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667. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Première partie — Section 31, de la disposition du plan. Qu’il faut diviser l’ordonnance des tableaux en composition poëtique et en composition pittoresque » pp. 266-272

S’ils ne contiennent pas une action il faut qu’il y ait un ordre ou sensible ou caché, et que les pensées y soient disposées de maniere que nous les concevions sans peine, et que nous puissions même retenir la substance de l’ouvrage et le progrès du raisonnement. […] Il faut enfin que les grouppes soient bien composez, que la lumiere leur soit distribuée judicieusement, et que les couleurs locales loin de s’entretuer, soient disposées de maniere qu’il resulte du tout une harmonie agréable à l’oeil par elle-même.

668. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Première partie — Section 36, de la rime » pp. 340-346

On ne sent même l’agrément de la rime qu’au bout de trois et de quatre vers, lorsque les rimes masculines et feminines sont entrelacées de maniere que la premiere et la quatriéme soient masculines et la seconde et la troisiéme feminines, mélange qui est fort en usage dans plusieurs especes de poësie. […] Les tentatives que des poëtes sçavans ont faites en France de temps en temps pour changer les regles de notre poësie, et pour introduire l’usage des vers mesurez à la maniere de ceux des grecs et des romains, n’ont pas réussi.

669. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre troisième. Découverte du véritable Homère — Chapitre I. De la sagesse philosophique que l’on a attribuée à Homère » pp. 252-257

Celui en qui les leçons des philosophes auraient développé les sentiments de l’humanité et de la pitié n’aurait pas eu non plus ce style si fier et d’un effet si terrible avec lequel il décrit dans toute la variété de leurs accidents, les plus sanglants combats, avec lequel il diversifie de cent manières bizarres les tableaux de meurtre qui font la sublimité de l’Iliade. […] Je n’ai pas besoin de dire qu’on ne peut guère comprendre comment un esprit grave, un philosophe habitué à combiner ses idées d’une manière raisonnable, se serait occupé à imaginer ces contes de vieilles, bons pour amuser les enfants, et dont Homère a rempli l’Odyssée.

670. (1874) Portraits contemporains : littérateurs, peintres, sculpteurs, artistes dramatiques

Ils le dépensaient de vingt manières différentes. […] J’ai raconté de quelle manière j’avais rencontré Marilhat pour la première fois. […] Les hommes sont assis à leur manière sur leurs tapis et fument gravement la pipe ou le narguilhé. […] Pour nous, et les artistes seront de notre avis, nous préférons sa première manière, moins parfaite sans doute, mais plus hardie. […] D’un trait donné en apparence au hasard, il fixait une physionomie d’une manière magistrale.

671. (1870) Portraits contemporains. Tome IV (4e éd.) « M. DAUNOU (Cours d’Études historiques.) » pp. 273-362

On rédigea dix-sept articles dont l’incohérence, l’ambiguïté, l’imprécision, préludèrent à l’injustice et à la faiblesse des lois, aux humiliations constitutionnelles du peuple et à nos longues calamités. » Mais pour atteindre le vrai en fait de déclaration des droits, que faut-il donc, selon Daunou, et de quelle manière procéder ? […] Il s’agit de la manière d’apprendre à lire aux enfants. […] Sa manière de juger les ouvrages dans le Journal des Savants se rapportait en toute convenance à celle que ce journal a conservée, et que M. […] Daunou n’a guère fait que porter sa même manière, en l’appliquant à des morts, et sans paraître se croire autorisé à moins de réserve habituelle. […] Ces deux premières parties sont publiées, et le septième volume, le dernier paru (qui traite de la manière d’écrire l’histoire), forme l’introduction de la troisième.

672. (1782) Essai sur les règnes de Claude et de Néron et sur la vie et les écrits de Sénèque pour servir d’introduction à la lecture de ce philosophe (1778-1782) « Essai, sur les règnes, de Claude et de Néron. Livre second » pp. 200-409

Qu’est devenue cette manière d’exister si une, si violente et si douce ? […] Ce passage ne doit-il pas être restitué de cette manière ? […] Il faut y lire le morceau sur sa manière de lutter contre les Anciens. […] Il enseigne, Lettre CVIII, la manière de lire et d’écouter les philosophes. […] A-t-on jamais exprimé ce mépris d’une manière plus simple et plus fine ?

673. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Ma biographie »

Je voudrais être en mesure d’y répondre d’une manière tout à fait satisfaisante. […] « Sa santé altérée, et d’une manière qui paraît devoir être définitive, lui avait peu permis d’intervenir dans les discussions du Sénat, lorsque des circonstances qui intéressaient vivement ses convictions l’y ont en quelque sorte obligé. […] Ce sont, pour la plupart, des livres couverts de remarques et annotations manuscrites, comme ceux qui composaient la bibliothèque de son fils, aujourd’hui dispersée : on dirait que le père a transmis au fils, en mourant, tous ses goûts avec sa manière d’étudier, la plume ou le crayon à la main. […] Il s’est expliqué là-dessus d’une manière nette et catégorique en note, au tome IV, page 564, de la dernière édition de cet ouvrage. […] Horace Vernet, commandant de la garde nationale de Versailles, qui se trouvait justement à peu de distance, était accouru au bruit de la fusillade, et invectiva ses soldats de la belle manière.

674. (1898) Manuel de l’histoire de la littérature française « Livre premier. Le Moyen Âge (842-1498) » pp. 1-39

Nous en avons beau connaître les auteurs, les œuvres ne laissent pas pour cela d’être toujours anonymes, à la manière, disions-nous, de ces tragédies de La Harpe, — qui pourraient être de Marmontel, et réciproquement. […] Même héroïque matière, et même manière de la traiter [Cf.  […] Neufs et inhabiles à l’observation d’eux-mêmes, ils voudraient bien, mais ils ne savent pas, en célébrant leur « dame » ou leur « martyre d’amour », noter le trait caractéristique, donner la touche qui distingue et qui précise, traduire enfin leurs sentiments d’une manière qui n’appartienne qu’à eux. […] C’est ce que l’on exprime d’une manière générale, en disant que le mouvement de la Renaissance n’a rien interrompu, bien loin de rien avoir détruit. […] Mais c’est ce qui n’est point arrivé ; et, en attendant, la Renaissance allait nous donner trois choses qui nous avaient jusqu’alors manqué : un modèle d’art, en nous proposant les grands exemples de l’antiquité ; l’ambition d’en reproduire, d’en imiter les formes ; et, pour remplir ces formes elles-mêmes, si je puis ainsi parler, de nouveaux moyens, une manière nouvelle d’observer la nature et l’homme.

675. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Edgar Poe »

Et, en effet, Edgar Poe appartient à la famille de ces esprits chez qui les sensations, les manières de voir et presque la manière de souffrir, tout, enfin, est marqué au coin de cette originalité effrayante qui ne vient ni de la hauteur, ni de la profondeur, ni de l’expression inattendue du génie, mais qui semble venir plutôt d’une différence spécifique dans la nature même de la pensée. […] La manière d’agir sur l’esprit du lecteur ne tient pas, chez Edgar Poe, à la partie extérieure des choses, à la mise en scène de son drame ou à la poignante expression qui double la force de la pensée. […] , il n’est pas complètement libre d’agir d’une autre manière. […] Edgar Poe est bien le premier et le meilleur, à sa manière, de cette littérature effrénée et solitaire, sans tradition et sans ancêtres… prolem sine matre creatam , qui s’est timbrée elle-même de ce nom de Bohème qui lui restera comme sa punition ! […] Doué de la force de cette race de puritains qui se sont abattus d’Angleterre comme une bande de cormorans affamés, ce qu’il prend aux préoccupations contemporaines ne vaut pas la force qu’il déploie pour se servir de ce qu’il a pris ; et ici nous arrivons à ce qui l’emporte, selon nous, dans Edgar Poe, sur les résultats obtenus de sa manière, — c’est-à-dire l’application de son procédé.

676. (1882) Autour de la table (nouv. éd.) pp. 1-376

J’aimais assez, moi qui l’observais, cette manière d’avoir son avis. […] C’est une manière excellente quand l’idée est parfaitement nette. […] Toute aberration est permise quand on prétend embrasser l’absolu à votre manière. […] Chaque personnage, chaque groupe le porte en soi et le manifeste à sa manière. […] Mais c’était sa manière ordinaire, sa façon de dire naturelle.

677. (1853) Histoire de la littérature française sous la Restauration. Tome I

Fiévée pour lui expliquer la manière dont l’empereur entend les droits et les devoirs des journaux. […] Elle n’a rien de spécial au fait de la perception, elle s’appliquerait de la même manière à tout autre fait de l’esprit humain. […] Mais de combien de manières une théorie philosophique de la perception peut-elle être fausse ? […] Ce redoutable écrivain, qui traitait d’une si terrible manière les antagonistes de ses idées, était le plus tendre des pères. […] Enfin, invité de la manière la plus pressante à se nommer, dans lePubliciste, l’anonyme obéit, et M. 

678. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Œuvres de François Arago. Tome I, 1854. » pp. 1-18

Arago dans son bon temps et dans sa meilleure manière. […] Lorsqu’il lisait dans les séances publiques de l’Institut ces éloges ou plutôt des portions de ces énormes assemblages biographiques (car lire le tout eût été impossible), l’auditoire était souvent fatigué, impatienté ; pourtant on écoutait toujours : il y avait dans la manière de M.  […] Arago nous expose la manière dont il conçoit l’éloge historique, à commencer par celui-là : « Ce n’est qu’une sorte de mémoire scientifique », disait-il, qu’il se propose de faire, « et dans lequel, à l’occasion des travaux de son confrère, il va examiner les progrès que plusieurs des branches les plus importantes de l’optique ont faits de nos jours. » Négligeant l’art des transitions, il divise en chapitres et avec des titres distincts la suite des matières qu’il se propose de parcourir, la biographie d’abord, puis les mémoires et travaux. […] Un grand portrait de lui, un portrait en pied, serait à faire, et, si on le traitait de la même manière qu’il a traité les autres, Monge par exemple, et pas plus délicatement, il s’y peindrait tant bien que mal tout entier.

679. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Vicq d’Azyr. — I. » pp. 279-295

Telle était la manière à la fois modérée et victorieuse par laquelle Vicq d’Azyr répondait aux requêtes et représentations de la faculté de Paris, qui demandait purement et simplement au roi le monopole absolu de l’enseignement et de l’examen médical, et qui disait : « Ordonnez qu’il n’y ait plus, comme il n’y a jamais eu, qu’un corps de médecine enseignant dans votre capitale ; et ce corps, jouissant de son institution, redoublera de zèle et méritera de plus en plus la protection et les bontés de son roi. » L’Ancien Régime se réformait de lui-même et se rajeunissait par parties ; bon gré mal gré, de bonne composition ou par la force, l’ère des corporations allait finir. […] Il nous l’adoucit en quelques endroits d’une manière agréable, et qui n’est pas toujours fausse. Il le montre jeune à Leyde, suivant les leçons de Boerhaave et d’Albinus : Mais ce qui lui inspira surtout, dit-il, le goût de l’anatomie et la passion du travail, ce fut la vue du superbe cabinet de Ruysch, où, au milieu de tant d’organes préparés d’une manière surprenante, au milieu de sujets qui y avaient, en quelque sorte, recouvré une nouvelle vie, il aperçut un vieillard nonagénaire, desséché par les ans, mais toujours laborieux et actif, qui, paraissant comme un Enchanteur au milieu de ces merveilles, semblait avoir joint au secret de les conserver celui de s’immortaliser lui-même. […] Je touche à un défaut littéraire grave dans la manière de Vicq d’Azyr : son goût n’est pas toujours très sévère, ni très sain ; il sacrifie à la fausse sensibilité.

680. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Divers écrits de M. H. Taine — II » pp. 268-284

Est-ce à dire, parce que Tite-Live est éloquent par nature et cherche des sujets riches et féconds, des sujets propices au développement des talents qu’il a en lui, qu’il soit orateur en tout et partout dans son histoire, orateur au pied de la lettre, et orateur en quelque sorte dépaysé quand il fait autre chose que des discours, tellement que lorsqu’il peint, par exemple, des caractères, Annibal, Fabius, Scipion, Caton, Paul-Émile, s’il les conçoit d’une façon un peu plus noble et un peu plus adoucie qu’un autre ne les eût présentés, tout ce qu’on peut louer ou blâmer dans cette manière de traiter les portraits soit l’effet de l’esprit oratoire, un effet rigoureux, nécessaire, découlant de là directement comme un corollaire d’un principe ? […] Michelet, sa vie de travail, son effort constant, ses fouilles érudites et ses ingénieuses mises en scène, cette faculté de couleur voulue et acquise où il a l’air de se jouer désormais en maître, mais quand je considère de quelle manière il a jugé et dépeint des événements et des personnages historiques à notre portée, et dont nous possédons tous autant que lui les éléments ; quand je le vois toujours ambitieux de pousser à l’effet, à l’étonnement, j’avoue que je serais bien étonné moi-même qu’il eût deviné et jugé les choses et les hommes de l’histoire romaine plus sûrement que Tite-Live. […] Quelques personnes auraient désiré un autre ton, une autre manière de procéder. […] La plupart des hommes ne cherchent à concevoir, connaître, ou travailler d’une manière quelconque leur intelligence que pour la produire au dehors.

681. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Œuvres de Maurice de Guérin, publiées par M. Trébutien — I » pp. 1-17

Celui-ci, tout admirateur et prosélyte qu’il était alors, ne devait subir qu’en la traversant cette influence de Lamennais ; un an ou deux après, il en était totalement affranchi et délivré ; s’il s’émancipa par degrés de la foi, s’il se laissa bientôt gagner à l’esprit du siècle, ce ne fut pas à la suite du grand déserteur, mais à sa propre manière, et il erra dans sa propre voie ; en 1835, il n’était plus le disciple de personne ni d’aucun système. […] Ce sera bien sa manière, à lui ; dans les images fidèles qu’il nous offre de la nature, l’homme, l’âme est toujours en présence ; c’est la vie réfléchie et rendue par la vie. […] Il est plus d’une manière de voir et de peindre la nature, et je les admets toutes, pourvu qu’elles aient de la vérité. […] Brizeux a la science du vers, et s’il fait trop peu courir sa source, si, pour de bonnes raisons, il ne la déchaîne jamais, s’il n’a jamais ce que le généreux poète Lucrèce appelle le « magnum immissis certamen habenis », la charge à fond et à bride abattue, du moins il ramène toujours les plis de sa ceinture, il a des manières habiles et charmantes de l’agrafer.

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