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802. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — F — Franc-Nohain (1873-1934) »

Elle prête une âme aux choses, et sa verve jette un reflet de vie sur les pauvres objets, accessoires familiers de tous les ridicules humains, de nos faiblesses et de nos infirmités.

803. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre quatrième. Du Merveilleux, ou de la Poésie dans ses rapports avec les êtres surnaturels. — Chapitre X. Machines poétiques. — Vénus dans les bois de Carthage, Raphaël au berceau d’Éden. »

Ce char enveloppé de vapeurs, ce voyage invisible d’un enchanteur et d’un héros au travers du camp des chrétiens, cette porte secrète d’Hérode, ces souvenirs des temps antiques jetés au milieu d’une narration rapide, ce guerrier qui assiste à un conseil sans être vu, et qui se montre seulement pour déterminer Solyme aux combats, tout ce merveilleux, quoique du genre magique, est d’une excellence singulière.

804. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Troisième partie. Beaux-arts et littérature. — Livre troisième. Histoire. — Chapitre premier. Du Christianisme dans la manière d’écrire l’histoire. »

Quiconque voulait être raisonnable sentait en lui je ne sais quelle impuissance du bien ; quiconque étendait une main pacifique, voyait cette main subitement séchée : le drapeau rouge flotte aux remparts des cités ; la guerre est déclarée aux nations : alors s’accomplissent les paroles du prophète : Les os des rois de Juda, les os des prêtres, les os des habitants de Jérusalem, seront jetés hors de leur sépulcre 169.

805. (1809) Tableau de la littérature française au dix-huitième siècle

Sa haine de la religion le jette fréquemment dans la mauvaise foi et le mauvais goût. […] On se jeta dans la science des sensations, espérant qu’elle serait plus à la portée de l’intelligence humaine. […] Le genre qu’il cultiva tendait à le jeter dans ces défauts. […] La terre où il avait été jeté était pour tous un lieu consacré. […] Dès lors, les souvenirs de sa mort jetaient dans toutes les âmes une impression religieuse.

806. (1894) La vie et les livres. Première série pp. -348

On lui rit au nez, et on lui jeta tant de pavés et de pièces de fonte (tout le lest du ponton) qu’elle quitta la partie. […] Puis, tout le monde se jeta à l’eau. […] Si la plume n’est pas une arme pour détruire les mensonges et soutenir les justes causes, autant vaut la casser et en jeter les débris au vent. […] Là-dessus, il se jeta sur ses cartes et les dévora des yeux. […] Il eût voulu (ce sont ses propres expressions) jeter la sonde dans ce terreau fumant, pullulant de germes.

807. (1878) Nos gens de lettres : leur caractère et leurs œuvres pp. -316

Primadant. — Cette intrigue où se jette mon fils m’inquiète pour lui et m’effraye. […] » Touché de ce renoncement généreux, Clindor se jette dans ses bras, — il ne la trompera point. […] Une minute : le bizarre nous guette, et, de la grand-route, il va nous jeter brusquement dans un chemin de traverse qui nous mènera Dieu sait où ! […] Il ne nous mène point à l’émotion, il nous y jette. […] à l’exaspération, comme ce pauvre Émile Capulet, qui a fini par jeter une chaise à la tête de son directeur ?

808. (1906) Propos de théâtre. Troisième série

Ou bien, il faut jeter l’amour sur un des seconds personnages, comme j’ai fait. […] Jocaste se jette entre les deux frères et détourne l’épée fratricide. […] M. de Voltaire travaille en marqueterie ; moi, je jette en bronze ! » La vérité est que Piron ne jetait pas en bronze tant que cela. […] », jeté si joliment par Mariette à M. de La Musardière, en savez-vous l’origine ?

809. (1882) Essais de critique et d’histoire (4e éd.)

Un autre lui jette une pierre, puis un second, puis une foule d’autres avec de grands cris. […] Et Cyrus, poussant un peu en avant de l’année, jetait ses regards des deux côtés, considérant ses ennemis et ses amis. […] Artapatès, le plus fidèle de ses officiers, sauta, dit-on, de son cheval lorsqu’il le vit renversé, et se jeta sur lui en l’embrassant. […] On jette le livre de dépit, et on le reprend avec enthousiasme. […] Sire, un tel, petit compagnon, courtise ma fille, faites-le jeter à la Bastille.

810. (1887) Études littéraires : dix-neuvième siècle

Puis, la loi du sujet le poète nous jette en pleine horreur, mais avec une exagération fantastique qui révèle l’impuissance, et des traces de négligence qui marquent le dégoût, et l’ouvrage devient proprement exécrable. […] Vigny est trop sincère pour se jeter, comme les demi-désespérés qui ne sont que des dégoûtés ou des rêveurs, dans le sein de la nature ainsi qu’en un refuge. […] Jersey rit, terre libre au sein des sombres mers… L’écume jette aux rocs ses blanches mousselines. […] VeuiIlot jette un cri d’admiration et d’émotion à cette première partie du poème. […] Hugo (souvent) ne sent pas assez, ne se jette pas lui-même dans la mêlée de ses strophes, semble les lancer de loin à la charge, et, à l’examiner d’un peu près, il arrive que son mouvement lyrique ressemble à un mouvement oratoire.

811. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — S — Schwob, Marcel (1867-1905) »

Et Bûchette et Jeanie, qui regarde en dedans, et Ilsée, Ilsée qui est l’apparition la plus essentielle que je sache ; et Marjolaine qui, la nuit, jette des grains de sable contre les sept cruches multicolores et pleines de rêves, et Cice, la petite sœur de Cendrillon, Cice et son chat qui attendent le prince ; et Lily, puis Monelle qui revient… Je ne puis tout citer de ces pages, les plus parfaites qui soient dans nos littératures, les plus simples et les plus religieusement profondes qu’il m’ait été donné de lire, et qui, par je ne sais quel sortilège admirable, semblent flotter sans cesse entre, deux éternités indécises… Je ne puis tout citer ; mais, cependant, la Fuite de Monelle, cette Fuite de Monelle qui est un chef-d’œuvre d’une incomparable douceur, et sa patience et son royaume et sa résurrection, lorsque ce livre se renferme sur d’autres paroles de l’enfant, qui entourent d’âme toute l’œuvre, comme les vieilles villes étaient entourées d’eau… [Mercure de France (août 1894).]

812. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Seconde partie — Section 17, de l’étenduë des climats plus propres aux arts et aux sciences que les autres. Des changemens qui surviennent dans ces climats » pp. 290-294

Les sels et les sucs spiritueux de ces denrées jettent dans le sang des nations septentrionales une ame, ou, pour parler avec les physiciens une huile étherée, laquelle ne se trouve point dans les alimens de leur patrie.

813. (1862) Cours familier de littérature. XIV « LXXXIVe entretien. Considérations sur un chef-d’œuvre, ou Le danger du génie. Les Misérables, par Victor Hugo (2e partie) » pp. 365-432

La poésie, c’est la vie des choses, on ne sait si son pinceau est pinceau ou torche, tant il jette d’ombre et de lumière sur tous les contours de ce qu’il voit ou de ce qu’il veut faire voir. […] Ce fut le conventionnel qui le rompit (car évidemment l’évêque, confondu, ne savait plus que dire) ; il se souleva sur un coude, présenta son pouce et son index replié un peu vers sa joue, comme on fait machinalement lorsqu’on interroge et qu’on juge (c’était donc maintenant le conventionnel qui, arrogamment, interrogeait et jugeait l’évêque ; le pénitent intervertissait les rôles, et jetait à ses pieds le confesseur au nom de ses doctrines glorifiées) ; il interpella l’évêque avec un regard plein de toutes les énergies de l’agonie. […] » (Remarquez que l’évêque, par charité, ne lui disait rien, ne lui demandait rien, et qu’il s’était contenté de jeter à voix basse un mot d’incrédule pitié, en réponse aux brutalités du terroriste malade.) […] Il s’est dit : « Je vais me jeter avec mon talent au milieu de tout cela, je vais me donner le vertige et le donnerai à cette foule sans savoir comment je la nourrirai ! 

814. (1868) Cours familier de littérature. XXVI « CLIVe entretien. Madame de Staël. Suite »

Dans le cercle étroit qu’elle parcourt, son activité lui semble vaine, et sa science du délire ; un désir invincible la presse de s’élancer vers des régions élevées dans des sphères plus libres ; elle croit qu’au terme de sa carrière un rideau va se lever pour lui découvrir des scènes de lumière : mais quand la mort touche son corps périssable, elle jette un regard en arrière vers les plaisirs terrestres et vers ses compagnes mortelles. […] MARGUERITE se jette à genoux. […] FAUST, se jette à ses pieds. […] Le sort en est jeté, j’écris ce livre : qu’il soit lu par mes contemporains ou par la postérité, n’importe ; il peut bien attendre un lecteur pendant un siècle, puisque Dieu lui-même a manqué, durant six mille années, d’un contemplateur tel que moi. » Cette expression hardie d’un orgueilleux enthousiasme prouve la force intérieure du génie.

815. (1869) Cours familier de littérature. XXVII « CLVIIe Entretien. Marie Stuart, (Reine d’Écosse). (Suite et fin.) »

« Elle parut, dit la Chronique d’Édimbourg, à sa fenêtre qui donne sur Hightgat, s’adressant au peuple d’une voix forte et disant comment elle avait été jetée en prison par ses propres sujets qui l’avaient trahie ; elle se présenta plusieurs fois à la même fenêtre, dans un misérable état, ses cheveux épars sur ses épaules et sur son sein ; le corps nu et découvert presque jusqu’à la ceinture. « Par cette main royale », dit-elle à lord Ruthven et à Lindsay, qui avaient aidé au meurtre jamais pardonné de son premier favori, Rizzio, « j’aurai vos têtes, tôt ou tard !  […] Ils se jetèrent à ses pieds, l’entraînèrent dans leurs montagnes, levèrent leurs vassaux catholiques, lui formèrent une armée, révoquèrent son abdication, combattirent sous ses yeux pour sa cause, à Longside, contre les troupes de Murray, et furent vaincus une seconde fois. […] Tous alors éclatèrent en sanglots, et se jetèrent à genoux autour de la table. […] » Pawlet l’aidant à monter les degrés de l’échafaud, elle jeta sur lui un regard plein de douceur : « Sir Amyas, dit-elle, je vous remercie de votre courtoisie ; c’est la dernière peine que je vous donnerai et le plus agréable service que vous puissiez me rendre. » Parvenue à l’échafaud, Marie Stuart prit place dans le fauteuil qui lui avait été préparé, le visage tourné vers les spectateurs.

816. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — H — Hugo, Victor (1802-1885) »

Ces belles exagérations héroïques et castillanes, cette superbe emphase espagnole, ce langage si fier et si hautain dans sa familiarité, ces images d’une étrangeté éblouissante, nous jetaient comme en extase et nous enivraient de leur poésie capiteuse. […] Carmen Sylva Ce ne sont que les sommets altiers, couverts de neige, qui jettent des flammes au soleil couchant. […] Henri de Bornier Victor Hugo a écrit cette phrase dont on pourrait faire l’épigraphe de son théâtre : « Dieu frappe l’homme y l’homme jette un cri : ce cri, c’est le drame. […] « Je les ai sus par cœur, je les ai jetés jadis aux échos des coins de Provence où j’ai grandi.

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