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730. (1930) Le roman français pp. 1-197

C’est à croire que les Goncourt, qui passent pour avoir inventé cette école du document, se sont inspirés de lui. […] Enfin, son instinct de malice, son besoin de liberté, lui inspiraient le désir de rester dans l’opposition. […] Ce pourrait bien être Baudelaire qui lui inspire le goût du satanisme dans Là-bas, et c’est par le satanisme qu’il arrivera au catholicisme. […] Car ce n’est pas Jésus, c’est Manès, qui paraît avoir inspiré Sous le soleil de Satan, de M.  […] Emmanuel Bove, Pierre Bost et d’autres, l’intérêt subsiste, l’écrivain sachant quand même inspirer l’impression du réel.

731. (1858) Cours familier de littérature. V « XXIXe entretien. La musique de Mozart » pp. 281-360

Mais, d’abord, un mot sur l’art dont il fut, selon nous, avec Beethoven et avant Rossini, le plus complet et le plus miraculeux inspiré. […] Comment ce style du compositeur inspiré ou inhabile nous donne-t-il des ravissements ou des dégoûts qui nous enlèvent jusqu’au troisième ciel, ou qui nous laissent froids et mornes au vain bruit de ses notes sans idée et sans âme ? […] Le jeune compositeur, ivre de son voyage, commence avec sa sœur, de toutes les villes où il s’arrête, une correspondance moitié enfantine, moitié inspirée, où le badinage lutte avec les larmes. […] Il y a des moments où le rossignol contient toutes les gaietés de sons inspirés par le printemps de l’amour dans une roulade ; souvent il chancelle et tombe de la branche, l’oreille éblouie de sa propre mélodie, ivre-mort de l’ivresse musicale.

732. (1863) Cours familier de littérature. XVI « XCIIIe entretien. Vie du Tasse (3e partie) » pp. 129-224

ce qui m’inspira confiance et ce qui me perdit ! […] « Priez Dieu pour moi, et soyez assuré que, de même que je vous ai toujours chéri et honoré dans le présent, maintenant, dans cette vie plus réelle que je vais commencer, je ferai pour vous tout ce qui me sera inspiré par la plus tendre et la plus parfaite charité du cœur ; et dans ces sentiments je recommande vous et moi à la divine miséricorde. […] Cependant, quelle que soit la pitié que ses malheurs inspirent aux cœurs généreux, cette pitié ne doit pas se tourner en colère et en accusations injustes contre l’ingratitude de l’humanité envers les génies qui l’honorent. […] Tel fut le Tasse, malheureux par lui-même plus que par les autres ; mais son infortune est pour beaucoup dans l’adoration que son nom inspira aux jeunes gens et aux femmes, qui aiment à trouver dans la vie de leur poète autant de poésie que dans ses vers !

733. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Discours sur le système et la vie de Vico » pp. -

Le platonisme, qui au seizième siècle les avait si heureusement inspirées, qui pour ainsi dire, avait alors ressuscité la Grèce antique en Italie, était relégué dans la poussière des cloîtres. […] Quelle force de jeunesse n’ont pas alors l’imagination, la mémoire, et les passions qui inspirent la poésie ? […] Quelque horreur que nous inspirent ces religions sanguinaires, n’oublions pas que c’est sous leur influence que se sont formées les plus illustres sociétés du monde ; l’athéisme n’a rien fondé. […] Nulle part il ne s’est plus abandonné à l’enthousiasme qu’inspire la science considérée dans son ensemble et dans son harmonie.

734. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Malherbe et son école. Mémoire sur la vie de Malherbe et sur ses œuvres par M. de Gournay, de l’Académie de Caen (1852.) » pp. 67-87

Il y eut là, tout au sortir de l’enseignement de Malherbe, dans notre poésie française lyrique, une veine trop peu abondante, trop tôt distraite et interrompue, mais très pure, très française, neuve, élevée et douce : il en est resté quatre ou cinq odes au plus, mais dignes d’Horace, qu’on y retrouve imité sans servilité et avec génie, et bien faites surtout pour enchanter et inspirer, comme cela a dû être, la jeunesse de La Fontaine. […] J’indiquerai également, comme sorties du même courant et de la même source, comme inspirées par un semblable et pur amour de la campagne, les belles et douces stances de Lamartine dans ses secondes Méditations poétiques : « Ô vallons paternels !

735. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Roederer. — I. » pp. 325-345

Je cite ces lettres, parce qu’on y voit se dessiner un trait de son caractère, et en même temps l’estime qu’il inspirait. […] En général, il ne condense pas et ne grave pas de la sorte sa pensée : mais cette fois la vivacité de l’impression, l’effroi des souvenirs, et aussi cette forte idée de Hobbes, lue et méditée auparavant dans la retraite, et se résumant en un style concis, ont servi à l’inspirer.

736. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Histoire de la maison royale de Saint-Cyr, par M. Théophile Lavallée. » pp. 473-494

Il l’a vue telle qu’elle était, tout occupée du salut du roi, de sa réforme, de son amusement décent, de l’intérieur de la famille royale, du soulagement des peuples, et faisant tout cela, il est vrai, avec plus de rectitude que d’effusion, avec plus de justesse que de grandeur ; enfin, il a résumé son jugement sur elle en des termes précis, au moment de l’accompagner dans son œuvre de tendresse et de prédilection : Mme de Maintenon, dit-il, n’a donc pas eu sur Louis XIV l’influence malfaisante que ses ennemis lui ont attribuée : elle n’eut pas de grandes vues, elle ne lui inspira pas de grandes choses : elle borna trop sa pensée et sa mission au salut de l’homme et aux affaires de religion ; l’on peut même dire qu’en beaucoup de circonstances elle rapetissa le grand roi ; mais elle ne lui donna que des conseils salutaires, désintéressés, utiles à l’État et au soulagement du peuple, et en définitive elle a fait à la France un bien réel en réformant la vie d’un homme dont les passions avaient été divinisées, en arrachant à une vieillesse licencieuse un monarque qui, selon Leibniz, « faisait seul le destin de son siècle » ; enfin en le rendant capable de soutenir, « avec un visage toujours égal et véritablement chrétien », les désastres de la fin de son règne. […] Pendant son agonie, elle devint beaucoup plus belle qu’elle n’avait été dans le temps de sa meilleure santé ; mais c’était une beauté toute céleste qui inspirait de la dévotion, et nous la regardâmes mourir avec ravissement… La langue de Saint-Cyr forme une nuance à part dans celle du siècle de Louis XIV ; Mme de Caylus en est la fleur mondaine ; on sent qu’Esther y a passé, et Fénelon également.

737. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « William Cowper, ou de la poésie domestique (I, II et III) — III » pp. 178-197

… La pièce la plus considérable qu’il ait composée dans les dernières années, et qui est d’une imagination aussi forte qu’élevée, a pour titre Le Chêne de Yardley ; elle lui avait été inspirée par un chêne antique qu’il avait vu dans ses promenades autour de Weston, et qui était réputé contemporain de la conquête des Normands. […] Je remarquerai seulement qu’en Angleterre, la vie privée est plus close, plus abritée, mieux encadrée dans son ensemble, plus conforme par son esprit aux mœurs générales de la race et de la nation ; ainsi ornée et préservée, ainsi à demi enveloppée de son mystère comme le cottage l’est dans ses roses ou comme un nid dans le buisson, elle prête davantage à cette douce et poétique ferveur qu’elle inspire et dont on vient de voir tant de purs exemples.

738. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Merlin de Thionville et la Chartreuse du Val-Saint-Pierre. »

On hésite à dire un mot sur de telles tentatives, inspirées par d’honorables sentiments et poursuivies avec opiniâtreté pendant toute une vie. […] c’est mieux : le seul amour de la patrie, le seul enthousiasme de la vertu, l’unique désir de rendre la paix à son pays, l’inspire et la transporte jusqu’à l’égarer dans le choix de sa victime.

739. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Catinat (suite et fin.) »

Catinat les calmait de son mieux, et aurait voulu leur inspirer quelque chose de son abnégation. […] Toute cette cérémonie et les soins donnés à la tombe nouvelle ont été suggérés, inspirés et surveillés par l’esprit et le cœur d’une princesse bien digne de posséder le domaine historique de Saint-Gratien, et qui, aimant de prédilection sans doute les grandeurs et les beautés de l’art et tout ce qui fait le charme de la vie, met encore au-dessus le patriotisme, l’esprit de vérité, la droiture et les honnêtes gens.

740. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Réminiscences, par M. Coulmann. Ancien Maître des requêtes, ancien Député. »

Coulmann a le plus connues, et il a eu l’honneur d’inspirer à cette femme distinguée une amitié véritable. […] Mme Dufrenoy que je vois en cela semblable à d’autres personnes qui ont souffert du désaccord conjugal et qui n’ont point trouvé de satisfaction complète ailleurs, dans les passions inspirées ou ressenties, en était venue à placer naturellement le bonheur dans la situation contraire à la sienne, c’est-à-dire dans un bon mariage, dans une union bien assortie.

741. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Madame Desbordes-Valmore. »

Elle avait joué très jeune, en même temps que l’excellente actrice Mme Gontier, qui avait jadis inspiré une passion à M. de Florian, et qui surtout en avait ressenti une très vive pour ce brillant capitaine de dragons, auteur de jolies arlequinades. […] annonçait à Mme Valmore qu’il venait d’autoriser le directeur à résilier son engagement pour l’année 1819-1820 ; on y sent la considération qu’elle inspirait partout autour d’elle : « Mille grâces, Madame, de votre charmant cadeau ; ce que je connaissais de vos ouvrages m’en rend la collection infiniment précieuse ; leur cachet particulier est la peinture de douces et modestes vertus, d’une exquise sensibilité et des sentiments les plus nobles, les plus purs, en un mot de ces sentiments que votre jeu reproduit avec tant de vérité et de naturel sur la scène.

742. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « M. de Sénancour — M. de Sénancour, en 1832 »

Oberman, en effet, quand on le lit à un certain âge et dans une certaine disposition d’âme, doit provoquer un enthousiasme du genre de celui que Young, Ossian et Werther inspirèrent en leur temps. […] Le silence protège les rêves de l’amour ; le mouvement des eaux pénètre de sa douce agitation ; la fureur des vagues inspire ses efforts orageux, et tout commandera ses plaisirs quand la nuit sera douce, quand la lune embellira la nuit, quand la volupté sera dans les ombres et la lumière, dans la solitude, dans les airs et les eaux et la nuit… Heureux délire !

743. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « MME DESBORDES-VALMORE. (Les Pleurs, poésies nouvelles. — Une Raillerie de l’Amour, roman.) » pp. 91-114

Elle est un poëte si instinctif, si tendre, si éploré, si prompt à toutes les larmes et à tous les transports, si brisé et battu par tous les vents, si inspiré par l’âme seule, si étranger aux écoles et à l’art, qu’il est impossible près d’elle de ne pas considérer la poésie comme indépendante de tout but, comme un simple don de pleurer, de s’écrier, de se plaindre, d’envelopper de mélodie sa souffrance. […] » Lamartine a merveilleusement exprimé comment, de tous ces fragments brisés d’une vie si douloureuse, il résultait une plus touchante harmonie ; ce tendre et bienfaisant consolateur, que nul désormais ne consolera38, a dit en s’adressant à Mme Valmore : Du poëte c’est le mystère : Le luthier qui crée une voix Jette son instrument à terre, Foule aux pieds, brise comme un verre L’œuvre chantante de ses doigts Puis d’une main que l’art inspire, Rajustant ces fragments meurtris, Réveille le son et l’admire, Et trouve une voix à sa lyre Plus sonore dans ses débris !

744. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « DU ROMAN INTIME ou MADEMOISELLE DE LIRON » pp. 22-41

Il est des douleurs tellement irrémédiables à la fois et fécondes, que, malgré la fragilité de notre nature et le démenti de l’expérience, nous nous obstinons à les concevoir éternelles ; faibles, inconstants, médiocres nous-mêmes, nous vouons héroïquement au sacrifice les êtres qui ont inspiré de grandes préférences et causé de grandes infortunes ; nous nous les imaginons comme fixés désormais sur cette terre dans la situation sublime où l’élan d’une noble passion les a portés. — Mais nous n’en étions qu’au départ de Rome. […] Quoique Mme de Ferriol, femme exigeante, pleine de sécheresse et d’aigreur, n’eût pas pour Mlle Aïssé ces égards délicats qu’inspire la bienveillance de l’âme, la jeune Grecque, comme on l’appelait, était l’idole de cette société aimable, sinon sévère : Mme de Parabère, Mme du Deffand, lady Bolingbroke, la recherchaient à l’envi.

745. (1889) Le théâtre contemporain. Émile Augier, Alexandre Dumas fils « Émile Augier — Chapitre IV »

elle a passé sa vie à deux pas de la pauvreté, et ce voisinage lui inspire une peur si affreuse, qu’elle prend tous les déguisements pour lui échapper. […] Il laissera sa marque là où il a frappé ; il effraye, mais l’effroi qu’il inspire sera salutaire ; il déshabille chastement le vice, il marche dans la corruption sans y enfoncer.

746. (1889) Le théâtre contemporain. Émile Augier, Alexandre Dumas fils « Alexandre Dumas fils — Chapitre XII »

M. de Ryons n’est que le moteur de la comédie, une machine à paradoxes qui l’inspire et la fait mouvoir, mais le mécanisme n’est pas suffisamment déguisé ; on sent trop, sous son habit noir, le froid du métal, l’acier du ressort. […] Mais, ce qu’il faut louer surtout, dans cette comédie de transformation, c’est l’honnêteté qui l’inspire, la pitié qui la remue, la foi qui ranime.

747. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Adrienne Le Couvreur. » pp. 199-220

Elle a été aimée du plus brillant guerrier de son temps ; elle a inspiré au plus grand poète d’alors sa plus touchante élégie. […] Et quand ils m’honorent de quelques bontés, vous sentez bien ce que la reconnaissance peut ajouter à de tels sentiments, et assurément je ne fus jamais ingrate… En même temps qu’elle désire l’amitié, elle en redoute un peu les enthousiasmes ; elle craint toujours qu’un autre sentiment ne se glisse dessous, et elle en parle d’un ton à persuader sérieusement qu’elle en veut rester au premier : Je suis, dit-elle, d’un sexe et d’une profession où l’on ne soupçonne pas volontiers cet honnête sentiment, l’unique que je désire, dont je sois flattée, et dont j’ose me croire digne par la façon dont je le sens ; j’ajoute même par celle dont je l’ai inspiré plus d’une fois.

748. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Le duc de Lauzun. » pp. 287-308

Rien de plus aimable et de plus intéressant que sa figure ; rien de plus tendre et de plus chaste que les sentiments qu’elle inspirait. […] On comprit que le goût qu’inspirait Lauzun n’avait pas cessé.

749. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Jasmin. (Troisième volume de ses Poésies.) (1851.) » pp. 309-329

Il avait composé pour cette solennité une pièce nouvelle, intitulée Le Prêtre sans église, et inspirée des mêmes sentiments élevés et droits. […] » — C’est après avoir entendu ce poème et tant de pièces inspirées par un même sentiment moral élevé, qu’on a pu dire avec raison : « Si la France possédait dix poètes comme Jasmin, dix poètes de cette influence, elle n’aurait pas à craindre de révolutions. » J’allais oublier de dire que ce troisième volume de Jasmin est dédié à M. 

750. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Madame de Motteville. » pp. 168-188

On a trouvé ces réflexions trop multipliées et trop longues, ce qui peut être vrai pour la dernière partie des Mémoires ; mais elle sait d’ordinaire les entremêler aux circonstances mêmes qui les lui inspirent. […] Mme de Motteville n’est point une royaliste aveugle : elle croit au droit des rois, mais aussi à la justice qui en est la règle, et que Dieu, selon elle, leur inspire souvent, et qu’il leur a presque toujours suggérée dans ce royaume de France.

751. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Le maréchal Marmont, duc de Raguse. — I. » pp. 1-22

Ayant écrit pour l’un de ses ouvrages, et peut-être pour ses Mémoires, quelques pages où il se ressouvenait, avec une sorte de complaisance, de l’influence salutaire qu’il avait exercée sur les troupes soumises à ses ordres, soit en 1804 dans ce commandement de l’armée gallo-batave, soit en 1805 à l’armée de Dalmatie, soit en 1811 à l’armée de Portugal, et bien qu’il terminât sa récapitulation par ces seuls mots : « L’ensemble de ces souvenirs fait la consolation de ma vieillesse », il craignit d’en avoir trop dit, il raya les pages, et j’ai sous les yeux les feuillets condamnés avec ces mots en marge de sa main : « Je me décide à supprimer ce dernier paragraphe, qui avait été inspiré par un mouvement d’amour-propre 1. » Dans la campagne d’Austerlitz, Marmont, après avoir contribué à la prise d’Ulm, reçut ordre de se mettre à la tête des troupes occupant la Dalmatie ; elles étaient composées de ce qu’avait de moins bon l’armée d’Italie, il les organisa, les exerça, les anima de son zèle. […] Dès le mois de mars précédent, il avait été élevé à la dignité de duc de Raguse pour récompense de son administration vigilante et créatrice dans cette province inculte de Dalmatie : « Quatre-vingts lieues de belles routes, dit-il, construites dans les localités les plus sauvages, au milieu des plus grandes difficultés naturelles, ont laissé aux habitants des souvenirs honorables et qui ne périront jamais. » Ces travaux étaient exécutés par les troupes, qui, noblement inspirées de la pensée civilisatrice du chef, y mettaient leur orgueil comme à une victoire.

752. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Monsieur Michaud, de l’Académie française. » pp. 20-40

Cette conversation, pleine de chaleur et de projets, l’inspirait à son tour. […] Parisot, homme instruit et même savant, ne soit pas le rédacteur de l’article dont il est le signataire ; mais il est trop évident qu’il s’est surtout inspiré de M. 

753. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Montesquieu. — II. (Fin.) » pp. 63-82

Ces suicides des Caton, des Brutus, lui inspirent des réflexions où il entre peut-être quelque idolâtrie classique et quelque prestige : « Il est certain, s’écrie-t-il, que les hommes sont devenus moins libres, moins courageux, moins portés aux grandes entreprises qu’ils n’étaient lorsque, par cette puissance qu’on prenait sur soi-même, on pouvait, à tous les instants, échapper à toute autre puissance. » Il le redira jusque dans L’Esprit des lois, à propos de ce qu’on appelait vertu chez les anciens : « Lorsqu’elle y était dans sa force, on y faisait des choses que nous ne voyons plus aujourd’hui, et qui étonnent nos petites âmes. » Montesquieu a deviné bien des choses antiques ou modernes, et de celles même qu’il avait le moins vues de son temps, soit pour les gouvernements libres, soit pour les guerres civiles, soit pour les gouvernements d’empire ; on ferait un extrait piquant de ces sortes de prédictions ou d’allusions prises de ses œuvres. […] inspirez-moi !

754. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Grimm. — II. (Fin.) » pp. 308-328

Les gens qui sont d’une si bonne composition n’ont jamais eu le bonheur de sentir l’enthousiasme qu’inspirent les chefs-d’œuvre des grands génies, et ce n’est pas pour eux qu’Homère, Sophocle (je supprime Richardson, que Grimm place en trop haute compagnie), Raphaël et Pergolèse ont travaillé. […] En philosophie, il le traite avec le dédain d’un homme qui n’en est pas resté aux demi-partis et dont l’incrédulité, du moins, n’est point inconséquente : Voltaire, au contraire, s’arrête à mi-chemin et, en continuant de mal faire, s’effraye par moment de sa propre audace : « Il raisonne là-dessus, dit Grimm, comme un enfant, mais comme un joli enfant qu’il est. » À partir de Tancrède, tout ce que Voltaire produit pour le théâtre lui paraît marqué du signe de la vieillesse ; mais, à sa mort, il se reprend à l’envisager dans son ensemble, et avec l’admiration qu’une telle carrière inspire ; il exprime très bien le sentiment de la décadence littéraire que, selon lui, Voltaire retardait, et qui va précipiter son cours : « Depuis la mort de Voltaire, un vaste silence règne dans ces contrées, et nous rappelle à chaque instant nos pertes et notre pauvreté. » Il écrivait cela à Frédéric (janvier 1784).

755. (1889) Écrivains francisés. Dickens, Heine, Tourguénef, Poe, Dostoïewski, Tolstoï « Ivan Tourguénef »

Celle-ci passe de l’admiration que lui inspirait cette attitude d’homme en lutte avec la société, à une commisération maternelle et un peu méprisante. […] Ce sont des études esquissées-d’une singulière délicatesse de traits menus, diffus cependant et noyés d’ombre, qui tentent cette curiosité de connaître, que suscite tout mystère, qui la récompensent de son effort, par l’intéressante complexité de la physionomie qui surgit peu à peu de l’ombre, par la sympathie émue qu’elle inspire, comme elle se révèle véridique, portrait et non académie, être tout semblable à son spectateur et mirant dans ses yeux le charme et la tristesse qu’il a connus et subis.

756. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Livre IV : La philosophie — II. L’histoire de la philosophie au xixe  siècle — Chapitre II : Rapports de l’histoire de la philosophie avec la philosophie même »

N’est-ce rien enfin que cet amour de l’humanité, cette fraternité en esprit qui nous inspire cette croyance que nul homme ne se trompe d’une manière absolue ? […] Heureux encore ceux qui, ne l’ayant pas reçue, ne cherchent ni à se tromper eux-mêmes, ni à tromper les autres en se faisant passer pour inspirés !

757. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « Saint-Simon »

Saint-Simon, en effet, devait en inspirer une terrible à ce gouvernement de drôlesses. […] de la transpiration d’une haine cachée sous les bassesses d’une ambition infatigable et infortunée à laquelle Louis XIV répondit toujours par l’écrasement de son dédain, ce formidable duc, à esprit et à physionomie diaboliques, devait inspirer une bien autre épouvante à cette femmelette de Louis XV qu’au grand roi… J’imagine que de certains mots, cruels et profonds, qui devaient parfois lui échapper, comme il en échappe aux hommes de génie, plus haut que leur temps, et qui se sont le plus voués au mépris reposant du silence, faisaient redouter davantage ces papiers qu’on ne connaissait pas, mais qu’on savait qu’il entassait toujours, et qui pouvaient être l’histoire de quelque Tacite, d’un Tacite doublé, triplé et accumulé par le temps… La peur a parfois de ces divinations !

758. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « X. Ernest Renan »

Dans l’état actuel de la science et des grotesques respects qu’elle inspire à la plupart des hommes qui croient qu’elle leur donnera la clef de ce monde que Dieu a gardée, il n’était ni si indifférent ni si bouffon de confisquer Moïse au profit du sanscrit et de ramener la question de Dieu, si peu scientifique, à une simple question de dehors et de dedans, qui l’est beaucoup plus ! […] Renan est diminué par l’ennui qu’il inspire.

759. (1874) Premiers lundis. Tome I « [Préface] »

Ils sont certainement pleins de chaleur et de lumière, et tout à fait inspirés du sujet qui faisait alors la préoccupation des plus grands poètes et artistes : la guerre de l’indépendance grecque.

760. (1874) Premiers lundis. Tome I « Madame de Maintenon et la Princesse des Ursins — II »

Par principe de prudence, comme par principe d’humilité, elle affecta de se rapetisser et de s’effacer au milieu de tant de grandeurs ; les calamités de toutes sortes, qui affligeaient la France et la famille de Louis XIV, lui inspirèrent un découragement trop naturel pour ne pas être vrai, qu’il entrait dans ses vues et ses manières d’exagérer encore.

761. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre XIV. De la plaisanterie anglaise » pp. 296-306

La gaieté de l’esprit est facile à tous les hommes qui ont de l’esprit ; mais c’est le génie d’un homme et le bon goût de plusieurs qui peuvent seuls inspirer la véritable comédie.

762. (1896) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Sixième série « La Tolérance »

Et, si Valmiki n’est pas encore un bon terrain de conciliation, si nous ne pouvons décidément pas communier dans le même beau, communions dans le même amour de la beauté, dans les plaisirs que cet amour donne et dans les vertus qu’il inspire.

763. (1885) Préfaces tirées des Œuvres complètes de Victor Hugo « Préfaces des recueils poétiques — Préface des « Rayons et les Ombres » (1840) »

Voilant à dessein les exceptions honteuses, il inspirerait la vénération pour la vieillesse, en montrant la vieillesse toujours grande ; la compassion pour la femme, en montrant la femme toujours faible ; le culte des affections naturelles, en montrant qu’il y a toujours, et dans tous les cas, quelque chose de sacré, de divin et de vertueux dans ces deux grands sentiments sur lesquels le monde repose depuis Adam et Ève, la paternité, la maternité.

764. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome I « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Jean de Meun, et les femmes de la cour de Philippe-le-Bel. » pp. 95-104

L’envie de plaire à sa maîtresse l’inspira comme Ovide, & le fit chanter d’après lui.

765. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome I « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Montmaur, avec tout le Parnasse Latin & François. » pp. 172-183

Les vers prouvent ce qu’il sçavoit faire, inspiré par la haine & la vengeance.

766. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Troisième partie. Beaux-arts et littérature. — Livre quatrième. Éloquence. — Chapitre V. Que l’incrédulité est la principale cause de la décadence du goût et du génie. »

Où sont ces hommes aux figures calmes et majestueuses, au port et aux vêtements nobles, au langage épuré, à l’air guerrier et classique, conquérant et inspiré des arts ?

767. (1767) Salon de 1767 « Peintures — Lépicié » pp. 275-278

Il y a là de quoi désespérer tous les grands artistes et leur inspirer le plus parfait mépris pour le jugement du public.

768. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Première partie — Section 33, de la poësie du stile dans laquelle les mots sont regardez en tant que les signes de nos idées, que c’est la poësie du stile qui fait la destinée des poëmes » pp. 275-287

Le conseil d’un ami peut bien nous faire supprimer quelques figures impropres ou mal imaginées ; mais il ne peut nous inspirer le genie necessaire pour inventer celles dont il conviendroit de se servir.

769. (1905) Les ennemis de l’art d’écrire. Réponse aux objections de MM. F. Brunetière, Emile Faguet, Adolphe Brisson, Rémy de Gourmont, Ernest Charles, G. Lanson, G. Pélissier, Octave Uzanne, Léon Blum, A. Mazel, C. Vergniol, etc… « XI »

Uzanne, limite le style au pastiche adroit… Il se dispose à vous faire acquérir, grâce à quelques règles rapides et faciles d’assimilation, un style inspiré de celui des auteurs illustres.

770. (1909) Les œuvres et les hommes. Philosophes et écrivains religieux et politiques. XXV « Léon Bloy »

Tel Léon Bloy et son livre sur le Révélateur du Globe 49, que l’histoire du comte Roselly de Lorgues et son dévouement à la mémoire de Colomb lui ont inspiré.

771. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XV. De Tacite. D’un éloge qu’il prononça étant consul ; de son éloge historique d’Agricola. »

Si on demande quel est l’homme qui a le mieux peint les vices et les crimes, et qui inspire mieux l’indignation et le mépris pour ceux qui ont fait le malheur des hommes, je dirai, c’est Tacite ; qui donne un plus saint respect pour la vertu malheureuse, et la représente d’une manière plus auguste, ou dans les fers, ou sous les coups d’un bourreau, c’est Tacite ; qui a le mieux flétri les affranchis et les esclaves, et tous ceux qui rampaient, flattaient, pillaient et corrompaient à la cour des empereurs, c’est encore Tacite.

772. (1862) Cours familier de littérature. XIII « LXXVIIIe entretien. Revue littéraire de l’année 1861 en France. M. de Marcellus (1re partie) » pp. 333-411

Il semble que ces solitaires résidences inspirent à leurs possesseurs quelque chose du repos, des loisirs studieux, des goûts conservateurs, des contemplations philosophiques qui caractérisent ces hommes de paix. […] Détournons les yeux, nous n’avons pas pu leur inspirer la prudence. […] Il leur inspirait la guerre en Espagne, guerre qui était dans leur nature, guerre de restauration, de constitution même ; guerre d’intervention contre la démagogie espagnole et contre l’insurrection militaire, mais guerre désintéressée de toute conquête.

773. (1864) Cours familier de littérature. XVII « XCVIIIe entretien. Alfieri. Sa vie et ses œuvres (3e partie) » pp. 81-152

Qu’était-ce que Fabre, en effet, pour lui inspirer une passion si vive et si impatiente ? […] « C’est la duchesse de Devonshire, la plus belle et la plus riche des Anglaises, avec laquelle j’étais lié, et qui me mentionne dans son testament d’amitié peu d’années après ; l’excellent cardinal Consalvi, ministre du cœur de Pie VII ; lord Byron ; Hoblouse, son ami ; Thomas Moore, le poète de l’Inde ; lord Russell, qui gouverne encore aujourd’hui l’Angleterre ; Lamartine, ajoute l’historien, non plus timide et tremblant, comme en 1811, mais levant déjà son front inspiré, et lisant à ce noble auditoire les strophes mélodieuses qui allaient renouveler la poésie en France. » Ce salon était un sommet serein de la pensée qui réapparaissait au-dessus des flots. […] Telle qu’elle était, et en enlevant par la pensée trente ans de vie agitée à cette personne, on ne pouvait s’empêcher de lui restituer une vivacité sereine et une grâce agile, en contraste avec la majesté de son rang et avec les malheurs de son union, très propres à inspirer un immense amour.

774. (1868) Cours familier de littérature. XXVI « CLIVe entretien. Madame de Staël. Suite »

Une seule voix sans parole, non pas sans harmonie, sans force, mais irrésistible, proclame un Dieu au fond de notre cœur : tout ce qui est vraiment beau dans l’homme naît de ce qu’il éprouve intérieurement et spontanément : toute action héroïque est inspirée par la liberté morale ; l’acte de se dévouer à la volonté divine, cet acte que toutes les sensations combattent et que l’enthousiasme seul inspire, est si noble et si pur, que les anges eux-mêmes, vertueux par nature et sans obstacle, pourraient l’envier à l’homme. […] Mais elle atteste, par le fanatisme de la curiosité dont elle est pleine, l’enthousiasme et l’éblouissement que le nom de l’auteur de Corinne inspirait à la jeunesse de son temps.

775. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre II. La première génération des grands classiques — Chapitre III. Pascal »

Rien de plus large que l’esprit de leur enseignement, rien de meilleur, pour le temps, que leurs méthodes, dont leurs rivaux, et surtout l’Université, s’inspirèrent bientôt. […] Même le germe de la conception qui inspirera les Pensées, de ce qu’on appellera inexactement le scepticisme de Pascal, existe déjà dans son esprit : la Préface du traité du Vide admet l’impossibilité d’atteindre à la certitude autrement que par la révélation, en matière de théologie ; la raison même, au progrès de laquelle il croit et travaille, n’a point ici de méthode qui vaille. […] Celles qui sont essentiellement chrétiennes, lui sont communes avec les grands docteurs de l’Église ; Bossuet les exprimera, sans avoir besoin de s’inspirer de Pascal.

776. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — H — Hugo, Victor (1802-1885) »

Hugo au défi de publier l’anecdote dont il s’est inspiré ; et, si jamais il y a eu, en Espagne ou ailleurs, un sentiment général, une frénésie d’honneur qui puisse autoriser le cinquième acte d’Hernani, nous dirons que c’est une belle chose que cette catastrophe. […] On ne peut attaquer par trop d’endroits à la fois une production pareille, quand on voit par la préface des Consolations (de Sainte-Beuve) la déplorable émulation qu’elle peut inspirer à un esprit délicat et naturellement juste. […] Je le remercie de l’admiration unanime qu’elles inspirent.

777. (1889) Histoire de la littérature française. Tome II (16e éd.) « Chapitre troisième »

Il imagine un lutin qui lui inspirait ses beaux endroits et l’abandonnait dans les mauvais. […] Ce grand homme s’était fait une idée du poème dramatique d’après deux sortes de modèles bien différents : les anciens, dont il dissertait plus qu’il ne les lisait, et les Espagnols, qui lui avaient inspiré le Cid. […] Un amour épisodique n’inspirera pas au poète un langage touchant, pathétique, durable, et s’il l’emploie comme embellissement, il risque de ne donner qu’une image bientôt surannée de la manière dont on comprenait l’amour de son temps.

778. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre VII. La littérature et les conditions économiques » pp. 157-190

Comme le dit fort bien Guillaume de Greef dans son Introduction à la sociologie 58 : « L’inaction libre ou forcée est la condition sine qua non de l’art ; à la différence du producteur ordinaire, l’artiste travaille irrégulièrement, à ses heures, c’est-à-dire quand le repos l’a rendu sensible et irritable… ; c’est dans cet état nerveux que l’homme de génie inconscient et véritablement inspiré enfante ces créations en apparence subites et spontanées, mais, en réalité, jaillies d’une lente et considérable épargne d’accumulation d’énergie. » Aussi y a-t-il une liaison perpétuelle entre l’état plus ou moins prospère d’un pays et les œuvres auxquelles ce pays donne naissance. […] A un siècle et demi de distance, les mêmes causes ont produit les mêmes effets ; tant il est vrai qu’une société ne peut se passionner pour l’agriculture sans faire naître aussitôt, comme autant de fleurs champêtres, une quantité d’œuvres inspirées par la vie des champs ! […] Après le règne de Louis XIV, on s’avise que de grands écrivains font autant pour la gloire d’un peuple que de grands capitaines ou de grands diplomates ; on s’aperçoit que les Corneille, les Molière, les Racine ont opéré des conquêtes plus durables que celles du grand roi, et si Voltaire peut traiter presque d’égal à égal avec des têtes couronnées, en sa qualité de roi de l’opinion publique, s’il a des correspondants et des flatteurs parmi les souverains d’Europe, il doit en partie ce prestige au souvenir de ses illustres devanciers, à l’admiration qu’ils ont inspirée, à la haute idée qu’ils ont donnée des droits sacrés du génie.

779. (1887) Revue wagnérienne. Tome II « Paris, le 8 mai 1886. »

MM. d’Indy et Chabrier ; et d’autres avec eux, par les théories et les œuvres Wagnériennes ont appris à répudier la loi du poème à forme fixe ; leur esprit s’est habitué à un développement libre des émotions ; et, en même temps qu’ils s’inspiraient de la forme dramatique Wagnérienne, ils s’inspiraient (justement), de la langue Wagnérienne. […] Nous avons toujours vu telle expression de la face, telle couleur ou tels contours accompagner tels objets qui nous inspiraient, par d’autres motifs, telle ou telle émotion : voici ces couleurs, et ces contours, et ces expressions, liés dans notre âme à ces émotions ; et les voici devenus, non plus seulement les signes de sensations visuelles, mais les signes, aussi, de nos émotions ; les voici devenues, par le hasard de cette liaison, et comme les syllabes de la poésie, comme les notes de la musique, des signes émotionnels.

780. (1888) Revue wagnérienne. Tome III « III »

Mais si l’auteur de Lohengrin, au point de vue général, a reçu le sujet de son œuvre des poèmes déjà écrits en langue française il en a eu également le résumé dans les chants des autres minnesinger germains, eux-mêmes inspirés de nos trouvères. […] Devant la menace de Klingsor, il reste grave et immobile, et c’est avec un enthousiasme inspiré qu’il brandit la sainte lance et qu’il quitte le jardin, vainqueur. […] A la rigueur inspirée du théâtre antique et la revendication d’un accès populaire au théâtre, se dressent les dorures et les velours, les petites loges intimes et la mise en valeur du corps de ballet, pour le plaisir des bons abonnés qui entretenaient une danseuse.

781. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Lettres de m. l’Abbé Sabatier de Castres ; relatives aux trois siecles de la littérature françoise.ABCD » pp. -641

C'est ce souvenir qui ne cessera de m'inspirer des égards pour vos sentimens, & des procédés conformes à ma reconnoissance. […] Sous ce dernier titre, Votre Majesté ne pourra qu’applaudir au zele qui m’a inspiré dans l’exposé des Trois Siecles de notre Littérature, & dans la censure des travers philosophiques, qui dégradent les Lettres parmi nous. […] J'aurois peut-être dû m'épargner à moi-même la honte d'être descendu jusqu'à répondre à un tel Calomniateur ; mais j'ai jugé qu'il étoit nécessaire de détruire, dans l'esprit de ceux qui le connoissent personnellement, les préventions que la gravité de son caractere & de son âge auroit pu inspirer en faveur de son imputation ; & dès-lors, par amour pour la vérité & par respect pour les Honnêtes Gens qui la cherchent de bonne foi, je me suis abstenu de lui marquer le mépris que je lui devois.

782. (1862) Les œuvres et les hommes. Les poètes (première série). III « M. Victor Hugo. Les Contemplations. — La Légende des siècles. »

Pour notre compte, nous aurions mieux aimé nous occuper d’autre chose ; mais nous avons été accusés d’avoir fait une mauvaise action en parlant, avec la tristesse qu’inspire M.  […] Hugo n’est qu’une imposture, et que son air effaré, qu’il croit inspiré, n’est qu’une odieuse grimace devant un miroir. […] Prenez les pièces les plus belles de La Légende des siècles, inspirées toutes, plus ou moins, par le Moyen Age ou ce qui en reste (il y a bien du Moyen Age dans Le Régiment du baron Madruce), et comparez-les tranquillement à celles dans lesquelles le monde moderne a mis son panthéisme, son humanitarisme, son progrès illimité et tous ses amphigouris sur les êtres, la substance, l’avenir et les astres, et vous aurez bientôt jugé.

783. (1908) Les œuvres et les hommes XXIV. Voyageurs et romanciers « Victor Hugo »

IV Le Shakespeare, il est vrai, n’était que de la critique, et l’on sait combien peu Victor Hugo est organisé pour en faire… La fameuse préface du Cromwell n’était point de la critique ; c’était une proclamation romantique, inspirée par les guerres du temps. […] VI Dans un article d’examen sur la Lucrèce Borgia d’Hugo, qui n’a inspiré le premier jour que de la curiorité, sans enthousiasme, et le lendemain que les grandes phrases d’une critique sans indépendance, nous avons touché cette question des Borgia, qui n’est plus à présent qu’une mystification de l’Histoire. […] C’est la trahir que d’inspirer, comme vient de le faire Hugo, de l’intérêt et de l’admiration pour ces choses scélérates et ces hommes scélérats, les hommes et les choses de la monarchie !

784. (1900) Le rire. Essai sur la signification du comique « Chapitre I. Du comique en général »

Je ne veux pas dire que nous ne puissions rire d’une personne qui nous inspire de la pitié, par exemple, ou même de l’affection : seulement alors, pour quelques instants, il faudra oublier cette affection, faire taire cette pitié. […] Un personnage de tragédie ne changera rien à sa conduite parce qu’il saura comment nous la jugeons ; il y pourra persévérer, même avec la pleine conscience de ce qu’il est, même avec le sentiment très net de l’horreur qu’il nous inspire. […] Par la crainte qu’il inspire, il réprime les excentricités, tient constamment en éveil et en contact réciproque certaines activités d’ordre accessoire qui risqueraient de s’isoler et de s’endormir, assouplit enfin tout ce qui peut rester de raideur mécanique à la surface du corps social.

785. (1868) Curiosités esthétiques « V. Salon de 1859 » pp. 245-358

Tout le monde sait que le jaune, l’orangé, le rouge, inspirent et représentent des idées de joie, de richesse, de gloire et d’amour ; mais il y a des milliers d’atmosphères jaunes ou rouges, et toutes les autres couleurs seront affectées logiquement et dans une quantité proportionnelle par l’atmosphère dominante. […] Il verse tour à tour sur ses toiles inspirées le sang, la lumière et les ténèbres. […] Je me surprends à envier le sort de ces hommes étendus sous ces ombres bleues, et dont les yeux, qui ne sont ni éveillés ni endormis, n’expriment, si toutefois ils expriment quelque chose, que l’amour du repos et le sentiment du bonheur qu’inspire une immense lumière. […] Il est certain que tout cet ordre et toute cette harmonie n’en gardent pas moins la qualité inspiratrice qui y est providentiellement déposée ; mais, dans ce cas, faute d’une intelligence qu’elle pût inspirer, cette qualité serait comme si elle n’était pas. Les artistes qui veulent exprimer la nature, moins les sentiments qu’elle inspire, se soumettent à une opération bizarre qui consiste à tuer en eux l’homme pensant et sentant, et malheureusement, croyez que, pour la plupart, cette opération n’a rien de bizarre ni de douloureux.

786. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Gui Patin. — I. » pp. 88-109

Gui Patin fit ou inspira un pamphlet pour critiquer et mettre en pièces cette Requête ; et Renaudot de nouveau riposta, en attendant que l’affaire fût jugée devant le Parlement. […] La Faculté, au contraire, protestait contre toute idée d’imitation et soutenait que, dans cet essai de bonne œuvre publique, elle n’avait eu à s’inspirer que d’elle-même et de son amour du bien.

787. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Roederer. — III. (Fin.) » pp. 371-393

Dans le principe, Roederer avait compté travailler directement avec le consul, s’inspirer de son esprit, et justifier devant lui de ses idées. […] L’émulation de supériorité inspirée par l’égalité de droits, c’est ainsi qu’il définit l’esprit de la France.

788. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Étienne de La Boétie. L’ami de Montaigne. » pp. 140-161

La Boétie a été la passion de Montaigne ; il lui a inspiré son plus beau chapitre, ou du moins son plus touchant ; leurs deux noms sont à jamais inséparables, et sitôt qu’on parle d’amitié, on les rencontre des premiers, on les cite inévitablement, de même que lorsqu’on parle de l’amour d’une mère pour sa fille, on nomme Mme de Sévigné. […] Que d’autres craignent cet homme d’un seul livre : pour moi, quand c’est M. le docteur Payen, bien au contraire, je le cherche, j’aime à le voir d’abord et à le consulter ; et ce respect affectueux qu’il ressent pour l’objet de son étude, aisément lui-même il l’inspire. — M. 

789. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Duclos. — II. Duclos historien » pp. 224-245

Charles, dit l’abbé Le Grand, était doux, facile, adonné à ses plaisirs et tellement livré à ses favoris et à ses maîtresses qu’il ne pouvait avoir d’autres passions ni d’autres sentiments que ceux qu’ils lui inspiraient. […] Le duc de Bourgogne était le seul pour qui elle employât le mot de monsieur, parce que son maintien sérieux n’inspirait pas la familiarité ; au lieu que la duchesse de Bourgogne faisait à Mlle Choin les mêmes petites caresses qu’à Mme de Maintenon.

790. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « [Chapitre 5] — II » pp. 112-130

Il y aurait puisé de grands modèles, et le monde ne lui a inspiré que la mode actuelle. […] La seule vérité historique que je tiens à marquerk, c’est que les deux frères appartiennent à des familles d’hommes politiques toutes différentes et même opposées, l’un étant de ceux qui vont au fond des objets et aspirent à un but réel et constant, l’autre de ceux qui s’en tiennent en tout aux expédients, et s’inspirent uniquement de la circonstance.

791. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Œuvres de Louise Labé, la Belle Cordière. »

Y aurait-il eu un jour, une heure où, regardant au fond de ce cœur trop confiant en sa flamme, elle l’eut trouvé changé, refroidi, presque méconnaissable, et aurait-elle jamais consenti, condescendu par degrés au sentiment doucement attristé qui inspira à de plus humbles et à de plus résignées des vers comme ceux-ci : Serait-ce un autre cœur que la Nature donne A ceux qu’elle préfère et destine à vieillir ? […] J’y lis tout à côté de belles et dignes Stances à Alfred de Musset, ce frère puîné de Louise Labé ; écrites au lendemain même de sa mort, elles sont toutes pénétrées de son immortel sanglot ; en voici quelques notes vibrantes : Parmi nous maint poëte à la bouche inspirée Avait déjà rouvert une source sacrée ; Oui, d’autres nous avaient de leurs chants abreuvés ; Mais le cri qui saisit le cœur et le remue, Mais ces accens profonds qui d’une lèvre émue Vont à l’âme de tous, toi seul les as trouvés.

792. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Gavarni. »

Un souffle de Fragonard, de Watteau, l’a inspiré à son tour, ou plutôt il n’a obéi qu’à la fée intérieure. […] De projets de bonheur la calèche était pleine ; Nul ne sait quels regards venaient s’y caresser, Ni de quelle main blanche on ôtait la mitaine Pour cueillir un premier baiser ; Ni quelles voix ont fait de ces aveux qu’inspire L’ombrage parfumé des arbres défendus.

793. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Théophile Gautier. »

Ici la forme est inspirée du Moyen-Age, de sa mythologie et des images de la mort qui lui sont familières. […] Une des productions les plus poétiques de Théophile Gautier et qui, par son tour et sa hardiesse, est encore inspirée du Moyen-Age, — du Moyen-Age irrévérent et en pleine décadence, — c’est la saynète qui a pour titre une Larme du Diable (1839).

794. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Anthologie grecque traduite pour la première fois en français et de la question des Anciens et des Modernes »

C’est là-dessus qu’André Chénier travailla et s’inspira dans son retour à l’antique. […] Dans les tons riants et doux, quel plus gracieux et plus engageant appel que cet avis aux navigateurs, qui réveille dans nos esprits le souvenir des odes printanières d’Horace (Solvitur acris hyems… Diffugere nives…), et qui les a précédées, peut-être inspirées : « C’est la saison de prendre la mer, car déjà la babillarde hirondelle est revenue, et le gracieux zéphire ; les prairies fleurissent, la mer se tait, hier encore toute hérissée de vagues au souffle des vents ; lève l’ancre, matelot, détache les amarres et navigue à toutes voiles.

795. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Entretiens sur l’architecture par M. Viollet-Le-Duc (suite et fin.) »

Mais c’est surtout pour le dedans qu’elle est faite, c’est par le dedans qu’elle a grandi, et c’est par là aussi qu’elle doit être vue ; ces églises sont bâties pour des fidèles qui y entrent et qui y prient ; les vitraux, ternes au-dehors, ne s’illuminent et n’ouvrent leurs rosaces mystérieuses qu’au-dedans ; jamais monument sacré ne fut plus conforme au génie qui l’inspira, à la foi qui s’y nourrit et s’y enflamme, à la dévotion qui s’y prosterne et y adore. […] Viollet, c’est d’abord qu’on ne prenne pas l’antique pour le transporter, tel quel, chez nous, sans motif, sans égard à tout ce qui diffère profondément entre des sociétés si dissemblables ; et de notre passé à nous, de notre ancienne architecture nationale, il veut qu’on n’en prenne que ce qui s’applique à nos mœurs actuelles, à notre objet, aux matériaux dont nous nous servons, et surtout qu’on s’inspire du bon sens extraordinaire dont ces vieux architectes du XIIIe siècle ont fait preuve.

796. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Madame Roland, ses lettres à Buzot. Ses Mémoires. »

Rousseau est le plus grand original et qui ne se modèle sur personne, qui ne s’inspire que de lui : aussi deviendra-t-il vite un modèle, et il mordra d’autant plus au vif sur la fibre humaine moderne qu’il est un pur moderne lui-même. […] Va, je suis pénétrée de ton courage, honorée de ton attachement et glorieuse de tout ce que l’un et l’autre peuvent inspirer à ton âme fière et sensible.

797. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Le Général Franceschi-Delonne : Souvenirs militaires, par le général baron de Saint-Joseph. »

Le respect qu’il inspirait autour de lui ne permettait pas d’aller au fond de ses pensées. […] Le propre du général Franceschi était d’inspirer des affections vraies et durables.

798. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Lamartine — Lamartine »

Vous vous dites sans cesse inspirés par les cieux, Et vous ne frappez plus notre oreille, nos yeux, Que par le seul tableau des choses de la terre ; Quelques traits copiés de l’ordre élémentaire.  […] D’autres sont plus amants que poètes : un amour particulier les inspire, les arrache de terre, les élève à la poésie ; cet amour mort en eux, il convient qu’ils s’ensevelissent aussi et qu’ils se taisent.

799. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « M. CHARLES MAGNIN (Causeries et Méditations historiques et littéraires.) » pp. 387-414

Il y a mieux : pour lui, si je ne me trompe, cette grâce, cette aisance de rédaction qui le distiguent, doivent quelquefois déterminer, inspirer, guider la recherche par l’idée d’en faire usage. […] Pourtant, encore une fois, c’est moins au nom de cette perspective, toujours si pâle et si mêlée d’ombres, qu’il faut s’adresser au vrai critique et le convier à ne pas cesser ; la vérité voilà ce qui l’inspire, la vérité littéraire, le plaisir de la dire avec piquant ou avec détour, l’amour d’une étude courante et animée.

800. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Madame de Krüdner et ce qu’en aurait dit Saint-Évremond. Vie de madame de Krüdner, par M. Charles Eynard »

» Elle cherchait évidemment l’amour ; elle cherchait à le ressentir, surtout à l’inspirer ; elle en aimait la montre et le jeu. […] Quoi qu’il en soit, il paraît bien que ce ne fut qu’à Copenhague, où elle alla en quittant Venise, que la jeune ambassadrice fut entièrement éclairée sur le genre de sentiment qu’elle avait inspiré à M. de Stakieff.

801. (1869) Cours familier de littérature. XXVII « CLXIe Entretien. Chateaubriand »

Ce bruit ne m’inspirait aucune envie de m’y mêler. […] XIII Il avait employé son temps à la fréquentation de quelques émigrés comme lui et à la rédaction d’une œuvre sérieuse inspirée par la Révolution française et intitulée Essai sur les Révolutions ; c’était un tâtonnement de son génie.

802. (1869) Cours familier de littérature. XXVIII « CLXVIIIe entretien. Fénelon, (suite) »

Après ce que lui inspire le plus ardent désir de soulager ceux qui souffrent, il a mieux que le remède ou l’aumône, il a son regard, un mot tendre, un soupir, une larme. […] XXXV Le culte et la vénération que son nom inspirait traversaient ces lignes ennemies que nos armes ne savaient plus rompre.

803. (1886) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Deuxième série « Anatole France »

Son âme avide et tendre, Que le siècle brutal fatigua sans retour, Cherche entre ces esprits indulgents à qui tendre L’ardente et lourde fleur de son dernier amour… Et Leuconoé goûte éperdument les charmes D’adorer un enfant et de pleurer un dieu… Et nous aussi nous les aimons, ces femmes, et, parce qu’elle les a consolées et qu’elle console encore les âmes en peine, la religion de Jésus continue d’inspirer à beaucoup de ceux qui ne croient plus une tendresse incurable. […] De même que la Leuconoé aux inquiétudes ineffables, l’âme moderne, « consulte tous les dieux », non plus pour y croire comme la courtisane antique, mais pour comprendre et vénérer les rêves que l’énigme du monde a inspirés à nos ancêtres et les illusions qui les ont empêchés de tant souffrir.

804. (1889) Histoire de la littérature française. Tome III (16e éd.) « Chapitre douzième. »

Comparaison entre l’époque où La Bruyère prend ses portraits et celle qui a inspiré La Rochefoucauld. — § IV. […] Comparaison entre l’époque où La Bruyère prend ses portraits et celle qui a inspiré La Rochefoucauld.

805. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre IX. La littérature et le droit » pp. 231-249

Elle inspire à l’implacable apôtre de la rédemption par le sang, à ce catholique si peu chrétien que fut Joseph de Maistre, des pages rouges et sombres comme le manteau de ce bourreau dont il fait un être providentiel et l’une des pierres angulaires de la société. […] Pouvant s’adresser directement à un grand nombre de personnes, plus vivante, plus immédiate dans ses effets que l’article de journal, elle a été la dernière à triompher de la peur qu’elle inspire.

806. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre XII. La littérature et la religion » pp. 294-312

Ainsi depuis 1830, en notre siècle où les courants contraires se sont succédé avec rapidité, où les vagues d’idées ont été, pour ainsi dire, plus courtes, on compte en moins de cinquante ans trois de ces coalitions avec les forces de résistance ; l’une après la première explosion de socialisme qui menaça la société bourgeoise, c’est-à-dire au lendemain des journées de juin 1848 ; l’autre après la seconde grande levée du prolétariat, lors de la Commune de 1871 ; la troisième enfin qui a commencé de 1885 à 1890 et qui dure encore, causée par les craintes que le progrès des nouvelles théories sociales inspire aux détenteurs des derniers privilèges. […] On est souvent étonné que le xviie  siècle, siècle de foi, surtout si on le compare au nôtre, n’ait pas inspiré d’éloquentes méditations religieuses comme celles de Lamartine et que la plupart des vers dévots, nés alors, soient d’une glaciale froideur ou même d’une remarquable platitude.

807. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre XVIII. Formule générale et tableau d’une époque » pp. 463-482

Tous les écrivains s’en inspirent, sauf trois ou quatre exceptions. […] Le bon sens est sa Muse, et s’il lui inspire des ouvrages bien ordonnés, des vers solides et pleins qui deviennent facilement proverbiaux, il ne peut, hélas !

808. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « La duchesse du Maine. » pp. 206-228

L’admiration, l’enthousiasme dont il était saisi, lui inspirait des expressions qui répondaient à la mâle et harmonieuse énergie des vers grecs, autant qu’il est possible d’en approcher dans la prose d’une langue à peine tirée de la barbarie… Cependant M. de Malezieu, par des efforts que produisait un enthousiasme subit, et par un récit véhément, semblait suppléer à la pauvreté de la langue, et mettre dans sa déclamation toute l’âme des grands hommes d’Athènes. […] Malgré ce goût de l’esprit et des gens qui en avaient le plus, on ne saurait dire pourtant que l’influence de la cour de Sceaux ait été profitable aux lettres, ni qu’elle ait rien inspiré.

809. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Madame Émile de Girardin. (Poésies. — Élégies. — Napoline. — Cléopâtre. — Lettres parisiennes, etc., etc.) » pp. 384-406

Oui, me répète avec conviction un témoin aimable et des plus spirituels de ce moment, oui, elle était à la fois belle, simple, inspirée comme la Muse, rieuse et bonne enfant (c’est le mot unanime), et telle qu’elle a peint plus tard sa Napoline, c’est-à-dire encore elle-même,         Naïve en sa gaieté, rieuse et point méchante ; disant les vers avec élégance et un air de grandeur comme elle les faisait alors. […] Représentez-vous à une grande soirée de la duchesse de Duras, ou mieux à une brillante matinée du château de Lormois, chez la duchesse de Maillé, en plein soleil d’été, cette enfant rieuse, avec sa profusion de cheveux blonds et ce luxe de vie qui donne la joie, échappée dans le parc, bondissant et courant, puis rappelée tout à coup, et dans le plus élégant des salons, devant le plus recherché des mondes, récitant des vers d’un air grave, avec un front d’inspirée, un profil légèrement accusé de Muse antique, avec un timbre de voix précis et sonore, récitant ou un chant de Madeleine, ou son élégie (tant de fois refaite) sur Le Bonheur d’être belle, et dites s’il n’y avait pas de quoi rendre les armes et de quoi être ébloui.

810. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Madame de La Vallière. » pp. 451-473

La modestie, la grâce, une grâce simple et ingénue, un air de pudeur qui gagnait l’estime, inspiraient et disposaient à ravir tous ses mouvements. […] Ceux qui ont écrit le récit de sa vie pénitente se sont plu à en citer des exemples singuliers, qui nous toucheraient trop peu aujourd’hui ; mais le principe qui les lui inspirait, et le but dont elle s’approchait par ces moyens, sont à jamais dignes de respect dans tous les temps, et de quelque point de vue qu’on les envisage : « J’espère, je crois et j’aime, disait-elle ; c’est à Dieu à perfectionner ses dons. » — « Espérer et croire, ce sont deux grandes vertus ; mais qui n’a point la charité n’a rien : il est comme une plante stérile que le soleil n’éclaire point. » Cette belle âme, réalisant désormais en elle les qualités de l’amour divin, se considéra jusqu’à la fin comme l’une des dernières devant Dieu : Je ne lui demande pas, disait-elle, de ces grands dons qui ne sont faits que pour les grandes âmes qu’il a mises dans le monde pour l’éclairer, je ne pourrais pas les contenir ; mais je lui demande qu’il incline mon cœur, selon sa parole, à rechercher sa loi, à la méditer nuit et jour.

811. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Hégésippe Moreau. (Le Myosotis, nouvelle édition, 1 vol., Masgana.) — Pierre Dupont. (Chants et poésies, 1 vol., Garnier frères.) » pp. 51-75

Dupont respirent à chaque page la reconnaissance que lui inspira un procédé si généreux et si soutenu de la part de son premier patron. […] Ici, nous le dirons avec franchise et avec l’estime que nous inspire sa nature foncièrement aimable et bienveillante, M. 

812. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Armand Carrel. — II. (Suite.) Janvier 1830-mars 1831. » pp. 105-127

« On ne peut attaquer par trop d’endroits à la fois une production pareille, disait Carrel en concluant sur Hernani, quand on voit par la préface des Consolations la déplorable émulation qu’elle peut inspirer à un esprit délicat et naturellement juste. » L’éloge ici rachète certes la critique, et, venant d’un esprit aussi rigoureux, il honore. […] C’est ce même sentiment d’une générosité presque confraternelle qui lui inspira (21 juillet) les quelques lignes par lesquelles il honora le trépas du jeune Amédée de Bourmont, tué au début de l’expédition, quand, à peu de jours de là, il avait été si inexorable et d’une mémoire si vengeresse contre le père.

813. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Rollin. » pp. 261-282

Pendant qu’il écrivait le premier tome de son Histoire ancienne, il était consulté par un grand seigneur belge, le duc d’Aremberg, sur le choix d’un précepteur : Jean-Baptiste Rousseau, alors établi à Bruxelles, servit d’intermédiaire dans cette négociation à laquelle Rollin apporta tout son zèle ; et cet excellent homme, poussant à bout son idée, écrivait à Rousseau : Il y a, dans le premier tome de mon Histoire, un endroit où j’ai été fort occupé de lui (le duc d’Aremberg) et de vous : c’est celui où je parle de Scipion Émilien, et je ne crois pas vous faire tort ni à l’un ni à l’autre en donnant à M. le duc le personnage et le caractère d’un aussi grand homme que Scipion, et à vous celui de Polybe qui ne contribua pas peu par ses conseils à inspirer à cet illustre Romain ces sentiments de générosité, etc. […] On s’explique donc comment, malgré sa modestie, sa candeur, et le respect universel qu’il inspirait, Rollin put être inquiété quelquefois.

814. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Bernardin de Saint-Pierre. — I. » pp. 414-435

— Paul et Virginie, dit-il encore dans un autre ouvrage, m’a accompagné dans les contrées dont s’inspira Bernardin de Saint-Pierre ; je l’ai relu pendant bien des années, avec mon compagnon et mon ami, M.  […] Ce sont ces affections qui, lorsque notre état leur est contraire, nous inspirent des constances inébranlables et nous livrent, au milieu de la foule, des luttes perpétuelles et malheureuses contre les autres et contre nous-même : mais, lorsqu’elles viennent à se développer dans des circonstances heureuses, alors elles font éclore des arts inconnus et des talents extraordinaires.

815. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Volney. Étude sur sa vie et sur ses œuvres, par M. Eugène Berger. 1852. — II. (Fin.) » pp. 411-433

Voilà l’éternelle morale qui avant et depuis Salomon, jusqu’à Sophocle, jusqu’à Cicéron, jusqu’à nous tous, se peut tirer du spectacle changeant des choses humaines, et il semble que, sauf le rajeunissement de l’expression, toujours possible à une âme sincère, les ruines de la ville de Zénobie, dévastée à la suite d’une guerre par l’empereur Aurélien, n’étaient guère de nature à inspirer d’autres pensées. […] Je le laisse parler lui-même le plus que je peux ; c’est le meilleur moyen de le faire connaître, car on le lit bien peu aujourd’hui : Lorsqu’en 1783, écrit-il, je partais de Marseille, c’était de plein gré, avec cette alacrité, cette confiance en autrui et en soi qu’inspire la jeunesse : je quittais gaiement un pays d’abondance et de paix pour aller vivre dans un pays de barbarie et de misère, sans autre motif que d’employer le temps d’une jeunesse inquiète et active à me procurer des connaissances d’un genre neuf, et à embellir, par elles, le reste de ma vie d’une auréole de considération et d’estime.

816. (1889) Écrivains francisés. Dickens, Heine, Tourguénef, Poe, Dostoïewski, Tolstoï « Henri Heine »

Tous les poètes ont parlé de l’amour ; personne ne s’est inspiré aussi violemment et d’une façon plus persévérante, de l’indignation ou du désespoir que cause une affection déçue. […] Il s’accable de mépris et d’indulgence, s’insulte et salit sa passion ; la folie de hasarder la paix de son cœur entre les mains traîtresses d’une femme, lui inspire de faux ricanements, et c’est quand son affection trompée, bourrelée et meurtrie lui rend l’âme le plus vide et le plus morne, qu’il s’ingénie à affiler contre sa tendresse et la perfidie de sa bien-aimée les plus jolis sarcasmes.

817. (1694) Des ouvrages de l’esprit

Quand une lecture vous élève l’esprit, et qu’elle vous inspire des sentiments nobles et courageux, ne cherchez pas une autre règle pour juger l’ouvrage ; il est bon, et fait de main d’ouvrier. […] Il doit au contraire éviter comme un écueil de vouloir imiter ceux qui écrivent par humeur, que le cœur fait parler, à qui il inspire les termes et les figures, et qui tirent, pour ainsi dire, de leurs entrailles tout ce qu’ils expriment sur le papier ; dangereux modèles et tout propres à faire tomber dans le froid, dans le bas, et dans le ridicule ceux qui s’ingèrent de les suivre : en effet, je rirais d’un homme qui voudrait sérieusement parler mon ton de voix, ou me ressembler de visage.

818. (1920) Action, n° 4, juillet 1920, Extraits

L’écrivain luxembourgeois d’extrême-gauche Pol Michels (1897-1956) s’inspire dans ses écrits du futurisme et de l’expressionnisme. […] Dans ses poèmes et ses récits, elle s’inspire de sources bibliques et orientales.

819. (1862) Les œuvres et les hommes. Les poètes (première série). III « M. Sainte-Beuve. Les Poésies de Joseph Delorme, Les Consolations, les Pensées d’août. »

Sainte-Beuve, alors poète et observateur, et inspiré pour son propre compte, n’imitait pas Chateaubriand ! […] Auguste Le Prévôt, où il est estompé dans une rêverie pieuse, à la nuance de laquelle il aurait dû s’arrêter, mais qu’il a forcée et trop forcée partout ailleurs ; dans la pièce qui commence par le vers : J’arrive de bien loin, et demain je repars ; idée charmante, inspirée par la famille, cette source de toute poésie intime ; dans Les Larmes de Racine, où l’on retrouve le détail secret, domestique, obscur, dans lequel M. 

820. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XXVIII. Des obstacles qui avaient retardé l’éloquence parmi nous ; de sa renaissance, de sa marche et de ses progrès. »

Trop au-dessous de ces grands intérêts, on voulait cependant les égaler ; on voulait mettre de petites choses modernes au niveau de ces grandes choses antiques qui nous étonnent par leur hauteur, et dont la distance augmente encore le respect qu’elles nous inspirent. […] Les grands objets inspirent de grandes idées ; il est impossible de n’être pas quelquefois sublime en parlant de Dieu, de l’éternité et du temps.

821. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Réception du père Lacordaire » pp. 122-129

L’orateur a été mieux inspiré, quand il nous a dit tout ce qu’aimait M. de Tocqueville, quand il nous l’a peint surtout dans sa retraite, dans la vie privée, dans l’union domestique, où il ne fut trompé que dans la mesure de bonheur qui surpassa encore son espoir et son vœu.

822. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « AUGUSTE BARBIER, Il Pianto, poëme, 2e édition » pp. 235-242

C’est l’Italie tout entière, sa tristesse de servitude et de tombeau, l’imagnificence de ses peintures aux murailles des palais et des temples que rien autre de grand ne remplit, sa foi en ruine, ses mains aux fers, sa noble mamelle que l’oisiveté flétrit ou que souille l’étranger, — c’est tout ce spectacle, amèrement beau, qui a inspiré le poëte ; de la blessure qu’une telle vue lui a causée sont nés à l’instant et, pour ainsi dire, ont ruisselé ses vers.

823. (1874) Premiers lundis. Tome I « Madame de Maintenon et la Princesse des Ursins — I »

« Il est vrai, écrit-elle, qu’on a de la peine à remuer toute cette machine ici ; mais on ne néglige rien pour la faire marcher. » Dès les premiers jours, elle s’est décidée contre les grands dans une querelle d’étiquette, et a inspiré au jeune roi une énergie qui a fait taire les vanités : elle comprend que la condescendance ne sauverait rien.

824. (1874) Premiers lundis. Tome I « Victor Hugo : Odes et ballades — I »

De tous ceux qui formaient la tribu sainte et militante à ses beaux jours d’ardeur et d’espérance, le plus indépendant, le plus inspiré, et aussi le plus jeune, était M. 

825. (1874) Premiers lundis. Tome I « Walter Scott : Vie de Napoléon Bonaparte — II »

Sir Walter Scott sait gré au jeune vainqueur du respect et de la pitié que lui inspira le guerrier à cheveux blancs, mais ce n’est pas sans ajouter quelque épigramme contre le coup de théâtre du manteau.

826. (1874) Premiers lundis. Tome I « A. de Lamartine : Harmonies poétiques et religieuses — II »

La vie de campagne, la vie patriarcale de famille dans ces belles provinces qu’arrose la Saône, les hautes herbes qui ploient sous l’aquilon, les bois dont le murmure et l’ombre sont au maître, les entretiens des pâtres autour des feux allumés, ces rayons de soleil couchant sur les fléaux, les socs de charrue et les gerbes des chars, ces ombres allongées des moulins monotones, toutes ces douces géorgiques de notre France ont une beauté forte et reposée qui égale à nos yeux la splendeur blanchissante du Golfe de Gênes et les autres tableaux enchantés que l’Italie a inspirés au poète.

827. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre VII. De la littérature latine, depuis la mort d’Auguste jusqu’au règne des Antonins » pp. 176-187

Sénèque (que je ne juge ici que par ses ouvrages), Tacite, Épictète, Marc-Aurèle, quoique dans des situations différentes, et avec des caractères que l’on ne peut comparer, furent tous inspirés par l’indignation contre le crime.

828. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome I « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Aristophane, et Socrate. » pp. 20-32

Cet oracle de Delphes, qui l’avoit nommé l’homme de la Grèce le plus sage ; cette fureur de décrier toutes les sectes, & de n’en avoir aucune ; cette antipathie pour tout ce qui étoit mode, agrémens, magnificence, plaisirs, fêtes ; ses goûts suspects ; ses tracasseries de ménage ; le prétendu démon duquel il se disoit inspiré ; tout, jusqu’à sa naissance & sa profession, fournissoit des armes contre lui.

829. (1906) La nouvelle littérature, 1895-1905 « Deuxième partie. L’évolution des genres — Chapitre V. Le mouvement régionaliste. Les jeunes en province » pp. 221-231

Léon Bocquet, l’auteur de Flandre, recueil de poèmes inspirés par le décor natal, a groupé autour du Beffroi une importante pléiade de poètes : MM. 

830. (1765) Essais sur la peinture pour faire suite au salon de 1765 « Tout ce que j’ai compris de ma vie du clair-obscur » pp. 26-33

Qu’il s’élève une vapeur qui attriste le ciel, et qui répande sur l’espace un ton grisâtre et monotone, tout devient muet, rien ne m’inspire ni ne m’arrête, et je ramène mes pas vers ma demeure.

831. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Seconde partie — Section 14, comment il se peut faire que les causes physiques aïent part à la destinée des siecles illustres. Du pouvoir de l’air sur le corps humain » pp. 237-251

Suivant qu’il est sérain ou qu’il est agité, suivant qu’il est vif ou qu’il est pesant, il inspire aux animaux une gaïeté où il les jette dans une langueur que la moindre attention rend sensible.

832. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « Gabrille d’Estrées et Henri IV »

Or, la gaîté qu’inspire un homme est toujours voisine du mépris.

833. (1905) Les œuvres et les hommes. De l’histoire. XX. « La défection de Marmont »

Une indignation générale qui n’est point apaisée a succédé à la curiosité inspirée par son livre, et certainement le silence du tombeau aurait mieux valu pour garder sa mémoire que la voix qui vient d’en sortir.

834. (1895) Les œuvres et les hommes. Journalistes et polémistes, chroniqueurs et pamphlétaires. XV « Edmond About » pp. 63-72

Telles sont les réflexions générales et très involontaires que nous a inspirées le livre d’Edmond About sur la Grèce contemporaine.

835. (1889) Les œuvres et les hommes. Les poètes (deuxième série). XI « Charles Monselet »

Ce recueil de vers, fait par un artiste toujours inspiré, n’a pas cependant partout la même valeur poétique, et, je vous en préviens, ce n’est pas de celui qui joue avec son talent et son style et qui, par exemple, a écrit ces fameux : Sonnets gastronomiques, — lesquels ne sont, par parenthèse, que de brillantes et charmantes difficultés vaincues — ce n’est pas de cet artiste que je veux vous parler.

836. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre premier. De la louange et de l’amour de la gloire. »

Mais quelquefois aussi c’est l’hommage que l’admiration rend aux vertus, ou la reconnaissance au génie ; et sous ce point de vue, elle est une des choses les plus grandes qui soient parmi les hommes : d’abord, par son autorité, elle inspire un respect naturel pour celui qui la mérite et qui l’obtient ; par sa justice, elle est la voix des nations qu’on ne peut séduire, des siècles qu’on ne peut corrompre ; par son indépendance, l’autorité toute-puissante ne peut l’obtenir, l’autorité toute-puissante ne peut l’ôter ; par son étendue, elle remplit tous les lieux ; par sa durée, elle embrasse les siècles.

837. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre VII. D’Isocrate et de ses éloges. »

D’abord, un des principaux mérites d’Isocrate, était l’harmonie ; on sait combien les Grecs y étaient sensibles ; nés avec une prodigieuse délicatesse d’organes, leur âme s’ouvrait par tous les sens à des impressions vives et rapides ; la mélodie des sons excitait chez eux le même enthousiasme que la vue de la beauté ; la musique faisait partie de leurs institutions politiques et morales ; le courage même et la vertu s’inspiraient par les sons.

838. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XXV. De Paul Jove, et de ses éloges. »

Enfin, pour connaître l’esprit de ce temps-là, il ne sera pas inutile d’observer que Paul Jove loue avec transport ce Pic de La Mirandole, l’homme de l’Europe, et peut-être du monde, qui à son âge eût entassé dans sa tête le plus de mots et le moins d’idées ; qu’il n’ose point blâmer ouvertement ce Jérôme Savonarole, enthousiaste et fourbe, qui déclamant en chaire contre les Médicis, faisait des prophéties et des cabales, et voulait, dans Florence, jouer à la fois le rôle de Brutus et d’un homme inspiré ; qu’enfin il loue Machiavel de très bonne foi, et ne pense pas même à s’étonner de ses principes : car le machiavélisme qui n’existe plus sans doute, et qu’une politique éclairée et sage a dû bannir pour jamais, né dans ces siècles orageux, du choc de mille intérêts et de l’excès de toutes les ambitions joint à la faiblesse de chaque pouvoir, fait uniquement pour des âmes qui suppléaient à la force par la ruse, et aux talents par les crimes, était, pendant quelque temps, devenu en Europe la maladie des meilleurs esprits, à peu près comme certaines pestes qui, nées dans un climat, ont fait le tour du monde, et n’ont disparu qu’après avoir ravagé le globe.

839. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre second. De la sagesse poétique — Chapitre VII. De la physique poétique » pp. 221-230

Examinons le trait sublime que Longin admire dans l’ode de Sapho, traduite par Catulle : le poète exprime par une comparaison les transports qu’inspire la présence de l’objet aimé, Ille mi par esse deo videtur, Celui-là est pour moi égal en bonheur aux dieux même....

840. (1932) Le clavecin de Diderot

Le surréalisme s’est attaqué, s’attaquera aux problèmes qui ne sont éternels que par la peur qu’ils n’ont cessé d’inspirer à l’homme. […] De misérables bicoques entassées sur des collines, voilà bien de quoi se réjouir, inspirer les pinceaux des vieilles anglo-saxonnes. […] Alors, le dépit d’inspirer aux idéalistes ce réalisme terre à terre, contrepoids aux extravagances des édens passés, des paradis futurs. […] Thaïs est le titre d’un roman d’Anatole France publié en 1890, inspiré du récit de la vie de sainte Thaïs. […] Quatrain inspiré du tableau éponyme de Manet.

841. (1859) Cours familier de littérature. VIII « XLVIIIe entretien. Littérature latine. Horace (2e partie) » pp. 411-480

Ces odes, distribuées selon leurs dates et selon les circonstances qui les ont inspirées, feraient revivre l’homme tout entier dans le poète. […] XV Il revient dans l’ode familière suivante à lui-même, et dit comment il devint favori de la muse légère : « Sur les rives du Vulturne, qui poursuit son cours au-delà de l’Apulie où je suis né, un jour que, fatigué par mes jeux et vaincu par le sommeil, des colombes prophétiques me parsemèrent d’un feuillage printanier ; ce prodige étonna ceux qui habitent le nid d’aigle escarpé du village d’Achérontie, les précipices boisés de Brantium, et ceux qui labourent les gras territoires de l’obscur Férente, émerveillés de ce que je sommeillais à l’abri des ours et des morsures des noires vipères, sans autre défense que les rameaux de myrte et de laurier, enfant à qui les dieux seuls pouvaient inspirer tant de confiance !  […] Hafiz est amoureux comme Salomon ; il prend ses images et ses couleurs dans la voluptueuse Arabie ; Horace ne les prend que dans ses modèles grecs ; Hafiz est un inspiré de l’amour et de la divinité ; Horace, tout parfait qu’il soit de style, n’est qu’un littérateur accompli de Rome ; le premier, original comme la nature ; le second, académique comme la cour d’Auguste.

842. (1862) Cours familier de littérature. XIII « LXXVIIe entretien. Phidias, par Louis de Ronchaud (2e partie) » pp. 241-331

C’est un jeu d’enfant ; et, si un philosophe recueilli a inventé l’écriture, si un oiseau inspiré a inventé la musique, si un opticien coloriste a inventé la peinture, nous pensons que la sculpture a été inventée par un enfant. […] Heureux les hommes qui ne sont accusés que de l’ivresse inspirée par le charme, cette sorcellerie du génie ! […] Les figures symboliques des dieux revêtent une majesté calme qui semble avoir été inspirée aux artistes par le spectacle de la nature.

843. (1865) Cours familier de littérature. XX « CXVIe entretien. Le Lépreux de la cité d’Aoste, par M. Xavier de Maistre » pp. 5-79

Maman avait été assez liée avec elle pour connaître son caractère : ayant très innocemment inspiré du goût à quelqu’un sur qui Mme de Menthon avait des prétentions, elle resta chargée auprès d’elle du crime de cette préférence, quoiqu’elle n’eût été ni recherchée ni acceptée ; et Mme de Menthon chercha depuis lors à jouer à sa rivale plusieurs tours, dont aucun ne réussit. […] La délicieuse tranquillité qu’inspire un bonheur certain était empreinte sur leurs belles physionomies ; ils marchaient lentement ; leurs bras étaient entrelacés. […] Il n’y a ni à réfléchir, ni à s’extasier ; il n’y a qu’à tomber à genoux devant cet interprète de la douleur suprême, et à verser autant de larmes qu’il y a de mots. — Comment a-t-il pu écrire cette prose de Job, de Job sur son fumier, sans être inspiré par celui qui a fait du cœur humain (dit-on) le clavier de la douleur ?

844. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre III. Les grands artistes classiques — Chapitre VI. Bossuet et Bourdaloue »

Il inspira la Déclaration de 1682, formulant les libertés de l’Église gallicane : indépendance des rois au temporel ; infaillibilité de l’Église universelle, et non du pape ; primauté du pape, mais égalité essentielle des évêques, comme ses pairs et successeurs directs des apôtres. […] Fénelon, ultramontain, ami des Jésuites, avait la faveur de la cour de Rome : Bossuet, gallican, eut besoin d’avoir évidemment raison, et surtout d’avoir de son côté la peur qu’inspirait le roi. […] Bossuet n’allègue guère que l’Écriture pour autoriser ses préceptes ; en fait, il tire quelque chose de saint Thomas, dans son De regimine principum ; il s’inspire plus encore d’Aristote et de Hobbes ; souvent il dégage des lois de l’étude des faits, et il utilise les observations qu’il a faites en expliquant au Dauphin l’histoire de France.

845. (1889) Histoire de la littérature française. Tome II (16e éd.) « Chapitre cinquième. De l’influence de certaines institutions sur le perfectionnement de l’esprit français et sur la langue. »

Le dernier surtout, par l’élégance précoce et la pureté originale de son style, lui avait inspiré une sorte de culte ; il se décidait avec peine à tenir pour bonne une phrase qui n’eût pas été employée dans l’Histoire romaine de Coeffeteau. […] Il faut parler de ces choses avec réserve, et ne pas prendre feu, par un excès de délicatesse littéraire, contre la pensée qui a inspiré ces changements. […] On l’émancipe, pour ainsi dire, selon l’esprit de Descartes, qui souffle dans toutes les pages de cette Logique, et qui en a inspiré le langage.

846. (1772) Bibliothèque d’un homme de goût, ou Avis sur le choix des meilleurs livres écrits en notre langue sur tous les genres de sciences et de littérature. Tome I « Bibliotheque d’un homme de goût. — Chapitre III. Poëtes françois. » pp. 142-215

L’objet de l’auteur est d’inspirer la vertu, en déclarant la guerre aux vices de la société. […] Il cherche moins à peindre des ridicules, qu’à inspirer l’humanité. […] Il y a d’autres tirades inspirées par les Muses.

847. (1900) Le rire. Essai sur la signification du comique « Chapitre III. Le comique de caractère »

Enfin (et c’est ici le point essentiel), l’action est exactement proportionnée au sentiment qui l’inspire ; il y a passage graduel de l’un à l’autre, de sorte que notre sympathie ou notre aversion peuvent se laisser glisser le long du fil qui va du sentiment à l’acte et s’intéresser progressivement. […] Issue de la vie sociale, puisque c’est une admiration de soi fondée sur l’admiration qu’on croit inspirer aux autres, elle est plus naturelle encore, plus universellement innée que l’égoïsme, car de l’égoïsme la nature triomphe souvent, tandis que c’est par la réflexion seulement que nous venons à bout de la vanité. […] Mais il ne suit pas de là que le rire frappe toujours juste, ni qu’il s’inspire d’une pensée de bienveillance ou même d’équité.

848. (1817) Cours analytique de littérature générale. Tome II pp. 5-461

Au contraire, si vous parcourez les annales des autres nations, vous y rencontrerez de loin en loin des traces du génie isolé de quelques auteurs inspirés par la nature, et luttant contre la sourde ignorance de leur siècle. […] Votre indulgence, qui peut-être eût rassuré tout autre, m’a inspiré plus de crainte que de confiance en moi-même. […] Ce travers, le ton qui l’accompagne, n’ont-ils pas même certaine bonne grâce qu’inspire le beau sexe à tous ceux qui l’approchent ? […] Ces deux contraires peuvent seuls rivaliser l’un avec l’autre, par l’horreur pareille qu’ils inspirent, et le désordre égal qu’ils jettent dans le monde. […] Telle est l’expression d’un caractère principal ; car elle sort du fonds de probité d’un homme à qui les dérèglements publics inspirent la misanthropie.

849. (1874) Portraits contemporains : littérateurs, peintres, sculpteurs, artistes dramatiques

B. : quoique très-sobre et abstème d’habitude, Balzac ne craignait pas de temps à autre « un tronçon de chière lie » ; il mangeait avec une joviale gourmandise qui inspirait l’appétit, et il buvait d’une façon pantagruélique. […] Macbeth, qu’on jouait alors, lui inspirait une véritable frénésie d’admiration, et il dut plus d’une fois en nous accompagnant inquiéter les policemen, protecteurs de la tranquillité nocturne, par la fougue de ses tirades soutenues de gestes convulsifs. […] Grosse joie sans doute, inspirée par le vin bleu et la charcuterie, mais honnête après tout, car la famille est là, et ces fillettes qu’on embrasse et dont on chiffonne un peu la robe de guingan faite par elles-mêmes, savent bien que leurs amants seront leurs maris. […] Puis l’on se quitta en se serrant la main avec cette force qu’inspire l’idée qu’on se rencontre pour la dernière fois peut-être. […] J’aurais peur d’être taxé d’exagération en disant que la vue de cette peinture me rendit malade et m’inspira la nostalgie de l’Orient, où je n’avais jamais mis le pied.

850. (1911) Études pp. 9-261

Jamais chez Baudelaire les images ne foisonnent sur place ainsi que chez les inspirés. […] Le plus souvent elle est debout, dans l’attitude des végétaux et des êtres qu’inspire la nature. […] Ce sont les mouvements de son âme qui soulèvent ses phrases et leur inspirent d’errer. […] Point d’autre entente que celle inspirée par l’unité de l’âme où tout se passe. […] C’est sans doute l’impression de cette horizontalité qui inspira à M. 

851. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Alexis Piron »

Si l’on n’v trouve pas un certain intérêt de cœur, il y a un intérêt d’esprit qui le remplace  La pure imagination ne fut jamais si heureuse. » Ce jour-là, jour bien inspiré, Piron se montra en vers de l’école de Régnier, de Molière, de Regnard. […] Son air aveugle lui donnait la physionomie d’un inspiré qui débite des oracles satiriques, non de son cru, mais par quelque suggestion étrangère. […] Ce buste, le premier de ceux qui furent donnés à la Comédie-Française, et qui inaugura cette curieuse galerie des auteurs dramatiques, est en effet des plus beaux : quelque chose de libre, de négligé, de malicieux et d’inspiré. […] C’est bien l’inspiré dont Grimm a parlé, et qu’une pointe de demi-vin ou d’ivresse de gaîté anime.

852. (1864) Cours familier de littérature. XVII « CIe entretien. Lettre à M. Sainte-Beuve (1re partie) » pp. 313-408

La vue de jeunes et brillants talents qui s’épanouissent lui inspire, non pas de l’envie, il n’en eut jamais ! […] Et qu’il enviait au divin poète d’avoir pu dire, parlant à sa lyre tant chérie : Des partis l’haleine glacée Ne t’inspira point tour à tour : Aussi chaste que la pensée, Nul souffle ne t’a caressée, Excepté celui de l’amour ! […] Voici ces vers que je suis parvenu à vous griffonner en trois jours sur les idées que votre épître délicieuse m’avait inspirées quand je la reçus, et qui étaient ensevelis et effacés sur mon album au crayon… « Pardonnez-moi de vous répéter en vers mes injures poétiques sur quelques morceaux de Joseph Delorme ; vous verrez qu’elles sont l’ombre de la lumière qui environnera son nom. […] Que le bonheur vous inspire aussi bien que les chagrins et la pénitence : ce sera une double satisfaction pour ceux qui vous aiment. » Lamartine.

853. (1864) Cours familier de littérature. XVIII « CVIIIe entretien. Balzac et ses œuvres (3e partie) » pp. 433-527

Cette préparation, si prisée par quelques gourmets, paraît rarement à Tours sur les tables aristocratiques ; si j’en entendis parler avant d’être mis en pension, je n’avais jamais eu le bonheur de voir étendre pour moi cette brune confiture sur une tartine de pain ; mais elle n’aurait pas été de mode à la pension, mon envie n’en eût pas été moins vive, car elle était devenue comme une idée fixe, semblable au désir qu’inspiraient à l’une des plus élégantes duchesses de Paris les ragoûts cuisinés par les portières, et qu’en sa qualité de femme, elle satisfit. […] J’entrai dans une horrible défiance de moi-même, en trouvant là les répulsions que j’inspirais en famille. […] Sa coquetterie était devenue un mystère, elle faisait rêver au lieu d’inspirer l’attention galante que sollicitent les femmes, et laissait apercevoir sa première nature de flamme vive, ses premiers rêves bleus, comme on voit le ciel par des éclaircies de nuages. […] Enfin, nous étions liés par ce terrible baiser, espèce de secret qui nous inspirait une honte mutuelle.

854. (1925) La fin de l’art

Il faut y joindre le Supplément au Voyage de Bougainville, qui est bien la chose la plus divertissante qu’ait jamais inspirée la philosophie et qu’il faudrait mettre au rang des contes de Voltaire. […] Comme elle était fort jolie, on lui trouva l’air inspiré dès qu’elle chanta et sa poésie passa d’abord pour aussi belle que ses beaux cheveux blonds. […] Mais, et c’est là ce que je voulais dire, le ton lâché d’une correspondance peut venir aussi de la qualité du correspondant et du genre d’amitié qu’il inspire. […] Un médecin guérit ou améliore souvent l’état d’un malade par la confiance qu’il inspire plus que par les remèdes qu’il prescrit.

855. (1881) La parole intérieure. Essai de psychologie descriptive « Chapitre III. Variétés vives de la parole intérieure »

La parole intérieure inspirée, propre aux poètes qui croient écrire sous la dictée de la Muse, doit être rattachée à la parole intérieure dramatique. […] Dans les passages où Xénophon nous parle de l’oracle intérieur que s’attribuait son maître, il semble n’avoir rien ajouté à ce qu’il croyait la vérité ; mais le sérieux constant de cet esprit positif et borné permet de supposer qu’il n’a pas su distinguer dans les allusions de Socrate ce qu’il y avait de sincère et ce qu’il y avait de feint, la part du témoignage et celle de l’allégorie ; et cette distinction que Xénophon, d’ailleurs crédule et superstitieux, n’a pas su faire, Platon, idéaliste et poète, l’a volontairement dédaignée ; Platon, lui, a si bien compris l’ironie socratique qu’il l’a élevée à la hauteur d’un procédé littéraire ; il a renchéri sur Socrate ; il a greffé son ironie sur celle du maître, les mythes que lui dictait son imagination sur les mythes de l’enseignement socratique ; ce que Socrate avait, divinisé, Platon s’est gardé de le ramener à des proportions humaines ; il se serait privé par là de ressources précieuses pour la partie artistique et inspirée de ses dialogues ; tout prouve d’ailleurs qu’il professait pour la vérité historique un dédain presque absolu ; il était d’avance de l’avis d’Aristote, que « la poésie est plus philosophique que l’histoire183 » ; le fait sensible et particulier n’est pour lui qu’un fragment insignifiant du non-être ; la légende de Socrate était plus vraie, sans doute, à ses yeux, que la vie de Socrate. […] Homère a tiré parti en poète de ce fait que, chez les hommes d’action, surtout chez les natures primitives, l’idée d’une action à faire est spontanée, vive, presque violente ; soit qu’une parole intérieure la définisse à l’esprit, soit qu’elle reste à l’état d’impulsion confuse, toujours elle parle haut dans l’âme, et comme elle est subite et vive, elle semble inspirée. […] Il n’y a pas de cas de conscience pour les âmes simples ; au contraire, pour des esprits fins et instruits, la vie ne présente guère que des cas de conscience ; rarement la loi morale prononce de ces brèves sentences dont l’évidence s’impose et qui brillent dans l’âme comme des éclairs ; presque toujours elle inspire une discussion calme, méthodique ; elle est comme la lumière douce et constante d’un soleil surnaturel.

856. (1910) Études littéraires : dix-huitième siècle

C’est un passage presque éloquent que celui où la rotation de la terre inspire à l’auteur ce tableau mouvant, glissant devant nos yeux, des différents peuples humains. […] Remarquez d’abord que les amours qu’elle inspire sont vifs mais non point ardents ni profonds. […] L’idée de grandeur est surtout inspirée par la noble empreinte de l’intelligence, et ce que Montesquieu a été, c’est surtout un homme souverainement intelligent. […] Le seul transport lyrique qu’il ait connu lui est inspiré par cette manière de ravissement de l’intelligence jouissant d’elle-même comme d’un sens aiguisé et affiné. […] Mais quand on en revient à l’ensemble, il n’inspire pas une grande vénération, ni une admiration bien profonde.

857. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Appendice » pp. 511-516

On a insisté sur le peu d’intérêt qui s’attache ici aux caractères vicieux et sur la répulsion qu’ils inspirent, même sous la forme élégante et habile dont ils sont revêtus, et que fait si bien valoir la principale et ingénieuse interprète.

858. (1874) Premiers lundis. Tome I « Diderot : Mémoires, correspondance et ouvrages inédits — II »

On y verrait le grand et chaleureux amateur qui, le premier, a fondé la critique d’art en France, dans le négligé flottant de son costume, le cou nu, le front inspiré et annonçant du geste cette conquête nouvelle que l’imagination et la science du critique sauront se faire dans le monde de l’art.

859. (1889) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Quatrième série « Grosclaude. »

Mais si vous voulez un exemple, voyez ce que le zèle de la commission d’incendie, après la catastrophe de l’Opéra-Comique, a inspiré à M. 

860. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XXXV » pp. 402-412

Le libertinage du roi inspirait un dégoût général dans cette société.

861. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — L — article » pp. 23-38

Du titre de Clément rendez-le ambititieux ; (Louis XIV) C’est par-là que les Rois sont semblables aux Dieux Du magnanime Henri qu’il contemple la vie ; Dès qu’il put se venger il en perdit l’envie ; Inspirez à Louis cette même douceur : La plus belle victoire est de vaincre son cœur.

862. (1899) Le monde attend son évangile. À propos de « Fécondité » (La Plume) pp. 700-702

De sévères préoccupations l’ont inspiré.

863. (1913) Le bovarysme « Quatrième partie : Le Réel — V »

*** Dans tous ces cas la vérité se montre un principe arbitraire qui s’exprime dans la croyance qu’elle inspire et dont la vertu consiste à contredire une force contraire qui lui résiste.

864. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome I « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Racine, et Pradon. » pp. 334-348

C’est ainsi qu’on arrête l’essor du génie, & que ceux qu’il inspire sont contraints de sacrifier des beautés sublimes & véritables à des beautés de convention & de caprice.

865. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre second. Poésie dans ses rapports avec les hommes. Caractères. — Chapitre III. Suite des Époux. — Adam et Ève. »

Il commence ce magnifique épithalame, sans préparation et par un mouvement inspiré, à la manière antique : Hail, wedded love, mysterious law, true source Of human offspring… « Salut, amour conjugal, loi mystérieuse, source de la postérité ! 

866. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre cinquième. La Bible et Homère. — Chapitre II. Qu’il y a trois styles principaux dans l’Écriture. »

Job est la figure de l’humanité souffrante, et l’écrivain inspiré a trouvé assez de plaintes pour la multitude des maux partagés entre la race humaine.

867. (1865) Du sentiment de l’admiration

Dans ce monde des chefs-d’œuvre, il assiste de près au témoignage sublime de Polyeucte, il tressaille d’amour filial avec Antigone ou Rodrigue, d’amour fraternel avec Electre ; il apprend la pitié par l’infortune de Philoctète ; le dévouement de l’Orestie et le cinquième acte de Cinna lui enseignent l’oubli des injures ; l’amour des faibles dans la nature lui est inspiré par Virgile et Lafontaine, ces grands génies aimants.

868. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « L’insurrection normande en 1793 »

Le mouvement fut digne de ceux qui l’avaient inspiré ou qui le fomentèrent, de ces principaux chefs de la Gironde, proscrits du « déplorable 31 mai », comme dit Vaultier, collégiens réussis qui furent des politiques manqués, et qui, le doux Vaultier lui-même l’affirme, n’ont compris ni les hommes, ni les événements, ni le jeu des intérêts sociaux : rien que cela !

869. (1905) Les œuvres et les hommes. De l’histoire. XX. « Napoléon »

… Plus heureux avec les artistes et les poètes qu’avec les historiens, Napoléon a inspiré des pages et des poésies sublimes.

870. (1905) Les œuvres et les hommes. De l’histoire. XX. « Histoire des ducs de Normandie avant la conquête de l’Angleterre »

Pourquoi le Moyen Âge, cet enfer pour Labutte, ne lui a-t-il inspiré qu’une horreur mesquine ?

871. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « Lettres portugaises » pp. 41-51

Ce n’est pas même un livre, ce sont des pages inspirées, arrachées à l’âme comme ses cris et ses larmes, et dans lesquelles l’Amour, sans le savoir, a produit ce que l’Art, qui le sait, produit dans les œuvres des hommes de génie !

872. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Avellaneda »

ce n’est pas une admiration sans réserve, comme le Don Quichotte en a inspiré à beaucoup d’esprits (car le génie, comme Dieu, fanatise), qui nous fait repousser le livre d’Avellaneda comme indigne de toute comparaison avec l’épopée romanesque de Cervantes.

873. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XI. Des éloges funèbres sous les empereurs, et de quelques éloges de particuliers. »

Enfin, il vint à parler de sa rare prudence et de sa profonde sagesse, c’est-à-dire, de la profonde sagesse d’un empereur qui n’avait ni une idée dans la tête, ni un sentiment dans le cœur ; qui ne sut jamais ni vouloir, ni aimer, ni haïr ; toujours prêt à obéir à qui daignait lui commander, jouet de ses courtisans, esclave de ses esclaves même, et si stupide qu’il inspirait encore plus de pitié que de mépris.

874. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XIV. Panégyrique de Trajan, par Pline le jeune. »

Un prince peut-être peut inspirer la haine sans la mériter et la sentir ; mais à coup sûr il ne peut être aimé, s’il n’aime lui-même42. » On voit dans tous ces morceaux quelle est l’âme et le tour d’esprit de l’orateur ; ce sont des pensées toujours vraies, et quelquefois fortes, aiguisées en épigrammes, et relevées toujours par un contraste ou de mots, ou d’idées.

875. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Première partie. — Chapitre XVII. »

dont les moelleux tissus défient l’art d’Athènes inspiré par Minerve, tu peux te vanter de Lucain !

876. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Jean-Jacques Ampère »

Lorsqu’il revint d’Italie, la première fois qu’elle le revit, elle lui demanda ce que lui avait inspiré cette belle contrée : il était adossé à la cheminée ; ceux qui ont été témoins de la scène semblent y être encore : il se mit, d’un ton pénétré et plein de nombre, à réciter une ode en l’honneur de l’Italie. […] Je dirai seulement de ce tendre intérêt qu’il inspira à Mlle Cuvier, intérêt mystérieux resté bien longtemps secret, et dont il est permis à peine de dévoiler quelque chose aujourd’hui79, que plus tard les voyages d’Ampère en Allemagne, puis dans le Nord, y apportèrent un arrêt et un obstacle, peut-être un brisement et une rupture intérieure : à son retour du Nord, il ne retrouva plus celle qui savait si bien l’écouter ; la noble jeune fille si distinguée, et depuis quelque temps promise à un autre, mourait de consomption avant l’autel. […] L’amitié lui inspira son second article, du 4 juin 1825, sur le Théâtre de Clara Gazul. […] Lui-même me semble avoir bien apprécié ce que son rôle a eu, à son moment, d’original et d’incomplet, dans la note manuscrite suivante : « Dans ces siècles d’affectation et d’apparence, il aurait pu arriver que je fusse le seul qui entendît, qui voulût entendre ces regrets profonds que l’étude des choses inspire, seule voie sans doute qui puisse ramener les hommes au bonheur. […] De bien touchants discours furent prononcés aux obsèques de la noble jeune fille, le 1er octobre, d’abord par M. le pasteur Boissard, dans le temple de la rue des Billettes, puis, sur la tombe même, par M. de Salvandy, que cette jeune mémoire inspira dignement et que je n’ai jamais vu si simple.

877. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [1] Rapport pp. -218

Il en vint, en dépit des épouvantes qu’inspirent les agonies, à aimer la mort pour elle-même, c’est-à-dire pour ce qu’elle offre de non-émotion, de non-sensation, de non-pensée. […] Et parce que, en même temps qu’un inspiré, il fut un artiste savant, un écrivain maître et sûr de soi, son œuvre ne périra point. […] Armand Silvestre est un inspiré. […] Par la tendresse qu’il dut inspirer à ceux qui avoisinèrent, qui furent comme tentés de protéger sa grâce fragile, presque sacrée par sa fragilité même, on s’explique la sorte de culte dont plusieurs l’environnent. […] Il suffit de dire qu’il n’y a pas en ce temps un inspiré plus sincère, un artiste plus sûr, plus charmant, plus fin.

878. (1864) Physiologie des écrivains et des artistes ou Essai de critique naturelle

Ensuite il renonça à la sculpture pour se livrer à la philosophie ; mais les Grâces, ce premier idéal de sa pensée adolescente, ne cessèrent jamais, jusque dans sa vieillesse, d’inspirer tous ses discours. […] Ils se croyaient alors inspirés, et ils étaient fous ; leurs accès étaient précédés d’une espèce d’abrutissement, qu’ils regardaient comme l’état de l’homme sous la condition de nature dépravée. […] Le meilleur argument, sans doute, pour prouver comme quoi le vin donne de l’esprit, serait cette jolie leçon inspirée à l’aimable professeur… faut-il dire Babrius, ou Ebrius ? […] Païsiello ne s’inspirait qu’enseveli dans ses couvertures…. […] On a vu à quel point il admirait le Dante, et combien il s’en inspirait.

879. (1905) Pour qu’on lise Platon pp. 1-398

La mort de Socrate a inspiré à Platon toutes ses haines. Les haines de Platon lui ont inspiré toutes ses idées, et parce que Platon se trouvait être intelligent, les idées de Platon furent des choses très considérables. […] Nous organisons la matière sur le modèle d’une de ces idées universelles qu’il nous est donné d’entrevoir ou de soupçonner et qui nous inspirent. […] Il est trop évident que même lorsqu’elle paraît être « pure » elle est tournée du côté de la morale comme vers sa fin, ou inspirée par une arrière-pensée morale très obsédante, très dominante et très impérieuse. […] « Connaissez-vous une autre condition que celle du philosophe véritable pour inspirer le mépris des dignités et des charges publiques ?

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