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606. (1888) La critique scientifique « La critique scientifique — Analyse esthétique »

Enfin on peut imaginer une troisième sorte de moyen expressif : le symbole, le leit-motif, le langage symbolique, la peinture de Chenavardct et de Kaulbachcu, où l’artiste s’exprime en vertu d’une convention particulière entre lui et l’auditeur. […] Il facilitera ainsi, à un point qu’on ne peut encore imaginer, l’analyse des œuvres d’art plastiques et musicales, en permettant de doser, pour ainsi dire, ce qu’elles contiennent d’éléments de peine et de plaisir physique pour les sens de l’être vivant normal.

607. (1886) Quelques écrivains français. Flaubert, Zola, Hugo, Goncourt, Huysmans, etc. « Émile Zola » pp. 70-104

Zola, comme tous les écrivains peu aptes à imaginer le mécanisme intérieur de la machine humaine, et comme aucun des romanciers psychologues, montre les actes de ses personnages de préférence à leurs raisonnements, les effets plutôt que les causes. […] On peut imaginer un esprit enregistreur, éminemment apte à percevoir par les sens, à retenir et à se figurer les mille manifestations de la vie décrivant les objets, les physionomies et les caractères de la façon dont ils apparaissent par le détaillement de leurs parties et l’énumération %94de leurs actes ; parvenant, grâce à une accumulation de notes internes, à avoir d’une nation à une certaine époque une connaissance aussi complète que celle dont nous avons marqué les limites.

608. (1913) Essai sur la littérature merveilleuse des noirs ; suivi de Contes indigènes de l’Ouest-Africain français « Essai sur la littérature merveilleuse des noirs. — Chapitre I. »

Il y a lieu de distinguer cette catégorie de celle dont on parlera immédiatement après, en ce que le conteur n’imagine que pour le plaisir d’imaginer tandis que l’autre catégorie trahit des intentions d’enseignement moral.

609. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « Rivarol » pp. 245-272

Je m’imagine que s’il revenait au monde, lui, le superbe de son esprit, il regarderait comme une impertinence envers sa mémoire cette manière d’agir, littéraire ou commerciale, avec ses œuvres, — si on peut appeler de ce nom d’œuvres les improvisations d’un homme qui, en produisant, a si peu travaillé ! […] Oui, c’était là le vrai et le grand Rivarol, aussi pour moi le Rivarol impossible à retrouver, comme la beauté d’une femme morte, le Rivarol imaginé, puisque je ne l’ai pas entendu, et qui enivre toujours ma pensée comme si je l’avais entendu, et même peut-être davantage !

610. (1765) Articles de l’Encyclopédie pp. 11-15754

Il, c’est-à-dire, l’être métaphysique, l’être imaginé ou d’imitation, a dans le point dont il s’agit des hommes qui, &c. […] Un vaisseau se trouve arrêté en pleine mer par quelque banc de sable inconnu aux Matelots, ils imaginent que c’est un petit poisson qui les arrête. […] Philosophes se sont imaginé qu’elles naissoient avec nous : ce qui veut dire qu’en venant au monde nous savons ce que c’est que l’infini, le beau, le parfait, &c. […] Le desir & le besoin d’accomplir ce dessein, firent enfin imaginer ces signes particuliers qu’on appelle lettres, dont chacune fut destinée à marquer chacun des sons simples qui forment les mots. […] Coerera de genere hoc adfingere, imaginer des phantômes de cette sorte, id. ibid. v. 165.

611. (1874) Premiers lundis. Tome I « Deux révolutions — I. De la France en 1789 et de la France en 1830 »

Ce qui nous fâche et nous étonne, c’est que des jeunes hommes qui semblaient pleins d’âme et d’avenir, d’une intelligence étendue et exercée, plus propre sans doute à spéculer qu’à agir, s’étant imaginé de tout temps qu’ils auraient, dans une révolution, à jouer le rôle de Girondins, se figurent probablement que l’heure est venue, et, par une étrange illusion, s’arrêtent, non pas devant des échafauds à dresser (nous n’en sommes pas là encore, et on abolira peut-être la peine de mort en attendant), mais devant les conséquences à tirer de leurs idées politiques.

612. (1892) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Cinquième série « Contre une légende »

Croire que l’homme est capable de vérité, croire que le monde a un sens, le chercher, croire qu’on a le devoir de conformer sa vie à ce qu’on a pu deviner des fins de l’univers, etc…, ce n’est pas la foi du charbonnier, du derviche, ni du nègre fétichiste ; mais j’imagine pourtant que c’est une foi.

613. (1920) La mêlée symboliste. II. 1890-1900 « L’état de la société parisienne à l’époque du symbolisme » pp. 117-124

Félix Faure joue au souverain, restaure, à son profit, le cérémonial des cours, fait marquer à son chiffre les serrures de l’Élysée et passe le temps qu’il dérobe aux réjouissances, à imaginer un costume d’apparat aux vives chamarrures dont il puisse se prévaloir aux yeux des foules éblouies.

614. (1890) L’avenir de la science « VII »

Les premières études que l’on consacre à apprendre le bagage matériel d’une langue seraient sans cela insupportables, et, grâce à ce goût, elles deviennent des plus attrayantes qui se puissent imaginer.

615. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre XII. Ambassade de Jean prisonnier vers Jésus  Mort de Jean  Rapports de son école avec celle de Jésus. »

On s’imagine facilement la haine que la petite-fille d’Hérode le Grand dut concevoir contre ce conseiller importun.

616. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XVIII » pp. 198-205

Le 1er juin 1663, jour où La Critique de l’École des femmes fut jouée à Paris, n’était pas loin du 14 octobre, jour de la grande fête projetée pour Versailles, et où devait être joué L’Impromptu de Versailles, pièce où les marquis sont l’objet du plus sanglant outrage et du plus direct qu’on puisse imaginer.

617. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome I « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Montmaur, avec tout le Parnasse Latin & François. » pp. 172-183

On imagina de le prendre par son foible, de le mortifier par l’endroit qui lui seroit le plus sensible ; c’est-à-dire, de l’empêcher de parler.

618. (1761) Salon de 1761 « Récapitulation » pp. 165-170

Il y a du goût et du bon goût à avoir imaginé cet épisode.

619. (1767) Salon de 1767 « Peintures — Lépicié » pp. 275-278

Imaginez ce Christ, ces apôtres, ces pères, ces mères, ces grand’mères, ces petites filles, ces petits garçons peints par un Raphaël.

620. (1913) Essai sur la littérature merveilleuse des noirs ; suivi de Contes indigènes de l’Ouest-Africain français « Essai sur la littérature merveilleuse des noirs. — Chapitre IV. Personnages des fables. »

Le noir qui a conçu les guinné comme semblables aux hommes, au point de vue du caractère, imagine de même les animaux organisés en société semblable à la sienne mais il n’a pas pour but, en adoptant cette conception, de railler, sous un voile d’allégorie, la constitution du groupement social dont il fait partie.

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