Un poème noble et mesuré, une mélodie juste et mobile, une forte et magnifique statue, une exacte et brillante peinture, sont des preuves perpétuelles de l’existence de Dieu. […] Car il est impossible d’être plus juste et plus net. […] Lorsque des poètes chantent une chose quelconque, c’est d’une manière si juste et si belle en même temps, que nous croyons la voir soudain la première fois. […] si nous n’étions pas braves, beaux, magnifiques et justes ? […] Nous ne composerons rien de juste si nous ne le sommes pas nous-mêmes.
Il y a donc quelque chose de juste dans le principe des amateurs d’auteurs difficiles. […] Ils ont pensé en clair, d’abord, comme tout le monde, puis, par des substitutions patientes de mots impropres aux mots justes, de tournures bizarres aux tours simples, d’inversions aux tours directs, ils ont obscurci progressivement leur texte. […] Invertissez les inversions, tournez les termes impropres aux termes probablement justes, d’après le sens général du morceau, s’il en a un ; par une lecture attentive, pénétrez-vous de ce que l’auteur a sans doute voulu dire et, ainsi éclairés, si la chose est possible, saisissez les petits procédés par lesquels il a dérobé son idée aux regards et détruisez-les à mesure, jusqu’à ce que vous soyez en présence de l’idée elle-même, laquelle vous paraîtra souvent très ordinaire, mais quelquefois intéressante encore. « Vous voulez, Acis, me dire qu’il fait froid, dites il fait froid. » Eh bien ! […] C’est ce qui a fait valoir plusieurs choses de néant, qui a mis en crédit plusieurs écrits et les a chargés de toutes sortes de matières qu’on a voulu, une même chose recevant mille et mille et autant qu’il nous plaît d’images et considérations diverses. » Or bien, c’est juste le travail contraire qu’il convient que vous fassiez sur les auteurs difficiles.
Ce mouvement rétrospectif, reconnaissant, réfléchi, qui nous fait revenir sur de grandes œuvres éclatantes ou replacer dans une juste lumière des ouvrages oubliés ou méconnus, doit être d’autant plus encouragé par la Critique qu’il n’est pas dans la nature du Génie français, lequel, en toutes choses, se porte en avant avec sa proverbiale furie, et mêle si joliment l’ingratitude à ses distributions de gloire. […] si, à tous les travaux inspirés par sa fervente piété d’éditeur, il en avait joint un autre, moins microscopique, et s’il nous eût donné la mesure juste de son La Bruyère. […] Quoique Destailleur ait le sentiment fort juste des beautés de détail de son auteur, nous sommes sûr qu’il pouvait, en s’abandonnant à une admiration plus courageuse, trouver mieux, pour les mettre en saillie, que des interjections qui ressemblent à des étiquettes, que les parfait ! […] Destailleur, qui est un esprit distingué et juste, s’est-il rappelé le mot de Voltaire, ou l’aurait-il subi, non seulement en passant aussi vite qu’il l’a fait sur la personnalité de son auteur, dont il ne nous dit que ce que dit l’histoire, mais en négligeant de nous donner la clef de ses divers Caractères, sortis, tous, de l’étude de quelque personnalité ?
Quel est le lettré de ce temps où les Mémoires de mademoiselle Céleste Mogador trouvent des plumes galantes qui en écrivent, quel est le lettré qui, par un mot, ait seulement donné une idée juste de ce beau et utile travail de bénédictin que M. […] Esprit de juste milieu qui se démène, — rendons lui cette justice, — pour être juste, il reste milieu, mais non juste, à peu près en toutes choses, et c’est par là qu’il a triomphé !
Peut-être Molière, entraîné par cette sympathie si vive en lui, ne s’appliqua-t-il pas assez à discerner, dans les mœurs dont le public était disposé à rire, le vrai du faux, l’exagération d’avec le naturel noble et choisi, et les affectations hypocrites d’avec un juste éloignement pour l’impudence du vice. […] Les écrivains qui accréditent cette erreur ne remarquent pas que si leur opinion était juste, la gloire de Molière, qu’ils croient rehausser, serait au contraire rabaissée : car, s’il était vrai qu’il eut fait la guerre à la marquise de Rambouillet, à sa fille Julie, aux Sévigné, aux La Fayette, aux La Suze, au lieu de la faire seulement aux Scudéry, on pourrait dire qu’il est sorti vaincu d’un côté, étant vainqueur de l’autre, un effet, s’il a purgé la langue et les mœurs des affectations hypocrites et ridicules des Peckes, d’un autre côté les femmes illustres, qui ont survécu à l’hôtel de Rambouillet et en avaient fait partie, ont banni du langage et des mœurs des grossièretés et des scandales qu’il protégeait, et y ont apporté des délicatesses et des larmes dont elles ont eu les premières le sentiment. […] Mais il n’est pas plus juste de lui en reprocher l’adoption et l’expansion, que de lui en imputer la naissance.
Mais le feuilleton haletant et qui a fait haleter toute œuvre de large poitrine et de souffle, le feuilleton, cette forme bonne, tout au plus, pour les pituiteux littéraires qui y crachotent chaque jour leurs albumineuses expectorations, ne saurait donner l’idée juste d’un ouvrage qui a les deux beautés du livre : — la beauté de l’ensemble et la beauté du détail. […] Ce livre qu’il écrit aujourd’hui sur les deux faces de l’art dramatique, et qu’il appelle Les Deux Masques, avec une ingéniosité si simple et si juste, doit avoir trois séries, nous annonce-t-il dans sa préface. […] Saint-Victor a, lui, en ses Deux Masques, la pureté et la ligne irréprochable du fini dans l’œuvre accomplie, et la certitude, que rien ne trouble plus, d’un talent au point juste de sa maturité. […] C’est le point juste dans la maturité qui est le progrès et même la nouveauté dans le livre de Saint-Victor.
Ne croyez point d’ailleurs que ce soit par pur esprit de chicane que Marivaux ait ainsi maille à partir avec les hommes supérieurs ; il ne laisse pas de mêler à ce qui est une vue incomplète bien des considérations aussi neuves que justes. […] Ainsi nous avons très rarement le portrait de l’esprit humain dans sa figure naturelle : on ne nous le peint que dans un état de contorsion ; il ne va point son pas, pour ainsi dire, il a toujours une marche d’emprunt… J’arrête la pensée au moment où lui-même il va en abuser, et tandis qu’il est juste encore et qu’il est clair. […] » Ici, dans une petite dissertation très juste et très bien déduite, Marivaux montre que pour la nuance de pensée de La Rochefoucauld, il n’y avait pourtant pas d’autre expression possible, et que les équivalents proposés n’y répondent pas : Cet esprit, simplement trompé par le cœur, ne me dit pas qu’il est souvent trompé comme un sot, ne me dit pas même qu’il se laisse tromper. […] Or, si l’idée de l’auteur est juste, que trouvez-vous à redire au signe dont il se sert pour exprimer cette idée ? […] Le grand et perpétuel défaut de Marivaux est de s’appesantir à satiété sur la même pensée, qui a presque toujours commencé par être juste et fine, et qu’il trouve moyen de fausser en la raffinant.
Au milieu de bien des vues justes et rapides qui recommandent ce chapitre, il y abondait trop pourtant dans le sens de bonhomie et d’attendrissement. […] Jung sur Henri IV un effort à être juste, comme de quelqu’un qui n’est pas tout à fait de la lignée ni de la morale française, et qui paraît plus puritain que généralement nous ne le sommes71. […] Quand je me souviens de Henri IV, et pour me le résumer à moi-même au juste, sans pencher ni du côté de la tradition factice et arrangée, ni du côté de l’anecdote maligne et injurieuse à l’histoire, je tiens à me rappeler trois ou quatre points essentiels qui me le déterminent, en quelque sorte, dans les grandes lignes de sa nature morale et de son caractère politique. […] Le grand Frédéric, lui, était un roi essentiellement écrivain ; et quand il écrivait en prose, sauf les germanismes inévitables, c’était un écrivain ferme, sensé, vraiment philosophe, plein de résultats justes et de vues d’expérience, et doué aussi par endroits d’une imagination assez haute et assez frappante. […] … » Mais il ne s’agit pas seulement d’être un peu plus exact que Scipion Dupleix ou d’être moins pastoral que l’abbé de Marolles, il s’agit d’être juste et de ne pas ombrer le tableau là où il n’y a pas d’ombre, M.
Diodati et Gaffarelli, auxquels je voudrois vous prier d’écrire confidemment que vous avez entendu parler des différends qui se passent entre lui et moi, et que, sachant assurément que le Père m’a donné juste sujet de me plaindre de lui, vous les priez de le réduire et persuader à me donner quelque satisfaction par lettre de sa propre main, conçue en telle sorte qu’il montre au moins d’avoir regret de m’avoir offensé à tort et légèrement contre tant de services que je lui avois rendus. […] Mais je vous proteste, monsieur, que, telle satisfaction que me donne ledit Père, je ne le tiendrai jamais pour autre que pour un homme plus étourdi qu’une mouche, et moins sensé ès-affaires du monde qu’un enfant ; et si d’aventure il s’obstine de ne vouloir entendre à tant de voies d’accord que je lui fais présenter par mes amis en rongeant mon frein le plus qu’il m’est possible, et qu’il veuille toujours persister en ses menteries ordinaires et en ses impostures, j’en ferai une telle vengeance à l’avenir que, s’il a évité les justes ressentiments du maître du palais de Rome en s’enfuyant à Paris sous prétexte d’être poursuivi des Espagnols qui ne pensoient pas à lui, il n’évitera pas pourtant les miens. […] Puisque leur témoignage extérieur est souvent invoqué en l’honneur du philosophe calabrois, il était juste qu’on eût le témoignage intime et confidentiel.
Lisant sans autre but que de s’instruire et de se charmer, de revenir à la source de la juste éloquence et des pensées salutaires, il n’a guère pris la plume en littérature que pour exprimer ce sentiment vif, l’amour et le goût des bonnes et vieilles œuvres. […] J’en sais d’autres encore dont l’ambition serait, dans la critique, d’atteindre à une nouveauté vraie, à une hardiesse juste, de trouver du neuf à tout coup ; mais aussi, en voulant trouver toujours, on court risque d’inventer ; on reste quelquefois en chemin avec sa hardiesse, en deçà ou au-delà de la justesse. […] S’il n’y a qu’une voix sur lui, et si un juste respect l’environne, c’est qu’il s’exhale un parfum d’honnêteté de tout ce qu’il écrit. […] Il ne faudrait pourtant pas trop presser ce juste milieu religieux et moral en tant que système : cela n’a toute valeur que comme expression d’une nature individuelle, et ce qui en fait la force en M. de Sacy, c’est d’être avant tout porté par un bon fonds, préparé de longue main. Car qu’on ne croie pas que ce soit une petite avance pour la vertu que de sortir de la race des justes.
En prononçant ce mot d’un goût si juste et si pur : « Que celui d’entre vous qui est sans péché lui jette la première pierre ! […] En apparence, vous êtes justes ; mais au fond vous êtes remplis de feinte et de péché. « Malheur à vous, scribes et pharisiens hypocrites, qui bâtissez les tombeaux des prophètes, et ornez les monuments des justes, et qui dites : Si nous eussions vécu du temps de nos pères, nous n’eussions pas trempé avec eux dans le meurtre des prophètes ! […] La Sagesse de Dieu a eu bien raison de dire 987 : « Je vous enverrai des prophètes, des sages, des savants ; vous tuerez et crucifierez les uns, vous ferez fouetter les autres dans vos synagogues, vous les poursuivrez de ville en ville ; afin qu’un jour retombe sur vous tout le sang innocent qui a été répandu sur la terre, depuis le sang d’Abel le juste jusqu’au sang de Zacharie, fils de Barachie 988, que vous avez tué entre le temple et l’autel. » Je vous le dis, c’est à la génération présente que tout ce sang sera redemandé 989. » Son dogme terrible de la substitution des gentils, cette idée que le royaume de Dieu allait être transféré à d’autres, ceux à qui il était destiné n’en ayant pas voulu 990, revenait comme une menace sanglante contre l’aristocratie, et son titre de Fils de Dieu qu’il avouait ouvertement dans de vives paraboles 991, où ses ennemis jouaient le rôle de meurtriers des envoyés célestes, était un défi au judaïsme légal. […] Ce meurtre est le dernier dans la liste des meurtres d’hommes justes, dressée selon l’ordre où ils se présentent dans la Bible.
Les Réflexions sur la Poésie, la Peinture & la Musique, renferment tout ce qu’on a dit de plus juste, de plus sage & de mieux vu sur ces trois parties des Beaux-Arts. […] Il est si rare de trouver des esprits aussi pénétrans que sages, pour saisir dans une juste précision ce qui constitue la vraie beauté de chaque genre ; il est si ordinaire de voir des esprits présomptueux donner leurs rêveries pour des découvertes, les égaremens de leur goût pour des regles sûres, les productions de leur plume pour des modeles irréprochables, qu’on doit regarder les Ecrits des vrais Littérateurs comme des préservatifs contre la décadence des Lettres, ou comme ces colonnes milliaires qui, chez les Romains, indiquoient les grandes routes, & éloignoient les voyageurs des chemins détournés.
— dit-il quelque part, bondissant sous elle, — l’écrasante et affolante pensée d’un Dieu tout-puissant, qui, non content de tyranniser nos corps, tyrannise nos cœurs, en nous ôtant la force même de nous plaindre, parce que nous savons que l’iniquité même sera juste si le caprice de celui qui peut tout l’a décidé ainsi… » Voilà Job et le poitrinaire qui meurent à Madère, — et c’est lui, Georges Caumont, fou des terreurs de Dieu, et qui, de la religion qu’il réprouve, n’a gardé que la croyance à l’enfer… « Non ! — ajoute-t-il en insistant, — je ne crois pas au ciel, mais je crois à l’enfer, où ma place est marquée de toute éternité ; à un enfer où l’inique Jeffries qui doit me juger m’ôtera, pour me confondre, le sentiment de l’iniquité divine, et par ses tout-puissants prestiges, domptant, éblouissant, affolant ma conscience, me fera avouer en grinçant des dents que l’injustice est juste, que l’horreur est clémente, qu’une faiblesse d’un instant exige une éternité de peine infinie ; que le péché originel, la prédestination, le petit nombre des élus, la damnation de Socrate et des enfants non baptisés, sont des miracles de miséricorde, et qu’il est juste et très juste qu’éternellement avec eux je hurle, et qu’éternellement ils râlent avec moi !!!
Ce qui nous paroît vraiment mériter de justes éloges, ce sont les Notes qui accompagnent son Ouvrage intitulé les deux âges du Goût. […] Une critique juste & réfléchie peut seule donner du poids à la louange, & quiconque n’a pas le courage de blâmer quelquefois, s’expose à l’être lui-même comme un fade adulateur.
tu nous as arraché celui qui a tué sa mère : qui dira que cela est juste ? […] Et nous nous glorifions d’être justes. […] C’est avec une juste indignation qu’elles s’écrient : — « Eh quoi ! […] Quel homme restera juste, s’il ne redoute rien ? […] La justice du juste tient à lui, et l’impiété tient à l’impie