Après la mort de Socrate, dont il avait été le disciple, il osa paraître en deuil dans Athènes, aux yeux de ce même peuple assassin de son maître ; et des hommes qui parlaient de vertus et des lois en les outrageant, ne manquèrent pas de le nommer séditieux, lorsqu’il n’était que sensible. […] On prétend que Démosthène l’admirait ; il fut loué par Socrate ; Platon en a fait un magnifique éloge ; Cicéron l’appelle le père de l’éloquence ; Quintilien le met au rang des grands écrivains Denys d’Halicarnasse le vante comme orateur, philosophe et homme d’État ; enfin, après sa mort, on lui érigea deux statues, et sur son mausolée on éleva une colonne de quarante pieds, au haut de laquelle était placée une sirène, image et symbole de son éloquence. […] Et d’abord, qui croirait que l’homme qui prit le deuil à la mort de Socrate, ait composé un éloge d’Hélène ?
Le prétexte de sa mort fut son attachement au calvinisme. […] Il est mort en 1729, dans sa quatre-vingt troisième année. […] La mort funeste de ce bon roi les priva d’un père. […] Il en fit, après sa mort, un second dans les limbes, pour y recevoir les enfans morts sans baptême. […] Les jésuites, à la mort de ce père, réclamèrent les papiers.
Fâcheux contretemps pour notre négociateur ; cette mort lui faisait perdre tout le fruit du succès de son opération. […] » La mort choisit les siens, et la troupe repart. […] » Car il s’agit de réveiller les morts. […] Le souvenir même se trouvait exempt de la pourriture des morts. […] la mort, la défaite, le triomphe de la force injuste sur la faiblesse et sur le droit.
Du côté de la mort. […] On a beau se prétendre explorateur, on ne s’en cogne pas moins à des théories de mort, d’une mort hypocritement maquillée aux couleurs de la vie, et dont la sagesse est vantée, comme si un cadavre pouvait avoir quelque mérite à ne point gambiller. […] Mais pour un Lafcadio promis sinon à la guillotine, du moins à la mort violente, comme pour un Barrès qui s’achemine vers le conformisme, même fond d’exaspération sexuelle. […] La retenir par le collier n’eût donc été qu’une manière à la fois de jouer le bon maître et d’exaspérer, dans une si calme personne, l’envie de courir, de courir jusqu’à la mort. […] On a prétendu ceux de la pensée, les attributs mêmes de la mort.
et nous ce pendant nous consumons notre âge Sur le bord inconnu d’un étrange rivage, Où le malheur nous fait ces tristes vers chanter, Comme on voit quelquefois, quand la mort les appelle, Arrangés flanc à flanc parmi l’herbe nouvelle, Bien loin sur un étang trois cygnes lamenter. […] Mais ce qui était le mieux dans ce petit Recueil, qui ne parut qu’après la mort de Du Bellay, c’était son Élégie latine à son ami Jean de Morel, une pièce essentielle, qui résume toute sa biographie, et qui, rapprochée aujourd’hui de sa lettre française d’apologie au cardinal, ne laisse rien à désirer. Je ne voudrais plus y joindre, pour nous donner l’entier spectacle de l’âme et des dispositions intérieures du pauvre et triste poète, dans les derniers mois de sa vie, qu’une autre lettre française de lui adressée à un ami (le même Morel probablement), sur la mort du feu roi et le département de Madame de Savoie. […] Or Dieu a voulu que je portasse ma part de cette perte commune, m’ayant la fortune, par le triste et inopiné accident de cette douloureuse mort, retranché tout à un coup, comme à beaucoup d’autres, le fil de toutes mes espérances. […] Et qui seroit si fol de se vouloir dorénavant travailler l’esprit pour faire quelque chose de bon et digne de la postérité, ayant perdu la faveur d’un si bon prince et la présence d’une telle princesse, qui, depuis la mort de ce grand roi François, père et instaurateur des bonnes lettres, étoit demourée l’unique support et refuge de la vertu et de ceux qui en font profession ?
Le premier de ces instincts, d’abord physique, lui commande de se rapprocher de sa mère sous peine de mort ; il crée la famille, cette sainte unité de l’ordre social. […] Rousseau mène directement à ces emblèmes ; le commandement est le crime, et l’obéissance est la mort. […] C’est la civilisation des sens, beau phénomène, mais phénomène court comme le temps, borné comme l’espace, fini comme la poussière organisée, périssable comme la mort. […] Rousseau et de ses disciples ne promet à l’humanité que des biens matériels et quelques souffrances égales pour tous, des luttes pour ou contre une souveraineté sans cesse imposée par les tyrans, sans cesse reconquise par les peuples ; des droits qui ne reposent que sur des révoltes de tous contre tous, et qui ne sont contresignées qu’avec du sang, des métiers ou des arts tout manuels ; des lois toutes égalitaires pour consoler au moins le malheur de chacun par le niveau du malheur commun, puis la mort ensevelissant une société de poussière vivante dans une poussière morte. […] En un mot, le vrai contrat social, au lieu de donner pour fin à la société mortelle la mort, donne pour fin à la société spiritualiste sur la terre le sacrifice, et pour fin à la société divinisée après la vie l’immortalité !
Laffitte ; puis il était revenu se laisser arrêter par l’agent de police Javert, et condamner à mort. À mort ! […] D’abord à cinq ans pour un morceau de pain, condamnation impossible, pour un morceau de pain origine de tout, volé à bonne intention chez le boulanger de son village ; ensuite à mort après dix-neuf ans de sa peine accomplie ! […] La détresse du peuple, les travailleurs sans pain, le dernier des Condés disparu dans les ténèbres, Bruxelles chassant les Nassau comme Paris les Bourbons, la Belgique s’offrant à un prince français et donnée à un prince anglais, la haine russe de Nicolas, derrière nous deux démons du midi, Ferdinand en Espagne, Miguel en Portugal, la terre tremblant en Italie, Metternich étendant la main sur Bologne, la France brusquant l’Autriche à Ancône, au nord on ne sait quel sinistre bruit de marteau reclouant la Pologne dans son cercueil, dans toute l’Europe des regards irrités guettant la France ; l’Angleterre, alliée suspecte, prête à pousser ce qui pencherait et à se jeter sur ce qui tomberait ; la pairie s’abritant derrière Beccaria pour refuser quatre têtes à la loi, les fleurs de lis raturées sur la voiture du roi, la croix arrachée de Notre-Dame, la Fayette amoindri, Laffitte ruiné, Benjamin Constant mort dans l’indigence, Casimir Périer mort dans l’épuisement du pouvoir ; la maladie politique et la maladie sociale se déclarant à la fois dans les deux capitales du royaume, l’une la ville de la pensée, l’autre la ville du travail ; à Paris la guerre civile, à Lyon la guerre servile ; dans les deux cités la même lueur de fournaise ; une pourpre de cratère au front du peuple ; le midi fanatisé, l’ouest troublé, la duchesse de Berry dans la Vendée, les complots, les conspirations, les soulèvements, le choléra, ajoutaient à la sombre rumeur des idées le sombre tumulte des événements. » VIII Tout cela mène à ce que l’auteur nomme l’Épopée de la rue Saint-Denis, c’est-à-dire aux barricades. […] Nous surtout, qui voulons supprimer la peine irréparable de mort en matière civile, et qui avons eu l’audace de la supprimer même en politique, nous n’aimons pas la peine corruptrice des bagnes, et nous avons, dans nos nombreux discours sur ce sujet, réclamé un pénitentiaire colonial avec une législation spéciale, et des prisons lointaines et graduées, pour donner la sécurité à la société innocente, contre les bêtes féroces de la ménagerie humaine ; mais, la prison pénitentiaire coloniale n’existant pas encore, il faut bien reconnaître à la société le droit sacré de se défendre en attendant et de se séparer de ce qui la menace en la souillant.
Voilà un auteur qui eût été bien surpris si on lui avait dit qu’un siècle après sa mort, on le priserait, non comme le meilleur défenseur qu’ait eu le parti des ducs et pairs, mais comme un grand écrivain. […] Le journal de la mort de Louis XIV nous transporte au milieu de sa cour et jusque dans sa chambre. […] Le hasard du sujet, non le propos de l’auteur, a donné une forme plus régulière au récit de la mort de Monseigneur, le plus beau morceau peut-être de ces Mémoires. Quel tableau que celui de ces espérances détruites par la mort du prince ; de ce règne dévoré d’avance ; de ces dettes contractées sur une succession qui ne doit pas s’ouvrir ; de ce deuil extérieur de tous, qui cache tant de pensées diverses et la profonde joie de quelques-uns ; de ce vieux roi qui pleure à la porte de son fils ! […] Mais l’œuvre de Tacite n’en est que plus étonnante ; et celui-là sera toujours le premier des historiens qui a su se rendre présents, par l’imagination et la sensibilité, des événements si loin de lui, et qui nous émeut de morts arrivées il y a deux mille ans dans la famille des Césars, presque autant que Saint-Simon de ces morts qui réduisaient en quelques semaines la famille de Louis XIV à un vieillard et à un enfant.
Quel monde de héros s’est ainsi, d’âge en âge, superposé au monde des vivants et des morts ! […] Madeleine, un jour, tombera dans tes bras en te demandant grâce ; tu auras la joie sans pareille de voir une sainte créature s’évanouir de lassitude à tes pieds ; tu l’épargneras, j’en suis sûr, et tu t’en iras, la mort dans l’âme, pleurer sa perte pendant des années. […] Car elle ne conduit qu’à l’un ou à l’autre de ces deux dénouements : au renoncement qui est une souffrance, ou à une victoire, qui est une autre souffrance par la satiété, le mépris ou la mort qu’elle entraîne. […] Il est écrit à la veille de la mort de Fromentin, et il fait beaucoup plus que nous montrer un talent fortifié par douze années de méditation et d’étude : il nous révèle la véritable voie de l’auteur ; il nous apprend que celui qu’on savait être déjà un peintre délicat, un voyageur intéressant, un romancier pénétrant et émouvant, était avant tout un critique d’art original et novateur. […] « Ni gesticulations, ni cris, ni horreurs, ni trop de larmes… Le Christ est une des plus élégantes figures que Rubens ait imaginées pour peindre un Dieu… Vous n’avez pas oublié l’effet de ce grand corps un peu déhanché, dont la petite tête, maigre et fine, est tombée de côté, si livide et si parfaitement limpide en sa pâleur, ni crispé, ni grimaçant, d’où toute douleur a disparu, et qui descend avec tant de béatitude, pour s’y reposer un moment, dans les étranges beautés de la mort des justes.
. — Pour toi quand tout est mort, ami, tout vit pour moi : Ce déclin que l’Automne étale avec richesse Me parle, à moi, d’un temps de fête et d’allégresse, Du meilleur des saints jours, — alors qu’heureux enfants, Sur les bancs de la classe, en nos vœux innocents, Les feuilles qui tombaient ne nous disaient encore Que le très-doux Noël et sa prochaine aurore. […] Que n’as-tu, comme moi, l’espoir qui te soutienne, Qui te montre la vie en germe dans la mort, Le mal à se détruire épuisant son effort !
Le risque n’est pas effrayant, lorsqu’il s’agit d’apprécier le mérite des Morts. […] Les Morts, du fond de leur tombeau, n’appellent point des sentences prononcées contre eux ; les Vivans sont toujours prêts à crier à l’injustice & à être injustes, pour prouver qu’on a tort de les attaquer.
Il est mort fidèle à lui-même, invinciblement dévoué à la beauté intellectuelle et morale. […] Non pas que Renan eût peur de la souffrance ou de la mort. […] Elle ravive les désirs et les rêves que l’on croyait morts. […] Mais on répète en public que l’éternelle succession des naissances et des morts n’est qu’une vaine apparence. […] Rien de plus vivant que ce dialogue des morts.
Devenu prêtre, il eut à prononcer dans cette dernière ville l’oraison funèbre de l’archevêque mort en 1659 ; il n’avait mis que dix jours au plus à la préparer. La maladie et la mort de son oncle, le père Hercule, l’appelèrent à Paris en cette même année ; il se proposa d’y rester, et n’ayant pu le faire avec la permission de ses supérieurs, il sortit de la congrégation, mais en se déliant avec douceur comme ce sera toujours sa façon et méthodeae, en emportant et en laissant les meilleurs souvenirs. […] L’Amour se plaint à sa mère qu’Alcandre (c’est-à-dire M. de Caumartin) résiste à tous ses traits, et que depuis la mort de sa première femme, il demeure inflexible : Il soupira jadis son amoureuse peine. […] Il assista celui-ci à ses derniers moments, et l’exhorta à la mort, de même qu’il l’avait consolé et soutenu de ses entretiens affectueux, il y avait dix-huit ans, dans la première solitude de son veuvage : c’était dans les deux cas la même religieuse amitié, mais empreinte à la fin d’un caractère de plus et de l’imposante gravité du ministère. […] En lisant, dans les Mémoires de Saint-Simon, le portrait du même M. de Caumartin, conseiller d’État et intendant des finances, mort en 1720, on y découvre des caractères de bonne éducation qui décèlent la main excellente de son précepteur.
J’imagine que les plaintes du vieil Évandre s’arrachant des bras de son fils unique, qui vole aux combats et à la mort, n’auraient pas convenu, pour l’attendrissement, au maître sourcilleux : N’as-tu pas des enfants ? […] Lebrun avait composés sur la mort d’un fils de la reine Hortense, de cet enfant si cher à Napoléon qui le pleura, sont également restés en portefeuille81 avec une quantité de petites pièces. […] De retour en France en 1821, il publia, vers septembre, un poëme lyrique sur la mort de Napoléon, morceau étendu, plein d’harmonie, de souffle et d’émotion. […] Il la paya complète : la pension de 1,200 francs qu’il devait à l’Empereur pour son ode A la Grande Armée lui fut ôtée par le ministère Villèle pour cet hommage de reconnaissance rendu au bienfaiteur mort. […] Depuis son succès de 1820, sa place y semblait marquée avec certitude ; seulement son poëme sur la Mort de Napoléon l’avait fort retardé.
Au sujet de la mort d’Agamemnon, dans le récit que fait l’Ombre de ce grand roi à Ulysse qui l’interroge dans les Enfers, il est dit : « Noble fils de Laërte, ingénieux Ulysse, ce n’est ni Neptune qui m’a dompté sur mes vaisseaux en déchaînant le vaste souffle des vents funestes, ni quelque peuplade ennemie qui m’a détruit sur terre ; mais Ægisthe, tramant contre moi la mort et le mauvais destin, m’a tué d’accord avec ma perverse épouse, après m’avoir invité dans son palais ; pendant le festin même, il m’a tué, comme on tue un bœuf sur la crèche. C’est ainsi que j’ai péri par la plus lamentable mort… » Ce dernier trait si vrai, si vrai à la fois quant à l’image physique et quant au contraste moral qui en ressort (le Roi des rois tué, assommé comme le bœuf qui mange !) […] et sur ta tombe amèrement baignée je verse en libation le souvenir de nos amours, le souvenir de notre affection ; car tu m’es chère jusque parmi les morts ; et moi, Méléagre, je m’écrie pitoyablement vers toi, stérile hommage dans l’Achéron ! […] Mais je te supplie à genoux, ô Terre, notre nourrice à tous, d’embrasser dans ton sein, ô mère, d’embrasser doucement cette morte tant pleurée. » Cette pièce, après la mort d’une amante, m’a involontairement rappelé les suprêmes sonnets de Pétrarque, de qui la pensée m’est encore revenue plus d’une fois en lisant Méléagre. […] Le poëte se représente dans la situation d’un messager qui vient annoncer à celle-ci la mort de ses fils, croyant que c’est là tout son malheur ; mais tout d’un coup, et tandis qu’il parle, il est témoin de la mort des filles restées auprès de leur mère.