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406. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Première partie — Section 47, quels vers sont les plus propres à être mis en musique » pp. 479-483

La nature fournit elle-même, pour ainsi dire, les chants propres à exprimer les sentimens. […] Ainsi le musicien en composant sur des vers, tels que ceux dont nous parlons ici, fait des chants aussi variez que la nature même est variée. […] La nature ne fournit presque rien à l’expression. […] Il faut donc qu’il se jette dans des chants, plûtôt nobles et imposans qu’expressifs, et parce que la nature ne lui aide pas à varier ces chants, il faut encore qu’ils deviennent à la fin uniformes.

407. (1894) Écrivains d’aujourd’hui

C’est une nature de travailleur appliqué, consciencieux et un peu lourd. […] Et c’est bien cela qui est de nature à nous effrayer. […] La poésie de la nature. […] Jules Lemaître est « en sympathie » avec la nature de son pays. […] La nature humaine est infiniment plus complexe.

408. (1907) L’évolution créatrice « Chapitre II. Les directions divergentes de l’évolution de la vie. Torpeur, intelligence, instinct. »

Il faut reconnaître que tout n’est pas cohérent dans la nature. […] où finit celle de la nature ? […] Mais c’est là une différence de degré plutôt que de nature. […] Déterminons plus précisément la nature des relations que l’intelligence établit. […] Entre les animaux et lui, il n’y a plus une différence de degré, mais de nature.

409. (1904) Zangwill pp. 7-90

C’est ainsi que l’esprit reproduit la nature ; les objets et la poésie du dehors deviennent les images et la poésie du dedans. […] La nature jusqu’ici a fait ce qu’elle a pu ; les forces spontanées ne dépasseront pas l’étiage qu’elles ont atteint. C’est à la science à prendre l’œuvre au point où la nature l’a laissée. […] Tout dans la nature se réduit au mouvement. […] En sorte qu’on doit le considérer comme le représentant et l’abrégé d’un esprit duquel il reçoit sa dignité et sa nature.

410. (1880) Goethe et Diderot « Diderot »

Mais quelle différence entre la nature de ces pacants et la nature aristocratique de Voltaire ! […] Singulière et rare nature d’entre-deux ! […] L’Interprétation de la nature n’est donc point un système. […] Gœthe seul, l’incomparable Gœthe, a pu dépasser cet ennui que Diderot dégorge dans son Interprétation de la nature. […] il était, de nature, prédicateur.

411. (1874) Histoire du romantisme pp. -399

« Devions-nous cette préoccupation sublime à des natures heureuses ? […] Elle avait des accents de nature, des cris de l’âme qui bouleversaient la salle. […] Les œuvres de l’art lui cachaient un peu les œuvres de la nature. […] Cabat avait découvert la nature sans aller bien loin. […] Sans doute la nature inculte vaut mieux, mais il y a un charme dans cette nature arrangée.

412. (1866) Nouveaux essais de critique et d’histoire (2e éd.)

Le conseil est contraire à sa nature. […] Une seule idée, celle de la nature. […] Par cette conformité, la raison, imitatrice de la nature, participe à la majesté de la nature. […] Il n’y a qu’un être parfait, la nature ; il n’y a qu’une idée parfaite, celle de la nature ; il n’y a qu’une vie parfaite, celle où la volonté de la nature devient notre volonté. […] Les premiers affranchissent l’homme de la nature en lui déclarant que la nature n’existe pas ; les seconds affranchissent l’homme de la nature en lui déclarant que l’âme est une monade sur laquelle la nature n’a pas de prise.

413. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — R. — article » pp. 109-114

Si on trouve des hommes portés l'injustice, à la malignité ; de telles dispositions sont dans eux des vices acquis par l'éducation, les circonstances, les passions, & non des germes inséparables de la Nature humaine. […] Aucune vertu, même momentanée, qui, selon lui, ne soit produite par un orgueil sensible ou déguisé ; & c'est sur ce faux principe qu'il établit ses réflexions chagrines contre la Nature humaine. […] Ne reprochons qu'à nous-mêmes, non à la Nature, les vices qui nous tyrannisent. Quand bien même la Nature seroit vicieuse, la Société nous offre des moyens, la Religion nous fournit des secours, qui réduiront toujours le méchant à n'imputer qu'à lui seul le juste blâme de sa perversité.

414. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre second. Poésie dans ses rapports avec les hommes. Caractères. — Chapitre VI. La Mère. — Andromaque. »

L’antiquité ne parle pas de la sorte, car elle n’imite que les sentiments naturels : or, les sentiments exprimés dans ces vers de Racine ne sont point purement dans la nature ; ils contredisent au contraire la voix du cœur. […] Or, de tels préceptes sont directement opposés au cri de l’orgueil : on y voit la nature corrigée, la nature plus belle, la nature évangélique.

415. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre troisième. Suite de la Poésie dans ses rapports avec les hommes. Passions. — Chapitre premier. Que le Christianisme a changé les rapports des passions en changeant les bases du vice et de la vertu. »

Cette seule transmutation de principes montre la nature humaine sous un jour nouveau, et nous devons découvrir dans les passions des rapports que les anciens n’y voyaient pas. […] Un de nos plus doux sentiments, et peut-être le seul qui appartienne absolument à l’âme (les autres ont quelque mélange des sens dans leur nature ou dans leur but), c’est l’amitié. […] 30 « Mère, voilà ton fils ; disciple, voilà ta mère. » Le christianisme, qui a révélé notre double nature et montré les contradictions de notre être, qui a fait voir le haut et le bas de notre cœur, qui lui-même est plein de contrastes comme nous, puisqu’il nous présente un Homme-Dieu, un Enfant maître des mondes, le créateur de l’univers sortant du sein d’une créature ; le christianisme, disons-nous, vu sous ce jour des contrastes, est encore, par excellence, la religion de l’amitié. […] Loin de flétrir l’imagination, en lui faisant tout toucher et tout connaître, il a répandu le doute et les ombres sur les choses inutiles à nos fins ; supérieur en cela à cette imprudente philosophie, qui cherche trop à pénétrer la nature de l’homme et à trouver le fond partout.

416. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Troisième partie. Beaux-arts et littérature. — Livre troisième. Histoire. — Chapitre IV. Pourquoi les Français n’ont que des mémoires. »

Trop occupés d’une nature de convention, la vraie nature nous échappe ; nous ne raisonnons guère sur celle-ci qu’à force d’esprit et comme au hasard ; et, quand nous rencontrons juste, c’est moins un fait d’expérience qu’une chose devinée. […] Les théories générales ne sont pas de la nature de l’homme, le vrai le plus pur a toujours en soi un mélange de faux. La vérité humaine est semblable au triangle, qui ne peut avoir qu’un seul angle droit, comme si la nature avait voulu graver une image de notre insuffisante rectitude dans la seule science réputée certaine parmi nous.

417. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Première partie — Section 26, que les sujets ne sont pas épuisez pour les peintres. Exemples tirez des tableaux du crucifiment » pp. 221-226

La nature est si variée qu’elle fournit toujours des sujets neufs à ceux qui ont du genie. Un homme né avec du genie voit la nature, que son art imite avec d’autres yeux que les personnes qui n’ont pas de genie. […] Son tableau répresente le moment où la nature s’émut d’horreur à la mort du créateur ; le moment où le soleil s’éclipsa sans l’interposition de la lune, et où les morts sortirent de leurs sepulchres. […] La bible qui est celui de tous les livres qu’on lit le plus, ne nous apprend-elle pas que la nature s’émût d’horreur à la mort de Jesus-Christ, et que les morts sortirent de leurs tombeaux ?

418. (1859) Cours familier de littérature. VIII « XLIVe entretien. Examen critique de l’Histoire de l’Empire, par M. Thiers » pp. 81-176

C’est le système qui parle, tandis que dans l’exécution c’est la nature qui agit. La nature, dans M.  […] Il a fait le système avec sa volonté ; il a fait son histoire avec sa nature. […] Cet élément de la nature de M.  […] On sent là un acteur inné, formé par la nature et ayant deviné l’expérience.

419. (1880) Goethe et Diderot « Gœthe »

Et quoi d’étonnant, puisque, de nature et de volonté, Gœthe ne voit jamais les choses que par leur côté extérieur ? […] Et, de fait, Gœthe était tout cela de nature. […] Il s’était même brouillé avec Jacobi, l’auteur des Choses divines, parce que Jacobi croyait que la Nature cachait Dieu, tandis que lui, Gœthe, croyait que la Nature était dans Dieu et Dieu dans la Nature, ce qui est le panthéisme indou aussi bien que le panthéisme allemand. […] Sa nature n’est pas une, mais mêlée comme son talent, qui est de l’ordre composite et même confus. […] Et la comparaison du manteau était de trop, car l’âme de Gœthe n’est, elle-même, de nature, qu’une toile cirée.

420. (1898) Politiques et moralistes du dix-neuvième siècle. Troisième série

Seulement, tout en obéissant à ce penchant de sa nature, il s’égare. […] Mais ils ne le sont pas de par leur nature même et de par la nature. […] La nature est l’inégalité et l’iniquité et l’injustice même. […] La nature a des uniformités. […] En fait il n’y a pas un atome d’égalité ni même de justice dans la nature.

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