Non sans doute qu’il n’y ait en eux que pure fantasmagorie et jeu verbal. […] En effet, toutes les réformes que Kahn inaugurait dans l’expression n’apparaissent pas comme des jeux frivoles de mandarin, mais elles sont toutes au service d’une nouvelle inspiration poétique. […] Mais sa simplicité est pleine d’agrément, et les jeux combinés de la lumière et de l’eau la varient de mille manières. […] Les joueurs de quilles de Flandre et de Brabant la repêchèrent ; ils en firent la quille médiane de leur jeu. […] Et telle, il aurait pu jouir d’elle, s’il l’avait laissée s’enivrer joyeusement de la Nature, de ses parfums, de ses lumières, de ses chansons, attentive au jeu sans fin des apparences.
On joua le jeu français de tout ou rien.
Du sein de son loisir, il ne prend d’autre soin que de saisir au passage et d’écrire en vers ses pensées riantes ou tendres, à mesure qu’elles traversent son âme ; et la plupart de ses pièces sont des impromptus de volupté, qui, au milieu de ses jeux, lui échappent sans plus d’effort que les roses effeuillées de sa guirlande.
Elle sort de l’ombre honteuse des exercices secrets pour s’élever à la dignité relative d’un jeu de théâtre, d’un divertissement scénique.
Remy de Gourmont Lorsqu’il appela un de ses poèmes Le Pèlerin passionné, il donna de lui-même et de son rôle, et de ses jeux parmi nous, une idée excellente et d’un symbolisme très raisonnable.
Cette nouvelle mettait aussi en jeu les opérations de la volonté, mais elle ne traitait plus de ses affaiblissements et de ses défaites sous l’aspect de la peur ; elle étudiait, au contraire, ses exaltations sous l’impulsion d’une conviction tournée à l’idée fixe ; elle démontrait sa puissance qui parvenait même à saturer l’atmosphère, à imposer sa foi aux choses ambiantes… Mais, dans le tempérament de Villiers, un autre coin, bien autrement perçant, bien autrement net, existait, un coin de plaisanterie noire et de raillerie féroce ; ce n’étaient plus alors les paradoxales mystifications d’Edgard Poe, c’était un bafouage d’un comique lugubre, tel qu’en ragea Swift.
C’est donc là que les lois de la sensibilité et de l’émotion se montrent dans leur libre jeu.
» Ils n’admettent pas que le corps social soit un composé d’organes distincts et spéciaux, tous également naturels et nécessaires, chacun d’eux adapté par sa structure particulière à un emploi défini et restreint, chacun d’eux spontanément produit, formé, entretenu, renouvelé et stimulé par l’initiative, par les affinités réciproques, par le libre jeu de ses cellules.
Il est bien évident que si j’ai étudié avec curiosité et sympathie ces questions, qui présentent des difficultés pratiques, qui mettent en jeu des intérêts immédiats et qui sont, par conséquent, l’objet de polémiques violentes, je n’ai eu d’autre but que de m’élever jusque sur le plan des idées. […] Jeu qui n’a rien de surprenant, car aussitôt que l’esprit raisonne dogmatiquement, il fausse l’intelligence et la détourne de la vie. […] Dans le cas présent, d’ailleurs, les intérêts des marchands d’autographes ne sont pas en jeu un seul instant9. […] Ils craignent d’exhumer des documents relatifs aux amours, à la passion du jeu, à l’existence orageuse de leur arrière-grand-oncle ; ils tremblent devant des révélations possibles, qui compromettraient, prétendent-ils, leur dignité. […] ce ne sera pas sans frais ni ennuis, et le jeu n’en vaudra pas toujours la chandelle.
Peut-être est-ce ce qu’il y a de meilleur et de plus suave dans l’amour, que ces yeux qui se cherchent et se trouvent, et s’isolent et se mêlent, au milieu de tant de monde, seuls au monde, un moment… Et ce jeu est surtout charmant, quand la femme est obligée de vous regarder, sans en avoir l’air, vous jette un sourire sous sa lorgnette, met son manteau et ses fourrures lentement, sur le bord de sa loge, et vous jette un regard, gai, triste et doux. […] Il était là, au milieu des autres qui gaminaient, empêché de s’amuser par le grand cordon de la Légion d’honneur, qu’il portait pour la première fois, à la fois heureux et triste, partagé entre son âge et sa majesté, et réduit à sourire seulement des yeux aux jeux des autres enfants. […] Il nous montre ce type d’inventeur sublime volé, volé, volé par tout le monde, volé par Ericsen de sa découverte de l’hélice, volé par Girardin de sa découverte du physionotrace, et vivant, à la fin de sa vie, d’une misérable pension faite par le ministère de la marine, et toujours la tête dans un tas de découvertes, et soutenant en lui la flamme qui fait trouver avec de l’eau-de-vie, — et se préparant aux travaux de la nuit par le jeu enragé de deux ou trois heures de violon. […] On vit tout entier absorbé, dans l’enchantement, le doux enivrement, la musique du jeu de ses acteurs, et la volupté de cela vous fait passer entre les épaules de petits frissons agréables. […] Une sérénité absolue, la conviction que quand même le public ne trouverait pas notre pièce parfaite, elle est si remarquablement jouée, que le jeu des acteurs doit emporter le succès.
La démocratie, sans le vouloir, par le jeu seul de son mécanisme, crée ici une aristocratie et la conserve. […] Mais ici, d’abord, il n’y avait pas seulement du jeu ; et ensuite le jeu était plus dangereux. Il n’y avait pas seulement du jeu. […] Je dis de plus que le jeu était dangereux. […] On y sent vivre un homme avec ses différentes facultés et ses diverses tendances, toutes en jeu.
Il ne contrariait décidément personne : ni le moyen âge qui l’avait admis, ni la Renaissance, dont il était comme la forme extérieure et l’écorce brillante ; il n’y avait guère que Genève qu’il désobligeât un jeu, justement parce qu’il était un moyen terme. […] Le conte gras et large abondant et facile, spacieux et aisé, qui non seulement coule de Source, mais se déroule et se déploie en jeux puissants, joyeux et alertes où il semble se plaire lui-même, c’est dans l’Homère bouffon qu’il faut le chercher. […] Il n’y a rien qui soit plus que l’ambition application aux choses fortuites ; car l’ambition est un jeu. […] Il y en a un qui est de gaîté, il y en a un qui est d’indulgence, il y en a un qui est de sensibilité doucement émue, il y en a un qui est d’imagination brillante qui se plaît à ses découvertes et à ses jeux ; et Calvin parce qu’il manque de charité, de sensibilité et d’imagination, n’en a aucun. […] Chez tel peuple la différence, comme langue et comme style, de la prose au vers, est très grande, chez tel autre elle est légère, et ce n’est qu’à l’user et par tâtonnements qu’on apprend ce que permet de jeu en cela et de liberté et de hardiesse le naturel de chaque langue, c’est-à-dire de chaque esprit public.
Les lecteurs habitués au promenoir et aux jeux de la critique ne seront peut-être pas fâchés de voir ajouter, dans leur bibliothèque, une aile à ce Fontainebleau composite du dix-neuvième siècle. […] Dominique est un roman autobiographique, mais avec plus d’air, plus de jeu que Volupté, et, à plus forte raison, que les deux gauches essais de Renan et de Taine. […] Dans ce cas une femme s’acquitte ou croit s’acquitter par un redoublement d’amitié, et Dominique est l’histoire de ce jeu dangereux. […] Un peu plus de Paris intermittent eût convenu à Amiel, lui eût donné du jeu, de la souplesse. […] Après une promenade avec des amis, des jeux avec des enfants, il expose candidement en quoi il a « profité ».
On raconte qu’un jour de grande fête, au sortir du dîner, le prélat étant à jouer avec des dames, après que le jeu eut duré assez longtemps, quelqu’un fit remarquer que c’en était assez pour un jour de grande fête, et qu’il fallait donner quelque chose à l’édification.
Shakespeare, au fond, a procédé de même ; à la peinture extérieure des émotions il mêle des mots, des traits, des couplets qui nous font pénétrer au-delà du trouble grossier et confus des sens, qui organisent ce désordre, nous le débrouillent et nous font comprendre le jeu régulier de ces ressorts que le hasard seul semblait d’abord mettre en branle.