C’est à cette invasion de 440 que se rapporte très-probablement l’établissement de la tribu franke qu’on trouve occupant le pays de Tongres en 445, ayant pour chef Clodion, puis Mérovée, le vrai noyau des Franks, conquérants de la Gaule, le groupe privilégié, destiné un jour à l’empire. […] Dans les grandes villes, dans les centres et aux environs, dans le rayon de la puissance administrative et dans le cercle de la haute société gallo-romaine, on parlait latin ; dans les cantons écartés et hors des grandes voies romaines, les idiomes du pays, qu’on sait être si tenaces, devaient persister. […] Tel d’entre eux qui, avec ses égaux, ne fait usage que du patois du pays, est très-mortifié et se montre parfois très-piqué, si quelqu’un d’une classe plus élevée vient à lui adresser la parole en ce même patois ; c’est en effet lui dire tacitement : Je juge à votre air et à vos manières que vous ne devez pas comprendre le langage des gens bien élevés. […] Si cela était vrai, même à Rome et aux portes de Rome, si, au premier siècle de notre ère, l’osque ou telle autre forme de langage italiote primitif étaient encore parlés dans des districts peu éloignés de la Ville éternelle, que devait-il donc arriver en Gaule, au cœur du pays, chez des populations qui avaient un fonds d’idiomes tout à fait différents de famille et réfractaires à la fusion ? […] « Dans tout le reste du pays, les Gallo-Romains parlaient une langue en grande partie dérivée du latin, à laquelle les historiens donnent le nom de langue romaine rustique, ou simplement de langue romaine.
Les bruits qui ont été répandus sur l’abandon de mes biens à mes créanciers, sur ma retraite en pays étranger et sur la cessation de ce travail périodique en France, me forcent à publier dès aujourd’hui cette explication, qui ne devait paraître que le mois prochain. […] J’aurais tort de m’étonner pourtant, en y réfléchissant, de cette indifférence : c’était naturel ; quand on demande justice ou faveur à son pays, le crime impardonnable, c’est de vivre. […] Les uns ont attribué ces embarras de fortune à des dissipations de main fabuleuses ou à des prodigalités de cœur sans prudence, afin d’avoir le droit de détourner les yeux et l’intervention du pays de revers selon eux trop bien mérités. […] Les cérémonies qui accompagnent ce culte sont conformes aux mœurs du pays. […] Nous le disons hardiment ; si on pouvait montrer sur les cartes d’aujourd’hui le pays de chacun et ses limites, les savants et les antiquaires d’Europe se mettraient à genoux pour avoir ce morceau, qui manque totalement à l’Europe et est en effet très piquant et très curieux.
Ils étaient passés commandants, colonels, généraux, un sur mille, à force de batailler dans tous les pays du monde. […] Je ne tenais plus en place ; sans cesse je me voyais sur le point d’abandonner le pays. […] » L’homme me dit : « De quel pays êtes-vous ? […] Comment suis-je revenu au pays ? […] » Personne au village ne croyait que j’en reviendrais ; pourtant le bonheur de respirer l’air du pays et de revoir ceux que j’aimais me sauva.
À chaque page, je suis tenté de m’écrier : « On monte donc toujours dans ce pays ! […] que nos fondateurs de Revues ont peu le sens de leur pays ! […] Il restait moderne et de son pays quand même. […] Mais il rêve avec le pays tout entier ! […] ils n’ont donc pas un coin de pays à eux !
« Un de ces doux et gais enfants qui vont de pays en pays, laissant voir leurs genoux par les trous de leur pantalon. […] De là misère, nécessité d’abandonner son enfant, retours de sa pensée vers son pays natal, où cependant elle n’avait d’autre famille que les noms du pays, les rues et les portes des maisons. […] Le pays, qui y gagne aussi, ne lui marchande pas la considération monétaire qui suit le succès commercial. Le roi l’a nommé maire de son pays et chevalier de la Légion d’honneur ; il a six cent mille francs de réserve déposés chez le banquier libéral, M. […] Ce qui lui fait croire qu’il se trompe et qu’il doit réparation à ce brave philanthrope enrichi, c’est l’arrestation inopinée d’un autre forçat, vieux gibier abruti de cour d’assises, un nommé Champmathieu, qui a volé des pommes dans le pays.
Il n’a manqué à leurs auteurs que d’avoir été élevés dans quelque pays de civilisation arriérée, et nourris dès leur enfance de ballades et d’histoires merveilleuses : avec cela ils auraient pu faire des romans historiques, non seulement sur les traditions de leur nourrice, mais sur d’autres pays et d’autres temps. […] L’Amérique du Nord, se dépouillant de ses forêts et de ses habitants sauvages, a fait entendre un long soupir, que Cooper a écouté et a su rendre ; l’Écosse a produit le génie observateur et pittoresque de Scott, qui, se trouvant tout formé et tout grandi, s’est ensuite transporté, quelquefois peu heureusement, hors de ses limites naturelles de temps et de pays. […] C’est en ce sens que Scott et Cooper font partie de l’art de notre époque ; ils tiennent au mouvement général de l’Humanité comme leurs pays tiennent à l’ensemble de la grande famille Américo-Européenne. […] Goethe cependant l’avait précédé de bien des années ; mais Goethe, dans une vie plus calme, se fit une religion de l’art, et l’auteur de Werther et de Faust, devenu un demi-dieu pour l’Allemagne, honoré des faveurs des princes, visité par les philosophes, encensé par les poètes, par les musiciens, par les peintres, par tout le monde, disparut pour laisser voir un grand artiste qui paraissait heureux, et qui, dans toute la plénitude de sa vie, au lieu de reproduire la pensée de son siècle, s’amusait à chercher curieusement l’inspiration des âges écoulés ; tandis que Byron, aux prises avec les ardentes passions de son cœur et les doutes effrayants de son esprit, en butte à la morale pédante de l’aristocratie et du protestantisme de son pays, blessé dans ses affections les plus intimes, exilé de son île, parce que son île antilibérale, antiphilosophique, antipoétique, ne pouvait ni l’estimer comme homme, ni le comprendre comme poète, menant sa vie errante de pays en pays, cherchant le souvenir des ruines, voulant vivre de lumière, de lumière éclatante, et se rejetant dans la nature comme autrefois Rousseau, fut franchement philosophe toute sa vie, ennemi des prêtres, censeur des aristocrates, admirateur de Voltaire et de Napoléon ; toujours actif, toujours en tête de son siècle, mais toujours malheureux, agité comme d’une tempête perpétuelle, en sorte qu’en lui l’homme et le poète se confondent, que sa vie intime répond à ses ouvrages ; ce qui fait de lui le type de la poésie de notre âge. […] Comment, nés dans le pays qui a produit la philosophie la plus audacieusement sceptique, et qui a presque entièrement accompli la destruction du Moyen-Âge social et religieux, ont-ils moins que ces fils de l’Angleterre et de l’Allemagne cette affreuse tristesse d’un rêve qui ne s’achève pas, et en même temps cette fierté de Satan et cette vie du désespoir, cette vitalité du poison, comme parle Byron2 ?
À moins d’emprunter toutes mes images à mes livres, ce qui me répugnait comme un larcin et comme un mensonge, il me fallait donc décrire d’après nature l’aride et pauvre printemps de mon pays. […] C’était un homme de cinquante à soixante ans ; il était le cinquième fils d’une nombreuse et remarquable famille de notre pays, appelée la famille des Bruys. […] Tout le pays aime à la retrouver, le matin, où il l’a laissée le soir. […] Ils me rappelèrent bien plus vivement cette scène, longtemps après, quand, visitant moi-même Athènes, la colline de l’Acropole, la roche taillée du Pnyx et les pentes dénudées du Pentélique, je reconnus une ressemblance parfaite entre ces collines rocailleuses de l’Attique et les collines ruisselantes de pierres de mon pays. […] C’est alors aussi que j’étudiai plus profondément les plus grands historiens littéraires de l’antiquité, pour raconter aussi les grands événements de mon pays.
Les élus étaient une commission de cinq membres, qui représentaient les états dans l’intervalle des sessions, et qui dirigeaient l’assiette des impôts, les travaux publics, et presque toute l’administration du pays. […] C’est à ce titre qu’il fut appelé par le comte de Charny, grand écuyer de France et lieutenant général pour le roi au pays de Bourgogne, à un conseil secret tenu par ce seigneur, le surlendemain de la Saint-Barthélemy (26 août 1572). […] À quoi ils firent réponse que le roi ne leur ayant rien donné par écrit, ils ne le pouvaient faire ; aussi qu’on se devait contenter qu’étant connus pour gentilshommes de qualité du pays, ils ne voudraient en chose de telle importance avancer un mensonge, dont le blâme et le péril tomberaient sur eux-mêmes. […] Le président déjoua ses menées, rendit cœur aux notables habitants, leur expliqua nettement l’intention du duc de Mayenne, qui était que le pays s’aidât du duc de Savoie contre les ennemis communs, et non qu’on se donnât à lui.
Dans un temps où notre pays est infesté de tant de fausses doctrines mortelles aux vraies méthodes, et traversé d’un détestable esprit où les charlatanismes et les timidités se combinent, sachons au moins les noms de ceux qui forment l’élite scientifique et philosophique, qui marchent à l’avant-garde de la pensée et demeurent l’espoir de l’avenir. […] L’intendance de Montauban était une des moins faciles du royaume, parce que les commissaires des Grands Jours, établis dans les années antérieures pour réduire administrativement et judiciairement certaines provinces centrales où le désordre s’était depuis longtemps acclimaté et enhardi, n’avaient point poussé leurs recherches jusqu’à Montauban, et qu’il semblait que ce fût encore « un pays ouvert à la tyrannie des grands, à l’indépendance des peuples et aux malversations des juges. » M. […] Une des parties les plus délicates de sa tâche était de faire exécuter, à l’égard des protestants, si nombreux dans ce pays, les édits gradués qui tendaient à multiplier les conversions anodines et qui acheminaient peu à peu à la grande et fatale Révocation. […] Comme il convient de se bien définir à soi-même les termes, même les plus courants et les plus connus, on appelait proprement dragonnades l’opération, en apparence très-simple, qui consistait à faire arriver dans un pays des dragons ou tout autre corps de cavalerie, à les loger chez des bourgeois, métayers ou fermiers protestants, ou même des nobles, et à les ruiner par ces logements prolongés qui, dans l’état encore très-neuf de la discipline militaire d’alors, et surtout quand on voulait bien y donner les mains et fermer les yeux, étaient accompagnés de quantités d’exactions, vexations, coups, viols, sévices et parfois meurtres ; on exemptait qui l’on voulait de ces logements, et on écrasait les autres.
Ces trois existences si diverses, successivement racontées et finement décrites, donnent beaucoup à penser et à réfléchir sur la forme que revêtent l’esprit et le cœur en trois pays et trois sociétés si dissemblables, sur les directions que parvient à se frayer la spontanéité humaine à travers des contraintes et des pressions si différentes. […] Or, Mme la comtesse Agénor de Gasparin, — c’est elle en toutes lettres, — femme d’un homme de cœur et d’un homme de bien, Genevoise de famille et de naissance, de la haute bourgeoisie ou de l’aristocratie de cette république (c’est tout un), passant certaines saisons à Paris, mais établie et vivant plus ordinairement en son château ou manoir au pied du Jura suisse, dans le canton de Vaud, dans le pays de Glaire d’Orbe, a publié, en ces dernières années surtout, une série d’esquisses, d’impressions morales ou pittoresques, de tableaux paysanesques ou alpestres avec intention et inspiration chrétienne très-marquée46, toute une œuvre qu’il est naturel de rapprocher des Lettres et Journaux d’Eugénie de Guérin. […] Notre âme s’étend sur ce qu’elle voit ; elle change comme les horizons, elle en prend la forme… » C’est joli et gracieux sans doute, remarque le critique anglais ; mais quelle différence avec le pinceau de Maurice peignant la nature en traits profonds, trouvés et neufs, disant au retour d’une course où il a vu les rives de la Loire, Chambord, Blois, Amboise, Chenonceaux, les villes des deux bords, Orléans, Tours, Saumur, Nantes et l’Océan grondant au bout : « De là je suis rentré dans l’intérieur des terres jusqu’à Bourges et Nevers, pays des grands bois, où les bruits d’une vaste étendue et continus abondent aussi. » Et ailleurs il parle de ce beau torrent de rumeurs que roule la cime agitée des forêts. […] « Chaque plante tient du sol, chaque fleur tient de son vase, chaque homme de son pays. » Qui le croirait ?
Il avait l’imagination tendre et vive ; enfant, sa pensée se tournait naturellement aux choses célestes, et, dans ce pays de montagnes, il s’était accoutumé à les considérer comme les colonnes qui portaient le palais du Roi des mondes ; il ne s’agissait que de gravir pour y atteindre : Comme cette pensée roulait sans cesse dans son esprit, nous dit M. de Rémusat, qui se fait ici le traducteur excellent et l’humble interprète du premier biographe, il arriva qu’une nuit, il crut la réaliser. […] Anselme avait, je l’ai dit, l’âme tendre, la conscience délicate ; ces reproches de son père et ceux qu’il se faisait à lui-même le portèrent à un grand parti : il résolut de quitter le pays ; accompagné d’un seul clerc pour serviteur, il traversa le Mont-Cenis ; épuisé de fatigue et défaillant, on raconte que, pour réparer un peu ses forces, il ne trouvait à manger que la neige du chemin : Un âne portait leur mince bagage ; le serviteur inquiet chercha s’il n’y trouverait pas quelque nourriture, et, contre son attente, il trouva du pain blanc qui leur rendit la vie. […] Lorsqu’il eut été élu malgré lui archevêque de Cantorbéry le 6 mars 1093, pendant un voyage qu’il faisait en Angleterre (l’Angleterre alors et la Normandie n’étaient presque qu’un même pays depuis la conquête), Anselme ne trouva point en lui toutes les qualités et les ressources nécessaires à sa position nouvelle ; en gardant toutes ses vertus, il ne sut point les armer suffisamment pour les conflits et les combats du siècle ; cette haute dignité ecclésiastique de primat d’Angleterre, à laquelle il dut un surcroît de célébrité, un mélange d’éclat et de disgrâce, deux exils, des retours triomphants et bénis, et finalement sa canonisation peut-être, cette haute dignité nous le montre plutôt inférieur à lui-même et dépaysé dans les affaires, craintif, obstiné et indécis, débile sinon d’âme, du moins de caractère. […] Non ; permettez-moi aussi de vous dire qu’il faut avoir meilleure espérance et d’un pays et d’une littérature où tant de plumes distinguées se remettent à l’œuvre, et où vous-même donnez l’exemple en revenant aux choses que vous savez et que vous exposez si bien.
dans ce pays d’évêques et d’archevêques sans vocation. […] — et qu’il fût d’Église, dans ce pays qui ne croit plus à l’Église, il fit longtemps partie d’une société peu ecclésiastique, qui s’intitulait la Société des Démoniaques à Crazy-Castle (en français : Château détraqué), la résidence de Hall Stevenson, un ami chez lequel on commençait déjà ces orgies dérisoires, — monacales et funèbres, — qui se sont plus tard continuées chez Lord Byron. […] Malgré cet habit de ministre anglican que sa naissance lui jeta sur les épaules, c’était un chrétien de l’Évangile dans le pays de la Bible, un chrétien qui aurait dit si bien à l’Église : « Ma mère ! […] Il y a plus, c’est par le sentiment chrétien infusé en lui et gardé au milieu des libres penseurs de sa terre natale, que le compatriote de Bolingbroke et de Tindal atteignit sans y penser à cette originalité qui n’est plus l’originalité anglaise, cette superbe de l’orgueil et de la personnalité, et qui fait de lui comme un charmant étranger dans son pays.
Ce que l’histoire consacre, ce qu’elle imprime dans ses livres, professe dans les chaires, et invoque à tous moments dans les discussions de l’une et l’autre Chambre ; ce que les journaux répètent et portent à la fois sur tous les points du pays, cela même deviendrait-il dangereux au théâtre, sous un point de vue tout impartial, et à travers le prisme purificateur de l’art ? […] Le poète aurait pu dire encore qu’il avait, fort jeune, et en plus d’une circonstance mémorable, donné à la monarchie et au prince d’humbles gages qu’il ne séparait point, dans sa pensée, des autres gages qu’on devait donner aussi aux libertés et aux institutions du pays ; il aurait pu (et le roi l’eût cru sans peine) protester de son aversion contre toute malice détournée, de sa sincérité d’artiste, de sa bonne foi impartiale à l’égard des personnages que lui livrait l’histoire ; et, alors, la conversation tombant sur le caractère de Louis XIII, et sur le plus ou moins de danger ou de convenance qu’il y aurait à le laisser paraître dans la pièce en litige, le poëte eût pu expliquer à loisir à l’auguste Bourbon que le drame n’ajoutait rien là-dessus, retranchait bien plutôt à ce qu’autorisait la franchise sévère de l’histoire, et que l’image de temps si éloignés et si différents des nôtres ne pouvait le moins du monde paraître une indirecte contrefaçon du présent.
[Le Pays, 20 mars 1853.] […] Ainsi, par exemple, quel illuminé était-ce donc que cet aventurier d’abbé de Bucquoy dont Gérard de Nerval nous raconte la vie, que ce païen Quintus Aucler, plus Grec et plus Romain, à lui seul, que tous les révolutionnaires, et qui voulait, dans un pays chrétien de tradition séculaire, rétablir officiellement le culte de Jupiter ?
[Le Pays, 22 juin 1853.] […] Ce sont les hommes comme Eugène Chapus qui pourraient créer dans notre pays ce genre spécial de littérature, à laquelle Balzac préludait si grandement dès 1830 par son Traité de la vie élégante.