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1325. (1908) Esquisses et souvenirs pp. 7-341

Il s’extasiait sur les vieux rondeaux du père de maître Clément. […] Il pensait que les ratures de ces maîtres seraient un aiguillon et un guide pour corriger, polir, arrondir les phrases. […] * Certes, Flaubert est un maître. […] Le maître de la narration, La Fontaine, était pesant, lorsque, dans un salon, il contait de vive voix. […] Et l’expression ne manque-t-elle pas de cette vertu cachée qui enchante en surprenant chez les véritables maîtres de la langue ?

1326. (1896) Études et portraits littéraires

En quoi il se sépare de son premier maître. […] Comme tous les maîtres, Maupassant a sa marque. […] Elle a du maître le dessin âpre et la couleur montée. […] Paul Bourget, plusieurs de nos contemporains sont maîtres en cet art d’agilité spirituelle. […] Voir Crispin rival de son maître.

1327. (1870) Portraits contemporains. Tome IV (4e éd.) « LEOPARDI. » pp. 363-422

Un prêtre de l’endroit, l’abbé Sanchini, lui enseigna les premiers éléments du latin ; quant au grec, l’apprenant dès l’âge de huit ans dans la grammaire dite de Padoue, l’enfant jugea cette grammaire insuffisante, et, décidé à s’en passer, il se mit à aborder directement les textes qu’il trouvait dans la bibliothèque de son père ; il lut ainsi sans maître, et bientôt avec une surprenante facilité, les auteurs ecclésiastiques, les saints Pères, tout ce que lui fournissait en ce genre cette très-riche bibliothèque domestique ; le premier débrouillement fait, il lut méthodiquement, par ordre chronologique, plume en main, et, de même que chez Pascal, avec qui on l’a comparé, le génie mathématique éclata comme par miracle ; ainsi le génie philologique se fit jour merveilleusement chez le jeune Leopardi ; il devint un véritable érudit à l’âge où les autres en sont encore à répéter sur les bancs la dictée du maître. […] Ce goût philologique qu’il avait développé et aiguisé dans la lecture des anciens, Leopardi le portait aussi dans l’étude et l’usage de sa propre langue ; il revenait à Dante et aux vrais maîtres d’avant la Crusca. […] Et cœur ne fut jamais plus sage ni plus fort Qu’atteint d’amour : jamais mieux qu’alors il ne prise La vie a son vrai taux, et souvent il la brise ; Car, partout où l’Amour se fait maître et seigneur, Le courage s’implante ou renaît plein d’honneur, Et la sagesse alors, non celle qu’on renomme, Mais celle d’action, devient aisée à l’homme. […] Puis, quand le rude maître a pris en plein sa proie, Quand l’invincible éclair se déchaîne et foudroie, Combien, ô Mort, combien, au pire du tourment, Monte vers toi le cri du malheureux amant !

1328. (1866) Petite comédie de la critique littéraire, ou Molière selon trois écoles philosophiques « Première partie. — L’école dogmatique — Chapitre III. — Du drame comique. Méditation d’un philosophe hégélien ou Voyage pittoresque à travers l’Esthétique de Hegel » pp. 111-177

Et, tandis que la comédie ne se glisse point au foyer d’une famille conforme à sa véritable idée, dont le chef sait maintenir sur les siens son autorité naturelle, elle entre sans façon dans une famille désorganisée, où les maîtres sont devenus les serviteurs et les serviteurs les maîtres, où le père a perdu par sa faute le respect de ses enfants. […]   …… Jusqu’ici, assis aux pieds du divin Hegel, mon maître, j’ai écouté docilement ses leçons, reproduisant sa pensée avec fidélité, sans me permettre d’intervenir moi-même dans cette modeste exposition, autrement que par la plus timide paraphrase. […] 1º Puisque l’auteur comique ne doit pas complètement disparaître derrière ses personnages, je puis admirer l’humour modéré du romancier espagnol, ses prologues, ses parenthèses, l’ingénieuse idée qu’il a eue de faire critiquer son roman par les personnages mêmes qui y remplissent un rôle, et la façon spirituelle dont il plaisante au sujet de l’âne de Sancho, perdu dans la montagne et monté par son maître, avant que Sancho l’eût trouvé. […] Aussitôt, tirant ses chausses en toute hâte, il resta nu en pan de chemise ; puis, sans autre façon, il se donna du talon dans le derrière, fit deux cabrioles en l’air et deux culbutes, la tête en bas et les pieds en haut, découvrant de telles choses que, pour ne les pas voir davantage, Sancho tourna bride, et se tint pour satisfait de pouvoir jurer que son maître demeurait fou243. » 174.

1329. (1864) Cours familier de littérature. XVII « CIIe entretien. Lettre à M. Sainte-Beuve (2e partie) » pp. 409-488

. — Il comprend tout, aspire à tout, et n’est maître de rien ni de lui-même. […] Vous descendiez patiemment l’escalier de la haute littérature pour arriver au terrain plane et libre que vous parcourez en maître maintenant. […] Né à Mantoue, n’ayant eu d’autre maître de poésie que la nature agreste de la Lombardie, il commence tout jeune ses Églogues, qui sont aussi ses chefs-d’œuvre. […] La première églogue, qui n’est guère que la troisième dans l’ordre chronologique, nous a dit dès l’enfance comment Tityre, qui n’est ici que Virgile lui-même, dut aller dans la grande ville, à Rome ; comment, présenté, par l’intervention de Mécène probablement, au maître déjà suprême, à celui qu’il appelle un Dieu, à Auguste, il fut remis en possession de son héritage, et put célébrer avec reconnaissance son bonheur, rendu plus sensible par la calamité universelle. […] Il fallut quelque protection nouvelle et présente, telle que celle de Varus (on l’entrevoit), pour mettre le poète à l’abri de la vengeance, et pour tenir la main à ce que le bienfait d’Octave eût son exécution ; à moins qu’on n’admette que ce ne fut que l’année suivante, et après la guerre de Pérouse, Octave devenant de plus en plus maître, que Virgile reconquit décidément sa chère maison et son héritage.

1330. (1899) Les industriels du roman populaire, suivi de : L’état actuel du roman populaire (enquête) [articles de la Revue des Revues] pp. 1-403

Les maîtres du drame et du roman s’appliquent souvent à concentrer là toute leur puissance. […] Et le maître entrepreneur brochera sur le tout, signera et débitera la marchandise. […] Enfin des maîtres conteurs, tels que Daudet et Theuriet, essayèrent aussi leurs forces sur ce terrain. […] Tant que les journaux populaires auront pour maîtres des hommes d’argent sans autre moralité que celle de leurs dividendes, nous ne saurions espérer une initiative éducatrice de leur part. […] Je veux dire que Bouchor et ses collaborateurs pourraient, à chacune de leurs séances mensuelles, lire un court fragment de n’importe quel feuilleton populaire en cours de publication, et le couvrir de ridicule et d’opprobre en lisant ensuite, par contraste, les pages des maîtres dont ils ont entrepris la diffusion dans le peuple.

1331. (1857) Cours familier de littérature. IV « XXIe Entretien. Le 16 juillet 1857, ou œuvres et caractère de Béranger » pp. 161-252

Béranger y avait connu Laujon, Désaugiers, et tous les maîtres de la gaie science. Avec cette flexibilité de caractère qui est la faiblesse et la grâce de la jeunesse, il est naturel qu’il y ait admiré ces maîtres ; on comprend qu’il ait été possédé, au début, d’une certaine émulation pour rivaliser de jovialité et de gaudriole avec eux. […] La culture de l’esprit, on la reçoit de ses maîtres et de ses livres. […] XXXIII Dans le temps où le jeune Béranger, sans souci de sa fortune, se consolait de l’indigence par l’étourderie, il fréquentait la salle d’armes d’un maître d’escrime du faubourg Saint-Antoine, nommé Valois. […] Cette jeune fille, d’une taille élevée, d’une souplesse énergique d’avant-bras, d’une physionomie noble et douce, d’un regard de reine tempéré par une délicate réserve, montrait encore à quatre-vingts ans les traces d’une beauté qui avait dû éblouir les élèves du maître d’armes.

1332. (1772) Bibliothèque d’un homme de goût, ou Avis sur le choix des meilleurs livres écrits en notre langue sur tous les genres de sciences et de littérature. Tome I « Bibliotheque d’un homme de goût. — Chapitre I. Des poëtes anciens. » pp. 2-93

Son coloris est celui d’un grand Maître, & son expression prend toujours la couleur de sa pensée. […] Il a moins considéré ce Poëte comme le maître ou le précurseur de Virgile, que comme un Philosophe profond & sublime, qui déduit avec beaucoup d’art des principes qu’il a établis, l’explication des phénomènes de la nature. […] On dit que Mme. de Sevigné les comparoit à des domestiques, qui vont faire un message de la part de leur maître, & qui disent souvent le contraire de ce qu’on leur a ordonné. […] Le parallèle d’Horace & de Juvenal, composé de traits puisés dans leurs écrits, est de main de maître. […] Ce sont deux grands maîtres qui ont puisé dans les mêmes sources ; l’un & l’autre ont étudié la nature dans ce qu’elle a de plus parfait ; l’un & l’autre donnent des leçons si sûres que les négliger, c’est s’égarer, voilà ce que dit l’auteur de la Vie de Mignard, mais tous les critiques n’ont pas pensé comme lui.

1333. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Discours sur le système et la vie de Vico » pp. -

Ses maîtres furent les jurisconsultes romains, le divin Platon, et ce Dante avec lequel il avait lui-même tant de rapport par son caractère mélancolique et ardent. […] Les premiers pères de famille sont les premiers prêtres ; et comme la religion compose encore toute la sagesse, les premiers sages ; maîtres absolus de leur famille, ils sont aussi les premiers rois ; de là le nom de patriarches (pères et princes). […] « Cet accident ne fit qu’altérer son humeur, et le rendit mélancolique et ardent, caractère ordinaire des hommes qui unissent la vivacité d’esprit et la profondeur. » Après avoir fait ses humanités et surpassé ses maîtres, il se livra avec ardeur à la dialectique ; mais les subtilités de la scholastique le rebutèrent : il faillit perdre l’esprit, et demeura découragé pour dix-huit mois. […] Combien il se félicita de n’avoir pas eu de maître dont les paroles fussent pour lui des lois ; combien il remercia la solitude de ses forêts, où il avait pu suivre une carrière toute indépendante ! […] Aussi ses amis l’appelaient-ils, comme on nommait autrefois Épicure, αὐτοδιδάσκαλος, le maître de soi-même .

1334. (1853) Portraits littéraires. Tome II (3e éd.) pp. 59-300

Boileau, comme Horace, son maître et son modèle, ne plaît et ne plaira jamais qu’aux lettrés. […] Je lui fais belle part, et je le tiens pour un maître consommé. […] Delavigne se fût contenté de proclamer en toute occasion son respect pour les maîtres, nous ne songerions pas à incriminer la mystification du public. […] Les paysages bibliques de Nicolas Poussin fourniraient la matière de nombreux mémoires à celui qui voudrait relever toutes les erreurs de ce maître illustre. […] Comment franchir les rangs pressés d’admirateurs qui se partagent la parole du maître comme la manne céleste ?

1335. (1902) Le problème du style. Questions d’art, de littérature et de grammaire

Il y a un maître et des apprentis. […] Dieu, comme dit le pauvre François Villon, que n’ai-je eu un tel maître « au temps de ma jeunesse folle » ! […] Un écrivain ne doit songer, quand il écrit, ni à ses maîtres, ni même à son style. […] Et il analyse la manière des maîtres. […] Il faudra que les maîtres, au lieu d’enseigner deux orthographes aux mots vingt et cent, enseignent deux prononciations.

1336. (1894) Dégénérescence. Fin de siècle, le mysticisme. L’égotisme, le réalisme, le vingtième siècle

Veuillez, cher et honoré Maître, conserver votre bienveillance à votre reconnaissant et dévoué Max Nordau. […] La transparence du travail thématique des maîtres classiques, leur observation consciencieuse des lois du contre-point, passent pour plates et ennuyeuses. […] Ce que nous en savons, nous le devons presque exclusivement aux maîtres français. […] Conformément à la doctrine de leur maître théorique Ruskin, le déclin de l’art commence, pour les préraphaélites, avec Raphaël. […] Et ainsi il advint que, dans la désignation qu’ils s’attribuèrent, ils firent précisément allusion à Raphaël et non à un autre maître ou à une autre période de l’histoire de l’art.

1337. (1856) Réalisme, numéros 1-2 pp. 1-32

Pour la foule, et je joins à la foule la plupart des amateurs, dont le jugement a eu les musées pour serre chaude, la réalité est fausse, le conventionnel est vrai ; en effet, les peintures renfermées dans les musées, et qu’on lui montre toujours comme types, sont des peintures rousses, noires, vertes, grises, des peintures idéalisées, arrangées, plus propres à détraquer une tête de peintre qu’à l’assainir, car la vérité en est presque généralement absente ; le beau devrait donc se faire roux, noir et vert comme les maîtres ; et Dieu sait que chez ces maîtres il y a des arrangements de lumière, du théâtre, de la tragédie enfin. […] Vous avez d’autres points de repère, me direz-vous : le maître a donné sa loi pour reconnaître les chefs-d’œuvre. […] … La religion, la philosophie, le passé, le présent, la pratique, l’abstraction, tout cela s’embrouille, fait gâchis ; les idées les plus contraires s’entrechoquent dans son esprit ; trop faible pour faire sortir une opinion de ce chaos, il s’en rapporte à la parole du maître. […] Les théâtres font de belles recettes ; on a même, depuis quelque temps, trouvé moyen d’augmenter le nombre des gens privilégiés qui gagnent notre argent avec les talents réunis des costumiers, des maîtres de ballet, des musiciens, des décorateurs, des machinistes, des acteurs et même des auteurs. […] Vous avez d’autres points de repère, me direz-vous : le maître a donné sa loi pour reconnaître les chefs-d’œuvre.

1338. (1716) Réflexions sur la critique pp. 1-296

Ils ont été nos guides et nos maîtres, il faut les estimer et les étudier, mais non pas comme des maîtres tyranniques, sur la parole de qui nous devions jurer toûjours, et qu’il ne soit jamais permis d’éxaminer. […] N’est-il pas le maître d’aller aux ennemis, et de s’exposer à périr pour le salut des grecs. […] Si nous nous rendons maîtres de ces glorieuses dépoüilles, n’en doutons point, les grecs remonteront cette nuit même sur les vaisseaux qu’ils auront pû sauver, et abandonneront ce rivage. […] Je ne prétens que m’instruire moi-même, et donner occasion aux lecteurs désintéressez d’interroger leur propre raison qui doit être leur véritable maître. […] Je n’ai donc plus qu’à rendre raison de mon poëme dans ma troisiéme partie, où je tâcherai, sans prétendre m’ériger en maître, de donner quelques idées de poësie et de versification.

1339. (1893) Alfred de Musset

On avait la bonté d’écouter ce bambin, et il en profitait pour rompre en visière sur certains points au maître lui-même. […] Maîtres, maîtres divins, où trouverai-je, hélas ! […] Le souvenir de George Sand rentra en maître dans ce cœur ravagé, dont il n’avait jamais été bien éloigné. […] « Viens, maître, nous en avons trop fait ; sauvons-nous. […] Rappelez-vous sa conversation avec son maître de danse.

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