En novembre 1806, Pelleport, sur la présentation du maréchal Soult, est nommé chef de bataillon dans le même régiment : « J’avais dix ans d’exercice dans l’emploi pénible d’adjudant-major ; néanmoins, cette promotion fut une grâce et non un droit, car on comptait dans le régiment dix capitaines plus anciens de grade que moi. » À la veille d’Eylau, il lui arrive un événement fort extraordinaire dont on pensera ce qu’on voudra, et qui serait de nature à justifier l’apparition du fantôme à Brutus, à la veille de Philippes : L’on va rire de moi, n’importe… La veille de la bataille d’Eylau, je dormais profondément, lorsque je fus réveillé par un bruit léger : une femme belle et richement habillée était devant moi : « Tu seras blessé, me dit-elle, et grièvement. […] Grâce aux soins du capitaine Berchet, payeur du 18e, grâce à l’honnêteté de mes braves camarades, les 120000 francs furent remis en caisse après la campagne.
Dans ce petit volume de 1830, si on le prend à part, en soi et non noyé, comme plus tard, au milieu des Poésies complètes, on surprend l’adolescence du talent qui se dessine dans toute sa grâce. […] C’est la perfection dans la grâce. — Quand je me remets à feuilleter et à parcourir en tous sens, comme je viens de le faire, ce recueil de vers de Gautier, qui mériterait à lui seul une étude à part, je m’étonne encore une fois qu’un tel poète n’ait pas encore reçu de tous, à ce titre, son entière louange et son renom.
Un jour vint et une heure, un moment social, non calculé, non prévu, général, universel, où il se trouva, — sans que personne pût dire ni à quelle minute précise, ni par quelle transformation cela s’était fait, — où, dis-je, il se trouva qu’une langue nouvelle était née au sein même de la confusion, que cette langue toute jeune, qui n’était plus l’ancienne langue dégradée et dénaturée, offrait une forme actuelle et viable, animée d’un souffle à elle, ayant ses instincts, ses inclinations, ses flexions et ses grâces : le français des XIe et XIIe siècles, cette production naïve, simple et encore rude et bien gauche, ingénieuse pourtant, qui allait bientôt se diversifier et s’épanouir dans des poèmes sans nombre, dans de vastes chansons chevaleresques, dans des contes joyeux, des récits et des commencements d’histoires, venait d’apparaître et d’éclore aux lèvres de tout un peuple. […] Voici ce petit tableau et ce colloque, plein de mouvement, de coquetterie et de grâce : « Les dames mirent beaucoup de temps à faire leur toilette.
Cette grâce si grande et si distinguée dont elle vient de m’honorer, donne une exemple qui doit élever les sentiments et le courage de tout ce qui a l’honneur de la servir. […] Les grâces du roi avaient alors un tel pouvoir de grandir, que le frère de Catinat, Croisilles, si tendrement lié avec lui dès l’enfance, n’osait plus le traiter par lettres sur le même pied qu’auparavant, et qu’il changea de ton aussitôt.
Une douce humeur y domine, moins marquée que dans Sterne, que plusieurs chapitres rappellent toutefois32 ; mais j’y verrais plutôt en général la grâce souriante et sensible de Charles Lamb. […] Mais il suffira de donner ici sa jolie pièce du Papillon, qui, pour la grâce et l’émotion, ne dépare pas. le souvenir de ses autres écrits.
La grâce recouvrait celles-ci ; la corruption mignonne de l’espèce y était corrigée par des teintes de sentiment, et y devenait tout avenante : Les vices délicats se nommaient des plaisirs. […] Eugène Sue, dont il n’a la grâce ni la fantaisie.
Il fit, dans le Lycée, quatre articles sur Chénier139 ; le premier est un petit chef-d’œuvre de grâce, de critique émue et ornée. […] La plus remarquable de ces pièces est (tome II, page 51) l’élégie imitée de l’allemand de Grillpanzer, l’Enfant heureux, dont l’idée refleurie avec grâce a fait depuis le plus frais bouton d’or de la couronne poétique de Reboul.
Si le rituel de la théogonie grecque est resté inséparable de toutes les formes de la galanterie ; s’il constituait, il y a peu de temps encore, ce qu’on appelle poésie et littérature ; si Vénus, Cupidon et les Grâces ont été fêtés dans nos chansons, qu’on juge de leur empire sur ceux dont, la veille encore, ils étaient le culte et la foi. […] La révolution opérée dans les mœurs ne se fait encore sentir que par d’imperceptibles nuances ; toutefois elle apparaît évidente dans une autre partie du tableau : Gnathon l’esclave est en plein polythéisme ; Astyle, le jeune patron, s’amuse et se divertit encore aux gaietés païennes ; les amours naïves et sensuelles des deux bergers flottent entre les deux croyances ; mais Cléariste et Dionysophane, le vieux patricien et l’antique matrone, ont déjà la dignité, le calme, la grâce sévère de la famille chrétienne.
« Voltaire l’avait, les anciens ne l’avaient pas. » Le style de son temps, du xviiie siècle, ne lui paraît pas l’unique dans la vraie beauté française : « Aujourd’hui le style a plus de fermeté, mais il a moins de grâce ; on s’exprime plus nettement et moins agréablement ; on articule trop distinctement, pour ainsi dire. » Il se souvient du xvie , du xviie siècle et de la Grèce ; il ajoute avec un sentiment attique des idiotismes : « Il y a, dans la langue française, de petits mots dont presque personne ne sait rien faire. » Ce Gil Blas, que Fontanes lui citait, n’était son fait qu’à demi : « On peut dire des romans de Le Sage, qu’ils ont l’air d’avoir été écrits dans un café, par un joueur de dominos, en sortant de la comédie. » Il disait de La Harpe : « La facilité et l’abondance avec lesquelles La Harpe parle le langage de la critique lui donnent l’air habile, mais il l’est peu. » Il disait d’Anacharsis : « Anacharsis donne l’idée d’un beau livre et ne l’est pas. » Maintenant on voit, ce me semble, apparaître, se dresser dans sa hauteur et son peu d’alignement cette rare et originale nature. […] A tel romancier qui réussit une fois sur cent, je dirai avec lui : « Il ne faut pas seulement qu’un ouvrage soit bon, mais qu’il soit fait par un bon auteur. » A tel critique hérissé et coupe-jarret, à tel autre aisément fatrassier et sans grâce : « Des belles-lettres.
Mais de plus, il y a en ces deux hommes, dans la libre intimité de leur commerce, dans la naturelle effusion de leurs natures, à travers leurs dialogués, il y a comme un rayon de cette grâce aimable et puissante, qui illumina parfois le christianisme au moyen âge, avant les schismes et les révoltes ; ce roi et ce baron sont de la communion de saint François d’Assise. […] Il est de la même famille, il a le sens de la vie, et il rend d’un trait léger et juste, avec une grâce inoubliable.
Et, après tout, cette histoire du dur dressage d’un enfant à son métier de prince et de général est fort intéressante en elle-même, et M. le duc d’Aumale nous la raconte avec beaucoup de vivacité et de charme et dans un style qui a en même temps de la tenue et de la grâce. […] Mais la princesse, blessée par ces prescriptions, peut-être aussi trouvant que son fils « ne faisait pas d’assez bonne grâce son compliment aux dames », lui dit « qu’il n’était pas nécessaire de venir souvent ».
L’autre (les Maximes ), qui est la production d’un esprit instruit par le commerce du monde, et dont la délicatesse était égale à la pénétration, observant que l’amour-propre est dans l’homme la cause de tous ses faibles, l’attaque sans relâche, quelque part où il se trouve ; et cette unique pensée, comme multipliée en mille autres, a toujours, par le choix des mots et la variété de l’expression, la grâce de la nouveauté. » La Bruyère se caractérise ensuite lui-même : « L’on ne suit aucune de ces routes dans l’ouvrage qui est joint à la traduction des Caractères (de Théophraste) ; il est tout différent des deux autres que je viens de toucher : moins sublime que le premier et moins délicat que le second, il ne tend qu’à rendre l’homme raisonnable, mais par des voies simples et communes. » Aucun auteur n’a mieux défini la nature ni marqué plus nettement le but de ses écrits. […] Selon lui, ni Bossuet, dont La Bruyère n’a pas les élans ni les traits sublimes ; ni Fénelon, dont il n’a pas le nombre, l’abondance et l’harmonie ; ni Voltaire, dont il n’a pas la grâce brillante et l’abandon ; ni Rousseau, dont il n’a pas l’émotion, n’ont au même degré la variété, la finesse, l’originalité des formes et des tours, qui étonnent dans La Bruyère.
Il la taquina si bien, cette oreille, ce nom d’un artiste suprême, de qui j’ai dit, d’ailleurs, qu’il considérait la clarté comme une grâce secondaire, qu’une assez plaisante confusion commença de régner. […] » — « Grâce à Μ.
Remercions madame Gros d’avoir fait revivre dans notre âge, devenu étranger aux grands secrets de l’âme, les merveilles de conversion qui semblaient réservées aux temps où la grâce vivante se promenait sur la terre avec ses trésors d’indulgence et de pardon. […] Nous possédons un excellent crayon de cette physionomie modeste, franche, ouverte, chagrine, mais résignée, en une petite biographie, chef-d’œuvre de simplicité et de vertueuse bonne grâce, écrite par M. le curé de Château-l’Évêque.
A partir du xvie siècle, grâce surtout à la découverte de l’imprimerie, massacres et bûchers ne suffisent plus à étouffer la rébellion. […] Il peut sauver qui il lui plaît ; il peut avoir damné dès l’éternité des pécheurs encore à naître ; c’est le mystère de la grâce et de la prédestination sur lequel le xviie siècle a entassé tant de volumes.