Déjà au temps d’Homère nous leur trouvons les mêmes mœurs ; à chaque instant on lance un navire à la mer ; Ulysse en construit un, de ses mains ; on va commercer, piller sur les côtes environnantes. […] Ainsi préparé par les mœurs, on comprend que le citoyen soit soldat sans effort et du premier coup. — Il sera marin sans beaucoup plus d’apprentissage. […] Son livre est un document d’histoire ; ses contemporains ont eu les mœurs qu’il décrit ; son Olympe lui-même n’est qu’une famille grecque. […] Entre toutes ces poésies, les plus populaires et les plus propres à nous faire comprendre ces mœurs lointaines sont les cantates qui célèbrent les vainqueurs des quatre grands jeux. […] L’État en a besoin ; les mœurs publiques les demandent.
» dirait-il d’abord à ces Italiens de races, d’origines, de régions, de mœurs, de dominations diverses réunis autour de leur grand oracle politique. […] L’Italie ne sera ressuscitée que par elle-même et sous la forme vraie que deux mille ans, la nature, les mœurs lui donnent, c’est-à-dire sous la forme de confédération italique. […] L’habitude du régime républicain y avait tellement passé dans les mœurs, qu’après les empereurs auteurs de la servitude et de la décadence, l’Italie renaquit partout de ses cendres sous la forme républicaine : république en Sicile, en Calabre, en Campanie, à Naples, république à Rome sous la domination des papes, république à Sienne, république à Lucques, république à Pise, république à Florence, république à Gênes, république à Venise, républiques presque partout. […] La liberté constitutionnelle à laquelle vous aspirez sera justement plus assurée chez vous qu’à Turin ; ce n’est plus l’arbitraire d’un roi soldat qui vous mesurera selon ses intérêts cette liberté constitutionnelle, et qui vous la changera en dictature militaire au premier tocsin ; c’est vous-mêmes qui vous la donnerez selon vos mœurs et vos lumières, et qui ne la mesurerez qu’à vos vertus publiques ! […] Les nationalités diverses de l’Italie respectées comme les vérités du sol ; Les constitutions intérieures de chacune de ces nationalités laissées au libre arbitre des divers États, et reliées seulement par une diète italique à une constitution générale de toute l’Italie ; La Sicile et Naples, unies ou séparées, fournissant à la confédération leur contingent de députés et au besoin de subsides et de troupes remis au pouvoir exécutif extérieur de la patrie italienne ; Rome, livrée à son propre arbitre, réglant sa constitution elle-même selon les besoins de son administration temporelle et les convenances de son pontificat spirituel ; aucune main armée, profane et étrangère, interposée entre les souverains et les peuples, théocratiques, monarchiques ou républicains, à leur gré ; Rome capitale des capitales d’Italie, siége de la diète italique, ou bien une capitale fédérale alternative ; Florence, souveraine d’elle-même, monarchie, duché ou république, se gouvernant selon son génie, ou dans l’activité de ses Médicis, ou par le patriotisme de ses grands citoyens, ou par la douceur de son réformateur Léopold ; Turin, rentré dans ses limites, monarchie militaire, sentinelle de l’Italie septentrionale, bouclier de la Péninsule au nord, se désarmant au midi pour ne pas opprimer ce qu’elle protége, s’interdisant ses alliances séparées et suspectes avec l’Angleterre, offrant ses généraux et ses soldats à la défense de la patrie fédérale ; La Lombardie, principauté ou république, indépendante du Piémont, se modelant pour son organisation en cantons lombards, semblable à ces cantons helvétiques dont ce pays a le sol et les mœurs ; Venise, ville hanséatique sous la double garantie de l’Allemagne et de l’Italie, reprenant sous sa république et sous ses doges non plus sa place militante et conquérante que la marine de l’Europe ne lui laisse plus, mais sa place commerciale et artistique que son génie, plus oriental qu’italien, lui assure ; ses provinces de terre ferme neutralisées comme Venise elle-même, et constituées ainsi pour la paix, laissant une zone de sécurité et d’inoffensivité inviolables entre le Tyrol et l’Italie : Sous le drapeau d’une neutralité européenne, de nouvelles guerres ne sont nullement nécessaires pour une constitution semblable de l’Italie.
Sauf dans un petit nombre de pièces qui ont tiré de ces idées mêmes la force et le naturel qui les a fait durer, le fond et les détails sont fournis par le moment, par les mœurs, par le tour d’esprit particulier de l’époque. […] Pendant que Ronsard disputait à Saint-Gelais le titre de prince des poètes au temps même de cette furie d’imitation antique, un traducteur de génie, Amyot devinant d’instinct ce qui avait échappé aux poètes réformateurs, comprenait que les langues ne s’enrichissent que par les idées, et versait pour ainsi dire, dans la nôtre, le recueil le plus complet des idées, des mœurs, des hommes et des choses de l’antiquité, les ouvrages de Plutarque (1559-1574). […] Ses grands hommes dans les Vies ; dans les Œuvres morales, ses philosophies, sa religion, ses mœurs, sa vie domestique et anecdotique ; que de sources fécondes, que de termes de comparaison avec la société d’alors ! […] Ce fut une école de mœurs presque autant qu’une école de langage. […] Les mœurs auraient d’ailleurs opéré naturellement et en son temps, ce que hâta la violence religieuse.
Je sçais que de grands hommes ont supposé à presque tous les genres de poësie, des vûës plus hautes et plus solides : ils ont cru que le but du poëme épique étoit de convaincre l’esprit d’une vérité importante ; que la fin de la tragédie étoit de purger les passions, et celle de la comédie de corriger les moeurs. […] Si les apologistes du poëme épique avoient raison, Homere eût dû tenir le premier rang dans les vûës de Platon ; mais ce philosophe ne trouva dans la poësie qu’un plaisir souvent dangereux ; et il crut que la morale y étoit tellement subordonnée à l’agrément, qu’on n’en pouvoit attendre aucune utilité pour les moeurs. […] Ainsi Ménandre réduisit à une peinture innocente des moeurs, la comédie où régnoit auparavant la médisance. […] Monsieur Despréaux condamne aussi ce commencement de l’Alaric : je chante le vainqueur des vainqueurs de la terre. et ces deux grands critiques après avoir donné un exemple du ridicule, proposent pour modéle de la perfection, l’un, le début de l’odissée : muse, raconte-moi les avantures de cet homme, qui après la prise de Troye, vit tant de pays et tant de moeurs différentes ; l’autre, ce commencement de l’Enéïde : je chante cet homme qui contraint de fuir les rivages de Troye, aborda enfin en Italie . mais supposons un moment que ces quatre propositions soient des commencemens d’ode. […] Pour moi, j’ai tâché véritablement de lui ressembler dans les odes que j’appelle anacréontiques ; j’ai voulu y donner une idée de son esprit, de ses moeurs et même de son style.
Comme Duclos, après avoir donné ses Considérations sur les mœurs où il avait oublié de parler des femmes et où il avait à peine prononcé leur nom62, voulut réparer cette omission singulière en publiant l’année suivante (1751), sous le titre de Mémoires pour servir à l’histoire des mœurs du xviiie siècle, une espèce de répétition de ses Confessions du comte de…, Voltaire qui trouvait ce genre de romans détestable, et qui voyait dans ceux de Duclos une preuve de plus de la décadence du goût, écrivait : « Ils sont d’un homme qui est en place (dans la place d’historiographe), et qui par là est supérieur à sa matière. […] La relation de Duclos est d’un genre particulier et a mérité l’estime des voyageurs : n’y cherchez pas ce qui est dans de Brosses, le sentiment des arts, la grâce et la fertilité du goût, tout ce qui est des muses ; mais sur les hommes, sur les mœurs, sur les gouvernements, Duclos a de bonnes observations et s’y montre à chaque pas sensé, modéré, éclairé.
En supprimant les scènes intermédiaires et qui coupent à tout instant l’épisode, en le détachant du reste, on a quelque chose de curieux et d’assez amusant qui nous ouvre un jour sur les mœurs du monde élégant de ce temps-là. […] Si sa sœur Marthe, qui a des mœurs plus modestes, l’en blâme, elle n’en tient compte. […] Il n’est pas dénué de cette espèce d’avantage et de dédommagement qui semble revenir surtout aux œuvres modernes : il peint les mœurs modernes, les coutumes et costumes d’un temps ; il en est un témoignage.
Le Spectateur, d’Addison, ayant été traduit en 1714 à Amsterdam, sous ce nom : le Spectateur ou le Socrate moderne où l’on voit un portrait naïf des mœurs de ce siècle et plusieurs éditions de l’ouvrage s’étant vendues avec une rapidité prodigieuse, tous les libraires se mirent à commander à leurs auteurs à gages des Spectateurs de tendances et d’opinions diverses. […] À preuve ce titre fort bizarre : « Les mœurs du jour, ou histoire de Sir William Harrington, écrite du vivant de M. […] De cette esquisse d’une psychologie des titres que nous avons tentée, on pourra donc tirer cette conclusion que les appellations des livres varient selon les époques et les mœurs, mais reflètent toujours fidèlement les genres et les habitudes littéraires.
Il y en eut bien d’autres au moyen âge ; car cette époque fut celle qui vit apparaître dans le roman et dans les mœurs l’amour, tel que nous le connaissons. […] Ce roman n’avait de la sorte, il faut le dire, aucun rapport avec la réalité des mœurs. […] Cependant l’ancienne société aristocratique survivait, dans ses hommes et ses mœurs, surtout en province. […] Elles en prennent les mœurs, les aspirations, les jalousies, elles se reconnaissent — ou se cherchent — dans Zola. […] Il n’en est pas de meilleure preuve que l’œuvre de Lucien Descaves : Sous-Offs, son premier roman, sur les mœurs — on peut dire les mauvaises mœurs — des sous-officiers en temps de paix et de caserne, ressortit entièrement à l’esthétique naturaliste.
La beauté des arts, la grâce de la vie raffinée et sensuelle n’avaient point de prise sur lui ; ce sont les mœurs qu’il jugeait, et il ne les jugeait qu’avec sa conscience. […] Certainement, son père et lui, par leur génie, leurs mœurs, leur scélératesse parfaite, affichée et systématique, ont présenté à l’Europe les deux images les mieux réussies du diable. […] Dès lors la rigidité et le rigorisme entrent dans les mœurs. […] Encore un pas, et ce grand mouvement va passer du dedans au dehors, des mœurs privées aux institutions publiques. […] Voyez encore aujourd’hui les mœurs des étudiants.
On est ici dans les vieilles mœurs ; il faut s’y faire et ne point froncer les lèvres pour commencer. […] Ce genre de spectacle, depuis si charmant et si français, alors au berceau, était des plus humbles et des plus bas ; il consistait en de simples parades qui, nées sous la Régence, et grâce aux libres mœurs qu’elle favorisait, en avaient pris le ton. […] Mais si l’on avait parlé à Piron de ces services que rendait à l’esprit humain l’auteur de l’Essai sur les Mœurs, il aurait haussé les épaules. […] Lui vantant un jour la probité de Pelletier, elle parut surprise de ce que je le louais là-dessus de bonne foi Ses moeurs étaient basses, et cela n’est point étonnant, ayant été toute sa vie femme de chambre de la marquise de Mimeure, qui n’est morte que depuis cinq ou six ans. […] Il lui reproche, sur l’article des mœurs et des principes, d’avoir, « d’un trait de plume, dépouillé Mlle de Bar de la plus sainte auréole dont une femme puisse s’entourer. » Elle est jolie, l’auréole !
C’est dire qu’autrefois il y avait des mœurs et qui façonnaient tout naturellement les cadets à la ressemblance de leurs aînés. […] Avec Flaubert, avec les frères de Goncourt, le roman, lui, tend de plus en plus à devenir un chapitre de l’histoire des mœurs. […] S’il croit en eux lui-même, au point de vous forcer d’y croire, c’est qu’il est l’un d’eux, qu’il a leurs mœurs, leurs manières de sentir et de penser, leur origine. […] Généralisez-la et vous apercevez par-delà ces deux études de mœurs surgir cette question de la nocivité possible de la pensée, qui préoccupait déjà Balzac. […] Elle paraît deux fois dans l’élégante galerie de Carmontelle, document incomparable pour l’histoire de la société et des mœurs du dix-huitième siècle.
Mais cette morale n’est pas précisément celle qui répond au but indiqué par l’arrêté ; elle est à l’adresse des pères plus encore que des enfants, et ce ne serait en bonne logique qu’une juste conséquence si un fils aimable, morigéné le matin par son père pour quelques dissipations, et assistant le soir avec lui à la représentation des Jeunes Gens, lui disait, de ce ton de familiarité qu’autorisent les mœurs modernes : “Eh bien, qui de nous deux, ce matin, avait raison ? […] À cela il a été répondu, moins comme contradiction directe à ce que ces éloges avaient, liitérairement, de mérité, que comme correctif et au point de vue où la commission avait à juger l’ouvrage, qu’il ne paraissait point du tout certain que la peinture fidèle de ce vilain monde fût d’un effet moral aussi assuré ; que le personnage même le plus odieux de la pièce avait encore bien du charme ; que le personnage même le plus honnête, et qui fait le rôle de réparateur, était bien mêlé aux autres et en tenait encore pour la conduite et pour le ton ; que le goût du spectateur n’est pas toujours sain, que la curiosité est parfois singulière dans ses caprices, qu’on aime quelquefois à vérifier le mal qu’on vient de voir si spirituellement retracé et si vivant ; que, dans les ouvrages déjà anciens, ces sortes de peintures refroidies n’ont sans doute aucun inconvénient, et que ce n’est plus qu’un tableau de mœurs, mais que l’image très vive et très à nu, et en même temps si amusante, des vices contemporains, court risque de toucher autrement qu’il ne faudrait, et qu’il en peut sortir une contagion subtile, si un large courant de verve purifiante et saine ne circule à côté.
Mais c’est surtout aux détails de mœurs, à l’influence des lieux sur les habitudes et la littérature des peuples, que nous attachons du prix. […] Les mœurs africaines, la traite et la révolte des esclaves, y sont peintes des plus vives couleurs, et l’on y puise une généreuse indignation contre un trafic hautement désavoué par la conscience des peuples.
Les écrivains qui ont existé pendant la république, ne s’étant jamais permis d’exprimer les affections qu’ils éprouvaient, c’est dans le court passage des mœurs les plus sévères à la plus effroyable corruption, que les poètes latins ont montré une sensibilité plus touchante que celle qu’on peut trouver dans aucun ouvrage grec. […] Le système d’Épicure, le dogme du fatalisme, les mœurs de l’antiquité avant l’établissement de la religion chrétienne, dénaturent presque entièrement ce qui tient aux affections du cœur.
Nul enjolivement, pas d’esprit, pas d’intrigue, pas de peinture de mœurs. […] L’innocence naïve, la nature sauvage, cela reposait du raffinement extrême des idées et des mœurs ; cela remplissait le vide secret, consolait le profond ennui des cœurs.