Dans ce siècle, dont la langue ressemble à une charmille taillée de Versailles, je ne connais qu’un homme qui aurait pu traduire Hérodote, s’il l’avait voulu : c’est le traducteur d’Anacréon qui, d’un coup de sa baguette gauloise, a transfiguré, à ravir les Grecs s’ils avaient pu l’entendre, L’Amour mouillé, ce chef-d’œuvre, en ce double chef-d’œuvre : J’étais couché mollement, Et, contre mon ordinaire, Je dormais tranquillement, Quand un enfant s’en vint faire À ma porte quelque bruit : Il pleuvait fort cette nuit, etc., etc.
Montrez tout ce que vous voudrez des ruines de cette femme, et la poignée de cheveux s’il vous en reste, de ces cheveux blanchis en une nuit, et les souliers percés qu’elle traînait à la prison de ses pieds de reine, et la pauvre robe d’indienne brune et blanche, et toute rapiécée, qu’elle portait au Temple, et le mouchoir trempé par Mingault dans le sang de l’échafaud, et même la robe de linon immortelle de cette reine qui commença par le bonheur pour mieux finir par le martyre !
Montrez tout ce que vous voudrez des ruines de cette femme, et la poignée de cheveux s’il vous en reste, de ces cheveux blanchis en une nuit, et les souliers percés qu’elle traînait à la prison, de ses pieds de reine, et la pauvre robe d’indienne brune et blanche, et toute rapiécée, qu’elle portait au Temple, et le mouchoir trempé par Mingault dans le sang de l’échafaud, et même la robe de linon immortelle de cette reine qui commença par le bonheur pour mieux finir par le martyre.
» et l’autre disant : « En Europe, maintenant, il fait nuit. » Il savait qu’il n’y avait plus, puisqu’il l’avait vue disparaître, de Monarchie, en France, qu’on pût conseiller ou qu’on pût avertir… Aussi garda-t-il stoïquement son livre.
Selon Saint-René Taillandier, qui est le Christophe Colomb de ces lettres, le Monsieur Josse de ces bijoux qu’il a montés dans le similor de son Introduction, ces lettres révèlent en Sismondi des tendresses, des délicatesses et des nuances dont personne jusqu’à présent ne s’était douté, et nous font entrevoir un Sismondi charmant, pris sous l’autre, et que Saint-René Taillandier s’est mis en train de dégager, comme le phaéton de la voiture à foin embourbée dégage sa voiture : Prends ton pic et romps-moi ce caillou qui te nuit !
… Le nom même de Dieu, ce diable de vieux mot qui embarbouille l’esprit et nuit à sa clarté suprême, M.
Les ombres de la nuit allongent les monuments et les statues… Corneille, ce génie dans l’obscurité, entrevu, presque caché, — non pas seulement dans une petite maison noire d’une rue noire de Rouen mais dans la silencieuse fierté de son cœur, — une autre ombre !
Seulement, tels qu’ils sont, il faut bien le dire, ils n’ont ni les développements, pleins de grandeur de ces Mille et une Nuits qui sont les épopées de l’enfance, ni le dramatique et le concentré de Perrault, — ce Shakespeare en raccourci s’il avait du style et les grâces riantes ou mélancoliques de cette fée des Contes de fées, la ravissante madame d’Aulnoy !
Sous prétexte de ne faire aucun cas de ses nobles aïeux et de les subordonner tous dans leur ordre de noblesse à ce qui est de l’ordre de l’esprit, il les a montrés et déroulés en une longue lignée, mais pour les replonger aussitôt dans la nuit, et il s’est représenté, lui, le dernier, comme le seul glorieux, le seul vraiment ancêtre et dont on se souviendra ; car seul il a gravé son nom sur le pur tableau des livres de l’esprit. […] On n’a qu’à lire, si l’on en doutait, la préface qu’il mit au drame de Chatterton, et qui a pour titre : Dernière nuit de travail. — Du 29 au 30 juin 1834. […] Le Christ demande à son père le prix de sa venue : il pose les éternels problèmes du bien et du mal, de la vérité et du doute, de la vie et de la mort, de la Providence et du Hasard, tous les pourquoi possibles, en philosophie naturelle, en philosophie morale, en politique : Et si les nations sont des femmes guidées Par les étoiles d’or des divines idées, Ou de folles enfants sans lampe dans la nuit, Se heurtant et pleurant, et que rien ne conduit ?
Ce village, bâti comme pour une nuit dans la solitude, ressemble (ou plutôt ressemblait alors) à un groupe de tentes noirâtres, dressées pour une halte de pasteurs dans les steppes de Crimée par une tribu errante de Tartares. […] On m’offrit pour la nuit une place dans le fenil, et je partageai le souper de la famille de l’horloger pasteur. […] L’ombre de ses longs cils sur ses joues, le soir, quand elle lut en notre présence la prière d’avant la nuit aux enfants, flotte encore dans mes regards après quarante ans, comme si la lampe qui éclairait son suave profil n’était pas éteinte encore.
Le duc venait souvent le voir le soir, et ils restaient à causer sciences jusqu’à une heure avancée de la nuit ; et souvent le temps me durait et je me demandais si le duc ne partirait pas. […] Un jour, il me sonna au milieu de la nuit ; j’entre, il avait roulé son lit de fer près de la fenêtre, et, de son lit, couché, il contemplait le ciel. […] Le jour suivant, mon maître fit part à la cour de ses observations, et une dame dit à l’oreille de sa voisine : “Goethe extravague” ; mais le duc et les autres messieurs ont cru Goethe, et on apprit bientôt qu’il avait vu juste, car quelques semaines plus tard arriva la nouvelle que, cette même nuit, une partie de Messine avait été détruite par un tremblement de terre. » * * * Lundi, 17 novembre 1823.
Le poète y souhaite « pour la France une littérature qu’on puisse comparer à une ville du moyen âge », et si on lui demande ce qu’il a voulu faire lui-même dans son livre, il répond : une mosquée, « la mosquée orientale, au dôme de cuivre et d’étain, aux portes peintes, aux parois vernissées, avec son jour d’en haut, ses grêles arcades, ses cassolettes qui fument jour et nuit, ses versets du Koran sur chaque porte, ses sanctuaires éblouissants, et la mosaïque de son pavé et la mosaïque de ses murailles ; épanouie au soleil comme une large fleur pleine de parfums ». […] Ces danseuses nues qui tourbillonnent emportées par un mouvement vertigineux, qui semblent ivres de plaisir et prêtes à se pâmer, cette ronde effrénée où le marbre palpite d’une vie si intense et si voluptueuse que, lors de sa mise en place, la pudeur effarouchée de quelque pieux vandale l’inonda une nuit d’une épaisse couche d’encre, comment les regarder sans entendre aussitôt dans sa mémoire les flons-flons endiablés d’Offenbach, sans revoir par les yeux de l’esprit cette folle orgie dont la cour impériale et les rois en exil ou en vacances menaient le branle et dont témoignent encore les opérettes d’Halévy et Cie ? […] Et la description reprend : « Ce soir, au bord de l’eau, la crécelle lointaine des rainettes ; par instants, le cri guttural du tire-arache dans les roseaux ; un poisson qui saute ; des arbres qui font dans le ciel une ombre mouillée comme dans l’eau, et dans toute cette nature la paix de la nuit, de la mort.
L’Orient Vierge de Mauclair est mieux qu’un roman fantastique parce qu’il est influencé des Rosny et les Contes dans la Nuit de Frédéric Boutet ont une tenue philosophique. […] Délicieux et fins, ses vers sont comparables à ces fruits d’Orient qu’ils évoquent en le charme des nuits. Ils sont souples et gracieux comme des palmes, nuancés en d’infinies harmonies L’auteur d’Yvelaine aime les soirs d’enchantement, les palais de songe, les sources maléfiques envoûteuses des fleurs, les mystères des nuits d’orage où crient les voix sous les gibets, les souvenirs qui dorment au fond des mémoires et qui font frissonner les enfants.
La nuit, échappant au cadenas vigilant du bouquiniste, ils mènent un cortège plus fantastique que celui de Raffet. […] Cet être parfait, cette femme qui eût été supérieure à son compagnon lui-même, effraye le Créateur qui livre son chef-d’œuvre à Satan pour en délivrer l’homme : à partir de ce jour, le couple infernal tourmentera les jours et les nuits d’Adam et d’Ève et de leur postérité. […] On découvrira, dans les « Jardins de Lombardie », une fantaisie sur les poèmes de l’Arioste et du Tasse dont il a traduit avec un coloris ravissant « le romanesque plus oriental que la mélancolie des nuits asiatiques ». […] Ces quatre bayadères qui tournaient dans les parfums d’une chambre close par une nuit accablée d’Orient, ces beautés fières et tristes qui me rassasient des rêves de la mort, et dont je n’ai jamais satiété, sont-ce des fantômes, une chimère de mon cœur, une pure idée métaphysique ! […] Une nuit qu’il entrait dans Tournai avec son armée, le jeune Louis XIV a vu, à la lueur des torches, Poccancy sur un balcon à côté d’une femme belle, désirable, dans un désordre galant.
On est mineur de père en fils ; on a commencé tout enfant à descendre dans la mine ; on a travaillé des vingt et des trente ans à cinq cents mètres de profondeur, dans le silence et dans la nuit. […] Volontiers il prendrait à son compte les belles paroles du sculpteur Védrine comparant les générations d’art aux barques qui se sauvent dans le vent sous la nuit menaçante. […] Depuis cette terrible nuit, elle ne pense plus à Frantz, elle ne se sent plus digne d’aimer et d’être aimée. […] Dans le délire de ses nuits, c’est cela qu’elle répète sans cesse : J’ai honte ! […] Dans le silence agité de la nuit, l’hymne révolutionnaire se détachait, lent, grave, tout rempli de solennelle vengeance.