que l’homme sache la parole avant de parler, proposition évidente et qui exclut toute idée d’invention de la parole par l’homme. […] Il faut des paroles pour penser ses idées, comme il faut des idées pour parler et être entendu. […] Ce système devient complétement inacceptable si la parole a été révélée.
Il espère que les paroles du prêtre effaceront de sa mémoire jusqu’aux dernières traces du passé. […] D’ailleurs cette parole ne doit pas être prise dans un sens absolu ; si les œuvres de M. […] Mais la parole, encore inhabile, inexpérimentée, traduit confusément les sentiments et les idées que le poète lui confie. […] Il a tiré de la parole tout ce que la parole contenait ; s’il ne veut pas se survivre, il est temps qu’il appelle à son aide les idées qu’il a jusqu’ici négligées. […] Si une parole d’encouragement, une parole inquiète et curieuse, appelait sur ses lèvres l’aveu d’une faute imaginaire, elle renoncerait sans doute au roman qu’elle a rêvé.
Le tumulte s’accroît ; vingt députés se lèvent à la fois pour demander la parole ; on dénonce l’auteur, le président, le secrétaire. […] Vous pouvez lui parler, causer franchement avec lui ; lui porter, par exemple, une parole de moi, une proposition. » — « Et quelle parole, quelle proposition voulez-vous que je lui dise ? » — « Le voici : il faut le ramener à nous, il faut qu’il nous serve, qu’il engage Bonaparte à traiter avec les princes : nous le ferons connétable. » « Je pris alors la parole : « Mais pour M. de Talleyrand, que ferez-vous ? » — « Certainement, je le servirai de tout mon cœur ; il me connaît, il sait que je suis incapable de lui manquer de parole. […] L’entrepreneur, sur ma parole, achète les matériaux et met la main à l’œuvre.
Goethe lui répond avec des paroles senties de reconnaissance pour tout ce que sa mère lui a dû de soins dans sa vieillesse et de reverdissement. […] » Ce furent les premières paroles qu’il prononça et qui pénétrèrent dans mon âme. […] Ces paroles de Goethe sur Schiller allèrent jusqu’à l’attendrissement. […] » La prise et la mort d’Hofer, qu’on laisse fusiller, lui arrachent des paroles de douleur et de haute éloquence morale. […] Le grand compositeur, sourd, misanthrope, amer pour tous, fut pour elle, dès la première visite, ouvert, confiant, abondant en bonnes et magnifiques paroles : il se mit aussitôt au piano, et joua et chanta, à son intention, ses chants les plus divins.
La favorite l’a appelée : « Envieuse. » Le Maître a déclaré : « Il est juste que celle-ci, qui est belle, ait la meilleure part. » Il a dit encore : « Il faut que tout le monde vive. » Il a conclu : « Tout travail mérite salaire. » L’esclave laborieuse est partie persuadée par ces paroles. […] Je joindrai l’utile à l’agréable : ils sauront, par les arts, amuser leurs ennuis et se rendre aimables aux femmes : leur parole, habile guerrière, les fera redoutables aux hommes. […] Ô mes frères en prostitution, saluons nos trois héros : Saint Paul qui adresse aux Romains et aux Corinthiens de sublimes épîtres, mais qui se refuse aux simonies, qui ne vit ni de l’autel ni de la parole, qui, pour avoir à manger, tisse des tentes ; — saint Spinoza qui compose la plus logique ou creuse la plus profonde des philosophies, mais qui, ayant besoin chaque jour de quelques grains de gruau pour soutenir son corps ascétique, ne veut pas les obtenir comme professeur, méprise les chaires offertes et polit des verres de lunette ; — saint Tolstoï, le plus noble génie de notre temps, qui donne ses livres libérateurs et ne se reconnaît le droit de dîner que lorsqu’il a raccommodé une paire de souliers. […] Du moins, je parle franchement, oubliant que ma parole est payée et que peut-être, à cause de ma franchise, on refusera de m’écouter et de me donner le nécessaire.
On savait que cet homme, qu’on appelait malheureux parce qu’il avait été la cause d’un désastre suprême, cherchait de toute sa force à se relever sous les accablantes paroles d’un historien qui pèsera un peu plus que lui devant l’Histoire, — les paroles de l’Empereur lui-même, — et c’était un spectacle qu’on attendait et qu’on tenait à voir que cette lutte d’un homme qui voulait sauver son honneur contre le mépris qui avait le plus le droit d’exister. […] Critique sagace et parole comptée quand il s’agit de l’appréciation des livres et des hommes, Rapetti, qui réunit la capacité étendue et diverse de l’historien au sens incessamment aiguisé du jurisconsulte, a été plus frappé que personne du caractère qu’offrent ces mémoires de Raguse où l’inconsistance essaie d’être retorse et réussit à se montrer telle, et où les machiavélismes et les sophismes de la défense brouillent la faute pour la couvrir. […] Le duc de Raguse aurait un fils, et son fils serait un héros, qu’il pourrait pleurer en lisant ces grandes et belles paroles en face de la tombe de son père, mais qu’à coup sûr il ne les reprocherait jamais à la sévérité de l’historien !
Parfois elle envahit tout l’être, et les paroles cessent, comme les notions. […] Dans l’émotion joyeuse, souvent la poussée des images devient plus rapide : les rythmes rapides ont désigné la joie, d’abord pour les paroles, puis pour le chant, qui fut un effort à rendre les paroles plus expressives. […] Iseult, pourtant, reproche à Tristan le meurtre de Morold avec des paroles âpres. […] Un flot d’harmonie les inonde ; ils s’absorbent dans la volupté qui les étreint ; les paroles s’échappent, brûlantes de leurs lèvres. […] Richard Wagner a le secret de ces émotions excessives qu’aucune parole ne rendrait.
comme le rire et les larmes s’échappent alternativement des moindres paroles ! […] N’était-ce pas, avant tout et surtout, un homme d’action bien plus que de parole ? […] C’est à peine si elle se souvient des paroles dures et brutales de son maître. […] Son amitié sainte trouverait des paroles salutaires sans se détourner de la route du devoir. […] Tisbe profère des paroles de haine et de colère contre sa rivale.
En second lieu, le geste naturel signifie quelque chose sans le secours de la parole, lorsqu’on reconnoît ce geste pour être la même démonstration qui accompagne ordinairement une certaine phrase. […] Celui qui veut dire par signes et sans proferer aucune parole, mon pere vient de mourir, est obligé de suppléer par des signes étudiez et differens de ceux qu’il emploïeroit en prononçant, aux paroles qu’il ne dit pas. […] Quoiqu’on joignit sur le théatre la parole avec le geste dans les representations ordinaires, l’art du geste étoit néanmoins enseigné dans les écoles comme un art qui montroit à s’exprimer, même sans parler. […] Tous les gestes dont je viens de faire mention, c’est Quintilien même qu’on entend, partent naturellement avec la parole.
Excepté son dernier et son plus magnifique ouvrage, intitulé « Les Paroles de Dieu », d’une hauteur de mysticisme qui épouvante l’admiration et dont je ne me suis pas senti digne de rendre compte, j’ai toujours parlé de ses livres avec l’intérêt passionné qu’ils excitent. […] Indépendamment de sa Physionomie de saints, des Paroles de Dieu et des Contes extraordinaires que je viens de rappeler, il a publié les deux traités : L’Homme et le Style, Le Jour du Seigneur ; Renan, l’Allemagne et l’athéisme au xixe siècle ; les Œuvres choisies, mises en ordre et précédées d’une Introduction, de Jeanne Chezard de Martel ; La bienheureuse Angèle de Foligno et Rusbrock l’admirable, et tout cela, qui mériterait pourtant de retentir, n’a pas rompu le silence étendu autour de cet harmonieux nom d’Hello, si bien fait, à ce qu’il semble, pour résonner comme un clairon d’or sur les lèvres de la gloire ; tout cela n’a pas mordu sur l’esprit d’un temps éperdument sorti des voies où la pensée et la piété de M. […] Mais le mystique, à la parole perdue dans le désert d’hommes sans écho de ce monde ambiant, a dû nécessairement se détourner quelque peu des choses divines pour envisager les choses humaines qu’il voulait voir, et il les a percées d’un tel regard que le monde, inattentif et indifférent au mystique, prendra peut-être garde à l’observateur ! […] Hello, qui voit tout à travers le sien, le chrétien enflammé du livre des Paroles de Dieu et qui, pour la première fois, dans la Critique, s’efforce d’introduire l’onction, l’apaisement et le ciel de sa mysticité. […] Mais, malheureusement pour la sagesse et l’orgueil des hommes, l’auteur à l’enthousiasme sacré du livre Les Paroles de Dieu, cette perle jetée sur le fumier du siècle aux porcs qui ne la ramassent pas, restera le mystique Hello, dans sa nuit invisible de flamme, avec son amour, son enthousiasme et sa foi !
Ier entretien « Toutes les choses sont en germe dans les paroles. » (Poète et philosophe indien.) […] Elles ne font entendre qu’un imperceptible gazouillement, semblable aux paroles qu’on balbutie en rêve, comme si ces charmants oiseaux, qui aiment tant la demeure de l’homme, avaient peur de réveiller les enfants encore endormis dans la chambre haute. […] Nul n’entrait dans cette maison, nul n’en sortait ; il n’y avait pas un voisin ou un paysan du village qui eût échangé en sa vie une parole ou un salut avec les habitants. […] C’est là la littérature des événements, aussi réelle et aussi nécessaire à la grandeur des nations que celle de la parole. […] Loin de moi donc les timidités de paroles !
Étrange train de paroles ! […] Parole qui peut-être eût passé sans que je la reconnaisse. […] ô parole incommunicable ! […] Une parole est à dire, préparée de toute éternité, annoncée par les prophètes ! […] Mais on aimera la grâce de l’élusion, le mouvement pur de la parole.
J’ai dépêché des courriers… De telles paroles, à une pareille heure, voilà de quoi honorer à jamais un nom dans l’histoire. […] Jusque-là il avait bien pu lui adresser la parole au conseil pour lui demander son avis, mais pas autrement ; ici c’est en déjeunant et au moment de partir pour la chasse au renard. […] monsieur, repartit le roi, il y a bien de la différence d’un renard à un loup. » — « Voilà tout ce que Sa Majesté m’a encore jamais dit, ajoute d’Argenson, quoique ma personne en soit bien connue et que je me donne bien de la peine pour son service. » — La seconde parole que le roi lui adresse se fait attendre ; elle est de huit ans plus tard, à un voyage de Fontainebleau (septembre 1732), et presque aussi insignifiante. D’Argenson, tout philosophe qu’il est, se montre attentif à noter ces légères marques d’attention du maître, de même qu’il recueille les bonnes paroles échappées sur son compte au cardinal de Fleury. […] Parlant quelque part d’un homme d’un esprit étroit et faux qui mettait son orgueil à déplaire, et qui méprisait par principe la bonté et la douceur des gens véritablement grands : « Il n’admire du fer, dit-il, que la rouille. » Parlant du caractère des Français qu’il a si bien connus, qui sont portés à entreprendre et à se décourager, à passer de l’extrême désir et du trop d’entrainement au dégoût, il dit : « La lassitude du soir se ressent de l’ardeur du matin. » Enfin, voulant appeler et fixer l’attention sur les misères du peuple des campagnes dont on est touché quand on vit dans les provinces, et qu’on oublie trop à Paris et à Versailles, il a dit cette parole admirable et qui mériterait d’être écrite en lettres d’or : « Il nous faut des âmes fermes et des cœurs tendres pour persévérer dans une pitié dont l’objet est absent. » Si ce n’est pas un écrivain, ce n’est donc pas non plus le contraire que d’Argenson : sa parole, livrée à elle-même et allant au courant de la plume, a des hasards naturels et des richesses de sens qui valent la peine qu’on s’y arrête et qu’on les recueille.
Il a adopté de bonne heure certaines idées, certains systèmes, et par toutes les voies, par la plume, par la parole, dans la chaire, à la tribune, au pouvoir et hors du pouvoir, il n’a rien négligé pour les faire prévaloir et pour les naturaliser dans notre pays. […] Les habitudes de race et d’éducation première se marquent encore dans le talent et se retrouvent dans la parole, même lorsqu’elles ont disparu des habitudes de notre vie : on en garde la fibre et le ton. […] Il n’eut pas seulement ce que j’appelle la chaleur de son ambition, il en eut par instants la flamme dans sa parole. […] Sa parole, à l’isoler en elle-même, a plutôt de la force et du nerf. […] cette parole s’est traduite en actes, elle a eu des effets trop réels.
Jadis tes paroles, tes regards appelaient sur moi tout le ciel ! […] Elle n’eut pas de conversation générale, mais seulement quelques paroles expressives échangées avec les personnes les plus considérables de la réunion. […] Ses paroles, ses proclamations étaient d’un despote repentant et presque d’un républicain. […] Je serais resté confondu et muet, car, pétrifié doublement par la beauté de l’une et par la gloire de l’autre, je ressemblais à un dieu terme qui voit passer sans parole le bruit et l’éclat du temps. […] La seconde restauration lui rendait Paris, le gouvernement représentatif, la liberté de la pensée, l’influence de la parole, la faveur de Louis XVIII, la fortune de M.
Sa présence enivrait, et chacune de ses paroles semblait élargir le cœur. […] J’étais saisi, mais les paroles les plus amicales dissipèrent aussitôt mon embarras. […] J’étais on ne peut plus heureux, car chacune de ses paroles respirait la bienveillance, et je sentais qu’il avait une bonne opinion de moi. […] « “Je réponds de la façon la plus brève. — Daru prend alors la parole. […] Mais on vit bientôt que les paroles de Napoléon avaient fait sur lui une forte impression.
» Impossible de vous rendre le comique de la parole et de l’intonation, je me tordais les côtes de rire, pendant que le pauvre diable me racontait son ulcère. […] Il croit que les morts aimés nous entourent, sont présents, écoutent la parole qui s’occupe d’eux, jouissent du souvenir de leur mémoire. […] » Dans le bruit des paroles des gens qui parlent ici pour ne rien dire, de bouches qui prudhommisent où hystérisent des lieux communs, ainsi que celle d’Aubryet, c’est une bonne fortune de rencontrer un causeur à la parole judicieuse, relevée d’une pointe d’ironie parisienne. […] Pour cela, il irait s’établir, toute une année, dans la ville poétique, et Venise lui fournit le thème de paroles toujours peintes, de paroles toujours originales, mais un peu lentes à se formuler. […] Il faut se saluer, se dire quelques paroles.
C’est la science de la parole prononcée ou écrite. […] La Grammaire considere la parole dans deux états différens, ou comme prononcée, ou comme écrite : la parole écrite est l’image de la parole prononcée, & celle-ci est l’image de la pensée. […] L’écriture symbolique fut donc remplacée par l’écriture ortographique, qui est la représentation de la parole. […] Il est impossible que l’organe de la parole fasse entendre la voyelle avant l’aspiration. […] Ce sont les paroles du P.
Ne prêtant pas d’attention au sens de ses paroles, j’ai deux ou trois fois, la sensation de l’entendre rejouer Henriette Maréchal. […] C’est une parole blagueuse, coupée de rires gamins, et de remuements qui ne peuvent tenir en place sur sa chaise. […] Arrivé dans les coulisses, je vois Méténier plus blême qu’à l’ordinaire, et Paul Alexis, affalé sur une rampe d’escalier, l’oreille tendue à la parole de sa femme, qui lui conte qu’un de ses confrères a passé la soirée à crier, que c’est un four. […] Et dans l’évocation de ce voyage, il se soulève de son abattement, ses yeux brillent : c’est le Daudet du bon temps qui a la parole. […] Et d’après les paroles du dîneur, il me semble que Dostoïevsky, est dans ces années, l’auteur le plus russe, l’auteur reproduisant le plus fidèlement l’âme de ses compatriotes.
Est-il vrai que l’âge des grandes choses, des grands esprits et des grandes paroles soit passé pour nous et pour nos descendants, et que nous n’ayons plus qu’à nous résigner à la stérilité et à couvrir nos fronts, comme les prophètes de malheur, de la cendre de nos pères ? […] je le dis avec une conviction qui n’emprunte rien au patriotisme et rien à l’illusion, pendant que la grande littérature, l’expression de l’esprit humain par la parole, baisse depuis quelques années en Europe, elle monte en France. […] XXIV Nous définissons ainsi nous-même le style, et surtout celui de madame de Sévigné, le style français, dans ces paroles. […] Eux seuls ils ont la parole à la tribune des âmes ; ils sont les orateurs de la morale ; la chaire est leur trône. […] Tous ont moins d’élévation, d’étendue et de majesté dans la parole.
Si Dieu s’était déclaré l’auteur de ces livres ou de ces chants, l’historien de ses propres mystères, le poète de ses propres œuvres, quel serait donc l’insecte assez superbe, assez insensé et assez sacrilège pour se poser en critique du Créateur de la pensée et de la parole ? […] Seulement, dans ce peuple de l’enthousiasme, l’éloquence et la poésie fondus ensemble n’étaient qu’une seule puissance, la puissance de la parole inspirée ou de ce qu’on appelle la parole de Dieu ! […] C’était par conséquent l’idiome le plus lyrique qu’un poète pût trouver tout préparé pour lui ; car tout homme inspiré était prophète, tout le peuple était chœur, et Jéhova lui-même prenait la parole à chaque instant, souverain poète qui parlait par le tonnerre et l’éclair dans les nuées. […] « Or cette femme, à ces paroles, consentit à boire et à manger, et elle s’en alla au Temple pour supplier, dans sa douleur et dans ses larmes, le Seigneur de lui accorder l’objet de son vœu. […] « La parole qui coule avec les grâces de la profondeur du génie est plus mémorable que les grandes actions. » « La pensée nous fait dieux !
« Au reste, puisque ce que vous me demandez est d’une telle nature, qu’il est bien plus facile de la sentir en silence au fond de l’âme que de l’exprimer par des paroles, je vous obéis, à cette condition que je ne vous promets pas ce que je ne puis tenir, et que j’ai de bons motifs pour ne pas vous refuser. […] ennemi, devrais-je dire, et certes, le plus ingrat, lui qui, comblé par vous de tant de bienfaits, fut si peu docile à votre parole et qui offensa tant de fois votre majesté ! […] Après ces paroles, il se reposa quelque temps comme dans la contemplation. […] votre bénédiction, mon père, avant de me quitter. » Aussitôt, courbant la tête, abaissant son regard et offrant la plus parfaite image de la piété, il répondit de mémoire et sacramentalement aux paroles et aux prières du prêtre, nullement ému de l’expression de la douleur de ses familiers qui éclatait et ne se dissimulait plus. […] Ensuite, après nous avoir caressés et embrassés tous, et demandé pardon pour les choses fâcheuses dont sa maladie avait pu être cause à l’égard de quelqu’un d’entre nous, il fut tout entier à l’extrême-onction et aux dernières paroles qu’on adresse à l’âme qui part.
Son cri de ralliement fut cette parole de saint Paul : La foi justifie sans les œwres. […] Il se déchargeait sur les conseils secrets de Dieu de cette diversité par laquelle on voyait les uns obéir à la prédication de la parole, et les autres la mépriser. […] Ou ils devaient s’opiniâtrer d’autant plus à mépriser la prédication de la parole, que Calvin les y déclarait prédestinés, ou ils pouvaient à leur tour se prétendre les élus et Calvin le réprouvé. […] Qu’on se figure que, trente ans avant l’apparition du livre de Calvin, il n’y avait en France, pour toute Bible, qu’une sorte d’interprétation grossière, où la glose était mêlée au texte, et faisait accorder la parole sacrée avec tous les abus de l’Église romaine. […] Les principes, c’est à savoir les paroles mêmes des livres saints, sont d’abord exposés et interprétés ; puis viennent les témoignages tirés des Pères, dont la suite forme la tradition consacrée dans la matière ; la réfutation des objections suit en dernier lieu.
n’avait ni l’essor de vol, ni la parole de flamme, ni les hautes sources sacrées de Bossuet : c’est bien ici que les ailes lui manquent. […] Il ne trouve à dire, en terminant, que des paroles comme celles-ci : « Ne dédaignez pas les efforts d’un cœur qui vous était attaché, qui, sauvant des débris de votre naufrage ce qu’il peut, essaie de l’appendre au temple de l’immortalité… J’entrevois déjà la fin de ma carrière, et le moment, cher prince, où l’Être des êtres réunira à jamais ma cendre à la vôtre. » Des imitations toujours, et quelle froideur ! […] Il y a des doctrines et des convictions qui soutiennent et qui portent dans tout ce qui est de la parole publique ; il y en a qui font faute et qui délaissent. […] Prince chéri, vous nous quittez… Houdon fit son buste ; le chevalier de Bouflers lui fit des impromptu, et le duc de Nivernais (paroles et musique) faisait les chansons56. […] Cependant avec deux gros yeux dont l’un regardait à droite et l’autre à gauche, son regard n’en avait pas moins je ne sais quelle douceur, qu’on remarquait aussi dans le son de sa voix et lorsqu’on l’écoutait, ses paroles étant toujours d’une obligeance extrême : on s’accoutumait à le voir… Il avait pour les arts, et surtout pour la musique, une véritable passion, au point qu’il voyageait avec son premier violon afin de pouvoir cultiver son talent en route.
Vielé-Griffin serait fréquemment tenté par ce défaut, s’il n’y échappait en exprimant alors sa pensée en paroles immédiates, sans le secours d’une Image continue. […] Mais le Poète doit chercher moins à conclure qu’à donner à penser, de telle sorte que le lecteur, collaborant par ce qu’il devine, achève en lui-même les paroles écrites. […] C’est la suggestion : on sait par quelles admirables paroles la glorifia Schopenhauer. […] Lorsqu’à la scène une strophe ou une exclamation a « porté », souvent on voit « l’effet » bientôt réduit par les paroles qui suivent et que l’acteur prononce après les applaudissements. […] La parabole, en soi, n’est pourtant qu’une parole symbolique qui suggère une idée dans un certain but, mais sans la préciser.
Villehardouin, par exemple, pour nous en tenir à lui, possédait à un haut degré le don de la parole et l’art d’insinuer les conseils que d’ordinaire la prudence lui dictait : c’est un témoignage qu’ont rendu de lui ses contemporains, et c’est ce qui ressort et s’entrevoit aussi d’après l’Histoire qu’il a laissée. […] La parole est une faculté qui, à toutes les époques, et dans un degré éminent, est donnée naturellement à quelques-uns : c’est entre la parole parlée et cette même parole écrite que la plus grande différence a lieu et qu’il se fait un naufrage de bien des pensées. […] Alors, Geoffroy de Villehardouin, le maréchal de Champagne, prit la parole par l’accord et par la volonté des autres, et commença à dire en telle manière : « Seigneurs, les barons de France les plus hauts et les plus puissants nous ont vers vous envoyés, et vous crient merci pour qu’il vous prenne pitié de la cité de Jérusalem, qui est en servage des mécréants, et pour que vous vouliez, en honneur de Dieu, les aider à venger la honte de Jésus-Christ ; et par ce motif vous ont-ils choisis qu’ils savent bien que nulle nation, ni gent qui soit sur mer, n’ont si grand pouvoir comme vous avez, et en partant nous commandèrent que nous eussions à en tomber à vos pieds, et de ne point nous en relever que vous ne l’ayez accordé. » « Et alors les six députés s’agenouillèrent, pleurant beaucoup ; et le doge et tous les autres commencèrent à pleurer de la pitié qu’ils en eurent, et s’écrièrent tous d’une voix, et tendant les mains en haut : « Nous l’octroyons ! […] Si vous vouliez octroyer que mon fils demeurât dans le pays en ma place pour le garder et gouverner, je prendrais maintenant la croix et irais avec vous vivre ou mourir, selon ce que Dieu m’aura destiné. » À ces nobles paroles du vieillard un grand cri s’éleva et l’acclamation publique répondit.
Il semble alors qu’une noble et sainte alliance se forme entre cinq jeunes hommes, pleins de foi et de vaillance. — “Moi, je couvrirai ces toiles, ces murailles de mes peintures vivantes : graveur, prépare ton burin et répands mon œuvre dans le monde entier.” — “Je ferai respirer l’argile, dit le statuaire, et le marbre tremblera devant moi, comme il tremblait devant le Puget.” — “Moi, je saurai créer des mélodies sublimes, et mes chants inspirés se marieront aux belles harmonies de l’orchestre obéissant.” — L’architecte prend la parole et dit : “Moi, je construirai le temple où vivront tes peintures, où respireront tes statues ; je bâtirai le théâtre immense où frémira le public sous l’empire de tes chants ! […] Une seule loi avait été cependant retranchée de la règle commune : Camaldules volontaires et temporaires, ils s’étaient réservé le droit illimité de la parole. […] Il n’était pas orateur ; son débit, d’une extrême lenteur et sans grâce, impatientait l’auditoire et donnait même le change aux moins mal disposés, sur la portée de ses paroles. […] Ces défauts de débit, cette longanimité de parole et cette longueur de larynx (colli longitudo, a dit Phèdre), auxquels se joignait un ton amer de misanthropie, paralysaient, chez M. de Quincy, l’effet des plus éminentes qualités : ce fut un malheur. […] Le portrait d’un parfait secrétaire de l’Académie des Beaux-Arts, tel que je le conçois, serait à peu près celui-ci : Avoir une parole grave et agréable, sévère et ornée, même gracieuse : les beaux-arts ne se séparent jamais des grâces ; — être l’homme d’un art peut-être, mais surtout et plus encore de tous les arts ; être visité et non possédé par tous les génies : Tous les goûts à la fois sont entrés dans mon âme !
Il excelle, et ce mot d’art est glacial pour désigner la profondeur de compassion qui le motive, dans la peinture des éperdûments suprêmes de l’âme humaine meurtrie, déchirée, pleurante et saignante, tressaillant de ses cris et se répandant en paroles tremblées. […] Sous la chamarrure des uniformes, en le déguenillement des souque-nilles, à travers le poli ou le débraillé des manières, ou des paroles choisies ou éructées, il sait discerner le fond même, boueux ou délicat, de l’homme, la simple créature matérielle, souffrante, transgressante, endolorie, irascible, périssable et vive. […] Et quelles saisissantes paroles dans ses confidences ! […] Dans ses livres se trouvent les paroles les plus riches en pardon pour tous ceux en qui la vie imprime ses stigmates et fait sourdre les lents sanglots. […] Les criminels, les débauchés, les filles séduites et les filles souillées, les petites méchantes gens, toute la saleté et les pustules du corps social, sont oints et pansés de ses maigres mains ; avec de simples paroles de compassion, ils sont consolés et attendris par l’articulation de leur sourd et gros murmure.
Ces deux limites sont la parole et la société. […] Le feu, accordé à l’homme pour s’en servir comme d’un instrument, a été aussi regardé par eux comme l’emblème du don de la parole. […] En grec et en latin le mot fable signifie parole. […] Ce n’est donc que dans la société qu’il faut étudier l’homme, et la société ne peut exister sans la parole. […] Mais auparavant présentons, dans son ensemble, la théorie de la parole, en y comprenant l’esquisse rapide des destinées de la langue française.
Sans doute les actions sont la meilleure garantie de la moralité d’un homme : néanmoins je croirais qu’il existe un accent dans les paroles, et par conséquent un caractère dans les formes du style, qui atteste les qualités de l’âme avec plus de certitude encore que les actions même. […] Toutes les fois que les paroles sont appelées en témoignage, on ne peut dénaturer dans le langage le caractère de vérité que la nature y a gravé ; ce n’est plus un art mensonger, c’est un signe irrécusable ; et ce qu’on éprouve échappe, de mille manières, dans ce qu’on dit. […] Quand une fois la puissance de la parole est admise dans les intérêts politiques, elle devient de la plus haute importance. […] Sans doute les plus grands hommes connus n’ont pas tous été distingués comme écrivains ; mais il en est très peu qui n’aient exercé l’empire de la parole. […] L’harmonie des paroles ajoute beaucoup à l’ébranlement causé par une éloquence généreuse.
A la clarté de sa parole s’évanouissaient les budgets, se découvraient les fautes politiques de l’empire. […] Un procès politique fit connaître Gambetta848 tout à la fin de l’empire ; c’était un fougueux méridional, à la parole éclatante et large, très avisé, très intelligent, très maître de sa volonté, capable de voir plus haut que les intérêts et les haines de parti : un véritable homme d’État. […] C’était pourtant un homme de réelle valeur, instruit, intelligent, d’une rare probité intellectuelle, plus apte à expliquer les systèmes qu’à les réfuter, et ne dissimulant rien des doctrines qu’il ne réussissait pas à détruire : il avait la parole un peu trop ronde et fleurie, élégante et chaude. […] A l’éloquence universitaire doit s’annexer une autre forme de la parole publique qui s’est développée surtout depuis vingt-cinq ans. […] Je ne vois qu’un homme à signaler, qui vraiment a fait de la conférence autre chose qu’un discours ou une lecture, et s’y est créé une forme originale de parole.
Les pages qu’écrit le journaliste s’envolent ; les paroles que distribue durant des années le professeur courent le risqueb de se perdre. […] Saint-Marc Girardin a pris soin de recueillir quelques-unes de ses meilleures paroles et de ses meilleures pages dans les agréables volumes qu’il publie aujourd’hui. […] Par sa parole vive, souple, déliée, il allait chercher l’esprit de ses auditeurs, l’attirait à lui, l’engageait à se développer librement, naturellement, sans faux pli et sans boursouflure. […] Il empruntera ses paroles à Fénelon, qu’il aime tant à citer ; il dira que ce n’est nullement la poésie lyrique en elle-même qu’il condamne, mais l’abus qu’on en fait, et le luxe d’images où elle se perd : Un auteur qui a trop d’esprit, et qui en veut toujours avoir, disait Fénelon, lasse et épuise le mien : je n’en veux point avoir tant. […] Saint-Marc Girardin, pour s’excuser de ne point paraître admirer le lyrique des modernes, nous répondrait encore par ces paroles de Voltaire, lesquelles s’accordent si bien avec celles de Fénelon : Le grand art, ce me semble, est de passer du familier à l’héroïque, et de descendre avec des nuances délicates.
La parole se substituant à l’écriture a, dans tous les temps, été le symptôme des littératures qui vont mourir. […] C’est toujours la séparation de Jésus-Christ et de son Église, malgré les paroles divines de Jésus-Christ, auquel croit pourtant le comte de Gasparin, sur leur identification éternelle. « Si Jésus-Christ ne ment pas, l’Église ne peut errer », disait ce saltimbanque de Luther, qui, par là, se condamnait lui-même… C’était assez, à ce qu’il semblait, pour l’hérésie, que ce mensonge de Jésus-Christ, mais l’historien d’Innocent III a cru devoir ajouter aux raisons connues, et réfutées tant de fois par les théologiens catholiques, d’être et de rester protestant, une conception nouvelle, qui ne fausse pas que l’idée chrétienne, mais la nature des choses elle-même, et c’est cette conception, qui n’est qu’une chimère, qui donne à la publication intitulée Innocent III le peu qu’elle a de triste originalité. […] L’Innocent III du comte de Gasparin n’est qu’un discours sur le pontificat d’Innocent III, condamné d’avance par un a priori illusoire, et dérisoire aussi… Ce pontificat glorieux, le plus glorieux — quoique exécrable — de tous les pontificats de l’Église romaine, de l’aveu du comte de Gasparin, ne pouvait pas, il faut en convenir, être raconté en quelques minutes de Conférence, avec toutes les négligences d’une parole qui se hâte, avec tous les à peu près de la circonstance, tous les faits laissés, vu leur nombre, forcément, dans l’ombre d’un discours. […] La parole, sur laquelle vivent les conférenciers modernes et qui ajoute à sa radicale infériorité l’odieuse et vaniteuse prétention d’être improvisée, glisse sur les grands sujets et ne saurait les poinçonner. […] Seulement, une réserve à ceci : Quand j’oppose la vacuité de la parole à la plénitude des grands sujets, je n’entends point parler des sermonnaires.
Il était au quatrième siècle ce qu’avait été Minutius Félix au second, un mondain néophyte servant de sa parole la foi de ses frères, et célébrant la Rome nouvelle avec la tradition littéraire d’un ancien Romain. […] « Mais nous, ignorants du gain et de l’usure, étrangers à l’art de la parole, non redoutés dans l’art de la guerre, nous ne connaissons que toi seul, ô Christ ! […] « Nous croyons les paroles, Ô Rédempteur ! […] « Ô trop heureux les pays et les peuples que tu aborde ras en nous quittant, et que le Christ visitera de tes pas et de ta parole !
. — nobles paroles de victor hugo sur sa tombe. — candidatures académiques. — tibère, tragédie de marie-joseph chénier au théatre-français. — article scandaleux de janin. […] Quand on lui demandait si, pour la tant regretter, cette campagne lui rapportait beaucoup, il répondait : « Elle me rapportait… des vers. » — Il avait épousé, il y a quelques années, une dame d’honneur de la reine Hortense, et vivait fort en famille, allant très-peu dans le monde. — Victor Hugo a trouvé d’éloquentes paroles sur la tombe de son rival, et lui-même il a eu le droit de rappeler avec sentiment le coup qui venait de le frapper30. Ces paroles de Victor Hugo ont été accueillies de tous comme elles le méritaient ; et elles ont ajouté à la consécration funèbre de ce jour.
Cette horreur de la persécution, liée en lui aux ineffaçables images de l’enfance, demeure l’idée fixe, la pensée dominante de toute sa vie ; elle lui dicta ses premiers écrits, comme ses dernières paroles. […] Ce fut un beau jour pour lui que celui où la liberté des cultes fut proclamée ; ce jour-là, il parla longuement et gravement ; ses paroles furent dignes et contenues ; elles devaient retentir bien haut dans sa bouche, et y recevoir une signification bien profonde pour qui savait que le malheur avait passé par là. […] Ses paroles, aigres et chagrines, respirent une méprisante ironie : « Je suis las, s’écria-t-il, durant le procès a du roi, je suis las de la portion de tyrannie que je suis contraint d’exercer, et je demande qu’on me fasse perdre les formes et la contenance des tyrans. » Son vœu fut entendu.
Rien ne repose ; jamais des paroles simples ne viennent replacer le lecteur dans la nature habituelle. […] Lui-même détesterait, dans la bouche d’autrui, les paroles qu’il a tracées sur le papier. […] Je me sens, aussi, exigeant envers moi-même, et je voudrais trouver des paroles égales à mes impressions. […] C’est par une belle pensée qu’il a été interdit, lorsqu’on célèbre un lugubre anniversaire, de faire descendre de la chaire aucune autre parole que les paroles dernières du saint roi, ces paroles de paix et de pardon, qui ne demandent d’autre expiation que la concorde de ses sujets, la clémence de ses successeurs et le bonheur de la France. […] La mort du roi était une parole qu’on ne prononçait qu’avec tristesse et respect.
» Alors il semble à Parsifal que de ce vase sort une voix plaintive, mystérieuse, une voix sans paroles, comme une mélodie de tendresse et de souffrance ineffable. […] Il la regarde avec surprise, et après quelques paroles consolantes, verse sur sa tête l’eau purifiante du baptême puisée à la source. […] Entre les drames d’Eschyle dont presque tout nous est resté par la conservation des paroles, et les drames de Wagner, il n’y a exactement pas plus d’analogie qu’entre l’Anneau des Nibelungen et les opéras de Verdi. […] Rien de plus proche et de plus semblable que la parole et la musique, cette dernière étant née de l’une, et formée, selon l’essai de Spencer, de tous les éléments de timbre, de rhythme, d’accent et d’intonation qui différencient la parole émue de la parole calme. […] Enfin, partant d’un ensemble indéfini, de la symphonie vague parce qu’il lui manque la précision du mot, de la parole poétique vague encore parce qu’il lui manque la signification de l’accent, Wagner a défini l’une par l’autre les deux sortes de l’émission vocale.
Voyons, est-ce le langage d’un ennemi, d’un écrivain prêt à dénaturer méchamment les paroles de l’homme, dont il redonne les conversations ? […] Jules Huret qui a très fidèlement rapporté mes paroles. — « J’affirme que les conversations données par moi, dans les quatre volumes parus, sont pour ainsi des sténographies, reproduisant non seulement les idées des causeurs, mais le plus souvent leurs expressions, et j’ai la foi que tout lecteur désintéressé et clairvoyant, reconnaîtra que mon désir, mon ambition a été de faire vrais, les hommes que je portraiturais, et que pour rien au monde, je n’aurais voulu leur prêter des paroles qu’ils n’auraient pas dites.
non, répondait-il ; nous aurons la liberté anglaise. » Il aimait dès lors et pressentait le genre d’éloquence anglaise, parlementaire, par instinct d’orateur et par besoin d’une honnête liberté dans la parole. […] Dubois, caractérisant dans le Globe cette sorte d’éblouissement causé par la parole de M. […] Il improvise en parole, mais il n’improvise pas au courant et à la pointe de la plume. […] Combien de fois, au temps même de ces Cours nourrissants où nous nous rafraîchissions avec toute la jeunesse, vers 1829, encore émus de sa parole que nous venions de quitter si éloquente, ne l’avons-nous pas retrouvé, esprit tout divers et inépuisable de grâce dans des causeries nouvelles ? […] Villemain dans le Globe, qui débuta après lui par des couronnes académiques, a porté dans la poésie latine qu’il professe un sel délicat et rare, une urbanité élégante et simple, une aménité de parole où l’art disparaît, pour ainsi dire, dans une décence naturelle.
Ce vent de la parole dont Villemain a joué toute sa vie, il en joue aujourd’hui pindariquement pour Pindare ; mais une vue réelle, un mot profond, une pensée qui attire une autre pensée, voilà ce qu’en six cents mortelles pages nous défions de trouver une fois. […] Bon pour faire brillamment une classe, Villemain voulut un jour aborder l’histoire et il ne comprit rien à celle de Grégoire VII, sous laquelle sa minceur d’homme de lettres resta écrasée… Pas plus d’instinct que de réflexion, Villemain ne va à ce qui est supérieur et grand, et pas plus dans l’ordre de la parole, qui est son domaine, que dans l’ordre de l’action, qui ne l’est pas… Chose à remarquer ! […] À proprement parler, il n’y a pas d’histoire de la tribune, par l’impérieuse et souveraine raison qu’il n’y a pas d’art de la parole, si ce n’est pour les rhéteurs qui se vantent de l’enseigner. L’art de la parole n’existe pas en soi. […] Elle n’est jamais la parole pour la parole, mais la parole en vue d’un but à atteindre ou d’une résistance à briser.
On s’écarte pour laisser passer une masse noire que des femmes soutiennent : c’est la veuve secouée de sanglots, que l’on transporte au fond du hall, et que la barbarie du protocole force à recevoir les poignées de main et les paroles de condoléances, comme si elle avait encore la conscience des choses et la possession d’elle-même. […] » Et il y a dans cette parole du dernier boulevardier, du dernier viveur du troisième Empire, du chroniqueur sceptique, une note imprévue qui attendrit. […] Jean, prend la parole, puis c’est Paul Redonnel, Jean Carrère, Henry Degron et Léon Maillard. […] Et ma pensée évoque ce dernier banquet de la Plume en l’honneur de Paul Adam (7 décembre 1899) où, dans la joie et les lumières, Deschamps sentait monter vers lui la sympathie de trois cents convives, exaltés jusqu’à l’ivresse par l’éloquence de l’auteur du Mystère des foules et la vibrante et chaude parole de Moréas.
Des conciliateurs se sont présentés avec de sages paroles entre les deux fronts d’attaque. […] L’esprit des peuples, en un religieux silence, entend longtemps retentir de catastrophe en catastrophe la parole mystérieuse qui témoigne dans les ténèbres : Admonet, et magna testatur voce per umbras. Quelques âmes choisies recueillent cette parole et s’en fortifient. […] Il ne sera jamais l’écho d’aucune parole, si ce n’est de celle de Dieu.
L’empereur eut, à celle occasion, des paroles de sensibilité pour le roi et le père malheureux, et il autorisa Horace Vernet à les redire25. Horace, à son retour de France, moins de six semaines après, se trouva d’autre part chargé confidentiellement par Louis-Philippe de certaines paroles amicales et très-conciliantes qu’il n’attendait que l’occasion pour placer. […] Cependant les choses politiques suivirent leur cours, et la mésintelligence diplomatique continuant de plus belle, Horace finit par se féliciter de n’avoir pas redit complètement des paroles d’amitié qui avaient perdu tout à-propos26. […] Que si l’on tient à savoir au juste les paroles dites par l’empereur Nicolas à Horace Vernet au sujet de la mort du duc d’Orléans, je les donnerai en propres termes, d’après une note digne de foi que j’ai sous les yeux, et qui a été écrite sous la dictée d’Horace lui-même. […] Je me sais bon gré de ma retenue pendant mon voyage et de n’avoir pas tout dit, car véritablement, d’après ce qui se fait ici par ordre supérieur, je crois que notre bon roi a voulu se ficher de moi en me chargeant de belles paroles ; car je ne puis douter que, d’un autre coté, il n’agisse autrement… » Évidemment, de part et d’autre, on l’avait chargé de simples politesses ; on ne l’avait pas pris très au sérieux comme ambassadeur.
. — Paroles sans musique, avec une lettre d’Auguste Vitu (1889). — Le Trèfle à quatre feuilles (1890). — Mon ami chose (1893). — Le Portrait de Manon (1894). — Nurka (1896). […] [Lettre-préface à Paroles sans musique (1889).]
et, avec ta parole suave et avec tout ce qui est nécessaire à son salut, aide-le dans sa route, afin que j’en sois réjouie ici ! […] Dante reprend courage à l’aspect et aux paroles de Béatrice, écarte la bête qui obstrue son chemin, remercie Virgile et se trouve aux portes de l’enfer. […] « Telles furent les paroles qui arrivèrent jusqu’à nous. […] ” « Quand je pus recouvrer la parole : “Hélas ! […] « “Mais, si mes paroles doivent être une semence qui fructifie à la honte du traître que je ronge, tu me verras parler et pleurer à la fois.
Il faut donc prendre ces harangues pour de simples paroles assez exactement recueillies, où le maître (car Henri IV en est un) dit à sa manière à ceux dont il a besoin et qui lui résistent, qui lui viennent faire remontrance, des vérités parfois rudes, mais qu’il sait égayer d’un geste ou d’un sourire. Toutes ces harangues à des parlements sont d’un roi qui ne badine pas ou qui ne badine qu’en paroles, qui ordonne, et qui a l’épée au côté. […] Mes prédécesseurs vous ont donné des paroles avec beaucoup d’apparat, et moi, avec jaquette grise, je vous donnerai les effets. […] Quoi qu’il en soit, ceux dont il abandonnait la communion ont triomphé et triomphent encore de cette parole légère, échappée alors dans le secret. […] Napoléon, lui, de l’arc vibrant de sa lèvre, lance sa parole d’acier et ne sourit pas.
Toutefois, après qu’on s’est emparé de ses propres aveux à lui-même, après qu’on a écouté sur son compte des adversaires tels que Retz et qu’on a recueilli leurs paroles, il n’y a plus qu’à passer outre sans insister. […] Il accordait beaucoup plus aux autres ; il insinuait ses observations sans les imposer ; il ne fermait, la bouche à personne ; il n’arrachait point la parole comme on le fait si souvent ; il savait que « l’intérêt est l’âme de l’amour-propre », même en conversation ; que, si chacun ne pense qu’à soi et à ce qu’il va dire, il paralyse les autres ; que la meilleure manière de les ranimer et de les tirer de l’assoupissement ou de l’ennui, c’est de s’intéresser à eux et de toucher à propos les fibres qui leur sont chères. […] Comme on le respecte beaucoup, on attend qu’il ait fini pour glisser un mot ; mais il a trouvé l’art de ne jamais finir ; car, ayant respiré en toute hâte au milieu d’une parenthèse, il repart et court de plus belle, si bien que la parole lui reste toujours, que sa phrase commencée dans un salon se continue dans un autre ; que dis-je ? […] Fuyons les expressions trop recherchées, les termes durs ou forcés, et ne nous servons point de paroles plus grandes que les choses 6. […] Un autre, au contraire, est égal en beauté aux immortels, mais la grâce ne couronne point ses paroles. » (Odyssée, VIII, 167.)
Je suis donc tenté, puisque j’ai si fréquemment la parole, de la prendre cette fois pour répondre de mon mieux à ces nombreuses questions et pour discourir devant le public, avec une liberté décente, sur ce sujet et sur d’autres qui y touchent de près. […] Mais n’y eût-il, après examen et débat contradictoire, d’autre résultat que de rester plus ferme chacun dans son opinion, et de donner satisfaction au public avec qui il faut toujours plus ou moins compter, ce ne serait pas avoir perdu son temps ni ses paroles. […] Éloquence publique, art de la Parole (chaire, tribune, barreau, etc.). […] Lacordaire est entré à l’Académie non pour sa robe, non pour sa croyance, apparemment, mais pour son talent de parole et son éloquence ; il eût fait partie de la section désignée par ce nom. […] convaincu peut-être et converti, et cela dans une Compagnie dont l’égalité est le principe et dont la parole est l’âme ; — oui, être menacé de ne plus sortir d’une même nuance et bientôt d’une même famille, être destiné, si l’on vit encore vingt ans, à voir se vérifier ce mot de M.
C’est bien là, se disait-on en lisant ces derniers recueils, c’est bien l’homme à la parole insolente, offensante ; il a besoin à tout prix de la placer. […] On aurait retrouvé, soi aussi, quelque chose de sa parole et de son éblouissement ; on aurait reçu le choc et l’étincelle. […] Le poète a dit des paroles qu’elles étaient ailées ; pourquoi leur rogner les ailes ? […] N’est-ce pas ainsi que Lamartine, un jour, pendant une pluie d’orage, sut tenir en suspens tout un banquet à Mâcon, par le charme et les chaînes d’or de sa parole ? […] La couleur, qui flottait brillante et diffuse dans sa parole et dans toute son action, n’a pas su se fixer sur le papier45.
Un tel acte aurait eu besoin, pour faire son effet, d’être accompagné et précédé de tous les éclairs, des tonnerres et des larges torrents de l’éloquence ; et la parole de M. de Girardin dans une assemblée n’a que les qualités de sa plume, concision et netteté. […] Il est de ceux qui joignent volontiers l’acte aux paroles. […] Je glisse donc sur la partie des réformes radicales proposées alors par La Presse, et qui se confondaient dans le tumulte avec tant d’autres projets moins cohérents et moins concertés ; mais ce qui tranchait et la distinguait honorablement, ce que tous aussitôt comprirent, ce fut l’opposition franche et déclarée que M. de Girardin commença à faire dans le courant de mars aux vagues paroles, aux concessions continuelles, aux illusions fatales du Gouvernement provisoire, comme aussi à la propagande violente de quelques-uns de ses membres dans les départements. […] ici nous sommes prêts à reconnaître, nonobstant toutes les exceptions flagrantes, une tendance générale de la société et de la civilisation vers l’ordre d’idées pacifiques et économiques prêchées par M. de Girardin ; et c’est ce qui a fait dire de lui à M. de Lamartine en une parole heureuse et magnifique comme toutes ses paroles : « Chez Girardin le paradoxe, c’est la vérité vue à distance. » Mais à quelle distance ? […] Byron l’a dit dans une parole célèbre : « Les mots sont des choses, et une petite goutte d’encre tombant, comme une rosée, sur une pensée, la féconde et produit ce qui fait penser ensuite des milliers, peut-être des millions d’hommes. » Et vous-même, sous l’empire des faits, sous le coup de l’évidence, vous l’avez dit, et aussi énergiquement que Byron : « La puissance des mots est immense ; il n’en est peut-être pas de plus grande sur la terre.
Les paroles grossières ou cruelles que des hommes en pouvoir se sont souvent permises dans la conversation, devaient, à la longue, dépraver leur âme, en même temps qu’elles agissaient sur la morale de ceux qui les écoutaient. […] Les paroles tout à la fois vulgaires et féroces produisent, à quelques égards, le même effet que la vue du sang : lorsqu’on s’habitue à les prononcer, les idées qu’elles retracent deviennent plus familières. […] Une femme perd de son charme, non seulement par les paroles sans délicatesse qu’elle pourrait se permettre, mais par ce qu’elle entend, par ce qu’on ose dire devant elle. […] Les opinions républicaines se confondaient dans quelques têtes avec les paroles rudes et les plaisanteries rebutantes de quelques républicains, et les affections non raisonnées s’éloignaient naturellement de la république. […] Je dirai plus, une suite de hasards peuvent conduire un homme à se faire remarquer par quelques faits illustres, sans qu’il soit doué cependant ou d’un génie supérieur, ou d’un caractère héroïque ; mais il est impossible que les paroles, les accents, les formes qu’on emploie envers ceux qui nous environnent, ne caractérisent pas la vraie grandeur de la seule manière inimitable.
Mais le moment de ces maximes de conservation et de guérison sociale n’était point encore venu : les paroles de Portalis tombaient dans une atmosphère enflammée, et s’y altéraient au gré des passions. […] Âgé de près de soixante ans, presque entièrement aveugle, d’une physionomie sérieuse et fine qu’éclairait un demi-sourire, d’une parole facile, claire, élégante et même fleurie, d’une discussion tempérée et lumineuse, d’une vaste mémoire, consulté en sa maison ou apporté au Conseil sur sa chaise curule comme un vieillard homérique, il nous rend avec originalité ces personnages de l’antique Rome dont Cicéron a célébré les noms, les P. […] On nous dit que, par sa manière de plaider, il fit révolution au barreau, et je me figure, en effet, que ce parlement distingué, mais éloigné comme il était de la capitale, avait conservé beaucoup de ses formes antiques et surannées, de celles dont on avait vu le jeune d’Aguesseau s’affranchir en son temps en portant la parole au parquet de Paris. […] Tant il est vrai qu’à chacun appartient sa tâche et son rôle ; celui de Portalis était de ne point innover en détruisant : « Le mal de détruire, disait-il, est infiniment plus grand que celui de souffrir. » — « Il est plus dangereux de changer, disait-il encore, qu’il n’est incommode de souffrir. » Mais la destruction faite, et quand la violence aveugle ne régnait plus, il arrivait, il se levait avec calme, il trouvait des paroles de douceur, d’équité, de renaissance et presque de convalescence sociale, et il excellait à infuser quelque chose de la moralité ancienne dans le fait nouveau. […] Ce n’était pas seulement l’esprit d’humanité, c’était aussi l’esprit de parti qui s’emparait à l’instant de ces belles paroles de Portalis.
Le jeune séminariste, mis en présence du monument inconnu, ne put que répondre : « Attendons. » Ces deux jeunes gens, compatriotes et dès lors adversaires, ne se sont jamais revus depuis ; mais l’abbé Gerbet et Jouffroy, en se combattant l’un l’autre plume en main, n’ont cessé de le faire dans les termes de la controverse la plus digne, et Jouffroy, dont le cœur, sous cette parole absolue, était si bon, ne parlait, s’il m’en souvient, de l’abbé Gerbet qu’avec les sentiments d’une affectueuse estime. […] Il suffit d’une parole, d’un souffle émané du Vatican, pour dissiper ce qui pouvait sembler nuageux et obscur dans les doctrines de l’abbé Gerbet. […] L’auteur commence par rechercher historiquement les idées générales, universellement répandues dans l’Antiquité, de sacrifice, d’offrande, de désir et de besoin de communication avec un Dieu toujours présent, qui ont servi de préparation et d’acheminement au mystère ; mais, au milieu des digressions historiques et des distinctions dogmatiques fines ou profondes, il mêle à tout moment de belles et douces paroles qui sortent de l’âme et qui sont l’effusion d’une foi aimante. […] Le livre de l’abbé Gerbet est rempli de ces paroles d’or ; mais, quand ou veut les détacher et les isoler, on s’aperçoit combien elles tiennent étroitement au tissu. […] S’il avait été, une fois ou l’autre, assujetti à rendre sa parole publique, il aurait bien été obligé d’éclaircir, de dégager, d’élargir, non pas ses points de vue, mais les avenues qui y mènent.
Lavergne, Antonin (1863-1941) [Bibliographie] Les Paroles d’amour, avec préface de Frédéric Bataille (1893). […] Émile Faguet Les Paroles d’amour, de M.
Ne me payez donc de belles paroles et promesses, mais je veux vous étreindre à deux bras pour de votre presence être sûre. […] Vive image de sa mission parmi les hommes auxquels il devait distribuer la parole, ce pain de vie ! […] — Madame, répondit le rude apôtre, la parole est plus stérile que le rocher quand c’est une parole mondaine ; mais, quand elle est inspirée par Dieu, les fleurs, les épis et les vertus en sortent ! […] La reine, consternée de l’impuissance de ses charmes, de sa parole et de son rang, sur ce cœur cuirassé de fanatisme, pleura comme un enfant devant le sectaire. […] Je n’aurai de joie que lorsque ton cœur sera aussi désolé que l’est aujourd’hui le mien. » En achevant ces paroles, la reine s’évanouit.
Au milieu de tout ce qu’elles renferment de gracieux, d’aimable, de tendre même au point de vue de la famille, il fait remarquer qu’on n’y rencontre jamais l’expression d’un sentiment religieux, pieux, jamais une larme de tendresse ou de tristesse, une parole d’humilité ou de compassion. […] Il y a, en ce qui est du jugement littéraire proprement dit, une page excellente, définitive : Les Paroles d’un croyant, dit M. […] On a beaucoup admiré les Paroles d’un croyant ; nous n’avons, pour notre part, jamais su goûter ce pastiche apocalyptique, ce genre emprunté à la Bible et qui consiste essentiellement dans le dépècement du discours en versets et dans l’usage de la conjonction et au commencement des phrases, cette prose soi-disant poétique enfin, qui trahit par son ambition même l’impuissance d’écrire un poème véritable. […] On pouvait croire qu’il manquait tout à fait de tendresse et d’onction ; mais, par un ou deux chapitres de ces Paroles même d’un croyant qu’on vient de voir si sévèrement jugées, il a commencé de prouver qu’il n’était pas tout à fait dépourvu de cette fibre-là. […] Le retrouvant au printemps de 1846, il avait oublié quelques critiques de moi un peu vives, et me les avait pardonnées ; il me parut aimable, gai, comme il l’était volontiers dans ses bonnes heures, fécond de vues et jeune d’esprit ; et entre autres choses, il me dit ces propres paroles qui étaient une manière d’apologie en réponse à des objections qu’il devinait au-dedans de moi et que je me gardais bien d’exprimer ; je ne donne d’ailleurs l’apologie que pour ce qu’elle vaut : « J’ai reçu de la Providence, me disait-il, une faculté heureuse dont je la remercie, la faculté de me passionner toujours pour ce que je crois la vérité, pour ce qui me paraît tel actuellement.
Des hommes animés d’une joie saine doivent chanter d’abord Dieu, d’après de pieuses traditions et avec de chastes paroles, puis demander par libations et prières le pouvoir d’accomplir la justice. […] Les vierges, l’ayant interpellée de douces paroles, lui persuadèrent adroitement de retirer des portes sans délai le lourd verrou. […] La sagesse dont il était le disciple, les croyances qu’il avait recueillies sur l’essence divine de l’âme et la vérité absolue, fortifiées de sa puissante parole, trouvaient près de lui d’autres maîtres pour les enseigner, d’autres poëtes pour les chanter. […] Hormis le mensonge des dernières paroles, les merveilles dont se vante ici le poëte physicien n’excèdent pas ce que l’observation et, sur quelques points, la prescience des phénomènes de la nature pouvaient lui suggérer de conseils utiles aux laboureurs et aux pâtres de Sicile. […] Est-ce Empédocle ou Pindare dont les paroles altérées sont là reproduites ?
En français, le premier acte seul avait été exécuté, au concert, sous les paroles de M. […] Victor Wilder : les hésitations, les illusions qu’on gardait encore à la lecture, au théâtre se sont d’un coup dissipées ; c’est là, sous l’accompagnement de cette extraordinaire musique que l’inanité des paroles doit lugubrement éclater. […] Tout ce que l’on pourrait accorder, ce serait de faire exécuter dans les concerts tous les passages des drames de Wagner où la mimique, le décor et la parole n’interviennent pas. […] Il est incontestable, croyons-nous, que Wagner, tout en spécialisant son art en Allemagne par l’importance qu’il a donnée au rythme particulier de la parole, a destiné son œuvre à l’humanité tout entière, à la perception de tous. […] Cette parole de Wagner à l’issue de la première Tétralogie à Bayreuth : « et maintenant, vous avez un art !
Aux belles la parole. Parole et rôle riment très-mal. […] Serait-ce qu’une montagne prête d’accoucher lui aurait paru plus contraire à la vraisemblance qu’une lime qui adresse la parole à un serpent ?
Et je tins parole ; mais je ne donnai pas suite à mes projets de représentations théâtrales. […] Ces confidences d’Abner amènent ces vers, restés monuments de parole, dans la bouche du grand-prêtre. […] Cependant, comme la musique emportait les paroles sur l’aile des mélodies, l’effet de ce chœur répandait un parfum de recueillement, d’espérance et de prière dans la salle. […] (Ici commence la symphonie, et Joad aussitôt reprend la parole.) […] ” Si le roi eût pu prévoir l’impression que firent ces paroles, il ne les eût point dites ; mais il ne pouvait soupçonner que ces paroles tomberaient sur un cœur si sensible.
Je crois, ma parole, que c’est ton gueux de fils. […] « Mais ces paroles : ah ! […] Agissez d’après mes paroles. […] En a-t-on dit des paroles, splendides de niaiserie convaincue ! […] C’est que pour elle aussi a retenti la parole mystérieuse : Marche !
Pline a recueilli ce que savait son siècle ; rien n’est à lui dans son livre que la parole. […] Sa parole est un ordre, il faut lui céder ou être haï. […] Voyez si les larmes y manquent et si jamais on les fit couler avec des paroles moins ambitieuses. […] » et une longue faiblesse succéda à ces douloureuses paroles. […] Mais ce silence est plus éloquent que des phrases: voilà le style sans style, le murmure du cœur muet de paroles, mais qui n’a pas besoin de paroles pour être entendu.
La pensée de ce Dieu, qui éclate avec les éclairs et les grondements de sa foudre dans les paroles de son poète, ajoute à ce chant de guerre un caractère surnaturel, qui est, par excellence, le caractère de la poésie lyrique des Hébreux. […] « Point de parole ici-bas et là-haut qui soit vide de lui ! […] « Éclairs, grêle, neige, brouillards, vents des tempêtes qui exécutez ses paroles, chantez ! […] Il n’y a pas une piété sur la terre qui ne prie avec ses paroles ou qui ne chante avec sa voix. […] ô éternité de la parole inspirée !
Par aversion pour le clinquant, il fait trop fi des richesses de la parole et des magnificences légitimes qu’en tirent la passion, la-fantaisie ou l’éloquence. […] Eugène Viollet-le-Duc, élevé par lui librement, philosophiquement, mis de bonne heure à même des belles choses, entouré des bons et beaux exemplaires en tout genre, est devenu l’homme distingué que nous savons, le restaurateur le plus actif et le plus intelligent de l’art gothique en France, ayant en toute matière des idées saines, ouvertes, avancées, et maniant la parole et la plume aussi aisément que le crayon ; j’ajouterai qu’à en juger par ses directions manifestes, il n’a guère en rien les doctrines de son oncle ; et c’est en cela que je loue ce dernier de n’avoir point appliqué, dans une éducation domestique qu’il avait tant à cœur de mener à bien, de vue exclusive ni de système personnel et oppressif. […] Les allées et venues des personnes de la maison, les visites, rien ne le tirait de son calme, à moins que quelques paroles malsonnantes à son oreille ne vinssent, comme une étincelle électrique, enflammer son cerveau. […] Le travail littéraire dont s’occupait Ballanche, en ce moment lui faisait diriger ses lectures sur les ouvrages de Bossuet, et comme le dîner de la duchesse lui avait délié la langue, il laissa échapper sur le grand évêque quelques paroles dédaigneuses qui furent relevées aussitôt par Mme Récamier et le duc de Laval. […] » Puis s’arrêtant tout à coup : « Il y aurait là cinquante mille fenêtres que je m’en précipiterais d’un coup, en témoignage de ce que j’avance. » En laissant échapper ces dernières paroles, il appuyait la main tantôt sur l’épaule de M. de Laval, tantôt sur celle de Lord Kinnaird et du duc de Rohan, qui, ainsi que les autres assistants, ne pouvaient se tenir de rire, hilarité à laquelle le bon Ballanche se laissa bientôt aller lui-même. » Voilà un portrait d’ami pris sur nature et qui sort tout : vivant d’un croquis, ou d’un procès-verbal tracé évidemment le soir même.
De cette première rencontre il résulta, à deux jours de là, un rendez-vous ; ce rendez-vous ne se donna point non plus, on peut le croire, sans toutes sortes de façons et de cérémonies ; mais Michel était beau, d’une taille noble, d’une grande finesse de physionomie, d’une parole aisée et sobre qui ne montrait que l’homme du monde et qui ne laissait deviner en rien le métier ni la profession. […] écoutez. — J’écoute. — Vous allez me donner votre parole de gentilhomme que… » « M. […] donnez-moi votre parole d’homme : vous ne chercherez jamais à me connaître… » Michel, le poète artiste, donna sa parole, et il la tiendra : il ne saura jamais au juste ce qu’était la dame. […] Ces petits amours sont des oiseaux fort farouches ; les grands mots surtout leur font peur. » En général, Michel se fait peu d’illusion sur les femmes ; il sait la vie, il sait ce que valent la plupart du temps ces grandes défenses : « La parole chez les femmes est toujours un mensonge convenu ; on peut facilement la mal traduire et se tromper de ruse. » Mais ici ce n’est pas le cas. […] je méprise la parole et les phrases.
La parole prononcée et parlée a plus d’action et de force que la parole écrite. […] La parole vive, en effet, a toujours ses familiarités, ses négligences aimables et ses grâces. […] Enfin un mauvais mot, parce qu’il est aisé à remarquer, est capable de faire plus de tort qu’un mauvais raisonnement, dont peu de gens s’aperçoivent, quoiqu’il n’y ait nulle comparaison de l’un à l’autre. » Le grand adversaire de Vaugelas, l’antique et docte La Mothe-Le-Vayer s’est fort récrié sur cette parole ; il la tient pour un blasphème et se révolte contre une telle légèreté. […] Vaugelas, en terminant sa Préface, prend soin de tracer le programme d’un nouvel ouvrage qui serait à faire sur la langue, et que le sien n’a pas la prétention de suppléer : ce serait, après avoir célébré l’excellence de la parole en général, de tracer un historique de notre langue en particulier, de la suivre dans ses progrès et ses âges divers, depuis ses premiers bégayements jusqu’à « ce comble de perfection » où elle est arrivée, et qui permet de la comparer aux nobles idiomes de l’antiquité : témoin tant de belles traductions de cette même antiquité, dans lesquelles nos Français ont égalé quelquefois leurs auteurs, s’il ne les ont surpassés. […] ce n’est point Patru auquel il semble, en terminant, vouloir passer la parole et résigner le sceptre de la rhétorique et de l’éloquence.
Dans un admirable portrait de Wallenstein, ce glorieux généralissime de l’Empire assassiné par ordre de son maître, Richelieu, qui se reporte à sa propre situation de ministre calomnié et sans cesse menacé de ruine, trouve de magnifiques paroles pour caractériser l’infidélité et l’ingratitude des hommes ; et, après avoir raconté la vie de ce grand guerrier, après nous l’avoir montré avec vérité dans sa personne et dans son habitude ordinaire, il ajoute en une langue que Bossuet ne surpassera point : Tel le blâma après sa mort, qui l’eût loué s’il eût vécu : on accuse facilement ceux qui ne sont pas en état de se défendre. […] Mais pour ceux qui voudraient tirer parti contre notre nation de ses paroles, ajoutons que, selon lui, cette légèreté française porte souvent son remède en elle-même ; car, si elle nous jette souvent dans des précipices effroyables, elle ne nous y laisse pas, « et nous en tire si promptement, que nos ennemis, ne pouvant prendre de justes mesures sur des variétés si fréquentes, n’ont pas le loisir de profiter de nos fautes ». […] Les flatteries l’emportèrent jusque-là qu’il crut que toutes les louanges qu’on lui donnait étaient véritables, et que la grandeur qu’il possédait était moindre que son mérite… Il était plein de belles paroles et de promesses qu’il ne tenait pas fidèlement ; mais, lorsqu’il donnait des paroles plus absolues, c’est alors qu’on était plus assuré de n’avoir pas ce qu’il promettait ; et, lorsqu’il promettait le plus son affection, c’était lorsqu’on avait plus de sujet d’en être en doute : tant il manquait de foi sans en avoir honte, mesurant tout l’honneur à son utilité ! […] La théorie de Richelieu est dans ces paroles ; il est vrai, comme il nous l’a dit ailleurs, que, s’il fallait absolument choisir, il jugeait la punition plus nécessaire encore que la récompense, et il la faisait marcher devant. […] Si un homme est sujet à ses vengeances, le mettre en autorité est mettre l’épée à la main d’un furieux. » De telles paroles montrent à quel point l’esprit de Richelieu était loin de donner dans les extrémités violentes.
En délicat observateur et fin comédien, il me donne la représentation des trois couches de la génération actuelle : les vieux paysans, dont il imite le parler sonore et vide, et composé de monosyllabes et d’adverbes qui ne concluent jamais ; les fils de ces paysans à la parole avocassière et belle-diseuse ; les petits-fils, la couche silencieuse, diplomatique, et souverainement destructive. […] Qu’il le veuille ou qu’il ne le veuille pas l’aristo perce dans chaque parole du démocrate, et parle-t-il de Gambetta, qu’il dénomme le prince de la goujaterie, on sent tout le dédain de l’homme bien né pour le fils de l’épicier de Cahors, et pour tous les côtés roturiers du parvenu. […] » Mardi 28 décembre Au dîner des Spartiates de ce soir, le général Turr rappelait cette parole du juif Mirès, parole à lui dite en 1860 : « Si dans cinquante ans, vous ne nous avez pendus, vous les catholiques… il ne vous restera pas de quoi acheter la corde pour le faire ! […] Il y a au troisième acte une déclaration de Jack dont pas une parole n’est à changer, déclaration qui ne portait pas cependant. Alors Lafontaine a eu l’idée de montrer à Chelles, comment elle devait être jouée, cette déclaration marchée, — et rien qu’avec une hésitation, un faux départ de la marche, et pour ainsi dire, des balbutiements de pieds, accompagnant le balbutiement amoureux des paroles, cette déclaration a pris tout à coup un très grand effet.
Que ce soit la mer merveilleuse, tout enguirlandée de varechs et de madrépores, comme une galaxie d’étoiles roses ; que ce soit le fleuve, où tant de fois il admira rouler le Bateau Ivre ; que ce soit le lac plat, ou Autre décor, une eau de songe et jamais grise ; que ce soit la source bruissante en cascatelles d’écume, ou la fontaine de girandes lumineuses, ses yeux avides de cliquetis et de clarté s’amusent puérilement des perles blanches et des cristallines paroles grêles des gouttes d’eau. […] Des chœurs répètent les bonnes paroles. […] De nouveau, au fond de ses veines, il a entendu, enfermée dans de beaux rythmes, la parole d’antiques choses.
Je me bornerai donc à dire quelque chose des compositions musicales des anciens, qui n’étoient point faites sur des paroles, et qui ne devoient être executées que par des instrumens. […] Nous avons observé déja dans le premier volume de cet ouvrage que les symphonies étoient susceptibles, ainsi que le sont les chants musicaux composez sur des paroles d’un caractere particulier qui rende ces symphonies capables de nous affecter diversement en nous inspirant tantôt de la gayeté, tantôt de la tristesse, tantôt une ardeur martiale et tantôt des sentimens de dévotion : le son des instrumens, écrit Quintilien, l’auteur le plus capable de rendre compte du gout de l’antiquité, nous affecte, et bien qu’il ne nous fasse pas entendre aucun mot, il ne laisse point de nous inspirer divers sentimens. […] Si cela n’étoit point, pourquoi les chants des symphonies qui ne nous font point entendre aucune parole, pourroient-ils nous émouvoir à leur gré, ainsi qu’ils le sçavent faire ?
Mais, en obéissant à son caractère sombre et hautain, Maturin parte de la faim avec d’autres paroles. […] Et malheur à ceux qui méconnaissent la vérité de ces paroles, ils seront dupes toute leur vie. […] Il étudiera ses moindres paroles pour épargner à sa maîtresse la honte d’un regret. […] Le silence est une plainte et la parole une querelle. […] Sa parole majestueuse et sereine force l’incrédulité à l’indulgence, et l’espérance au respect.
Selon une tradition, Jésus aurait prononcé cette parole, qui fut dans son cœur, sinon sur ses lèvres : « Père, pardonne-leur ; ils ne savent ce qu’ils font 1178. » Un écriteau, suivant la coutume romaine, était attaché au haut de la croix, portant en trois langues, en hébreu, en grec et en latin : LE ROI DES JUIFS. […] Les paroles qu’on y prête à Jésus n’ont pu être écrites qu’après le siège de Jérusalem. […] En général les dernières paroles prêtées à Jésus, surtout telles que Luc les rapporte, prêtent au doute. […] Les dernières paroles des condamnés célèbres sont toujours recueillies de deux ou trois façons complètement différentes par les témoins les plus rapprochés.
On n’a jamais mieux exprimé l’étonnement en face d’un grand spectacle, ni mieux embrassé par une parole naïve la largeur d’un horizon. […] Ce ne fut qu’après mainte zizanie survenue et des manquements de parole qu’il était d’ailleurs trop aisé de prévoir, que la guerre sur un autre pied recommença et qu’il fut décidé qu’on pouvait en toute conscience déposséder des traîtres. […] Il y a, dans ce récit de Nicétas, une parole d’estime pour Villehardouin, et je suis assuré que, s’il avait eu à parler de Nicétas à son tour, Villehardouin la lui aurait également rendue. […] s’écrie tout d’un coup Nicétas en s’interrompant, le Barbare devance mes paroles ; il est emporté plus rapide dans sa course que l’aile de l’Histoire, et aucun obstacle ne l’arrête ; car elle, elle en est encore à le montrer saccageant Thèbes, s’emparant d’Athènes, envahissant l’Eubée : mais lui, il ne marche pas, il vole, il traverse les airs laissant en arrière tout récit ; il marche vers l’Isthme, il renverse l’armée romaine qui lui barre le passage ; il pénètre dans cette ville assise sur l’Isthme même et qui était jadis l’opulente Corinthe ; il se porte à Argos, il enveloppe tout le pays de Lacédémone, il s’élance dans l’Achaïe, court de là à Méthone, et se rue sur Pylos, la patrie de Nestor : puis, arrivé aux bords de l’Alphée, il s’abreuvera, je pense, de ses ondes, et, s’y baignant, il y puisera le souvenir de la tradition antique et gracieuse ; et, dès qu’il aura su que le fleuve s’est fondu d’amour pour Aréthuse, la source de Sicile, qui désaltère les fils de l’Italie, je crains fort que, ne faisant violence au fleuve lui-même, il n’écrive sur ses eaux et ne fasse savoir par lui à ses compatriotes de là-bas les exploits dont ont souffert les Grecs. […] Ils n’estiment rien que la vaillance, dit toujours Nicétas des Français d’alors et de ceux qu’il appelle Barbares, mais c’est la vaillance séparée des autres vertus ; ils la revendiquent pour eux comme infuse par nature et corroborée par un long usage, et ne souffrent qu’aucune autre nation puisse se comparer à eux en ces choses de guerre ; d’ailleurs étrangers aux Muses et n’ayant aucun commerce avec les Grâces, ils sont d’un naturel farouche, et ont la colère plus prompte que la parole.
Il y a des âmes nées guerrières ; elles le sont par l’instinct qui les pousse aux périls, par les ressources de génie qu’elles y trouvent, et les talents, chaque fois imprévus, qu’elles y déploient, comme par l’ardeur croissante dont elles s’y enflamment ; elles le sont aussi, pendant et après l’action, par l’expression et par la parole. […] Montluc, qui nous a conservé ses paroles, sentit là ce premier et poignant aiguillon de la louange qui, parti de haut, fait faire ensuite l’impossible aux gens de cœur. […] » L’aveu, on le voit, et jusqu’à un certain point le repentir des cruautés de Montluc, se peuvent lire dans ces paroles. […] Montluc, qui ne faisait pas semblant d’entendre, écouta la réponse du marquis : « Celui-là fera toujours bien partout où il se trouvera. » Ces petites pointes d’honneur servent beaucoup à la guerre, remarque-t-il ; et c’est pourquoi il ne se fait faute de mettre telles paroles par écrit, bien qu’elles soient à sa louange : « Capitaines, et vous seigneurs, qui menez les hommes à la mort, car la guerre n’est autre chose, quand vous verrez faire quelque brave acte à un des vôtres, louez-le en public, contez-le aux autres qui ne s’y sont pas trouvés. […] Lui qui n’a point lu les livres ni étudié, il a de belles et grandes paroles que lui envierait un Chateaubriand et tout écrivain d’éclat, et comme les trouvent parfois, sans tant de façons, ceux qui, avec une pensée vive et une âme forte, écrivent ou dictent en tenant l’épée.
Guizot. » Et il tint parole, exactement pour l’un, à très-peu près pour l’autre. […] — Cet autre homme, lui, est chrétien ; il admet la divinité, une émanation plus ou moins directe de la divinité, une inspiration d’en haut dans la vie, dans les actes et les paroles du Christ : mais il se permet de rechercher quels ont été au vrai ces actes et ces paroles ; il étudie les témoignages écrits, les textes ; il les compare, il les critique, et il arrive par là à une foi chrétienne, mais non catholique comme la vôtre : homme pur d’ailleurs, de mœurs sévères, de paroles exemplaires : et cet homme-là, parce qu’il ne peut en conscience arriver à penser comme vous sur un certain arrangement, une certaine ordonnance, magnifique d’ailleurs et grandiose, qui s’est dessinée surtout depuis le ve siècle, vous l’insulterez, vous l’appellerez à première vue blafard en redingote marron ! […] Certainement il faut des avocats de plume et de parole, des avocats éloquents (et on lui en connaît) au parti catholique pour les grandes questions à l’ordre du jour, ce n’est pas ce dont il s’agit ici.
En ce qui regarde le fait de la séparation, madame de Caylus se borne aux paroles suivantes : « Ces deux amants, pressés par leur conscience, se séparèrent de bonne foi, ou du moins ils le crurent. […] Voici ses paroles : « Je n’ai jamais eu tant d’envie de vous voir que dans cette affaire-ci. […] Et quel style, quelle transparence, quelle modestie dans les paroles qui voilent le fond de la pensée. […] Aussitôt que Louis XIV l’aperçut, il lui adressa ces paroles accablantes : Ne me dîtes rien ; j’ai donné mes ordres pour qu’on prépare au château un logement pour madame de Montespan. […] Il est certain que l’ami de Quantova (le roi) dit à sa femme et à son curé par deux fois : Soyez persuadés que je n’ai pas changé les résolutions que j’avais en partant ; fiez-vous à ma parole, et instruisez les curieux de mes sentiments116. » 31 juillet.
Le tout se couronne par une prière adressée surtout au Dieu infini et bon, auquel il s’abandonne avec confiance si quelquefois la parole l’a trahi : Pardonnez ces erreurs, ô Bonté qui n’êtes pas moins infinie que toutes les autres perfections de mon Dieu ; pardonnez les bégaiements d’une langue qui ne peut s’abstenir de vous louer, et les défaillances d’un esprit que vous n’avez fait que pour admirer votre perfection. […] Il ne fait en quelque sorte que promulguer et reconnaître les choses de l’esprit en homme sûr qui n’a pas combattu depuis longtemps les combats intérieurs ; c’est l’homme de toutes les autorités et de toutes les stabilités qui parle, et qui se plaît à considérer partout l’ordre ou à le rétablir aussitôt par sa parole. […] Pascal, contrairement à Bossuet, se prend aussi d’affection pour les petites églises, pour les petits troupeaux réservés d’élus, ce qui mène à la secte : « J’aime, dit-il, les adorateurs inconnus au monde et aux prophètes mêmes. » Mais, à côté et au travers de ces duretés et de ces aspérités du chemin, que de paroles perçantes ! […] Il suppose tout d’un coup un dialogue où le divin agonisant prend la parole et s’adresse à son disciple, en lui disant : Console-toi, tu ne me chercherais pas, si tu ne m’avais trouvé […] Allons voir à Londres, allons visiter et admirer le Palais de cristal et ses merveilles, allons l’enrichir et l’enorgueillir de nos produits : oui, mais en chemin, mais au retour, que quelques-uns se redisent avec Pascal ces paroles qui devraient être gravées au frontispice : Tous les corps, le firmament, les étoiles, la terre et ses royaumes, ne valent pas le moindre des esprits ; car il connaît tout cela, et soi ; et les corps, rien.
Sans compter les marques de satisfaction publique, la première fois qu’il reverra Villars, deux ou trois mois après, il lui dira ces belles paroles : Je suis autant Français que roi ; ce qui ternit la gloire de la nation m’est plus sensible que tout autre intérêt. […] S’il était aussi bien M. de Vendôme, on dirait que c’est le sang de Henri IV qui pétille dans sa parole. […] » Voilà, Monsieur, des paroles nécessaires, non pour augmenter le zèle, il est toujours égal, mais pour que votre général ait l’esprit plus libre, le cœur satisfait, et que, jugeant de sa fortune dans la guerre par celle qu’il trouve dans son élévation, il ne croie rien d’impossible. […] Tel est au vrai Villars nous donnant son secret, et dictant spirituellement les paroles et les moyens les plus propres pour exalter et enlever Villars. Cette lettre écrite à une heure décisive lui était restée très présente, et, bien vieux, il aimait à en rappeler textuellement les dernières paroles : Peut-on servir sans plaire ?
Dès lors Alphonse crut à l’exécution de la parole jurée et défendit de poursuivre les vaincus. […] Il n’est pas défendu assurément de supposer que Rodrigue, qu’elle a vu à Bivar, n’a pas été sans lui plaire ; mais rien de cela ne perce ni ne se laisse deviner dans son air ni dans ses paroles ; sa franchise même éloigne le soupçon ; personne, après l’avoir entendue, n’a l’idée de sourire. […] Il tient sa parole et ne cesse dès lors de guerroyer et contre les Maures, et contre les Aragonais, contre les Navarrais, et contre les Français, les Savoyards. […] Le vol des oiseaux, cette superstition qui avait persisté dans le Midi depuis les Romains, n’est pas oublié : « A la sortie de Bivar, ils eurent la corneille à droite, et, en entrant à Burgos, ils l’eurent à gauche. » Chacun se met à la fenêtre pour les voir passer ; tous pleurent de pitié et disent les mêmes paroles : « Dieu ! […] « Mais quand il vint à Rodrigue, l’espérance du succès qu’il attendait étant presque morte dans son sein, — on trouve souvent là où l’on ne songeait pas, — les yeux enflammés, tel qu’un tigre furieux d’Hyrcanie, plein de rage et d’audace, Rodrigue dit ces paroles : « Lâchez-moi, mon père, dans cette mauvaise heure, lâchez-moi dans cette heure mauvaise ; car, si vous n’étiez mon père, il n’y aurait pas entre nous une satisfaction en paroles.