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1283. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MADAME DE SOUZA » pp. 42-61

La morale, la religion de ses livres sont exactes et pures ; toutefois ce n’est guère par le côté des ardeurs et des mysticités qu’elle envisage le cloître ; elle y voit peu l’expiation contrite des Héloïse et des La Vallière. […] Nous ne dirons rien des autres écrits de Mme de Souza, de Mademoiselle de Tournon, de la Duchesse de Guise, non qu’ils manquent aucunement de grâce et de finesse, mais parce que l’observation morale s’y complique de la question historique, laquelle se place entre nous, lecteur, et le livre, et nous en gâte l’effet.

1284. (1889) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Quatrième série « Alphonse Daudet, l’Immortel. »

C’est lui qui éreinte tout le temps l’Académie et qui tire la morale de l’histoire. J’aimerais que l’éreintement se fît uniquement par le récit et les tableaux, et que la morale s’en dégageât d’elle-même.

1285. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Discours sur l’histoire de la révolution d’Angleterre, par M. Guizot (1850) » pp. 311-331

Il fait très bien sentir une sorte de gravité morale subsistante chez les mêmes hommes au milieu des manœuvres et des intrigues ; mais il ne met pas la contradiction assez à jour. […] Elle doit être savoureuse, comme nous le disions dernièrement à propos de Commynes ; c’est une leçon toute morale.

1286. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « La Harpe. » pp. 103-122

Cette conversion soudaine de La Harpe, ce qu’elle laissa subsister du vieil homme en lui, ce qu’elle y modifia peut-être par endroits, mériterait toute une étude morale. […] Il remonta, dès le 31 décembre 1794, dans sa chaire du Lycée, y déclarant une guerre courageuse aux tyrans, à peine abattus et encore menaçants, de la raison, de la morale, des lettres et des arts ; il y invectiva la langue révolutionnaire dans un langage qui s’en ressentait quelque peu à son tour.

1287. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « L’abbé Barthélemy. — I. » pp. 186-205

La critique littéraire, qui doit être heureuse et fière de s’élever toutes les fois qu’elle rencontre de grands sujets, se plaît pourtant, par sa nature, à ces sujets moyens qui ne sont point pour cela médiocres, et qui permettent à la morale sociale d’y pénétrer. […] Dans un petit Traité de morale, rédigé à l’usage d’un neveu de M. de Malesherbes, et qu’il fit à la demande d’une mère, il a montré combien l’aménité était la forme de son caractère, et l’humanité le fond de son âme.

1288. (1892) Journal des Goncourt. Tome VI (1878-1884) « Année 1880 » pp. 100-128

Vendredi 23 février Des jours de souffrance, de faiblesse physique, de lâcheté morale, où peu à peu je perds l’énergie de sortir de chez moi, et où je m’habitue à une existence emprisonnée dans mon cabinet de travail, sans vouloir même descendre à la salle à manger pour y prendre mes repas. […] Et de la politique l’opportunisme descendra bientôt dans la pratique de la vie, et il y aura de l’opportunisme dans l’honneur, dans la morale, etc.

1289. (1897) Préface sur le vers libre (Premiers poèmes) pp. 3-38

Elle a pourtant le mérite d’avoir présidé à de belles œuvres serrées, à de nobles tragédies ; elle suggère, par son existence, l’idée d’une étude de crise morale, sans péripéties, à beaux plis simples, brève, serrée comme la nature ; elle peut fournir au théâtre aussi bien que l’esthétique diverse et variée du drame. […] Les gardiens du constitué sont d’accord sur toute la ligne ; les Académies de poésie, de musique, de danse et de morale et tous les octrois de la muraille de Chine mobilisent toutes leurs forces, et si l’on se demande plus tard comment l’union hétérogène du symbolisme put durer quelques années, forte, nous l’avons dit, de poètes dissemblables, de romanciers comme Adam, fréquentée de peintres comme Seurat, c’est que toutes les idées nouvelles se solidarisent en raison de l’identique et solidarisée résistance.

1290. (1892) L’anarchie littéraire pp. 5-32

La plupart affichaient crânement leur mépris de nos préjugés, de notre morale et même de nos institutions. […] Ceux-ci sont les seuls qui aient apporté des théories nouvelles en esthétique, en morale comme en philosophie, les seuls qui s’appuient sur une base invariable et éternelle : la Science.

1291. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « Édelestand du Méril »

Ne ferions-nous pas bien de descendre de cet azur pour châtier ces erreurs sur la personne morale de l’homme même qui ose la systématiser ? […] Si intellectuelle qu’elle soit, et par cela même qu’elle est intellectuelle, elle est essentiellement morale et doit, en prononçant ses arrêts, faire acte de moralité.

1292. (1917) Les diverses familles spirituelles de la France « Chapitre iii »

Un officier, voyant l’auditoire, les chants, le réconfort, s’écriait : « Quelle superbe manœuvre morale !  […] Aumônier de la plus haute valeur morale qui a, par son influence personnelle due à ses vertus, rendu les plus grands services.

1293. (1900) La province dans le roman pp. 113-140

Je ne justifie aucunement le dédain de nos anciens auteurs envers la province, qui fut toujours pour la grandeur du pays, grandeur matérielle et grandeur morale, ce que les masses de l’infanterie sont pour la force d’une armée : l’élément principal, le corps discipliné, pressé, obscur, qui porte le poids de la bataille et ne connaît de la victoire que le repos qui la suit. […] Les romanciers, dégagés du préjugé traditionnel, découvriraient la France du silence, celle qui sème et récolte pour Paris qui fait tant de bruit ; ils apercevraient la grandeur de sa mission qui est de perpétuer la race, de la nourrir et d’en maintenir l’énergie morale et les qualités essentielles par le constant apport d’éléments sains qu’elle envoie non seulement à Paris, mais dans toutes nos grandes villes.

1294. (1896) Les époques du théâtre français (1636-1850) (2e éd.)

C’est ainsi que la manière dont il a traité dans son dialogue les idées générales, les lieux communs de la morale ou de la politique, les cas de conscience encore, faisant un caractère éminent de son style, on s’imagine assez volontiers qu’il en a le premier porté l’expression sur la scène. […] Enfin, Messieurs, il fallait que l’observation morale ou psychologique eût fait, elle aussi, de certains progrès qu’elle était précisément à la veille de faire entre 1640 et 1650, mais qu’elle n’avait pas encore faits. […] Enfin, ce que n’étaient non plus ni le Cid, ni Polyeucte même : des tragédies de caractère, appuyées sur l’observation morale, et riches d’enseignements sur le cœur humain, c’est ce que Rodogune est encore, et c’était encore un progrès. […] Nous leur devons d’excellentes leçons de langage, de goût, de savoir-vivre, et presque de morale. […] La part y est trop petite à cette liberté qui est pour nous le fondement même de la personnalité morale.

1295. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre cinquième. Le peuple. — Chapitre V. Résumé. »

À leur tête, le roi, qui a fait la France en se dévouant à elle comme à sa chose propre, finit par user d’elle comme de sa chose propre ; l’argent public est son argent de poche, et des passions, des vanités, des faiblesses personnelles, des habitudes de luxe, des préoccupations de famille, des intrigues de maîtresse, des caprices d’épouse gouvernent un État de vingt-six millions d’hommes avec un arbitraire, une incurie, une prodigalité, une maladresse, un manque de suite qu’on excuserait à peine dans la conduite d’un domaine privé  Roi et privilégiés, ils n’excellent qu’en un point, le savoir-vivre, le bon goût, le bon ton, le talent de représenter et de recevoir, le don de causer avec grâce, finesse et gaieté, l’art de transformer la vie en une fête ingénieuse et brillante, comme si le monde était un salon d’oisifs délicats où il suffit d’être spirituel et aimable, tandis qu’il est un cirque où il faut être fort pour combattre, et un laboratoire où il faut travailler pour être utile  Par cette habitude, cette perfection et cet ascendant de la conversation polie, ils ont imprimé à l’esprit français la forme classique, qui, combinée avec le nouvel acquis scientifique, produit la philosophie du dix-huitième siècle, le discrédit de la tradition, la prétention de refondre toutes les institutions humaines d’après la raison seule, l’application des méthodes mathématiques à la politique et à la morale, le catéchisme des droits de l’homme, et tous les dogmes anarchiques et despotiques du Contrat social  Une fois que la chimère est née, ils la recueillent chez eux comme un passe-temps de salon ; ils jouent avec le monstre tout petit, encore innocent, enrubanné comme un mouton d’églogue ; ils n’imaginent pas qu’il puisse jamais devenir une bête enragée et formidable ; ils le nourrissent, ils le flattent, puis, de leur hôtel, ils le laissent descendre dans la rue  Là, chez une bourgeoisie que le gouvernement indispose en compromettant sa fortune, que les privilèges heurtent en comprimant ses ambitions, que l’inégalité blesse en froissant son amour-propre, la théorie révolutionnaire prend des accroissements rapides, une âpreté soudaine, et, au bout de quelques années, se trouve la maîtresse incontestée de l’opinion  À ce moment et sur son appel, surgit un autre colosse, un monstre aux millions de têtes, une brute effarouchée et aveugle, tout un peuple pressuré, exaspéré et subitement déchaîné contre le gouvernement dont les exactions le dépouillent, contre les privilégiés dont les droits l’affament, sans que, dans ces campagnes désertées par leurs patrons naturels, il se rencontre une autorité survivante, sans que, dans ces provinces pliées à la centralisation mécanique, il reste un groupe indépendant, sans que, dans cette société désagrégée par le despotisme, il puisse se former des centres d’initiative et de résistance, sans que, dans cette haute classe désarmée par son humanité même, il se trouve un politique exempt d’illusion et capable d’action, sans que tant de bonnes volontés et de belles intelligences puissent se défendre contre les deux ennemis de toute liberté et de tout ordre, contre la contagion du rêve démocratique qui trouble les meilleures têtes et contre les irruptions de la brutalité populacière qui pervertit les meilleures lois.

1296. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Première partie. Préparation générale — Chapitre III. De la sécheresse des impressions. — Du vague dans les idées et le langage. — Hyperboles et lieux communs. — Diffusion et bavardage »

Mais elle s’en est supérieurement tirée, et nous a répondu franchement que les prédicateurs devaient prêcher la morale et point le dogme ; que l’esclavage avilissait l’homme jusqu’à s’en faire aimer ; que Louis XIV devait plus aux grands génies de son temps que Racine et Pascal ne devaient à Louis XIV, et que, d’ailleurs, Bonaparte était fils de la liberté, et qu’il avait tué sa mère.

1297. (1892) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Cinquième série « Choses d’autrefois »

L’éducation n’y développe plus la volonté ni l’énergie morale.

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