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623. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — P. — article » pp. 474-476

Il savoit combien les illusions accréditées sont promptes à se révolter contre la voix qui les combat ; il n’ignoroit pas non plus de quoi l’esprit de parti est capable, lorsqu’il se voit contredit & humilié ; mais son zele n’en a point été effrayé.

624. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — P. — article » pp. 480-482

Ils déciderent d’une voix unanime, que la premiere place vacante lui seroit réservée.

625. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Le Général Franceschi-Delonne : Souvenirs militaires, par le général baron de Saint-Joseph. »

Il s’agissait pour le maréchal Soult, arrivé des premiers avec ses forces sur le plateau d’Austerlitz, de s’éclairer au loin sur sa droite, afin de s’assurer que les corps d’armée venus d’Italie sous les archiducs ne menaçaient pas le flanc de l’armée française et ne cherchaient pas à se réunir par la Hongrie avec le gros des Austro-Russes, On serait surpris de savoir avec quel petit nombre, avec quel chiffre réduit de sabres, mais d’autant plus mobiles, tous confiants, dociles à sa voix et aussi intelligents qu’impétueux, Franceschi s’acquitta de cette mission délicate et hardie. […] Lorsqu’on vint me chercher pour partir, lorsqu’il fallut me séparer de mon général, de mes compagnons d’infortune, leur faire mes adieux, les forces m’abandonnèrent ; je tombai dans les bras du général, je pressais son cœur contre le mien, je le baignais de mes larmes et je sentis couler les siennes : « Mon ami, me dit-il d’une voix émue, pars, va porter de mes nouvelles à mon Octavie, va travailler à me rendre à son amour. » Je m’éloignai de lui à ces mots et me sentis entraîné, comme malgré moi ; je descendis sans m’en apercevoir les marches de la tour ; je traversai les portes de l’Alhambra, et je me trouvai sous la croisée du général. […] Seulement je remarquai que sa voix s’éteignait sensiblement.

626. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « LE COMTE XAVIER DE MAISTRE. » pp. 33-63

Il n’y eut jamais interruption bien longue dans cette suite littéraire notable ; et Ducis se vantait tout haut à Versailles de son sang allobroge, quand déjà, de par delà les monts, la voix de Joseph de Maistre allait éclater29. […] Et sa plaintive rêverie Trouvait sa voix dans leurs accords. […] Dis-moi l’histoire du printemps Et des nouvelles de l’aurore ; Dis-moi si dans le fond des bois Le rossignol, à ton passage, Quand tu traversais le bocage, Faisait ouïr sa douce voix.

627. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Pierre Corneille »

Pour me faire admirer je ne fais point de ligue ; J’ai peu de voix pour moi, mais je les ai sans brigue ; Et mon ambition, pour faire un peu de bruit, Ne les va point quêter de réduit en réduit. […] Quitter l’Espagne dès l’instant qu’il y avait mis pied, ne pas pousser plus loin cette glorieuse victoire du Cid, et renoncer de gaieté de cœur à tant de héros magnanimes qui lui tendaient les bras, mais tourner à côté et s’attaquer à une Rome castillane, sur la foi de Lucain et de Sénèque, ces Espagnols, bourgeois sous Néron, c’était pour Corneille ne pas profiter de tous ses avantages et mal interpréter la voix de son génie au moment où elle venait de parler si clairement. […] Hors de là il valait peu : brusque, lourd, taciturne et mélancolique, son grand front ridé ne s’illuminait, son œil terne et voilé n’étincelait, sa voix sèche et sans grâce ne prenait de l’accent, que lorsqu’il parlait du théâtre, et surtout du sien.

628. (1869) Cours familier de littérature. XXVII « CLXIe Entretien. Chateaubriand »

VII Quand j’avais passé une heure auprès d’elle, je la quittais, le cœur plein de délire, l’oreille tintante du timbre mélodieux de sa voix, l’âme affamée du désir du lendemain. […] Quel ascendant un pareil livre ne devait-il pas prendre au premier pas sur un monde renversé, bouleversé, dépouillé, égorgé, qui ne savait plus que croire, que sentir, que dire, et qui attendait une voix d’en haut pour reprendre haleine ? […] Si tu savais combien de pleurs tes erreurs ont fait répandre à notre respectable mère, combien elles paraissent déplorables à tout ce qui pense et fait profession non-seulement de piété, mais de raison ; si tu le savais, peut-être cela contribuerait-il à t’ouvrir les yeux, à te faire renoncer à écrire ; et si le ciel touché de nos vœux permettait notre réunion, tu trouverais au milieu de nous tout le bonheur qu’on peut goûter sur la terre ; tu nous donnerais ce bonheur, car il n’en est point pour nous, tandis que tu nous manques et que nous avons lieu d’être inquiets sur ton sort. » XIX Cette lettre l’attendrit ; il crut y entendre une voix du ciel.

629. (1892) Boileau « Chapitre II. La poésie de Boileau » pp. 44-72

Écoutez ce jeu de rimes qui tintent : Les cloches dans les airs de leurs voix argentines Appelaient à grand bruit les chantres à matines. […] Depuis sa première enfance, il vit dans le tumulte de la grande ville ; de sa guérite au-dessus du grenier, dans la maison de la cour du Palais, son oreille perçoit chaque jour la clameur aiguë et matinale des coqs, et tous ces bruits de la cité laborieuse qui s’éveille, les coups de marteau du serrurier voisin, les maçons chantant ou s’injuriant sur leurs échafaudages, les charrettes roulant sur le pavé, les courtauds ouvrant les boutiques avec un grand bruit de volets choqués et de voix, et puis les cloches des vingt-six églises ramassées dans l’étroite enceinte de l’île Notre-Dame. […] D’autres fois, le poète ne peut se tenir d’ajouter un trait plaisant à l’image qu’il évoque : c’est comme une intention littéraire en peinture, et cette voix qui veut nous amuser, nous distrait de la contemplation de l’objet qui d’abord avait été seul mis devant nos yeux.

630. (1887) Discours et conférences « Rapport sur les prix de vertu lu dans la séance publique annuelle de l’Académie française »

Elle voulait porter son apostolat jusqu’aux derniers confins du mal et voir si là encore la voix du bien peut être entendue. […] Songez à Sfax, à cette poignée de braves jetés sur une plage de boue et de feu ; partout les ruses cachées du désespoir, les embûches du fanatisme, et, au milieu de cet enfer, un nombre imperceptible de soldats, de marins, courant où les mène la voix de leurs chefs, car le chef, est pour eux la patrie, le devoir. […] Il a obéi à un ordre supérieur, à un oracle infaillible, à une voix qui commande de la façon la plus claire, sans donner ses raisons.

631. (1889) Le théâtre contemporain. Émile Augier, Alexandre Dumas fils « Émile Augier — CHAPITRE VII »

Mais, au lieu de son jeune amant, un vieillard étonné et triste sort, à sa voix, du paravent que forme la toile. […] Elle félicite Camille de son mariage sans que sa voix tremble ; elle se montre froide et digne vis-à-vis de Paul. […] Augier n’a parlé, au théâtre, une voix si souple et si ferme ; son vers a l’étincelle et il a la flamme, il lance la saillie et il grave en traits saillants la sentence.

632. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Chansons de Béranger. (Édition nouvelle.) » pp. 286-308

l’interrompt et lui coupe la voix. […] Son filet de voix est continu, intarissable et agréable autant qu’une voix aussi fluette et aussi fêlée peut l’être ; et, comme le dit de lui le poète Barbier, « il a de la parlotte en critique ».

633. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Monsieur de Broglie. » pp. 376-398

» 157 voix sur 161 furent pour l’affirmative ; trois membres protestèrent et s’abstinrent ; une seule voix fut pour la négative et pour déclarer qu’il n’y avait pas eu attentat : c’était celle du duc de Broglie. […] — Le roi d’Espagne, rentrant dans ses États après cinq ans d’exil, s’empare du pouvoir absolu et soumet au joug le plus humiliant le peuple qui a délivré l’Europe ; il fait bien ; nulle voix, parmi les souverains, ne s’élève pour le contredire ; il reçoit même, de toutes parts, des félicitations et des éloges !

634. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Mme de Caylus et de ce qu’on appelle Urbanité. » pp. 56-77

Elle n’avait pas été élevée à Saint-Cyr, elle était venue trop tôt pour cela ; mais elle en vit les commencements ; et, un jour que Racine récitait à Mme de Maintenondes scènes d’Esther qu’il était en train de composer pour cette maison, Mme de Caylus se mit à les déclamer si bien et d’une voix si touchante, que Racine supplia Mme de Maintenonde demander à sa nièce d’y jouer. […] On comprend déjà ce que j’ai voulu dire quand j’ai parlé de cette perfection de culture et de goût chez une personne qui, à l’âge de quinze ans, vit naître Esther, qui en respira le premier parfum et en pénétra si bien l’esprit, qu’elle semblait, par l’émotion de sa voix, y ajouter quelque chose. Cette émotion, avec tout ce qu’elle promettait de sentiments prêts à éclore, Mme de Caylus ne l’eut pas seulement dans la voix.

635. (1892) Journal des Goncourt. Tome VI (1878-1884) « Année 1881 » pp. 132-169

Quand il me dit quelque chose d’aimable, je ne sais comment cela se fait, mais je lui réponds avec une voix montée pour la dispute. […] Parmi les loges d’hommes : celle de Coquelin aîné a quelque chose d’un atelier de peintre, avec ses divans fabriqués de verdures, et les esquisses accrochées aux murs ; celle de Delaunay, de l’amoureux à la voix de musique, est curieuse, par l’affichage un peu enfantin de ses triomphes, par des coussins brodés, des couronnes de fleurs artificielles, un buste, au cou duquel pend une guirlande, sur laquelle on lit sur des bouts de ruban sale, imprimés en lettres d’or les rôles joués par lui, dans quelque ville de province. […] Un cabinet de travail ayant la hauteur et la grandeur, où se lit sur la cheminée, la devise : Nulla dies sine linea , et où l’on aperçoit dans un coin un orgue mélodium avec voix d’anges, dont l’auteur naturaliste tire des accords à la tombée de la nuit.

636. (1889) Écrivains francisés. Dickens, Heine, Tourguénef, Poe, Dostoïewski, Tolstoï « Henri Heine »

Il connaît les sourdes voix du vent, de la mer, des forêts, des ruines. […] Des visions l’obsèdent, de faibles rappels sonnent dans son souvenir ; un vague fantôme de femme reparaît ainsi, en quelques phrases obscures, à la fin de plusieurs chapitres des Reisebilder ; cette « Maria la morte », dont il croit entendre la « voix soyeuse » dans un vieux palais de Vérone, dont il retrouve le vague visage dans une galerie de très anciens portraits à Gênes : « Dans mon cœur vibrait le souvenir de Maria la morte. […] Par la douce phormynx, qu’Apollon lit retentir, Et par les muses, qui chantaient en se répondant par leur voix harmonieuse5.

637. (1905) Les œuvres et les hommes. De l’histoire. XX. « La Révolution française »

Il sait que le plus souvent c’est le creux de la tête des hommes qui fait la sonorité de la gloire, comme, dans les théâtres antiques, c’était le vide des vases d’airain qui doublait le son de la voix. Et de même qu’en remplissant ces vases d’airain on diminuait la voix, Cassagnac a pensé qu’en mettant des raisons et des faits dans le creux de la tête des hommes, la gloire qu’ils font diminuerait. […] Et voilà ce que j’aurais voulu signaler à l’Europe si ma voix avait porté loin.

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