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1209. (1856) Cours familier de littérature. I « Ier entretien » pp. 5-78

Philosophie, religion, législation, histoire, poésie, roman, journal même, tout passait et repassait tour à tour ou tout à la fois par les controverses de cette académie en plein air. […] L’histoire elle-même me semblait mesquine et triviale quand elle ne racontait pas les événements humains avec l’accent surhumain de la philosophie, de la tragédie ou de la religion. […] … XXXVIII Quant à moi, je serais mort déjà mille fois de la mort de Caton, si j’étais de la religion de Caton ; mais je n’en suis pas ; j’adore Dieu dans ses desseins ; je crois que la mort patiente du dernier des mendiants sur sa paille est plus sublime que la mort impatiente de Caton sur le tronçon de son épée !

1210. (1772) Bibliothèque d’un homme de goût, ou Avis sur le choix des meilleurs livres écrits en notre langue sur tous les genres de sciences et de littérature. Tome I « Bibliotheque d’un homme de goût. — Chapitre III. Poëtes françois. » pp. 142-215

Racine le fils a chanté la Grace & la Religion dans deux Poëmes, pleins de beaux vers. […] Il y a une Epître du même auteur qui renferme plus de venin encore que son écrit sur la Religion naturelle, & le poison est bien plus habilement préparé. […] Heureux s’il avoit toujours respecté la Religion, & s’il n’avoit jamais fait rougir la vertu.

1211. (1915) Les idées et les hommes. Deuxième série pp. -341

La religion ? […] La mort les séparera ; on le sait bien et la religion le déclare. […] En fait de religion véritable, c’est tout ; ce n’est presque rien. […] On la sent préservée : le souvenir de son enfance, comme une vague religion, la préserve. […] Il cherche la vérité primordiale, éparse dans les religions de l’univers… Oui !

1212. (1899) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Septième série « Discours prononcé à la société des visiteurs des pauvres. » pp. 230-304

… » Puis, elle se calme ; elle ne peut s’empêcher de trouver Mikils un peu ridicule, de le voir « comme un pauvre être diminué qu’on plaint avec un sourire », et « de le traiter presque dans sa pensée comme feraient les gens du monde et les personnes sans religion ni bonté ». […] Et c’est de quoi j’ai pris mon parti, et de quoi se sont émues certaines personnes « de la religion ». […] — Mais j’irai plus loin : pendant que j’y suis, je songe à ces pasteurs « esprits forts », qui ne croient que bien juste en Dieu ; et, comme tout à l’heure je conciliais mal le sacerdoce avec le ménage, voilà maintenant que j’ai peine à concevoir le sacerdoce lui-même dans une religion rationaliste (si ces mots peuvent aller ensemble) ou qui tend au rationalisme. […] C’est égal, il est curieux que ces gens-là, qui trouveraient très bien que je fusse détaché de ma religion natale, s’indignent que je paraisse détaché de la leur. — Notez d’ailleurs que je me suis contenu, justement parce que je suis né catholique.

1213. (1889) Histoire de la littérature française. Tome III (16e éd.) « Chapitre huitième »

Combien plus dans nos sociétés modernes, où les mœurs et la religion lui ont rendu son rang, et où l’union de la beauté morale et de la beauté physique compose l’idéal de la femme ! […] Sentiment sublime, il est sans vicissitude et sans combats ; flamme inextinguible, l’âme qui l’a une fois reçue, la garde et l’entretient tant que dure la vie, et s’exhale avec elle ; passion plus semblable à une vertu qu’à une faiblesse, elle se contente par elle-même et n’a pas besoin de retour ; religion de la famille, les lettres et les arts, qui nous repaissent les yeux des tableaux de l’autre amour, laissent respectueusement l’amour maternel au foyer domestique et n’en amusent pas nos imaginations. […] Les livres, saints lui offraient, dans l’enceinte de la même ville, deux familles de race royale séparées par la haine et le meurtre, l’une victorieuse et sur le trône, l’autre vaincue, mais restée maîtresse de la religion nationale, gardant au fond du temple le roi légitime, et tolérée parce qu’on la croyait faible. Il vit tout ce qu’il y avait de pressant, d’irrésistible dans ce contact de l’usurpation et du droit, de la religion et de l’idolâtrie, outre la volonté du Dieu des vengeances, qui joue le même rôle dans Athalie que le dieu Destin dans le théâtre grec.

1214. (1874) Premiers lundis. Tome II « Poésie — Poésie — I. Hymnes sacrées par Édouard Turquety. »

l’idée de traiter poétiquement les solennités diverses de la religion, de les traduire en hymnes, est de l’invention de l’auteur, et ouvre une ère nouvelle à l’art ?

1215. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre VI. De la littérature latine sous le règne d’Auguste » pp. 164-175

Le système d’Épicure, le dogme du fatalisme, les mœurs de l’antiquité avant l’établissement de la religion chrétienne, dénaturent presque entièrement ce qui tient aux affections du cœur.

1216. (1895) Histoire de la littérature française « Cinquième partie. Le dix-huitième siècle — Livre V. Indices et germes d’un art nouveau — Chapitre I. Bernardin de Saint-Pierre »

C’est lui qui a créé les symboles de la religion philosophique, le culte laïque des grands hommes et des bons hommes, dont un Élysée national rassemblerait les cendres, les bustes, les monuments ; à côté des bienfaiteurs du genre humain, y seraient reçus le laborieux pêcheur et le charbonnier vertueux.

1217. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre XII. Lo Ipocrito et Le Tartuffe » pp. 209-224

Sous des apparences d’humilité, elle change la religion en astuce et se rend maîtresse des biens, de l’honneur et de l’esprit des gens… C’est un beau trait que celui du démon se faisant adorer comme un saint… Ceux qui me nourrissent, je les loue de leurs œuvres pies, de leurs vertus, de leur charité ; je les rassure sur leurs débauches, sur leurs usures ; rentrant la tête dans les épaules avec un petit ricanement, j’allègue la fragilité de la chair.

1218. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre II. Recherche des vérités générales » pp. 113-119

Les querelles de religion ont pu renforcer le pouvoir de l’Église, le désir d’unité religieuse. « La folle du logis » s’est si bien donné carrière dans les œuvres de Scarron, de Bergerac, de Saint-Amand que le besoin d’une discipline pour la langue et d’un code pour la littérature a pu se faire sentir impérieusement.

1219. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XI » pp. 89-99

À l’époque de son mariage, Montausier avait à peine trente-cinq ans ; depuis l’âge de vingt ans, il était au service et engagé dans des guerres successives, en Italie, en Lorraine, en Alsace ; en 1638, parvenu au grade de maréchal de camp, bien qu’âgé seulement de vingt-huit ans, il fut nommé gouverneur de l’Alsace, province alors d’une soumission équivoque, où le roi avait besoin d’un homme qui réunit l’art et le courage du guerrier au tarent et à la sagesse de l’administrateur ; en 1638, il se signala au siège de Brissac ; revenu à Paris pendant l’hiver de 1641, il fut rappelé à l’ouverture de la campagne par Guébriant devenu général en chef de l’armée d’Allemagne et peu après maréchal de France ; le maréchal, qui avait une grande confiance en Montausier, ayant été tué en 1643, celui-ci fut fait prisonnier, peu de temps après, à la déroute de Dillingen ; il ne recouvra la liberté qu’en 1644 ; alors enfin il lui restait encore un obstacle à franchir pour se marier ; c’était sa religion.

1220. (1899) Le monde attend son évangile. À propos de « Fécondité » (La Plume) pp. 700-702

Elle devrait être notre religion.

1221. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome I « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Balzac, et le père Goulu, général des feuillans. » pp. 184-196

Il respecta la religion dans un religieux, quel qu’il pût être.

1222. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome II « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — M. de Voltaire, et l’abbé Desfontaines. » pp. 59-72

Il ne s’étoit jusques là fait connoître que par une critique du livre de la religion prouvée par les faits, & par une autre de la tragédie d’Inès de Castro, sous ce titre : Paradoxes littéraires.

1223. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Seconde partie — Section 37, des défauts que nous croïons voir dans les poëmes des anciens » pp. 537-553

Il a dû y jetter le merveilleux compatible avec la vraisemblance, suivant la religion de son temps.

1224. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre XI. Mme Marie-Alexandre Dumas. Les Dauphines littéraires »

Or Mme Marie-Alexandre Dumas, qui n’a point de nom en religion, et qui n’oublie pas en public de prendre celui de son père, est Dumas et n’est que Dumas de pied en cap, depuis la pointe de ses beaux cheveux qu’elle n’a probablement pas coupés, jusqu’à la pointe de ses bottines, si elle en porte encore, au lieu de sandales !

1225. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « Philippe II »

le fanatisme religieux, le charbon fumant d’une flamme d’amour, inextinguible encore, pour une religion enfoncée par le marteau de quinze siècles dans le cœur, les mœurs et les institutions politiques des peuples, et même de ceux-là qui s’étaient révoltés contre elle… Il ne faut pas s’y tromper !

1226. (1895) Les œuvres et les hommes. Journalistes et polémistes, chroniqueurs et pamphlétaires. XV « Les honnêtes gens du Journal des Débats » pp. 91-101

Bohèmes, malgré tout, cependant, ces derniers, malgré leur attitude de Staters et d’olympiens, leur importance, leur influence, leur situation dans tous les mondes, officiels ou non officiels, leurs chaires quand ils sont professeurs, leurs bibliothèques quand ils sont bibliothécaires, leurs palmes d’académiciens quand ils sont de l’Académie : — le signe essentiel, caractéristique, du bohème, n’étant pas de n’avoir point d’habit, mais de n’avoir point de principes, de manquer de l’asile sacré d’une morale fixe autour de la tête et du cœur, de vagabonder dans ses écrits à tout vent de doctrine, et, comme déjà nous l’avons dit, de vivre, enfant de la balle politique ou littéraire venu ou trouvé sous le chou de la circonstance, sans feu ni lieu intellectuel, — c’est-à-dire sans une religion ou sans une philosophie.

1227. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « Louis Wihl »

En effet, je suis frappé (et je l’ai toujours été) de la consanguinité de ces deux hommes, tous les deux de la même double race : tous les deux Juifs, tous les deux Allemands, tous les deux poètes et reflétant dans leurs poésies leur double nationalité, entraînés tous les deux, par aptitude et par goût, vers la philosophie et la science ; mais dont l’un a brisé tout : religion, race, philosophie, système, pour s’asseoir, isolé et désespéré, au milieu des massacres de son esprit, comme un meurtrier au milieu de ses meurtres, et dont l’autre s’est conservé intégral, — noble, ferme et pur.

1228. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XVII. De l’éloquence au temps de Dioclétien. Des orateurs des Gaules. Panégyriques en l’honneur de Maximien et de Constance Chlore. »

Il eût mieux valu dire que sa valeur n’était rien à son humanité ; qu’empereur il fut modeste et doux ; que maître absolu, il donna, par ses vertus, des bornes à un pouvoir qui n’en avait pas ; qu’il n’eut point de trésor, parce qu’il voulait que chacun de ses sujets en eût un ; que les jours de fêtes, il empruntait la vaisselle d’or et d’argent de ses amis, parce qu’il n’en avait point lui-même ; qu’il fut humain en religion comme en politique ; et que, pendant tout le temps qu’il régna, tandis que les autres empereurs, persécuteurs des chrétiens, lui donnaient l’exemple d’une superstition inquiète et féroce, il ne fit jamais, dans ses États, ni dresser un échafaud, ni allumer un bûcher.

1229. (1887) Journal des Goncourt. Tome II (1862-1865) « Année 1863 » pp. 77-169

Au fond, notre indépendance absolue de tout ce qui est officiel, consacré, académiquement reconnu, renverse les habitudes d’esprit, les religions, les superstitions de respect de Sainte-Beuve, et nous lui apparaissons comme de singuliers pistolets, comme des contempteurs un peu effrayants. […] Et puis il est vivant, trop vivant… J’ai l’air d’être brave comme ça, en apparence, mais au fond, moralement, je suis très peureux. » Puis s’entame une énorme discussion sur Dieu et la religion, une discussion née de la fermentation d’une bonne et chaude digestion en de grandes cervelles. […] Et la conversation va de suite naturellement à la religion. […] C’est très sauvage… » Et moi je disais à mon voisin : « On peut nier Dieu, discuter le pape, dégueuler sur tout… mais Homère… C’est singulier les religions en littérature !  […] Alors il esquisse un Jésus, fils d’une parfumeuse et d’un charpentier, un mauvais sujet qui quitte ses parents et envoie dinguer sa mère, qui s’entoure d’un tas de canailles, de gens tarés, de croquemorts, de filles de mauvaise vie, qui conspire contre le gouvernement établi, et qu’on a très bien fait de crucifier ou plutôt de lapider : un socialiste, un Sobrier de ce temps-là, un exaspéré contre les riches, le théoricien désespéré de l’Imitation, le destructeur de la famille et de la propriété, amenant dans le monde un fleuve de sang, et les persécutions, et les inquisitions, et les guerres de religion, faisant la nuit sur la civilisation, au sortir de la pleine lumière qu’était le polythéisme, abîmant l’art, détruisant la pensée, en sorte que les siècles, qui viennent après lui ne sont que de la m… jusqu’à ce que trois ou quatre manuscrits, rapportés de Constantinople par Lascaris, et trois ou quatre morceaux de statues, retrouvés en Italie, lors de la Renaissance, soient, pour l’humanité, comme un jour rouvert, en pleines ténèbres… » « Ça c’était un livre, ça pouvait être faux, mais le livre avait sa logique.

1230. (1888) La vie littéraire. Première série pp. 1-363

Il est vrai qu’il n’est pas catholique et qu’il ne professe aucune religion révélée. […] Ayant conçu un livre contre toutes les religions, il compose, de bonne foi, un livre en faveur de toutes les religions. […] La religion n’en produisait plus ; la science en enfanta. […] C’est-à-dire qu’on y accomplit les actes les plus agréables de la religion populaire. […] La sainteté des larmes est au fond de toutes les religions.

1231. (1922) Gustave Flaubert

La littérature a été pour lui une religion, mais une religion triste. […] De cette religion présente figurée en esprit comme lointaine et exhumée de la poussière, Flaubert passera naturellement à la religion authentiquement lointaine et réellement exhumée de la poussière, c’est-à-dire de Madame Bovary à Salammbô. […] La religion est devenue pour lui un rabâchage. […] Et le clergé est là-dedans, car on dit que le principal grief du Parquet, c’est l’offense à la religion représentée par la scène de l’Extrême-Onction. […] Pour celles mêmes qui oublieraient le devoir ou la religion, le simple bon sens peut suffire.

1232. (1925) Feux tournants. Nouveaux portraits contemporains

Moins pathétique que Lamennais, dont la religion ne veut pas avoir de limites, George Eliot s’accommode assez bien du silence de Dieu, pourvu qu’elle se sente assurée de remplir longtemps son devoir absolu. […] Regrettant sans doute de n’avoir pu le défendre vivant, Bremond du moins voulut protéger ce mort charmant contre tant d’intellectualistes qui imposent au dogme une rigidité telle qu’ils vident la religion de son contenu pour en mieux conserver la forme. […] Tout cela en imposait à Xavier, et il était aussi reconnaissant à son nouveau maître de traiter si durement les écrivains qui n’ont qu’une religion : celle du cœur, et qui la prennent pour de l’idéalisme. […] Cet abbé, qui ne croit à rien sauf à la religion et qui collectionne des Monet et des Vuillard, s’enivre de Ravel et de Claude Debussy. […] Histoire littéraire du sentiment religieux en France depuis la fin des guerres de religion jusqu’à nos jours (11 vol.), Bloud & Gay, 1916-1933.

1233. (1924) Intérieurs : Baudelaire, Fromentin, Amiel

C’est le charme de l’Islam, le décor d’une religion si parfaitement appropriée à un climat et à une humanité, en un temps où le Génie du Christianisme a appris aux Français à considérer la religion, et la leur d’abord, comme un fait esthétique et un ordre décoratif. […] Et peut-être nul orateur ne saurait-il mieux que ce tableau de Rubens conforter en l’accordant à l’ordre intérieur qu’est la religion de la Croix une âme écrasée par le poids d’un monde injuste et magnifique. […] « Le vrai mariage c’est une prière, c’est un culte, c’est la vie devenue religion. » Et pourtant il connaît, comme tout le monde, une vie sentimentale, qui se modèle sur les détours, les replis, les hésitations, la disponibilité indéfinie de sa nature. […] Joignez à cela une antipathie profonde contre le catholicisme, une haine de vieux Genevois contre Rome, contre une Rome dont la France figure aux yeux d’Amiel la conquête et la victime, avec sa « fatale notion de la religion, due elle-même à sa vie façonnée par le catholicisme ». […] Le philosophe Si Amiel maintient par le protestantisme libéral ses communications avec la vive source chrétienne, ce n’est point cependant la religion qui fait le fond ordinaire et le propre de sa vie spirituelle.

1234. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MADAME DE LA FAYETTE » pp. 249-287

Mais la confidence de Mme Scarron se resserrant par degrés, il en résulta de ces paroles rapportées et de ces conjectures qui déplaisent entre amis : « L’idée d’entrer en religion ne m’est jamais venue dans l’esprit, écrivait Mme de Maintenon à l’abbé Testu ; rassurez donc Mme de La Fayette. » Donnant à son frère des leçons d’économie, Mme de Maintenon écrivait en 1678 : « J’aurois cinquante mille livres de rente que je n’aurois pas le train de grande dame, ni un lit galonné d’or comme Mme de La Fayette, ni un valet de chambre comme Mme de Coulanges. […] Depuis la mort de M. de La Rochefoucauld, les idées de Mme de La Fayette se tournèrent de plus en plus à la religion ; on en a un témoignage précieux dans une belle et longue lettre de Du Guet, qui est à elle. […] « Jusqu’ici les nuages dont vous avez essayé de couvrir la religion vous ont cachée à vous-même.

1235. (1861) Cours familier de littérature. XI « LXIVe entretien. Cicéron (3e partie) » pp. 257-336

C’est ainsi que l’esprit des philosophes ou des politiques, tels que Cicéron, échappe, en s’élevant dans les régions sereines et immuables de la pensée, aux préoccupations personnelles qui les agitent au milieu du sénat, du peuple, de la guerre civile, sur le sort de leur patrie ou sur leur propre sort, et que ces esprits sublimes se réfugient dans la philosophie et dans la religion pour ne plus entendre ou pour mépriser de si haut les bruits et les oscillations du monde. […] Pour finir, car il est temps, je n’ai plus qu’à montrer que tout ce qui nous est utile dans ce monde-ci a été fait exprès pour nous. » XI Dans son livre sur la Nature des dieux, il gardait encore quelques ménagements avec la théologie populaire et avec la religion de l’État ; mais son livre sur la Divination, c’est-à-dire sur les mystères du culte romain, fut son véritable testament philosophique. […] Après avoir reçu les ambassadeurs de César avec toute la politesse chinoise, il s’informe secrètement par ses interprètes des usages, des sciences et de la religion de ce peuple romain, aussi célèbre dans l’Occident que le peuple chinois l’est dans l’Orient.

1236. (1862) Cours familier de littérature. XIV « LXXXIe entretien. Socrate et Platon. Philosophie grecque (1re partie) » pp. 145-224

Platon fut à Socrate ce que saint Paul fut au Christ ; tous deux écrivent, commentent et développent la doctrine de son maître qui n’a rien écrit, et, ici, il serait curieux peut-être d’examiner pourquoi ni le révélateur d’une philosophie raisonnée, ni le révélateur d’une religion révélée, n’ont pas voulu, ou n’ont pas daigné écrire eux-mêmes une seule ligne, si ce n’est ce doigt sur le sable qui traça des caractères de miséricorde. […] Cette théorie était, au fond, celle de tous les sages des religions antiques ; ce qu’on a appelé polythéisme n’était, dans ces religions, que symbolisme.

1237. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre VIII. La littérature et la vie politique » pp. 191-229

Ainsi le Roman de la rose n’est dans sa première partie qu’une idylle gracieuse et quintessenciée ; il devient dans la seconde une terrible machine de guerre contre la religion catholique et la féodalité. […] Dans le règlement des rapports du pouvoir civil et de la religion, quand on enlève au clergé ses biens, quand on ouvre les couvents, quand on impose aux prêtres le serment à la Constitution, vous pouvez reconnaître l’inspiration de Voltaire. […] Un d’entre eux obtint cependant un jour l’insigne faveur d’être écouté et le roi avoua qu’il n’avait jamais ouï parler si bien ; mais cela ne l’empêcha pas, quelques mois plus tard, de donner quinze jours aux ministres de la religion prétendue réformée pour quitter le royaume, de faire condamner aux galères ou à mort ceux qui s’obstinaient à rester, et de faire couvrir par le roulement des tambours la voix de ceux qui, du haut de l’échafaud, essayaient de haranguer la foule.

1238. (1886) Revue wagnérienne. Tome I « Paris, 8 juillet 1885. »

L’écrit philosophique « Art et Religion »bl dit le mal de l’existence individuelle, morcelant et opposant nos intérêts ; mais il exalte le retour à l’unité universelle, pleinement bonne, pleinement sainte, — et naturelle, — et bien heureuse. […] Religion et Art (1880) est un essai publié en 1880 dans la troisième livraison des Bayreuther Blätter, puis repris dans le volume 10 des Gesammelte Schriften und Dichtungen. […] Wagner y développe sa théorie de la religion de l’art et affirme à nouveau la suprématie de la musique.

1239. (1886) Quelques écrivains français. Flaubert, Zola, Hugo, Goncourt, Huysmans, etc. « Gustave Flaubert. Étude analytique » pp. 2-68

Arnoux riche, la religion du chic dont est imbu le jeune de Cisy, les plaisirs mondains de Mme Dambreuse et les galanteries maquignonnes de son premier amant, sont détaillés avec une insistance dont l’ironie n’exclut pas toute exactitude. […] « Je suis perdu dans les religions de la Perse, écrit-il dans sa correspondance, je tâche de me faire une idée nette du dieu Hom, ce qui n’est pas facile. […] L’ascète est l’homme privé et assiégé de satisfactions charnelles ; les amorosités faciles de la reine de Saba le sollicitent ; la magie, de celle des brahmanes à celle des Alexandrins tentent sa soif de pouvoir ; il passe, n’adhérant définitivement à aucune, par toutes les religions et les hérésies ; la méthaphysique lui propose ses antinomies irrésolues, et il hésite de désespoir, à s’abîmer dans la luxure ou à s’anéantir dans la mort ; mais sa curiosité le fait encore balancer entre le mystère du sphinx et les fables de la chimère qui l’entraîne à travers les mythes et les ébauches de la création, à l’intuition de ces germes de vie qui la contiennent toute ; il l’adore pour se relever et se remettre par la prière dans le cycle des cultes, quand le soleil le rappelle de la spéculation nocturne à l’action diurne.

1240. (1856) Cours familier de littérature. I « IVe entretien. [Philosophie et littérature de l’Inde primitive (suite)]. I » pp. 241-320

N’y a-t-il pas, en effet, de la religion dans la philosophie, de la philosophie dans l’histoire, du drame dans le récit, du récit dans le drame, de la poésie dans l’éloquence, de l’éloquence dans la poésie ? […] Le rideau qui nous dérobait la Chine, ses religions, sa philosophie, son histoire, sa prodigieuse civilisation à peine soupçonnée des Grecs et des Romains, comme une de ces planètes lointaines dont les astronomes aperçoivent, à travers des distances infinies, quelques lueurs. […] Des dialogues explicatifs du sens de ces lois et des dogmes de la religion sont un des plus admirables monuments de cette littérature.

1241. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Edgar Poe »

La métempsycose surtout, cette religion définitive que les libres penseurs proposent pour remplacer le Christianisme, est une des conceptions qui obsèdent le plus sa pensée. […] Victor Hugo, traître à cet art pour l’art qui ne fut jamais pour lui qu’une religion de préface, et qui, en vieillissant, a livré sa Muse à de bien autres préoccupations ; Victor Hugo, même aux plus chaudes années de sa jeunesse, est bien tiède et bien transi dans son amour fanfaron de la forme et de la beauté, en comparaison d’Edgar Poe, de ce poète et de cet inventeur qui a la frénésie patiente, quand il s’agit de donner à son œuvre le fini… qui est son seul infini, hélas ! […] Elle vient d’une grande chose : de la foi qui lui montre l’enfer à l’œil nud et de l’indignité sentie, qui lui dit qu’il y peut tomber, tandis que la peur d’Edgar Poe est la peur de l’enfant ou du lâche d’esprit, fasciné par ce que la mort, qui garde le secret de l’autre monde, quand la religion ne nous le dit pas, a d’inconnu, de ténébreux, de froid.

1242. (1868) Curiosités esthétiques « I. Salon de 1845 » pp. 1-76

. — Aussi quelle singulière idée que de montrer à ces messieurs la religion, la philosophie, les sciences et les arts éclairant l’Europe, et de représenter chaque peuple de l’Europe par une figure qui occupe dans le tableau sa place géographique ! […] Tissier est vraiment coloriste, mais n’est peut-être que cela ; — c’est pourquoi son portrait de femme, qui est d’une couleur distinguée et dans une gamme de ton très-grise, est supérieur à son tableau de religion. […] Tassaert Un petit tableau de religion presque galante. — La Vierge allaite l’enfant Jésus — sous une couronne de fleurs et de petits amours.

1243. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Journal et Mémoires, de Mathieu Marais, publiés, par M. De Lescure »

On le regardait comme un apôtre ; mais on reconnaît à présent que c’était un faux apôtre et un déclamateur qui a joué la religion. […] Je sais certainement qu’il a été tracassé pour les Lettres persanes ; que le cardinal a dit qu’il y avait dans ce livre des satires contre le Gouvernement passé et la Régence ; que cela marquait un cœur et un esprit de révolte ; qu’il y avait aussi de certaines libertés contre la religion et les mœurs, et qu’il fallait désavouer ce livre.

1244. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Nouvelle correspondance inédite de M. de Tocqueville »

Ses sentiments religieux et philosophiques, nous venons de les voir, au sein même de cette douleur : il les confondait volontiers et évitait peut-être de distinguer le point précis, la ligne exacte où il aurait pu établir entre eux, entre la religion et la philosophie, une différence essentielle. […] Il n’avait cessé de songer à cette idée principale et maîtresse dont il pourrait se faire le chef auprès des générations nouvelles, et qu’il pourrait inscrire sur son drapeau : « Mon plus beau rêve en entrant dans la vie politique, écrivait-il à son frère, homme monarchique et catholique, était de contribuer à la réconciliation de l’esprit de liberté et de l’esprit de religion, de la société nouvelle et du Clergé. » Mais cette réconciliation s’en alla en fumée avant qu’il eût pu en rallier les éléments et en formuler la doctrine.

1245. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Œuvres inédites de F. de la Mennais (suite et fin.)  »

Il n’y a que les Jésuites qui puissent renouveler la religion en France. […] Peyrat pense et parle en ministre de la Religion réformée) ; mais il se relâchait, il s’abandonnait par moments avec Béranger.

1246. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Mémoires sur la mort de Louis XV »

On parlait déjà, quoique vaguement, des sacrements dans tout le château ; on disait que le roi, qui avait tant de religion, allait les demander dès qu’il se verrait bien malade, ce qui ne pourrait pas manquer d’arriver bientôt. […] Telle était la position où se trouvaient dans ce moment les ennemis du tripot ; la connaissance qu’ils avaient du goût du roi pour les sacrements, de son idée sur l’efficacité d’un acte de contrition, et sur le besoin qu’il en avait, leur persuadait bien qu’on touchait au moment où son amour pour la religion, ou son envie de donner un bon exemple en ce genre, allaient lui faire demander son confesseur ; mais leur opinion, partagée par Mesdames, la leur rendait encore plus certaine.

1247. (1796) De l’influence des passions sur le bonheur des individus et des nations « Introduction »

L’organisation de la puissance publique, qui excite ou comprime l’ambition, rend telle ou telle religion plus ou moins nécessaire, tel ou tel code pénal trop indulgent ou trop sévère, telle étendue de pays dangereuse ou convenable ; enfin c’est de la manière dont les peuples conçoivent l’ordre social, que dépend le destin de la race humaine sous tous les rapports. […] Enfin, si le temps et l’étude apprenaient, comment on peut donner aux principes politiques assez d’évidence pour qu’ils ne fussent plus l’objet de deux religions, et par conséquent des plus sanglantes fureurs, il semble que l’on aurait du moins offert un examen complet, de tout ce qui livre la destinée de l’homme à la puissance du malheur.

1248. (1858) Cours familier de littérature. V « XXVIIIe entretien. Poésie sacrée. David, berger et roi » pp. 225-279

Dieu, l’amour, la patrie sont les inspirations les plus habituelles des grands lyriques, parce que la religion, l’amour, la patrie sont les plus sublimes, les plus intimes ou les plus généreuses émotions de l’homme. […] Toute civilisation, toute religion reposent sur un livre.

1249. (1889) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Quatrième série « Victor Hugo, Toute la Lyre. »

Et il me paraît bien, à moi, que ce dernier recueil n’est pas plus un assemblage d’« épreuves ratées » que la seconde Légende des siècles, le Pape, l’Ane, Religions et Religion, Pitié suprême, le Théâtre en liberté ou la Fin de Satan.

1250. (1868) Alexandre Pouchkine pp. 1-34

Un général Chichkova, à qui on attribue les proclamations éloquentes qui, en 1812, appelèrent le peuple russe à la défense de son territoire, était le principal avocat de l’idiome slavon ; et, de fait, il en tira parti habilement dans un pays où le patriotisme se confond avec l’attachement à la religion. […] Pour combattre la révolution, on avait demandé à la religion des armes nouvelles.

1251. (1889) Le théâtre contemporain. Émile Augier, Alexandre Dumas fils « Émile Augier — Chapitre Premier »

» Dans l’Inde, la haine de la vie fonde une religion qui, après trois mille ans, règne encore sur la majorité des hommes. […] Cette religion du néant pèse sur le monde bouddhiste avec une lourdeur torpide et morbide.

1252. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Monsieur de Malesherbes. » pp. 512-538

Quelques-uns de ces amours-propres parlaient au nom de la religion et de la morale ; quelques autres (et ce n’étaient pas les moins aigres) se mettaient en avant au nom du goût : J’ai entendu dire sérieusement, remarquait-il, qu’il est contre le bon ordre de laisser imprimer que la musique italienne est la seule bonne… Je connais des magistrats qui regardent comme un abus de laisser imprimer, sur la jurisprudence, des livres élémentaires, et qui prétendent que ces livres diminuent le nombre des véritables savants. […] Et ici il le pouvait moins que jamais ; car il était indirectement blâmé lui-même et un peu abandonné par son père, « chez qui le respect pour la religion qu’on disait offensée avait prévalu sur toute autre considération ».

1253. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Chateaubriand homme d’État et politique. » pp. 539-564

La France pourra les rappeler, quand leurs talents, lassés d’être inutiles, seront sincèrement convertis à la religion et à la légitimité. […] Et la religion, s’il vous plaît, où est-elle dans tout cela ?

1254. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « André Chénier, homme politique. » pp. 144-169

… Et quand la société dure depuis assez longtemps pour que tout cela soit dans tous une habitude innée et soit devenu une sorte de religion, je dirais presque de superstition, certes alors un pays a le meilleur esprit public qu’il puisse avoir. […] Tout à l’heure, c’était l’écrivain et l’homme de goût, dans Chénier, qui se révoltait contre Manuel ; ici, c’est le militaire qui prend feu contre Collot d’Herbois, c’est le gentilhomme qui a porté l’épée et qui sait ce que c’est que la religion du drapeau.

1255. (1885) Préfaces tirées des Œuvres complètes de Victor Hugo « Préfaces des romans — Préface des « Derniers Jours d’un condamné » (1832) »

Autrefois du moins, quelque foi circulait dans le peuple ; au moment suprême, le souffle religieux qui était dans l’air pouvait amollir le plus endurci ; un patient était en même temps un pénitent ; la religion lui ouvrait un monde au moment où la société lui en fermait un autre ; toute âme avait conscience de Dieu ; l’échafaud n’était qu’une frontière du ciel. […] maintenant que toutes les religions sont attaquées du dry-rot, comme ces vieux vaisseaux qui pourrissent dans nos ports, et qui jadis peut-être ont découvert des mondes ?

1256. (1772) Bibliothèque d’un homme de goût, ou Avis sur le choix des meilleurs livres écrits en notre langue sur tous les genres de sciences et de littérature. Tome I « Bibliotheque d’un homme de goût. — Chapitre II. Des poëtes étrangers. » pp. 94-141

On ne place point Ovide parmi les Poëmes épiques, parce que ses métamorphoses, toutes consacrées qu’elles sont par la religion des Anciens, ne font pas un tout, ne font pas un ouvrage régulier. […] Milton en ce point & en plusieurs autres, est autant au-dessus des anciens Poëtes, que notre Religion est au-dessus des fables payennes.

1257. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « M. de Sénancour — Oberman, édition nouvelle, 1833 »

Vers ce même temps, et non plus dans l’ordre de l’action, mais dans celui du sentiment, de la méditation et du rêve, il y avait deux génies, alors naissants, et longuement depuis combattus et refoulés, admirateurs à la fois et adversaires de ce développement gigantesque qu’ils avaient sous les yeux ; sentant aussi en eux l’infini, mais par des aspects tout différents du premier, le sentant dans la poésie, dans l’histoire, dans les beautés des arts ou de la nature, dans le culte ressuscité du passé, dans les aspirations sympathiques vers l’avenir ; nobles et vagues puissances, lumineux précurseurs, représentants des idées, des enthousiasmes, des réminiscences illusoires ou des espérances prophétiques qui devaient triompher de l’Empire et régner durant les quinze années qui succédèrent ; il y avait Corinne et René, Mais, vers ce temps, il y eut aussi, sans qu’on le sût, ni durant tout l’Empire, ni durant les quinze années suivantes, il y eut un autre type, non moins profond, non moins admirable et sacré, de la sensation de l’infini en nous, de l’infinienvisagé et senti hors de l’action, hors de l’histoire, hors des religions du passé ou des vues progressives, de l’infini en lui-même face à face avec nous-même.

1258. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Relation inédite de la dernière maladie de Louis XV. »

Ami de M. de Choiseul, ennemi du ministère d’Aiguillon et de la maîtresse favorite, il eût pu dire aux approches du danger, comme Saint-Simon à la nouvelle de la mort de Monseigneur : « La joie néanmoins perçoit à travers les réflexions momentanées de religion et d’humanité par lesquelles j’essayois de me rappeler. » A nos yeux comme aux siens, est-il besoin d’en avertir ?

1259. (1874) Premiers lundis. Tome I « Diderot : Mémoires, correspondance et ouvrages inédits — I »

On était dans un siècle d’analyse et de destruction, on s’inquiétait bien moins d’opposer aux idées en décadence des systèmes complets, réfléchis, désintéressés, dans lesquels les idées nouvelles de philosophie, de religion, de morale et de politique s’édifiassent selon l’ordre le plus général et le plus vrai, que de combattre et de renverser ce dont on ne voulait plus, ce à quoi on ne croyait plus, et ce qui pourtant subsistait toujours.

1260. (1874) Premiers lundis. Tome II « E. Lerminier. De l’influence de la philosophie du xviiie  siècle sur la législation et la sociabilité du xixe . »

Lerminier jette des vues élevées sur la religion, la science et la liberté dans l’avenir.

1261. (1866) Petite comédie de la critique littéraire, ou Molière selon trois écoles philosophiques « Introduction » pp. 3-17

Alexandre Vinet croit ressaisir dans les idées de la morale et même de la religion les principes absolu ?

1262. (1895) Histoire de la littérature française « Cinquième partie. Le dix-huitième siècle — Livre III. Les tempéraments et les idées — Chapitre I. Un retardataire : Saint-Simon »

Cette façon d’entendre la religion est ce qu’il y a de plus intelligent en lui.

1263. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome II « Querelles générales, ou querelles sur de grands sujets. — Première Partie. Des Langues Françoise et Latine. — L’orthographe, et la prononciation. » pp. 110-124

La Sorbonne la crut dangereuse pour la religion & pour l’état : elle anathématisa quiconque ne se conformeroit point à la prononciation d’usage dans les écoles.

1264. (1824) Notes sur les fables de La Fontaine « Livre onzième. »

Le costume est ici mal observé ; Minos est le juge des enfers dans la Mythologie grecque, mais ne l’est point dans la religion du Mogol, qui est le mahométisme.

1265. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « Notre critique et la leur »

En religion, nous tenons pour l’Église ; en politique, pour la monarchie ; en littérature, pour la grande tradition du siècle de Louis XIV.

1266. (1895) Les œuvres et les hommes. Journalistes et polémistes, chroniqueurs et pamphlétaires. XV « De Cormenin (Timon) » pp. 179-190

II Ces portraits d’orateurs, faits par un homme qui a la religion de l’éloquence et du pamphlet, n’avaient point, en effet, à l’origine, été tracés en vue d’un livre, de cette composition d’un livre dont les orateurs sont généralement incapables, et Cormenin était un orateur… sur le papier !

1267. (1862) Les œuvres et les hommes. Les poètes (première série). III « M. Le Conte de l’Isle. Poëmes antiques. »

C’est un chrétien qui croit que le Christianisme, comme le Polythéisme, est une religion flambée.

1268. (1889) Les œuvres et les hommes. Les poètes (deuxième série). XI « M. Paul Bourget »

Paul Bourget n’en restera pas moins Byronien de religion poétique, il ne changera pas l’âme qu’il a et ne se laissera pas étouffer dans d’ineptes systèmes et des poétiques de perdition.

1269. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre premier. Des principes — Chapitre IV. De la méthode » pp. 81-92

En réfléchissant sur les commencements de la religion et de la civilisation païennes, on arrive à ces premières origines, au-delà desquelles c’est une vaine curiosité d’en demander d’antérieures ; ce qui est le caractère propre des principes.

1270. (1910) Propos littéraires. Cinquième série

Il faut, d’abord (souvenir de Rousseau), créer une religion sociale ; et ensuite, seulement, élever despotiquement tous les enfants dans cette religion sociale ; mais, avant qu’on ait créé cette religion sociale, il faut rester dans la liberté : « Tant que nous n’aurons pas de religion nationale, nous devons tolérer les sectes, et c’est pourquoi nous sommes prêt à défendre, en apparence contre nos principes, la liberté d’éducation et le droit même des jésuites, en tant que secte religieuse éducatrice. […] Étonnez-vous que les femmes soient religieuses et n’admettent jamais que les choses qui ont quelque rapport avec une religion ; et, du reste, fassent des religions, toutes pleines de mystères, de toutes les choses où elles s’attachent ! […] Il déteste les religions, les principes de 1789, la morale de Kant, le protestantisme, l’instruction « scientifique » et la phraséologie des considérants de M.  […] Vous me direz que les religions, pour commencer par elles, sont plutôt idola præteriti temporis que idola præsentis. […] À ce moment majestueux, où la religion du serment exigeait que le caractère de la fête fût sévère, succéda la gaieté franche.

1271. (1863) Causeries parisiennes. Première série pp. -419

Le but de l’ouvrage était de montrer, dit la préface, « comment le journalisme renverse la société en détruisant toutes ses religions ». […] C’est du moins ce qu’a décidé le tribunal civil de la Seine, dans le procès de l’Ami de la Religion. […] Dans cette religion nouvelle, quels seront les prêtres ? […] Ils s’avouent même que la similitude de religion pourrait bien être plus apparente que réelle entre nous et un peuple où les fidèles organisent des confréries en l’honneur de saint Judas Iscariote. […] Elle est capable même d’avoir fait mieux que la plus belle fille du monde, et d’avoir donné de la religion aux Chinois.

1272. (1889) Derniers essais de critique et d’histoire

Pour l’Espagnol, au contraire, la religion est une émotion de la chair et du sang, une hallucination du cerveau, une explosion de la férocité native. […] Les premières religions ne sont qu’un langage exact, le cri involontaire d’une âme qui sent la sublimité et l’éternité des choses, en même temps qu’elle perçoit leurs dehors. […] Un premier cours traitera des limites et communications naturelles, des races, des langues et des religions dans les principaux États. […] Le cierge d’Arsène Guillot résume beaucoup de volumes sur la religion du peuple et sur les vrais sentiments des courtisanes. […] Pendant des siècles, les lois, la religion, les mœurs, les cérémonies ont travaillé à faire l’athlète accompli, la parfaite statue vivante.

1273. (1890) La vie littéraire. Deuxième série pp. -366

Les religions n’uniraient point les hommes si elles s’adressaient à l’intelligence, car l’intelligence est superbe et se plaît aux disputes. […] Ils représentent toute la religion accessible à l’âge le plus tendre. […] Je vais plus loin : tout sentiment profond ramène à cette antique religion des hommes. […] En morale, en religion, en politique, tout est contestable, puisque tout est contesté. […] Zola se trompe fort s’il croit que la religion d’aujourd’hui en a gardé le moindre souvenir.

1274. (1857) Réalisme, numéros 3-6 pp. 33-88

Dès l’instant qu’il n’existe pas d’idéalisme d’État, de même qu’il y a dans quelques contrées des religions d’État, nous retombons forcément sous le bénéfice du principe américain, de la spontanéité et de la liberté personnelle. […] Aussi, dans l’absence d’une philosophie, il lui fallait une religion, la religion étant destinée à conduire par la foi ceux qui résistent à la raison, et la raison ne pouvant s’accommoder des rêveries romantiques. […] Sa foi était limitée, son mysticisme était faux ; et pour n’avoir voulu admettre de Rabelais que ses archaïsmes, de Molière que Dom Juan w, et le bon sens de personne, il lui a fallu, à côté de la religion, une autre religion. […] Après tout, ils ne croient peut-être pas plus que moi à cette religion nouvelle, à cette philosophie inspirée, et M.  […] Dans sa religion même, il n’oubliera pas son avantage, seulement il l’ennoblit et le sanctifie dans l’idéal du bien suprême.

1275. (1897) Aspects pp. -215

GRYMALKIN La Religion ? […] Et, si votre volonté m’appelle à être le fossoyeur de votre sainte religion, ah ! […] Comme toutes les religions, il n’est au fond qu’une explication du monde, un code social et politique destiné à faire régner tout le bonheur possible sur la terre. […] Bref, il inventa une religion c’est-à-dire quelque chose comme une chaîne, car religion vient de religare qui signifie, si je ne me trompe, garrotter. Don Quichotte, lui, n’a pas inventé de religion.

1276. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre I. Les origines. — Chapitre III. La nouvelle langue. » pp. 165-234

. —  Le frère quêteur et la religion. —  La bouffonnerie, la polissonnerie et la grossièreté du moyen âge. […] Les dames ont déclaré dans leurs sentences « que lorsqu’on aime, on ne peut rien refuser à qui vous aime. » L’amour a force de loi ; il est inscrit dans un code ; on le mêle avec la religion, et il y a une messe de l’amour où les oiseaux, par leurs antiennes199, font un office divin comme celui de la messe. […] Voilà déjà la satire du mariage ; vous la trouverez chez Chaucer à vingt reprises : il n’y a plus, pour épuiser les deux perpétuels sujets de la moquerie française, qu’à joindre à la satire du mariage la satire de la religion. […] En effet, la poésie et la religion ne sont plus capables de suggérer un sentiment vrai.

1277. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Virgile et Constantin le Grand par M. J.-P. Rossignol. »

Grâce à ce rôle nouveau qu’une semblable interprétation créait à Virgile, et que la vague tradition favorisa, on comprend mieux comment le divin et pieux poëte (le poëte pourtant de Corydon et de Didon) a pu être pris sous le patronage de deux religions si différentes et si contraires, comment le Christianisme du moyen-âge s’est accoutumé peu à peu à l’accepter pour magicien et pour devin, et comment Dante, le poëte théologien, n’hésitera point à se le choisir pour guide dans les sphères de la foi chrétienne.

1278. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — D. — article » pp. 151-168

Finissons cet article, en déclarant encore à tous les Aristarques du nouveau Monde Littéraire, que, malgré leurs efforts, leurs Dissertations, leurs Sentences, leurs Satires, Despréaux n’en sera pas moins celui de tous nos Poëtes dont on a retenu & dont on citera toujours le plus de vers ; celui qui, le premier, a déployé les richesses de notre Langue, & qui l’a portée, par ses Ouvrages, au degré d’estime où elle est parvenue depuis ; celui qui a fait le plus régner le bon goût, & a le plus fortement attaqué le mauvais ; celui qui a su le mieux réunir l’exactitude de la méthode & la vivacité de l’imagination ; le sel de la bonne plaisanterie, & le respect dû à la Religion & aux mœurs ; l’art de lancer le ridicule, & celui de louer avec délicatesse ; le talent d’imiter, en paroissant original ; la distinction unique d’être tout à la fois Législateur & Modele ; &, pour tout dire enfin, il ajoutera à tous ces genres de gloire, ce qui donne le plus de droit aux hommages de la vertu, les qualités du cœur.

1279. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — R. — article » pp. 24-41

Voyez le beau morceau du Poëme de la Religion, sur la formation des fleuves & des rivieres : vous y trouverez une description des plus pompeuses, des plus nettes, sans que les difficultés aient pu ralentir la marche du Génie qui les a subjuguées.

1280. (1888) Préfaces et manifestes littéraires « Japonisme » pp. 261-283

Oui, vraiment, cette écritoire, ce petit objet de la vie usuelle, a été fabriqué par un vassal du prince Akao, par un de ces quarante-sept héros qui se vouèrent à la mort pour venger leur seigneur et maître, par un de ces hommes dont la mémoire est devenue une sorte de religion au Japon, en ce pays, adorateur du sublime, et qui, au dire d’Hayashi, n’accueille et n’aime de toute notre littérature européenne que les drames de Shakespeare et la tragédie du CID, de Corneille.

1281. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome II « Querelles générales, ou querelles sur de grands sujets. — Première Partie. Des Langues Françoise et Latine. — De la langue Françoise. » pp. 159-174

L’auteur de l’Esprit des loix veut que la différence des gouvernemens, des religions, des mœurs & des coutumes des peuples, vienne principalement du climat.

1282. (1799) Jugements sur Rousseau [posth.]

Cette différence se remarque surtout, je n’observe pas l’ordre des volumes, mais n’importe, dans les deux parties de la profession de foi du vicaire savoyard, il n’est guère que rhéteur quand il parle de l’existence de Dieu, de la vie à venir et de l’immortalité de l’âme ; quand il attaque ce qu’il appelle les mensonges que les hommes ont nommés religion, il est orateur et presque philosophe : ce morceau est peut-être celui de son livre qui a réuni le plus de suffrages.

1283. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « Deux diplomates »

C’étaient assurément, l’un et l’autre, des hommes de religion et de monarchie, comme il en faudrait beaucoup aux princes, et jamais, il faut le reconnaître, l’amitié qui les unit ne prit sa source dans des natures plus profondément nobles et qui réfléchissent mieux en elles toutes les qualités accumulées de leur race.

1284. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « M. Jacques Demogeot » pp. 273-285

Il y est parlé du protestantisme et de ces guerres de religion qui n’ont été que la première phase de nos guerres révolutionnaires, et si l’auteur n’y a pas toute la justice qui devrait suivre l’indifférence, il y a au moins l’indifférence qui la précède.

1285. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « Marie-Antoinette » pp. 171-184

Femme d’un grand sens, que la religion éclairait de ses lumières surnaturelles, elle ne s’y trompait pas ; et, d’ailleurs, si elle avait pu l’oublier, un souvenir cruel l’aurait avertie.

1286. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « XII. Marie-Antoinette, par MM. Jules et Edmond de Goncourt » pp. 283-295

Femme d’un grand sens, que la religion éclairait de ses lumières surnaturelles, elle ne s’y trompait pas ; et d’ailleurs, si elle avait pu l’oublier, un souvenir cruel l’aurait avertie.

1287. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XXII. Philosophie politique »

Luther et Calvin sont des fondateurs de religion, des bâtisseurs d’église contre Rome.

1288. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « Francis Lacombe »

On y trouve tout ce qui tient aux jurandes, aux maîtrises, aux rapports des travailleurs avec l’État et la religion.

1289. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « Chastel, Doisy, Mézières »

L’auteur de l’Assistance montre bien que les circonstances dans lesquelles vivaient les fidèles des premiers temps étaient des circonstances d’exception, et que la communauté, au sens chrétien, s’est perpétuée dans l’Église de Jésus-Christ là seulement où elle était réalisable, c’est-à-dire dans ces communautés religieuses, éternelles comme la religion elle-même, dont elles ne sont la plus grande force que parce qu’elles en sont la plus grande vertu.

1290. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « Gérard de Nerval  »

Ces compositions hybrides et morbides, mystérieuses, mystagogiques, qui traitent de magie et de surnaturalités et charrient dans leur flot noir ou brumeux toutes les superstitions et tous les songes de l’humanité, l’auteur des Illuminés les avait lues, et peut-être y avait-il cru, le temps de les lire ; car il n’était préservé par rien, ce sceptique à impression, qui se teignait pour une minute de tous les milieux par lesquels il passait, et qui nous a avoué quelque part qu’il avait été chrétien, polythéiste, mahométan, bouddhiste, enfin de dix-sept religions, tour à tour.

1291. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre V. Des Grecs, et de leurs éloges funèbres en l’honneur des guerriers morts dans les combats. »

En Égypte, où la politique était liée à la religion, on se proposait surtout de faire régner la morale dans toutes les classes de citoyens : dans la Grèce, composée de républiques libres et guerrières, on s’attachait à élever les âmes et à nourrir le mépris des dangers et de la mort.

1292. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre second. De la sagesse poétique — Chapitre XI. De la géographie poétique » pp. 239-241

Sans doute il comprenait avec raison sous cette dénomination les vagabonds sans lois et sans culte qui, pour échapper aux rixes continuelles de l’état bestial, cherchaient un asile dans les lieux forts occupés par les premières sociétés, faibles qu’ils étaient par leur isolement, et manquant de tous les biens que la civilisation assurait déjà aux hommes réunis par la religion.

1293. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre quatrième. Du cours que suit l’histoire des nations — Chapitre V. Autres preuves tirées des caractères propres aux aristocraties héroïques. — Garde des limites, des ordres politiques, des lois » pp. 321-333

L’observation des lois divines a continué de s’appeler religion.

1294. (1891) La vie littéraire. Troisième série pp. -396

Longtemps la métaphysique fut soumise à la religion ; Philosophia ancilla theologiæ. […] Il professa, il professe encore des religions athées. […] Le diable mort, tout l’édifice de la religion s’écroulait, et le cataclysme s’étendait jusqu’au ciel. […] Mais dans une âme affinée, cette religion se prête à toutes les délicatesses et s’accommode même d’une pointe de dandysme. […] Une douce religion nous fait communier en elle ; le récit de ses miracles et de sa passion est un évangile auquel nous croyons tous.

1295. (1896) Études et portraits littéraires

Ils savaient la voir certes, mais ils n’en avaient pas encore la « religion », ni le souci. […] Un néologisme exprime cette conception de la vie affirmée par certains avec une exagération particulière : Égotisme, c’est-à-dire exclusive religion du « subjectif ». […] Nous voici aboutir à la religion. […] Politique, religion, question sociale. […] Le lien logique, très ferme, de cette suite de propositions sur l’obligation morale et la transcendance de son origine, sur la religion et son efficace, est à peine indiqué dans cette rapide analyse.

1296. (1930) Le roman français pp. 1-197

Boileau l’édicte fortement : les mystères de la religion ne lui semblent pas matière à littérature. […] Quinze millions de martyrs pour cette religion-là en quatre ans, c’est un peu trop. […] Cette guerre révéla qu’il n’y avait plus qu’une religion ayant le droit d’imposer le sacrifice de la vie : le patriotisme. […] » Ce grand écrivain se faisait ainsi une religion personnelle, « mystique et stoïcienne tout à la fois ». […] Fierté d’appartenir à une religion qui permet, qui ordonne même de « choisir sa voie ».

1297. (1859) Cours familier de littérature. VII « XXXVIIe entretien. La littérature des sens. La peinture. Léopold Robert (2e partie) » pp. 5-80

XXVII Léopold s’achemina donc vers Paris à l’appel de ces amis, mais déjà triste ; la gloire a ses mélancolies comme la religion, comme l’amour : plus on monte, plus l’on voit de profondeur sous ses pieds ; plus on possède, plus on sent le néant de ce qu’on atteint. […] Elle m’a donné une énergie, une inspiration, un ressort que je n’aurais pas eus sans elle… Quant à la religion, si elle condamne les passions qui conduisent au vice, défend-elle les penchants qui en éloignent ?  […] D’ailleurs mes sentiments pour elle sont nobles et purs, et, quand ils auront plus de calme, ils me feront trouver un bien dans ce qui m’a tant agité… » Il cherchait ce bien et cet apaisement dans la religion et dans la prière ; la Bible de sa mère était sans cesse dans ses mains ; il y trouvait des souvenirs ; il n’y puisa pas assez la résignation et la force ; il ne trouva pas non plus en lui-même la mâle et tendre impassibilité de Michel-Ange, qui, voyant dans son cercueil, couvert de fleurs, passer le visage adoré de Vittoria Colonna, s’écria : Que ne l’ai-je du moins baisée au front !

1298. (1859) Cours familier de littérature. VII « XXXVIIIe entretien. Littérature dramatique de l’Allemagne. Le drame de Faust par Goethe » pp. 81-160

Blaze de Bury, écrivain de l’école ascétique, renfermé comme dans les cloîtres studieux de la religion littéraire, a publié, il y a douze ans, une complète étude sur le génie de Goethe et une incomparable traduction du drame de Faust ; nous nous en servirons, comme on se sert, dans les ténèbres d’une langue inconnue, d’une lumière empruntée qui fait rejaillir de tous les mots les couleurs mêmes de cette langue, ou comme on se sert, dans un souterrain, d’un écho qui répercute le bruit de tous les pas de ceux qui vous devancent dans sa nuit. […] Les dix premiers chants du poème épique de la Messiade, par Klopstock, venaient de paraître ; l’Allemagne s’étonnait et frémissait d’enthousiasme à cette poésie sérieuse comme une religion, où le drame du Calvaire se déroule entre le ciel et l’enfer et où l’enfer lui-même laisse entrer le rayon de la miséricorde. […] dis-moi, comment te comportes-tu avec la religion ?

1299. (1862) Cours familier de littérature. XIV « LXXXe entretien. Œuvres diverses de M. de Marcellus (3e partie) et Adolphe Dumas » pp. 65-144

C’est elle qu’il nommait la douce fille de Dieu, et il l’ennoblissait d’avance, quand une religion plus consolante devait un jour la purifier en l’immortalisant. » X Puis M. de Marcellus déchire le voile et traduit cette sublime définition de Dieu. […] Il s’était éteint sans souffrance et sans angoisse, plein de confiance dans les promesses de la religion, qu’il avait toujours admise sans contrôle dans ses dogmes pour la pratiquer dans ses vertus. […] Le désespoir, la solitude, l’exemple des frères qui lui prêtaient asile, le ramenèrent à la religion de sa mère.

1300. (1889) Histoire de la littérature française. Tome IV (16e éd.) « Chapitre troisième »

Rapports de la population avec les gouvernements, les lois et la religion ; constitution économique du commerce ; proportion des peines aux délits ; réduction de toutes les lois françaises en un code unique ; la liberté, pour attirer les étrangers par l’opulence qui la suit toujours ; l’égalité, pour porter l’abondance et la vie dans tout le corps politique ; la tolérance religieuse, pour assurer l’autorité du prince et la stabilité de l’Etat : voilà quelques-unes des nouveautés que Montesquieu proclame avec l’air de n’y penser que par plaisir, répandant à la fois les doutes, les vœux de réforme, les critiques déguisées du temps présent, tout, excepté des craintes sur le prix dont la France devait payer un jour ces conquêtes. […] Il devient plus chrétien à mesure qu’il avance dans la vie, et par la même vérité d’observation qui nous le montre se corrigeant avec le temps, la religion de son enfance passe insensiblement de sa mémoire dans son cœur, et y prend la place laissée vide par les passions qui se retirent. […] On y croit encore que le grec est tout au moins utile pour savoir à fond le latin, et que l’union de ces trois langues, liées d’une parenté si étroite, et qui ont exprimé en perfection toutes les vérités de la religion, de la morale et de l’art, est l’inattaquable fondement de toute éducation libérale.

1301. (1889) Écrivains francisés. Dickens, Heine, Tourguénef, Poe, Dostoïewski, Tolstoï « Conclusions »

La peur et la pitié sont assurément les deux sentiments que satisfait la religion, et l’exagération religieuse, qui est le mysticisme, provient probablement aussi d’une exagération de ces deux sentiments, unie à la perversion de la perception dont cette exagération résulte. […] Chez Tolstoï, dont la foi religieuse bien que fort vive n’est pas à proprement parler mystique, puisque sa religion est un système rationnel et qu’il croit à un triomphe sur terre, ou peut cependant ramener clairement l’origine des pensées qui le lui ont fait adopter à une prédominance graduelle de la sensibilité sur les facultés de perception, qui pourtant étaient chez lui énormes, et sur les facultés d’idéation qui étaient plus faibles. […] S’ils sont croyants, ils se réfugient dans la religion, mais non pas dans la foi calme et aussi rationnelle que le comportent ses mystères.

1302. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome II « Querelles générales, ou querelles sur de grands sujets. — Troisième Partie. De la Poësie. — III. Le Poëme épique, ou l’Épopée. » pp. 275-353

Par la même raison que cet écrivain voyoit le Sauveur des hommes dans Énée, il croyoit voir aussi la religion chrétienne dans Lalagé, la maîtresse d’Horace, & donnoit, pour auteurs de ses Odes & de l’Énéide, des moines du treizième siècle. […] Il découvre une plus belle matière à traiter ; de plus grands événemens à développer ; un palais plus vaste & plus digne d’admiration ; intérêt de nation, intérêt de famille, intérêt de politique, intérêt de religion, de curiosité. […] Grandisson nous peint deux amans égaux par la naissance, par la fortune & par le mérite ; tous deux charmans, tous deux accomplis, fidèles à tous les devoirs de la religion & de la morale ; & qui, après avoir été le modèle des vrais amans, deviennent celui des heureux époux.

1303. (1857) Cours familier de littérature. IV « XXIIIe entretien. I. — Une page de mémoires. Comment je suis devenu poète » pp. 365-444

X Après la nature, ce fut la religion qui me fit un peu poète. […] La religion, qui est extérieure et sensuelle dans le Midi, est morne et contemplative dans ces climats. […] Les jésuites, très favorisés alors par l’empire et par le cardinal Fesch, oncle de Napoléon, saluèrent le Génie du Christianisme avec moins d’enthousiasme que le parti de l’empire et que le parti royaliste ne l’avaient salué ; ils ne se dissimulèrent pas que le secours apporté en apparence par ce livre à la religion était un secours dangereux, plus poétique que chrétien, et que les sensualités d’images et de cœur par lesquelles l’écrivain alléchait, pour ainsi dire, les âmes, étaient au fond très opposées à l’orthodoxie littérale et à la sévérité morale de dogme et de l’esprit chrétien.

1304. (1892) Un Hollandais à Paris en 1891 pp. -305

Ceci est pour moi une vérité incontestable : sous la race, sous la religion, sous la société politique et à certains égards indépendants de ces facteurs de l’humanité, il y a l’homme. […] Qui donc, pensez-vous, a gardé intactes à travers les siècles notre religion et notre nationalité ? […] La religion, sortie du culte de la famille, est retournée, après la perte de notre pays et de notre capitale, au foyer où elle avait pris son origine. […] On le tenait d’abord pour un adversaire de la religion ; et c’est justement lui qui a ramené le sentiment religieux dans la conscience des classes civilisées. […] N’avaient-ils pas, au fond de leur cœur, des pressentiments de cette religion sublime, que les esprits de notre temps cherchent avec tant d’ardeur ?

1305. (1900) La vie et les livres. Cinquième série pp. 1-352

Les pires épreuves n’ont pu ébranler cette religion, qui s’était emparée de son âme tout entière. […] Il soupçonne que la religion est le premier des liens sociaux. […] Longtemps, les gens naïfs ont cru que les guerres de religion étaient définitivement éteintes. […] Mais il s’agit bien de religion, dans ces méchantes distractions de l’oisiveté mondaine ! […] Ce genre de fatalisme ne me plaît pas plus que la religion étroite et cruelle des Turcs.

1306. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Madame Desbordes-Valmore. »

La religion et ses ministres divins se penchent sur les blessés pour les bénir, — sur les morts pour envier leur martyre… « Ôte ton chapeau à mon intention en passant devant l’église Notre-Dame, et mets sur ses pieds les premières fleurs de carême que tu trouveras. » Cependant les conséquences ne tardent pas à se faire sentir. […] Ici l’un des traits de la religion de Mme Valmore se prononce.

1307. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre III. Les grands artistes classiques — Chapitre IV. Racine »

Une sensibilité infiniment délicate, un esprit mordant, un amour-propre ardent, beaucoup d’impétuosité à suivre le premier mouvement, peu de possession de soi jusqu’à ce que la religion l’eût réglé, voilà ce que la vie de Racine nous montre en lui : c’est une âme de poète, vibrante et passionnée. […] Mathan est une Ame envieuse, ambitieuse, qui joue de la religion, hypocrite tragique, à qui nulle vie innocente, nul intérêt public n’est précieux, dès qu’il trouve jour à satisfaire ses haines ou son orgueil : serviteur égoïste et sans dévouement d’Athalie, servi lui-même par le zèle intéressé de Nabal.

1308. (1889) Les premières armes du symbolisme pp. 5-50

Il les assaisonne de religion, car il est catholique. […] Un autre habitué fait remarquer quelles complications invraisemblables on obtient avec la religion.

1309. (1854) Histoire de la littérature française. Tome I « Livre I — Chapitre premier »

Quoiqu’il ne s’agisse que de l’esprit français dans la littérature, comme tout ce qui est de la vie politique et sociale des arts, de la religion, de la philosophie, tout ce qui est une matière pour l’activité humaine, a été exprimé ou peut l’être par la littérature, on est bien près de connaître tout le fonds de sa nation, quand on en connaît l’esprit dans les œuvres littéraires. […] La seconde s’est vue pendant et après les guerres de religion.

1310. (1854) Histoire de la littérature française. Tome I « Livre II — Chapitre cinquième »

Il avait été mêlé aux guerres de religion. […] Tous s’étudiaient à emprunter à l’antiquité ce qui y est plus particulièrement le fruit des mœurs des formes de la société civile et politique, des religions, du sol, tout ce qui la fait différer essentiellement des temps modernes, et en particulier de la France.

1311. (1889) Histoire de la littérature française. Tome II (16e éd.) « Chapitre premier »

Les affaires de religion, les conclaves, l’hérésie, les troubles politiques, la guerre, la paix, en fournissent la matière. […] On pourrait reconnaître, dans la Relation à Ménandre, de grands traits de mélancolie, que Pascal semble avoir recueillis et placés en meilleur lieu ; dans la fameuse lettre sur Rome, et dans beaucoup de pensées de religion, la hardiesse et la pompe solide de Bossuet ; dans Aristippe et le Prince, des portraits que La Bruyère n’a fait que retourner.

1312. (1863) Le réalisme épique dans le roman pp. 840-860

Si la pécheresse, au bord de la tombe, demande sa consolation et sa force au plus mystérieux sacrement de la religion catholique, la peinture de cette scène a juste autant de valeur dans l’ensemble du roman que la description d’une casquette ridicule sur la tête d’un collégien de province. […] Et ce n’est pas seulement sur la bataille des défilés de la Hache qu’il a des informations si complètes ; cette Carthage dont les historiens romains parlent trop peu, ce sénat de marchands praticiens, cette religion monstrueuse et subtile, ces temples hideux, ces divinités infâmes, les mœurs publiques, les mœurs privées, tout enfin lui a été révélé avec la plus minutieuse exactitude.

1313. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « II. M. Capefigue » pp. 9-45

Vertu, vice, religion, politique, art, industrie, les plus hautes sphères de l’activité humaine ne sont pour elle que des sujets, plus ou moins heureux, de trumeaux à badigeonner. […] Ils ont leurs raisons et ils en ont la logique, mais que des écrivains de religion et de monarchie comme M. 

1314. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « Μ. Ε. Renan » pp. 109-147

Renan écrit, page 38 : « La Religion dans l’humanité est l’équivalent de la nidification chez l’oiseau. » C’est Mascarille, à l’Académie ! […] Renan, mais je l’ai vu naître ; je l’ai toujours suivi dans toutes ses élucubrations, depuis sa Vie de Jésus, qui fut son scandalum tinniens, mais avec laquelle, croyant crever une religion, il ne creva qu’un tambour, et le sien !

1315. (1902) Les œuvres et les hommes. Le roman contemporain. XVIII « Octave Feuillet »

Il faut être aussi hardi contre lui que contre la religion. […] Dans un temps où le sentimentalisme gouverne le monde et a remplacé la religion, la morale et la loi, tous les pleurards qui tètent leur canne en regardant mélancoliquement les corniches, quand on parle des choses du cœur, trouveront admirable un livre dans lequel, à l’honneur de la nature humaine, Berquin bat constamment Borgia, par la très simple raison, du reste, c’est que le Borgia qu’on voulait mettre dans ce livre, en définitive n’y est pas !

1316. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Deuxième partie. — Chapitre XXI. »

Ce que la religion seule avait d’abord réclamé, ce que toute grande politique devait ambitionner, la civilisation, le bon sens, la nécessité, l’accompliront dans un terme prévu ; et le poëte illustre qui, de nos jours, avait des premiers invoqué et promis cette délivrance, malgré sa rétractation qui nous afflige, aura été, nous l’espérons, non pas rêveur, mais prophète. […] Laissons à la religion ses mystères, à la poésie son délire ; et ne nous plaignons pas qu’au seizième siècle le génie de la Renaissance ait épargné cet alliage à la raison et au goût.

1317. (1874) Premiers lundis. Tome I « Espoir et vœu du mouvement littéraire et poétique après la Révolution de 1830. »

Il fut donc populaire jusqu’à un certain point, populaire dans les châteaux, dans le clergé, au sein des familles pieuses ; sa renommée considérable tenait beaucoup à l’espèce de religion sentimentale et poétique qu’il célébrait avec génie, à l’opposition courageuse dont on lui savait gré, à la défaveur impériale qu’il avait osé encourir.

1318. (1874) Premiers lundis. Tome II « Alexis de Tocqueville. De la démocratie en Amérique. »

Il nous montre donc, particulièrement dans la Nouvelle-Angleterre, les puritains, les émigrants de toute secte, persécutés ailleurs, venant là chercher asile, s’y réunissant dans certaines nécessités communes, dans certains droits primordiaux, et sauf quelques erreurs et préjugés inévitables, y pratiquant aussitôt l’alliance de l’esprit de religion avec l’esprit de liberté.

1319. (1823) Racine et Shakspeare « Chapitre II. Le Rire » pp. 28-42

Tous les sujets de Louis XIV se piquaient d’imiter un certain modèle, pour être élégants et de bon ton, et Louis XIV lui-même fut le dieu de cette religion.

1320. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Deuxième partie. Invention — Chapitre III. Du récit des faits. — Antécédents et conséquents. — Causes et effets »

C’est par trop simplifier les questions, et, sans parler de Dieu, c’est par trop méconnaître l’infinie fécondité de la nature humaine, inépuisable source de phénomènes, subtile créatrice de merveilleux sans miracle, que de donner tous les fondateurs de religions et tous les prêtres pour des charlatans et pour des fous, tous les fidèles et dévots pour des dupes et pour des sots.

1321. (1892) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Cinquième série « Édouard Rod »

Il découvre très vite qu’il est incapable de pratiquer pour de bon, et dans la rigueur réelle de ses obligations, la « religion de la souffrance humaine », et qu’il n’est, comme tant d’autres, qu’un brave homme assez pitoyable et pas méchant, mais non pas héroïque… Et il souffre de cette constatation.

1322. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre XXII. Machinations des ennemis de Jésus. »

… Intimement persuadés que Jésus était thaumaturge, Lazare et ses deux sœurs purent aider un de ses miracles à s’exécuter, comme tant d’hommes pieux qui, convaincus de la vérité de leur religion, ont cherché à triompher de l’obstination des hommes par des moyens dont ils voyaient bien la faiblesse.

1323. (1880) Les deux masques. Première série. I, Les antiques. Eschyle : tragédie-comédie. « Chapitre V, la Perse et la Grèce »

Mais cette race élue portait en elle des divinités qui devaient conquérir le monde : les génies de la beauté, de la civilisation, de l’éducation, du progrès ; une religion ouverte à toutes les hardiesses et à toutes les conceptions de l’esprit, le sens unique et parfait des arts, le culte des idées pures, un don de perfectionnement qui transformait tout ce qu’elle touchait.

1324. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « César Daly »

Un jour César Daly perdra-t-il, sur la toute-puissance de cet art qui est une véritable religion pour sa pensée, les illusions de tous ceux qui pensent que l’absolu peut se réaliser sur la terre ?

1325. (1905) Les œuvres et les hommes. De l’histoire. XX. « La révocation de l’Édit de Nantes »

Il se serait demandé encore si, dans la prévision des événements qui allaient suivre, il ne valait pas mieux se séparer de tout ce qui pouvait entretenir dans le pays les antiques et effroyables divisions intestines, que de l’y garder en affrontant les éventualités les plus funestes ; car, à cette époque de l’histoire, la religion pesait plus dans les décisions des hommes que cette idée de la patrie qui, deux siècles plus tard, l’a remplacée.

1326. (1895) Les œuvres et les hommes. Journalistes et polémistes, chroniqueurs et pamphlétaires. XV « A. Grenier » pp. 263-276

Gaston Boissier : La Religion romaine, d’Auguste aux Antonins !

1327. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « Madame Du Deffand »

Ce fut le bon sens et sa charmante fille, la plaisanterie, qui l’empêcha de tomber là-dedans, puisque ce ne furent point la religion et ses bons anges… Eh bien, cela suffirait, je ne dis pas à la gloire, mais à l’excuse de sa vie !

1328. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « X. Doudan »

Quoiqu’il ressemble à Joubert par l’accent, le coloris, le platonisme, et ce que je me permettrai d’appeler : la sensualité de l’immatériel, Joubert a une autre religion littéraire et d’autres assises dans la pensée que ce capricieux Doudan, qui s’amuse à sauter, avec tant de grâce, à travers tous les cerceaux du paradoxe, et qui avait bien ses raisons pour résister à ses amis qui lui conseillaient de faire un livre.

1329. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « Mademoiselle de Condé »

La religion ne la saisit pas tout de suite dans ses bras maternels.

1330. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XXVI. Médecine Tessier »

Il ganta sa main et masqua son visage, et l’on vit jusqu’à ce lion de Broussais dont Pariset disait : Quærens quem devoret , devenu tout à coup d’une prudence antipathique à son génie, mettre une sourdine à sa voix rugissante et inventer, pour mieux cacher le secret de la comédie, ce mot d’ontologie qui signifiait toutes les chimères et toutes les sottises de la religion, de la métaphysique et de la spiritualité !

1331. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « Ch. de Rémusat. Abélard, drame philosophique » pp. 237-250

Il manque même de haine philosophique, quoique de Rémusat doive avoir, tapies quelque part, les haines de sa philosophie, et quoique le scepticisme du temps et la glace de son tempérament aient bien diminué cette rage contre l’Église qu’ont tous, au fond du cœur, les philosophes, et que Cousin, lâche, mais indiscret, révélait en la couvrant de ce mot, dit justement à propos d’Abélard : « Il avait déposé dans les esprits de son temps le doute salutaire et provisoire, qui préparait l’esprit à des solutions meilleures que celles de la foi. » Charles de Rémusat n’a jamais eu de ces imprudentes et impudentes paroles d’un homme dont l’espérance trahit l’hypocrisie, mais à quelque coin, dans cet esprit moyen, dans cette âme de sagesse bourgeoise, il y a toujours, prête à se glisser au dehors, l’hostilité contre toutes les grandes choses que nous croyons… Comme Abélard, le héros de toute sa vie, comme Bacon, qu’il a aussi commenté, de Rémusat s’est toujours plus ou moins vanté d’être un écrivain de libre examen et de libre pensée, un philosophe contre la théologie, un adversaire de l’autorité sur tous les terrains, en religion comme en politique, — et comme l’Église est l’autorité constituée de Dieu sur la terre et qu’elle a le privilège divin « que les portes de l’enfer ne prévaudront jamais contre Elle », de Rémusat, qui est une de ces portes-là, — non pas une porte cochère, aux cuivres insolemment luisants et aux gonds tournant à grand bruit, mais une petite porte, discrète et presque cachée à l’angle et sous les lierres prudents de son mur, — de Rémusat entend bien prévaloir contre l’Église et lui prouver que son privilège divin n’est qu’une prétention !

1332. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « M. Léon Aubineau. La Vie du bienheureux mendiant et pèlerin Benoît-Joseph Labre » pp. 361-375

Il n’y avait plus de mœurs, ni publiques, ni privées ; ni enseignement, que celui du plaisir ; et la religion de la Vénus commode, en attendant le Néant commode.

1333. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « Georges Caumont. Jugements d’un mourant sur la vie » pp. 417-429

— dit-il quelque part, bondissant sous elle, — l’écrasante et affolante pensée d’un Dieu tout-puissant, qui, non content de tyranniser nos corps, tyrannise nos cœurs, en nous ôtant la force même de nous plaindre, parce que nous savons que l’iniquité même sera juste si le caprice de celui qui peut tout l’a décidé ainsi… » Voilà Job et le poitrinaire qui meurent à Madère, — et c’est lui, Georges Caumont, fou des terreurs de Dieu, et qui, de la religion qu’il réprouve, n’a gardé que la croyance à l’enfer… « Non !

1334. (1909) Les œuvres et les hommes. Philosophes et écrivains religieux et politiques. XXV « Gustave D’Alaux »

Voilà, selon d’Alaux, l’explication et la clef de ce phénomène, qui s’appelle pour l’heure Faustin Ier, de la tyrannie indurée de cet homme, arrivé au pouvoir en se frottant les yeux, comme l’Éveillé de la comédie, sans parti pris, sans intention que d’imiter Richer, non parce qu’il était le plus intelligent de ces souverains de pas sage, mais parce qu’il était le dernier passé, et qui trouve tout à coup dans sa religion de barbare, dans sa terreur des sorciers et dans son fétichisme méprisé, une initiative qui fait de lui le représentant le plus pur qu’ait jamais eu à Haïti le parti ultra de la réaction africaine !

1335. (1909) Les œuvres et les hommes. Philosophes et écrivains religieux et politiques. XXV « Charles De Rémusat »

Au lieu d’écrire simplement de Bolingbroke, de Walpole, de Junius, de Burke et de Fox, Rémusat a écrit des dissertations sur les principes constitutionnels, sur l’aristocratie, sur la religion, sur toutes ces choses, enfin, qui sont le pont aux ânes de tous les dissertateurs politiques, pont qu’un tour de roue de siècle fait crouler et sur lequel, d’ailleurs, Rémusat ne s’avance pas avec une de ces magnifiques allures qui, pour l’âne, font oublier le pont… Rien de plus médiocre que cette partie de son travail.

1336. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « M. Théophile Gautier. » pp. 295-308

C’est un écrivain d’application et d’agencement, de creusement et de volonté, lequel a la religion de Buffon : que le génie n’est qu’une patience… En raison même de ses facultés et de ses théories qui font suite à ses facultés, je crois bien que M. 

1337. (1908) Les œuvres et les hommes XXIV. Voyageurs et romanciers « L’Abbé *** »

Si vous joignez de plus à cela l’horripilation impudique que causent, à ces sensitives du mariage des prêtres, le dogme de l’immaculée Conception et la haine profonde pour le Marianisme, — cette affreuse religion entrevue par Michelet, — qui remplacerait prochainement le Christianisme si nous n’avions pas pour le sauver des docteurs comme des Julio de la Clavière et des abbés Trois-Étoiles, vous aurez à peu près tout ce qu’il y a de vues et de choses nouvelles dans ce Maudit, que j’appelle plutôt le mal dit ; car il est impossible de plus mal dire, il est impossible de plus manquer que ce livre du talent qui sait exprimer même des sottises, et qui parfois les fait passer !

1338. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XXXI. Des oraisons funèbres de Bourdaloue, de La Rue et de Massillon. »

Qui ne sait d’ailleurs qu’outre les beautés de tous les temps et de tous les lieux, il y a pour chaque genre, des beautés analogues au climat, au gouvernement, à la religion, à la société, au caractère national ?

1339. (1900) Molière pp. -283

Molière n’y avait mis aucune espèce de mauvaise intention ni contre la religion, ni contre les dévots, cela est certain ; je vais dire pourquoi. […] Eh bien, le mari systématique qu’il a voulu peindre, le mari égoïste et fantasque, pour qu’il soit complet, il faut en effet qu’il fasse des sermons, il faut qu’il fasse de la religion l’usage bas et vil qu’en fait Arnolphe. Pour les maris de cette sorte, qu’est-ce que la religion ? […] Combien crois-tu que j’en connaisse, qui, par ce stratagème, ont rhabillé adroitement les désordres de leur jeunesse, qui se sont fait un bouclier du manteau de la religion, et, sous cet habit respecté, ont la permission d’être les plus méchants hommes du monde ? […] ——— La fidélité des femmes est une question comme la science des médecins, et la sincérité des prêtres d’une religion fausse.

1340. (1905) Propos littéraires. Troisième série

Voilà qui aide à comprendre la formation d’une religion… » Mais il croyait que l’humanité, très lentement, s’améliore, s’adoucit et se perfectionne. […] En gros, il a enseigné le positivisme et le respect des religions. […] Je n’avais pas compris ce que c’est qu’une religion populaire, prise bien naïvement et sans critique par un peuple. Je n’avais pas compris un peuple créant sans cesse sa religion, prenant ses dogmes d’une façon vivante et vraie. […] Il y aurait là un certain excès. » Et, en effet, le positivisme n’a l’horreur des religions que quand, à son tour, il en devient une.

1341. (1896) Le livre des masques

Comme Emerson, il doit voir dans la nature « les images de la plus ancienne religion » et songer, encore comme Emerson : « Il semble qu’une journée n’a pas été tout entière profane, où quelque attention a été donnée aux choses de la nature. » Un par un, il connaît et il aime les éléments de la forêt, depuis les « grands doux frênes » jusqu’au « jeune million des herbes », et c’est bien sa forêt, sa personnelle et originale forêt : Sous ma forêt de Mai fleure tout chèvrefeuille Le soleil goutte en or par l’ombre grasse, Un chevreuil bruit dans les feuilles qu’il cueille, La brise en la frise des bouleaux passe, De feuille en feuille ; Par ma plaine de mai toute herbe s’argente Le soleil y luit comme au jeu des épées, Une abeille vibre aux muguets de la sente Des hautes fleurs vers le ru groupées. […] En « poésie » comme en religion, il faut la foi, et la foi n’a pas besoin de voir avec les yeux du corps pour contempler ce qu’elle reconnaît bien mieux en elle-même… » De telles idées furent maintes fois, sous de multiples formes toujours nouvelles, toujours rares, exprimées par Villiers de l’Isle-Adam dans son œuvre. […] Rimbaud était de ces femmes dont on n’est pas surpris d’entendre dire qu’elles sont entrées en religion dans une maison publique ; mais ce qui révolte encore davantage c’est qu’il semble avoir été une maîtresse jalouse et passionnée : ici l’aberration devient crapuleuse, étant sentimentale. […] Pierre Louys Il y a en ce moment un petit mouvement de néo-paganisme, de naturisme sensuel, d’érotisme à la fois mystique et matérialiste, mi renouveau de ces religions purement charnelles où la femme est adorée jusque dans les laideurs de son sexe, car au moyen de métaphores on peut adoniser l’informe et diviniser l’illusoire. […] Pierre Louys a des religions et des mœurs alexandrines lui a permis de vêtir ses personnages de noms et de costumes véridiquement anciens, mais il faut lire le livre dépouillé de ces précautions qui ne sont là, ainsi, qu’en plus d’un roman du XVIIIe siècle, que le paravent brodé d’hiératiques phallophores derrière lequel s’agitent des mœurs, des gestes et des désirs d’un incontestable aujourd’hui.

1342. (1911) Visages d’hier et d’aujourd’hui

Mais la substance mystérieuse nous invite à la religion. […] La science s’est, dans son esprit, tout de suite substituée à la religion. Et, que ce fût à la religion on à la science, il croyait naturellement. […] On crut un instant qu’il s’établirait chez nous à l’état de religion. […] Mais ils se trompent, quand ils se figurent que la religion doit être chagrine.

1343. (1891) Essais sur l’histoire de la littérature française pp. -384

Il en use à l’égard de la tradition et des maîtres classiques, à l’égard de sa religion littéraire, comme Bossuet à l’égard de la religion chrétienne et des Pères. […] Depuis ce temps-là je me doute que notre pauvre planète est le théâtre d’une querelle déjà bien vieille et qui a sa gravité même à côté des plus importantes querelles de la religion et de la politique. […] Madame Sand, presque à chaque volume, invente une religion nouvelle ou une nouvelle forme de république. […] La richesse a si bien usurpé la considération publique qu’il ne reste plus qu’une estime secondaire pour le mérite, la probité, les belles actions, les grandes idées, la religion, l’honneur, l’intelligence. […] Songez-vous à vous demander si votre religion et votre morale règnent en ces climats ?

1344. (1904) Prostitués. Études critiques sur les gens de lettres d’aujourd’hui « Chapitre II. Filles à soldats »

[Maurice Barrès] Maurice Barrès débuta par je ne sais quel individualisme bas, raffiné et onanique, quelque chose qui ressemble aux noblesses simples du stoïcisme ou de l’épicurisme comme les fantaisies d’un Baudelaire ressemblent à une religion directement sincère.

1345. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome II « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Jean-Baptiste Rousseau, et Joseph Saurin. » pp. 28-46

On a cru trouver des lumières sûres dans un écrit laissé par le fameux Boindin, procureur du roi, des trésoriers de France, ce censeur en titre de toutes les nouveautés de Paris, si bien peint dans le Temple du goût, sous le nom de Bardou, homme sans religion*, mais de mœurs rigides.

1346. (1767) Salon de 1767 « Peintures — Renou » pp. 301-307

Lucrèce a dit que les mortels opprimés gémissaient sous l’aspect menaçant de la religion, quoe caput a coeli… etc. changez le vers spondaïque en un vers ordinaire ; rétrécissez le lieu de la scène, en substituant à regionibus une expression petite et légère ; au lieu de ostendebat qui étend sans fin la durée de la prononciation et avec elle la mesure de la tête du monstre, dites montrait ; au lieu d’une tête isolée peignez la figure entière, et il n’y aura plus d’effet.

1347. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Troisième partie — Section 10, continuation des preuves qui montrent que les anciens écrivoient en notes la déclamation » pp. 154-173

On peut même observer aujourd’hui dans les lieux où les habitans sont de religions differentes qu’ils ne sortent pas de leurs églises après le service avec la même humeur.

1348. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « Chamfort »

L’avortement, l’infanticide et l’abandon ont cent fois levé le poignard sur sa tête, cherché des oubliettes mystérieuses, consulté des scélérats et rêvé bien des espèces de crimes avant de le déposer dans son berceau et de l’y laisser, — pour la religion peut-être, qui l’y a trouvé et qui l’y a pris !

1349. (1905) Les œuvres et les hommes. De l’histoire. XX. « Louis XIV. Quinze ans de règne »

Sous Louis XIV, les questions politiques étaient encore doublées de questions religieuses, et les écrivains d’un temps sans religion comme l’est le nôtre l’oublient trop.

1350. (1888) Les œuvres et les hommes. Les Historiens. X. « Th. Carlyle » pp. 243-258

Il traite dédaigneusement de formules les lois, les religions, les codes, les thèses quelconques, et il n’a une si grande haine pour Robespierre que parce que cet homme de creuse métaphysique politique n’est pour lui que l’expression morte d’une formule (il l’appelle même par moquerie l’homme-formule), et il n’a tant de sympathie pour Danton que parce que celui-ci, crimes et tout, n’est que de la passion et de la vie, jusqu’au bout de ses ongles de lion !

1351. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « Benjamin Constant »

Car, tel il était, cet homme si bien de race française, quoique sa famille fût réfugiée depuis trois siècles en Suisse et que trois cents ans de protestantisme l’eussent défrancisée, mais qui reparaissait française dans son dernier descendant, dans la personne de ce brillant esprit, de ce sceptique élégant du xviiie  siècle, qui a fait sur les Religions un livre bien français dans son insuffisance et dans sa légèreté religieuse !

1352. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XIII. Pascal »

C’est même la raison, par parenthèse, qui m’a toujours empêché de croire qu’eût-il vécu plus longtemps et n’eût-il pas eu dans le cœur le néant de tout, qui empêche de rien achever, Pascal eût pu élever à la religion le monument que l’on regrette, non que l’ordonnance d’un beau livre ne fût dans les puissances de ce grand esprit de déduction et de géométrie, mais la peur fait trembler la main et dérange les combinaisons de l’artiste, tandis que la terreur, tout le temps qu’elle ne vous glace pas, fait pousser le cri pathétique ; et le cri pathétique chez l’écrivain, c’est l’expression !

1353. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « M. Jules Soury. Jésus et les Évangiles » pp. 251-264

… Aux applaudissements de la foule, cette honte recherchée… Il n’y a plus de Religion d’État pour châtier, comme il le faudrait, les écrivains qui, sous prétexte de critique, se livrent aux abominables et révoltantes conclusions d’un livre comme cette nouvelle Vie de Jésus, sortie évidemment de l’autre, et qui a pour ambition de la surpasser.

1354. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « M. Matter. Swedenborg » pp. 265-280

Il n’a pas les ardentes ambitions d’un Montanus ; il ne se rêve pas le Paraclet ; il ne veut pas fonder une religion nouvelle, pas même rétablir l’ancienne pureté du Christianisme.

1355. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « M. Athanase Renard. Les Philosophes et la Philosophie » pp. 431-446

Aux systèmes des philosophes dont il écrit la triste chronique, il oppose le sien, qui n’est pas un système, mais une vue générale et planant sur l’esprit humain… Le Dr Athanase Renard n’a point le bon sens étranglé de Reid, l’Écossais, étroit en philosophie comme en religion (le presbytérianisme), mais il a le bon sens dilaté d’un Gaulois, agrandi par l’idée catholique… La race vit et pense dans le Dr Athanase Renard, et c’est pour cela que je l’aime et que je l’estimé, moi qui crois à la race, et qu’en toute chose nous ne valons pas nos pères !

1356. (1904) Les œuvres et les hommes. Romanciers d’hier et d’avant-hier. XIX « Madame Sand et Paul de Musset » pp. 63-77

En effet, Laurent est un poète, comme Sténio, qui, disait-on, était déjà un portrait ; débauché comme Sténio, amoureux comme Sténio, bien plus de l’émotion de l’amour que de la femme aimée, recherchant cette émotion moins pour l’éprouver que pour la peindre, contradictoire comme un enfant et comme tant de génies, lorsque la religion, qui fait seule l’harmonie et l’ordre dans ces têtes sublimes et troublées, n’y verse pas la paix féconde et la lumière !

1357. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « Deux romans scandaleux » pp. 239-251

En effet, Laurent est un poète, comme Sténio qui, disait-on, était déjà un portrait, débauché comme Sténio, amoureux comme Sténio, bien plus de l’émotion de l’amour que de la femme aimée, recherchant cette émotion moins pour l’éprouver que pour la peindre, contradictoire comme un enfant et comme tant de génies, lorsque la religion, qui fait seule l’harmonie et l’ordre dans ces têtes sublimes et troublées, n’y verse pas la paix féconde et la lumière !

1358. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « M. Ch. Bataille et M. E. Rasetti » pp. 281-294

La morale, la religion, la métaphysique, toutes les conditions de la nature humaine intellectuelle pèsent sur vous.

1359. (1906) Les idées égalitaires. Étude sociologique « Introduction »

En ce sens, l’explication intégrale d’un fait social suppose une conspiration de toutes les disciplines de l’histoire, de celles qui ont déjà revêtu la forme scientifique comme de celles qui l’attendent encore : sociogéographie, technologie, anthropologie, psychologie des peuples, économie politique, science des religions, de la morale, etc. : cette conspiration, c’est la future philosophie de l’histoire, qui ne doit plus être, comme celle de l’âge héroïque, antérieure, mais postérieure à la connaissance scientifique des faits sociaux.

1360. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XXX. De Fléchier. »

Alors il fait voir ce grand homme étendu sur ses trophées ; il présente l’image de ce corps pâle et sanglant, auprès duquel, dit-il, fume encore la foudre qui l’a frappé, et montre dans l’éloignement les tristes images de la religion, et de la patrie éplorée.

1361. (1898) Ceux qu’on lit : 1896 pp. 3-361

Dans ces lettres, qui alternent avec celles que sa sœur Henriette lui écrivait, on suit les étapes de deux esprits — j’allais dire de deux âmes — qui, désireux de vérité, trop pressés peut-être de la connaître, ignorant qu’on ne la captive jamais d’une façon absolue, passent de la religion au doute et du doute à la négation. […] Quelques parties aussi en sont consacrées à l’art, à des détails de la vie romaine moderne, mais c’est le Vatican, c’est le Pape, sa politique, l’avenir de la papauté et de notre religion qui en sont le véritable et sévère sujet. […] « Le christianisme redevenant la religion de justice et de vérité qu’il était, avant de s’être laissé conquérir par les riches et par les puissants. […] » Toute république est un état d’anarchie, et c’est dès lors la plus criminelle des fautes, c’est ébranler à jamais l’idée d’autorité, d’ordre, de religion même, que de reconnaître la légitimité d’une république, dans l’unique but de caresser le rêve d’une conciliation impossible… Aussi voyez ce qu’il a fait du pouvoir temporel. […] Le meilleur serait pour lui de constater qu’au fond il n’est, malgré toute son honnêteté de conscience, qu’un mauvais prêtre incapable d’enseigner et de défendre sa religion.

1362. (1730) Discours sur la tragédie pp. 1-458

J’ai fait enfin tous mes efforts pour représenter continument dans la mere et dans le fils, la force et le triomphe de la religion ; et de là, si je ne me trompe, naît dans la piéce cette unité d’interêt qui est à mon avis la condition la plus essentielle d’une tragédie. […] Comme, par exemple, dans ma tragédie, la tentation où j’expose Misaël est la force de la religion qui doit en triompher. […] La convenance est ici le pathetique, puisque l’amour conjugal et l’amour paternel sont l’ame de toute la piece : ce n’est ni le sublime de la religion ni l’héroïque de l’ambition. […] L’homme le plus vertueux que j’aye vû dans nos tragedies, en exceptant les hommes animés du zele de la religion, c’est Regulus. […] Sa reconnoissance, sa docilité pour le grand-prêtre, son amour, son zèle pour la religion, vertus qui deviennent encore plus touchantes par son enfance ; tout attire à lui la pitié du spectateur.

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