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737. (1886) Revue wagnérienne. Tome I « Paris, 8 mai 1885. »

Cet instinct, ici, décide tout, étonnamment ; c’est lui qui donne à Beethoven sa claire aversion pour une manière de vivre pareille à celle de Haydn. […] Un pareil sentiment avait conduit, jadis, Spinoza, dans sa conscience de lui-même, à tailler des verres de lunettes, pour obtenir, par ce travail, le moyen d’entretenir sa vie. […] Un bonheur pareil allait, déjà, échoir à Mozart lorsque ce maître, trop tôt créé, mourut. […] À lui est pareil ce musicien devenu sourd.

738. (1889) L’art au point de vue sociologique « Chapitre neuvième. Les idées philosophiques et sociales dans la poésie (suite). Les successeurs d’Hugo »

Avec Sully-Prudhomme ce n’est plus le lyrique ébloui, tentant d’embrasser tout le dehors en son regard agrandi ; ce sont les yeux mi-clos de la réflexion sur soi, la vision intérieure, mais qui cependant s’élargit peu à peu, « jusqu’aux étoiles » : Tout m’attire à la fois et d’un attrait pareil : Le vrai par ses lueurs, l’inconnu par ses voiles : Un trait d’or, frémissant joint mon cœur au soleil Et de longs fils soyeux l’unissent aux étoiles238. […] Le vrai coupable est Celui qui a troublé le repos du néant pour en tirer le monde ; c’est cet Esprit flottant sur le chaos informe qui y a soufflé la vie et la forme : Emporté sur les eaux de la Nuit primitive, Au muet tourbillon d’un vain rêve pareil, Ai-je affermi l’abîme, allumé le soleil, Et pour penser : Je suis ! […] Puis le poète entre dans une église, au mois de Marie, et il entend le sermon d’un prêtre : Je l’entendis longtemps parler d’une voix dure, Mêlant son dogme trouble à la morale pure Et, dans son rêve noir et respirant l’effroi, Jetant les mots d’amour, d’espérance et de foi, Pareil à l’orateur qui, sous le drapeau rouge, Parlait aux malheureux réunis dans le bouge De progrès, de bonheur et de fraternité. […] L’esprit est un vaisseau, le doute est une mer, Mer sans borne et sans fond, où se perdent les sondes… Et, devant le grand ciel nocturne où tous ces mondes Étaient fixés, pareils aux clous d’argent d’un dais, J’étais triste jusqu’à la mort, et demandais Au Sphinx silencieux, à l’Isis sous ses voiles, S’il en était ainsi dans toutes les étoiles.

739. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Edgar Poe »

« Il y a si longtemps qu’on ne vous a vu, — dit-il à Poe ; — et comment pouvais-je deviner que vous vous mettriez en route par un froid pareil, pour venir me rendre visite ? […] En présence d’un oubli pareil, on se demande si le mutisme moral du poète a passé dans l’âme de son traducteur. […] Ce qu’après une pareille entrée en matière l’imagination était impatiente de connaître, c’était le poète d’Eureka et du Corbeau, et il n’est pas dans ces Histoires ! […] L’Aventure sans pareille d’un certain Hans Pfaall, le Canard au ballon, la Vérité sur le cas de M. 

740. (1857) Causeries du samedi. Deuxième série des Causeries littéraires pp. 1-402

Chez Goriot, rien de pareil : ce qui le désole, dans la vie de ses filles, ce n’est pas leur ignominie, mais seulement leur abandon. […] N’insistons pas trop : indiquer de pareilles fautes, c’est assez les punir. […] Hugo peut-il écrire de pareils vers ? […] demanderions-nous, si la sympathie même et la tendresse pouvaient excuser une question pareille. […] répond l’auteur, il faut que je sois tombé bien bas dans votre estime, puisque vous me croyez capable d’une pareille saleté ! 

741. (1882) Hommes et dieux. Études d’histoire et de littérature

Son exemple est efficace, son influence s’exhale du fond des forêts, et se répand sur la Grèce, pareille à ces vents froids qui purifient l’atmosphère. […] Depuis les guerres Puniques, Rome n’avait pas été en pareil péril. […] Quels combats durent se livrer dans une pareille âme le Stoïcien aux prises avec le César ! […] Ignorante sei tu che gli di villania, che non gliene diciam noi. » Cellini eut, avec ses papes, des scènes toutes pareilles. […] Ils se détachent de la phalange héroïque, sous le tranchant du glaive, pareils aux fragments d’un bas-relief mutilé.

742. (1915) Les idées et les hommes. Deuxième série pp. -341

Pour nous, frères chênes, gardons notre père Tolstoï, sur le tertre, d’une grandeur unique par le site, qui domine la plaine infinie… » On trouvera de pareilles beautés intelligentes et de pareilles musiques dans les chapitres que M.  […] Elle a de fines précautions, pareilles à des coquetteries. […] Mais il y a ici et là une pareille qualité, j’allais dire, une égale vertu de la réflexion scrupuleuse, un pareil don de l’analyse délicate et de la synthèse prompte, l’amour des idées et, à leur égard, cette vigilance, l’amour de la vérité. […] Mais, en 1815, second désastre, pareil à celui que subirent les contemporains de la Révolution. […] Et l’âme de Savignan, pareille à un palimpseste, deux écritures l’ont marquée, celle d’autrefois, celle d’aujourd’hui.

743. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Nouveaux voyages en zigzag, par Töpffer. (1853.) » pp. 413-430

car c’est ici ce que vous aimez ; et, en effet, dans une pareille figure ainsi peignée, ainsi accoutrée, ainsi indolente et occupée, pauvre et insouciante, respire dans tout son charme la poésie des champs. […] La nouveauté, sans doute, pour des citadins surtout ; l’aspect si rapproché de la mort, de la solitude, de l’éternel silence ; notre existence si frêle, si passagère, mais vivante et douée de pensée, de volonté et d’affection, mise en quelque sorte en contact avec la brute existence et la muette grandeur de ces êtres sans vie, voilà, ce semble, les vagues pensers qui attachent et qui secouent l’âme à la vue de cette scène et d’autres pareilles.

744. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Ramond, le peintre des Pyrénées — I. » pp. 446-462

Les développements en seraient du plus vif intérêt ; le rôle du capitaine Birk, animé du jeu original de Préville, captiverait, échaufferait ; et je garantirais presque la réussite d’une pareille entreprise. […] [NdA] Je retrouve dans ses Voyages au Mont-Perdu, publiés en 1801, un sentiment tout pareil, à l’occasion d’une chapelle de la Vierge qui se rencontre dans la partie la plus désolée de la vallée de Héas et qui y a créé un peu de civilisation et de vie.

745. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Histoire du Consulat et de l’Empire, par M. Thiers. (Tome XII) » pp. 157-172

Il me serait facile de m’occuper d’abord et uniquement de cette préface, qui, pareille à une conversation rapide, impétueuse, familière, touche à mille points, soulève mille questions, fait dire oui et non à la fois, dessine l’auteur et le livre, et dispense jusqu’à un certain point le critique qui n’a qu’un moment d’aller au-delà. […] Il a eu un pareil soin également envers les autres personnages de son histoire.

746. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Correspondance de Voltaire avec la duchesse de Saxe-Golha et autres lettres de lui inédites, publiées par MM. Évariste, Bavoux et Alphonse François. Œuvres et correspondance inédites de J-J. Rousseau, publiées par M. G. Streckeisen-Moultou. — II » pp. 231-245

La chaleur était à peine tombée avec le soleil ; les oiseaux, déjà retirés et non encore endormis, annonçaient, par un ramage languissant et voluptueux, le plaisir qu’ils goûtaient à respirer un air plus frais ; une rosée abondante et salutaire ranimait déjà la verdure… Ici une de ces descriptions naturelles dont il a le premier dans notre littérature donné le parfait exemple, mais où il a été depuis surpassé par ses grands disciples, par Bernardin de Saint-Pierre, par Chateaubriand, par George Sand, tous bien autrement particuliers, nuancés et neufs, et qui ne se contentent pas de peindre la nature en traits généraux devenus trop aisément communsy ; — et il continue : À ce concours d’objets agréables, le philosophe, touché comme l’est toujours en pareil cas une âme sensible où règne la tranquille innocence, livre son cœur et ses sens à leurs douces impressions : pour les goûter plus à loisir, il se couche sur l’herbe, et appuyant sa tête sur sa main, il promène délicieusement ses regards sur tout ce qui les flatte. […] C’est bien le même qui écrivait à son ami Coindet, de qui il appréhendait quelque supercherie pareille : « J’aime à profiter des soins de votre amitié, mais je n’aime pas qu’ils soient onéreux ni à vous ni à vos amis… Je vous crois trop mon ami pour prendre le bon marché dans votre poche ni dans celle d’autrui. » J’allais oublier de parler des lettres de Rousseau qu’on a recueillies dans ce volume.

747. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Sainte-Hélène, par M. Thiers »

Il n’existe pas de circonstances atténuantes, et l’on n’est pas admis à dire d’un pareil être : « Il fera mieux une autre fois. » C’est sur les pensées, sur les occupations historiques et morales du grand captif qu’il faut se rejeter pour n’avoir pas le cœur trop serré par ce supplice et cette lente agonie de près de six années à Sainte-Hélène. […] Et en général, cette école de philosophes systématiques et distingués qui, dans leur classification un peu bizarre des grands hommes de l’histoire, ne voulaient voir en Napoléon dont ils méconnaissaient toute l’œuvre de création civile qu’un grand et puissant rétrogradateur, ne saurait soutenir désormais un pareil sentiment après tant de paroles de sagesse, de haute clairvoyance et presque de prophétie sociale, sorties de Sainte-Hélène, et qui révèlent un fond d’âme égal ou supérieur, s’il se peut, aux actes, et parfois meilleur.

748. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Salammbô par M. Gustave Flaubert. (Suite.) » pp. 52-72

Il y a bien, au fond, un peu du souvenir de Mâtho dans ces redoublements d’inquiétude et d’exaltation de la jeune fille, qui se croit, comme beaucoup de ses pareilles, plus idéale et plus mystique qu’elle ne l’est : il y a pour elle, derrière le voile si ardemment invoqué, autre chose encore que la déesse. […] Où donc l’auteur a-t-il pris une pareille idée des Conseils de Carthage ?

749. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Daphnis et Chloé. Traduction d’Amyot et de courier »

On est confondu, en vérité, de lire un pareil jugement, de la part d’un si savant homme et qui avait traduit le livre dans sa jeunesse, de celui même qui, en homme de goût, relisait son Théocrite une fois chaque année, au printemps. […] le premier jugement avait couru et court encore ; c’est le seul qu’on ait réimprimé et qui se lise en tête de toutes les éditions de Bayle qui, dans son Dictionnaire, s’autorise, sans la contrôler, de l’opinion de Huet, ne songe qu’à renchérir, à son tour, sur l’article des mœurs ; non qu’il en prenne la défense et qu’il fasse le rigoriste, mais en érudit qui ne se trouve pas souvent à pareille fête, il badine à sa façon derrière du latin et du grec, il se gaudit des légèretés du roman en y cherchant le graveleux et sans y soupçonner la délicatesse.

750. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « M. Octave Feuillet »

Sibylle, tout inexpérimentée qu’elle est en pareille matière, donne à la jeune femme, son amie, le seul conseil droit et sage : «  À votre place, ce que je ferais, le voici : je me confierais tout simplement à mon mari. » Blanche suit le conseil et s’en trouve bien. […] C’est insensé : car d’abord Raoul n’a point là-dessus de parti pris absolu et irrévocable ; car, de plus, Sibylle, qui exerce un grand ascendant sur lui, doit espérer, Dieu aidant, de modifier son opinion et de l’amener à la sienne ; car, même chrétiennement parlant, il n’y a pas lieu, en pareil cas, de jeter le manche après la cognée, puisque saint Paul a écrit que « la femme fidèle justifierait le mari infidèle. » Aussi, à partir de ce moment, tout intérêt selon moi, cesse raisonnablement de s’attacher à Sibylle, qui se conduit en personne peu éclairée, en fille volontaire et opiniâtre, en fanatique fidèle à la lettre plus qu’à l’esprit, et, pour trancher le mot, comme une petite sotte.

751. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « La comtesse d’Albany par M. Saint-René Taillandier. »

Tandis que son Ombre continuait de planer sur les monts et les lacs de la nuageuse Écosse, et que l’héroïque fantôme, pareil à ceux d’Ossian, ne cessait d’y grandir et d’y régner à l’état de légende, lui, devenu tout chair et matière, et comme s’il n’était plus que la dépouille de lui-même, s’accoutumait à végéter sur le continent, livré au vin et à la débauche, dans des habitudes crapuleuses qui le menèrent à l’abrutissement. […] Certes, cet homme de haut talent et, jusqu’à un certain point, de génie, de noble aspect et « d’une figure avantageuse » (ainsi en parlent ceux qui l’ont vu et qui ne songeaient point à faire, comme aujourd’hui, des caricatures à tout propos) ; cet homme à l’âme ardente, élevée, d’un esprit libre, d’un caractère indépendant et fier, qui n’avait pu se plier à la vie de Turin, et qui n’hésita pas, en renonçant à son pays, à sacrifier les deux tiers de sa fortune pour se mieux dévouer à l’objet de son culte ; le poète qui, dans la Dédicace de Myrrha, s’étonnant d’avoir tant tardé à nommer publiquement celle qui l’inspire, lui disait : « Ma vie ne compte que depuis le jour qu’elle s’est enlacée à ta vie » ; un pareil homme méritait que la comtesse d’Albany, déçue et frappée dans sa destinée, crût elle-même s’honorer par un tel choix, et ne pas perdre, même aux yeux du monde, en échangeant royauté contre royauté.

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