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1118. (1860) Ceci n’est pas un livre « [Épigraphe] » p. 

[Épigraphe] La vérité est un cercle dont la circonférence peut être partout, mais dont le centre n’est certainement nulle part.

1119. (1761) Salon de 1761 « Peinture —  Nattier  »

Cet homme-là n’a donc point d’amis qui lui dise la vérité.

1120. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre II. La Renaissance. — Chapitre V. La Renaissance chrétienne. » pp. 282-410

Au milieu de cette copie minutieuse de la vérité laide, où est l’échappée ? […] Par malheur, les marchands de pardons ne savent pas que tout est changé et que l’esprit est devenu adulte ; il ne récite plus les mots machinalement comme un catéchisme, il les sonde anxieusement comme une vérité. […] La préface elle-même appelait les gens à l’étude indépendante, disant que « l’évêque de Rome a tâché longtemps de priver le peuple de la Bible…, pour l’empêcher de découvrir ses tours et ses mensonges…, sachant bien que si le clair soleil de la parole de Dieu apparaissait dans la chaleur du jour, il dissiperait le brouillard pestilentiel de ses diaboliques doctrines. » Même de l’avis des gens officiels, c’est donc la vérité pure et tout entière qui est là, non pas la simple vérité spéculative, mais la vérité morale sans laquelle nous ne pouvons bien vivre ni être sauvés […] Mais pendant tout ce temps je cachai mon pardon, et ne lui en dis rien, l’exhortant seulement à avouer la vérité. […] Les chercheurs pensaient que la vérité religieuse ne doit être saisie que dans une sorte de brouillard mystique, avec doute et appréhension.

1121. (1889) Derniers essais de critique et d’histoire

Il a aimé de tout son cœur la vérité vraie, et l’a cherchée de toutes ses forces. […] A la vérité, le lecteur aura besoin de faire effort. […] Comment faire pour concilier ces deux extrêmes, la beauté et la vérité ? […] A l’égard de la cour, je ne lui mâche pas ses vérités, je lui dis même ses propres fautes. […] Étranger, protestant, sans parti, sans attache et sans peur, il peut saisir la vérité, toute la vérité, et aucun document ne lui manque.

1122. (1846) Études de littérature ancienne et étrangère

Hortensius resta muet devant la vérité des faits, et Verrès, effrayé, s’exila lui-même. […] Marlowe, dans ses derniers ouvrages, avait fait de ce vers l’emploi le plus heureux pour l’effet de la scène et la vérité du dialogue. […] Louons un homme de génie par la vérité, non par les systèmes. […] Mais, en revanche, quelle admirable vérité dans le rôle de Brutus ! […] Un essor si périlleux n’est pas, à la vérité, sans chutes et sans écarts.

1123. (1884) La légende du Parnasse contemporain

J’ai peut-être oublié quelques détails, mais j’affirme la vérité du fond. […] La vérité avant tout ! […] On se demande quelquefois si la vérité qui décourage est préférable au mensonge qui réconforte. […] La clarté dans toutes les ombres, la vérité dans toutes les illusions. […] Ils seront les menteurs qui diront la vérité, puisqu’ils vanteront le courage, la pudeur, l’honneur.

1124. (1925) Promenades philosophiques. Troisième série

Le fils de Jehovah descendant du ciel et y remontant à son tour, miracle, vérité éternelle ! […] Ce qu’il y a de terrible quand on cherche la vérité, c’est qu’on la trouve. […] La vérité est dans les faits et non dans la raison. […] A bien réfléchir, on verra qu’il n’exprime presque jamais que des vérités de bon sens. […] Le contact de son œuvre a mis au jour les vérités qui sommeillaient dans les esprits.

1125. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — B — Bonaparte-Wyse, William-Charles (1826-1892) »

L’archéologie y est devenue une vérité, une actualité ; si l’on n’était homme du Nord et sceptique, on se croirait tout de bon à une renaissance.

1126. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — B — article »

Il ne faut pas croire tout ce qu’il y raconte ; il aime trop à parler de lui-même, pour qu’il puisse dire constamment la vérité.

1127. (1890) Journal des Goncourt. Tome IV (1870-1871) « Préface »

Préface La vérité, que personne ne veut ou n’ose dire, je cherche, de mon vivant, à la dire un rien, en attendant que, vingt ans après ma mort, ce journal la dise tout entière.

1128. (1902) La poésie nouvelle

C’est le rôle de la poésie, de rendre à notre vision sa véridique ingénuité, de restituer aux bois, aux champs, à toute la Nature et enfin au cœur de l’homme, à ses passions, à ses mélancolies et à ses allégresses, leur immédiate et si éphémère vérité. […] Ils reprochent au symbolisme de n’être pas assez humain, assez ouvert à la vie, à la vérité, — ce qui n’est pas juste ; — au vers-librisme ils reprochent de détruire l’harmonie poétique, — ce qui n’est pas juste non plus ; — et ils se fondent sur cette double erreur pour opérer un retour aux traditions. […] Ces symboles enfantins étaient donc pleins de vérité. […] Il les emplit de son rêve, il les modifie suivant son rêve, et s’il les transforme, c’est dans le sens d’une vérité plus profonde. […] Or, c’est au contraire le goût de Laforgue d’être sincère incessamment et minutieusement ; c’est le goût de Laforgue et, suivant les principes de son esthétique, c’est aussi la condition de son Art, car tout ce qui s’écarte, même un peu, de l’intime vérité des choses est inexistant.‌

1129. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — G — article » p. 403

Il est fâcheux que l’éloquence ne se déploie souvent qu’aux dépens de la vérité ; il est fâcheux encore qu’un Traducteur exact n’ait pas toujours le talent de faire ressortir les beautés de son original.

1130. (1884) Les problèmes de l’esthétique contemporaine pp. -257

La vérité est que la forme des gouvernements n’a pas d’influence directe sur le cerveau de l’artiste. […] On pourrait faire la même remarque, avec encore plus de vérité, pour l’un des meilleurs poètes de notre génération, malheureusement trop subtil et trop ingénieux. […] Ceux-ci affichent la prétention de chercher comme la science la « vérité exacte », au lieu du mythe et des jeux de l’imagination, et ils croient trouver la vérité dans la réalité brute. […] Je ne me rappelle pas le nom de l’auteur ; mais la proposition elle-même est restée dans ma mémoire comme offrant sur ce point, sinon la vérité même, du moins une esquisse de la vérité. » M.  […] Ce sont là des affirmations un peu fantaisistes, et c’est même, croyons-nous, tout le contraire de la vérité.

1131. (1898) Émile Zola devant les jeunes (articles de La Plume) pp. 106-203

quoi, pensent-ils, l’hérédité, l’éducation et l’habitude avaient enraciné au fond de notre être des croyances prétendues vivaces, une foi que nous pensions immuable, des vérités que nous présumions absolues ! […] À la vérité, je ne le crois pas. […] Le style ne vaut que comme reflet de la vérité, que par sa solide structure intérieure, et il ne sera jamais superflu de réagir contre les virtuoses de la phrase sonore. […] Or ces idées générales, ces vérités nouvelles étaient douées d’une telle puissance, d’une si forte intensité, qu’elles ne devaient pas tarder à provoquer dans la littérature et dans les arts une véritable révolution. […] La vérité, c’est que Zola s’est surtout efforcé de simplifier la psychologie, en ne considérant chez les êtres que les sentiments essentiels et les mobiles primordiaux.

1132. (1888) Journal des Goncourt. Tome III (1866-1870) « Année 1866 » pp. 3-95

La princesse lui a écrit de nous, au sujet de notre préface : « Ils ont dit la vérité, c’est un crime !  […] * * * — Le xixe  siècle est à la fois le siècle de la Vérité et de la Blague. […] Et tout cela avec une telle naïveté, une si grande bonne foi cynique, une si naturelle absence de sens moral, qu’il est impossible de démêler ce qu’il y a de vérité ou de mensonge dans cet amour pour cette fille morte…. […] mon Dieu, cela fera peut-être, un jour, de la vérité et de la philosophie de l’histoire. […] Car où est l’opinion faite de la vérité vraie ?

1133. (1888) Épidémie naturaliste ; suivi de : Émile Zola et la science : discours prononcé au profit d’une société pour l’enseignement en 1880 pp. 4-93

Tout ce que je puis dire, c’est que, par le choix systématique de ses modèles, il a été à côté de la vérité. […] Qui dit psychologue dit traître à la vérité. […] Sans doute, Diderot, esprit philosophique, esprit de science, préfère encore la vérité crue à l’ornement de convention. […] Il est absolument contraire à la vérité que les femmes d’ivrognes partagent, tôt ou tard, cette immonde passion. […] La vérité est qu’il a des qualités incontestables.

1134. (1896) Matière et mémoire. Essai sur la relation du corps à l’esprit « Chapitre I. De la sélection des images, pour la représentation. Le rôle du corps »

Mais la vérité est que les mouvements de la matière sont très clairs en tant qu’images, et qu’il n’y a pas lieu de chercher dans le mouvement autre chose que ce qu’on y voit. […] Mais la vérité est que le caractère de mouvements extérieurement identiques est intérieurement modifié, selon qu’ils donnent la réplique à une impression visuelle, tactile ou auditive. […] Mais la vérité est qu’elle n’est pas plus dans les centres sensoriels que dans les centres moteurs ; elle mesure la complexité de leurs rapports, et existe là où elle apparaît. […] La vérité est que l’affection n’est pas la matière première dont la perception est faite ; elle est bien plutôt l’impureté qui s’y mêle. […] La vérité est qu’il y aurait un moyen, et un seul, de réfuter le matérialisme : ce serait d’établir que la matière est absolument comme elle paraît être.

1135. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — B — article » p. 278

Il ressemble à cet égard à plusieurs de ses confreres, qui, en combattant pour la prétendue vérité, ont très-souvent abusé du raisonnement, & corrompu la langue.

1136. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — C — article » p. 468

Il n’a guere plus de mérite que le précédent, comme Littérateur ; mais on fait grand cas de ses Ouvrages de Controverse & de Théologie, dont le plus connu est le Traité de la vérité de la Religion, un des meilleurs qui aient été composés depuis celui d’Abadie.

1137. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — R. — article »

Le style du Réfugié est clair & rapide ; il présente les faits avec ordre ; il démêle avec pénétration les principes des événemens : mais quand l’esprit de secte domine ses lumieres, ses récits sont rarement d’accord avec la vérité.

1138. (1858) Du roman et du théâtre contemporains et de leur influence sur les mœurs (2e éd.)

Puisqu’on s’obstine à la vanter encore tous les jours, pourquoi ne pas s’obstiner à faire connaître la vérité sur elle ? […] La vérité est que, dans le domaine des idées comme dans le domaine des faits, il ne fit que développer les germes existants. […] Vérité ! […] Elle se débat dans le vide, plutôt qu’elle ne combat en ennemie la vérité. […] C’est partout, on le voit, la même pensée, c’est-à-dire le même mensonge à la vérité, la même calomnie contre la société.

1139. (1895) Le mal d’écrire et le roman contemporain

La critique n’ose, éclaircir l’énigme ; la vérité lui fait peur. […] Voilà la vérité : Chateaubriand n’a vécu que pour la littérature. […] Le réalisme a tellement méconnu ces vérités, qu’elles ont presque l’air d’être des paradoxes. […] La mort de Werther surtout est admirable de vérité inconsciente. […] L’un et l’autre sont deux faces différentes de la vérité humaine.

1140. (1866) Petite comédie de la critique littéraire, ou Molière selon trois écoles philosophiques « À M. Vacherot » p. 1

Reprenez la vérité comme votre bien, et laissez-moi les paradoxes, — ou le scepticisme.

1141. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — S — Souvestre, Émile (1806-1854) »

Charton Il ne voyait dans les lettres qu’un moyen de satisfaire sa passion la plus ardente, celle de se rendre utile selon ses facultés en exprimant les sentiments généreux dont son cœur était plein, en défendant les vérités de l’ordre moral proscrites, reniées, oubliées, au milieu des entraînements matériels du siècle.

1142. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — T. — article »

On trouve, à la vérité, des détails curieux & intéressans dans le récit de ses Voyages ; mais il seroit à présent un mauvais guide en matiere de commerce.

1143. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — F. — article » p. 325

On estime pourtant celui qui a pour titre : Dissertation sur la Recherche de la Vérité, suivi d’un examen particulier des sentimens de Descartes.

1144. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « George Sand — George Sand, Indiana (1832) »

On admire le talent dans cette dernière moitié ; mais ce n’est plus la vérité palpitante, l’impression franche, l’émotion du commencement.  […] Ses premiers mécomptes, la manière naturelle et facile dont Raymon les répare, dont il la fascine et l’enchante ; l’éclair sinistre qu’un mot de sir Ralph sur l’aventure de Noun jette dans l’esprit d’Indiana, le coup qu’elle en reçoit et qu’elle rend à Raymon ; sa croyance en lui, malgré la découverte, sa résolution de fuir avec lui, de se réfugier chez lui, plutôt que de suivre son mari au départ ; cet abandon immense, généreux, inébranlable, sans souci de l’opinion, sans remords, et mêlé pourtant d’un superstitieux refus ; toute cette analyse vivante est d’une vérité, d’une observation profonde et irrécusable, qu’on ne saurait assez louer.

1145. (1874) Premiers lundis. Tome II « Poésie — George Sand. Cosima. »

Au second acte, par exemple, quoi de mieux comme vérité d’analyse que cette scène entre Cosima et Ordonio, lorsque celui-ci, qu’on croyait mort, revenu à l’improviste, surprend Cosima en larmes, lisant la dernière lettre qu’elle a reçue de lui ? […] Il se pourrait qu’au théâtre on ne supportât pas en face de telles vérités et qu’il fallût toujours une certaine dose jeune premier dans l’amoureux.

1146. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XXVIII » pp. 305-318

Voltaire, qui, à la vérité, avait une bonne raison pour ne pas aimer que l’on décriât les femmes savantes (c’était son attachement pour la marquise du Châtelet), observe fort judicieusement et en homme de l’art, que dans la pièce dont nous parlons, « Molière attaque un ridicule qui semblait peu propre à réjouir ni la cour, ni le peuple à qui ce ridicule paraissait être également étranger, et qu’elle fut reçue d’abord assez froidement. […] J’ai peint à la vérité d’après nature ; j’ai pris un trait d’un côté et un trait d’un autre, et de ces divers traits, qui pouvaient convenir à une même personne, j’en ai fait des peintures vraisemblables, cherchant moins à réjouir les lecteurs par la satire de quelqu’un, qu’à leur proposer des défauts à éviter et des modèles à suivre ».

1147. (1885) Préfaces tirées des Œuvres complètes de Victor Hugo « Préfaces des pièces de théâtre — Préface de « Ruy Blas » (1839) »

Aux yeux de l’auteur, et sans préjudice de ce que les personnages accessoires peuvent apporter à la vérité de l’ensemble, ces quatre têtes ainsi groupées résumeraient les principales saillies qu’offrait au regard du philosophe historien la monarchie espagnole il y a cent quarante ans. […] La vérité absolue n’est que dans l’ensemble de l’œuvre.

1148. (1824) Notes sur les fables de La Fontaine « Livre huitième. »

La vérité que veut établir ici La Fontaine, n’avait nul besoin de cette espèce de Prologue : c’est ce qu’on verra aisément, en sautant le Prologue et en commençant à ces mots : Il était un berger, etc….. […] On peut objecter que, dans cette fable, le marchand est forcé de passer la rivière, comme il a été forcé de passer le torrent, et que la fable serait meilleure, c’est-à-dire, la vérité que l’auteur veut établir mieux démontrée, si le marchand, ayant le choix de passer par la rivière, ou par le torrent, eût préféré la rivière.

1149. (1767) Salon de 1767 « Peintures — Baudouin » pp. 198-202

Composition froide, point de vérité, exécution faible de tout point. — Mais les figures ont de la proportion et du mouvement. — D’accord. […] Je reviens sur mon premier jugement ; tout ceci bien peint, mais très-bien peint, n’est qu’un amas de contradictions, point de vérité, point de vrai goût.

1150. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « XIV. Vaublanc. Mémoires et Souvenirs » pp. 311-322

Il n’avait donc pas à se plaindre, si ce n’est pour le compte de ce qu’il croyait la vérité. […] Il importe qu’on ne croie qu’à la dernière extrémité à la puissance irrésistible des Révolutions, et tout livre qui, même aux dépens de la vérité abstraite et absolue, retrempera à cet égard les courages, mérite d’être lu.

1151. (1888) Les œuvres et les hommes. Les Historiens. X. « Léopold Ranke » pp. 1-14

à un camp d’opinions quelconques, à une tribu de préjugés ou à une vérité — car nous croyons à la vérité ! 

1152. (1888) Les œuvres et les hommes. Les Historiens. X. « W.-H. Prescott » pp. 135-148

Démocrate qui n’agite pas l’Histoire, c’est un de ces indifférents de la terre dont parle Shakespeare ; mais l’indifférence qui reçoit tout, c’est le papier blanc sur lequel on peut écrire des paroles de vérité. […] Ce n’est pas plus là de la vérité complète sur les institutions, le temps et le gouvernement de Philippe II, que ce n’est une histoire complète, ce grand fragment laissé par Prescott.

1153. (1895) Les œuvres et les hommes. Journalistes et polémistes, chroniqueurs et pamphlétaires. XV « Camille Desmoulins » pp. 31-44

» Je sais bien, c’est la vérité, qu’à l’époque où, fringant et émoustillé comme un page, Camille Desmoulins sortait du collège, il n’était guères possible à ce Chérubin de la démocratie d’être autre chose qu’un journaliste. […] Aveugles, tous deux, l’un comme un cyprès et l’autre comme un saule pleureur, honnêtes arbres tumulaires qui, à force d’ombrager une épitaphe, finissent par en prendre le mensonge pour la vérité, MΜ. 

1154. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XIV. M. Auguste Martin »

… » III Et c’est la vérité. […] et tout cela, c’est la vérité, est d’une majesté à laquelle, dans l’histoire intellectuelle des nations, il n’y a rien à comparer.

1155. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « Francis Lacombe »

Enveloppé dans la grande parole de Leibnitz : le passé est gros de l’avenir , comme dans un talisman de vérité, il a cherché dans le passé la clef du difficile problème qu’on pose en ce moment, comme un sphinx qui le garderait au seuil d’une société à reconstruire. […] Comme fait, si le temps l’a détruite, fille de la vérité sociale elle trouve une expiation vengeresse dans les désordres et les souffrances qui ont déchiré les entrailles du monde depuis qu’elle ne le protège plus.

1156. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « Chastel, Doisy, Mézières »

Pleine d’admiration pour les premiers siècles de l’Église qui furent si grands, pour cette période de l’histoire, la Genèse d’un nouvel univers moral dressée devant les yeux humiliés de l’Économie politique, comme ce bouclier de diamants qu’Ubald, dans le Tasse, présente à Renaud pour qu’il y mire son impuissance et sa honte, l’Académie n’a pas su conclure nettement dans le sens de cette admiration franche et souveraine, et ce n’est pas le livre véritablement chrétien, imbibé de ce catholicisme qui est le sang pur de la vérité chrétienne qu’elle a couronné, mais des livres infectés plus ou moins de ce protestantisme qui est le commencement de la philosophie, comme, dans un autre ordre, la crainte de Dieu est le commencement de la sagesse. […] Ce livre, dont le titre étreint dans l’esprit et précise la question davantage (Assistance comparée dans l’ère païenne et l’ère chrétienne), n’a pas seulement, comme nous le disions plus haut, sa valeur individuelle et littéraire, mais il a la valeur générale, impersonnelle, absolue, de la vérité.

1157. (1862) Les œuvres et les hommes. Les poètes (première série). III « M. de Banville. Les Odes funambulesques. »

La vérité étant toujours dans un extrême (l’extrême opposé à l’erreur), les esprits à outrance, quand ils ne sont pas dans la vérité, sont si bien dans l’erreur qu’on les y voit tout de suite et qu’il est impossible de s’y tromper !

1158. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre second. De la sagesse poétique — Chapitre XI. De la géographie poétique » pp. 239-241

Les géographes anciens s’accordent à reconnaître une vérité dont ils n’ont point su faire usage : c’est que les anciennes nations, émigrant dans des contrées étrangères et lointaines, donnèrent des noms tirés de leur ancienne patrie, aux cités, aux montagnes et aux fleuves, aux isthmes et aux détroits, aux îles et aux promontoires. […] Cependant toute tradition vulgaire doit avoir originairement quelque cause publique, quelque fondement de vérité.… Ce sont les Grecs qui, chantant par tout le monde leur guerre de Troie et les aventures de leurs héros, ont fait d’Énée le fondateur de la nation romaine, tandis que, selon Bochart, il ne mit jamais le pied en Italie, que Strabon assure qu’il ne sortit jamais de Troie, et qu’Homère, dont l’autorité a plus de poids ici, raconte qu’il y mourut et qu’il laissa le trône à sa postérité.

1159. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre quatrième. Du cours que suit l’histoire des nations — Chapitre V. Autres preuves tirées des caractères propres aux aristocraties héroïques. — Garde des limites, des ordres politiques, des lois » pp. 321-333

On peut même dire avec vérité que toutes les exceptions faites aux lois chez les modernes, sont des privilèges voulus par le mérite particulier des faits, qui les sort de la disposition commune. […] Toutefois dans cette confusion, ils rencontrent par hasard une vérité, c’est que plusieurs coutumes anciennes des Romains reçurent le caractère de lois dans les deux dernières tables ; ce qui montre bien que Rome fut dans les premiers siècles une aristocratie.

1160. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Première partie. — Chapitre V. »

Mais ce que ces vers décrivent nous frappe du moins par une vérité de couleur qu’atteste un voyageur érudit, plein des souvenirs du même lieu. […] Les fables même qu’on en raconte attestent un fond de vérité dans le génie attribué dès lors à toutes les variétés du nom grec.

1161. (1885) Le romantisme des classiques (4e éd.)

Fontenelle disait que, s’il avait la main pleine de vérités, il se garderait de l’ouvrir. Moi, j’avoue qu’en pareil cas, et si j’étais absolument sûr que ce fussent des vérités, j’aurais grand’ peine à la tenir fermée. Tout ce que la prudence de l’âge a pu m’apprendre, c’est de me contenter d’entr’ouvrir les doigts, — peut-être aussi afin que tout ne s’échappe pas d’un seul coup et que le plaisir dure plus longtemps. — Le mal, à mon avis, ne vient pas ordinairement des vérités que l’on montre, mais des vérités que l’on cache. […] Ces aveux que lui arrache la force de la vérité, malgré le vif désir qu’elle a de ne point déplaire au Cardinal, n’en ont que plus de prix. […] Ni l’un ni l’autre ne remarquèrent non plus le peu de vérité générale quant à la couleur locale, eu égard au temps de l’action et des personnages.

1162. (1911) L’attitude du lyrisme contemporain pp. 5-466

Une des raisons du vers libre, en effet, est de rendre à la strophe sa vérité et ses lois organiques. […] La vérité est que son talent offre une remarquable synthèse des deux visions, un parfait équilibre d’attitudes contraires. […] Cette vérité cachée, nous la pressentons hors de nous comme en nous. […] Toute vérité qu’on pousse trop loin se fausse, disait M.  […] Il ne croit pas à la permanence du caractère, à une vérité immuable, mais à des vérités mobiles « qui se remplacent selon les heures et nous offrent tour à tour leurs motifs de vie ».

1163. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome III pp. -

Loin des Midas en robe, il s’étoit fait, dans sa solitude de Northolland, un asyle accessible au repos & à la vérité. […] Le prétexte de la dispute fut l’opinion qu’on voit tout en dieu ; opinion exposée dans le livre de la Recherche de la vérité. […] vérité, vertu ! […] Zeuxis saisissoit la nature dans toute sa vérité. […] Ils font la guerre aux vérités qui leur déplaisent, & s’efforcent de les faire condamner.

1164. (1761) Salon de 1761 « Peinture —  Vernet  »

Il y a toujours un grand travail ; une grande variété ; beaucoup de vérité ; beaucoup de talent ; mais on dirait volontiers en les regardant, À demain lorsque le soleil sera levé.

1165. (1759) Salon de 1759 « Salon de 1759 — Aved »

Je voudrais que vous vissiez avec quelle vérité de couleur et quelle simplicité cela est fait.

1166. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre troisième. Découverte du véritable Homère — [Introduction] » p. 251

[Introduction] Avoir démontré, comme nous l’avons fait dans le livre précèdent, que la sagesse poétique fut la sagesse vulgaire des peuples grecs, d’abord poètes théologiens, et ensuite héroïques, c’est avoir prouvé d’une manière implicite la même vérité relativement à la sagesse d’Homère.

1167. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — P. — article » p. 465

Quelquefois il échappoit à Guy Patin des traits de vérité sur la Science qu’il professoit.

1168. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — S. — article » p. 304

On doit se défier cependant d'un esprit de partialité, que son Editeur, M. l'Abbé de l'Ecluse, redresse avec sagacité, toutes les fois que l'occasion s'en présente ; tant il est vrai que les Mémoires particuliers sont sujets à induire en erreur, & que ce n'est que de combinaison des différens récits que peut naître la vérité !

1169. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre V. Les contemporains. — Chapitre VI. La poésie. Tennyson. »

Et je lui dis : « Ma cousine Amy, parle-moi et dis-moi la vérité. —  Fie-t’en à moi, cousine. […] Il n’a point enfoncé lourdement un pied rude dans la vérité et dans la passion. […] Ils sont raffinés et ils sont avides ; il leur faut chaque jour une provision de paroles colorées, d’anecdotes crues, de railleries mordantes, de vérités neuves, d’idées variées. […] Il n’a pas été un simple dilettante ; il ne s’est pas contenté de goûter et de jouir ; il a imprimé sa marque dans la pensée humaine ; il a dit au monde ce que c’est que l’homme, l’amour, la vérité, le bonheur. […] Il n’y a au monde qu’une œuvre digne d’un homme, l’enfantement d’une vérité à laquelle on se livre et à laquelle on croit.

1170. (1865) Cours familier de littérature. XX « CXIXe entretien. Conversations de Goethe, par Eckermann (1re partie) » pp. 241-314

Il prit pour devise la modération, et ne goûta plus que la vérité pratique. […] Il dit que les dernières époques de sa vie ne peuvent pas avoir la même abondance de détails que sa jeunesse, racontée dans Vérité et Poésie. « Je composerai le récit de ces dernières années sous forme d’Annales ; il s’agit moins de raconter ma vie que de montrer sur quoi s’est exercée mon activité. D’ailleurs, pour tout individu, l’époque la plus intéressante est celle du développement15, et pour moi cette époque se termine dans les volumes détaillés de Vérité et Poésie. […] « “Et il soutint son opinion par de longs développements d’une parfaite justesse. — Je l’écoutai, gardant une expression de physionomie sereine, et lui répondis avec un sourire gai : « “— Je crois que personne ne m’a fait encore cette critique, mais je la trouve tout à fait juste, et j’avoue qu’il y a dans ce passage un manque de vérité. […] Il avait vivement senti combien le théâtre français s’éloigne de la nature et de la vérité.

1171. (1894) Journal des Goncourt. Tome VII (1885-1888) « Année 1887 » pp. 165-228

» Et il termine, en me disant aimablement, que la fréquentation de ce monde, lui a fait apprécier la vérité des Frères Zemganno. […] Vendredi 28 octobre Ah, la vérité ! Que dis-je, la vérité !… non, mais tant seulement un millionième de vérité, comme c’est difficile à dire, et qu’on vous le fait payer. Tant pis, je l’aime cette vérité, et j’aime à la dire, ainsi que c’est permis de son vivant, à la dose d’un granule homéopathique… et oui, pour cette vérité telle quelle, s’il le faut, je saurais mourir, comme d’autres meurent pour une patrie… Puis vraiment, est-ce que nos illustres, nos académiciens, nos membres de l’Institut se figurent passer à la postérité, comme de petits bons dieux en chambre, sans alliage d’humanité aucune… Allons donc, ces hypocrisies de la convention, tous ces mensonges seront percés un jour, un peu plus tôt, un peu plus tard.

1172. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Santeul ou de la poésie latine sous Louis XIV, par M. Montalant-Bougleux, 1 vol. in-12. Paris, 1855. — II » pp. 39-56

Arnauld répondit par un remerciement qui renfermait un blâme et une crainte, la crainte trop bien fondée que le soi-disant converti Santeul ne fût relaps au monde et aux muses, et infidèle à l’esprit de vérité. […] Mais il y avait d’autres choses encore dans l’épitaphe ; il y disait d’Arnauld qu’il revenait de l’exil, ayant triomphé de ses ennemis, « exul, hoste triumphato » ; il l’appelait le défenseur de la vérité, l’oracle du juste, Arnaldus veri defensor, et arbiter aequi. […] Je puis cependant rendre ce témoignage à la vérité, qu’en quatre repas où je me suis trouvé avec lui, je n’ai jamais vu d’homme qui, dans une aussi grande chère, fût plus modéré, soit pour le boire, soit pour le manger.

1173. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Madame de Staël. Coppet et Weimar, par l’auteur des Souvenirs de Mme Récamier (suite et fin.) »

s’écriait-elle à ce sujet, quand je les vis, ces princes, en Angleterre, ils écoutaient la vérité ; je leur peignais l’état de la France, ce qu’elle demandait, ce qu’il était si facile de lui donner. […] Vous connaissez mon exactitude, ma vérité, my dear sir ; que l’Angleterre ne se laisse pas tromper par les émigrés. […] Thiers, qui cherche avant tout la vérité, mais qui la cherche sans froideur, avec vivacité, avec prédilection, s’est posé la question au sujet du Napoléon des Cent-Jours, et il a singulièrement animé la conclusion qui lui a paru la plus probable.

1174. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « M. Ernest Renan »

Renan que des précautions de politesse et de prudence, des formes de circonspection respectueuse, je ne m’en inquiéterais pas autrement ; mais c’est un procédé devenu chez lui habituel et constant, qui tient d’une part à l’élévation, à l’étendue, à l’impartialité du critique, aux yeux duquel « la vérité est toute dans les nuances » ; et aussi le dilettante et l’artiste y ont leur action et leur jeu. […] Il aime certainement la vérité, il déteste encore plus ce qui est vulgaire. Il est des erreurs délicates et distinguées qui pourraient lui paraître préférables à des vérités triviales.

1175. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Entretiens de Gœthe et d’Eckermann (suite) »

C’était l’étude de la nature qui lui avait appris la large méthode ; la nature avait été son livre : « Avec elle, disait-il, nous avons affaire à la vérité infinie, éternelle, et elle rejette aussitôt comme incapable tout homme qui n’observe pas et n’agit pas toujours avec une scrupuleuse pureté. […] Comme j’avais assez d’énergie pour montrer mes sentiments dans toute leur vérité, je passais pour fier, et je passe pour tel encore aujourd’hui. […] Montrant un jour à Eckermann deux de ses poésies dont l’intention était très-morale, mais où le détail offrait par places trop de naturel et de vérité, il se proposait bien de les garder en portefeuille, disait-il, de peur de scandaliser : « Si l’intelligence, si une haute culture d’esprit, remarquait-il à ce propos, étaient des biens communs à tous les hommes, le poëte aurait beau jeu ; il pourrait être entièrement vrai et n’éprouverait pas de crainte pour dire les meilleures choses.

1176. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Le Mystère du Siège d’Orléans ou Jeanne d’Arc, et à ce propos de l’ancien théâtre français (suite.) »

On brodait, on amplifiait, on y introduisait des légendes et des traditions de toutes mains ; on y intercalait des scènes vulgaires, d’une vérité et d’une copie contemporaine, attachante. […] Dès la seconde scène, Dieu le Père y est montré sur son trône, entouré de ses Anges et présidant à un débat que se livrent ses divers attributs personnifiés en plusieurs Dames, d’un côté la Paix et la Miséricorde, de l’autre la Justice et la Vérité. […] L’intérêt du sujet d’Œdipe en général, c’est précisément le crime innocent, involontaire, et (une fois la mythologie admise) de voir le pauvre mortel la proie et le jouet du sort, sous la main des Dieux ; et l’intérêt de l’Œdipe-Roi, en particulier, c’est la découverte par degrés, la gradation admirablement ménagée dans la révélation du crime, c’est le voile qui se lève lentement, péniblement, peu à peu, dans l’âme d’Œdipe, dans l’âme de Jocaste, jusqu’à ce qu’il soit entièrement déchiré et que l’affreuse vérité éclate aux yeux des coupables involontaires et aux yeux de tous.

1177. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Jean-Bon Saint-André, sa vie et ses écrits. par M. Michel Nicolas. »

Jean-Bon fut comme la plupart des hommes de cette époque : son esprit qui était ferme et net, et non supérieur, s’excitant et s’enflammant au foyer du cœur et au souffle de la passion, marcha avec les événements sans les devancer de beaucoup, et il est de ceux qui auraient pu dire en toute vérité avec le moraliste : « Les occasions nous font connaître aux autres, et encore plus à nous-mêmes. » Le 30 avril 1789, à l’occasion de l’Édit de Louis XVI en faveur des Protestants et en vertu duquel il leur était permis de s’avouer tels désormais sans péril et sans crainte, de pratiquer leur culte, de contracter mariage selon les lois et de jouir des avantages et des droits de citoyens, Jean-Bon prononçait à titre et en qualité de pasteur, « devant quelques vrais serviteurs de Dieu et divers citoyens amis de la religion, de la tolérance, de la patrie et de l’humanité », un discours ou sermon où il se montrait pénétré de reconnaissance envers « le bienfaisant monarque », et d’une sensibilité autant que d’une modération qu’il n’a que trop tôt démenties : « Mais peut-on se le dissimuler ? […] Jean-Bon Saint-André, quinze ans après environ, et déjà préfet de Mayence, ayant à prononcer un discours pour la première séance publique de la Société des Sciences et Arts dont on l’avait nommé membre (1804), y disait dans un sentiment de vérité et de modestie qu’il nous faut tout d’abord invoquer à sa décharge : « Citoyens, en paraissant pour la première fois au milieu de vous, étonné de la place que vos bontés m’ont assignée, je me demande à moi-même quels sont mes titres pour l’occuper. […] Assez d’écrivains, pressés de donner, comme les récits de la vérité, les rêveries de leur esprit ou les préventions de leur cœur, ont publié des ouvrages, prétendus historiques, de cette grande crise politique.

1178. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre V. De la littérature latine, pendant que la république romaine durait encore » pp. 135-163

L’empire romain ayant succédé à la domination d’Athènes, la littérature latine suivit la route que la littérature grecque avait tracée, d’abord parce que c’était la meilleure à beaucoup d’égards, et que vouloir s’en écarter en tout, eût été renoncer au bon goût et à la vérité ; peut-être aussi, parce que la nécessité seule produit l’invention, et qu’on adopte au lieu de créer quand on trouve un modèle d’accord avec ses idées habituelles. […] Ce ne sont ni les préjugés de la société, ni les opinions philosophiques qui disposent de notre cœur ; c’est la vertu, telle que le ciel l’a créée, vertu d’amour ou vertu de sacrifice, mais toujours délicatesse et vérité. […] L’instruction vaut quelquefois beaucoup mieux que l’érudition ; car, dans la nuit de l’antiquité, l’on peut se perdre dans des faits de détails qui empêcheront de saisir la vérité de l’ensemble.

1179. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre III. Le naturalisme, 1850-1890 — Chapitre VI. Science, histoire, mémoires »

Faire de la vérité le but de la pensée, du bien la fin de l’action, le vrai étant l’exclusion du miracle, et le bien l’exclusion de l’égoïsme : on peut juger comme on voudra cette philosophie, on n’a pas le droit d’y voir un jeu de dilettante indifférent. Toutes les précautions que ce loyal esprit a prises pour éviter le parti-pris, les vues étroites ou exclusives, pour saisir toutes les parties et manifester tous les aspects de la vérité, ont donné le change aux esprits superficiels ou prévenus : en même temps que notre grossière façon d’entendre l’opposition théorique de la science et de la foi nous faisait mal juger tous ces fins sentiments, ces expansions affectueuses ou enthousiastes, qui se mêlaient sans cesse chez Renan aux affirmations du déterminisme scientifique. […] À tous, littérateurs ou autres, il nous a donné cette générale leçon, d’avoir trouvé la paix de la conscience et le bonheur en cette pauvre vie, simplement parce que la vérité toujours l’a conduit.

1180. (1890) L’avenir de la science « XVI »

Le grand résultat de la critique historique du XIXe siècle, appliquée à l’histoire de l’esprit humain, est d’avoir reconnu le flux nécessaire des systèmes, d’avoir entrevu quelques-unes des lois d’après lesquelles ils se superposent, et la manière dont ils oscillent sans cesse vers la vérité, lorsqu’ils suivent leur cours naturel. C’est là une vérité spéculative de premier ordre, mais qui devient très dangereuse dès qu’on peut l’appliquer. […] La plupart des catégories de la science ancienne exclues par les modernes correspondaient à des caractères extérieurs de la nature, qu’on ne considère plus, et avaient bien leur part de vérité.

1181. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Mémoires de Philippe de Commynes, nouvelle édition publiée par Mlle Dupont. (3 vol. in-8º.) » pp. 241-259

Quoi qu’il en soit, son récit, d’autant moins ambitieux qu’il ne le donnait qu’à titre de matériaux, est resté l’histoire définitive de ce temps, un monument de naïveté, de vérité et de finesse ; l’histoire politique en France date de là. […] « Je ne sais s’ils disoient ainsi à part, ajoute Commynes, je me doute que non ; et à la vérité je crois qu’il les y eût laissés et qu’il ne fût pas revenu. » Commynes exprime ainsi sa conjecture, et il ne s’en indigne pas. […] Le tableau des dernières années de Louis XI est d’une vérité frappante et inimitable chez Commynes.

1182. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Portalis. Discours et rapports sur le Code civil, — sur le Concordat de 1801, — publiés par son petit-fils — I. » pp. 441-459

Portalis, durant l’exil qui suivit la proscription de Fructidor, âgé pour lors de cinquante-quatre ans, pouvait écrire à un ami en toute vérité : Je ne dis point la sagesse, mais le hasard du moins a fait que je n’ai appartenu à aucun parti, et qu’en conséquence j’ai toujours été mieux placé pour bien voir et bien juger. […] Sur les idées et les querelles religieuses, il y a des mots heureux : « Les vérités dogmatiques, dit-il, ont des bornes ; né libre et peut-être rebelle, l’esprit humain n’aime point à s’en prescrire. […] Dans ce Mémoire, si plein de justice, de vérité et de toutes les droites inspirations humaines, on voudrait vers la fin quelques accents de plus, je ne sais lesquels, mais comme un Cicéron en aurait su trouver.

1183. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Portalis. Discours et rapports sur le Code civil, — sur le Concordat de 1801, — publiés par son petit-fils — II. » pp. 460-478

Des témoins fidèles nous représentent avec vérité Portalis au Conseil des Anciens, débitant presque aveugle ses beaux discours. […] En reconnaissant à chacun le droit de critique et de discussion, Portalis, ayant Montlosier en vue, écrivait : La vérité, surtout en matière de législation, est le bien de tous les hommes. […] Ce discours tout entier est semé et comme tissu de vérités et de beautés morales du premier ordre.

1184. (1912) Le vers libre pp. 5-41

Il n’y a aucune raison pour que cette vérité s’infirme en 1888, car notre époque ne paraît nullement la période d’apogée du développement intellectuel. […] brièvement, voici : Il fallait d’abord comprendre la vérité profonde des tentatives antérieures et se demander pourquoi les poètes s’étaient bornés dans leurs essais de réforme. […] Dès les premiers jours, forts de la vérité de l’instinct lyrique, nous avons dit que les travaux de laboratoire donneraient raison à nos théories, et l’on ne peut que savoir gré à Robert de Souza de son application à en essayer la laborieuse confirmation.

1185. (1912) L’art de lire « Chapitre VIII. Les ennemis de la lecture »

Le lecteur qui lit en critique se prive à la vérité de plaisirs médiocres ou moyens ; mais c’est la rançon ; et, par compensation de cette perte, il se prépare des plaisirs exquis quand il découvrira l’œuvre exquise. […] Cette estime trop haute, cette suspension momentanée du pendule critique n’était qu’un artifice pour prendre à la pipée l’âme d’une chose. » Il faut donc être un lecteur armé, qui désarme par méthode et pour comprendre, qui reprend ses armes pour discuter, qui désarme enfin de nouveau quand l’examen critique lui a prouvé qu’il est en face d’une chose dont la vérité ou la beauté est indiscutable. […] Mais plus tard le critique intervient et il juge, et il compare et il raisonne, et il contraint l’artiste à distinguer ce qu’il a fait de ce qu’il a voulu faire, et il l’amène à se corriger et il juge des corrections, et enfin il donne son approbation et même son admiration devant la vérité ou la beauté définitivement atteintes.

1186. (1898) L’esprit nouveau dans la vie artistique, sociale et religieuse « III — Un symbole »

Puisque les fidèles du Sacré-Cœur voulaient obtenir l’adhésion nationale à leur projet, il fallait au moins que ce projet fût présenté dans son intégrité et dans sa vérité. […] Ce n’est pas leur alliance, puisque l’Église comportant la toute vérité doit toujours maintenir sa prépondérance : encore moins, par conséquent, la domination de l’Église par la France. […] Il leur pardonnera leur ingratitude s’ils veulent encore le suivre, car il est la seule vérité et il veut leur bien.

1187. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre II. La Renaissance. — Chapitre VI. Milton. » pp. 411-519

Il en était transporté, il se faisait illusion à lui-même, et vivait ainsi seul à seul avec le sublime, comme un guerrier pontife qui, dans son armure rigide, ou dans sa chape étincelante, se tient debout face à face avec la Vérité. […] Il se révolta contre la coutume462, reine illégitime de la croyance humaine, ennemie née et acharnée de la vérité, porta la main sur le mariage, et demanda le divorce en cas de contrariété d’humeurs. […] Les arsenaux de la guerre n’y ont point plus d’enclumes et de martaux travaillant à fabriquer la cuirasse et l’épée de la justice qui s’arme pour la défense de la vérité assiégée, qu’il n’y a de plumes et de têtes veillant auprès de leurs lampes studieuses, méditant, cherchant, roulant de nouvelles inventions et de nouvelles idées, pour les présenter en tribut d’hommage et de foi à la réforme qui approche. […] La vérité même qu’il tient devient son hérésie. […] Ne permets pas qu’ils nous enveloppent encore une fois dans ce nuage obscur de ténèbres infernales où nous n’apercevrons plus le soleil de ta vérité, où jamais nous n’espérerons l’aurore consolatrice, où jamais nous n’entendrons plus chanter l’oiseau de ton matin !

1188. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — A — article » p. 155

Si on le lit aujourd’hui de sang froid, on y remarquera plutôt ce ton de chaleur & d’emportement qui naît de la prévention, que le caractere de cette véritable éloquence, qui réunit la vérité des faits à la force de l’expression.

1189. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — P. — article » p. 554

Il faut croire que l’Ecrivain Germanique n’a écouté que son caractere, très-philosophique, à la vérité, par un amour propre impitoyable envers les autres, & très-indulgent envers lui-même.

1190. (1893) Alfred de Musset

Il trouvait de la vérité dans certaines critiques et se préparait à l’évolution que son tempérament poétique rendait inévitable dès qu’il serait hors de page. […] On « n’est pas habitué, dit-il, aux pièces naturelles, et à cette fantaisie si semblable à la vérité même, qui est le propre de M.  […] Après les débauches de clinquant et de panaches des vingt dernières années, on revenait à la vérité et au naturel. […] Grillparzer a dit que la source de toute poésie était dans la vérité de la sensation. Toute la poésie de Musset s’explique par cette vérité.

1191. (1788) Les entretiens du Jardin des Thuileries de Paris pp. 2-212

Je le crois ; mais tous les orateurs du monde ne viendroient pas à bout de leur persuader cette vérité. […] Il voudroit pouvoir s’exprimer sans le secours des mots, tant ils les juge au-dessous des grandes vérités qu’il annonce. […] Ce pourroit être à la vérité sur des lits qui ne seroient ni chers, ni précieux, mais qu’importe si le luxe est réellement nécessaire dans un vaste Royaume. […] L’abbé reprit la conversation, & dit avec beaucoup de vérité, que la littérature s’assoupiroit sans les journalistes. […] Nous reconnûmes sur-tout que le journaliste n’avoit point été flatteur, & que ses réflexions étoient marquées au coin de la vérité.

1192. (1890) La bataille littéraire. Deuxième série (1879-1882) (3e éd.) pp. 1-303

Cette scène de l’abdication, comme celles de ces existences royales, sont étudiées, on le voit, d’après la vérité même et l’histoire. […] La vérité est qu’elle prit ce météore pour un astre et ce songeur silencieux pour un homme profond. […] Le charme y est plus nécessaire que la vérité. […] Au premier degré, on est déjà dans la vérité ; au second, dans la philosophie ; au troisième, dans la conscience. […] La péripétie m’y paraît plus dramatique, l’émotion plus poignante, l’intérêt plus prolongé, la vérité plus grande.

1193. (1888) Impressions de théâtre. Deuxième série

Ce n’est pas la vérité humaine qui triomphe, puisque le mariage ne se fait pas ; et ce n’est pas non plus la vérité sociale, puisqu’aucun des personnages, sauf la comtesse, ne reconnaît cette vérité. […] Voilà la vérité vraie. […] Mario lui dit la vérité, et elle lui demande pardon à genoux. […] celui-là est d’une vérité bien divertissante. […] Cette revanche du sage est petite à la vérité.

1194. (1880) Une maladie morale : le mal du siècle pp. 7-419

Je m’efforcerai de puiser la vérité à toutes les sources. […] Mais est-ce bien la vérité ? […] Il fait plus qu’entrevoir la vérité qu’il a exprimée, il la dégage par une application pratique. […] Il souffre du mal du doute et il le décrit avec un profond accent de vérité. […] vérité !

1195. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Avertissement. » pp. 1-2

Chaque fois que je m’y remets et que je rentre dans cette veine de critique toute pratique, je tâche d’y introduire une proportion plus grande de vérité, et d’apporter dans l’expression plus de franchise.

1196. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — A — article » p. 154

Quand même il existeroit quelques défauts dans ce Livre vraiment original, ils seront toujours de la nature de ceux qu’on oublie en faveur de la justesse & de la solidité des réflexions, de la noblesse & de l’énergie du style, de la vérité des maximes qui s’y présentent à chaque page : trop heureux si la Littérature n’offroit jamais que de pareils sujets d’indulgence !

1197. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — A — article » p. 173

Son département dans l’Histoire naturelle de M. de Buffon, est peu brillant, à la vérité ; mais il n’en a pas moins son mérite : l’objet du travail de M d’Aubenton est la partie anatomique.

1198. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — C — article »

Le Professeur n’y opposa que la modération & le mépris, & il proposa pour le prix de l’Université, cette vérité si aisée à démontrer, que la Philosophie de nos jours n’est pas moins ennemie des Rois que de la Religion.

1199. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — D. — article » p. 108

L’esprit de systême qui s’étend sur l’étude des Langues, comme sur toutes les autres Sciences, pourra bien condamner la méthode des Anciens, qui avoit besoin, à la vérité, d’être réformée ; mais on est encore à attendre les succès solides, annoncés avec emphase dans les différens Prospectus, que l’expérience n’a pas justifiés.

1200. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — L — article » p. 88

Son Histoire de Louis XIV n’est le plus souvent qu’une compilation informe des Gazettes étrangeres de son temps, dont les Auteurs n’annonçoient ni ne vouloient dire la vérité.

1201. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — S. — article »

Les Comédiens peuvent y puiser des leçons utiles, capables de perfectionner leurs talens ; les Auteurs qui travaillent pour eux ne doivent pas non plus négliger les regles qu’il donne, pour acquérir le naturel, la justesse, le costume, & la vérité, si peu connus de la plupart de nos Poëtes dramatiques.

1202. (1759) Salon de 1759 « Salon de 1759 — Chardin » p. 98

C’est toujours la nature et la vérité ; vous prendriez les bouteilles par le goulot, si vous aviez soif ; les pêches et les raisins éveillent l’appétit et appellent la main.

1203. (1862) Portraits littéraires. Tome II (nouv. éd.) « Bernardin de Saint-Pierre »

Mais s’il savait toujours être idéal dans l’effet de l’ensemble, il ne reculait pas sur la vérité, infinie familière, du détail. […] On avait tant insisté sur les désaccords, les bouleversements, les hasards, qu’il y avait nouveauté à la fois et vérité dans ce parti. […] Tant de notions amassées de partout sur les plantes, sur les climats, tant de maximes morales sur la société et sur l’homme, ce mélange de vérités, d’hypothèses et de chimères, venant à se rencontrer sous des inclinaisons favorables vers l’horizon attiédi, peignirent divinement le nuage et firent tout d’abord arc-en-ciel. […] S’il est insuffisant à remuer et, pour ainsi dire, à faire frémir avec grâce le voile de la nature, s’il lui est refusé de revêtir d’images transparentes, et accessibles à tous, les vérités qu’il médite, et s’il les ensevelit plutôt sous des clauses occultes, il contredit, sinon avec raison en principe (ce que je ne me permets pas de juger), du moins avec une portée bien supérieure, quelques-unes des douces persuasions propagées par Bernardin ; par exemple, que la nature, qui varie à chaque instant les formes des êtres, n’a de lois constantes que celles de leur bonheur […] Il y est montré dans une essentielle discussion que « Milton a copié les amours d’Adam et d’Ève sur les amours de la terre, quoiqu’il en ait magnifiquement embelli les couleurs ; mais il n’avait trempé tout au plus qu’à moitié son pinceau dans la vérité. » Le grand succès de vente des Études mit l’auteur à même d’acheter une petite maison rue de la Reine-Blanche, à l’extrémité de son faubourg.

1204. (1869) Cours familier de littérature. XXVII « CLVIIe Entretien. Marie Stuart, (Reine d’Écosse). (Suite et fin.) »

Il la reprit cependant au moment d’expirer, et, soit puissance de la vérité, soit tendresse, il dicta à ses geôliers une justification de la reine dans la mort de Darnley ; il prit tout sur lui : crime et expiation. […] Bothwell était trop chargé de crimes pour que sa bouche, même en mourant, fût le gage d’une vérité. […] « Croyez en particulier ce qui vous sera dit par une personne qui vous donnera une bague de rubis de ma part, car je prens sur ma conscience qu’il vous sera dit la vérité de ce que je l’ay chargée, spécialement de ce qui touche mes pauvres serviteurs et la part d’aulcun. […] C’est la vérité, reprit-elle avec une satisfaction religieuse. […] Rends partout témoignage de la vérité.

1205. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome II « Querelles générales, ou querelles sur de grands sujets. — Troisième Partie. De la Poësie. — IV. La Poësie dramatique. » pp. 354-420

de Voltaire n’a point introduit l’amour, sont-elles en aussi grand nombre que celles où il le fait parler avec tant de force & de vérité ? […] Mais de quel côté est la vérité ? […] Tout y est dicté par le sentiment & par la vérité même : tout y est embelli par l’imagination la plus agréable. […] L’apologiste du théâtre termine sa lettre par cette réflexion : « D’autres que vous me feront peut-être un crime d’avoir suivi l’opinion la plus favorable, & m’appelleront casuiste relâché, parce qu’aujourd’hui c’est la mode d’enseigner une morale austère, & de ne la pas pratiquer : mais je vous jure, monsieur, que je ne me suis pas arrêté à la douceur, ou à la rigueur de l’opinion, mais uniquement à la vérité. » Un prêtre, un religieux, qui entreprend de laver le théâtre de son ancien opprobre, étoit capable de rassurer bien des consciences : mais le P.  […] De tous les livres qu’il a donnés, celui-ci est presque le seul qui contienne des vérités utiles & pratiques.

1206. (1902) Les œuvres et les hommes. Le roman contemporain. XVIII « Edmond et Jules de Goncourt »

Mais s’ils ont voulu la faire plus charmante, ils lui ont, selon nous, de cette façon, ôté de son charme, et s’ils ont voulu ne la faire que vraie, ils l’ont faite trop charmante pour qu’on ne lui pardonne pas sa vérité, qu’il fallait montrer pour la faire haïr. […] « Le classicisme et sa queue seront tués. » Et la révolution de la Vérité littéraire accomplie. […] La Science, qui est la prétention des vieux peuples, viole ici l’art, sous prétexte de vérité, et elle prouve, par la plume de ceux qui proclament le Naturalisme le dernier mot de la littérature (et il pourrait bien l’être, en effet !) […] M. de Goncourt, pour être plus vrai, sans doute, comme on entend la vérité maintenant, a fait ses frères Zemganno platement vulgaires. […] J’aurais donné cette revanche à la vérité dans l’amour de pénétrer une seule fois la plus calculée et la plus sublime des feintises de l’art et du génie.

1207. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Avertissement »

Je tiendrai compte de toutes ces différences pour pousser le plus possible au relief et à la vérité.

1208. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — A — article » p. 178

On connoît un autre Aubery, sieur du Maurier, mort en 1667, par des Mémoires pour servir à l’Histoire de Hollande ; Ouvrage où la vérité est dite avec courage & fermeté, & dont plusieurs Historiens ont tiré le plus grand parti.

1209. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — D. — article » p. 110

Et est-ce avec de pareilles ressources qu’on peut prétendre à la gloire de dire la vérité, & à celle de bien écrire l’Histoire ?

1210. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — P. — article » p. 509

Nous connoissons des jeunes gens que son Livre de la Vérité de la Religion prouvée à un Déiste, a ramenés au Christianisme, dont la lecture peu réfléchie des Ouvrages philosophiques les avoit écartés.

1211. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — S. — article » p. 252

Le caractere dominant de son style, est la véhémence, sans que la chaleur qui l'anime, nuise à la vérité des mouvemens & aux couleurs touchantes de l'onction & de la sensibilité.

1212. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — S. — article » p. 273

Ses Sermons, imprimés plusieurs fois en six volumes in-12, ne le placent pas, à la vérité, parmi les Prédicateurs du premier ordre, mais fort au dessus de tous les Orateurs Chrétiens de nos jours.

1213. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — V. — article » p. 412

Il convenoit lui-même que de dix traits insérés dans ses Ouvrages, il en avoit appris neuf dans la conversation, vrai moyen de hasarder bien des choses, & de rencontrer rarement la vérité.

1214. (1761) Salon de 1761 « Gravure —  Cochin  »

Si je rencontre Cochin, la vérité m’échappera, et il saura ce que je pense.

1215. (1763) Salon de 1763 « Peintures — Jeaurat » p. 198

C’est la vérité dans ce genre.

1216. (1870) Portraits contemporains. Tome IV (4e éd.) « M. DAUNOU (Cours d’Études historiques.) » pp. 273-362

Lui-même, dans ses jugements littéraires les plus bienveillants, il n’apporta jamais de complaisance, et il sut relever le prix du moindre de ses éloges en les retenant toujours dans la limite de ce qu’il croyait la vérité. […] Daunou se mit à concourir pour le prix fondé par Raynal à l’Académie de Lyon sur le sujet suivant : Quelles vérités et quels sentiments importe-t-il le plus d’inculquer aux hommes pour leur bonheur ? […] Si, comme il arrive presque toujours et comme il doit arriver en effet, si votre élève attache quelque caractère de sagesse et de vérité naturelle à ce que vous lui enseignez, votre élève n’apprend à lire qu’en désapprenant à penser ; et certes il a trop à perdre dans cet échange. […] Si, dans les sciences même les plus sévères, aucune vérité n’est éclose du génie des Archimède et des Newton sans une émotion poétique et je ne sais quel frémissement de la nature intelligente, comment, sans le bienfait de l’enthousiasme, les vérités morales saisiraient-elles le cœur des humains ? […] De la part d’un esprit sérieusement convaincu et qui croyait fermement à de certaines vérités, cela est mieux.

1217. (1898) Manuel de l’histoire de la littérature française « Livre II. L’Âge classique (1498-1801) — Chapitre premier. La Formation de l’Idéal classique (1498-1610) » pp. 40-106

Et, à la vérité, le proverbe n’empêche pas que saint Thomas d’Aquin, pour ne nommer que lui, ne soit plein d’Aristote. […] À plus forte raison, maître Clément Marot, dont on peut dire avec vérité que les poésies ne sont remplies que de lui-même ; et aussi bien le titre de son premier recueil : L’Adolescence clémentine, nous le déclare-t-il assez ouvertement. […] Dans aucun livre l’art n’a consisté plus manifestement à savoir s’en passer, et à se priver de tous les moyens, même les plus légitimes, d’intéresser la sensibilité du lecteur à la vérité de la doctrine que l’on enseigne. […] Lisez à cet égard les Discours politiques et militaires de La Noue ; la Sagesse de Charron et ses Trois Vérités ; ou encore la Philosophie stoïque de Du Vair. […] 3º Les Œuvres. — Les Trois Vérités contre les athées, idolâtres, juifs, hérétiques et schismatiques, Bordeaux, 1593 ; — Discours chrétiens de la Divinité, Création, Rédemption, Bordeaux ; — Traité de la sagesse, Bordeaux, 1601.

1218. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « À mes élèves de l’université de Lausanne »

Puisse-t-il sous cette forme nouvelle leur être encore utile, servir aussi à leurs camarades de France et d’ailleurs, et, manié, perfectionné par leurs mains juvéniles, les aider tous à dégager de la gaine de pierre où elle est ci demi emprisonnée les lignes pures et harmonieuses de la Vérité !

1219. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — D. — article » p. 219

Son Poëme de la grandeur de Dieu dans les merveilles de la Nature, a eu d’abord de la célébrité ; mais, à le bien examiner, il ne differe de ses autres Poésies, que par quelques morceaux heureux, & par des notes instructives à la vérité, mais tirées pour la plupart du Spectacle de la Nature, de M.

1220. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — H — article » p. 484

Sa Nouvelle Histoire poétique n’est qu’un Recueil de morceaux traduits d’Homere, d’Ovide, & de Virgile, dont il a fait un corps, auquel il a donné la forme historique, & qu’il a revêtu de son style net & facile, à la vérité, mais souvent inégal.

1221. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — J. — article » p. 514

Il y démontre cette vérité, en réfutant, d’une maniere victorieuse, les atomes d’Epicure, les argumens de Lucrece, & le systême de Spinosa.

1222. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — L — article » p. 21

Lafitau, offre plus de légéreté dans le style, que de vérité dans les faits, & ce sera par un esprit d’impartialité.

1223. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — L — article » p. 98

Plein de zele pour la Religion & doué du talent d’écrire avec onction, il a publié plusieurs Ouvrages en faveur du Christianisme, contre les attaques multipliées de la nouvelle Philosophie, où, par des raisonnemens solides & à la portée de tous les Esprits, il prouve la vérité, l’utilité & la nécessité de la Religion.

1224. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — M. — article » p. 390

Les Loix civiles, qu’il connoissoit si bien, n’ont point, à la vérité, statué de peine contre l’orgueil ; mais celles de la Société le proscrivent comme le poison du mérite, & refusent l’estime à quiconque se couronne de ses propres mains.

1225. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — R. — article » pp. 74-75

Il est quelquefois, à la vérité, inférieur à son Original ; mais il a, en revanche, des morceaux où il le surpasse, en donnant de la force, de la grace, de la noblesse à certains détails minutieux, que le génie Anglois peut admettre, mais que celui de notre Nation eût rejetés.

1226. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — S. — article » p. 285

La raison & la vérité dédaignent toute parure recherchée, & le ton de la vraie Philosophie est ennemi de tout ce qui peut sentir l'emphase & la prétention.

1227. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — T. — article » p. 352

Les plaisanteries de l'Auteur sur les divers états de la vie, sont, à la vérité, aussi anciennes que ces états mêmes, mais elles sont renouvelées d'une maniere très-piquante & très-philosophique.

1228. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — T. — article » p. 360

« Plans simples, & presque toujours pris dans le cœur du sujet ; style facile, uni, coulant, assez concis, mais sans sécheresse, plus délicat que recherché, ne s’élevant qu’avec les choses qu’il traite, en n’ empruntant jamais sa force que de l’énergie même des objets ; & coloris, en général, aussi doux qu’égal : voilà, dit M. de Querlon, l’idée que nous donnerions de son genre. » Nous adoptons cette idée avec d’autant plus de confiance, qu’elle est conforme à la vérité, & que le Journaliste a prononcé ce jugement après la mort de l’Auteur.

1229. (1730) Discours sur la tragédie pp. 1-458

Les autres partent d’écrivains plus instruits et plus ingénieux, mais qui malheureusement n’ont pas pour objet la raison ni la vérité. […] J’aurois contredit, par un des personages, la vérité que j’aurois établie par l’autre. […] Suivons l’ordre de votre préface ; et s’il est vrai, comme je n’en doute point, que vous ne cherchiez que la vérité, tâchons de la découvrir ensemble. […] Heureux les combats où le vaincu, s’il est raisonnable, remporte le même avantage que le vainqueur, je veux dire la vérité ! […] On eut d’abord quelque peine à s’y habituer : mais enfin on sentit la force et le charme de la vérité ; et ces peuples s’étonnent aujourd’hui que leurs ancêtres ne comprissent pas qu’on pût s’accommoder d’une imitation si vraye.

1230. (1928) Quelques témoignages : hommes et idées. Tome II

Sorel qualifie de mythe cette croyance, quelle qu’elle soit, dont la vérité objective importe peu. […] Elle a sa part de vérité, qu’il faut réduire à des phénomènes tout près d’être morbides. […] Mais, pour lui obéir, il faut l’étudier dans sa vérité et en accepter les lois. […] Il était en effet dans sa vérité à lui. […] Elles permettent de traduire dans sa vérité un terme si étranger à notre tradition qu’il ne figure pas dans notre premier dictionnaire.

1231. (1938) Réflexions sur le roman pp. 9-257

D’après les éléments de vérité que je crois discerner dans le récit de M.  […] Est-il la seule vérité ? […] La vérité chrétienne, ou même la vérité tout court, se définira-t-elle par le contraire de cette facilité, de cette joie spontanée ? […] Mais quelle que soit la vérité d’une telle conclusion, ce n’est ni cette vérité ni cette conclusion qui nous intéressent dans ce roman. […] Bourget, outre l’élément de vérité, un élément de beauté dans cet art si complexe du roman.

1232. (1891) La vie littéraire. Troisième série pp. -396

La vérité est qu’on ne sort jamais de soi-même. […] Quiconque croit posséder la vérité doit la dire. […] Ces vérités sont précaires et transitoires. […] Sans doute il est d’une âme honnête d’aller droit à la vérité. Mais sommes-nous jamais sûrs de l’atteindre, cette divine vérité ?

1233. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — A — article » p. 187

L’Auteur a sur-tout un courage à dire la vérité, & une droiture dans ses discussions, qui lui concilient la confiance du Lecteur.

1234. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — B — article » pp. 208-209

Par-là il s’est privé de l’avantage de démêler la vérité, & de celui de faire adopter ses décisions, même lorsqu’elles sont équitables.

1235. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — D. — article » p. 138

Cet Auteur ne mériteroit pas cette remarque, s’il n’eût fait un Ouvrage mal digéré, à la vérité, mais qui, entre les mains d’un homme habile, eût pu être d’une grande utilité.

1236. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — L — article » p. 63

On y trouve, il est vrai, ce qu’il faudroit aller chercher dans cent Auteurs différens ; mais on y chercheroit vainement du goût, de l’exactitude dans les faits, de la vérité dans les portraits, de la nouveauté dans les idées, de la noblesse & de la correction dans le langage.

1237. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — M. — article » p. 220

L’Histoire de Saladin mériteroit l’estime des Savans, quand elle ne feroit recommandable que par les recherches qu’elle suppose, & la clarté avec laquelle l’Auteur a su débrouiller les fastes obscurs de la Chronologie arabesque ; mais une qualité plus estimable, c’est l’adresse avec laquelle il a su dire la vérité, sans insulter aux préjugés du Public.

1238. (1767) Salon de 1767 « Peintures — Roland de la porte » p. 203

Ce que je désirerais, c’est qu’on introduisît un bas-relief d’une grande force dans une composition historique, et qu’on s’imposât ainsi la nécessité d’achever l’ouvrage avec la même vérité et le même effet.

1239. (1881) Études sur la littérature française moderne et contemporaine

La question aujourd’hui est de savoir si le positivisme est la vérité. […] C’est du raffinement, non plus dans la nature et dans la vérité, mais dans le faux. […] peu importe ; la vérité dramatique et littéraire doit seule nous occuper ici. […] De leur union sortit l’Intelligence, qui eut pour compagne la Vérité. […] Car elle est seule contemporaine des événements, et elle est vraie, de la vérité de la prose.

1240. (1907) Propos littéraires. Quatrième série

La vérité, c’est que le système de M.  […] À la vérité, ici, ma théorie n’est peut-être pas juste. […] Dire la moitié de la vérité, c’est mentir. […] Au fond, la vérité en politique est ceci : il n’y a que de la politique étrangère. Si la France est condamnée à mort, c’est qu’elle est absolument convaincue du contraire de cette vérité.

1241. (1907) L’évolution créatrice « Chapitre IV. Le mécanisme cinématographique de la pensée  et l’illusion mécanistique. »

Car telle est la nature d’une existence purement logique qu’elle semble se suffire à elle-même, et se poser par le seul effet de la force immanente à la vérité. […] La vérité est que, si le langage se moulait ici sur le réel, nous ne dirions pas « l’enfant devient homme », mais « il y a devenir de l’enfant à l’homme ». […] De même, les raisonnements humains se continuent en une chaîne sans fin, mais ils s’abîmeraient tout d’un coup dans la vérité saisie par intuition, car leur extension et leur distension ne sont qu’un écart, pour ainsi dire, entre notre pensée et la vérité 100. […] Artistes à jamais admirables, les Grecs ont créé un type de vérité suprasensible, comme de beauté sensible, dont il est difficile de ne pas subir l’attrait. […] Pour l’une et pour l’autre, la réalité, comme la vérité, serait intégralement donnée dans l’éternité.

1242. (1875) Premiers lundis. Tome III « De la loi sur la presse »

Je dois voter l’acceptation de la loi, et c’est ainsi que je me trouve en dernier lieu au nombre des inscrits pour  ; mais la vérité est que j’avais d’abord demandé la parole pour parler sur la loi : car mes réserves à son sujet sont telles, que je semblerai le plus souvent parler contre. […] Boinvilliers a développé devant vous avec l’éloquence inflexible de la logique et des chiffres, ce qui n’est que la vérité la plus exacte : c’est que, si l’on a fait quelque chose pour la diminution du droit du timbre, on a fait trop peu ; le dégrèvement est trop faible : on n’a pas tenu compte des dures conditions qui pèsent sur cette entreprise morale appelée journal et qui devrait surtout porter une idée. […] On se plaint souvent que la littérature actuelle ne soit pas plus forte, plus élevée, plus semblable à celle des siècles précédents, des grandes époques précédentes : je ne sais ce que ces plaintes ont de fondé ; nous sommes trop juge et partie peur avoir voix au chapitre dans la question ; mais, en admettant le fondé du reproche, comment voulez-vous que la littérature, la véritable, celle qui a son inspiration propre, celle qui n’est animée ni du désir du gain ni de l’ambition des honneurs, mais qui a sa verve naturelle, originale, son goût de fantaisie ou de vérité, et d’une vérité piquante et parfois satirique (car ce ne sont pas les sujets qui manquent), comment voulez-vous que cette littérature qui sacrifie tout à elle-même, à sa propre satisfaction, au plaisir de rendre avec art, avec relief, et le plus excellemment possible ce qu’elle pense, ce qu’elle voit et dans le jour sous lequel elle le voit, comment voulez-vous qu’elle ait toute sa vigueur, sa joie, sa fierté et son indépendance, si, à tout moment, l’écrivain qui tient la plume a à se faire cette question : « Aurai-je affaire ou non à messieurs du parquet, à messieurs de la police correctionnelle ? 

1243. (1861) Cours familier de littérature. XII « LXVIIe entretien. J.-J. Rousseau. Son faux Contrat social et le vrai contrat social (3e partie) » pp. 5-56

Son faux Contrat social et le vrai contrat social (3e partie) I Finissons-en avec les théories imaginaires de ces législateurs des rêves, qui, en plaçant le but hors de portée parce qu’il est hors de la vérité, consument le peuple en vains efforts pour l’atteindre, font perdre le temps à l’humanité, finissent par l’irriter de son impuissance et par la jeter dans des fureurs suicides, au lieu de la guider sous le doigt de Dieu vers des améliorations salutaires à l’avenir des sociétés. […] Peuple de beaux instincts, mais de peu de moralité politique, toujours ivre de lui-même, enivrant les autres peuples de son génie et de son exemple ; mais ne tenant pas plus à ses vérités qu’à ses rêves, et créé pour lancer le monde, plutôt que pour le diriger vers le bien. […] Le véritable contrat social n’a pas pour but seulement le corps de l’homme, il a pour but aussi et surtout l’âme humaine, il est spiritualiste plus que matériel ; car le corps ne vit qu’un jour de pain, et l’esprit vit éternellement de vérité, de devoir et de vertu. […] Combien le véritable contrat social est supérieur, en vérités et en dignité morale, à ce pacte de la chair avec les sens !

1244. (1879) L’esthétique naturaliste. Article de la Revue des deux mondes pp. 415-432

Son ambition était d’être un chef d’école et sa prétention d’apporter au monde la formule complète, — et jusqu’à lui vainement cherchée, — de la vérité littéraire moderne. […] Zola a voulu simplement dire que l’artiste devait ouvrir les yeux, regarder autour de lui et s’efforcer de peindre l’humanité telle qu’elle est, il n’a fait que répéter le conseil que formulent tous les critiques depuis qu’il y a des critiques, et qu’ont pratiqué instinctivement tous les artistes depuis qu’il y a des artistes : voilà sa grande découverte réduite à une vérité de la Palisse, et il va rendre jaloux l’ombre de Joseph Prudhomme. […] Nous savons ici à quoi nous en tenir sur la vérité générale de leurs portraits, et eux-mêmes au fond savent bien qu’ils n’ont représenté, en les exagérant, que certaines exceptions monstrueuses. […] Nous lui reprochons d’avoir systématiquement exclu toute une partie de la réalité, et la plus noble, la plus intéressante, celle qui enferme le plus de vérité humaine et générale.

1245. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Première partie. — Chapitre XIII. »

Mais là paraissait bien cette vérité tant de fois éprouvée : qu’il faut aux lettres une âme bien plus qu’une protection, et que nul loisir, nulle faveur, ne vaut pour elles l’agitation d’un temps libre et glorieux. […] Toutefois, au milieu de ce déchet de la dignité humaine chez les Grecs, dans cet abaissement de la vertu civile qui suivit la conquête d’Alexandre et marqua la domination de ses indignes successeurs en Macédoine, en Égypte, en Syrie, il semble incontestable que, dans l’ordre moral, dans la forme et l’action du sentiment religieux, quelques clartés nouvelles avaient lui, quelques vérités de plus agissaient sur le monde. […] Tels sont en particulier ces hymnes mis sous le nom d’Orphée, fabrication ancienne, puisque Platon en cite quelques vers, mais évidemment reprise et accrue plusieurs fois, à l’époque des trois premiers Ptolémées, et dans cette ville d’Alexandrie, où Clément et saint Justin martyr les recueillirent plus tard comme un germe antique de la foi naturelle, qu’on aimait alors à rapprocher des vérités de la foi révélée. […] car j’énonce la vérité, et il ne faut pas que ce qui avait auparavant apparu à ton esprit le prive d’une ère nouvelle et propice.

1246. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Deuxième partie. — Chapitre XXI. »

Dans la tradition moderne, et entre ses instincts nationaux maintenus à degrés divers, il n’est pas de vérité plus sentie que l’aversion pour la barbarie mahométane, et ce besoin de l’éloigner de l’Europe, partout attesté dans l’histoire. […] Rendu enfin à la lumière du jour et à sa chaire, devant un immense auditoire, il reprit ainsi son enseignement : « Je vous disais, à notre dernière séance… » Puis il rappela simplement quelque précepte littéraire, quelque vérité déjà connue, comme si tout autre souvenir de sa longue séquestration eût disparu de sa mémoire. […] Quel mortel, aliéné de lui-même, rejette si loin de soi la vérité qu’oublieux de tes dons célestes, il s’égare à la poursuite de l’ombre d’un faux bien ? […] « Quand, dit-il dans une autre méditation, libre de ce cachot, pourrai-je m’envoler aux cieux, et, sur le char qui fuira le plus loin d’ici-bas, contempler la vérité sans faux mélange ?

1247. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — Q. — article » p. 568

Quesnay a pu se tromper quelquefois, personne ne paroît plus fait pour atteindre à la vérité, & ses méprises sont de l’espece de celles qui échappent aux lumieres les plus étendues.

1248. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Mémoires de l’impératrice Catherine II. Écrits par elle-même, (suite et fin.) »

« L’horreur que me cause cette mort est inexprimable, dit-elle en propres termes le lendemain à la princesse Daschkoff ; c’est un coup qui me renverse. » Mais le personnage politique en elle reprit aussitôt le dessus : elle comprit que désavouer hautement le crime et parler de le punir ferait l’effet d’une comédie jouée ; qu’elle ne persuaderait personne ; que ce meurtre lui profitait trop pour qu’on ne le crût pas commandé ou tout au moins désiré par elle ; elle dissimula donc, et faisant son deuil en secret, — un deuil au reste qui dut être court, — elle se contenta, pour la satisfaction et le soulagement des siens et de son fils, de conserver dans une cassette la lettre écrite à elle par Orlof, après l’acte funeste, et qui témoignait de l’entière vérité. […] Sa plus grande dissimulation en causant était de ne pas dire tout ce qu’elle pensait et ce qu’elle savait, mais elle ne s’abaissait jamais au mensonge ; elle aimait par goût la vérité, et « à s’approcher d’elle le plus qu’elle pouvait toujours. » Sa littérature nous est connue ; elle nous a dit elle-même ses lectures ; elle était devenue plus difficile avec les années : « Elle aimait (c’est le prince de Ligne qui parle) les romans de Le Sage, Molière et Corneille. — “Racine n’est pas mon homme, disait-elle, excepté dans Mithridate.”

1249. (1892) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Cinquième série « Édouard Rod »

— Je crois que l’humanité marche — quoique très lentement, avec des arrêts et des retours — vers un état meilleur où la justice sera moins incomplètement réalisée, la souffrance moindre, la vérité mieux connue, et, si vous le voulez, vers un idéal. […] Je crois que tous les hommes sont réellement solidaires ; je crois aussi (ceci est de Pascal) que nous aimons les autres (ou d’autres que nous) aussi « naturellement » que nous nous aimons nous-même ; et que, de cette vérité sentie et de cet instinct développé peut découler toute une morale.

1250. (1897) Le monde où l’on imprime « Chapitre XVIII. Gentils conteurs » pp. 218-231

La vérité est insaisissable à la raison, mais l’image doit être sensible à notre cœur. […] Schwob s’étaye d’une assertion de Chamfort : « Il y a à parier que toute idée publique est une sottise, car elle a convenu au plus grand nombre. » Qu’il me permette de rapprocher le sixième Soliloque sceptique de Lamothe le Vayer : « Quand le vulgaire — et la pourpre et le cordon bleu en font partie — a une fois épousé une opinion pour absurde qu’elle soit, il se raidit d’autant plus à la maintenir qu’elle est déraisonnable et absolument opposée à la vérité, qui, n’est ni escoutée, ni comprise par la folle et ignorante multitude. » Tout de même, et malgré l’autorité de Chamfort, de Lamothe et de Marcel Schwob, il n’est pas de sincère exactitude (et aucun historien de mœurs n’admettra) qu’une collectivité choisisse jamais des opinions absurdes, c’est-à-dire à elle fâcheuses.

1251. (1890) L’avenir de la science « Sommaire »

III La science positive peut seule fournir les vérités vitales. […] Il ne peut apercevoir les fines vérités.

1252. (1905) Les ennemis de l’art d’écrire. Réponse aux objections de MM. F. Brunetière, Emile Faguet, Adolphe Brisson, Rémy de Gourmont, Ernest Charles, G. Lanson, G. Pélissier, Octave Uzanne, Léon Blum, A. Mazel, C. Vergniol, etc… « VII »

On va jusqu’à trouver la Chanson de Roland « plus réaliste qu’Homère »… « C’est, dit-on, de la réalité toute crue », La Chanson de Roland est, certes, un beau poème, pour l’élan, le souffle, l’accent héroïque, le ton de vérité émouvante et de grandeur continue. […] Ce point acquis, comment donc s’y prendre pour donner à la fiction l’air de la vérité, pour rendre vivante une description dont on n’a pas le modèle ?

1253. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « Joseph de Maistre »

» On a le mérite des âmes bien faites et profondes ; mais de mérite acquis, pénible, arraché aux instincts et tout saignant des cruautés du sacrifice, il n’y en a point, c’est la vérité ! D’un autre côté, quand on aime ses enfants et qu’on a du génie, comme de Maistre, et de la tendresse dans le génie, on efface bien vite sous la vérité de ce qu’on écrit toutes les mignonneries de cette délicieuse Artificielle, de cette caillette, non pas d’esprit, mais de cœur, qui s’appelle madame de Sévigné !

1254. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « Royalistes et Républicains »

Et c’est ainsi qu’il est allé jusqu’au bord d’une vérité dans laquelle il fallait se jeter avec courage, et qu’après son étude il est resté Gros-Jean… Gros-Jean politique comme devant ! […] Ils n’auront pas à le ramasser… Nous lui devrons, pour dédommagement des malheurs et des hontes dont il n’a pas su nous préserver, sinon de nous faire rentrer, par le clair spectacle de son impuissance, dans notre tradition historique, — car l’Histoire a de ces interruptions qui, comme les arcades rompues du Colysée, doivent rester béantes pour l’éternité, — au moins de nous replacer dans notre tempérament, dans notre vérité de peuple sentant et pensant… Le gouvernement du bavardage éternel, du sophisme, de la subtilité, de la chicane, de l’intrigaillerie de couloir, nous aura réappris le gouvernement de l’action, rapide et droite, qui fut notre génie !

1255. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « Mademoiselle de Condé »

je crois trop à la vérité surnaturelle du catholicisme pour m’étonner beaucoup de voir Mademoiselle de Condé, cette Vierge-martyre, entrée presque de plain-pied dans la Légion des Élus. […] IV Quant aux lettres intimes qui expriment cet amour d’une âme angélique pour une autre âme, éprise aussi, mais inférieure, je l’ai déjà dit, il n’y en a certainement nulle part de cet accent, de ce caractère, de cet idéal de vérité, de simplicité et de candeur !

1256. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Valmiki »

À nous aussi, le préjugé traditionnel avait passé au cou le nœud de pourpre et de soie — doux et éclatant — dans lequel il étrangle la Vérité, contente d’être étranglée comme un Turc soumis au kalife, et si nous nous sommes débarrassés du lacet fascinateur et terrible, si nous l’avons rejeté et rompu, grâces en soient rendues surtout à ce grand poème du Ramayâna, — l’un des plus beaux (disent les savants) de la littérature sanscrite, — et qu’on vient de traduire tout exprès pour nous qui ne serions, certes ! […] Parisot vante beaucoup trop pour un chrétien (car nous avons mieux que tout cela, nous, et non pas dans des poèmes aux idéalités menteuses, mais en pleine réalité, en pleine histoire), n’est guères, il faut bien en convenir, que débris épars de traditions antérieures, membres coupés d’une vérité primitive, de la grande Massacrée dont les lambeaux ont été semés dans tous les pays du monde pour qu’on sût partout qu’elle avait existé, complète, quelque parti Si donc un reflet troublé ou affaibli d’une poésie quelconque pénètre à travers l’inextricable fourré d’un poème où la plus forte attention peut s’égarer comme un éléphant dans les jungles, cette poésie n’appartient ni à la pensée de Valmiki, ni à l’esprit de sa race.

1257. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XI. Gorini »

Un homme, un champion de la vérité historique comme M. l’abbé Gorini, ne désarme que quand il n’y a plus le moindre petit mauvais texte à tuer. […] Les hommes sont si petits ; ils tiennent si peu à la vérité et tant à leur personne, que, pour peu que vous leur disiez qu’ils ont du talent, ils vous pardonneront d’avoir dit qu’ils en ont mal usé, et pourtant, si on comprenait, c’est la chose mortelle !

1258. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « Ch. de Rémusat. Abélard, drame philosophique » pp. 237-250

La Critique n’est la fille de personne que de la Vérité, et le plus noble langage d’un fils — fût-ce le Cid !  […] IV Eh bien, sans boire, moi, je la dirai, la vérité !

1259. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « A. Dumas. La Question du Divorce » pp. 377-390

IV Si ce qu’il a fait avait été du moins un beau livre, si la discussion à laquelle il s’était livré avait, à défaut de vérité sur le fond, montré les qualités d’un esprit fécond et vigoureux, je l’aurais signalé, malgré mon désespoir historique, parce que je parle ici littérature. […] Eh bien, le peu d’entre ceux qui l’ont lu jusqu’au bout, ce livre lourd et ennuyeux, — car, il faut bien le dire, il est ennuyeux, — n’ont à peine osé lui dire la vérité qu’en l’étouffant sous tous les entortillements de la flatterie, et avec des ramperies infatigables, à couvrir devant lui trente pieds du sol !

1260. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « Mgr Rudesindo Salvado »

C’est celui même du gouvernement de l’Angleterre, tel que nous le trouvons indiqué dans cette humble chronique, toute éclatante de candeur et de vérité. […] Mais sous cette apparence sincère, sous cette préoccupation exclusive et timorée de la vérité du détail, les Mémoires sur l’Australie contiennent latentes, mais visibles déjà pour les esprits doués de clairvoyance, toutes les prémisses d’un vaste syllogisme qu’achèvera l’avenir.

1261. (1902) Les œuvres et les hommes. Le roman contemporain. XVIII « Catulle Mendès »

Mendès, ce pandémonium de chimères où les monstres alternent avec les plus difformes caricatures, qui ne sont pas la vérité non plus ; tous sont tellement pétris et tripotés dans l’hyperbole et dans l’impossible, que Victor Hugo lui-même, malgré ses fameux yeux qui grossissent tout ce qu’ils regardent, déconcerté par un tel spectacle, serait bien capable de dire à la fin qu’une telle société de monstres n’existe pas. […] , ce roman est partagé en deux parties, portant des sous-titres différents : la première, La demoiselle en or ; la seconde, La petite impératrice, et il rappelle un peu les romans oubliés d’Eugène Sue, mais avec une expression autrement vibrante et supérieure et un désintéressement de tout ce qui n’est pas l’effet dramatique, auquel la vérité humaine est sacrifiée dans la mesure qu’elle a, pour frapper plus fort.

1262. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « Eugène Sue » pp. 16-26

Nous, de notre côté, en regardant dans quelles mains sont tombées les guides qui menaient naguères, comme un quadrige, trois ou quatre feuilletons à la fois, nous avons eu la preuve de cette vérité qu’il importe de répéter aux hommes d’une époque, dupe des choses physiques : c’est qu’il est plus aisé de produire beaucoup de volumes que d’en écrire un seul avec éclat, délicatesse et profondeur. […] — Vous rappelez-vous ces deux cités de saint Augustin, — la Cité de Dieu et la Cité du Diable, — ces deux camps tranchés et retranchés dont l’idée, à part la vérité théologique, serait encore une simplification sublime de l’histoire de l’humanité ?

1263. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « M. Théophile Gautier. » pp. 295-308

et qu’il est plus que temps, pour l’honneur de tous, d’en finir avec ce capitonnage dérisoire du même mot qu’on répète contre la Critique, surtout quand il s’agit d’un homme qui ne demande pas quartier, lui, et qui a bien assez de talent pour entendre une fois la vérité, — ce qui le changera ! Or, la vérité, — du moins pour moi, — c’est que ce livre, si longtemps attendu et présentement si exalté du Capitaine Fracasse, n’augmentera pas de beaucoup la renommée de M. 

1264. (1773) Essai sur les éloges « Morceaux retranchés à la censure dans l’Essai sur les éloges. »

Les lois qu’il a violées, les corps de l’État qu’il a opprimés, les parlements qu’il a avilis, la famille royale qu’il a persécutée, les peuples qu’il a écrasés, le sang innocent qu’il a versé, la nation entière qu’il a livrée tout enchaînée au pouvoir arbitraire, auraient dû s’élever contre ce coupable abus des éloges, et venger la vérité outragée par le mensonge. […] Il semble qu’il y ait pour eux une autre morale que pour le reste des hommes : on cherche toujours s’ils ont été grands, et jamais s’ils ont été justes ; celui même qui voit la vérité craint de la dire.

1265. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « LVII » pp. 218-219

., pour être apte à enseigner, a été bien et a eu des accents de vérité, de générosité et d’élévation remarquables.

1266. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — J — Jhouney, Alber (1860-1926) »

Charles Morice Albert Jhouney, par la nature de son esprit orienté aux seules réalités absolues, est à merveille le poète pour qui la Beauté ne ressort que de la Vérité.

1267. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — N — Peyrat, Napoléon (1809-1881) »

Les images riches et correctes sont frappantes de vérité… Voilà bien l’art de 1833, l’art d’enchâsser savamment l’image dans le vers et de tout combiner pour l’effet, et le son, et la figure, et le rythme, et la coupe, et la place, et l’enjambement.

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