Ce qui me paraît surtout à remarquer en lui comme en plusieurs personnages du haut clergé français au xviiie siècle, c’est ce mélange de monde, de philosophie, de grâce, qui peu à peu sut s’allier avec bon sens et bon goût à la considération et à l’estime ; ces prélats de qualité, engagés un peu légèrement dans leur état, en prennent cependant l’esprit avec l’âge ; ils deviennent, à un moment, des hommes d’Église dans la meilleure acception du mot, sans cesser pour cela d’être des hommes du monde et des gens aimables ; puis, quand viendra la persécution, quand sonnera l’heure de l’épreuve et du danger, ils trouveront eu eux du courage et de la constance ; ils auront l’honneur de leur état ; vrais gentilshommes de l’Église, ils en voudront partager les disgrâces et les infortunes comme ils en avaient recueilli par avance les bénéfices et possédé les privilèges. […] Pour bien juger du ton de cette correspondance, il ne faut pas oublier la position respective des deux personnages.
Ce n’est point avec des personnages de cette trempe qu’un chef d’État fera jamais un Code civil. […] Ainsi pour le prétendu athée Lalande, ainsi pour l’illuminé Cazotte ; les divers articles de Saint-Martin sur ces personnages et sur plusieurs autres seraient curieux à extraire : Bernardin de Saint-Pierre, de l’Institut, dit-il, me paraît un excellent homme.
C’était à qui substituerait ses plans et ses projets à ceux du général en chef : « Les personnes d’esprit, écrivait-il à ce propos, et surtout les personnes éloquentes sont très dangereuses dans une armée, parce que leurs opinions font des prosélytes, et si le général n’est un personnage opiniâtre et entêté de son opinion, ce qui est un défaut, ils lui donnent des incertitudes capables de lui faire commettre de grandes fautes : c’est le cas où je me trouve… La politique, nos pertes (à Lawfeld), et notre amour-propre peut-être, nous ont échauffés sur cette entreprise (de Berg-op-Zoom), au point que nous sommes prêts à y sacrifier l’armée, la gloire de nos armes et celle du roi. […] Il garde du héros de roman jusque dans le personnage de l’histoire.
Mais, bien que portant le même nom, remontant à la souche commune (un chambellan de Charles VII), et issu même de la branche aînée, il n’était qu’un cousin assez éloigné de ces hauts personnages. […] La Défense et Illustration est dédiée au cardinal Du Bellay, et la dédicace commence en ces termes pompeux : « Vu le personnage que tu joues au spectacle de toute l’Europe, voire de tout le monde, en ce grand théâtre romain, vu tant d’affaires et tels que seul quasi tu soutiens ; ô l’honneur du sacré Collège !
Ce personnage, alors inconnu et bien oublié de nos jours, qui s’appelait lui-même à travers le désert bruyant de son époque le Robinson de la spiritualité, que M. de Maistre a nommé le plus aimable et le plus élégant des théosophes, créature de prédilection véritablement faite pour aimer, pour croire et pour prier, Saint-Martin s’écriait, en s’adressant de bien loin aux hommes de son temps, dans ce langage fluide et comme imprégné d’ambroisie, qui est le sien : « Non, homme, objet cher et sacré pour mon cœur, je ne craindrai point de t’avoir abusé en te peignant ta destinée sous des couleurs si consolantes. […] La Mort de Socrate et surtout le Dernier Chant d’Harold sont d’admirables méditations encore, avec un flot qui toujours monte et s’étend, mais avec l’inconvénient grave d’un cadre historique donné et de personnages d’ailleurs connus : or, Lamartine, le moins dramatique de tous les poëtes, ne sait et ne peut parler qu’en son nom.
Ce que ne gardèrent pas moins, en général, les personnages de cette époque et de ce rang qui survécurent et dont la vieillesse honorée s’est prolongée jusqu’à nous, c’est une fidélité remarquable, sinon à tous les principes, du moins à l’esprit des doctrines et des mœurs dont s’était imbue leur jeunesse ; c’est le don de sociabilité, la pratique affable, tolérante, presque affectueuse, vraiment libérale, sans ombre de misanthropie et d’amertume, une sorte de confiance souriante et deux fois aimable après tant de déceptions, et ce trait qui, dans l’homme excellent dont nous parlons, formait plus qu’une qualité vague et était devenu le fond même du caractère et une vertu, la bienveillance. […] Les autres personnages de la cour ne sont pas moins agréablement dessinés. « En s’étendant un peu longuement sur ce séjour en Russie, écrivions-nous il y a plus de quinze ans déjà, lors de l’apparition des Mémoires, l’auteur ou mieux le spirituel causeur a cédé sans doute à plus d’un attrait : là où lui-même a rencontré tant de plaisirs et de faveurs qu’il se plaît à redire, d’autres qui lui sont chers ont recueilli dans les dangers d’assez glorieux sujets à célébrer.
Le seul défaut de Virieu, c’était de tenir un peu trop aux grands noms, qu’aimait sa mère ; et, quand il pouvait dire de ces personnages : Mon cousin ou ma cousine, pour attester la même filiation princière, il se sentait plus à leur niveau. […] XXII L’épilogue couronne dignement le poëme : c’est l’auteur lui-même, Chateaubriand, qui reprend la parole et qui raconte la suite de la destinée des personnages survivants (le père Aubry, Chactas), telle qu’il l’a apprise dans ses voyages aux terres lointaines.
Mais si c’est le père du duc d’Anguien qu’on nous présente, nous sommes un peu fâchés de voir le récit d’une partie de la guerre de Trente ans tourner autour de ce médiocre personnage. […] Puis c’est le droit et l’histoire où il s’applique avec beaucoup d’ardeur, considérant expressément les grands personnages historiques comme des maîtres et des sortes de prédécesseurs dans un rôle qu’il jouera à son tour. « C’est un esprit auquel il faut de l’emploi », disait fort justement son précepteur le P.
Chaque personnage paye son tribut. […] De quel autre nom caractériser tant de traits si justes et si enjoués, dont elles sont semées : sentiments délicats dans l’élégie ; aimable gaieté dans la chanson, flatteries nobles et ingénieuses dans les épîtres aux grands personnages ; railleries fines dans l’épigramme et la satire ?
Les Dieux et les Héros demeurent pour eux des personnages du passé, à demi historiques, personnages d’une histoire sans doute merveilleuse qui est celle d’un monde plus beau, plus grand, plus pittoresque par l’éloignement et la distance où il est du nôtre.
Victor Hugo fait ce tour de force78 d’apitoyer les lecteurs sur un personnage sans nom, dont ils ignorent et les antécédents et l’état civil et le crime même, dont ils ne savent rien sinon qu’il est un homme retranché par d’autres hommes du nombre des vivants et condamné non seulement à la mort par la guillotine, mais à l’agonie lente qui la précède. […] § 4. ― Si rapide que soit cette revue des rapports de la littérature et du droit, je ne saurais oublier que le droit positif s’incarne en des corps spéciaux et en des personnages qui, à des titres divers, coopèrent à la tâche de rendre la justice.
Les personnages meurent en état de grâce ; mais ils vivent tout autrement ; et, s’ils finissent par arriver au paradis, il faut avouer que c’est par des chemins singuliers et après un véritable voyage en zigzag. […] Au théâtre, des tirades contre la fourberie et la cruauté des prêtres ; Notre crédulité fait toute leur science, disait déjà, dans l’Œdipe de Voltaire débutant, un personnage qui n’est visiblement que le porte-parole de l’auteur.
Ce fut même pour elle qu’il composa le prologue de la Piété, par où elle débuta ; mais Mme de Caylus, une fois engagée, ne s’en tint pas à ce prologue, et elle joua successivement tous les personnages, surtout celui d’Esther. […] Elle sait changer de ton dès qu’il le faut, et proportionner sa touche à ses personnages : « Mlle de Rambures avait le style de la famille des Nogent dont était madame sa mère : vive, hardie, et tout l’esprit qu’il faut pour plaire aux hommes sans être belle.
Ce M. de Malezieu, qui devint le personnage essentiel de la cour de la duchesse, son oracle en tout genre ; et de qui on parlait à Sceaux comme de Pythagore : « Le maître l’a dit », devait certes avoir plus d’une qualité ; mais il est difficile aujourd’hui de se faire une juste idée de son mérite. […] Voilà des éloges qui donneraient une haute idée du personnage ; mais n’oublions pas que c’est dans une épître dédicatoire que Voltaire s’exprime de la sorte.
Ces diverses inexactitudes de détail m’ont mis en doute sur l’ensemble du travail, et, reprenant moi-même l’étude de Condorcet dans les parties qui me sont accessibles ainsi qu’à tout le monde, je suis arrivé à une tout autre appréciation de l’homme et du caractère ; et, comme Condorcet a été un personnage politique des plus considérables, un de ceux qui font les révolutions, qui y poussent, qui en espèrent tout, qui ne s’arrêtent qu’au dernier moment, au bord extrême du précipice, et qui y tombent, j’ai cru utile de dégager mon point de vue avec franchise et hardiesse. […] Depuis M. de Malesherbes jusqu’à Robespierre, on aurait ainsi épuisé le cercle des jugements les plus disparates, et tous concorderaient sur un même point de condamnation à l’égard du personnage : quelque chose de louche dans la conduite, et de peu net dans le caractère.