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15. (1913) Les antinomies entre l’individu et la société « Chapitre II. L’antinomie psychologique l’antinomie dans la vie intellectuelle » pp. 5-69

. — L’idée de vérité dans ses rapports avec la sociabilité. — Y a-t-il une vérité objective au nom de laquelle le groupe puisse demander à l’individu un acte de soumission intellectuelle ? […] Il y a une part de vérité dans cette théorie. […] La part de vérité d’abord. […] Nombre de philosophes ont admis l’existence d’une semblable vérité. […] Car, dans le pragmatisme, la vérité est une « réussite ».

16. (1898) L’esprit nouveau dans la vie artistique, sociale et religieuse « III — La rentrée dans l’ordre »

La vérité vécue est là devant nous, dans toute sa grandeur et toute sa sincérité. […] Reconnaître que l’« erreur » est précisément la vérité ! […] La vérité du séminaire, c’est ce que nous appelons d’un simple mot : erreur. […] C’est là une vérité d’ordre tellement extra-humain, qu’il serait téméraire de prétendre l’expliquer. […] Comment ceux qui sont fermés à toute vérité, voudraient-ils l’enseigner au monde ?

17. (1892) Boileau « Chapitre IV. La critique de Boileau (Suite). Les théories de l’« Art poétique » » pp. 89-120

La poésie est un art, et la vérité n’y est pas d’un autre ordre qu’en peinture et en sculpture : c’est la vérité de l’imitation, la conformité de la représentation figurée au modèle naturel. […] Jusque dans le jeu des acteurs, il bannit l’outrance, et met la vérité. […] Les phrases, les alinéas, les pages, le livre entier doit sonner la vérité. […] Des réalités, sans les copier, elle dégage la vérité qui les fait être. […] Il attribue une valeur absolue à des choses toutes relatives, et s’imagine trop facilement que la vérité et le naturel d’Athènes seront aussi vérité et naturel à Paris.

18. (1862) Cours familier de littérature. XIV « LXXXIe entretien. Socrate et Platon. Philosophie grecque (1re partie) » pp. 145-224

Ce sont des vérités innées ; autrement dit : des certitudes, des évidences. […] Était-ce parce que les langues humaines leur paraissaient insuffisantes à contenir les vérités divines qu’ils annonçaient aux hommes ? […] Voilà pourtant la vérité, Athéniens ! […] « Et les sens de ce corps, qui nous trompent, ne sont-ils pas un obstacle à la vérité ? « Et n’est-ce pas toujours par l’acte de la pensée que la vérité se manifeste à l’âme ?

19. (1887) Discours et conférences « Discours à la conférence Scientia : Banquet en l’honneur de M. Berthelot »

Cette religion, c’était le culte de la vérité. […] Ce que nous entendions par la vérité, en effet, c’était bien la science. […] La science est donc l’unique maîtresse de la vérité. […] Il y a trois grandes choses, pouvons-nous dire à notre tour, le bien, la beauté, la vérité ; la plus grande des trois, c’est la vérité. […] La vérité est ce qui est.

20. (1908) Après le naturalisme

Il n’y a pas deux vérités. La vérité n’a pas non plus deux faces. […] La vérité, c’est que l’esprit manœuvrait là. […] La vérité entend les vaincre. […] La Vérité.

21. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Seconde partie. De l’état actuel des lumières en France, et de leurs progrès futurs — Chapitre VI. De la philosophie » pp. 513-542

Lorsque les passions intestines mettent le désordre dans toutes les idées morales, il reste encore des vérités dont la route est connue et la méthode fixée. […] Déjà dans l’ordre moral, comme dans l’ordre physique, de certaines vérités sont à l’abri de leur empire. […] Ces vérités se composent de chaque fait et de chaque existence particulière. […] Leibnitz disait que si les hommes avaient intérêt à nier les vérités mathématiques, ces vérités seraient mises en doute. Il est néanmoins certain qu’il est des vérités morales reconnues, et que leur nombre doit toujours augmenter avec le temps.

22. (1889) Histoire de la littérature française. Tome IV (16e éd.) « Chapitre troisième »

Les premiers trouvent des vérités nouvelles ; les seconds développent les vérités trouvées et s’attachent à garder l’intégrité du langage. […] De là leur vérité saisissante et populaire. […] On y voit l’histoire telle que la veut l’esprit moderne, avec la vérité prouvée par des pièces, et au défaut de la vérité la vraisemblance. […] Chez ceux-ci la vraisemblance est au premier rang et la vérité au second. […] Eux aussi font passer l’art avant la matière et la vraisemblance avant la vérité.

23. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Deuxième partie. Invention — Chapitre VII. Induction et déduction. — Diverses causes des faux raisonnements »

Le grand point est donc de ne s’appuyer que sur des vérités indubitables. […] Si loin qu’on aille dans la preuve, il faudra s’arrêter quelque part, et admettre comme évidente sans démonstration une dernière vérité, fondement de toute certitude. […] Ce n’est pas tout : il ne faut pas aller en tout sujet aux dernières limites de la vérité qui se prouve. […] L’esprit se tient satisfait, en général, si l’on appuie les vérités dont on fait usage sur les vérités dont elles dépendent immédiatement, sans exiger qu’on cherche le fondement de celles-ci, qui serait en d’autres vérités, qu’on aurait ensuite à fonder ; et l’on irait ainsi à l’infini, sans fin et sans repos. […] Il faut savoir aussi discerner les vérités qui ne sont point évidentes par elles-mêmes, mais dont la démonstration est acquise et n’a pas besoin d’être refaite : on ne s’arrêtera pas à en recommencer la preuve.

24. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Troisième partie. Beaux-arts et littérature. — Livre second. Philosophie. — Chapitre premier. Astronomie et Mathématiques. »

Dans les sciences, ses dogmes ne s’opposent à aucune vérité naturelle ; sa doctrine ne défend aucune étude. […] Les systèmes succéderont éternellement aux systèmes, et la vérité restera toujours inconnue. […] Ils veulent trouver partout des vérités absolues, tandis qu’en morale et en politique les vérités sont relatives. […] L’une est une vérité simple, l’autre une vérité complexe. […] Lorsque, dans un siècle impie, l’homme vient à méconnaître l’existence de Dieu, comme c’est néanmoins la seule vérité qu’il possède à fond, et qu’il a un besoin impérieux des vérités positives, il cherche à s’en créer de nouvelles, et croit les trouver dans les abstractions des sciences.

25. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre III. Les grands artistes classiques — Chapitre II. Boileau Despréaux »

Il avait une nature d’esprit avide de vérité, mais de vérité démontrée, évidente, tangible : il était passionnément raisonnable, raisonneur, et rationaliste. […] Il fait le procès à toutes les œuvres où manquent et la vérité et l’art. […] Cependant on saisit sa pensée à travers l’insuffisance de l’expression : il faut la vérité, et il faut la vraisemblance ; la vraisemblance, c’est la vérité rendue sensible par une forme d’art. […] Sa fonction consiste à établir un rapport entre les choses et l’esprit, de façon que l’esprit goûte la vérité des choses. Mais la grande loi reste toujours la vérité, d’autant que ces natures tout intellectuelles du xviie  siècle ne sauraient se plaire aux objets où leur raison ne trouve point de vérité.

26. (1767) Salon de 1767 « Adressé à mon ami Mr Grimm » pp. 52-65

Vous y avez ajouté, vous en avez supprimé ; sans quoi vous n’eussiez pas fait une image première, une copie de la vérité, mais un portrait ou une copie de copie, (…) le fantôme et non la chose ; et vous n’auriez été qu’au troisième rang, puisqu’entre la vérité et votre ouvrage, il y aurait eu la vérité ou le prototype, son fantôme subsistant qui vous sert de modèle, et la copie que vous faites de cette ombre mal terminée, de ce fantôme. […] Ce type, cette vérité existait, suivant lui, dans l’entendement de Dieu, et les (…), les formes, ce que notre philosophe appelle la chose individuelle, étaient autant d’émanations de ces premiers types, de ces vérités existantes dans l’entendement de Dieu. […] Ainsi chaque objet existant a son type, sa vérité ou son idée générale. Or notre philosophe prétend que c’est jusqu’à cette idée générale, jusqu’à cette vérité qu’il faut que le peintre s’élève dans ses productions, sans quoi il ne serait que le copiste de la chose individuelle, un portraitiste, et son tableau ne serait qu’une chose du troisième rang, après la vérité ou l’idée générale et la chose individuelle qui en est une émanation ou une copie ; son tableau ne serait alors qu’une copie de cette copie. […] à cela, je répliquerai, et quand je ne pourrois pas vous l’apprendre, en auriez-vous moins senti la vérité de ce que je vous ai dit ?

27. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Livre II : La littérature — Chapitre III : La littérature du xviiie et du xixe  siècle »

Est-ce le principe des vérités générales ? […] Ce sont, ou des vérités descriptives, ou des vérités de sentiment intime, ou des vérités de peintures domestiques, ou enfin des vérités historiques, politiques, philosophiques : ce sont ces vérités nouvelles, exprimées dans une langue inégale sans doute et dégénérée, mais tantôt brillante, tantôt ardente, tantôt molle et mélodieuse, tantôt austère et nerveuse, qui assurent à la littérature du xixe  siècle, malgré ses défauts, une sorte de solidité, et lui permettent de soutenir avec quelque honneur la comparaison avec les siècles précédents. Ainsi le principe des vérités générales explique les beautés de nos écrivains, il en explique aussi les défauts. […] Tous ces défauts viennent de l’oubli du principe des vérités générales. […] Nisard et les efforts qu’il fait pour nous donner une image idéale et fidèle de l’esprit français ; mais, malgré tout, la vérité est la vérité.

28. (1881) Le naturalisme au théatre

Telle est l’exacte vérité. […] A cette heure, la vérité triomphe partout. […] Cela s’impose comme une vérité mathématique. […] La vérité des costumes ne va pas sans la vérité des décors, de la diction, des pièces elles-mêmes. […] Il se moque des vérités ambiantes, il va droit dans ce qu’il croit être la vérité absolue.

29. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre I. La préparations des chefs-d’œuvre — Chapitre III. Trois ouvriers du classicisme »

Révoquant tout en doute, tout ce que les hommes estiment le plus certain, et ce que lui-même avait cru jusque-là, bien résolu à « ne recevoir jamais aucune chose pour vraie qu’il ne la connût évidemment être telle », il s’attache à saisir une vérité et comme un bout du fil infini des vérités, qui s’entretiennent toutes. […] La vérité scientifique s’oppose ainsi à la vérité théologique, dont elle a sans doute emprunté l’absolue et rigoureuse détermination. […] Mais, surtout, il était conduit par sa méthode à certaines vérités que la religion aussi revendiquait comme siennes : un Dieu infini, parfait, une âme immatérielle, immortelle. […] Le but de tout exercice de la pensée est le vrai : en littérature comme en philosophie, dès qu’on pense, dès qu’on parle, ce ne peut être que pour chercher ou exposer la vérité. […] Le soin de la forme, l’idée de la beauté furent maintenus par le respect des modèles grecs ou romains : grâce à cette influence, la littérature resta un art : et l’idée d’une vérité artistique, concrète et sensible, l’idée du vrai naturel et réel se superposa à l’idée de la vérité scientifique, nécessairement abstraite.

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