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1187. (1854) Histoire de la littérature française. Tome I « Livre I — Chapitre deuxième »

Sa vie même est celle qu’on menait à cette époque ; une vie d’aventures, qui commence par une jeunesse romanesque. […] L’expérience et les années semblaient lui avoir donné, avec la satiété des spectacles qui avaient amusé sa jeunesse et son âge mur, un certain goût de pénétrer dans les causes et de tirer la morale des événements. […] Quant à Charles VIII, quoiqu’il en ait été d’abord maltraité, et qu’il n’ait jamais eu complétement sa faveur, il juge ce jeune prince avec indulgence, et ne lui « sait pas mauvais gré de ses rudesses », dit-il quelque part, « connoissant que c’estoit en sa jeunesse, et qu’il ne venoit pas de lui. » De ces trois princes, celui qui devait le plus l’occuper, c’est Louis XI.

1188. (1889) Histoire de la littérature française. Tome II (16e éd.) « Chapitre cinquième. De l’influence de certaines institutions sur le perfectionnement de l’esprit français et sur la langue. »

Il y loue « la solidité des observations, beaucoup de savoir et d’esprit, sans aucune affectation ni de l’un ni de l’autre ; des termes choisis, mais sans scrupule et sans enflure, et des mots qu’on disait bannis par l’Académie, employés où il était nécessaire, pour protester contre le reproche d’innovation55. » On peut regretter de n’y pas trouver cet étonnement naïf et généreux qui nous saisit encore aujourd’hui à la vue de ces beautés si neuves et si charmantes, de ces vers si vigoureux et si délicats, de toutes ces grâces de la jeunesse dans le génie et dans les personnages qu’il crée. […] Pour Patru, l’esprit de choix, le goût s’étaient révélés chez lui, comme chez Vaugelas, dès la première jeunesse. […] Dans la jeunesse on n’est touché que des pensées extraordinaires et surprenantes, et l’on dispute beaucoup du style, qui est la partie la plus apparente des écrits.

1189. (1883) Souvenirs d’enfance et de jeunesse « Chapitre II. Prière sur l’Acropole. — Saint-Renan. — Mon oncle Pierre. — Le Bonhomme Système et la Petite Noémi (1876) »

L’impérieux devoir qui m’obligea, durant les années de ma jeunesse, à résoudre pour mon compte, non avec le laisser aller du spéculatif, mais avec la fièvre de celui qui lutte pour la vie, les plus hauts problèmes de la philosophie et de la religion, ne me laissait pas un quart d’heure pour regarder en arrière. […] Quand elle s’égarait en ces souvenirs, indissolublement liés à l’éveil de sa première jeunesse, quand elle se rappelait tant d’enthousiasmes, tant de joies folles, qui alternaient avec les scènes de terreur, sa vie semblait renaître tout entière. […] VI Quoique l’éducation religieuse et prématurément sacerdotale qui m’était donnée ait empêché pour moi les liaisons de jeunesse avec des personnes d’un autre sexe, j’avais des petites amies d’enfance dont une surtout m’a laissé un profond souvenir.

1190. (1888) Préfaces et manifestes littéraires « Théâtre » pp. 83-168

Nous ne pouvons croire que ce qui s’appelle la jeunesse française, en 1865, ait les ciseaux de la censure dans son drapeau. […] À l’époque d’Hernani, on livrait le parterre à la jeunesse, et l’on refusait la claque ! […] Ce cousin avait eu une jeunesse un peu noceuse, était joueur… il fut refusé par les parents de la jeune fille.

1191. (1856) Cours familier de littérature. I « Ier entretien » pp. 5-78

Ils étaient tous les trois, dans des mesures diverses et pour des causes différentes, ennemis du despotisme militaire qui avait succédé à l’anarchie de la Révolution, et qui pesait alors sur les esprits plus encore que sur les institutions : mon père, par attachement chevaleresque aux rois de sa jeunesse, pour lesquels il avait versé son sang et joué sa tête ; M. de Vaudran, par amertume d’une situation élevée conquise par ses talents, perdue dans l’écroulement général des choses ; l’abbé Dumont, par ardeur pour la liberté dont il avait déploré les excès dans sa première jeunesse, mais dont il s’indignait maintenant de voir la respiration même étouffée en lui et autour de lui. […] XXXI Cette impression croissante se renouvela et s’accrut, connue on le pense bien, par les hautes études de mon adolescence, par les ennuis d’une longue oisiveté dans ma jeunesse inoccupée, qui ne trouvait son aliment que dans la lecture, par le besoin d’exprimer dans la solitude ces premières passions, qui, après avoir parlé en ardeur et en larmes, s’amortissent en parlant en vers ou en prose ; enfin par ces premières amours de l’imagination ou du cœur qui empruntent tous la voix de la poésie : la poésie !

1192. (1856) Cours familier de littérature. I « Ve entretien. [Le poème et drame de Sacountala] » pp. 321-398

Les arbres les plus élégants, mariant avec grâce leurs flexibles rameaux courbés sous le poids des fruits et des fleurs, se balancent au souffle du zéphyr qui leur dérobe en passant les plus suaves odeurs, et les répand au loin dans les airs ; sur la pelouse émaillée, des troupes de Gandharvas et d’Apsaras (sorte de nymphes dans la mythologie indienne), brillantes de jeunesse, se poursuivent dans leurs jeux folâtres, et glissent d’un lieu à l’autre comme des ombres légères. […] Ses lèvres ont l’incarnat de la rose ; ses bras, comme deux tendres rameaux, s’arrondissent avec souplesse, et la fleur attrayante de la jeunesse répand sur toute sa personne un charme inexprimable. […] Charmantes filles, combien cette douce intimité qui règne entre vous s’accorde admirablement avec votre jeunesse et vos grâces !

1193. (1817) Cours analytique de littérature générale. Tome IV pp. 5-

« C’est un magique talisman, « Cadeau que reçut sa jeunesse. […] Aux circonstances d’une entreprise pareille, Virgile ajoute l’intérêt de la jeunesse d’Euryale et de Nisus, d’un héroïsme naissant qui tente un premier essai d’audace, et du dévouement d’une amitié magnanime. […] Il s’embarque ; il paraît en soldat au milieu des batailles, il signale sa jeunesse par des actes de valeur, et revient solliciter le prix de ses services et de ses blessures dans une cour dont l’ingratitude le rebute, où des persécutions l’attendaient encore. […] jeunesse fugitive ! […] elle devient, en ce vieillard, une qualité nécessaire à dépeindre le penchant de son âge à raconter les faits du passé ; ses redites sont des traits qui nous le font reconnaître au milieu d’une jeunesse empressée et turbulente.

1194. (1895) Le mal d’écrire et le roman contemporain

L’un a la foi pour refuge, l’autre a le style ; le premier espère dans le Dieu de sa jeunesse ; le second s’est désespéré dans le travail. […] Une sorte d’arrêt commence à se manifester dans l’admiration publique ; la jeunesse s’éloigne de Chérie et des Frères Zemganno. […] De là des pages sur la prostitution et la jeunesse française, où réapparaît encore le chantre exalté de Don Juan. […] Faute d’accorder assez d’importance à la jeunesse de Chateaubriand, l’illustre critique n’a vu dans ses infidélités qu’une preuve de libertinage. […] Si le ciel lui eût mis aux bras les fautâmes de sa jeunesse, il se fût plus tôt fatigué de marcher avec des larves.

1195. (1895) La comédie littéraire. Notes et impressions de littérature pp. 3-379

Paul Verlaine fut proclamé solennellement le « poète de la jeunesse française ». […] François Villon ne reçut jamais, que je sache, la visite d’un interviewer, il ne fut point nommé, de son vivant, prince de la jeunesse française. […] Et, aujourd’hui, Maurice Maeterlinck règne sur une bonne partie de la jeunesse française. […] N’oublions pas que le Vœu d’une morte est une œuvre de jeunesse, et qu’elle adroit par cela même à toutes nos indulgences. […] Il conte tout au long son histoire et trace les menus épisodes de sa jeunesse.

1196. (1888) Études sur le XIXe siècle

Malgré sa brève existence et l’extrême jeunesse de ses rédacteurs — les frères Rossetti avaient vingt et vingt et un ans —, elle a cependant sa signification : plusieurs des articles qui y furent insérés posaient très nettement les problèmes d’esthétique que la « Confrérie préraphaélite » essayait de résoudre. […] Garibaldi avait une haute idée de la femme, et dans ses souvenirs de jeunesse, il n’y en a que trois dont il évoque le souvenir. […] épouvante du lâche, — joie du brave, santé du malade, — mystère immense, jeunesse infinie, — beauté formidable et charmante. […] Ses idées de jeunesse n’ont rien d’excessif : il manquait d’imagination, comme il se plaît à le reconnaître : « Chez moi, la folle du logis est une vieille paresseuse que j’ai beau exciter, elle ne se met jamais en mouvement. » Cette qualité négative le poussait aux sciences d’application et aux questions pratiques. […] Les qualités de réalisme émotionnel mais extrêmement minutieux qui donnent le cachet au style nommé préraphaélite se trouvent principalement dans tous les tableaux de Holman Hunt, dans la plupart de ceux de Madox Brown, dans quelques morceaux de Hughes, et dans l’œuvre admirable de la jeunesse de Millais.

1197. (1859) Cours familier de littérature. VIII « XLIVe entretien. Examen critique de l’Histoire de l’Empire, par M. Thiers » pp. 81-176

Thiers, livré aux travaux historiques dès ma jeunesse, certain que je faisais ce que mon siècle était particulièrement propre à faire. […] Mais je suis certain que l’expérience n’a pas glacé en moi les sentiments généreux de ma jeunesse ; je suis certain d’aimer, comme je les aimais, la liberté et la gloire de la France. » La gloire, oui ! […] Comment semble-t-il le présenter à l’histoire comme un rival dangereux au génie de la jeunesse, de la force et du bon sens personnifié dans Bonaparte ? […] Les fortunes se succèdent dans l’histoire du monde comme les êtres dans l’univers ; elles ont leur jeunesse, leur décrépitude et leur mort.

1198. (1864) Cours familier de littérature. XVIII « CVIIIe entretien. Balzac et ses œuvres (3e partie) » pp. 433-527

Un Parisien égaré ne verrait là que des pensions bourgeoises ou des Institutions, de la misère ou de l’ennui, de la vieillesse qui meurt, de la joyeuse jeunesse contrainte à travailler. […] La fiction qui représenterait ces pauvres cœurs opprimés par les êtres placés autour d’eux pour favoriser les développements de leur sensibilité serait la véritable histoire de ma jeunesse. […] Ce contraste entre mon abandon et le bonheur des autres a souillé les roses de mon enfance, et flétri ma verdoyante jeunesse. […] Pour un pauvre être écrasé par les différents despotismes qui, peu ou prou, pèsent sur toutes les jeunesses, le premier usage du libre arbitre, exercé même sur des riens, apportait à l’âme je ne sais quel épanouissement.

1199. (1896) Les Jeunes, études et portraits

Il a passé sa jeunesse dans un pays tout voisin de la France, mais qui tout de même n’est pas la France. […] La littérature classique a été répudiée par ceux-là même qui avaient eu jadis pour mission d’y initier la jeunesse. […] Georges Rodenbach qui aujourd’hui, est l’un des nôtres, a passé toute sa jeunesse dans Bruges, sa ville natale. […] Cette splendeur de jeunesse vraie était sa qualité la plus « précieuse. […] L’Enfant de volupté était une œuvre de jeunesse, d’un charme encore superficiel.

1200. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « M. Denne-Baron. » pp. 380-388

Il dirait volontiers comme le Tasse dans ce sonnet à Mme Lucrèce, duchesse d’Urbin : « Negli anni acerbi tuoi, etc. » En vos années d’âpre verdeur, vous ressembliez à la rose purpurine qui n’ouvre son sein ni aux tièdes rayons ni au Zéphyre, mais qui dans sa robe verte se cache vierge encore et toute honteuse ; Ou plutôt vous paraissez (car aucune chose mortelle ne peut se comparer à vous) comme une céleste Aurore qui emperle les campagnes et dore les monts, brillante dans un ciel serein, et tout humide de rosée : Aujourd’hui la saison moins verte ne vous a rien ôté ; et, fussiez-vous même en négligé, la beauté de première jeunesse, tout ornée d’atours, ne saurait vous vaincre ou vous égaler.

1201. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Poésies d’André Chénier »

Le voilà donc dans toute sa gloire et sa pureté, dressé sur son piédestal de marbre, entouré de toutes les inscriptions et de tous les bas-reliefs qui lui conviennent, ce charmant poëte florissant de jeunesse, ce dernier de nos classiques, tout entier restauré et reconquis.

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