Qu’on ne se figure pas que le talent seul et l’esprit suffisaient ; il fallait autre chose encore ; il fallait une certaine fortune, une certaine position, des alliances dans le monde. […] Je ne prétends pas dire qu’un esprit de cette qualité ne pourrait pas suffire à autre chose et nous donner plus et mieux encore qu’il ne nous donne aujourd’hui.
Je ne ferai ici ni la critique ni l’éloge de cette manière historique, la plus éloignée, je l’avoue, de mes goûts et de mes habitudes : qu’il me suffise de dire que M. […] Les autres ont le fond de l’âme élégiaque ; Tibulle, Properce, Ovide, les retiennent longtemps et leur suffisent : méfiez-vous pour eux de la langueur et des plaisirs.
J’ai cherché à m’expliquer une pareille erreur chez un écrivain auparavant réputé de bonne compagnie ; tout ce que j’ai dit jusqu’ici ne suffirait pas encore. […] Ville heureuse où l’on est dispensé d’avoir du bonheur, où il suffit d’être et de se sentir habiter ; qui fait plaisir, comme on le disait autrefois d’Athènes, rien qu’à regarder ; où l’on voit juste plus naturellement qu’ailleurs, où l’on ne s’exagère rien, où l’on ne se fait des monstres de rien ; où l’on respire, pour ainsi dire, avec l’air, même ce qu’on ne sait pas, où l’on n’est pas étranger même à ce qu’on ignore ; centre unique de ressources et de liberté, où la solitude est possible, où la société est commode et toujours voisine, où l’on est à cent lieues ou à deux pas ; où une seule matinée embrasse et satisfait toutes les curiosités, toutes les variétés de désirs ; où le plus sauvage, s’il est repris du besoin des hommes, n’a qu’à traverser les ponts, à parcourir cette zone brillante qui s’étend de la Madeleine au Gymnase ; et là, en quelques instants, il a tout retrouvé, il a tout vu, il s’est retrempé en plein courant, il a ressenti les plus vifs stimulants de la vie, il a compris la vraie philosophie parisienne, cette facilité, cette grâce à vivre, même au milieu du travail, cette sagesse rapide qui consiste à savoir profiter d’une heure de soleil !
Le paysage est tout à fait dans le style du Poussin, et quelques traits ont suffi pour dessiner dans la perfection le fond sur lequel se détachent les personnages. » Ils en reparlèrent encore les jours suivants ; mais ce fut dans la conversation du 20 mars 1831, pendant le dîner, que les idées échangées entre Gœthe et son disciple épuisèrent le sujet ; on y trouve le jugement en quelque sorte définitif sur cette production charmante, Goethe venait de relire l’ouvrage dans le texte de Courrier-Amyot, et il en était plein ; son imagination tout hellénique s’en était sentie consolée et rajeunie : « Le poème est si beau, disait-il, que l’on ne peut garder, dans le temps misérable où nous vivons, l’impression intérieure qu’il nous donne, et chaque fois qu’on le relit, on éprouve toujours une surprise nouvelle. […] On ne voit agir, en fait de divinités, que Pan et les Nymphes : on n’en nomme guère d’autres, et on voit en même temps que ces divinités suffisent aux besoins des bergers. » — « Et cependant, ajoutait Goethe, obéissant a la suggestion de son interlocuteur et continuant la pensée d’Eckermann ou plutôt la sienne propre, cependant, avec toute cette mesure, là se développe un monde tout entier : nous voyons des bergers de toute nature, des laboureurs, des jardiniers, des vendangeurs, des mariniers, des voleurs, des soldats, de nobles citadins, des grands seigneurs et des esclaves. » C’est tout ce dialogue qui manque, pour le dire en passant, dans la page de préface ajoutée à ta présente édition, où elle fait d’ailleurs une si digne et si magistrale figure.
La fertilité, l’ingéniosité des moyens ne suffisent pas. […] Est-ce donc qu’il n’y a pas une autre Victime humaine et divine qui suffit pour tous ?
Il ne suffit pas du calme extérieur pour assoupir les agitations de l’âme ; le calme invite à la paix, mais il ne la produit pas : elle descend de plus haut. […] Les injures n’avaient pas suffi : on en avait appelé au poignard… Toutes ces folies ne sont pas neuves, et l’ellébore ou le quinquina n’est pas trouvé, qui guérisse ces fièvres de cerveau.
J’entends… Ma fin prochaine en sera moins amère ; Mes amis, il suffit : je suivrai vos conseils, Et je mourrai du moins dans les bras de ma mère. […] Quant au chapitre de Victor Hugo sur l’année 1847 et que je ne me charge pas de justifier dans les points inexacts, je ne puis m’empêcher pourtant de trouver qu’il est bien étrange qu’on en soit venu à faire un volume tout entier, là où deux ou trois pages eussent amplement suffi.
Deux mots suffiront. […] Pour écrire avec génie, il faut penser avec génie ; pour bien écrire, il suffit d’une certaine dose de sens, d’imagination et de goût.
Quand les difficultés des premiers pas sont vaincues, il se forme à l’instant deux partis sur une même réputation ; non, parce qu’il y a deux manières de la juger, mais parce que l’ambition parle pour ou contre : celui qui veut être l’adversaire des grands succès reste passif, tant que dure leur éclat, et c’est pendant ce temps, au contraire, que les amis ne cessent d’agir en votre faveur ; ils arrivent déjà fatigués à l’époque du malheur, lorsqu’il suffit au public du mobile seul de la curiosité, pour se lasser des mêmes éloges ; les ennemis paraissent avec des armes toutes nouvelles, tandis que les amis ont émoussé les leurs, en les faisant inutilement briller autour du char de triomphe. […] N’importe, s’écrieront quelques âmes ardentes, n’exista-t-il qu’une chance de succès contre mille probabilités de revers ; il faudrait tenter une carrière dont le but se perd dans les cieux, et donne à l’homme après lui, ce que la mémoire des hommes peut conquérir sur le passé : un jour de gloire est si multiplié par notre propre pensée qu’il peut suffire à toute la vie.
Règle générale, il suffit qu’un même fait nous soit connu par deux voies différentes pour que nous concevions à sa place deux faits différents. […] Ici, les deux représentations arrivent par deux chemins opposés, l’une du dedans, l’autre du dehors, tellement que ces chemins demeurent perpétuellement divergents et que nous ne pouvons leur concevoir un même point de départ. — Ainsi l’opposition foncière des deux procédés de formation suffit à expliquer l’irréductibilité mutuelle des deux représentations.
Ce rire déconcertait les hâbleurs et tel le cri du coq suffisait pour jeter la panique au camp des ânes en déroute. […] Il me suffira de dire qu’il n’y était nullement question de Moréas.
Pour la justice, il se contentait de répéter l’axiome répandu : « Ne fais pas à autrui ce que tu ne voudrais pas qu’on te fît à toi-même 230. » Mais cette vieille sagesse, encore assez égoïste, ne lui suffisait pas. […] Concevoir le bien, en effet, ne suffit pas ; il faut le faire réussir parmi les hommes.
Quelques mots suffiront. […] Mais cela ne suffit pas pour effectuer la communication que je désire faire ; que le mot homme est une marque de l’idée dont Jean est une marque, et une marque d’autres idées avec celles-là, à savoir : celles dont Jacques, Thomas, etc., sont des marques.
Janin pour y suffire tant d’années sans fatigue, sans ennui, pour se retrouver aussi à l’aise et aussi en train le dernier jour que le premier. […] Il ne paraît pas, néanmoins, qu’on soit jamais arrivé, touchant les faits mystérieux qu’on soupçonnait, à une conviction bien établie et bien authentique ; mais le soupçon suffisait déjà.
Quelques écrivains de talent, en effet, doués d’originalité et d’une verve d’exception, quelques efforts brillants, isolés, mais sans suite, aussitôt brisés et qu’il faut recommencer toujours, ne suffisent pas pour doter une nation de ce fonds solide et imposant de richesse littéraire. […] Cet hommage rendu à ce qu’il suffit d’apercevoir et de reconnaître, nous ne sortirions plus de nos horizons, et l’œil s’y complairait en mille spectacles agréables où augustes, s’y réjouirait en mille rencontres variées et pleines de surprise, mais dont la confusion apparente ne serait jamais sans accord et sans harmonie.